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1
AL-KHWARIZMI, IBN TURK ET L’ALGEBRE :
RETOUR SUR UNE CONTROVERSE DE PRIORITE
Driss Lamrabet
(Rabat, Maroc)
Mots-clés: Histoire des mathématiques - al-Khwārizmī- – Ibn Turk - Abū Kāmil – Abū
Barza – Equations algébriques – Asie centrale.
INTRODUCTION
Nous rappelons ici brièvement l’origine de cette controverse et rapportons quelques brins
de renseignements concernant Ibn Turk (et son petit-fils Abû Barza), brins rassemblés à
partir de diverses sources autres que les deux seules (à savoir al-Fihrist d’Ibn al-Nadīm Xe
siècle et Ikhbār al-Ulama’ d’al-Qifṭī, XIIIe siècle) citées par les historiens des sciences qui
se sont intéressé à Ibn Turk. Nous avons en effet trouvé mention de ce savant chez un
historien qui a l’connu personnellement et qui rapporte des évènements d’après lui : il
s’agit d’al-Baladhūrī al-Balâdhurî (m. 279H/892). Son petit-fils, quant à lui, est cité encore
plus fréquemment par nombre d’historiens comme on va le voir.
A la lumière de ces éléments qui nous semblent nouveaux, nous essaierons quelque peu de
réhabiliter Abū Barza, de lui rendre justice en le blanchissant des diffamations portés contre
lui par Abū Kamil, cet illustre mathématicien dont la grande réputation a certainement
donné à ses jugements le statut de vérité et a peut-être contribué à éclipser les apports
mathématiques d’Ibn Turk au profit de ceux d’al-Khwārizmī’.
Nous avons volontairement multiplié les témoignages en faveur d’Abû Bazra, ce qui
permettra de mieux situer sa place dans la communauté des savants et ainsi de mieux juger
ce qu’il peut réclamer, et enfin de fournir des indications sur la période durant laquelle
vécut Ibn Turk et ses préoccupations intellectuelles. Ces renseignements pourront, sinon
confirmer, du moins corroborer certaines hypothèses relatives à ce mathématicien et à son
œuvre.
2
I PRECISIONS BIOGRAPHIQUES
La controverse de priorité en question est signalée par le célèbre mathématicien égyptien
Abū Kāmil Shujā‘ bin Aslam (vers 340H/951) dans l’introduction de son livre d’algèbre 1
ainsi que dans un autre de ses ouvrages (encore perdu) comme le rapporte Hajjî Khalifa
dans Kash azh-zhunûn2
([24]) . Ce dernier relate que selon Abû Kâmil, Abû Barza (m.
298H/910)3
aurait prétendu que la création de l’algèbre n’est pas l’oeuvre d’al-Khwârizmî,
mais de son aïeul, un contemporain d’al-Khwrizmî qui s’appelle Abû-l-Fadl ‘Abd-ul-
Hamîd ben Wâsi’ Ibn Turk al-Khuttalî4
. Abû Kâmil prit position en faveur d’al-Khwârizmî
et dénigra les propos d’Abû Barza. En dehors d’Abû Kâmil, la question n’est soulevée par
aucune source usuelle, si l’on excepte le ralliement d’Ibn Khaldûn à l’opinion d’Abû
Kâmil.
La source la plus ancienne qui fournit quelques renseignements sur Ibn Turk est Al-Fihrist
d’Ibn an-Nâdîm (Xe siècle). Ceux-ci sont ensuite repris par al-Qiftî (XIIIe siècle), Hajji
Khalifa (XVIIe siècle), et Ismâ’il Bâchâ al-Baghdâdî (XXe siècle). Ils concernent
uniquement les contributions mathématiques et ne mentionnent aucun autre champ
d’activité ni aucune date. Des investigations nous ont permis de glaner des brins
d’informations supplémentaires. Nous avons en effet trouvé une référence directe à Ibn
Turk faite par un de ses contemporains qui semble avoir été un de ses auditeurs5
. Il s’agit
de l’historien Al-Balâdhurî qui, à en croire les sources, aurait adressé, dans sa jeunesse, un
panégyrique au calife al-Mâmûn en 218H/833, et aurait vécu jusque vers 279H/892.
Malgré la lourdeur qui peut en résulter, nous reproduisons en bas de page quelques- uns
des rares passages qui citent Ibn Turk ou son petit-fils Abou Barza.
Ibn Turk semble s’être intéressé à l’histoire, car il est cité par al-Balâdhurî dans trois
chaînes de transmission6
. Selon cet historien, Ibn Turk avait été un auditeur de Yahyâ b.
Adam (m. 203H/818). Une biobibliographie tardive (Hadiyyat al-‘ârifîn d’Ismâ’îl
Bâchâ [16]) fournit 240H/854 comme date de décès d’Ibn Turk, et ce en signalant que sa
source est al-Fihrist , alors que les éditions connues d’al-Fihrist ne donnent aucune date.
Une telle date semble néanmoins acceptable si l’on tient compte des renseignements
fournis par al-Balâdhurî. Elle est proche de celle proposée comme approximative
(235H/848) par Sayli ([5]). Ainsi, Ibn Turk et al-Khwârizmî ont vécu à la même époque et
étaient intellectuellement mûrs sous le règne d’al-Mâmûn. Al-Khwârizmî faisait partie des
savants proches des califes et fut un membre influent de Bayt al-Hikma (Maison de la
Sagesse), facteurs qui ont probablement joué en faveur de la diffusion de son algèbre au
détriment de celle d’Ibn Turk, puisque l’on ne sait rien sur le milieu culturel et scientifique
dans lequel évoluait ce dernier, si ce n’est qu’il vécut (tout comme al-Khwârizmî et Abû
Barza) à Bagdad.
Ibn an-Nâdîm nous apprend dans al-Fihrist qu’Ibn Turk s’appelle Abû-l-Fadl (ou Abû
Muhammad) ‘Abd-ul-Hamîd ben Wâsi’ Ibn Turk al-Khuttalî le spécialiste du calcul (al-
hâsib) et cite parmi ses livres : le Livre exhaustif en calcul, qui comprend six livres
(chapitres), le Livre des transactions.([15]) 7
.
3
1
Dans cette introduction, Abû Kâmil loue longuement al-Khwârizmî et exhorte les mathématiciens à le
reconnaître comme étant le créateur de l’algèbre et celui grâce à qui cette discipline devint claire et
accessible.
2
“ ‫وتمامه‬ ‫الجبر‬ ‫بكمال‬ ( : ‫معروفا‬ ‫كتابا‬ ‫ألفت‬ : ) ‫والمقابلة‬ ‫بالجبر‬ ‫الوصايا‬ ( ‫كتاب‬ ‫في‬ ‫أسلم‬ ‫بن‬ ‫شجاع‬ ‫كامل‬ ‫أبو‬ ‫قال‬
‫والرد‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫لمحمد‬ ‫والمقابلة‬ ‫الجبر‬ ‫في‬ ‫والسبق‬ ‫بالتقدمة‬ ‫الثاني‬ ‫كتابي‬ ‫في‬ ‫الحجة‬ ‫وأقمت‬ ) ‫أصوله‬ ‫في‬ ‫والزيادة‬
‫[الم‬ ‫المحترق‬ ‫على‬‫تقصيره‬ ‫بينت‬ ‫وما‬ ‫جده‬ ‫أنه‬ ‫ذكر‬ ‫الذي‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫إلى‬ ‫ينسب‬ ‫مما‬ ‫برزة‬ ‫بأبي‬ ‫المعروف‬ ]‫تخرق‬
‫خليف‬ ‫(حجي‬ "‫جده‬ ‫إلى‬ ‫نسب‬ ‫فيما‬ ‫معرفته‬ ‫وقلة‬[ "‫الظنون‬ ‫"كشف‬ :‫ة‬24‫ج‬ ، ]2‫ص‬1408.)
"Abū Kāmil Shujā b. Aslam dit dans Kitāb al-wasāyā bi al-jabr wa al-muqābalah : J’ai composé un livre
intitulé: Kamāl al-Jabr wa tamāmuh wa al-ziyāda fī usūlih, et j’ai fourni la preuve, dans mon deuxième
livre, de la priorité et la primauté de Muḥammad bin Musā's en algèbre et la réponse à l’insane [al-
mutakharriq] appelé Abū Barza concernant ce qu’il attribue à ‘Abd-ul-Ḥamīd, dont il dit qu’il est son grand-
père; j’ai mis en évidence ses lacunes et son manque de connaissance à propos de ce qu’il attribue à son
grand-père ».
(Hajjī Khalifa in Kash azh-zhunūn [24], vol 2, p. 1407).
Remarque : on propose selon les éditions ‫المحترف‬ (le professionnel), ‫المحترق‬ (qui brûle, qui prend feu) ou
‫المتخرق‬. Les deux premiers termes sont visiblement sans lien avec le contexte.
3
Date rapportée par ibn Kathîr, adh-Dhahbî et d’autres. Ibn al-Jawzî fournit 292H/905 dans al-
Muntazham.
4
Al-Qiftî donne al-Gîlî , cependant que dans toutes les éditions des sources plus anciennes que sont les
ouvrages d’al-Balâdhurî (m. 279H/892) et d’Ibn an-Nâdîm (Xe siècle), on trouve al-Khuttalî (de Khuttal,
région de l’ancienne province du Khorâsân riveraine du fleuve Amou Daria) La préférence pour al-Gîlî
effectuée dans [5 ] est à ce point de vue discutable.
5
Il a également été un auditeur d’Al-Khwârizmî (qu’il appelle Muhammad. b. Mûsâ al-Khwârizmî al-
Hâsib), puisqu’il rapporte des renseignements qu’il dit avoir entendu de ce savant (deux fois dans Ansâb
al-ashrâf, [17], tome 4, pp. 274 et 349).
6
Dont les suivantes:
-"‫مسير‬ ‫ذكروا‬ :‫قال‬ ‫مجاهد‬ ‫عن‬ ،‫رجل‬ ‫عن‬ ،‫سفيان‬ ‫عن‬ ،‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحيى‬ ‫حدثني‬ ،‫الحاسب‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫حدثني‬
‫م‬ ‫وال‬ ،‫البارع‬ ‫فضلها‬ ‫بمذهب‬ ‫ذلك‬ ‫ليس‬ :‫فقال‬ ،‫البصرة‬ ‫إلى‬ ‫عائشة‬‫فإنها‬ ‫هذا‬ ‫ومع‬ ،‫اإلحسان‬ ‫من‬ ‫وتأخر‬ ‫لها‬ ‫تقدم‬ ‫ما‬ ‫بطل‬
( ."ّ‫حب‬ ‫من‬ ‫مع‬ ‫وكل‬ ‫له؛‬ ً‫ا‬َّ‫ب‬‫ح‬ ‫ّهن‬‫د‬‫أش‬ ‫وكانت‬ ،‫إليه‬ ‫وسلم‬ ‫عليه‬ ‫هللا‬ ‫صلى‬ ‫النبي‬ ‫نساء‬ ّ‫أحب‬‫البالذري‬‫أنساب‬ ‫من‬ ‫مل‬ُ‫ج‬":
[ "‫األشراف‬17‫ج‬ ، )‫أ‬ ]2‫ص‬48)
" ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ le mathématicien m’a dit : Yaḥya bin Ādam m’a dit, d’après Sufiān, d’après un
homme, d’après Mujāhid: Ils ont discuté du voyage d’ ‘Aisha's à Baṣṣorah puis il ajouta: cela n’enlèvera rien
de son excellent mérite et n’infirmera en rien ses bienveillances passées et futures. De plus, elle était la plus
affectionnée des femmes du Propheèe (sws) et celle d’entre elles qui l’affectionnait le plus ; et chacun penche
vers celui qu’il aime.. " Al-Balaẓūrī: Jumal min Ansāb al-ashrāf [17] ‫,)أ‬ vol 2 p 48)
‫ونفعها‬ ‫ودواؤها‬ ‫النفوس‬ ‫شفاء‬ ‫به‬ ‫كالكالم‬ ‫رأيت‬ ‫ما‬ :‫قال‬ ‫الثوري‬ ‫أن‬ ‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحيى‬ ‫عن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫"وحدثني‬
:‫قرأ‬ ‫ثم‬ ،‫وضررها‬﴿‫يخشى‬ ‫أو‬ ‫يتذكر‬ ‫لعله‬ ً‫ا‬‫ّن‬‫ي‬‫ل‬ ً‫ال‬‫قو‬ ‫له‬ ‫فقوال‬﴾‫اآلية‬ ،‫طه‬ ‫[سورة‬44]‫ج‬ ، ‫السابق‬ ‫(المصدر‬ "11‫ص‬321)
" ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ m’a dit d’après Yaḥya bin Ādam qu’al-Thawrī avait dit: je n’ai vu rien de tel
que la parole : elle permet la guérison des âmes et leur médication, leur bienfait et leur nuisance. Puis il
récita [(Coran, Taha, verset 44)] :(Puis, parlez-lui gentiment. Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra-
t-il ? ) (Ibid., vol.11, p. 321)
-‫حدثنى‬ :‫قال‬ ‫الحاسب‬ ‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫"حدثنى‬‫جامع‬ ‫مسجد‬ ‫أول‬ :‫قال‬ ‫صالح‬ ‫بن‬ ‫الحسن‬ ‫عن‬ ،‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحي‬
".‫اليمان‬ ‫ابن‬ ‫حذيفة‬ ‫يدي‬ ‫على‬ ‫ذلك‬ ‫وجرى‬ ،‫بناؤه‬ ‫وأحكم‬ ‫بعد‬ ‫وسع‬ ‫ثم‬ ،‫وأصحابه‬ ‫سعد‬ ‫بناه‬ ،‫المدائن‬ ‫مسجد‬ ‫بالسواد‬ ‫بنى‬
[ ‫(البالذري‬17،)‫ب‬ ، ]،"‫البلدان‬ ‫"فتوح‬‫الجزء‬2‫ص‬407)
4
-" ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ al-Khuttalī le mathématicien m’a dit: Yaḥya bin Ādam m’a dit que Ḥassan bin
Ṣaliḥ avait dit: La première grande mosquée bâtie à al-Sawād fut la mosquée d’al-Madā'in, bâtie par Sa‘ad
et ses compagnons; elle fut par la suite élargie et sa construction perfectionné grâce à Ḥudhayfa ibn al-
Yamān". (Al-Balaẓūrī:. [17] )‫ب‬ ،, )‫ب‬ ،Futūḥ al-buldān, vol 2, p. 407).
7
-‫الختلى‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫الفضل‬ ‫أبو‬ ‫وهو‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ "،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫محمد‬ ‫ابا‬ ‫يكنى‬ ‫وقيل‬ .‫الحاسب‬
[ ،‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫العالمات‬ ‫كتاب‬ .‫كتب‬ ‫ستة‬ ‫على‬ ‫ويحتوى‬ ،‫الحساب‬ ‫في‬ ‫الجامع‬ ‫كتاب‬15‫ص‬ ]391)
- " ‘Abd-ul-Ḥamīd: il s’appelle Abū al-Faḍl ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘ b. Turk al-Khuttlī al-Ḥasib; selon
certains son surnom est Abū Muḥammad. Il a parmi ses livres:Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb, en six chapitres,
Kitāb al-mu‘āmalāt. " (Ibn al-Nadīm, [15], p. 391)
-‫بابن‬ ‫ويعرف‬ ‫أهلها‬ َ‫ْن‬‫ي‬َ‫ب‬ ‫مذكور‬ ‫ا‬َ‫ه‬‫ِي‬‫ف‬ ‫مقدم‬ ‫الحساب‬ ‫بصناعة‬ ‫عالم‬ ‫حاسب‬ ‫رجل‬ ‫ا‬َ‫ذ‬َ‫ه‬ ‫الفضل‬ ‫أبو‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫"عبد‬
‫يحتوي‬ ‫الحساب‬ ‫ِي‬‫ف‬ ‫الجامع‬ ‫كتاب‬ :‫منها‬ ‫مستعملة‬ ‫مشهورة‬ ‫تصانيف‬ ‫الحساب‬ ‫ِي‬‫ف‬ ُ‫ه‬َ‫ل‬ .ً‫ا‬‫أيض‬ ‫محمد‬ ‫أبا‬ ‫ويكنى‬ ‫الجيلي‬ ‫ترك‬
.‫األعداد‬ ‫وخواص‬ ‫الحساب‬ ‫نوادر‬ ‫كتاب‬ .‫كتب‬ ‫ستة‬ ‫ى‬َ‫ل‬َ‫ع‬‫(القفطي‬ "،[14‫ص‬ ]155.)
" ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘, Abū al-Faḍl: Cet homme est un mathématicien, érudit dans l’art de
l’arithmétique, s’y distingue et jouit d’une renommée dans la communauté des professionnels de cet art; il
est connu sous le nom d’Ibn Turk al-Jīlī et a également Abū Muḥammad comme surnom. Il est l’auteur de
livres célèbres et diffusés en mathématiques, dont: Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb comprenant six chapitres et
Kitāb nawādir al-ḥisāb wa khawāṣ al-a‘dād.
(al-Qifṭī, [14] p. 155)
-‫سنة‬ ‫توفي‬ ‫الحاسب‬ ‫البغدادي‬ ‫الختلي‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ :‫"الختلي‬240‫أ‬‫الجامع‬ ‫كتاب‬ ‫صنف‬ ‫ومائتين‬ ‫ربعين‬
[ ،‫باشا‬ ‫(إسماعيل‬ " )‫الفهرست‬ ‫(من‬ ,‫المعامالت‬ ‫كتاب‬ .‫الحساب‬ ‫في‬16‫ج‬ ،]1‫ص‬506)
-"al-Khuttalī: ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘ b. Turk al-Khuttlī al-Baghdādī al-ḥāsib; il mourut en 240 H. Il ecrivit:
Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb, en six chapîtres, Kitāb al-mu‘āmalāt (d’après al-Fihrist) (Ismā‘īl Bāshā, [16] ،
vol. 1 p. 506).
5
Concernant Abû Barza, Ibn an-Nadîm l’appelle Abû Barza Al-Fadl ben Muhammad ben
‘Abd al-Hamîd ben Turk ben Wâsi’ al-Khuttalî, et cite parmi ses livres : le Livre des
transaction, le Livre de l’arpentage8
As for Abû Barza, Ibn an-Nadîm calls him Abû Barza Al-Fadl ben Muhammad ben ‘Abd
al-Hamîd ben Turk ben Wâsi’ al-Khuttalî, and mentions among his books :Transactions
Book and Surveing Book9
.
Al-Qiftî ([14]) fournit plus de précision sur Ibn Turk, qu’il présente comme un éminent
spécialiste du calcul (hâsib) réputé parmi les gens de cet art, et qui a composé des livres de
calcul célèbres que les gens utilisent, dont : le Livre exhaustif en calcul formé de six livres
(chapitres), le Livre des choses rares en calcul et des propriétés des nombres. Il signale
qu’il est connu sous le nom d’Ibn Turk al-Jîlî. La liste des œuvres citées diffère cependant
de celle d’Ibn an-Nadîm, puisqu’elle ne reprend pas le Livre des transactions, et comporte
le Livre des choses rares (ibid.).
A propos d’Abû Barza, Al-Qiftî signale que ce savant s’appelle Al-Fadl ben Muhammad
ben ‘Abd al-Hamîd ben Wâsi’, Abû Barza Al-Jîlî (au lieu d’al-Khuttalî, et sans ajouter Ibn
Turk), précise que c’est un érudit bien distingué en calcul et que les gens affluent vers lui
pour cette discipline dans laquelle il composa des livres intéressants dont : le Livre des
transactions et le Livre d’arpentage (ibid.).
Abû Barza est donc bien le petit-fils d’Ibn Turk, et ce fait n’est plus simplement
hypothétique comme le rapporte Abû Kâmil.
Il est en outre cité dans plusieurs chaînes de transmission de hadith. Dans ces chaînes de
transmission, il est appelé : Abū Barza Al-Fadl bin Muhammad al-Ḥāsib 10
Il a dû mourir assez âgé, puisque parmi ses professeurs figurent deux narrateurs bien
connus du Hadith : Ahmad ben ‘Abd Allâh ben Younes at-Tamîmî al-Kûfî, mort en
227H/842 et Abû ‘Abd Allâh Muhammad ben Simâ’a qui mourut en 233H/847. Il devait
ainsi avoir environs 15 ans en 227H/842 comme étudiant et serait donc né vers
212H/827 (il décéda en 298H/910); la date de naissance de son aïeul Ibn Turk pourrait se
situer aux alentours de 170H/786, et le grand-père pourrait avoir vu son petit-fils adulte.
En plus d’être des spécialistes avérés du calcul, seul aspect mentionné par Ibn an-Nadîm
et al-Qiftî,, ce qui précède montre qu’Abû Barza et son ancêtre étaient également des
narrateurs (ruwât ‫)رواة‬ fiables du Hadith, particulièrement le premier. Loin de l’image
dénigrante que voulait donner de lui Abû Kâmil, Abû Barza jouit d’une excellente
réputation et d’un grand respect tant de la part d’historiens célèbres, dont al-Khatîb al-
Baghdâdî (m. 463H/1072), As-Sam’ânî (m.562H/1167), Ibn al-Jawzî (m.597H/1201), et
Adh-Dhahbî (m.748H/1347) que de celle des spécialistes du Hadith tels qu’al-Bayhaqî
(m.458H/1066) ; tous le considèrent unanimement comme un personnage fiable et fort
respectable11
. En outre, les deux savants sont cités partout comme des érudits compétents
en science du calcul et comme des autorités en la matière. Tous deux sont qualifiés de al-
Hâsib (le spécialiste du calcul /mathématicien), qualificatif qui n’était décerné qu’à celui
qui s’est bien distingué en mathématiques.
A la lumière de ces renseignements sur Abû Barza, il faudrait donc prendre plus au sérieux
ses revendications de priorité pour lesquelles Abû Kâmil l’attaqua et le dénigra et lui rendre
justice ainsi qu’à son aïeul Ibn Turk.
6
8
-‫المعامالت،كتاب‬ ‫كتاب‬ ،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫"أبو‬
[ ‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫المساحة‬15‫ص‬ ]391)
- " Abū Barza al-Faḍl bin Muḥammad bin ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Turk bin Wāsi‘ al-Khuttalī. Il a comme livres:
Kitāb al-mu‘āmalāt, kitāb al-misāḥa" (Ibn al-Nadīm, [15] p. 391)
-‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬،‫ألجلها‬ ‫مقصود‬ ‫فيها‬ ‫مقدم‬ ‫الحساب‬ ‫بصناعة‬ ‫عالم‬ :،‫الجيلي‬ ‫برزة‬ ‫،أبو‬
( "‫المساحة‬ ‫كتاب‬ ،‫المعامالت‬ ‫كتاب‬ :‫منها‬ ،‫مفيدة‬ ‫كتبا‬ ‫ذلك‬ ‫في‬ ‫مصنف‬[، ‫القفطي‬14]‫ص‬ ،168).
- " al-Faḍl bin Muḥammad bin ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wāsi, Abū Barza al-Jīlī: un érudit dans l’art du calcul
dans lequel il fut excellent, à propos duquel il était sollicité et au sujet duquel il composa des livres utiles
dont: Kitāb al-mu‘āmalāt, kitāb al-misāḥa ". (al-Qifṭī, [14] p. 168).
9
-‫المعامالت،كتاب‬ ‫كتاب‬ ،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫"أبو‬
[ ‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫المساحة‬15‫ص‬ ]391).
10
Voir par exemple :
Abū Na’īm al-Ispahānī (m.430H/1038 ) : Ḥulyat al-‘awliyā’ wa ṭabaqāt al-‘aṣfiyā’,
asl-sa’āda, Le Caire, 1974, 7 : 255
Al-Bayhaqī (m.458H/1066) : Shu’ab al-īmān, maktabat al-rashād, Mumbay, Inde, 2003.
2 : 17 - 6 : 45 - 13 : 100
Al_Khaṭīb al-Baghdādī (m. 463H/1072): al-kifāya fī ‘ilm al-riwāya, al-maktaba al-
‘ilmiya, Medine, p. 347
Ismā’īl al-Ṭalīḥī al-Iṣbahānī (m.537H/1142 ): al-targhīb wa al-tarhīb, Dar al-ḥadīth,
Le Caire, 1993, 3 : 24.
Ibn Ḥajar al-Asqalānī (m.852H/1448): Taghlīq al-Ta’līq ‘alā Ṣaḥiḥ al-Bukhārī, al-
Maktab al-Islāmī, Ammān, 1405H, 2 : 55
7
11
-‫الكوفيين‬ ‫الحماني‬ ‫ويحيى‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫وثابت‬ ‫يونس‬ ‫بن‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ :‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬
‫ونوح‬ ‫األلهاني‬ ‫سليمان‬ ‫بن‬ ‫ومالك‬ ‫الرملي‬ ‫سماعه‬ ‫بن‬ ‫ومحمد‬‫محمد‬ ‫وأبو‬ ‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ‫القومسي‬ ‫حبيب‬ ‫بن‬
.‫السقطي‬ ‫يوسف‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫العباس‬ ‫وأبو‬ ‫ماسي‬ ‫بن‬‫الحاسب‬ ‫برزه‬ ‫أبي‬ ‫عن‬ ‫البرقاني‬ ‫بكر‬ ‫أبا‬ ‫سألت‬ ...‫ثقة‬ ‫وكان‬
[، ‫البغدادي‬ ‫(الخطيب‬ "..‫جليل‬ ‫وهو‬ ‫لعمرى‬ ‫أي‬ :‫فقال‬ ‫ثقة؟‬ ‫أكان‬ :‫قلت‬20‫ج‬ )‫أ‬ ،]14‫ص‬346-‫رقم‬ ‫الترجمة‬6770
).
-" al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: Il relatait d’après Aḥmad bin ‘Abd Allāh bin Yūnus, Thābit
bin Mūsā et Yaḥyā al-Ḥimmānī tous de Kūfa, Muḥammad bin Samā‘a al-Ramlī, Mālik bin Sulaymān al-
Alhānī et Nūḥ bin Ḥabīb al-Qawmasī; relataient d’après him: ‘Abd al-Bāqī bin Qāni‘, Abū Muḥammad bin
Māsī et Abū al-‘Abbās Aḥmad bin Muḥammad bin Yūsuf al-Saqaṭī. Il était probe … J’ai demandé à Abū
Bakr al-Barqānī à propos d’Abū Barza al-ḥāsib: Etait-il probe? Il me répondit: Assurément! Sur ma vie! Il
était vénérable aussi." (al-Khaṭīb al-Baghdādī, [20] ‫)أ‬ vol. 14, P. 346- Biographie N°. 6770).
-" ‫الحماني‬ ‫بن‬ ‫ويحيى‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫وثابت‬ ‫يونس‬ ‫بن‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ ،‫الحاسب‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬
‫ثقة‬ ‫وكان‬ ،‫السقطي‬ ‫يوسف‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫العباس‬ ‫وأبو‬ ‫ماسي‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫وأبو‬ ‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ،‫وغيرهم‬
‫ثما‬ ‫سنة‬ ‫صفر‬ ‫من‬ ‫بقين‬ ‫الربع‬ ‫ومات‬ ،‫صدوقا‬ ‫القدر‬ ‫جليل‬".‫ومائتين‬ ‫وتسعين‬ ‫ني‬ [ ،‫(السمعاني‬22‫ج‬ ، ]2‫ص‬154) .
-" Abū Barza al-Faḍl bin Muḥammad al-ḥāsib: Il relatait d’après Aḥmad bin ‘Abd Allāh bin Yūnus, Thābit
bin Mūsā, Yaḥyā al-Ḥimmānī et d’autres. Relataient d’après lui: ‘Abd al-Bāqī bin Nāfi‘, Abū Muḥammad
bin Māsī et Abū al-‘Abbās Aḥmad bin Muḥammad bin Yūsuf al-Saqaṭī. Il était probe, hautementdistingué
et honnête.
(Al-Sam‘ānī, [22], vol 2, p. 154).
-‫جليل‬ ‫ثقة‬ ‫وكان‬ ،‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ‫الحماني‬ ‫يحيى‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ .‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ ،‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ "
[( ."‫القدر‬13‫ج‬ ‫الجوزي‬ ‫ابن‬ ،]13‫ص‬43.)
"- al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: Il rapportait d’après Yaḥyā al-Ḥimmānī ; ‘Abd al-Bāqī bin
Nāfi‘ rapportait d’après lui. Il était probe et hautement distingué.
( [13] Ibn al-Jawzī, vol. 13, p. 43).
-‫ومحمد‬ ،‫الحماني‬ ‫ويحيى‬ ،‫اليربوعي‬ ‫يونس‬ ‫ابن‬ :‫عن‬ ‫روى‬ .‫بغداد‬ ‫حيسوب‬ ‫كان‬ .‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ .‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬
‫قا‬ ‫ابن‬ :‫وعنه‬ .‫سماعة‬ ‫بن‬‫وثقه‬ .‫وتسعين‬ ‫ثمان‬ ‫سنة‬ ‫صفر‬ ‫في‬ ‫توفي‬ .‫ماسي‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫وأبو‬ ،‫السقطي‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫وأحمد‬ ،‫نع‬
[ ‫(الذهبي‬ ."‫الخطيب‬21]‫،ج‬22‫ص‬226) .
"- al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: C’était le mathématicien de Bagdād. Il relatait d’après: Ibn
Yūnus al-Yarbū‘ī, Yaḥyā al-Ḥimmānī et Muḥammad bin Samā‘a; relatainent d’après lui : Ibn Qāni‘, Aḥmad
bin Muḥammad al-Saqaṭī et Abū Muḥammad bin Māsī. Il mourut en Ṣafar de l’an [2]98. Al-Khaṭīb a
démontré sa probité".
(Al-Dhahabī, [21], vol. 22, p. 226).
8
II UNE SOURCE COMMUNE POUR AL-KHWARIZMI ET IBN TURK ?
Un fragment du livre d’algèbre d’Ibn Turk a été retrouvée et éditée par Sayli à Istambul en
1962, et traduit en anglais en 2007 ([5], i)). Bien que court, ce fragment contient
suffisamment d’éléments pour permettre une comparaison12
.
Les deux oeuvres d’algèbres, celle d’al-Khwârizmî et celle d’Ibn Turk présentent des
similitudes et des différences, et toutes les deux ne sont pas sans susciter des questions.
Parmi les similitudes mentionnons:
1) Sur le plan terminologique: usage des mêmes termes : shay’, mâl, jidhr,…
2) Sur le plan méthodologique : existence d’une justification géométrique des algorithmes
dans l’un et l’autre ouvrage, la similitude allant jusqu’à l’usage de modèles géométriques
quasiment identiques pour le cinquième cas 2
x q px+ = (pour x<p/2).
Sur le plan des différences, les auteurs13
s’accordent pour affirmer que le travail d’Ibn Tutk
est mathématiquement plus élaboré que celui d’al-Khwârizmî ; le premier a en particulier
considéré deux modèles pour ce cinquième cas (l’un pour x<p/2 et l’autre pour x>p/2) ,
alors que le second s’est limité à un seul. Cette supériorité, sans autre preuve, a poussé
certains auteurs (voir par exemple [4]) à considérer Ibn Turk comme un simple
continuateur de l’algèbre d’al-Khwarizmī.
Les ressemblances entre les œuvres des deux savants pourraient-elles provenir de
l’existence d’une tradition algébrique en Asie centrale, d’où tous deux sont originaires ?
Hoyrup [3] distingue une tradition sous-scientifique (sub-scientific, représentée par les
calculs liés aux transactions commerciales et à la géométrie pratique comme l’arpentage)
et une autre scientifique véhiculée notamment par les ouvrages de mathématiques et
d’astronomie traduits du grec et du sanskrit. Selon lui, l’apparition de l’algèbre serait liée
à la première tradition. Hoyrup effectue dans ses articles l’analyse des œuvres d’algèbre
d’autres auteurs, en particulier du Liber mensurationum, traduction latine d’un ouvrage
d’arpentage écrit par un certain Abū Bakr qui semble utiliser une algèbre « archaïque »
pouvant être rattachée à une tradition babylonienne ou séleucide. Hoyrup n’hésite pas,
après une étude comparative précise, à conjecturer qu’Abū Bakr, al-Khwārizmī et Ibn Turk
ont tous dû puiser leur algèbre dans une même tradition répandue à leur époque parmi des
utilisateurs d’al-jabr (ahl al-jabr ou asḥāb al-jabr : « al-jabr-people » ou « followers of
al-jabr » selon la terminologie de Hoyrup).
Parmi les questions soulevées par l’existence éventuelle d’une telle tradition en Asie
centrale, on peut se poser les suivantes : Dans quelle langue était-elle exprimée ?
L’existence d’une terminologie arabe commune chez les deux mathématiciens signifie-t-
elle qu’un travail préalable d’arabisation avait déjà été accompli ? Abû Kâmil, qui dit avoir
appris l’algèbre grâce au livre d’al-Khwârizmî, ignorait-il l’existence d’une telle tradition?
12
Pour une étude comparative plus détaillée de l’algèbre de ces deux mathématiciens, voir [2], [2b] et[5]..
13
Dont Youschkevitch, ([10], p. 44), Djebbar ([1], p. 45), Katz et al. [2b], p.144, Hoyrup [3].
9
Ayant par la suite lu l’algèbre d’Ibn Turk et constaté des ressemblances, aurait-il crié au
plagiat ?
Hoyrup discute l’attitude d’Abū Kāmil qui semble avoir fait (volontairement ?) table rase
des pratiques autres que celles initiées par al-Khwārizmī :
“In Abu Kamil’s Algebra, the idea of a special group of al-jabr-people seems to have
disappeared. Instead, the subject, is now understood as the discipline of Al-Khwarizmi’s
Kitab fi al-jabr wa’l-muqabala” (Hoyrup, ii) , p. 263).
Et de conclure:
“So, we are led to the conclusion that both authors supplemented their treatise on the methods of the
“al-jabr-people” with material borrowed from another sub-scientific tradition. They did so, however,
from a conception of mathematics foreign to both sub-scientific traditions (as far as it can be judged
from the indirect evidence at hand), namely from the idea that mathematics should be supplied with
proofs. This, and not only the use of letters to identify geometric entities and the way to explain the
construction of a geometric figure, was in the scientific mathematical tradition initiated by the Greeks.
The fundamental feat of the two authors was to bring the two levels of mathematical activity together
for mutual fructification. (ibid., p. 266)
Note : Ibn an-Nâdîm cite un autre mathématicien et astronome, Sanad b. ‘Ali ,un juif
converti à l’Islam par le calife al-Mâmun (et donc contemporain d’al-Khwârizmî et d’Ibn
Turk) et dont al-Fihrist rapporte qu’il composa un livre d’algèbre (Kitâb al-jabr wa-l-
muqâbalah), encore perdu14
.
BIBLIOGRAPHIE
[1] -Djebbar; A.: L’algèbre arabe. Genèse d’un art. Vuibert-Adapt, Paris, 2005.
[2] -Hoyrup, J. :
i) “The Formation of Islamic Mathematics”: Sources and Conditions. Preprints og Reprints
1987 Nr 1. (Disponible en ligne)
ii) “Algebraic Traditions behind Ibn Turk and al-Khwārizmī'. In Acts of the International
Symposium on Ibn Turk, Khwarezmī, Farabī, Beyronī and Ibn Sīna
(Ankara 9-12 september 1985). Disponible en ligne
[2b] -Katz, Victor J. & Karen Hunger Parshall: Taming the Unknown. A History of
Algebra from Antiquity to the Earliest Twentieth Century. Princeton University Press,
2014.
[3] -Lamrabet, D. :
i) An introduction to the History of Maghrebian Mathematics (2020):
Publié par Amazon
14
Certains auteurs (Suter et à sa suite A. A Saidan) contestent l’attribution de ce livre à Sanad en affirmant
qu’il s’agit en fait du livre d’algèbre d’al-Khwârizmî. Leur argument est qu’Ibn an-Nadîm présente ce
dernier sans parler de son algèbre, et ce juste avant de présenter Sanad b. ‘Ali.
10
https://www.amazon.fr/Introduction-History-Maghrebian-Mathematics/dp/B084DG7LN3
French française: Introduction à l’histoire des mathématiques maghrébines.
https://www.amazon.fr/INTRODUCTION-LHISTOIRE-MATHEMATIQUES-
MAGHREBINES-Lamrabet/dp/B084DGPNNY
ii) Divers aspects du progrès en mathématiques. Publications de la Faculté des Lettres et
des Sciences Humaines, Rabat ; Série : Colloques et Séminaires. N° 112, 2003.
[4] -Rashed, R.: i) Entre arithmétique et algèbre; Les Belles Lettres, Paris, 1984.
ii) Al-Khwārizmī, Le commencement de l’algèbre; Paris, Librairie Scientifique et Technique Albert
Blanchard ( Sciences dans l’histoire), 2007.
[5] -Sayli, A .:
i) Logical Necessities in Mixed Equations by Abd al-Hamîd Ibn Turk and the Algebra of
his Time. Foundation for Science, Technology and Civilisation. Editor: Prof. Mohamed El
Gomati. Production: Amar Nazir. Jan. 2007.
ii) Al-Khwarizmi, Abdu’l-Hamid Ibn Turk and the Place of Central Asia in the History of
Science and Cuture. Foundation for Science, Technology and Civilisation. Editor: Prof.
Mohamed El Gomati. Production: Amar Nazir. December 2006.
Disponibles aux adresses :
http://www.muslimheritage.com/uploads/Place_of_Central_Asia_in_History_of_Science
_and_Culture.pdf (consultée en juin 2008).
[6] -Youchkevitch,A.P.: Les mathématiques arabes (VIII-XVe Siècles). Trad. par M.
Caznave et K. Jaouiche. Vrin, Paris, 1976.
[12]-‫أصبيعة‬ ‫أيب‬ ‫ابن‬:‫األطباء‬ ‫طبقات‬ ‫يف‬ ‫األنباء‬ ‫عيون‬،‫بريوت‬ ،‫رضا‬ ‫ار‬‫ز‬‫ن‬ .1965.
[13]-‫اجلوزي‬ ‫ابن‬:‫يخ‬‫ر‬‫ات‬ ‫يف‬ ‫املنتظم‬‫األمم‬‫و‬ ‫امللوك‬(18‫سنة‬ ‫املتوىف‬ ‫اجلوزي‬ ‫بن‬ ‫حممد‬ ‫بن‬ ‫علي‬ ‫بن‬ ‫الرمحن‬ ‫عبد‬ ‫ج‬‫الفر‬ ‫أليب‬ ،) ‫جزءا‬597. ‫ه‬
‫اجلزء‬13.‫بريوت‬ ،‫العلمية‬ ‫الكتب‬ ‫دار‬ .‫عطا‬ ‫القادر‬ ‫عبد‬ ‫ومصطفى‬ ‫عطا‬ ‫القادر‬ ‫عبد‬ ‫حممد‬ ‫حتقيق‬ .1412‫ه‬/1992
[14]-(‫ابن‬)‫القفطي‬:‫أب‬ ‫العلماء‬ ‫إخبار‬‫خ‬‫احلكماء‬ ‫بار‬‫مكتبة‬ ..)‫يخ‬‫ر‬‫ات‬ ‫(بدون‬ ‫القاهرة‬ .‫املتنيب‬
[15]-‫الندمي‬ ‫ابن‬:‫الفهرست‬،‫بريوت‬ ،‫املعرفة‬ ‫دار‬ ،1978
[16]-‫البغدادي‬ ‫ابشا‬ ‫إمساعيل‬:‫فني‬‫ر‬‫العا‬ ‫هدية‬‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫اث‬‫رت‬‫ال‬ ‫إحياء‬ ‫دار‬ .1955
[17]-‫البالذري‬)‫ا‬ :‫جابر‬ ‫بن‬ ‫حيىي‬ ‫بن‬ ‫أمحد‬ ،‫اف‬‫ر‬‫األش‬ ‫أنساب‬ ‫من‬ ‫مجل‬ ‫كتاب‬(13‫اء‬‫ز‬‫األج‬ ،)‫جزءا‬2‫و‬4‫و‬11.‫كار‬‫ز‬ ‫سهيل‬ ‫الدكتور‬ ‫حتقيق‬
‫بريوت‬ ،‫الفكر‬ ‫دار‬ ،‫كلي‬‫زر‬ ‫ايض‬‫ر‬ ‫الدكتور‬‫و‬1996)‫ب‬‫البلدان‬ ‫فتوح‬.‫الثاين‬ ‫القسم‬‫مؤسسة‬ .‫الطباع‬ ‫أنيس‬ ‫وعمر‬ ‫الطباع‬ ‫أنيس‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫.حتقيق‬
،‫بريوت‬ ،‫املعارف‬1987.
[18]-‫البيهقي‬:‫اإلميان‬ ‫شعب‬)‫الشاملة‬ ‫املكتبة‬ ‫(يف‬
[19]-‫اخلوارومي‬: ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫حممد‬ ،‫املقابلة‬‫و‬ ‫اجلرب‬ ‫كتاب‬‫الكاتب‬ ‫دار‬ .‫أمحد‬ ‫مرسي‬ ‫حممد‬ ‫الدكتور‬‫و‬ ‫مشرفة‬ ‫مصطفى‬ ‫علي‬ ‫الدكتور‬ ‫وتعليق‬ ‫تقدمي‬ .
،‫مصر‬ ‫ع‬‫فر‬ ،‫النشر‬‫و‬ ‫للطباعة‬ ‫العريب‬19
11
[20]-‫البغدادي‬ ‫اخلطيب‬)‫أ‬ :‫بغداد‬ ‫يخ‬‫ر‬‫ات‬(17‫اجلزء‬ ،)‫جزءا‬14‫بريوت‬ ،‫اإلسالمي‬ ‫الغرب‬ ‫دار‬ .‫اد‬‫و‬‫ع‬ ‫معروف‬ ‫بشار‬ ‫الدكتور‬ ‫حتقيق‬ .
2001.
[21]-‫الذهيب‬:‫اإلسالم‬ ‫يخ‬‫ر‬‫ات‬(52‫اجلزء‬ .)‫جزءا‬22‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫الكتاب‬ ‫دار‬ .‫تدمري‬ ‫السالم‬ ‫عبد‬ ‫عمر‬ ‫حتقيق‬ .1991.
[22]-‫السمعان‬:‫األنساب‬(5‫البارودي‬ ‫عمر‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫حتقيق‬ .)‫اء‬‫ز‬‫أج‬.‫بريوت‬ ،‫اجلنان‬ ‫دار‬ ،‫الثقافية‬ ‫األحباث‬‫و‬ ‫اخلدمات‬ ‫كز‬‫مر‬ .‫الثاين‬ ‫اجلزء‬
1408‫ه‬/1988.
[23]-‫املكتب‬‫ة‬‫الشاملة‬:‫املوقع‬ ‫من‬ ‫ل‬َّ‫م‬َ‫حت‬http//Islamport.com‫سنة‬ ‫خالل‬ ‫ات‬‫ر‬‫اي‬‫ز‬ ‫(بضع‬2008)
[24]-‫خليفة‬ ،‫حاجي‬:‫الفنون‬‫و‬ ‫الكتب‬ ‫أسامي‬ ‫عن‬ ‫الظنون‬ ‫كشف‬.‫حتقيق‬‫الدين‬ ‫شرف‬ ‫حممد‬‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫اث‬‫رت‬‫ال‬ ‫إحياء‬ ‫دار‬ ،‫ايلتقااي‬
12
ANNEXE : LA RESOLUTION DES EQUATIONS AFFINES ET
QUADRATIQUES ; UN BREF SOMMAIRE
(Extrait de mon livre Introduction à l'histoire des mathématiques maghrébines publié chez
Amazon en 2020:
https://www.amazon.fr/INTRODUCTION-LHISTOIRE-MATHEMATIQUES-
MAGHREBINES-Lamrabet/dp/B084DGPNNY
Le sommaire est limité ici un exemple et ne contient pas les justifications géométriques.
Pour résoudre une équation linéaire de degré un ou deux, les mathématiciens arabes
mobilisaient quatre outils principaux: a) la voie algébrique inaugurée par al-Khwārizmī b) le
procédé des plateaux de la balance (ṭarīqat al-kaffāt), c) la méthode des proportions, d) l'outil
arithmétique. Nous allons illustrer les deux premiers procédés.
1.1 La méthode algébrique d'al-Khwārizmī15
La résolution d'équations algébriques du premier et du deuxième degré était déjà connue des
Babyloniens près de deux millénaires avant J.C. De nombreuses tablettes contiennent en effet
des problèmes conduisant à de telles équations et l'exposé des solutions. Pareillement, on
trouve de tels problèmes dans les mathématiques indiennes. De même, certaines constructions
géométriques des Eléments d'Euclide peuvent s'interpréter comme des solutions d'équations
du deuxième degré et Diophante (vers 100) - dont l'algèbre indéterminée semble avoir été
connue des mathématiques arabo-islamiques vers le Xème
siècle - utilise des procédés
ingénieux pour résoudre des problèmes, procédés qui restent néanmoins limités aux seuls cas
traités.
Cependant, dans les documents retrouvés jusqu'à présent, nulle part ailleurs que dans les
mathématiques arabo-islamiques du troisième siècle de l'Hégire/neuvième siècle, plus
précisément dans le livre al-Khwārizmī (vers 780-vers 850) intitulé Ḥisāb al-Jabr wa al-
muqābalah (Calcul d'al-Jabr et al-Muqābalah), on ne trouve exposée de façon systématique
une classification de ces équations et l'énoncé de règles générales permettant l'obtention des
solutions en fonction des coefficients pour chaque cas. Tout au plus, il y avait ce que l'on peut
qualifier de recettes appliquées sans référence à un cadre unificateur et l'un des mérites d'al-
Khwārizmī et non des moindres, est d'y avoir introduit de l'ordre et d'en avoir dégagé des
règles générales. L'apport de ce grand savant est, à plus d'un titre, une véritable révolution
dans la pensée mathématique. Il a permis de donner un niveau d'abstraction supplémentaire
aux mathématiques. Si représenter un nombre connu par un symbole (exemple douze par: 12)
constitue déjà une abstraction, introduire le concept d'inconnue constitue une abstraction d'un
niveau plus élevé, puisque celle-ci peut être n'importe quel nombre de n'importe quelle nature:
longueur, aire, volume, somme d'argent, âge, etc. Avec ce mathématicien, on assiste à
15
L'ouvrage d'al-Khwārizmī sera notre référence, à cause de son rôle primordial dans la diffusion de cette
algèbre. Nous renvoyons à notre article sur la querelle soulevée par Abū Barza à propos de la priorité d'Ibn
Turk, un contemporain d'al-Khwārizmī dont une partie d’un livre d'algèbre a été découverte et éditée en
Turquie en 1960; on pourra consulter également les articles de A. Sayli cités en bibliographie
13
l'introduction de nouveaux objets mathématiques et à leur domptage progressif en vue de les
soumettre aux mêmes règles de calculs que les nombres connus.
De façon plus précise, on assiste chez al-Khwārizmī à:
- La démarcation explicite des frontières d’un champ mathématique nouveau, baptisé ḥisāb
al-Jabr wa al-muqabalah, abrégé souvent par la suite en (ḥisāb) al-Jabr;
- La définition de concepts nouveaux dont: nombres, racines, carrés;
- La distinction de six cas d'équations canoniques;
-L'introduction de deux opérations nouvelles avec leurs noms: al-Jabr et al-Muqābalah;
- La description des algorithmes correspondant à la résolution dans chaque cas;
- L'expression des solutions en fonction des coefficients;
- L'élaboration de modèles géométriques et la justification des algorithmes pour les trois
derniers types d'équations;
- La mise en œuvre de ce qui précède dans des situations pratiques variées pour résoudre
divers problèmes tels ceux relevant des transactions commerciales, de la science des héritages
et de l’arpentage.
Voici le sens des deux termes al-Jabr et al-Muqābala:
- al-Jabr correspond à l'opération de transposition des termes négatifs d'un membre d'une
équation dans l'autre, de telle sorte qu'il ne subsiste plus de part et d'autre que des termes
positifs.
- al-Muqābala est la "simplification" des termes semblables dans les deux membres d'une
équation.
Bien que l'auteur ne mentionne pas le terme, il fait usage de l'opération al-ḥaṭṭ (division des 2
membres par un nombre non nul). Le terme apparaîtra plus tard chez Ibn al-Bannā' (n°M134).
al-Khwārizmī distingue trois types de nombres: ‘adad mufrad (ou simplement ‘adad) ‫عدد‬ =
‫مفرد‬ nombre simple, nombre supposé connu, Shay' ‫=شيء‬ chose ou Jidhr ‫=جذر‬ racine, qui
désigne l'inconnue – notée couramment x de nos jours - et Māl ‫,مال‬ étymologiquement, bien
possédé, montant d'une somme – et qui désigne généralement le carré de l'inconnue16
noté
souvent x2
de nos jours -.
Il distingue d'autre part six formes canoniques (abwāb ‫أبواب‬ ou ḍurūb
‫)ضروب‬ auxquelles il ramenait une équation17
affine ou quadratique par al-Jabr et al-
muqabala:
1- Carrés égaux à des racines: 2
= bxax ;
2- Carrés égaux à des nombres: c=ax
2
;
3- Racines égales à des nombres: c=bx ;
4- Racines et carrés égaux à des nombres: 2
a +bx = cx ramenée à 2
+ px = qx ;
5- Carrés et nombres égaux à des racines: 2
a c = bxx + réduite à 2
+q = pxx ;
6- Carrés égaux à des racines et des nombres: 2
a = bx +cx ramenée à 2
= px +qx .
Il évitait de cette façon l'emploi de coefficients négatifs. En outre, s'il donnait les deux racines
lorsqu'elles sont positives, il n'acceptait pas les racines négatives ou nulles. Cette tradition a
survécu bien longtemps après lui, les nombres négatifs et zéro n'ayant accédé que tardivement
16
A la suite d'al-Khwārizmī apparurent: ka‘
b= cube, māl al-māl =le carré-carré, ka‘
b al-māl =carré-cube, etc. .
Pour des details à propos des différentes siginifications de māl voir Jeffrey A. Oaks & Haitham M. Alkhateeb
in Historia Mathematica 32 (2005) 400-425.
17
al-Khwārizmī utilise le verbe ‘ādala mais pas le nom mu’ādala, désignée par référence à l'un des six cas.
Notons que ces six cas n'épuisent pas ceux de l'équation générale notée aujourd'hui 2
0ax bx c+ + = ; les
racines négatives n'étaient pas considérées par al-Khwārizmī (mais elles l'étaient par les Indiens).
14
au statut complet de nombre. Voici un exemple tiré du livre d'algèbre d'al-Khwārizmī
(traduction personnelle d’après son édition arabe par Ali Musharrafa et M. Mursi):
"J'ai partagé dix en deux parties, puis multiplié chacune des deux par elle-même;
j'ai obtenu cinquante-huit."
Il donne ensuite la solution de la manière suivante:
"Prends l'une des deux parties comme racine et l'autre dix moins la racine; puis
multiplie dix moins la racine par lui-même, ce qui fait cent nombres, un carré moins vingt
racines; multiplies la racine par elle-même, ce qui produit un carré; fais ensuite la somme; il
en résulte cent et deux carrés moins vingt racines égaux à cinquante-huit. Par al-Jabr, restaure
à cent et deux carrées les vingt racines en moins et ajoute-les aux cinquante-huit nombres; il
vient cent et deux carrées égaux à cinquante-huit nombres et vingt racines; ramène ceci à un
seul carré en prenant la moitié de ce que tu as. Il vient cinquante et un carré égaux à vingt-
neuf et dix racines; opère par al-Muqābala en retranchant vingt-neuf de cinquante. Il en résulte
vingt-et-un et un carré égaux à dix racines. Prends la moitié des racines, ce qui donne cinq,
que tu multiplies par lui-même. Du résultat vingt-cinq, soustrais les vingt-et-un qui sont avec
le carré; il reste quatre dont tu prends la racine carrée, qui est deux, que tu soustrais de la
moitié des racines qui est cinq. Il reste trois, qui est l'une des deux parties; l'autre est alors
sept. Ce problème t'a conduit à l'un des six cas qui est: carrés et nombres égaux à des racines."
[al-Khwārizmī, traduction personnelle].
On perçoit sur cet exemple très simple, l'effort mental considérable que devaient déployer
les mathématiciens en l'absence de symboles. La tradition d'al-Khwārizmī fut respectée par
ses successeurs tant en Orient et en Occident arabe que par les mathématiciens européens
jusqu'au XVIIe
qui n'introduisirent pas de notation algébrique. Traduit en symbolisme
moderne, ce qui précède se ramène à la résolution de l'équation 100 +2x² - 20x = 58 . Les
transformations énoncées par al-Khwārizmī (dans le langage ordinaire, sans l'usage de
symboles ni pour les nombres, ni pour l'inconnue ou son carré, ni pour les opérations) sont les
suivantes:
100 +2x² - 20x = 58
100 +2x² = 58 +20x par al-Jabr;
50 +x² = 29 +10x par al-Ḥaṭṭ18
;
21+x² =10x par al-Muqābala et l'auteur se ramène de la sorte à une équation du cinquième
cas, puis fournit l’une des solutions x1 = 3 en conformité avec la formule moderne:
2
1 / 2 ( / 2)x p p q= − − et l’autre x2=10- x1=7.
18
al-Khwārizmī utilisa le verbe ḥaṭṭa dans la solution d'un problème d'héritage. Mais il semblerait que le nom,
en algèbre soit apparu pour la première fois chez Ibn al-Bannā’ al-Marrākushī (654-721H/1256-1321).

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AL-KHWARIZMI, IBN TURK ET L’ALGEBRE : RETOUR SUR UNE CONTROVERSE DE PRIORITE

  • 1. 1 AL-KHWARIZMI, IBN TURK ET L’ALGEBRE : RETOUR SUR UNE CONTROVERSE DE PRIORITE Driss Lamrabet (Rabat, Maroc) Mots-clés: Histoire des mathématiques - al-Khwārizmī- – Ibn Turk - Abū Kāmil – Abū Barza – Equations algébriques – Asie centrale. INTRODUCTION Nous rappelons ici brièvement l’origine de cette controverse et rapportons quelques brins de renseignements concernant Ibn Turk (et son petit-fils Abû Barza), brins rassemblés à partir de diverses sources autres que les deux seules (à savoir al-Fihrist d’Ibn al-Nadīm Xe siècle et Ikhbār al-Ulama’ d’al-Qifṭī, XIIIe siècle) citées par les historiens des sciences qui se sont intéressé à Ibn Turk. Nous avons en effet trouvé mention de ce savant chez un historien qui a l’connu personnellement et qui rapporte des évènements d’après lui : il s’agit d’al-Baladhūrī al-Balâdhurî (m. 279H/892). Son petit-fils, quant à lui, est cité encore plus fréquemment par nombre d’historiens comme on va le voir. A la lumière de ces éléments qui nous semblent nouveaux, nous essaierons quelque peu de réhabiliter Abū Barza, de lui rendre justice en le blanchissant des diffamations portés contre lui par Abū Kamil, cet illustre mathématicien dont la grande réputation a certainement donné à ses jugements le statut de vérité et a peut-être contribué à éclipser les apports mathématiques d’Ibn Turk au profit de ceux d’al-Khwārizmī’. Nous avons volontairement multiplié les témoignages en faveur d’Abû Bazra, ce qui permettra de mieux situer sa place dans la communauté des savants et ainsi de mieux juger ce qu’il peut réclamer, et enfin de fournir des indications sur la période durant laquelle vécut Ibn Turk et ses préoccupations intellectuelles. Ces renseignements pourront, sinon confirmer, du moins corroborer certaines hypothèses relatives à ce mathématicien et à son œuvre.
  • 2. 2 I PRECISIONS BIOGRAPHIQUES La controverse de priorité en question est signalée par le célèbre mathématicien égyptien Abū Kāmil Shujā‘ bin Aslam (vers 340H/951) dans l’introduction de son livre d’algèbre 1 ainsi que dans un autre de ses ouvrages (encore perdu) comme le rapporte Hajjî Khalifa dans Kash azh-zhunûn2 ([24]) . Ce dernier relate que selon Abû Kâmil, Abû Barza (m. 298H/910)3 aurait prétendu que la création de l’algèbre n’est pas l’oeuvre d’al-Khwârizmî, mais de son aïeul, un contemporain d’al-Khwrizmî qui s’appelle Abû-l-Fadl ‘Abd-ul- Hamîd ben Wâsi’ Ibn Turk al-Khuttalî4 . Abû Kâmil prit position en faveur d’al-Khwârizmî et dénigra les propos d’Abû Barza. En dehors d’Abû Kâmil, la question n’est soulevée par aucune source usuelle, si l’on excepte le ralliement d’Ibn Khaldûn à l’opinion d’Abû Kâmil. La source la plus ancienne qui fournit quelques renseignements sur Ibn Turk est Al-Fihrist d’Ibn an-Nâdîm (Xe siècle). Ceux-ci sont ensuite repris par al-Qiftî (XIIIe siècle), Hajji Khalifa (XVIIe siècle), et Ismâ’il Bâchâ al-Baghdâdî (XXe siècle). Ils concernent uniquement les contributions mathématiques et ne mentionnent aucun autre champ d’activité ni aucune date. Des investigations nous ont permis de glaner des brins d’informations supplémentaires. Nous avons en effet trouvé une référence directe à Ibn Turk faite par un de ses contemporains qui semble avoir été un de ses auditeurs5 . Il s’agit de l’historien Al-Balâdhurî qui, à en croire les sources, aurait adressé, dans sa jeunesse, un panégyrique au calife al-Mâmûn en 218H/833, et aurait vécu jusque vers 279H/892. Malgré la lourdeur qui peut en résulter, nous reproduisons en bas de page quelques- uns des rares passages qui citent Ibn Turk ou son petit-fils Abou Barza. Ibn Turk semble s’être intéressé à l’histoire, car il est cité par al-Balâdhurî dans trois chaînes de transmission6 . Selon cet historien, Ibn Turk avait été un auditeur de Yahyâ b. Adam (m. 203H/818). Une biobibliographie tardive (Hadiyyat al-‘ârifîn d’Ismâ’îl Bâchâ [16]) fournit 240H/854 comme date de décès d’Ibn Turk, et ce en signalant que sa source est al-Fihrist , alors que les éditions connues d’al-Fihrist ne donnent aucune date. Une telle date semble néanmoins acceptable si l’on tient compte des renseignements fournis par al-Balâdhurî. Elle est proche de celle proposée comme approximative (235H/848) par Sayli ([5]). Ainsi, Ibn Turk et al-Khwârizmî ont vécu à la même époque et étaient intellectuellement mûrs sous le règne d’al-Mâmûn. Al-Khwârizmî faisait partie des savants proches des califes et fut un membre influent de Bayt al-Hikma (Maison de la Sagesse), facteurs qui ont probablement joué en faveur de la diffusion de son algèbre au détriment de celle d’Ibn Turk, puisque l’on ne sait rien sur le milieu culturel et scientifique dans lequel évoluait ce dernier, si ce n’est qu’il vécut (tout comme al-Khwârizmî et Abû Barza) à Bagdad. Ibn an-Nâdîm nous apprend dans al-Fihrist qu’Ibn Turk s’appelle Abû-l-Fadl (ou Abû Muhammad) ‘Abd-ul-Hamîd ben Wâsi’ Ibn Turk al-Khuttalî le spécialiste du calcul (al- hâsib) et cite parmi ses livres : le Livre exhaustif en calcul, qui comprend six livres (chapitres), le Livre des transactions.([15]) 7 .
  • 3. 3 1 Dans cette introduction, Abû Kâmil loue longuement al-Khwârizmî et exhorte les mathématiciens à le reconnaître comme étant le créateur de l’algèbre et celui grâce à qui cette discipline devint claire et accessible. 2 “ ‫وتمامه‬ ‫الجبر‬ ‫بكمال‬ ( : ‫معروفا‬ ‫كتابا‬ ‫ألفت‬ : ) ‫والمقابلة‬ ‫بالجبر‬ ‫الوصايا‬ ( ‫كتاب‬ ‫في‬ ‫أسلم‬ ‫بن‬ ‫شجاع‬ ‫كامل‬ ‫أبو‬ ‫قال‬ ‫والرد‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫لمحمد‬ ‫والمقابلة‬ ‫الجبر‬ ‫في‬ ‫والسبق‬ ‫بالتقدمة‬ ‫الثاني‬ ‫كتابي‬ ‫في‬ ‫الحجة‬ ‫وأقمت‬ ) ‫أصوله‬ ‫في‬ ‫والزيادة‬ ‫[الم‬ ‫المحترق‬ ‫على‬‫تقصيره‬ ‫بينت‬ ‫وما‬ ‫جده‬ ‫أنه‬ ‫ذكر‬ ‫الذي‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫إلى‬ ‫ينسب‬ ‫مما‬ ‫برزة‬ ‫بأبي‬ ‫المعروف‬ ]‫تخرق‬ ‫خليف‬ ‫(حجي‬ "‫جده‬ ‫إلى‬ ‫نسب‬ ‫فيما‬ ‫معرفته‬ ‫وقلة‬[ "‫الظنون‬ ‫"كشف‬ :‫ة‬24‫ج‬ ، ]2‫ص‬1408.) "Abū Kāmil Shujā b. Aslam dit dans Kitāb al-wasāyā bi al-jabr wa al-muqābalah : J’ai composé un livre intitulé: Kamāl al-Jabr wa tamāmuh wa al-ziyāda fī usūlih, et j’ai fourni la preuve, dans mon deuxième livre, de la priorité et la primauté de Muḥammad bin Musā's en algèbre et la réponse à l’insane [al- mutakharriq] appelé Abū Barza concernant ce qu’il attribue à ‘Abd-ul-Ḥamīd, dont il dit qu’il est son grand- père; j’ai mis en évidence ses lacunes et son manque de connaissance à propos de ce qu’il attribue à son grand-père ». (Hajjī Khalifa in Kash azh-zhunūn [24], vol 2, p. 1407). Remarque : on propose selon les éditions ‫المحترف‬ (le professionnel), ‫المحترق‬ (qui brûle, qui prend feu) ou ‫المتخرق‬. Les deux premiers termes sont visiblement sans lien avec le contexte. 3 Date rapportée par ibn Kathîr, adh-Dhahbî et d’autres. Ibn al-Jawzî fournit 292H/905 dans al- Muntazham. 4 Al-Qiftî donne al-Gîlî , cependant que dans toutes les éditions des sources plus anciennes que sont les ouvrages d’al-Balâdhurî (m. 279H/892) et d’Ibn an-Nâdîm (Xe siècle), on trouve al-Khuttalî (de Khuttal, région de l’ancienne province du Khorâsân riveraine du fleuve Amou Daria) La préférence pour al-Gîlî effectuée dans [5 ] est à ce point de vue discutable. 5 Il a également été un auditeur d’Al-Khwârizmî (qu’il appelle Muhammad. b. Mûsâ al-Khwârizmî al- Hâsib), puisqu’il rapporte des renseignements qu’il dit avoir entendu de ce savant (deux fois dans Ansâb al-ashrâf, [17], tome 4, pp. 274 et 349). 6 Dont les suivantes: -"‫مسير‬ ‫ذكروا‬ :‫قال‬ ‫مجاهد‬ ‫عن‬ ،‫رجل‬ ‫عن‬ ،‫سفيان‬ ‫عن‬ ،‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحيى‬ ‫حدثني‬ ،‫الحاسب‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫حدثني‬ ‫م‬ ‫وال‬ ،‫البارع‬ ‫فضلها‬ ‫بمذهب‬ ‫ذلك‬ ‫ليس‬ :‫فقال‬ ،‫البصرة‬ ‫إلى‬ ‫عائشة‬‫فإنها‬ ‫هذا‬ ‫ومع‬ ،‫اإلحسان‬ ‫من‬ ‫وتأخر‬ ‫لها‬ ‫تقدم‬ ‫ما‬ ‫بطل‬ ( ."ّ‫حب‬ ‫من‬ ‫مع‬ ‫وكل‬ ‫له؛‬ ً‫ا‬َّ‫ب‬‫ح‬ ‫ّهن‬‫د‬‫أش‬ ‫وكانت‬ ،‫إليه‬ ‫وسلم‬ ‫عليه‬ ‫هللا‬ ‫صلى‬ ‫النبي‬ ‫نساء‬ ّ‫أحب‬‫البالذري‬‫أنساب‬ ‫من‬ ‫مل‬ُ‫ج‬": [ "‫األشراف‬17‫ج‬ ، )‫أ‬ ]2‫ص‬48) " ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ le mathématicien m’a dit : Yaḥya bin Ādam m’a dit, d’après Sufiān, d’après un homme, d’après Mujāhid: Ils ont discuté du voyage d’ ‘Aisha's à Baṣṣorah puis il ajouta: cela n’enlèvera rien de son excellent mérite et n’infirmera en rien ses bienveillances passées et futures. De plus, elle était la plus affectionnée des femmes du Propheèe (sws) et celle d’entre elles qui l’affectionnait le plus ; et chacun penche vers celui qu’il aime.. " Al-Balaẓūrī: Jumal min Ansāb al-ashrāf [17] ‫,)أ‬ vol 2 p 48) ‫ونفعها‬ ‫ودواؤها‬ ‫النفوس‬ ‫شفاء‬ ‫به‬ ‫كالكالم‬ ‫رأيت‬ ‫ما‬ :‫قال‬ ‫الثوري‬ ‫أن‬ ‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحيى‬ ‫عن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫"وحدثني‬ :‫قرأ‬ ‫ثم‬ ،‫وضررها‬﴿‫يخشى‬ ‫أو‬ ‫يتذكر‬ ‫لعله‬ ً‫ا‬‫ّن‬‫ي‬‫ل‬ ً‫ال‬‫قو‬ ‫له‬ ‫فقوال‬﴾‫اآلية‬ ،‫طه‬ ‫[سورة‬44]‫ج‬ ، ‫السابق‬ ‫(المصدر‬ "11‫ص‬321) " ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ m’a dit d’après Yaḥya bin Ādam qu’al-Thawrī avait dit: je n’ai vu rien de tel que la parole : elle permet la guérison des âmes et leur médication, leur bienfait et leur nuisance. Puis il récita [(Coran, Taha, verset 44)] :(Puis, parlez-lui gentiment. Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra- t-il ? ) (Ibid., vol.11, p. 321) -‫حدثنى‬ :‫قال‬ ‫الحاسب‬ ‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫"حدثنى‬‫جامع‬ ‫مسجد‬ ‫أول‬ :‫قال‬ ‫صالح‬ ‫بن‬ ‫الحسن‬ ‫عن‬ ،‫آدم‬ ‫بن‬ ‫يحي‬ ".‫اليمان‬ ‫ابن‬ ‫حذيفة‬ ‫يدي‬ ‫على‬ ‫ذلك‬ ‫وجرى‬ ،‫بناؤه‬ ‫وأحكم‬ ‫بعد‬ ‫وسع‬ ‫ثم‬ ،‫وأصحابه‬ ‫سعد‬ ‫بناه‬ ،‫المدائن‬ ‫مسجد‬ ‫بالسواد‬ ‫بنى‬ [ ‫(البالذري‬17،)‫ب‬ ، ]،"‫البلدان‬ ‫"فتوح‬‫الجزء‬2‫ص‬407)
  • 4. 4 -" ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wasi‘ al-Khuttalī le mathématicien m’a dit: Yaḥya bin Ādam m’a dit que Ḥassan bin Ṣaliḥ avait dit: La première grande mosquée bâtie à al-Sawād fut la mosquée d’al-Madā'in, bâtie par Sa‘ad et ses compagnons; elle fut par la suite élargie et sa construction perfectionné grâce à Ḥudhayfa ibn al- Yamān". (Al-Balaẓūrī:. [17] )‫ب‬ ،, )‫ب‬ ،Futūḥ al-buldān, vol 2, p. 407). 7 -‫الختلى‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫الفضل‬ ‫أبو‬ ‫وهو‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ "،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫محمد‬ ‫ابا‬ ‫يكنى‬ ‫وقيل‬ .‫الحاسب‬ [ ،‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫العالمات‬ ‫كتاب‬ .‫كتب‬ ‫ستة‬ ‫على‬ ‫ويحتوى‬ ،‫الحساب‬ ‫في‬ ‫الجامع‬ ‫كتاب‬15‫ص‬ ]391) - " ‘Abd-ul-Ḥamīd: il s’appelle Abū al-Faḍl ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘ b. Turk al-Khuttlī al-Ḥasib; selon certains son surnom est Abū Muḥammad. Il a parmi ses livres:Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb, en six chapitres, Kitāb al-mu‘āmalāt. " (Ibn al-Nadīm, [15], p. 391) -‫بابن‬ ‫ويعرف‬ ‫أهلها‬ َ‫ْن‬‫ي‬َ‫ب‬ ‫مذكور‬ ‫ا‬َ‫ه‬‫ِي‬‫ف‬ ‫مقدم‬ ‫الحساب‬ ‫بصناعة‬ ‫عالم‬ ‫حاسب‬ ‫رجل‬ ‫ا‬َ‫ذ‬َ‫ه‬ ‫الفضل‬ ‫أبو‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫"عبد‬ ‫يحتوي‬ ‫الحساب‬ ‫ِي‬‫ف‬ ‫الجامع‬ ‫كتاب‬ :‫منها‬ ‫مستعملة‬ ‫مشهورة‬ ‫تصانيف‬ ‫الحساب‬ ‫ِي‬‫ف‬ ُ‫ه‬َ‫ل‬ .ً‫ا‬‫أيض‬ ‫محمد‬ ‫أبا‬ ‫ويكنى‬ ‫الجيلي‬ ‫ترك‬ .‫األعداد‬ ‫وخواص‬ ‫الحساب‬ ‫نوادر‬ ‫كتاب‬ .‫كتب‬ ‫ستة‬ ‫ى‬َ‫ل‬َ‫ع‬‫(القفطي‬ "،[14‫ص‬ ]155.) " ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘, Abū al-Faḍl: Cet homme est un mathématicien, érudit dans l’art de l’arithmétique, s’y distingue et jouit d’une renommée dans la communauté des professionnels de cet art; il est connu sous le nom d’Ibn Turk al-Jīlī et a également Abū Muḥammad comme surnom. Il est l’auteur de livres célèbres et diffusés en mathématiques, dont: Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb comprenant six chapitres et Kitāb nawādir al-ḥisāb wa khawāṣ al-a‘dād. (al-Qifṭī, [14] p. 155) -‫سنة‬ ‫توفي‬ ‫الحاسب‬ ‫البغدادي‬ ‫الختلي‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ :‫"الختلي‬240‫أ‬‫الجامع‬ ‫كتاب‬ ‫صنف‬ ‫ومائتين‬ ‫ربعين‬ [ ،‫باشا‬ ‫(إسماعيل‬ " )‫الفهرست‬ ‫(من‬ ,‫المعامالت‬ ‫كتاب‬ .‫الحساب‬ ‫في‬16‫ج‬ ،]1‫ص‬506) -"al-Khuttalī: ‘Abd-ul-Ḥamīd b. Wāsi‘ b. Turk al-Khuttlī al-Baghdādī al-ḥāsib; il mourut en 240 H. Il ecrivit: Kitāb al-Jāmi‘ fī al-ḥisāb, en six chapîtres, Kitāb al-mu‘āmalāt (d’après al-Fihrist) (Ismā‘īl Bāshā, [16] ، vol. 1 p. 506).
  • 5. 5 Concernant Abû Barza, Ibn an-Nadîm l’appelle Abû Barza Al-Fadl ben Muhammad ben ‘Abd al-Hamîd ben Turk ben Wâsi’ al-Khuttalî, et cite parmi ses livres : le Livre des transaction, le Livre de l’arpentage8 As for Abû Barza, Ibn an-Nadîm calls him Abû Barza Al-Fadl ben Muhammad ben ‘Abd al-Hamîd ben Turk ben Wâsi’ al-Khuttalî, and mentions among his books :Transactions Book and Surveing Book9 . Al-Qiftî ([14]) fournit plus de précision sur Ibn Turk, qu’il présente comme un éminent spécialiste du calcul (hâsib) réputé parmi les gens de cet art, et qui a composé des livres de calcul célèbres que les gens utilisent, dont : le Livre exhaustif en calcul formé de six livres (chapitres), le Livre des choses rares en calcul et des propriétés des nombres. Il signale qu’il est connu sous le nom d’Ibn Turk al-Jîlî. La liste des œuvres citées diffère cependant de celle d’Ibn an-Nadîm, puisqu’elle ne reprend pas le Livre des transactions, et comporte le Livre des choses rares (ibid.). A propos d’Abû Barza, Al-Qiftî signale que ce savant s’appelle Al-Fadl ben Muhammad ben ‘Abd al-Hamîd ben Wâsi’, Abû Barza Al-Jîlî (au lieu d’al-Khuttalî, et sans ajouter Ibn Turk), précise que c’est un érudit bien distingué en calcul et que les gens affluent vers lui pour cette discipline dans laquelle il composa des livres intéressants dont : le Livre des transactions et le Livre d’arpentage (ibid.). Abû Barza est donc bien le petit-fils d’Ibn Turk, et ce fait n’est plus simplement hypothétique comme le rapporte Abû Kâmil. Il est en outre cité dans plusieurs chaînes de transmission de hadith. Dans ces chaînes de transmission, il est appelé : Abū Barza Al-Fadl bin Muhammad al-Ḥāsib 10 Il a dû mourir assez âgé, puisque parmi ses professeurs figurent deux narrateurs bien connus du Hadith : Ahmad ben ‘Abd Allâh ben Younes at-Tamîmî al-Kûfî, mort en 227H/842 et Abû ‘Abd Allâh Muhammad ben Simâ’a qui mourut en 233H/847. Il devait ainsi avoir environs 15 ans en 227H/842 comme étudiant et serait donc né vers 212H/827 (il décéda en 298H/910); la date de naissance de son aïeul Ibn Turk pourrait se situer aux alentours de 170H/786, et le grand-père pourrait avoir vu son petit-fils adulte. En plus d’être des spécialistes avérés du calcul, seul aspect mentionné par Ibn an-Nadîm et al-Qiftî,, ce qui précède montre qu’Abû Barza et son ancêtre étaient également des narrateurs (ruwât ‫)رواة‬ fiables du Hadith, particulièrement le premier. Loin de l’image dénigrante que voulait donner de lui Abû Kâmil, Abû Barza jouit d’une excellente réputation et d’un grand respect tant de la part d’historiens célèbres, dont al-Khatîb al- Baghdâdî (m. 463H/1072), As-Sam’ânî (m.562H/1167), Ibn al-Jawzî (m.597H/1201), et Adh-Dhahbî (m.748H/1347) que de celle des spécialistes du Hadith tels qu’al-Bayhaqî (m.458H/1066) ; tous le considèrent unanimement comme un personnage fiable et fort respectable11 . En outre, les deux savants sont cités partout comme des érudits compétents en science du calcul et comme des autorités en la matière. Tous deux sont qualifiés de al- Hâsib (le spécialiste du calcul /mathématicien), qualificatif qui n’était décerné qu’à celui qui s’est bien distingué en mathématiques. A la lumière de ces renseignements sur Abû Barza, il faudrait donc prendre plus au sérieux ses revendications de priorité pour lesquelles Abû Kâmil l’attaqua et le dénigra et lui rendre justice ainsi qu’à son aïeul Ibn Turk.
  • 6. 6 8 -‫المعامالت،كتاب‬ ‫كتاب‬ ،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫"أبو‬ [ ‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫المساحة‬15‫ص‬ ]391) - " Abū Barza al-Faḍl bin Muḥammad bin ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Turk bin Wāsi‘ al-Khuttalī. Il a comme livres: Kitāb al-mu‘āmalāt, kitāb al-misāḥa" (Ibn al-Nadīm, [15] p. 391) -‫واسع‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬،‫ألجلها‬ ‫مقصود‬ ‫فيها‬ ‫مقدم‬ ‫الحساب‬ ‫بصناعة‬ ‫عالم‬ :،‫الجيلي‬ ‫برزة‬ ‫،أبو‬ ( "‫المساحة‬ ‫كتاب‬ ،‫المعامالت‬ ‫كتاب‬ :‫منها‬ ،‫مفيدة‬ ‫كتبا‬ ‫ذلك‬ ‫في‬ ‫مصنف‬[، ‫القفطي‬14]‫ص‬ ،168). - " al-Faḍl bin Muḥammad bin ‘Abd-ul-Ḥamīd bin Wāsi, Abū Barza al-Jīlī: un érudit dans l’art du calcul dans lequel il fut excellent, à propos duquel il était sollicité et au sujet duquel il composa des livres utiles dont: Kitāb al-mu‘āmalāt, kitāb al-misāḥa ". (al-Qifṭī, [14] p. 168). 9 -‫المعامالت،كتاب‬ ‫كتاب‬ ،‫الكتب‬ ‫من‬ ‫وله‬ .‫الختلى‬ ‫واسع‬ ‫بن‬ ‫ترك‬ ‫بن‬ ‫الحميد‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫"أبو‬ [ ‫النديم‬ ‫(ابن‬ ".‫المساحة‬15‫ص‬ ]391). 10 Voir par exemple : Abū Na’īm al-Ispahānī (m.430H/1038 ) : Ḥulyat al-‘awliyā’ wa ṭabaqāt al-‘aṣfiyā’, asl-sa’āda, Le Caire, 1974, 7 : 255 Al-Bayhaqī (m.458H/1066) : Shu’ab al-īmān, maktabat al-rashād, Mumbay, Inde, 2003. 2 : 17 - 6 : 45 - 13 : 100 Al_Khaṭīb al-Baghdādī (m. 463H/1072): al-kifāya fī ‘ilm al-riwāya, al-maktaba al- ‘ilmiya, Medine, p. 347 Ismā’īl al-Ṭalīḥī al-Iṣbahānī (m.537H/1142 ): al-targhīb wa al-tarhīb, Dar al-ḥadīth, Le Caire, 1993, 3 : 24. Ibn Ḥajar al-Asqalānī (m.852H/1448): Taghlīq al-Ta’līq ‘alā Ṣaḥiḥ al-Bukhārī, al- Maktab al-Islāmī, Ammān, 1405H, 2 : 55
  • 7. 7 11 -‫الكوفيين‬ ‫الحماني‬ ‫ويحيى‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫وثابت‬ ‫يونس‬ ‫بن‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ :‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬ ‫ونوح‬ ‫األلهاني‬ ‫سليمان‬ ‫بن‬ ‫ومالك‬ ‫الرملي‬ ‫سماعه‬ ‫بن‬ ‫ومحمد‬‫محمد‬ ‫وأبو‬ ‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ‫القومسي‬ ‫حبيب‬ ‫بن‬ .‫السقطي‬ ‫يوسف‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫العباس‬ ‫وأبو‬ ‫ماسي‬ ‫بن‬‫الحاسب‬ ‫برزه‬ ‫أبي‬ ‫عن‬ ‫البرقاني‬ ‫بكر‬ ‫أبا‬ ‫سألت‬ ...‫ثقة‬ ‫وكان‬ [، ‫البغدادي‬ ‫(الخطيب‬ "..‫جليل‬ ‫وهو‬ ‫لعمرى‬ ‫أي‬ :‫فقال‬ ‫ثقة؟‬ ‫أكان‬ :‫قلت‬20‫ج‬ )‫أ‬ ،]14‫ص‬346-‫رقم‬ ‫الترجمة‬6770 ). -" al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: Il relatait d’après Aḥmad bin ‘Abd Allāh bin Yūnus, Thābit bin Mūsā et Yaḥyā al-Ḥimmānī tous de Kūfa, Muḥammad bin Samā‘a al-Ramlī, Mālik bin Sulaymān al- Alhānī et Nūḥ bin Ḥabīb al-Qawmasī; relataient d’après him: ‘Abd al-Bāqī bin Qāni‘, Abū Muḥammad bin Māsī et Abū al-‘Abbās Aḥmad bin Muḥammad bin Yūsuf al-Saqaṭī. Il était probe … J’ai demandé à Abū Bakr al-Barqānī à propos d’Abū Barza al-ḥāsib: Etait-il probe? Il me répondit: Assurément! Sur ma vie! Il était vénérable aussi." (al-Khaṭīb al-Baghdādī, [20] ‫)أ‬ vol. 14, P. 346- Biographie N°. 6770). -" ‫الحماني‬ ‫بن‬ ‫ويحيى‬ ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫وثابت‬ ‫يونس‬ ‫بن‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ ،‫الحاسب‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ ‫ثقة‬ ‫وكان‬ ،‫السقطي‬ ‫يوسف‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫أحمد‬ ‫العباس‬ ‫وأبو‬ ‫ماسي‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫وأبو‬ ‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ،‫وغيرهم‬ ‫ثما‬ ‫سنة‬ ‫صفر‬ ‫من‬ ‫بقين‬ ‫الربع‬ ‫ومات‬ ،‫صدوقا‬ ‫القدر‬ ‫جليل‬".‫ومائتين‬ ‫وتسعين‬ ‫ني‬ [ ،‫(السمعاني‬22‫ج‬ ، ]2‫ص‬154) . -" Abū Barza al-Faḍl bin Muḥammad al-ḥāsib: Il relatait d’après Aḥmad bin ‘Abd Allāh bin Yūnus, Thābit bin Mūsā, Yaḥyā al-Ḥimmānī et d’autres. Relataient d’après lui: ‘Abd al-Bāqī bin Nāfi‘, Abū Muḥammad bin Māsī et Abū al-‘Abbās Aḥmad bin Muḥammad bin Yūsuf al-Saqaṭī. Il était probe, hautementdistingué et honnête. (Al-Sam‘ānī, [22], vol 2, p. 154). -‫جليل‬ ‫ثقة‬ ‫وكان‬ ،‫قانع‬ ‫بن‬ ‫الباقي‬ ‫عبد‬ ‫عنه‬ ‫روى‬ ‫الحماني‬ ‫يحيى‬ ‫عن‬ ‫حدث‬ .‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ ،‫محمد‬ ‫بن‬ ‫الفضل‬ " [( ."‫القدر‬13‫ج‬ ‫الجوزي‬ ‫ابن‬ ،]13‫ص‬43.) "- al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: Il rapportait d’après Yaḥyā al-Ḥimmānī ; ‘Abd al-Bāqī bin Nāfi‘ rapportait d’après lui. Il était probe et hautement distingué. ( [13] Ibn al-Jawzī, vol. 13, p. 43). -‫ومحمد‬ ،‫الحماني‬ ‫ويحيى‬ ،‫اليربوعي‬ ‫يونس‬ ‫ابن‬ :‫عن‬ ‫روى‬ .‫بغداد‬ ‫حيسوب‬ ‫كان‬ .‫الحاسب‬ ‫برزة‬ ‫أبو‬ .‫محمد‬ ‫بن‬ ‫"الفضل‬ ‫قا‬ ‫ابن‬ :‫وعنه‬ .‫سماعة‬ ‫بن‬‫وثقه‬ .‫وتسعين‬ ‫ثمان‬ ‫سنة‬ ‫صفر‬ ‫في‬ ‫توفي‬ .‫ماسي‬ ‫بن‬ ‫محمد‬ ‫وأبو‬ ،‫السقطي‬ ‫محمد‬ ‫بن‬ ‫وأحمد‬ ،‫نع‬ [ ‫(الذهبي‬ ."‫الخطيب‬21]‫،ج‬22‫ص‬226) . "- al-Faḍl bin Muḥammad, Abū Barza al-ḥāsib: C’était le mathématicien de Bagdād. Il relatait d’après: Ibn Yūnus al-Yarbū‘ī, Yaḥyā al-Ḥimmānī et Muḥammad bin Samā‘a; relatainent d’après lui : Ibn Qāni‘, Aḥmad bin Muḥammad al-Saqaṭī et Abū Muḥammad bin Māsī. Il mourut en Ṣafar de l’an [2]98. Al-Khaṭīb a démontré sa probité". (Al-Dhahabī, [21], vol. 22, p. 226).
  • 8. 8 II UNE SOURCE COMMUNE POUR AL-KHWARIZMI ET IBN TURK ? Un fragment du livre d’algèbre d’Ibn Turk a été retrouvée et éditée par Sayli à Istambul en 1962, et traduit en anglais en 2007 ([5], i)). Bien que court, ce fragment contient suffisamment d’éléments pour permettre une comparaison12 . Les deux oeuvres d’algèbres, celle d’al-Khwârizmî et celle d’Ibn Turk présentent des similitudes et des différences, et toutes les deux ne sont pas sans susciter des questions. Parmi les similitudes mentionnons: 1) Sur le plan terminologique: usage des mêmes termes : shay’, mâl, jidhr,… 2) Sur le plan méthodologique : existence d’une justification géométrique des algorithmes dans l’un et l’autre ouvrage, la similitude allant jusqu’à l’usage de modèles géométriques quasiment identiques pour le cinquième cas 2 x q px+ = (pour x<p/2). Sur le plan des différences, les auteurs13 s’accordent pour affirmer que le travail d’Ibn Tutk est mathématiquement plus élaboré que celui d’al-Khwârizmî ; le premier a en particulier considéré deux modèles pour ce cinquième cas (l’un pour x<p/2 et l’autre pour x>p/2) , alors que le second s’est limité à un seul. Cette supériorité, sans autre preuve, a poussé certains auteurs (voir par exemple [4]) à considérer Ibn Turk comme un simple continuateur de l’algèbre d’al-Khwarizmī. Les ressemblances entre les œuvres des deux savants pourraient-elles provenir de l’existence d’une tradition algébrique en Asie centrale, d’où tous deux sont originaires ? Hoyrup [3] distingue une tradition sous-scientifique (sub-scientific, représentée par les calculs liés aux transactions commerciales et à la géométrie pratique comme l’arpentage) et une autre scientifique véhiculée notamment par les ouvrages de mathématiques et d’astronomie traduits du grec et du sanskrit. Selon lui, l’apparition de l’algèbre serait liée à la première tradition. Hoyrup effectue dans ses articles l’analyse des œuvres d’algèbre d’autres auteurs, en particulier du Liber mensurationum, traduction latine d’un ouvrage d’arpentage écrit par un certain Abū Bakr qui semble utiliser une algèbre « archaïque » pouvant être rattachée à une tradition babylonienne ou séleucide. Hoyrup n’hésite pas, après une étude comparative précise, à conjecturer qu’Abū Bakr, al-Khwārizmī et Ibn Turk ont tous dû puiser leur algèbre dans une même tradition répandue à leur époque parmi des utilisateurs d’al-jabr (ahl al-jabr ou asḥāb al-jabr : « al-jabr-people » ou « followers of al-jabr » selon la terminologie de Hoyrup). Parmi les questions soulevées par l’existence éventuelle d’une telle tradition en Asie centrale, on peut se poser les suivantes : Dans quelle langue était-elle exprimée ? L’existence d’une terminologie arabe commune chez les deux mathématiciens signifie-t- elle qu’un travail préalable d’arabisation avait déjà été accompli ? Abû Kâmil, qui dit avoir appris l’algèbre grâce au livre d’al-Khwârizmî, ignorait-il l’existence d’une telle tradition? 12 Pour une étude comparative plus détaillée de l’algèbre de ces deux mathématiciens, voir [2], [2b] et[5].. 13 Dont Youschkevitch, ([10], p. 44), Djebbar ([1], p. 45), Katz et al. [2b], p.144, Hoyrup [3].
  • 9. 9 Ayant par la suite lu l’algèbre d’Ibn Turk et constaté des ressemblances, aurait-il crié au plagiat ? Hoyrup discute l’attitude d’Abū Kāmil qui semble avoir fait (volontairement ?) table rase des pratiques autres que celles initiées par al-Khwārizmī : “In Abu Kamil’s Algebra, the idea of a special group of al-jabr-people seems to have disappeared. Instead, the subject, is now understood as the discipline of Al-Khwarizmi’s Kitab fi al-jabr wa’l-muqabala” (Hoyrup, ii) , p. 263). Et de conclure: “So, we are led to the conclusion that both authors supplemented their treatise on the methods of the “al-jabr-people” with material borrowed from another sub-scientific tradition. They did so, however, from a conception of mathematics foreign to both sub-scientific traditions (as far as it can be judged from the indirect evidence at hand), namely from the idea that mathematics should be supplied with proofs. This, and not only the use of letters to identify geometric entities and the way to explain the construction of a geometric figure, was in the scientific mathematical tradition initiated by the Greeks. The fundamental feat of the two authors was to bring the two levels of mathematical activity together for mutual fructification. (ibid., p. 266) Note : Ibn an-Nâdîm cite un autre mathématicien et astronome, Sanad b. ‘Ali ,un juif converti à l’Islam par le calife al-Mâmun (et donc contemporain d’al-Khwârizmî et d’Ibn Turk) et dont al-Fihrist rapporte qu’il composa un livre d’algèbre (Kitâb al-jabr wa-l- muqâbalah), encore perdu14 . BIBLIOGRAPHIE [1] -Djebbar; A.: L’algèbre arabe. Genèse d’un art. Vuibert-Adapt, Paris, 2005. [2] -Hoyrup, J. : i) “The Formation of Islamic Mathematics”: Sources and Conditions. Preprints og Reprints 1987 Nr 1. (Disponible en ligne) ii) “Algebraic Traditions behind Ibn Turk and al-Khwārizmī'. In Acts of the International Symposium on Ibn Turk, Khwarezmī, Farabī, Beyronī and Ibn Sīna (Ankara 9-12 september 1985). Disponible en ligne [2b] -Katz, Victor J. & Karen Hunger Parshall: Taming the Unknown. A History of Algebra from Antiquity to the Earliest Twentieth Century. Princeton University Press, 2014. [3] -Lamrabet, D. : i) An introduction to the History of Maghrebian Mathematics (2020): Publié par Amazon 14 Certains auteurs (Suter et à sa suite A. A Saidan) contestent l’attribution de ce livre à Sanad en affirmant qu’il s’agit en fait du livre d’algèbre d’al-Khwârizmî. Leur argument est qu’Ibn an-Nadîm présente ce dernier sans parler de son algèbre, et ce juste avant de présenter Sanad b. ‘Ali.
  • 10. 10 https://www.amazon.fr/Introduction-History-Maghrebian-Mathematics/dp/B084DG7LN3 French française: Introduction à l’histoire des mathématiques maghrébines. https://www.amazon.fr/INTRODUCTION-LHISTOIRE-MATHEMATIQUES- MAGHREBINES-Lamrabet/dp/B084DGPNNY ii) Divers aspects du progrès en mathématiques. Publications de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat ; Série : Colloques et Séminaires. N° 112, 2003. [4] -Rashed, R.: i) Entre arithmétique et algèbre; Les Belles Lettres, Paris, 1984. ii) Al-Khwārizmī, Le commencement de l’algèbre; Paris, Librairie Scientifique et Technique Albert Blanchard ( Sciences dans l’histoire), 2007. [5] -Sayli, A .: i) Logical Necessities in Mixed Equations by Abd al-Hamîd Ibn Turk and the Algebra of his Time. Foundation for Science, Technology and Civilisation. Editor: Prof. Mohamed El Gomati. Production: Amar Nazir. Jan. 2007. ii) Al-Khwarizmi, Abdu’l-Hamid Ibn Turk and the Place of Central Asia in the History of Science and Cuture. Foundation for Science, Technology and Civilisation. Editor: Prof. Mohamed El Gomati. Production: Amar Nazir. December 2006. Disponibles aux adresses : http://www.muslimheritage.com/uploads/Place_of_Central_Asia_in_History_of_Science _and_Culture.pdf (consultée en juin 2008). [6] -Youchkevitch,A.P.: Les mathématiques arabes (VIII-XVe Siècles). Trad. par M. Caznave et K. Jaouiche. Vrin, Paris, 1976. [12]-‫أصبيعة‬ ‫أيب‬ ‫ابن‬:‫األطباء‬ ‫طبقات‬ ‫يف‬ ‫األنباء‬ ‫عيون‬،‫بريوت‬ ،‫رضا‬ ‫ار‬‫ز‬‫ن‬ .1965. [13]-‫اجلوزي‬ ‫ابن‬:‫يخ‬‫ر‬‫ات‬ ‫يف‬ ‫املنتظم‬‫األمم‬‫و‬ ‫امللوك‬(18‫سنة‬ ‫املتوىف‬ ‫اجلوزي‬ ‫بن‬ ‫حممد‬ ‫بن‬ ‫علي‬ ‫بن‬ ‫الرمحن‬ ‫عبد‬ ‫ج‬‫الفر‬ ‫أليب‬ ،) ‫جزءا‬597. ‫ه‬ ‫اجلزء‬13.‫بريوت‬ ،‫العلمية‬ ‫الكتب‬ ‫دار‬ .‫عطا‬ ‫القادر‬ ‫عبد‬ ‫ومصطفى‬ ‫عطا‬ ‫القادر‬ ‫عبد‬ ‫حممد‬ ‫حتقيق‬ .1412‫ه‬/1992 [14]-(‫ابن‬)‫القفطي‬:‫أب‬ ‫العلماء‬ ‫إخبار‬‫خ‬‫احلكماء‬ ‫بار‬‫مكتبة‬ ..)‫يخ‬‫ر‬‫ات‬ ‫(بدون‬ ‫القاهرة‬ .‫املتنيب‬ [15]-‫الندمي‬ ‫ابن‬:‫الفهرست‬،‫بريوت‬ ،‫املعرفة‬ ‫دار‬ ،1978 [16]-‫البغدادي‬ ‫ابشا‬ ‫إمساعيل‬:‫فني‬‫ر‬‫العا‬ ‫هدية‬‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫اث‬‫رت‬‫ال‬ ‫إحياء‬ ‫دار‬ .1955 [17]-‫البالذري‬)‫ا‬ :‫جابر‬ ‫بن‬ ‫حيىي‬ ‫بن‬ ‫أمحد‬ ،‫اف‬‫ر‬‫األش‬ ‫أنساب‬ ‫من‬ ‫مجل‬ ‫كتاب‬(13‫اء‬‫ز‬‫األج‬ ،)‫جزءا‬2‫و‬4‫و‬11.‫كار‬‫ز‬ ‫سهيل‬ ‫الدكتور‬ ‫حتقيق‬ ‫بريوت‬ ،‫الفكر‬ ‫دار‬ ،‫كلي‬‫زر‬ ‫ايض‬‫ر‬ ‫الدكتور‬‫و‬1996)‫ب‬‫البلدان‬ ‫فتوح‬.‫الثاين‬ ‫القسم‬‫مؤسسة‬ .‫الطباع‬ ‫أنيس‬ ‫وعمر‬ ‫الطباع‬ ‫أنيس‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫.حتقيق‬ ،‫بريوت‬ ،‫املعارف‬1987. [18]-‫البيهقي‬:‫اإلميان‬ ‫شعب‬)‫الشاملة‬ ‫املكتبة‬ ‫(يف‬ [19]-‫اخلوارومي‬: ‫موسى‬ ‫بن‬ ‫حممد‬ ،‫املقابلة‬‫و‬ ‫اجلرب‬ ‫كتاب‬‫الكاتب‬ ‫دار‬ .‫أمحد‬ ‫مرسي‬ ‫حممد‬ ‫الدكتور‬‫و‬ ‫مشرفة‬ ‫مصطفى‬ ‫علي‬ ‫الدكتور‬ ‫وتعليق‬ ‫تقدمي‬ . ،‫مصر‬ ‫ع‬‫فر‬ ،‫النشر‬‫و‬ ‫للطباعة‬ ‫العريب‬19
  • 11. 11 [20]-‫البغدادي‬ ‫اخلطيب‬)‫أ‬ :‫بغداد‬ ‫يخ‬‫ر‬‫ات‬(17‫اجلزء‬ ،)‫جزءا‬14‫بريوت‬ ،‫اإلسالمي‬ ‫الغرب‬ ‫دار‬ .‫اد‬‫و‬‫ع‬ ‫معروف‬ ‫بشار‬ ‫الدكتور‬ ‫حتقيق‬ . 2001. [21]-‫الذهيب‬:‫اإلسالم‬ ‫يخ‬‫ر‬‫ات‬(52‫اجلزء‬ .)‫جزءا‬22‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫الكتاب‬ ‫دار‬ .‫تدمري‬ ‫السالم‬ ‫عبد‬ ‫عمر‬ ‫حتقيق‬ .1991. [22]-‫السمعان‬:‫األنساب‬(5‫البارودي‬ ‫عمر‬ ‫هللا‬ ‫عبد‬ ‫حتقيق‬ .)‫اء‬‫ز‬‫أج‬.‫بريوت‬ ،‫اجلنان‬ ‫دار‬ ،‫الثقافية‬ ‫األحباث‬‫و‬ ‫اخلدمات‬ ‫كز‬‫مر‬ .‫الثاين‬ ‫اجلزء‬ 1408‫ه‬/1988. [23]-‫املكتب‬‫ة‬‫الشاملة‬:‫املوقع‬ ‫من‬ ‫ل‬َّ‫م‬َ‫حت‬http//Islamport.com‫سنة‬ ‫خالل‬ ‫ات‬‫ر‬‫اي‬‫ز‬ ‫(بضع‬2008) [24]-‫خليفة‬ ،‫حاجي‬:‫الفنون‬‫و‬ ‫الكتب‬ ‫أسامي‬ ‫عن‬ ‫الظنون‬ ‫كشف‬.‫حتقيق‬‫الدين‬ ‫شرف‬ ‫حممد‬‫بريوت‬ ،‫العريب‬ ‫اث‬‫رت‬‫ال‬ ‫إحياء‬ ‫دار‬ ،‫ايلتقااي‬
  • 12. 12 ANNEXE : LA RESOLUTION DES EQUATIONS AFFINES ET QUADRATIQUES ; UN BREF SOMMAIRE (Extrait de mon livre Introduction à l'histoire des mathématiques maghrébines publié chez Amazon en 2020: https://www.amazon.fr/INTRODUCTION-LHISTOIRE-MATHEMATIQUES- MAGHREBINES-Lamrabet/dp/B084DGPNNY Le sommaire est limité ici un exemple et ne contient pas les justifications géométriques. Pour résoudre une équation linéaire de degré un ou deux, les mathématiciens arabes mobilisaient quatre outils principaux: a) la voie algébrique inaugurée par al-Khwārizmī b) le procédé des plateaux de la balance (ṭarīqat al-kaffāt), c) la méthode des proportions, d) l'outil arithmétique. Nous allons illustrer les deux premiers procédés. 1.1 La méthode algébrique d'al-Khwārizmī15 La résolution d'équations algébriques du premier et du deuxième degré était déjà connue des Babyloniens près de deux millénaires avant J.C. De nombreuses tablettes contiennent en effet des problèmes conduisant à de telles équations et l'exposé des solutions. Pareillement, on trouve de tels problèmes dans les mathématiques indiennes. De même, certaines constructions géométriques des Eléments d'Euclide peuvent s'interpréter comme des solutions d'équations du deuxième degré et Diophante (vers 100) - dont l'algèbre indéterminée semble avoir été connue des mathématiques arabo-islamiques vers le Xème siècle - utilise des procédés ingénieux pour résoudre des problèmes, procédés qui restent néanmoins limités aux seuls cas traités. Cependant, dans les documents retrouvés jusqu'à présent, nulle part ailleurs que dans les mathématiques arabo-islamiques du troisième siècle de l'Hégire/neuvième siècle, plus précisément dans le livre al-Khwārizmī (vers 780-vers 850) intitulé Ḥisāb al-Jabr wa al- muqābalah (Calcul d'al-Jabr et al-Muqābalah), on ne trouve exposée de façon systématique une classification de ces équations et l'énoncé de règles générales permettant l'obtention des solutions en fonction des coefficients pour chaque cas. Tout au plus, il y avait ce que l'on peut qualifier de recettes appliquées sans référence à un cadre unificateur et l'un des mérites d'al- Khwārizmī et non des moindres, est d'y avoir introduit de l'ordre et d'en avoir dégagé des règles générales. L'apport de ce grand savant est, à plus d'un titre, une véritable révolution dans la pensée mathématique. Il a permis de donner un niveau d'abstraction supplémentaire aux mathématiques. Si représenter un nombre connu par un symbole (exemple douze par: 12) constitue déjà une abstraction, introduire le concept d'inconnue constitue une abstraction d'un niveau plus élevé, puisque celle-ci peut être n'importe quel nombre de n'importe quelle nature: longueur, aire, volume, somme d'argent, âge, etc. Avec ce mathématicien, on assiste à 15 L'ouvrage d'al-Khwārizmī sera notre référence, à cause de son rôle primordial dans la diffusion de cette algèbre. Nous renvoyons à notre article sur la querelle soulevée par Abū Barza à propos de la priorité d'Ibn Turk, un contemporain d'al-Khwārizmī dont une partie d’un livre d'algèbre a été découverte et éditée en Turquie en 1960; on pourra consulter également les articles de A. Sayli cités en bibliographie
  • 13. 13 l'introduction de nouveaux objets mathématiques et à leur domptage progressif en vue de les soumettre aux mêmes règles de calculs que les nombres connus. De façon plus précise, on assiste chez al-Khwārizmī à: - La démarcation explicite des frontières d’un champ mathématique nouveau, baptisé ḥisāb al-Jabr wa al-muqabalah, abrégé souvent par la suite en (ḥisāb) al-Jabr; - La définition de concepts nouveaux dont: nombres, racines, carrés; - La distinction de six cas d'équations canoniques; -L'introduction de deux opérations nouvelles avec leurs noms: al-Jabr et al-Muqābalah; - La description des algorithmes correspondant à la résolution dans chaque cas; - L'expression des solutions en fonction des coefficients; - L'élaboration de modèles géométriques et la justification des algorithmes pour les trois derniers types d'équations; - La mise en œuvre de ce qui précède dans des situations pratiques variées pour résoudre divers problèmes tels ceux relevant des transactions commerciales, de la science des héritages et de l’arpentage. Voici le sens des deux termes al-Jabr et al-Muqābala: - al-Jabr correspond à l'opération de transposition des termes négatifs d'un membre d'une équation dans l'autre, de telle sorte qu'il ne subsiste plus de part et d'autre que des termes positifs. - al-Muqābala est la "simplification" des termes semblables dans les deux membres d'une équation. Bien que l'auteur ne mentionne pas le terme, il fait usage de l'opération al-ḥaṭṭ (division des 2 membres par un nombre non nul). Le terme apparaîtra plus tard chez Ibn al-Bannā' (n°M134). al-Khwārizmī distingue trois types de nombres: ‘adad mufrad (ou simplement ‘adad) ‫عدد‬ = ‫مفرد‬ nombre simple, nombre supposé connu, Shay' ‫=شيء‬ chose ou Jidhr ‫=جذر‬ racine, qui désigne l'inconnue – notée couramment x de nos jours - et Māl ‫,مال‬ étymologiquement, bien possédé, montant d'une somme – et qui désigne généralement le carré de l'inconnue16 noté souvent x2 de nos jours -. Il distingue d'autre part six formes canoniques (abwāb ‫أبواب‬ ou ḍurūb ‫)ضروب‬ auxquelles il ramenait une équation17 affine ou quadratique par al-Jabr et al- muqabala: 1- Carrés égaux à des racines: 2 = bxax ; 2- Carrés égaux à des nombres: c=ax 2 ; 3- Racines égales à des nombres: c=bx ; 4- Racines et carrés égaux à des nombres: 2 a +bx = cx ramenée à 2 + px = qx ; 5- Carrés et nombres égaux à des racines: 2 a c = bxx + réduite à 2 +q = pxx ; 6- Carrés égaux à des racines et des nombres: 2 a = bx +cx ramenée à 2 = px +qx . Il évitait de cette façon l'emploi de coefficients négatifs. En outre, s'il donnait les deux racines lorsqu'elles sont positives, il n'acceptait pas les racines négatives ou nulles. Cette tradition a survécu bien longtemps après lui, les nombres négatifs et zéro n'ayant accédé que tardivement 16 A la suite d'al-Khwārizmī apparurent: ka‘ b= cube, māl al-māl =le carré-carré, ka‘ b al-māl =carré-cube, etc. . Pour des details à propos des différentes siginifications de māl voir Jeffrey A. Oaks & Haitham M. Alkhateeb in Historia Mathematica 32 (2005) 400-425. 17 al-Khwārizmī utilise le verbe ‘ādala mais pas le nom mu’ādala, désignée par référence à l'un des six cas. Notons que ces six cas n'épuisent pas ceux de l'équation générale notée aujourd'hui 2 0ax bx c+ + = ; les racines négatives n'étaient pas considérées par al-Khwārizmī (mais elles l'étaient par les Indiens).
  • 14. 14 au statut complet de nombre. Voici un exemple tiré du livre d'algèbre d'al-Khwārizmī (traduction personnelle d’après son édition arabe par Ali Musharrafa et M. Mursi): "J'ai partagé dix en deux parties, puis multiplié chacune des deux par elle-même; j'ai obtenu cinquante-huit." Il donne ensuite la solution de la manière suivante: "Prends l'une des deux parties comme racine et l'autre dix moins la racine; puis multiplie dix moins la racine par lui-même, ce qui fait cent nombres, un carré moins vingt racines; multiplies la racine par elle-même, ce qui produit un carré; fais ensuite la somme; il en résulte cent et deux carrés moins vingt racines égaux à cinquante-huit. Par al-Jabr, restaure à cent et deux carrées les vingt racines en moins et ajoute-les aux cinquante-huit nombres; il vient cent et deux carrées égaux à cinquante-huit nombres et vingt racines; ramène ceci à un seul carré en prenant la moitié de ce que tu as. Il vient cinquante et un carré égaux à vingt- neuf et dix racines; opère par al-Muqābala en retranchant vingt-neuf de cinquante. Il en résulte vingt-et-un et un carré égaux à dix racines. Prends la moitié des racines, ce qui donne cinq, que tu multiplies par lui-même. Du résultat vingt-cinq, soustrais les vingt-et-un qui sont avec le carré; il reste quatre dont tu prends la racine carrée, qui est deux, que tu soustrais de la moitié des racines qui est cinq. Il reste trois, qui est l'une des deux parties; l'autre est alors sept. Ce problème t'a conduit à l'un des six cas qui est: carrés et nombres égaux à des racines." [al-Khwārizmī, traduction personnelle]. On perçoit sur cet exemple très simple, l'effort mental considérable que devaient déployer les mathématiciens en l'absence de symboles. La tradition d'al-Khwārizmī fut respectée par ses successeurs tant en Orient et en Occident arabe que par les mathématiciens européens jusqu'au XVIIe qui n'introduisirent pas de notation algébrique. Traduit en symbolisme moderne, ce qui précède se ramène à la résolution de l'équation 100 +2x² - 20x = 58 . Les transformations énoncées par al-Khwārizmī (dans le langage ordinaire, sans l'usage de symboles ni pour les nombres, ni pour l'inconnue ou son carré, ni pour les opérations) sont les suivantes: 100 +2x² - 20x = 58 100 +2x² = 58 +20x par al-Jabr; 50 +x² = 29 +10x par al-Ḥaṭṭ18 ; 21+x² =10x par al-Muqābala et l'auteur se ramène de la sorte à une équation du cinquième cas, puis fournit l’une des solutions x1 = 3 en conformité avec la formule moderne: 2 1 / 2 ( / 2)x p p q= − − et l’autre x2=10- x1=7. 18 al-Khwārizmī utilisa le verbe ḥaṭṭa dans la solution d'un problème d'héritage. Mais il semblerait que le nom, en algèbre soit apparu pour la première fois chez Ibn al-Bannā’ al-Marrākushī (654-721H/1256-1321).