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Maurizio Tiepolo
(sous la dir. de)
ÉVALUER L’ENVIRONNEMENT
AU SAHEL
Premières réflexions
sur la gouvernance locale
L’Harmattan Italia
via Degli Artisti 15
10124 Torino
L’Harmattan
5-7 rue de L’École Polytechnique
75005 Paris
Traduction de l’italien au français de RGB
avec la collaboration d’Elisa Pelizzari
L’Harmattan en Afrique
Harmattan Bénin - ISOR
Quartier Gbèdjromèdé - Rue Agbélenco, Lot 1247 I 01 - Cotonou-RP (01 BP 359)
christian_dablaka123@yahoo.fr
Harmattan Burkina Faso
Av. Mohamar Kadhafi
12 BP 226 - Ouagadougou / harmattanburkina@yahoo.fr
Harmattan Cameroun
Immeuble Don Bosco - BP 11486 - Yaoundé / harmattancam@yahoo.fr
Harmattan Congo
67 Av. E. Patrice Lumumba
BP 2874 - Brazzaville / harmattan.congo@yahoo.fr
Harmattan Côte-d’Ivoire
Rés. Karl - Cité des Art
03 BP 1588 - Abidjan / etien_nda@yahoo.fr
Harmattan Guinée
Almamya Rue Ka 028
BP 3470 - Conakry / harmattanguinee@yahoo.fr
Harmattan Rép. Démocratique du Congo
c/o Faculté des sciences sociales, pol. et admin.
BP 243 - Université de Kinshasa (XI) / matangilamusadila@yahoo.fr
Harmattan Mali
Rue 58, Porte 203 (face au Palais de la Culture)
Badalabougou-Bamako / poudiougopaul@yahoo.fr
Harmattan Mauritanie
Espace El Kettab - 472 Av. Palais des Congrès
BP 316 - Nouakchott / mdlemkettab@yahoo.com
Harmattan Sénégal
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Harmattan Togo
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ISBN (Italia) 978-88-7892-219-8 - ISBN (France) 978-2-336-00013-8
© L’Harmattan Italia srl (Torino), L’Harmattan sas (Paris), 2012
SOMMAIRE
Abréviations 7
Introduction, Maurizio Tiepolo 13
PREMIÈRE PARTIE
La gestion locale de l’environnement al Sahel 21
1. État et dynamique de l’environnement à l’échelle
locale au Sahel, Maurizio Tiepolo 23
2. Aménagement et gestion locale de l’environnement
au Sahel, Maurizio Tiepolo 53
3. Planification locale de l’environnement au Burkina
Faso : acquis et contraintes, Pamoussa Ouedraogo 101
4. La gestion locale de l’environnement au Niger,
Zalia Boubacar 123
5. La gestion locale de l’environnement au Sénégal et
dans la région de Louga, Médou Diarra Fall, Modou
Fall, Maguèye Thiane 161
SECONDE PARTIE
Évaluer la gestion de l’environnement au Sahel 189
6. Suivi-évaluation des plans et des projets locaux pour
l’environnement au Sahel, Maurizio Tiepolo 191
7. Évaluation ex-post de la composante ‘environnement’
du PIP de Ziniaré, Burkina Faso, 2007-2011,
Clémence Ouedraogo 227
8. Suivi de la composante « assainissement » du PCD
de Pouytenga, Burkina Faso, 2011-2015,
Ambasda Paul Sandwidi 253
9. État des lieux et suivi de la composante sécurité
alimentaire du PRD de la région Plateau Central,
Burkina Faso, 2011-2015, Pascal Compaoré 277
10. Évaluation ex-post du Projet « Sécurité alimentaire »,
région de Tahoua, département d’Illéla, Niger, 2009-
2011, Moussa Illiassou 307
11. Évaluation à mi-parcours du projet de gestion de la
mare de Tabalak, Niger, 2011-2012, Ibrahim Issoufou 335
12. Évaluation ex-post des actions de préservation contre
l’ensablement du barrage de Téra, Niger, 2006-2011,
Oumarou Yayé 351
13. Évaluation à mi-parcours de la composante
« aménagement participatif » des forêts du PRODER,
région de Fatick, Sénégal, 2010-2011, Alassane Ndour 371
14. État des lieux et dispositif de suivi de la composante
agriculture du PIC de Diouloulou, Sénégal, 2012-
2017, Malik Diatta 401
15. Évaluation à mi-parcours du projet d’adaptation à
l’érosion côtière dans les zones vulnérables à
Joal-Fadiouth, Sénégal, 2011-2012, Mamadou Sarr 425
Conclusion, Maurizio Tiepolo 449
Postface, Mario Artuso 457
Les auteurs 459
Liste des images 461
Index des noms 467
English Summary 475
13
Introduction
Maurizio Tiepolo
Lorsqu’on parle d’environnement au Sahel, la mémoire
retourne aux terribles sécheresses de 1972-74 et de 1981-84
qui dévastèrent d’immenses territoires et obligèrent à
l’exode provisoire les populations et qui touchèrent grave-
ment les productions agro-sylvo-pastorales.
Au cours des années suivantes, d’autres catastrophes
amenèrent cette région à faire les titres des journaux. Tout
d’abord les inondations de zones arides. Dans la nuit du 31
août au 1er septembre 2009, à Ouagadougou (Burkina Faso)
il tomba 263 mm de pluie. De mémoire d’homme, la ville
n’avait jamais eu autant d’eau. Selon les estimations,
l’inondation fit 8 morts, rendit 24.700 maisons inhabitables
et porta à évacuer 150.000 personnes. Au cours des jours
qui suivirent, ce fut le tour d’Agadez (Niger) où les inonda-
tions ne touchèrent pas moins de 25.000 personnes.
L’exploitation incontrôlée des ressources naturelles est
responsable d’importantes altérations environnementales.
Ainsi, l’extraction d’uranium dans le nord du Niger est ju-
gée comme responsable de la pollution évidente de la nap-
pe d’eau où puisent les établissements humains de la ré-
gion. La pêche, le long de la côte atlantique, appauvrit les
ressources halieutiques et, dans le même temps, pollue les
villes côtières avec les déchets et les fumées générés par la
transformation du poisson ; en outre, elle épuise les res-
sources forestières de l’intérieur pour alimenter les fours de
cuisson en charbon.
Jusqu’à présent, les catastrophes environnementales ont
été des événements médiatisés et connus.
14
D’autres changements, moins évidents, transparaissent à
travers les histoires du paysan et du pêcheur sur la dispari-
tion de la faune, l’appauvrissement des pâturages, la réduc-
tion de la diversité biologique. Mais l’environnement est
également urbain et les risques proviennent alors de
l’absence d’élimination et de l’élimination incorrecte de dé-
chets : ordures, déchets industriels, déchets hospitaliers,
eaux pluviales, boues des fosses septiques.
Bien que dans le Sahel la conservation de certaines res-
sources naturelles remonte à l’époque coloniale, ce fut seu-
lement à partir des grandes sécheresses que des politiques
et des plans d’action environnementaux furent établis.
C’est de cette époque que datent les organismes régionaux
chargés d’observer, de prévoir, d’alerter et d’intervenir à
l’échelle régionale (CILSS, Club du Sahel, INSAH) et ceux
nationaux (ministères de l’eau, de l’environnement). La
contribution de la communauté internationale à la création
de ces appareils fut déterminante et permit à chaque Pays
de disposer de structures gouvernementales et consultati-
ves qui se dotèrent peu à peu d’une législation environne-
mentale, de stratégies, de politiques et de plans nationaux
ainsi que d’un dispositif de gestion décentralisé.
En contrepartie, la mise en œuvre des orientations na-
tionales de la part des collectivités locales auxquelles les
compétences en matière d’environnement furent transfé-
rées, présente des retards. L’expérimentation d’outils de
gestion locale de l’environnement comme l’Agenda 21 loca-
le, les Plans régionaux, les Plans d’action locale pour
l’environnement ne manque pas. Toutefois, il s’agit
d’expériences sporadiques. Les collectivités locales sahé-
liennes préfèrent organiser l’action à travers la composante
environnementale du Plan de développement communal
(PDC), outil largement utilisé dans la région et établi de fa-
çon participative. L’application du PDC dépend du trans-
15
fert des fonds du budget de l’État aux collectivités locales.
Étant donnée l’impasse de ce dispositif, l’application, est
généralement limitée à moins que les fonds de la coopéra-
tion décentralisée ou bilatérale n’arrivent en aide.
Ceci est le contexte au moment où nous écrivons. Mais il
n’est pas dit que la conservation, la protection et l’usage de
l’environnement continueront de cette façon. Par exemple,
si le Burkina Faso se dotait d’un dispositif performant de
suivi-évaluation du Fonds de fonctionnement des collecti-
vités territoriales, à partir de 2013 ce seraient les fonds eu-
ropéens qui alimenteraient le Fonds. Les communes pour-
raient donc disposer de ressources pour réaliser les actions
environnementales prévues dans leur PDC.
De plus, au cours des dernières années, sous l’impulsion
des Nations Unies, chaque gouvernement et ceux qui au-
jourd’hui sont appelés les Partenaires techniques et finan-
ciers (PTF) investissent des ressources considérables dans
la gouvernance environnementale. Par ce terme, on entend
le processus qui mobilise l’Etat, le marché et la société civile
au niveau global, national et local pour formuler des politi-
ques environnementales et leur application. Ce processus
implique la définition de règles et de procédures visant au
développement environnemental durable.
Ce qui nous intéresse ici, c’est la gouvernance environ-
nementale locale, c’est-à-dire l’activité exercée par les collec-
tivités territoriales (régions, communes) pour préserver, pro-
téger et utiliser l’environnement rural et urbain, entendue
comme ensemble de ressources naturelles renouvelables et
de « cadre de vie » (assainissement, rayonnements, paysage).
Que savons-nous des dynamiques en cours dans les res-
sources naturelles renouvelables sahéliennes à l’échelle lo-
cale ? Est-il vraiment suffisant d’observer les variations de
la végétation sur une centaine de kilomètres carrés pour af-
firmer que le Sahel reverdit ? La nouvelle publiée sur le New
16
York Times, sur les sites internet de différents organismes et
dans certains rapports donne de l’espoir. Mais ce n’est pas la
vérité. Une même superficie analysée sur la même période
dans une autre zone sahélienne d’une étendue analogue
donne des résultats opposés. En réalité, nous savons peu de
choses sur les dynamiques environnementales en cours
après les états de l’environnement mesurés depuis environ
dix ans. Et les collectivités locales connaissent encore moins
les dynamiques de leur propre environnement.
Les connaissances sont également insuffisantes en ce qui
concerne les raisons de l’intensification de l’action environ-
nementale, les modes de gouvernance locale de
l’environnement et les résultats obtenus dans le Sahel. Ces
questions sont à la base de ce livre. C’est l’ampleur du thème
qui nous a poussés à restreindre l’étude à trois des huit Pays
sahéliens d’Afrique occidentale. On a choisi le Burkina Faso
et le Niger car ils représentent respectivement un Pays avec
une petite superficie territoriale et un des Pays sahéliens les
plus vastes et les plus peuplés, tous les deux internes. J’ai en-
suite fait le choix du Sénégal : la façade atlantique du Sahel.
Les objectifs fixés ont été plusieurs. Avant tout apprécier
l’état et les dynamiques de l’environnement comme per-
çues par les collectivités locales, souligner les lacunes, sug-
gérer des remèdes. En second lieu, reconstruire les pierres
milliaires de la gouvernance environnementale au Sahel
servant de référence à l’apparition de la gouvernance loca-
le. Puis, identifier les outils d’aménagement et de gestion
locale de l’environnement. Troisièmement, évaluer l’impact
et les obstacles rencontrés par ces outils. Et enfin, identifier
et si possible, décrire d’éventuels remèdes.
Pour décrire la gouvernance locale, il est nécessaire de
clarifier au moins trois faits qui s’entrecroisent :
- avant tout, la gouvernance environnementale internatio-
nale martelée par les sommets, les rencontres et les décla-
17
rations sur l’environnement réalisés à partir de 1972 par
les Nations Unies (ces événements sont à l’origine des po-
litiques internationales pour l’environnement, des ac-
cords multilatéraux, des engagements de chaque pays et
des PTF) ;
- deuxièmement, l’action des PTF à travers les projets dans
le domaine de l’environnement (un volet peu étudié mal-
gré les montants d’au moins 1,6 milliard d’euro investis
dans les trois Pays de 2000 à aujourd’hui, dont 0,7 en
bande sahélienne) ;
- troisièmement, la gouvernance environnementale nationa-
le, bouleversée, après 1996, par le processus de décentra-
lisation administrative et politique (avec des temps et des
modes différents d’un Pays à l’autre).
Cet ouvrage se structure en deux parties.
La première partie est consacrée aux dynamiques, à
l’aménagement et à la gestion de l’environnement. Dès le
chapitre initial, on y présente l’état des connaissances loca-
les sur l’environnement en le comparant aux données des
Plans d’action nationale pour l’environnement et aux be-
soins d’aménagement. Après avoir examiné les sources
d’information et les lacunes, trois possibilités sont propo-
sées pour améliorer et pérenniser le système d’information
local. Le deuxième chapitre porte notamment sur les origi-
nes de la gouvernance environnementale, les changements
d’approche survenus progressivement jusqu’à la naissance
de la gouvernance locale, les obstacles rencontrés au cours
de son déploiement. En ce qui concerne les ressources natu-
relles renouvelables, celui-ci documente le passage d’une
logique conversationniste à une logique d’utilisation dura-
ble de l’environnement visant la réduction de la pauvreté et
le développement local. Les trois chapitres suivants décri-
vent les dispositifs, les compétences et les outils de planifi-
18
cation de l’environnement au Burkina Faso, au Niger et au
Sénégal.
La deuxième partie de ce livre est consacrée essentielle-
ment au suivi et à l’évaluation des plans et des projets lo-
caux pour l’environnement. En réalité, ces activités appar-
tiennent en partie (évaluation) à l’aménagement et en partie
(suivi) à la gestion. Mais leur importance est telle qu’elle
justifie le démembrement et le développement séparé. Le
cinquième chapitre introduit, avec la perspective histori-
que, l’évaluation pour se concentrer ensuite sur les types de
suivi-évaluation applicables aux projets et aux plans locaux
d’environnement et il vérifie les obstacles auxquels
l’évaluation environnementale locale se heurte aujourd’hui.
De la même façon, les neuf courts chapitres suivants ras-
semblent des évaluations (3 pour chaque pays) de Plans de
développement régional (1), PDC (3) et des projets indivi-
duels (5). Il s’agit de trois états des lieux avec un dispositif
de suivi (identification des indicateurs comprise), 3 évalua-
tions mi-parcours et 3 évaluations ex post. Comme on le
verra, les aspects environnementaux évalués sont nom-
breux. Ceux urbains concernent les dispositifs de drainage
des eaux pluviales et des égouts (Pouytenga, Burkina Faso),
le ramassage et le transport à la décharge des déchets (Zi-
niaré, Burkina Faso), le nettoyage des plages urbaines pour
éliminer les déchets de la pêche et la réduction de la pollu-
tion de l’air dérivant de la transformation du poisson (Joal-
Fadiouth, Sénégal). Pour les aspects ruraux, on va de la sé-
curité alimentaire, composante du PDC qui intègre les ac-
tions de préservation des eaux et des sols (région Plateau
Central, Burkina Faso), à la gestion des forêts (région Fa-
tick, Sénégal), en passant par le secteur agricole dans lequel
on trouve les actions de récupération des terres salinisées
(Diouloulou, Sénégal), par la prévention de l’ensablement
des bassins hydriques avec des ouvrages de conservation
19
des eaux et des sols qui réduisent le ruissellement et donc,
le transport du sol en aval (Tabalak et Téra, Niger).
L’évaluation des neuf cas d’étude est destinée aux techni-
ciens locaux qui ont suivi une formation spécifique au Poli-
tecnico di Torino. Ces cas d’évaluation peuvent s’avérer
utiles à d’autres techniciens afin d’enraciner la pratique de
l’évaluation de l’environnement au Sahel.
Le livre recueille les résultats d’une prospection sur la
gouvernance locale de l’environnement réalisée avec une
méthode de travail organisée en deux composantes. La
première est la recherche, conduite au moyen d’une étude
approfondie de la documentation, des compétences et des
outils existants dans les trois Pays pris en compte avec des
visites sur place, une synthèse effectuée par des experts de
l’environnement sahélien, la collecte et l’analyse d’une cen-
taine de projets dans le domaine environnemental. Ces ac-
tivités ont été développées entre juillet 2011 et juillet 2012
dans le cadre du Programme de recherche scientifique
d’intérêt national « Évaluer, planifier et gérer localement le
territoire et l’environnement en Afrique sub-saharienne »,
projet « Plans d’action locale en Afrique occidentale : sys-
tèmes de reporting et méthodes de planification » coordon-
né par l’auteur.
La seconde composante a impliqué la mise au point de
la méthode d’évaluation de projets et de plans locaux, la
formation de techniciens sahéliens au Politecnico di Torino,
l’accompagnement pour l’évaluation de neuf instruments
de planification locale de l’environnement. Ces activités ont
été conduites en collaboration avec le 7e Mastère « Plans et
projets » du Politecnico de Turin de juillet 2011 à mars 2012.
De nombreuses personnes ont contribué à la réalisation
de ces activités.
20
Pour la partie recherche, je dois remercier Zalia Boubacar, Médou
Diarra Fall, Modou Fall, Pamoussa Ouedraogo et Maguèye Thiane
pour avoir écrit les chapitres trois, quatre et cinq.
Pour la partie formation et application, je voudrais remercier les
personnes qui ont rendu possible la réalisation du 7e Mastère : Mar-
cello Cavalcaselle pour les bourses d’études attribuées par la Direc-
tion générale pour la coopération au développement du Ministère ita-
lien des Affaires étrangères au Politecnico di Torino, Gennaro Genti-
le, directeur de l’Unité technique locale auprès de l’Ambassade
d’Italie à Dakar qui a permis la participation des candidats Sénégalais
ainsi que Roberta Battista pour l’organisation logistique à Dakar. Je
remercie également l’Ambassade d’Italie à Abidjan qui a permis aux
candidats Burkinabés et Nigériens de participer. COSPE et LVIA ont
proposé quelques candidats au Mastère et ont collaboré au succès de
toutes les phases de la formation en Italie et sur place. Un remercie-
ment spécial à Gianfranco Cattai, Marco Alban et Giovanni Armando
(LVIA) ainsi qu’à Alessandra Brunelli et à Claudio Russo (COSPE). Je
remercie également Marzia Sica qui a facilité le cofinancement de la
Compagnia di San Paolo pour le Mastère. Enfin, je souhaite rappeler
le personnel du Mastère du COREP, Emanuela Ovcin, responsable de
la formation, Mario Artuso qui s’est chargé de la coordination com-
plexe avec d’excellents résultats et Federica Piazza qui a organisé la
logistique avec une grande efficacité. Silvia Bergamasco (COSPE) et
Giancarlo Palma (Unité technique centrale de la DGCS – Ministère
des Affaires étrangères) ont apporté une importante contribution à la
méthode d’évaluation ensuite utilisée dans chaque cas d’étude et je
leur en suis particulièrement reconnaissant.
Je suis débiteur envers Silvia Macchi (Université de Rome « La
Sapienza »), Vieri Tarchiani (IBIMET-CNR) pour le temps qu’ils ont
consacré à la lecture du premier, du deuxième et du sixième chapitres
et pour les précieuses considérations qui ont enrichi ma vision des
événements environnementaux et dont j’espère avoir tenu compte de
façon adéquate. Enfin je remercie Eleonora Nadal pour la mise en pa-
ge du livre, Paolo Cantamessa et Enrico Ponte pour la réalisation des
figures et Sarah Braccio (Politecnico di Torino) pour la couverture, les
cartes des chapitres 1, 2, 6 et l’élaboration des données.
23
État et dynamique de l’environnement
à l’échelle locale au Sahel
Maurizio Tiepolo1
Par le terme environnement, on entend les ressources
naturelles (RN) renouvelables et non renouvelables (air,
terre, eau, ressources halieutiques, minérales, pâturages,
forêts, faune et biodiversité) et le « cadre de vie », à son
tour organisé en assainissement (déchets liquides, solides et
gazeux, eaux pluviales), rayonnements et paysage2. En
Afrique occidentale, dans les Pays traversés par le Sahel3,
l’environnement est soumis à des menaces constantes :
pression anthropique et pastorale sur les RN, pluies hors
saison ou intenses, élévation du niveau de la mer, séche-
resse, prédateurs des cultures, exploitation minière. Lors-
que ces menaces se vérifient dans des économies aussi
pauvres et non préparées à les affronter, celles-ci condui-
sent à des inondations, à la destruction des cultures, à des
famines et à une pollution à grande échelle.
Quand l’économie est fondée sur les RN, la gouvernance
de l’environnement devient importante pour le développe-
ment, et revêt également un intérêt théorique et pratique par-
ticulier.
1 Je remercie Sarah Braccio (Politecnico di Torino) et Vieri Tarchiani
(IBIMET-CNR) pour les commentaires et les informations.
2
Selon les Plans d’action nationale pour l’environnement (PANE) du
Burkina Faso, du Niger et du Sénégal. L’OCDE (2008) et le PNUE
(2012) englobent dans l’environnement aussi le climat, la couche
d’ozone et les ressources énergétiques.
3 Burkina Faso, Tchad, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger et Sénégal.
24
Fig. 1 – Burkina Faso, Niger et Sénégal. Subdivision en collectivités territo-
riales et isohyètes des 200 mm et des 500 mm (1971 - 2000) délimitant la
bande sahélienne (source isohyète : Centre Régional Agrhymet-CNR CeSIA,
élaboration de S. Braccio)
Chaque RN présente des dynamiques qui lui sont
propres (tab. 1). Les terres sahéliennes, par exemple, sont
soumises à l’érosion, à la salinisation et à la perte de fertili-
té. Ces phénomènes se produisent suite à l’utilisation de
terres inadaptées aux cultures (expansion incessante du
front agricole en zone pastorale), en raison d’une surexploi-
tation du sol pour la production d’arachides, de riz, de co-
ton, de canne à sucre (Burkina Faso, Sénégal), de biocarbu-
rants (Sénégal) et aux pratiques de ramassage des résidus
des cultures.
25
Tab. 1 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. État et dynamiques environnementaux ma-
jeurs selon l’État de l’environnement ou le PANE (sources : RBF, MECV 2008, RN,
CPM, CNEDD 2005, RS, MEPN 2005, RS, MEPN 1997)
Composante État ou dynamique BF N S
Climat Baisse pluviométrie ●
Eau Baisse apports eaux de surface
Espèces envahissantes
Pollution, baisse nappe
Ensablement cours d’eau
Envasement retenues eaux
●
●
●
●
●
Halieutiques Réduction
Destruction habitat de reproduction
Pollution
Surexploitation
Envahissement des eaux par les plantes
●
●
●
●
●
●
Terres Érosion
Érosion littoral
Salinisation
Faible rendement
Contamination
●
●
● ●
●
●
●
●
Mines Dégradation eaux souterraines et superficielles
Pollution atmosphérique
Destruction forêts
● ●
●
●
Pâturages Réduction biomasse
Diminution espèces appétées
Dépassement capacité de charge
Réduction espace pastoral
Feux de brousse
●
●
●
●
●
●
Forêts Forte pression
Dégradation (sécheresse, surexploitation)
Destruction mangroves
Réduction diversité biologique
●
●
●
●
●
●
Faune Régression, recul de biodiversité
Réduction d’habitat
●
●
●
Biodiversité Érosion génétique ● ●
Déchets liquides Latrines hygiéniquement inadéquates
Inorganisation gestion boues de vidange
●
●
●
Déchets solides Industries sans mesures protection
Pas de décharges contrôlées
Collecte déchets inferieure au 50%
●
●
● ●
●
●
Eaux pluviales Réseau très faible ● ●
Paysage Occupation illégale des espaces
Prolifération d’espèces envahissantes
●
●
●
26
La conservation des eaux et des sols (CES) est une solu-
tion reconnue : elle implique la reforestation, également
avec des espèces d’arbres utiles comme l’Acacia senegal qui
donne la gomme arabique. Mais il s’agit d’une opération
introduite par les projets de développement rural que
chaque agriculteur, habituellement, ne reproduit pas parce
que celle-ci est trop coûteuse (llliassou 2012) ou pour éviter
que le champ ne lui soit soustrait par le propriétaire une
fois que l’amélioration a porté ses fruits. C’est justement
pour conjurer cette éventualité que les projets encouragent
la formation de comités de gestion des terres récupérées.
Au fil des ans, d’autres techniques ont été testées avec suc-
cès, comme la régénération naturelle, la protection des
bords des champs avec des haies et des bandes d’herbe.
Les bassins hydriques sont soumis à ensablement et à la
pollution. Cette dernière incidence concerne aussi les
nappes d’eau ; si celles-ci entrent en contact avec le percolât
des décharges et des latrines.
Les ressources halieutiques subissent la pollution des
eaux et celles marines diminuent et s’appauvrissent. La
cause est la mauvaise gestion de la pêche : du nombre de
personnes qui la pratiquent jusqu’à l’abandon des équipe-
ments de pêche (filets fantômes), pratique qui entraîne une
réduction de la biodiversité (Macfadyen, Huntington 2010).
Les pâturages sont en régression en raison de l’avancée
du front agricole et enregistrent une diminution des es-
pèces herbacées appétibles.
Les activités minières peuvent polluer les eaux des
nappes d’eau où elles s’approvisionnent. C’est ce qui
semble se produire au Niger, au nord d’Agadez (Collectif
Tchinaghen 2008).
Les forêts s’éclaircissent de façon accélérée en raison de
la demande croissante en bois de chauffage, en charbon et
en bois d’œuvre de la part d’une population en augmenta-
27
tion. Bien que des dispositifs de gestion locale des forêts
aient été introduits, comme les marchés ruraux du bois au
Niger et les foyers améliorés à basse consommation la de-
mande reste bien supérieure à la capacité de régénération
des forêts.
En ce qui concerne le cadre de vie, les réseaux
d’évacuation des eaux pluviales sont encore rares et ceux-ci
sont mal entretenus. Par conséquent, dès la plus petite
pluie, des inondations se produisent. D’autre part, les habi-
tats occupent désormais aussi les bas fonds qui sont les
plus exposés aux inondations comme à Dakar (Dasylva
2009). Les eaux récupérées ne sont pas ensuite épurées. Les
égouts sûrs font défaut (même dans les capitales se sont les
latrines qui prévalent) et l’élimination des boues des fosses
septiques est désorganisée. Le ramassage des ordures mé-
nagères est peu diffus et le transport dans les décharges
n’est pas contrôlé. Les activités industrielles qui existent
désormais dans plusieurs villes n’éliminent pas les déchets
de façon sécurisée.
Le cadre dressé sommairement jusqu’à présent a été tiré
du Plan d’action nationale pour l’environnement (PANE)
du Burkina Faso et du Sénégal, ainsi que de l’État de
l’environnement du Niger et de la littérature en la matière
disponible.
La gouvernance environnementale locale ne peut ce-
pendant pas se limiter à ces connaissances mais elle doit
partir de l’état et des dynamiques vérifiées dans chaque
contexte.
Faire le point sur ces connaissances et les comparer avec
celles indiquées par les PANE et dans la littérature est
l’objectif de ce chapitre (paragraphe 1). Les connaissances
sur l’environnement peuvent être perfectionnées. Je vérifie-
rai les procédures utilisées localement pour les regrouper
(paragraphe 2). Ensuite, j’identifierai les limites des sources
28
d’information actuelles et leur utilisation (paragraphe 3)
afin de vérifier quelles contributions peuvent venir des sys-
tèmes d’information nationaux, du suivi communautaire et
de la photo-interprétation d’images satellitales haute défi-
nition pour la création d’un système d’information local sur
l’environnement (paragraphe 4).
J’ai utilisé différentes sources d’information pour effec-
tuer ce parcours analytique. L’existence de nombreux Plans
de développement communal (PDC) dans tout le Sahel m’a
facilité la tâche. Cet outil se base sur un diagnostic qui con-
cerne aussi l’environnement. Je ferai largement recours aux
PDC en ce qui concerne les paragraphes 1 et 2. Aux fins de
cette étude, la bande sahélienne est définie par les isohyètes
annuelles de 200 mm et de 500 mm telles qu’elles ont été vé-
rifiées au cours de la période 1971-2000. A l’intérieur, on
trouve 246 collectivités réparties entre communes urbaines et
communautés rurales. Parmi ces collectivités locales, j’ai
choisi de façon aléatoire un échantillon à 8% tant pour le Ni-
ger, que pour le Sénégal, Pays dont une partie importante du
territoire national se trouve dans la bande sahélienne (fig. 2,
tab. 2) et à 6% pour le Burkina Faso. L’importance moindre
de ce dernier est liée au fait qu’au moment où j’écris, la plu-
part des communes sahéliennes du Burkina Faso ne possède
pas ou n’a pas encore approuvé le PDC. Une fois les PDC ré-
cupéré pour chacune des communes tirées au sort, j’ai con-
trôlé que la série des précipitations totales annuelles de la
dernière décennie tombait pour la plus grande partie des
années sous les 500 mm. L’échantillon se compose de 10
communes nigériennes, 8 communes sénégalaises et 2 com-
munes burkinabés. Pour l’assainissement, j’ai fait référence
à 39 Plans Locaux d’Hydraulique et d’Assainissement rédi-
gés au Sénégal entre 2007 et 2011 pour autant de communes
de la bande sahélienne.
29
Le quatrième paragraphe est rédigé en se référant à ce
que j’ai découvert sur les sources d’information locales et na-
tionales durant mes expériences de suivi-évaluation de
l’environnement au Niger et au Sénégal entre 2004 et 2012 et
à la littérature disponible.
1. État et dynamique de l’environnement à l’échelle locale
L’état et les dynamiques de l’environnement ébauchées
dans l’introduction se fondent sur les PANE et sur l’État de
l’environnement. L’état et les dynamiques énoncées valent
aussi à l’échelle locale? La question est pertinente dans la me-
sure où le cadre national de l’environnement n’est pas compo-
sé comme une mosaïque des PDC mais avec d’autres sources
d’information4.
Nous partirons donc précisément de la connaissance lo-
cale de l’état et des dynamiques de l’environnement. Ce
parcours sera effectué au moyen de l’analyse des diagnos-
tics des PDC qui rendent compte de l’état, et parfois, aussi
des dynamiques environnementales locales. Il s’agit de
rapports presque simultanés aux PANE. Par conséquent, il
sera aussi possible de comparer les résultats produits par
les niveaux de connaissances nationales et locales.
J’ai identifié 20 PDC de communautés rurales et de com-
munes urbaines disposant d’un territoire essentiellement ru-
ral de façon aléatoire à l’intérieur de la bande sahélienne.
Deux tiers des PDC ont été préparés entre 2001 et 2006.
4 Dans le cas du PANE sénégalais, en 1995, 30 ateliers départementaux
furent organisés, mobilisant 2.300 participants pour discuter des
contraintes, des priorités et des expériences de GRN et des
mécanismes financiers pour soutenir les initiatives locales. Mais pour
rédiger le diagnostic environnemental des données complémentaires
furent recueillies dans un questionnaire envoyé à 175 collectivités
locales (RS, MEPN 1997: 11).
30
Fig. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. Localisation des 20 communes et
communautés rurales objet d’analyse dans la bande sahélienne : 1. Dori, 2.
Ouahigouya (Burkina Faso), 3. Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Garhan-
ga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9. Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Toumour
(Niger), 13. Agnam Civol, 14. Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17. Ndiébène
Gandiol, 18. Ndiéne Lagane, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal) (source isohyète :
Centre Régional Agrhymet et IBIMET-CNR ; élaboration de S. Braccio)
Tab. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2012. Communes et communautés ru-
rales dont le territoire administratif se trouve entièrement ou partiellement
dans la bande sahélienne (isohyète 200-500 mm, 1971-2000) (élaboration de S.
Braccio)
Bande sahélienne BF N S BF+N+S
Superficies, % du territoire national 15 34 43 32
Collectivités locales qui s’y trouvent
entièrement, n 20 67 70 157
partiellement, n 15 46 28 89
total, n 35 113 98 246
échantillon, n 2 10 8 20
échantillon, % 6 8 8 8
31
Tab. 3 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. État et dynamiques de
l’environnement locale selon les PDC
Composante
environnementale
État Dynamiques Fréquence
max : 20
Pluviométrie Insuffisante 11
Fluctuations, baisse 6
Eau Qualité baisse 5
Ensablement sources 12
Terres Érosion 9
Appauvrissement 3
Pâturages Feux de brousse 7
Occupation agricole 6
Végéta. ligneuse Coupe abusive 11
Assainissement Évacuation eaux absente 10
Décharge absente 8
Latrines rares ou absentes 7
Le tiers restant a été rédigé entre 2008 et 2011 L’analyse
locale met en évidence des caractères structuraux de
l’environnement sahélien. Tout d’abord il y a la pluviomé-
trie insuffisante (55%) et les signes du changement clima-
tique : chute et fluctuation du cumul annuel, vagues de
chaleur (tab. 3). Il y a ensuite la basse qualité des eaux (tab.
4) et parfois la profondeur de la nappe, la présence de
couches rocheuses qui empêchent de l’atteindre (30% des
cas) et la pauvreté des sols (15%). De plus, celle-ci révèle des
évolutions. Celle la plus fréquemment signalée est le proces-
sus d’ensablement des sources hydriques superficielles
(60%), dû à l’érosion des sols (45%) avec les conséquences
bien connues sur l’abreuvage du bétail.
Une autre dynamique signalée est la coupe abusive de la
végétation ligneuse (55% des cas), qui conduit, dans un cas
sur quatre, à la détérioration de la ressource.
L’absence d’assainissement à caractère permanent. Pour
le moment, les PDC signalent le manque de réseaux
d’évacuation des eaux pluviales (63% des cas examinés), de
32
décharges où déposer les ordures ménagères (50%) et
l’absence ou la rareté des latrines (35%).
Certains PDC ne traitent pas l’assainissement en soi,
surtout au Sénégal (Gagnick, Ndiené Lagane), mais comme
cause secondaire de problèmes sanitaires tels que la prolifé-
ration des moustiques et le fort taux de maladies diar-
rhéiques). Des informations plus précises sont aujourd’hui
possibles uniquement pour le Sénégal, seul Pays à s’être
doté, entre 2007 et 2011, de façon quadrillée, de Plans Lo-
caux d’Hydraulique et d’Assainissement dans le cadre du
PEPAM de la Banque Mondiale. Selon les 39 PLHA prépa-
rés dans la bande sahélienne, il faudrait 711 latrines dans
les bâtiments publics et plus de 43.000 latrines individuelles
et bacs à laver pour un coût total de 36,1 millions d’Euros.
Ce chiffre permettrait d’intervenir dans un bassin de
972.000 habitants (2011) pour y améliorer les conditions de
45% des familles.
Enfin, on signale la réduction des pâturages en raison de
l’avancée du front agricole (30%) et des feux de brousse (35%).
Jusqu’à présent, on constate une coïncidence significa-
tive entre les dynamiques relevées à l’échelle nationale et
celles à l’échelle locale. Cependant, à l’échelle nationale,
l’assainissement n’est pas présenté comme le problème en-
vironnemental local le plus courant.
Et pourtant, les localités concernées ne sont pas des vil-
lages comme c’est souvent le cas dans le Sahel sénégalais,
mais des petits centres et par fois des villes : au Burkina Fa-
so, les chefs-lieux des communes examinées ont entre 20.000
et 73.000 habitants et au Niger entre 11.000 et 24.000 habi-
tants. Les conditions hygiéniques précaires concernent donc
un nombre important de personnes et pas seulement dans la
bande sahélienne (Ouedraogo C. 2012 ; Sandwidi 2012).
L’analyse locale par rapport au cadre délimité par les
PANE signale l’ensablement.
33
Tab. 4 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. Etat et dynamique de
l’environnement local identifiés par 20 PDC de la bande sahélienne : 1. Dori,
2. Ouahigouya (Burkina Faso), 3. Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Gar-
hanga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9. Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Tou-
mour (Niger), 13. Agnam Civol, 14. Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17.
Ndiébène Gandiol, 18. Ndiéne Lagane, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal)
État et dynamique Collectivité locale
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 1920
Climat/pluies, tempér.
Insuffisance ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Mauvaise répartition ●
Fluctuations, baisse ● ● ●
Forte chaleur ●
Eaux
Profondeur nappe ● ● ● ● ● ●
Elévation niveau mer ●
Raréfaction PE naturels ● ●
Ensablement ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Baisse nappe phréatique ● ●
Salinisation, qualité ● ● ● ● ●
Terres ●
Inaptes, pauvres ● ● ● ●
Exploitation carrières ●
Erosion, ravinement ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Salinisation ●
Dégradation, perte fert. ● ● ● ●
Mouvements dunes
Désertification ●
Pâturages
Insuffisance ● ● ● ●
Dégradation, surpatur. ● ● ● ●
Occupation agricole ● ● ● ● ● ●
Espèces non appétées ● ● ●
Feux de brousse ● ● ● ● ● ● ●
Végétation ligneuse
Dégradation ● ● ● ● ●
Coupe abusive ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Défrichement ● ●
Biodiversité ●
Raréfaction poissons ● ● ● ●
Braconnage ●
Disparition faune ● ● ● ●
Assainissement ● ●
34
Rues insalubres ●
Latrines absentes ● ● ● ● ● ● ●
Déversement eaux rue ● ● ●
Évacuation eaux pluie ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Pollution ● ●
Absence décharge ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Pression démographiq. ● ● ●
Au Sénégal, l’érosion éolienne est considérée comme
étant liée à la fertilité des sols. Au Niger, l’érosion est hy-
drique et elle est mise en relation avec l’ensablement des
eaux de surface qui servent à l’irrigation mais aussi pour
l’approvisionnement hydrique des populations (Issoufou
2012 ; Yayé 2012).
Troisièmement, l’analyse locale signale la basse qualité
des eaux liée à la présence de chlore ou de fluor (Gawane,
Ndiebé Gandiol) et de sodium (Ouahigouya, Nguigmi et
Gagnick) présents au-delà des limites fixées par
l’Organisation Mondiale de la Santé. Au Sénégal, 41% des
PLHA enregistrent les caractéristiques physico-chimiques
des nappes aquifères. Les relevés effectués ont révélé que
dans 69% des cas, l’eau des nappes du Maestrichtien (supé-
rieures à 250 m), paléocène (supérieures à 100 – 250 m) y
compris aussi celle du Continental Terminal (15-50 m) pré-
sente des chlorures, fluorures ou sodium au-dessus des li-
mites fixées par l’OMS et celles établies par l’Union Euro-
péenne résultant de qualité médiocre ou inadaptée à la con-
sommation des personnes. Malgré tout les populations re-
courent à l’eau de la nappe phréatique voire aux eaux su-
perficielles.
Quelques écarts importants concernent aussi les dyna-
miques environnementales. En ce qui concerne les res-
sources forestières, les PANE parlent de dégradation sans
fournir de détails sur les facteurs qui la génèrent sauf la sé-
cheresse et l’exploitation.
35
Fig. 3 – Burkina Faso et Niger, 1960-2009. Glissement vers Sud de
l’isohyète annuelle des 500 mm de 1960 au 1990 (gris) et de 1991 au 2009
(noir) et localisation des communes étudiées (points noir) (source : USGS,
élaboration de S. Braccio)
Par ailleurs, la littérature existante a récemment mis
l’accent sur les processus de régénération de la végétation
arborée, présentés carrément comme un reverdissement du
Sahel (Abdoulaye et al 2006) mais les expériences observées
se trouvent aux limites méridionales de la bande sahélienne
où la pluviométrie est clairement favorable. A l’inverse,
deux tiers des collectivités locales indiquent la coupe abu-
sive de la végétation ligneuse même si celle-ci ne soutient
pas cette dynamique avec des informations plus précises.
La méthodologie est cependant disponible comme je l’ai
montré dans l’étude sur Téra, Niger (Tiepolo 2011).
Les cadres nationaux ne remarquent pas le changement
climatique. Au cours des vingt dernières années la baisse
de la pluviométrie porte l’isohyète des 500 mm à glisser
36
jusqu’à 80 kilomètres vers le sud dans la région de Zinder
au Niger, notamment dans le département de Margaria,
exposant ainsi des territoires qui, auparavant, n’avaient pas
de problèmes de pluviosité aux aléas sahéliens où les sé-
cheresses se répètent (fig. 3). Les PDC sont beaucoup plus
spécifiques. Dans un cas sur trois, ils mentionnent la mau-
vaise répartition, la chute ou la fluctuation du cumul plu-
viométrique annuel et se réfèrent à la constatation de
vagues de chaleur. De la même manière, ceux-ci signalent
la réduction des espaces pastoraux due aux feux de brousse
et à l’expansion du front agricole.
2. Les informations utilisées par les collectivités locales
pour connaître l’environnement
Quels sont les instruments utilisés par les collectivités
locales pour connaître l’état et les dynamiques de
l’environnement ? J’examinerai sous ce profil l’échantillon
de 20 PDC sahéliens (tableaux 5 et 6).
L’aspect le plus fréquemment documenté par les PDC
est l’évolution de la pluviométrie au fil du temps : cumul
annuel (80% des cas) et nombre de jours de pluie (55%). La
série ne dépasse pas les dix ans et seuls les PDC de la der-
nière génération, c.-à-d. ceux rédigés après 2008, présentent
une série plus longue qui va parfois jusqu’à 20 ans. Les
températures sont analysées dans 15% des cas sous forme
de moyennes mensuelles sur une seule année.
La nature des sols est rarement traitée à l’aide de cartes
ou avec la quantification des surfaces correspondantes (un
cas sur quatre).
37
Tab. 5 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. Indicateurs environne-
mentaux plus fréquemment utilisés dans les 20 PDC
Indicateur Fréquence (max 20)
Climat
Pluviométrie totale annuelle, mm 16
Sols
Type 5
Occupation, Ha 5
Eaux
Profondeur de la nappe phréatique, m 13
Qualité 3
Ressources halieutiques
Prises, T 1
Végétation arborée
Espèces, noms 16
Assainissement
Réseau eaux pluviales, m 3
Localités et population
Nombre 13
Population, n 8
Accroissement de la population, % 6
Pour les eaux, dans deux cas sur trois, la profondeur de
la nappe phréatique est fournie ainsi que celle fossile et les
éventuels obstacles rencontrés pour les atteindre, comme la
présence de couches rocheuses.
En ce qui concerne la végétation arborée, une liste des
principales espèces ligneuses présentes est presque tou-
jours dressée.
Le cadre décrit concerne l’ensemble des 20 cas. En réali-
té, les PDC sont plutôt hétérogènes. Les sénégalais, par
exemple, tels que rédigés entre 2003 et 2005, présentent un
dispositif analytique plus structuré de ceux du Niger. Il y a
ensuite des informations qui ne concernent pas strictement
l’environnement mais la pression qui est exercée sur ce der-
nier. Le nombre de la population des localités est indiqué
uniquement dans 40% des cas et le taux de croissance dans à
peine 30% des cas.
38
Tab. 6 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2001-2010. Informations utilisés dans
20 PDC de la bande sahélienne: 1. Dori, 2. Ouahigouya (Burkina Faso ), 3.
Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Garhanga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9.
Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Toumour (Niger), 13. Agnam Civol, 14.
De Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17. Ndiébène Gandiol, 18. Ndiéne Laga-
ne, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal)
Indicateur environnement Collectivité locale
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Année validation 08 09 07 04 05 06 06 06 03 05 0604 11 10 03 05 10 01 04 09
Sup. km2 *1 000 2,5 6,5 3 0,7 2,5 0,82,4 0,60,40,10,2 1 0,20,12,7
Localités, n ● ● ● ● ● ● ●
Climat
Pluviométrie an, mm ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Jours de pluie, n. ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Temp. Mensuelle, mm ● ● ●
Terres
Type, Ha ● ● ● ● ● ● ●
Occupation, Ha ●
Cultivable, Ha ●
Eaux
Qualité ● ● ●
Mares, n. ● ● ● ● ● ●
Profond. nappe, m ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Couverture eau, % ●
Halieutiques
Prises, T/an ●
Espèces noms ●
Pâturages et forêts
Classés, Ha ● ●
Espèces, noms ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Espèces dispar., noms ●
Végé. herbacée, noms ● ● ● ●
Faune, noms ● ● ● ● ● ● ●
Assainissement
Boues vidange ●
Réseau eaux pluie, m ● ● ●
Latrines publiques, n ●
Bac ordures, n ●
Population totale, n ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ●
Localités, n ● ● ● ● ● ● ● ●
Accroissement an, % ● ● ● ● ●
39
En effet, dans le Sahel, les collectivités locales sont des en-
tités récentes qui souvent ne correspondent pas aux limites
d’entités administratives précédentes comme les cantons, sur
lesquels il existe une série de relevés du nombre d’habitants.
Il s’avère donc difficile, comme cela a été souligné (Braccio
2009), de connaître leur population passée en utilisant, par
exemple, les recensements généraux de la population mais
cela n’est pas impossible. Par conséquent, dans les PDC les
taux d’écart de la population au cours des années sont calcu-
lés en appliquant aux communes des taux courants de crois-
sance relatifs à des entités administratives supérieurs aux-
quels ceux-ci appartiennent : départements voire régions. La
rareté des informations s’explique par les ressources dispo-
nibles pour les recueillir. Je me réfère avant tout au dit
« capital humain ». A Bagaroua, au Niger, il n’y a pas en-
core de « services techniques communaux ». Par contre, il
existe « quelques services techniques décentralisés de
l’État… mais le service de l’agriculture, de l’élevage, de
l’environnement ne comptent qu’un seul agent chacun »
(RN, Commune rurale de Bagaroua 2005 : 9).
3. Lacunes dans les connaissances locales
de l’environnement sahélien
L’analyse de 20 PDC montre l’utilisation à des fins de
gouvernance des connaissances locales sur l’environnement.
Celles-ci s’avèrent insuffisantes en ce qui concerne l’état de
l’environnement, rares sur les dynamiques et presque
inexistantes en ce qui concerne les relations entre les diffé-
rents facteurs environnementaux.
Observons quelques exemples. Partons du climat. La
pluviométrie décrite au moyen d’une brève série de préci-
pitations totales annuelles ne suffit pas à identifier un éven-
tuel changement climatique. En revanche, il est important
40
d’analyser les précipitations journalières pour juger une
saison agropastorale. Parfois, une saison pluvieuse par le
cumul total annuel présente des intervalles trop longs entre
les pluies et durant ces intervalles, les cultures et la végéta-
tion en général, en absence d’irrigation, souffrent et meu-
rent. Par contre, un cumul annuel bas peut s’avérer mieux
réparti (Tiepolo 2011: 142). Il s’agit ensuite de mettre en re-
lation les précipitations avec les besoins des cultures plu-
viales et de la végétation. Les températures ne font pas
l’objet d’analyse dans les PDC même si celles-ci sont rele-
vées localement. Dans ce cas aussi, une analyse historique
journalière permettrait de vérifier l’évolution des vagues de
chaleur en termes de plus grande fréquence et de durée du
phénomène. La série de relevés pluviométriques est géné-
ralement disponible auprès des stations météorologiques
qui, généralement, conservent des données bien au-delà de
la décennie qui est habituellement utilisée dans les PDC et
elles conservent également les données sur les précipita-
tions journalières.
Parlons maintenant des sols. Les PDC nigériens, no-
tamment, n’indiquent aucun chiffre à cet égard. A l’inverse,
60% des PDC sénégalais représentent les différents types de
sols sur des cartes ou en fournissent les superficies. A cet
égard, il convient de rappeler que ces informations permet-
traient, associées à d’autres, d’identifier les terres aptes aux
cultures, celles aptes à la plantation forestière, aux pâtu-
rages en plus de celles qui devraient faire l’objet d’une pro-
tection totale.
L’étendue des zones forestières reste inconnue. Pour ne
pas parler de leur contenu. Les inventaires forestiers sont
conduits uniquement au moment de la gestion des massifs
forestiers, par ex. dans le cas des marchés ruraux du bois au
Niger. D’une manière plus générale, on constate l’absence
d’informations sur la consistance des espaces végétalisés
41
(arborés, buissonnants, herbacés) : dans un cas seulement
on trouve des informations exhaustives à cet égard. Le pro-
blème n’est pas que les informations n’existent pas. Les
PDC sénégalais fournissent des cartes d’occupation du sol
mais celles-ci sont rarement utilisées pour mesurer
l’étendue de ces types d’occupation du sol.
Pour la biodiversité, les informations sont relativement
sommaires et quoiqu’il en soit, sporadiques. Par exemple,
les ressources halieutiques demeurent inconnues, sauf la
quantité de poisson exporté vers le Nigeria telle qu’elle est
relevée à Nguigmi par le Service des douanes.
Jusqu’à présent, les informations principales sont four-
nies sous forme d’état des lieux, sur une seule année.
La mesure des dynamiques n’est pas fondée sur des me-
sures mais sur les opinions de la population locale. La po-
pulation (40% des cas) et l’occupation des sols (5%) font ex-
ception.
Enfin, les informations susmentionnées ne sont pas
mises en relation entre elles c’est-à-dire qu’elles n’ont pas
été utilisées pour une analyse cherchant à identifier les rai-
sons des dynamiques ou pourquoi certaines dynamiques
intéressent des parties spécifiques du territoire communal
plutôt que d’autres. Et parmi ces causes, il conviendrait de
prendre en compte l’effet des actions de conservation, de
protection et de restauration de l’environnement précé-
dentes, aspect presque ignoré par les PDC. Enfin il serait
aussi utile de vérifier quels types de sols sont concernés par
la diminution des surfaces forestières et ceux concernés par
l’expansion du front agricole et s’il existe une relation entre
l’augmentation de la densité démographique (celle-ci étant
présentée comme un problème dans 15% des cas) et la di-
minution des zones forestières.
42
4. Vers un système d’information local
sur l’environnement
Les informations utilisées dans les PDC sont collectées
auprès de certaines institutions et de vive voix auprès des
habitants eux-mêmes de la part du cabinet chargé de rédi-
ger le plan. Il est rare que ces informations proviennent de
la Commune. La gouvernance environnementale locale
pourrait être améliorée, s’il était possible d’utiliser un sys-
tème d’information local sur l’environnement auprès de la
Commune ou dans une agence de soutien aux communes
comme cela se fait au Sénégal avec les Agences régionales
de développement (ARD) que le Burkina Faso s’apprête à
introduire. Le fait de s’arrêter sur l’organisation d’un tel
centre de service aux communes sort du cadre de cette
étude. En revanche, il est intéressant de raisonner sur
l’amélioration des informations locales dans la perspective
de créer un système d’information local. Trois voies sem-
blent possibles. La première est l’identification, l’évaluation
et l’utilisation éventuelle des informations sur
l’environnement recueillies et sauvegardées par les systèmes
d’information nationaux ou transnationaux. La deuxième
est d’expérimenter le suivi communautaire des dyna-
miques environnementales. La troisième est la photo-
interprétation d’images satellitales haute définition.
4.1. Systèmes d’information nationaux et transnationaux
Il y a au moins quatre secteurs sur lesquels une synergie
avec les systèmes d’information nationaux peut s’avérer
utile à l’échelle locale.
Avant tout les informations sur les sols. Les cartes pédo-
logiques réalisées par l’ORSTOM dans les années 1960 et
1970 sur les Pays sahéliens et celles réalisées dans le cadre
43
de différents projets de développement (surtout au Mali)
constituent une avancée des informations sur
l’environnement si elles sont interprétées par un pédo-
logue. Celles-ci sont disponibles auprès de plusieurs minis-
tères et depuis quelques années, elles sont finalement ac-
cessibles gratuitement en ligne sur le site de la cartothèque
de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et
de celui de l’European Soil Map Digital Archive (EU-
DASM). Les différentes classes de terre peuvent être uni-
fiées pour identifier les terres non adaptées aux cultures,
celles plus adaptées au pâturage et à la foresterie ainsi que
celles adaptées à la seule protection intégrale. L’échelle des
cartes pédologiques est au 1 : 500.000 pour le Burkina Faso,
pour le Niger et pour le Sénégal. Dans certaines zones, les
cartes pédologiques sont à l’échelle 1 : 100.000 (Ader Dout-
chi Maggia, Gourouol–Beli et Lac Tchad au Niger, Siné Sa-
loum au Sénégal), à l’échelle 1 : 50.000 (pour la Mare
d’Oursi au Burkina Faso) et aussi à l’échelle 1 : 5.000 pour
certaines parties particulièrement intéressantes du point de
vue agronomique comme le département de Keita (Niger)
et les environs de Dori (Burkina Faso).
Un deuxième aspect uniquement traité, pour le moment,
par certains PDC sénégalais, concerne l’occupation du sol.
La couverture arborée et herbacée ainsi que les pâturages
sont surveillés par satellite par différents organismes. Le
Centre Régional Agrhymet du Comité permanent Inter-
états de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS), basé à
Niamey calcule l’indice de végétation sur images SPOT
VGS à 1 km de résolution et produit des comptes-rendus
mensuels permettant de surveiller l’évolution de la cam-
pagne agricole dans toute la région sahélienne. Le projet
Africover de la FAO propose sa propre classification et sa
cartographie à partir d’images Landsat à 30 m de résolu-
tion. Ces images peuvent fournir une toute première base
44
en l’absence d’informations plus détaillées. L’unité
d’analyse est cependant trop grande (pixel 30 m au sol)
pour répondre aux nécessités locales comme l’a montré
Braccio (2011: 174). Celle-ci ne permet pas de localiser les
lentes transformations de la végétation dans les zones fo-
restières typiques des climats semi-arides, ni les jachères et
encore moins de saisir l’impact des ouvrages de conserva-
tion des eaux et des sols. Sans parler de la variation du
nombre de plantes dans les massifs forestiers aménages par
les marchés ruraux du bois.
Le troisième secteur est celui de l’assainissement. Les re-
censements de la population et de l’habitat, effectués envi-
ron tous les dix ans, depuis la fin des années 1970, peuvent
aider dans la mesure où ils constatent le dispositif des
égouts utilisé par les ménages et qu’ils indiquent cette in-
formation par petites unités d’analyses (ilot). Aucun dispo-
sitif d’évacuation des eaux pluviales ou de ramassage des
ordures n’est signalé. Par ailleurs, dans les trois Pays, dans
le milieu rural, ces infrastructures sont pratiquement
inexistantes.
Toutes ces informations ne présentent pas un intérêt en
soi mais seulement si elles sont croisées entre elles et si elles
sont mises en relation avec la pression anthropique.
Le quatrième secteur est donc celui de la population. Les
informations sont collectées à l’occasion des recensements
généraux et elles sont conservées par les instituts nationaux
de statistiques. Aujourd’hui encore, au moins trois relevés
sont disponibles (années 70, 80, 90 ou 2000). Au Niger, le
quatrième recensement de la population est prévu pour
2012. Les données concernent l’échelle locale dans la me-
sure où celles-ci sont désagrégées géographiquement par
petites unités territoriales. Les données des trois premiers
recensements sont publiées à l’échelle du département. Des
répartitions plus précises sont possibles. Pour vérifier les
45
dynamiques du peuplement, il est nécessaire de disposer
d’une observation dans le temps et cet exercice, comme
nous l’avons déjà fait remarquer pour le Niger, est faisable
même s’il est entravé par l’état où se trouvent actuellement
les archives de l’INS (Braccio 2009 : 158).
4.2. Le suivi communautaire
L’idée de mobiliser la communauté pour le suivi de la
biodiversité (forêts, plantes, poissons et coquillages) n’est
certes pas nouvelle (WWF). Il s’agit d’une manière rapide
et économique d’évaluer l’évolution des espèces présentes
sur le territoire communal. Souvent, les communautés ont
une connaissance approfondie des plantes et des animaux
présents sur le territoire rural où elles vivent. Le suivi part
de l’établissement d’un inventaire, exactement comme cela
se fait à l’occasion des marchés ruraux de bois, quand il
s’agit de contrôler les espèces présentes dans un massif fo-
restier faisant l’objet d’un aménagement. Mais dans ce cas,
on fait en revanche appel à la population locale. Des
groupes spécialisés sur les forêts, les plantes, la faune ter-
restre, les ressources halieutiques sont identifiés. Il est en-
suite demandé à chaque groupe d’identifier les espèces
présentes et celles qui abondent ou qui sont en diminution.
Cette activité exige que chaque groupe soit composé de
personnes connaissant bien l’environnement en question :
agriculteurs, bûcherons, éleveurs, pêcheurs etc. Le suivi
n’est pas seulement un moyen de recueillir rapidement des
informations mais c’est aussi une occasion de discuter avec
la communauté de la question de la biodiversité et de la
mettre en relation avec d’autres phénomènes comme le
changement climatique et la déforestation.
46
4.3. Photo-interprétation d’images satellites haute définition
Les images Landsat ou SPOT ne sont pas en mesure de
capturer les détails qui nous intéressent à l’échelle locale et les
relevés au sol ne sont pas non plus en mesure de le faire étant
donnée l’ampleur des collectivités territoriales sahéliennes :
les coûts seraient incompatibles avec le budget communal et
les temps dépasseraient les délais de rédaction des PDC éta-
blis par la loi. Dans ces conditions, la photo-interprétation
d’images satellitaires à haute résolution s’avère extrêmement
précieuse pour mesurer l’état de l’environnement local. Les
archives de reprises des images satellites sur différentes zones
du Sahel peuvent, en outre, permettre de mesurer les dyna-
miques environnementales sur une période de temps qui ac-
tuellement est d’environ dix ans. Les images satellites haute
définition saisissent l’état de la couverture arborée et végétale
et s’avèrent utiles pour vérifier au moins trois composantes
environnementales très importantes :
• La densité arborée par unité de superficie qui permet de
mesurer les effets de la coupe abusive hors des zones pro-
tégées ou aménagées (Tiepolo 2011) ou celle excessive à
l’intérieur de ces dernières. De plus, celle-ci se prête à
l’évaluation de l’impact des ouvrages de CES en termes
de reforestation et de régénération du manteau herbacé.
• Les jachères. C’est une pratique peu étudiée par la littéra-
ture et souvent décrite par les populations locales comme
étant en voie de disparition en raison de la pression an-
thropique. Nos analyses à Téra, Niger, au moyen de la
photo-interprétation d’images satellites haute définition
prises à la fin des la saison des pluies ont constaté exac-
tement l’inverse : sur un zone de 36 km2 les champs en
culture ont la même superficie des jachères (47%) (fig. 4).
• Les dynamiques de la végétation ripicole, indicatrice des
processus d’érosion et de l’impact de la sécheresse.
47
Fig. 4 – Commune de Téra, Niger, 17 septembre 2011. Jachères identifiées
sur une image satellitale GeoEye avec définition au sol de 0,50 m (gris foncé
en haut) et représentées sur l’ensemble des 36 km2 du territoire photo-
interprété (banc en bas) (photo-interprétation de P. Cantamessa, élaboration
de S. Braccio)
Conclusion
Un premier pas pour vérifier l’état et les dynamiques de
l’environnement à l’échelle locale a été fait en 1996 à
l’occasion du PANE sénégalais en interpellant les départe-
ments et les communes sur l’état de l’environnement.
Entre 2003 et 2006, la rédaction des premiers plans de
développement communaux a encouragé les collectivités
territoriales à collecter et à utiliser les connaissances locales
sur l’environnement aux fins de l’aménagement. Nous
avons vérifié que ces connaissances dans le cas des 20 PDC
analysés ici, confirment en bonne partie ce que l’on savait
sur l’environnement sahélien à l’échelle nationale mais elles
signalent aussi certains aspects peu connus. Par exemple, la
48
coupe abusive de la végétation arborée omniprésente,
l’ensablement des points d’eau naturels, la faible qualité
d’eau potable, l’absence d’assainissement dans des centres
ayant des dimensions parfois relativement importantes :
entre 11.000 et 24.000 habitants au Niger et entre 20.000 et
73.000 au Burkina Faso.
Ceci étant, différentes lacunes subsistent comme la quali-
té de l’air et les dynamiques de presque tous les composants
environnementaux.
L’absence de ces informations se reflète sur la qualité de
l’aménagement, comme nous le verrons au chapitre sui-
vant. Mais ce que l’on rencontre de façon systématique, in-
dépendamment de la qualité des informations disponibles,
c’est l’absence de croisement entre les dynamiques qui
pourraient s’avérer utile pour la prise de décision. Le dia-
gnostic semble, en bref, être préparé plus dans le respect de
lignes directrices ministérielles qui précisent quels thèmes
couvrir avec l’état des lieux, que pour comprendre des dy-
namiques pertinentes pour l’aménagement environnemen-
tal. Un exemple est la variation de l’occupation des sols en
relation avec la qualité de ces derniers et en relation avec la
pression démographique. Il semble que les questions aux-
quelles l’état de l’environnement de son évolution au fil du
temps qui devraient permettre de planifier et de proposer
des scénarios de réponse sont absentes.
Comment y remédier ? Avant tout en introduisant des
critères de qualité des données. Et ensuite en rendant la col-
lecte, le traitement et la communication systématiques. Le
long de ce parcours, il est possible de prévoir quatre
étapes : un système d’information environnemental local
(SIEL), la rédaction de PDC pilotes de nouvelle génération,
la mise à jour des lignes directrices ministérielles pour la
rédaction des PDC et le renforcement des capacité de plani-
49
fication des cabinets auxquels la rédaction des PDC est ha-
bituellement confiée.
Les systèmes d’information nationaux peuvent fournir
des informations utiles à l’échelle locale. Des programmes
pour le suivi de la part de la population elle-même peuvent
être lancés. La photo-interprétation d’images satellitales à
haute définition peut fournir un grand nombre
d’informations utiles. Il reste une inconnue : qui doit
l’effectuer et de qui doit gérer les informations. Les com-
munes présentent un personnel technique encore trop res-
treint. Peut-être que le dispositif sénégalais des ARD, dont
le modèle est prévu aussi au Burkina Faso, pourrait être
utile au Niger et en tous les cas, il mériterait que ces capaci-
tés soient renforcées à travers des formations en géoma-
tique.
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53
Aménagement et gestion locale de l’environnement
au Sahel
Maurizio Tiepolo1
Ce chapitre est consacré à l’aménagement et à la gestion
de l’environnement à l’échelle locale. Nous employons
l’expression « aménagement local » d’après la définition
proposée par le Code de gestion des collectivités territoriales
(CGCT) de chacun des trois Pays pris en considération. Le
Code établit les compétences de régions et communes en ma-
nière d’environnement (tab. 1). De la même manière, par
gestion locale, nous entendons toujours en référence au Code
toutes les activités de prévention, de protection, de conserva-
tion et d’autorisation relatives au « cadre de vie » et aux res-
sources naturelles (RN) confiées, en vertu de la loi, aux ré-
gions, aux communes, aux autorités coutumières ou aux or-
ganisations de base. Parmi les activités de gestion figure le
suivi-évaluation (à noter que cette activité sera traitée ex-
pressément dans le sixième chapitre).
La gestion de l’environnement fut initialement axée sur le
suivi de la sécheresse et des cultures et sur l’alerte précoce à
l’échelle nationale. La gestion environnementale à l’échelle
des villages ou des grappes de villages fut introduite par les
projets d’aide au développement qui suivaient l’approche de
« gestion des terroirs » et par les projets forestiers du début
des années 80.
Depuis la fin des années 90 au Sénégal, et plus tard au
Mali, au Niger et au Burkina Faso, les compétences en ma-
tière de gestion de l’environnement furent transférées aux
1 Je remercie Silvia Macchi (Université de Rome « La Sapienza ») et
Vieri Tarchiani (IBIMET CNR) pour les commentaires.
54
administrations locales. Les outils les plus utilisés furent les
Plans de développement communaux (PDC). A côté de ces
instruments qui auraient dû identifier les priorités locales
grâce à des études diagnostiques, ont apparu d’autres outils
de gestion environnementale (plan pilote de gestion envi-
ronnementale, Agenda 21 local, Plan local d’hydraulique et
d’assainissement). Malgré tout, la gestion environnementale
locale reste peu incisive. En ce qui concerne les effets positifs
pour l’environnement, le débat demeure animé. Les parte-
naires techniques et financiers (PTF) ont des positions diffé-
rentes sur les bénéficiaires de leur action. Ils se montrent par-
fois plus en faveur du soutien direct des organisations de
base que des collectivités territoriales (CT).
Ce chapitre a deux objectifs. Avant tout, identifier
l’apparition de la gestion locale de l’environnement liée à
l’évolution de l’action et de l’aide internationale dans ce sec-
teur. Deuxièmement, identifier les approches et les pratiques
innovantes d’aménagement et de gestion locale de
l’environnement au Burkina Faso, au Niger et au Sénégal.
On vérifiera le niveau d’affirmation de la gestion locale de
l’environnement ainsi que les approches récentes (para-
graphes 1, 2, 3 et 4) et les obstacles qui entravent leur réalisa-
tion (paragraphe 5). Enfin, nous fournirons des recommanda-
tions aux ministères, aux communes et aux PTF.
On a exploité la vaste documentation disponible sur la
législation environnementale relative aux trois Pays, comme
le matériel toute aussi important sur les plans environne-
mentaux à tous les niveaux (plans de développement com-
munal, plans locaux d’hydraulique et d’assainissement,
plans de développement communaux sectoriels sur l’eau po-
table et l’assainissement). En raison d’aspects spécifiques
comme les indicateurs environnementaux, on a en outre uti-
lisé les principaux documents produits par les organismes
internationaux compétents (OCDE, UNEP).
55
Tab. 1 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 1997-2001. Compétences des régions
et des communes en matière d’aménagement et gestion de l’environnement
selon le CGCT
Compétences en matière d’environnement Burkina
Faso
Niger Sénégal
État / aménagement
Politique environnementale, PANA ●
Contrôle pollutions et nuisances, PANA ●
État /gestion
Application politiques protection environnement, CE ●
Situation de l’environnement ●
Veille actions entreprises, compatibilité écologique, CE ●
Région / aménagement
Plan pour l’environnement, L 2002-012 ●
Plan d’action forestière, L 2002-012 ●
Plan de gestion des risques, L 2002, 012 ●
Création aires protégées, L 2002-012 ●
Région / gestion
Protection et entretien forets et zones naturelles, L… ●
Autorisation de défrichement domaine forestier, L… ●
Protection de la faune ●
Commune / aménagement
Plan communal action environnement, CGCT ●
Plan d’action pour l’environnement et GRN, L 2002-013 ●
POS, CGCL ●
Commune / gestion
Préservation et protection, L 2002-013 ●
Protection eaux et ressources halieutiques, CGCT ●
Régime d’accès aux points d’eau, CGCL ●
Enlèvement élimination déchets ménagères, CGCT ●
Autorisation coupe de bois, CGCT ● ●
Délivrance permis de chasse, de pèche, CGCT ●
Conservation GRN ● ●
Prévention et lutte contre les feux de brousse, CGCT ● ● ●
Protection faune, CGCT ●
Avis installation établissements insalubres, CGCT ● ●
56
En ce qui concerne la gestion environnementale, on a re-
cueilli 40 projets lancés entre 2001 et 2012 (dont 22 conclus)
par 12 partenaires techniques et financiers multi-bilatéraux
et, enfin, on a exploité différentes interviews effectuées au fil
des ans à des administrateurs locaux.
1. Á l’aube de la gestion de l’environnement
Les premières formes de protection de l’environnement
sahélien remontent à l’époque coloniale et consistent en la
conservation des forêts, une mesure importante dans la ré-
gion. La première législation remonte à juillet 1900. Celle-ci
prévoyait des permis, des concessions, des zones et des es-
pèces protégées. Les populations locales pouvaient cultiver,
prélever du bois, faire pâturer le bétail hors des conces-
sions. La délivrance des concessions était une prérogative du
gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française
(AOF)2 et la coupe des espèces devait être autorisée par le
commandant du cercle.
Si, d’une part, dans certaines colonies de l’AOF, le bois
était une ressource tellement abondante qu’il était possible
de l’exporter, en revanche, dans le Sahel semi-aride, celui-ci
manquait et devait être conservé pour éviter que le climat
ne dégrade les sols.
La discipline de conservation est redéfinie par le décret
1935 établissant un Code forestier pour l’Afrique Occidentale
Française, qui classait les forêts en deux catégories : les forêts
classées, domaine privé de l’État, et les forêts protégées en
2 L’AOF (1895-1958) était composée, dans sa configuration finale, de
la Côte d’Ivoire, du Dahomey (devenu le Bénin), de la Guinée, de la
Haute Volta (devenue le Burkina Faso), de la Mauritanie, du Niger,
du Sénégal, du Soudan français (devenu le Mali). Du point de vue
administratif, la Fédération était divisée en colonies puis en cercles
(101), qui à leur tour étaient divisés en cantons.
57
prévoyant une répression sévère des délits. Quelques zones
classées devinrent ensuite des parcs ou des réserves de
faune. Le classement interdisait à la population d’utiliser la
forêt. Dans les trois Pays, la surface classée était supérieure à
celle transformée en parcs ou en réserves de faune. Au Bur-
kina Faso, les quinze premières forêts classées remontent à
1936. Celles-ci couvraient une zone de 1.583 km2 soit 15% de
la surface qui sera classée. Au Niger, la première forêt clas-
sée fut celle de Gorou Bassounga qui se trouve dans
l’actuelle région de Dosso (1937) et qui représente une sur-
face de 100 km2, c.-à-d. 15% du total qui sera classé.
Les autres modalités de conservation furent les parcs et les
réserves de faune partielles ou totales. Sur le total des parcs et
des réserves actuels, au moins 2/3 remontent à l’époque colo-
niale. Mais en termes de superficie, la zone protégée repré-
sente à peine 11% de celle d’aujourd’hui. La situation varie
beaucoup d’un Pays à l’autre. Au Sénégal, 78% de la surface
transformée en parc est créée à l’époque coloniale, au Niger
uniquement 2%. A la seule exception du Niger, le classement
ne se poursuit pas après les indépendances nationales et il
laisse en héritage 376 aires classées sur 80.582 km2, dont ¾ au
Sénégal (tab. 2). Les zones protégées sont désormais conver-
ties en zones bâties, en champs ou en zones occupées par une
végétation arborescente extrêmement dégradée et, en tous les
cas, sujettes à des coupes abusives. Seulement pour une partie
infime, celles-ci sont conservées et gérées, pour la plupart
pour la production de bois de chauffage ou du bois d’œuvre.
La Direction des eaux, des forêts et de la chasse, chargée de
faire respecter les textes, est créée d’abord en Mauritanie et au
Sénégal (1937), puis au Soudan (Mali) (1938), en Haute Volta
(Burkina Faso) (1948) et enfin au Niger (1953). Avec les indé-
pendances nationales, la politique forestière était loin de cons-
tituer une priorité, comme le montre l’utilisation d’à peine 3%
du budget du Niger pour le secteur forestier.
58
Tab. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. Aires classées (sources : RS, CSE
2012, Ada et Mahamane 1999, Nikiema et al 2001, RS, MEPN 1997)
Aires Burkina Faso* Niger* Sénégal* Σ
Aires classées
Km2 10 810 7 406 62 376 80 592
n° 66 97 213 376
Avant 1960, n° 66 77
Parcs, réserves de faune
Km2 30 969 181 141 11 794 223 04
Avant 1960, Km2 11 987 2 960 9 180 24 127
* BF 68, 13.029 km2, N 90, 6.247 km2, S 242, 10.557 km2 selon Tarchiani et al (2008).
Au Niger les premières actions de reboisement remon-
tent à 1966, autour des centres urbains les plus importants.
2. Grandes sécheresses et embryons de législation
environnementale
En 1972-73 et en 1981-84, deux grandes sécheresses font
passer au second plan tout autre problème environnemental
dans le Sahel. Au Niger, l’isohyète des 300 mm, que Durand
jugeait être la limite Nord pour la culture du millet et du
sorgho, s’est déplacée vers le Sud de 80 km à 110 km. « La
première conséquence de la sécheresse est la disparition de
la végétation herbacée… les pâturages se réduisent toujours
plus, obligeant le bétail à parcourir des distances toujours
plus longues entre les points d’eau. Pendant ces trajets, les
bêtes, surtout les bovins, meurent d’épuisement et de faim »
(Durand 1977: 396-97).
A la quantité totale insuffisante de pluie, s’ajoute sa dis-
tribution inégale au fil du temps. En juin, on enregistra de
fortes pluies. Les cultures se développèrent mais les pluies
revinrent uniquement en août et donc les cultures séchèrent
entre temps. D’autre part, la crue du Niger n’arrivait pas et
compromettait les cultures de décrue. Bref, la sècheresse
59
toucha le monde rural dans son ensemble : élevage, cul-
tures pluviales et de décrue. En 1973, la production du millet
chuta d’un tiers par rapport à 1971, celle du sorgho de cin-
quante pour cent et celle des arachides chuta de soixante-dix
pour cent. Le nombre de bovins fut divisé par deux (Voir : 18-
21). La nappe d’eau diminua. Les arbres de gomme arabique
moururent. Le phénomène ne toucha pas seulement le Niger.
On estime que la sécheresse provoqua, dans le Sahel, la mort
de plus de cent mille personnes et qu’elle rendit 750 mille per-
sonnes totalement dépendantes de l’aide alimentaire au Mali,
en Mauritanie, au Niger et en Haute Volta (l’actuel Burkina
Faso) et qu’elle réduisit d’un quart le bétail obligeant ainsi la
population nomade à se sédentariser dans les centres urbains
(MacDonald 1986).
Le Séminaire sur les sociétés pastorales en Afrique Tropi-
cale, qui se tint à Niamey en novembre 1972 sous la prési-
dence de Théodore Monod et le Colloque de Nouakchott de
décembre 1973 sur la désertification au Sud du Sahara atti-
rèrent l’attention sur le phénomène. Le 15 décembre 1972 fut
créé le Programme des Nations Unies pour l’Environnement
(PNUE) suite à la Conférence des Nations Unies à Stockholm.
Les ministères et des organismes régionaux furent créés
ayant pour objectif de réduire les conséquences de la séche-
resse, de promouvoir l’autosuffisance alimentaire, d’accélérer
le développement économique (CILSS, 1973), de développer
la recherche (INSAH, 1976) et d’améliorer l’aide (Club du Sa-
hel, 1976). Ceux-ci prirent le relais des Nations Unies
(UNDRC, UNSO) qui étaient intervenues d’urgence afin de
réduire les conséquences de la sécheresse (Carozzi, Tiepolo
1996 : 20). C’est durant cette phase que le dispositif législatif
en matière d’environnement fut mis en place. Au Niger, par
exemple, une nouvelle législation forestière vit le jour (RN
1974) (tab. 3). Celle-ci montrait l’empreinte coloniale dans son
maintien de la gestion étatique. Dans les forêts classées, les
60
communautés locales conservaient les droits de passage, de
récolte du bois mort, des fruits, de la gomme, des plantes mé-
dicinales mais elles ne pouvaient ni acquérir ni vendre des
terres, ni couper les arbres, ni cultiver ou allumer des feux
(Elbow, Rochegude 1991 : 10). Au Sénégal, en revanche,
l’ensemble du domaine forestier était zone classée (L 74-46 18
juillet 1974). Le ramassage de bois mort, la collecte de fruits,
de paille à usage personnel, exigent l’obtention d’un permis
délivré gratuitement par le Service des eaux et forêts. Le pâtu-
rage était autorisé. Tous les droits d’usage étaient suspendus
dans les parcs nationaux, réserves naturelles intégrales et
partielles. Il était interdit de défricher et cultiver dans le do-
maine forestier.
Entre 1972 et 1991, le Sénégal et le Niger ont étendu les
zones protégées. Des parcs nationaux et des réserves de la
faune furent ainsi institués, correspondant à 35% de la zone
protégée actuelle dans les trois Pays (tab. 4). Au Sénégal, la ré-
serve de la faune du Ferlo Nord et Sud (1972), les parcs natio-
naux du Delta du Saloum (1976) et de la Langue de Barbarie
(1976) virent le jour ainsi que 4 réserves plus petites (Gou-
moul, Papenguin, Mbour et Bandia). Au Niger, l’immense
parc national de l’Aïr-Ténéré (1991) fut créé. Ce dernier, avec
ses 77.360 km2, compte parmi les plus vastes parcs d’Afrique
(tab. 4).
Entre 1981 et 1989, le Code forestier fut suivi de ceux de
l’eau, de l’environnement, de la chasse/faune et des res-
sources minières.
En ce qui concerne la gestion locale de l’environnement,
celle-ci relevait du corps forestier dans les sièges régionaux et
départementaux qui, d’habitude, avaient un seul agent pour
des territoires extrêmement étendus (Carozzi, Tiepolo 2006).
61
Tab. 3 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2012. Outils de gestion environne-
mentale selon niveau administratif (sources : RBF, MECV 2010, RBF 2007,
RBF, MAHRH 2006, RBF, MMCE 2005, RBF 1997, RBF, MET 1994, RN,
MHELCD 2005, RN, MHELCD 2005, RN, MP 1998, RN 1998, RS, ME
1997, RS 2001, RS 1999, RS, MEPN 1998, RS 1986, RS, PRESDAS -)
Niveau Burkina
Faso
Niger Sénégal
État
Stratégie croissance accélérée et DD 2010 - -
Stratégie réduction pauvreté 2004 2002, 2007 2003, 2011
Stratégie n. développement durable 2003a - 2005
Stratégie développement rural 2004 2006 …
Stratégie n. par diversité biologique - 2000 -
Stratégie énergie domestique 2005 1992 2008
Lettre politique sectorielle environnem. - - 2004
Lettre politique rurale décentralis. 2002 …
Prog. action national adaptation CC 2007 2006 2006
Plan action aires protégées 2012 - -
Plan d’action foncier 1996
Plan décennal action environnement 2008 2005 -
Plan a. national environnement 2007 2005 1998
Plan action forestier - - 1993
Plan action national LCD GRN 2000 1985, 2000 1998
EIE 1997
Code de l’eau 2001 1993 1981
Code/L. chasse / faune - 1962 1986
Code environnement 1997 1998 1983*, 2001
Code forestier 1997 1974, 2004 1965-1998
Code minier/pétrolier 2003 2007 1989
Code pastoral 2002 - -
Code pêche - 1971 1998
Code rural 1993
Loi biosécurité - - 2009
Région
Plan action environnementale - - 1997
Commune
PLHA 2012 - 2007
Plan action spécifique environnement … - -
PCD/PLD 2007-2009 2003-2007 2001-2008
Profil environnemental/État de l’envi. 2004-2008 2006 1993-2005
A21L 2004 - 2006
*Non opérationnel faute de décret d’application.
62
Tab. 4 – Burkina Faso, Niger et Sénégal, 2012. Aires protégées : Parcs natio-
naux (PN), Parc national marin (PNm), Réserves de faune (RF), Réserve oi-
seaux (RO) (sources : RBF 2012, UICN, PAPACO 2009, UICN 2010)
Burkina Faso Niger Sénégal Année Km2 Type
Kaboré Tambi 1936 2 427 PN
Deux Balés 1937 566 PN
Mare aux hippos 1937 192 RO
Arly 1950 1 300 RFp
W 1954 2 200 PN
Basse Casamance 1954 50 PN
Niokolo Koba 1954 9 130 PNm
Singou 1955 1 920 RFT
Pama 1955 2 230 RFp
Gadabedji 1956 760 RFT
Bontioli 1957 127 RFT
Nabéré 1957 365 RFp
W 1957 2 350 PN
Kourtiagou 1957 510 RFp
Dosso 1962 3 065 RFp
Tamou 1962 756 RFT
Ndiael 1965 465 RF
Komoé Leraba 1968 2 800 PN
Madjoari 1970 170 RTF
Sahel 1970 16 000 RSP
Djoudj 1971 160 PNm
Ferlo N-S 1972 1 121 RF
Delta du Saloum 1976 760 PN
Langue Barbarie 1976 8 PN
Iles Madeleine 1976 0,4 PN
Guembeul 1983 7 RSF
Popenguine 1986 10 RN
Mbour 1987 … REE
Bandia 1990 15 RN
Aïr et Ténéré 1991 77 360 RNN
Bamboung 2003 68 AMP
Mare d’Oursi 2006 12 R
Termit TinToumma 2012 97 000 RNN
A ceux-ci s’ajoutent les agents des services hydrauliques,
des ressources animales, du génie rural. Ces services décen-
tralisés établissaient un programme annuel qu’ils présen-
taient au ministère compétent pour le financement. Mais les
63
ressources étaient tellement réduites que, dans nombre de
cas, elles ne permettaient même pas d’acquérir un moyen
de transport, outil essentiel pour exercer les fonctions du
service.
Au début des années 80, le CILSS a commencé à envisager
la possibilité d’un aménagement des forêts naturelles ; c’est-à-
dire de protéger les forêts des feux de brousse et du pâturage,
d’organiser la production de bois et d’étudier les incidences
de la coupe. L’aménagement fut lancé dans les forêts classées.
En 1987, à Bamako, un séminaire régional fut consacré à
l’élaboration des plans d’aménagement forestier (Adamou et
al. 2005). Au Sénégal, selon le Code forestier de 1965, la popu-
lation entre 15 ans et 65 ans était mobilisée pour lutter contre
le feu, principal facteur de détérioration des forêts.
Au Burkina Faso l’un des axes majeurs de la politique inté-
rieure du président Thomas Sankara (1983-1987) a été
l’environnement. Les « Trois luttes » contre la coupe abusive
du bois, la divagation des animaux, les feux de brousse com-
prenait la sensibilisation des populations afin qu’elles
s’engagent dans un reboisement massif (ceinture verte de
Ouagadougou, bosquets de village), dans l’utilisation de
foyers améliorés, dans la récolte de semences forestières, dans
la création de pépinières et de bosquets entretenus par les
écoles. A cette époque date la création du Ministère de l’eau.
Rien qu’au Sénégal, entre 1975 et 1992, une trentaine de
projets de développement forestier a été réalisée. Ces der-
niers couvrent toutes les régions et de nombreux domaines
(Bontinot 2001). Au Niger, la participation de la population
locale fut invoquée par l’Engagement de Maradi (mai
1984). Par conséquent, à partir de 1989 la politique fores-
tière a été caractérisée par une plus grande responsabilisa-
tion des communautés locales dans la gestion des res-
sources de leur terroir. En 1992 le Pays adopta la Stratégie
énergie domestique (SED), liant la gestion de l’offre en bois
64
à celle de la demande énergétique. La SED repose sur
l’élaboration de schémas directeurs d’approvisionnement en
bois énergie, sur le transfert de la perception des taxes fores-
tières de l’État aux communautés locales, sur le transfert de
la gestion des massifs forestiers aux populations et sur le
renforcement du contrôle forestier (Tarchiani et al. 2008).
Au Sénégal le président Abdou Diouf souhaita un effort
de reboisement à l’occasion de la Conférence interministé-
rielle de 1984. A l’exception du Niger qui avait adopté un
Plan de lutte contre la désertification, dans les autres Pays, la
partie stratégique et d’aménagement de l’environnement
restait encore peu développée.
Cette période s’achève avec la création, en 1991, du Fonds
pour l’Environnement Mondial (FEM) doté d’1 milliard de
dollars financés par différents Partenaires techniques et fi-
nanciers (PTF). Initialement, le FEM est mis en place par la
Banque Mondiale, par le PNUD et par PNUE. En 1994, le
FEM devint un organisme autonome. Son action a pour ob-
jectif de mettre en œuvre les conventions sur la diversité bio-
logique (1992), sur le changement climatique, sur les pol-
luants organiques persistants (2001), sur la lutte contre la dé-
sertification (2003). Pendant les vingt premières années
d’activité, le FEM a financé, comme nous le verrons dans les
paragraphes suivants, un nombre élevé de projets dans la
bande sahélienne des trois Pays étudiés.
3. De Rio aux OMD : la naissance de la gestion locale de
l’environnement, 1992-2000
La gestion locale de l’environnement a des origines mul-
tiples et lointaines. Les performances insatisfaisantes de la
gestion centralisée de l’aide au développement des Années
70 sont une des explications les plus fréquemment présen-
tées pour justifier la nouvelle orientation de l’aide publique
65
au développement (APD). Celle-ci est également mentionnée
dans l’International development and food assistance Act of 1978,
promulgué sous la présidence de Carter. Cette loi exige, au-
jourd’hui encore, de développer l’aide américaine aux
pauvres à travers des institutions au niveau local. Cepen-
dant, il ne faut pas négliger la politique des privatisations
(thatchérisme) qui, dans les années 80, de façon consciente
ou non, a contaminé l’APD. Mais si l’aide au développement
devait être retirée à l’état central à qui devait-elle être trans-
férée ? La réponse est probablement à l’origine du processus
de décentralisation, du moins en Afrique occidentale.
La gestion locale trouve sa consécration avec le Sommet de
la Terre organisé par les Nations Unies à Rio en 1992 et avec
l’Action 21 (ainsi appelée parce qu’elle se réfère au XXIe
siècle) qui introduit la participation et le localisme dans la ges-
tion environnementale :
« Les organismes des Nations Unies, les autres organisations in-
ternationales de développement et de financement et les gouverne-
ments devraient… prendre… les mesures suivantes… :
b) fournir une assistance technique et financière au titre du renforce-
ment des capacités des populations autochtones et de leurs com-
munautés ;
renforcer les programmes de recherche et d’éducation visant à :
i) mieux comprendre le savoir faire et l’expérience des populations
autochtones en matière de gestion de l’environnement
ii) Renforcer l’efficacité des systèmes de gestion des ressources des
populations autochtones…
d) s’associer aux efforts des populations autochtones et de leurs
communautés en ce qui concerne la gestion des ressources et les
stratégies de conservation… notamment les programmes
d’utilisation des données et d’autres informations à l’appui des
projets de développement durable » (Nations Unies 1993 : 199).
Sur la base des recommandations du Sommet de Rio, une
procédure appelée Agenda 21 Local (A21L) fut mise au point
66
pour établir des plans stratégiques locaux pour
l’environnement (ICLEI et al. 1996). Au milieu des années
2000, le CNUEH-Habitat soutenait la création de quelques
A21L au Sénégal (RS, MUAT 2004). La démarche commença
avec la création du comité municipal A21L qui fut suivie par
la rédaction du Profil environnemental, c’est-à-dire l’état de
l’environnement secteur par secteur : eaux (approvisionne-
ment, eaux souterraines), air, forêts et espaces végétaux, as-
sainissement (déchets liquides et solides, réseau d’eaux plu-
viales) et patrimoine culturel. Les risques furent ensuite iden-
tifiés et décrits. Ces derniers concernaient les problèmes de
ruissellement et d’érosion du sol, la désertification,
l’insalubrité avec leur impact sur la morbidité et parfois la pol-
lution industrielle/artisanale. Enfin, le Profil présentait les
protagonistes pouvant être mobilisés, des acteurs institu-
tionnels aux associations. Le rapport consentait enfin
d’identifier les thèmes prioritaires sur lesquels organiser les
consultations. Des groupes de travail sectoriels furent donc
créés sur chacun de ces thèmes avec pour objectif de formu-
ler des stratégies et des plans d’action thématiques. Les fo-
rums communautaires avaient, eux, pour rôle de valider les
stratégies et les plans d’action. Ensuite, les Profils de projet
de démonstration étaient formulés. C’est à ce moment-là
seulement que l’A21L était préparé. Celui-ci récapitulait les
stratégies et les plans d’action thématiques. Il était validé par
des consultations pour la mise en œuvre de l’A21 et des
pactes urbains étaient établis comprenant les engagements
de chaque protagoniste. Enfin, des rencontres avec les PTF
étaient organisées afin de trouver les financements néces-
saires à la réalisation des projets de démonstration.
En 2002, selon l’ICLEI (2012), 80% des A21L étaient en vi-
gueur dans les économies avancées. Dans les trois Pays objet
de ce livre, l’A21L est une expérience essentiellement sénéga-
laise, urbaine et circonscrite à sept villes (tab. 5).
Gerer l'environnement au sahel
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Gerer l'environnement au sahel

  • 1. Maurizio Tiepolo (sous la dir. de) ÉVALUER L’ENVIRONNEMENT AU SAHEL Premières réflexions sur la gouvernance locale L’Harmattan Italia via Degli Artisti 15 10124 Torino L’Harmattan 5-7 rue de L’École Polytechnique 75005 Paris
  • 2. Traduction de l’italien au français de RGB avec la collaboration d’Elisa Pelizzari L’Harmattan en Afrique Harmattan Bénin - ISOR Quartier Gbèdjromèdé - Rue Agbélenco, Lot 1247 I 01 - Cotonou-RP (01 BP 359) christian_dablaka123@yahoo.fr Harmattan Burkina Faso Av. Mohamar Kadhafi 12 BP 226 - Ouagadougou / harmattanburkina@yahoo.fr Harmattan Cameroun Immeuble Don Bosco - BP 11486 - Yaoundé / harmattancam@yahoo.fr Harmattan Congo 67 Av. E. Patrice Lumumba BP 2874 - Brazzaville / harmattan.congo@yahoo.fr Harmattan Côte-d’Ivoire Rés. Karl - Cité des Art 03 BP 1588 - Abidjan / etien_nda@yahoo.fr Harmattan Guinée Almamya Rue Ka 028 BP 3470 - Conakry / harmattanguinee@yahoo.fr Harmattan Rép. Démocratique du Congo c/o Faculté des sciences sociales, pol. et admin. BP 243 - Université de Kinshasa (XI) / matangilamusadila@yahoo.fr Harmattan Mali Rue 58, Porte 203 (face au Palais de la Culture) Badalabougou-Bamako / poudiougopaul@yahoo.fr Harmattan Mauritanie Espace El Kettab - 472 Av. Palais des Congrès BP 316 - Nouakchott / mdlemkettab@yahoo.com Harmattan Sénégal Ville Rose - Rue Diourbel X Rue G, Point E BP 45034 - Dakar-Fann / senharmattan@gmail.com Harmattan Togo 1771, boulevard du 13 Janvier BP 414- Lomé / gerry@taama.net harmattan.italia@agora.it / www.editions-harmattan.fr ISBN (Italia) 978-88-7892-219-8 - ISBN (France) 978-2-336-00013-8 © L’Harmattan Italia srl (Torino), L’Harmattan sas (Paris), 2012
  • 3. SOMMAIRE Abréviations 7 Introduction, Maurizio Tiepolo 13 PREMIÈRE PARTIE La gestion locale de l’environnement al Sahel 21 1. État et dynamique de l’environnement à l’échelle locale au Sahel, Maurizio Tiepolo 23 2. Aménagement et gestion locale de l’environnement au Sahel, Maurizio Tiepolo 53 3. Planification locale de l’environnement au Burkina Faso : acquis et contraintes, Pamoussa Ouedraogo 101 4. La gestion locale de l’environnement au Niger, Zalia Boubacar 123 5. La gestion locale de l’environnement au Sénégal et dans la région de Louga, Médou Diarra Fall, Modou Fall, Maguèye Thiane 161 SECONDE PARTIE Évaluer la gestion de l’environnement au Sahel 189 6. Suivi-évaluation des plans et des projets locaux pour l’environnement au Sahel, Maurizio Tiepolo 191 7. Évaluation ex-post de la composante ‘environnement’ du PIP de Ziniaré, Burkina Faso, 2007-2011, Clémence Ouedraogo 227 8. Suivi de la composante « assainissement » du PCD de Pouytenga, Burkina Faso, 2011-2015, Ambasda Paul Sandwidi 253
  • 4. 9. État des lieux et suivi de la composante sécurité alimentaire du PRD de la région Plateau Central, Burkina Faso, 2011-2015, Pascal Compaoré 277 10. Évaluation ex-post du Projet « Sécurité alimentaire », région de Tahoua, département d’Illéla, Niger, 2009- 2011, Moussa Illiassou 307 11. Évaluation à mi-parcours du projet de gestion de la mare de Tabalak, Niger, 2011-2012, Ibrahim Issoufou 335 12. Évaluation ex-post des actions de préservation contre l’ensablement du barrage de Téra, Niger, 2006-2011, Oumarou Yayé 351 13. Évaluation à mi-parcours de la composante « aménagement participatif » des forêts du PRODER, région de Fatick, Sénégal, 2010-2011, Alassane Ndour 371 14. État des lieux et dispositif de suivi de la composante agriculture du PIC de Diouloulou, Sénégal, 2012- 2017, Malik Diatta 401 15. Évaluation à mi-parcours du projet d’adaptation à l’érosion côtière dans les zones vulnérables à Joal-Fadiouth, Sénégal, 2011-2012, Mamadou Sarr 425 Conclusion, Maurizio Tiepolo 449 Postface, Mario Artuso 457 Les auteurs 459 Liste des images 461 Index des noms 467 English Summary 475
  • 5. 13 Introduction Maurizio Tiepolo Lorsqu’on parle d’environnement au Sahel, la mémoire retourne aux terribles sécheresses de 1972-74 et de 1981-84 qui dévastèrent d’immenses territoires et obligèrent à l’exode provisoire les populations et qui touchèrent grave- ment les productions agro-sylvo-pastorales. Au cours des années suivantes, d’autres catastrophes amenèrent cette région à faire les titres des journaux. Tout d’abord les inondations de zones arides. Dans la nuit du 31 août au 1er septembre 2009, à Ouagadougou (Burkina Faso) il tomba 263 mm de pluie. De mémoire d’homme, la ville n’avait jamais eu autant d’eau. Selon les estimations, l’inondation fit 8 morts, rendit 24.700 maisons inhabitables et porta à évacuer 150.000 personnes. Au cours des jours qui suivirent, ce fut le tour d’Agadez (Niger) où les inonda- tions ne touchèrent pas moins de 25.000 personnes. L’exploitation incontrôlée des ressources naturelles est responsable d’importantes altérations environnementales. Ainsi, l’extraction d’uranium dans le nord du Niger est ju- gée comme responsable de la pollution évidente de la nap- pe d’eau où puisent les établissements humains de la ré- gion. La pêche, le long de la côte atlantique, appauvrit les ressources halieutiques et, dans le même temps, pollue les villes côtières avec les déchets et les fumées générés par la transformation du poisson ; en outre, elle épuise les res- sources forestières de l’intérieur pour alimenter les fours de cuisson en charbon. Jusqu’à présent, les catastrophes environnementales ont été des événements médiatisés et connus.
  • 6. 14 D’autres changements, moins évidents, transparaissent à travers les histoires du paysan et du pêcheur sur la dispari- tion de la faune, l’appauvrissement des pâturages, la réduc- tion de la diversité biologique. Mais l’environnement est également urbain et les risques proviennent alors de l’absence d’élimination et de l’élimination incorrecte de dé- chets : ordures, déchets industriels, déchets hospitaliers, eaux pluviales, boues des fosses septiques. Bien que dans le Sahel la conservation de certaines res- sources naturelles remonte à l’époque coloniale, ce fut seu- lement à partir des grandes sécheresses que des politiques et des plans d’action environnementaux furent établis. C’est de cette époque que datent les organismes régionaux chargés d’observer, de prévoir, d’alerter et d’intervenir à l’échelle régionale (CILSS, Club du Sahel, INSAH) et ceux nationaux (ministères de l’eau, de l’environnement). La contribution de la communauté internationale à la création de ces appareils fut déterminante et permit à chaque Pays de disposer de structures gouvernementales et consultati- ves qui se dotèrent peu à peu d’une législation environne- mentale, de stratégies, de politiques et de plans nationaux ainsi que d’un dispositif de gestion décentralisé. En contrepartie, la mise en œuvre des orientations na- tionales de la part des collectivités locales auxquelles les compétences en matière d’environnement furent transfé- rées, présente des retards. L’expérimentation d’outils de gestion locale de l’environnement comme l’Agenda 21 loca- le, les Plans régionaux, les Plans d’action locale pour l’environnement ne manque pas. Toutefois, il s’agit d’expériences sporadiques. Les collectivités locales sahé- liennes préfèrent organiser l’action à travers la composante environnementale du Plan de développement communal (PDC), outil largement utilisé dans la région et établi de fa- çon participative. L’application du PDC dépend du trans-
  • 7. 15 fert des fonds du budget de l’État aux collectivités locales. Étant donnée l’impasse de ce dispositif, l’application, est généralement limitée à moins que les fonds de la coopéra- tion décentralisée ou bilatérale n’arrivent en aide. Ceci est le contexte au moment où nous écrivons. Mais il n’est pas dit que la conservation, la protection et l’usage de l’environnement continueront de cette façon. Par exemple, si le Burkina Faso se dotait d’un dispositif performant de suivi-évaluation du Fonds de fonctionnement des collecti- vités territoriales, à partir de 2013 ce seraient les fonds eu- ropéens qui alimenteraient le Fonds. Les communes pour- raient donc disposer de ressources pour réaliser les actions environnementales prévues dans leur PDC. De plus, au cours des dernières années, sous l’impulsion des Nations Unies, chaque gouvernement et ceux qui au- jourd’hui sont appelés les Partenaires techniques et finan- ciers (PTF) investissent des ressources considérables dans la gouvernance environnementale. Par ce terme, on entend le processus qui mobilise l’Etat, le marché et la société civile au niveau global, national et local pour formuler des politi- ques environnementales et leur application. Ce processus implique la définition de règles et de procédures visant au développement environnemental durable. Ce qui nous intéresse ici, c’est la gouvernance environ- nementale locale, c’est-à-dire l’activité exercée par les collec- tivités territoriales (régions, communes) pour préserver, pro- téger et utiliser l’environnement rural et urbain, entendue comme ensemble de ressources naturelles renouvelables et de « cadre de vie » (assainissement, rayonnements, paysage). Que savons-nous des dynamiques en cours dans les res- sources naturelles renouvelables sahéliennes à l’échelle lo- cale ? Est-il vraiment suffisant d’observer les variations de la végétation sur une centaine de kilomètres carrés pour af- firmer que le Sahel reverdit ? La nouvelle publiée sur le New
  • 8. 16 York Times, sur les sites internet de différents organismes et dans certains rapports donne de l’espoir. Mais ce n’est pas la vérité. Une même superficie analysée sur la même période dans une autre zone sahélienne d’une étendue analogue donne des résultats opposés. En réalité, nous savons peu de choses sur les dynamiques environnementales en cours après les états de l’environnement mesurés depuis environ dix ans. Et les collectivités locales connaissent encore moins les dynamiques de leur propre environnement. Les connaissances sont également insuffisantes en ce qui concerne les raisons de l’intensification de l’action environ- nementale, les modes de gouvernance locale de l’environnement et les résultats obtenus dans le Sahel. Ces questions sont à la base de ce livre. C’est l’ampleur du thème qui nous a poussés à restreindre l’étude à trois des huit Pays sahéliens d’Afrique occidentale. On a choisi le Burkina Faso et le Niger car ils représentent respectivement un Pays avec une petite superficie territoriale et un des Pays sahéliens les plus vastes et les plus peuplés, tous les deux internes. J’ai en- suite fait le choix du Sénégal : la façade atlantique du Sahel. Les objectifs fixés ont été plusieurs. Avant tout apprécier l’état et les dynamiques de l’environnement comme per- çues par les collectivités locales, souligner les lacunes, sug- gérer des remèdes. En second lieu, reconstruire les pierres milliaires de la gouvernance environnementale au Sahel servant de référence à l’apparition de la gouvernance loca- le. Puis, identifier les outils d’aménagement et de gestion locale de l’environnement. Troisièmement, évaluer l’impact et les obstacles rencontrés par ces outils. Et enfin, identifier et si possible, décrire d’éventuels remèdes. Pour décrire la gouvernance locale, il est nécessaire de clarifier au moins trois faits qui s’entrecroisent : - avant tout, la gouvernance environnementale internatio- nale martelée par les sommets, les rencontres et les décla-
  • 9. 17 rations sur l’environnement réalisés à partir de 1972 par les Nations Unies (ces événements sont à l’origine des po- litiques internationales pour l’environnement, des ac- cords multilatéraux, des engagements de chaque pays et des PTF) ; - deuxièmement, l’action des PTF à travers les projets dans le domaine de l’environnement (un volet peu étudié mal- gré les montants d’au moins 1,6 milliard d’euro investis dans les trois Pays de 2000 à aujourd’hui, dont 0,7 en bande sahélienne) ; - troisièmement, la gouvernance environnementale nationa- le, bouleversée, après 1996, par le processus de décentra- lisation administrative et politique (avec des temps et des modes différents d’un Pays à l’autre). Cet ouvrage se structure en deux parties. La première partie est consacrée aux dynamiques, à l’aménagement et à la gestion de l’environnement. Dès le chapitre initial, on y présente l’état des connaissances loca- les sur l’environnement en le comparant aux données des Plans d’action nationale pour l’environnement et aux be- soins d’aménagement. Après avoir examiné les sources d’information et les lacunes, trois possibilités sont propo- sées pour améliorer et pérenniser le système d’information local. Le deuxième chapitre porte notamment sur les origi- nes de la gouvernance environnementale, les changements d’approche survenus progressivement jusqu’à la naissance de la gouvernance locale, les obstacles rencontrés au cours de son déploiement. En ce qui concerne les ressources natu- relles renouvelables, celui-ci documente le passage d’une logique conversationniste à une logique d’utilisation dura- ble de l’environnement visant la réduction de la pauvreté et le développement local. Les trois chapitres suivants décri- vent les dispositifs, les compétences et les outils de planifi-
  • 10. 18 cation de l’environnement au Burkina Faso, au Niger et au Sénégal. La deuxième partie de ce livre est consacrée essentielle- ment au suivi et à l’évaluation des plans et des projets lo- caux pour l’environnement. En réalité, ces activités appar- tiennent en partie (évaluation) à l’aménagement et en partie (suivi) à la gestion. Mais leur importance est telle qu’elle justifie le démembrement et le développement séparé. Le cinquième chapitre introduit, avec la perspective histori- que, l’évaluation pour se concentrer ensuite sur les types de suivi-évaluation applicables aux projets et aux plans locaux d’environnement et il vérifie les obstacles auxquels l’évaluation environnementale locale se heurte aujourd’hui. De la même façon, les neuf courts chapitres suivants ras- semblent des évaluations (3 pour chaque pays) de Plans de développement régional (1), PDC (3) et des projets indivi- duels (5). Il s’agit de trois états des lieux avec un dispositif de suivi (identification des indicateurs comprise), 3 évalua- tions mi-parcours et 3 évaluations ex post. Comme on le verra, les aspects environnementaux évalués sont nom- breux. Ceux urbains concernent les dispositifs de drainage des eaux pluviales et des égouts (Pouytenga, Burkina Faso), le ramassage et le transport à la décharge des déchets (Zi- niaré, Burkina Faso), le nettoyage des plages urbaines pour éliminer les déchets de la pêche et la réduction de la pollu- tion de l’air dérivant de la transformation du poisson (Joal- Fadiouth, Sénégal). Pour les aspects ruraux, on va de la sé- curité alimentaire, composante du PDC qui intègre les ac- tions de préservation des eaux et des sols (région Plateau Central, Burkina Faso), à la gestion des forêts (région Fa- tick, Sénégal), en passant par le secteur agricole dans lequel on trouve les actions de récupération des terres salinisées (Diouloulou, Sénégal), par la prévention de l’ensablement des bassins hydriques avec des ouvrages de conservation
  • 11. 19 des eaux et des sols qui réduisent le ruissellement et donc, le transport du sol en aval (Tabalak et Téra, Niger). L’évaluation des neuf cas d’étude est destinée aux techni- ciens locaux qui ont suivi une formation spécifique au Poli- tecnico di Torino. Ces cas d’évaluation peuvent s’avérer utiles à d’autres techniciens afin d’enraciner la pratique de l’évaluation de l’environnement au Sahel. Le livre recueille les résultats d’une prospection sur la gouvernance locale de l’environnement réalisée avec une méthode de travail organisée en deux composantes. La première est la recherche, conduite au moyen d’une étude approfondie de la documentation, des compétences et des outils existants dans les trois Pays pris en compte avec des visites sur place, une synthèse effectuée par des experts de l’environnement sahélien, la collecte et l’analyse d’une cen- taine de projets dans le domaine environnemental. Ces ac- tivités ont été développées entre juillet 2011 et juillet 2012 dans le cadre du Programme de recherche scientifique d’intérêt national « Évaluer, planifier et gérer localement le territoire et l’environnement en Afrique sub-saharienne », projet « Plans d’action locale en Afrique occidentale : sys- tèmes de reporting et méthodes de planification » coordon- né par l’auteur. La seconde composante a impliqué la mise au point de la méthode d’évaluation de projets et de plans locaux, la formation de techniciens sahéliens au Politecnico di Torino, l’accompagnement pour l’évaluation de neuf instruments de planification locale de l’environnement. Ces activités ont été conduites en collaboration avec le 7e Mastère « Plans et projets » du Politecnico de Turin de juillet 2011 à mars 2012. De nombreuses personnes ont contribué à la réalisation de ces activités.
  • 12. 20 Pour la partie recherche, je dois remercier Zalia Boubacar, Médou Diarra Fall, Modou Fall, Pamoussa Ouedraogo et Maguèye Thiane pour avoir écrit les chapitres trois, quatre et cinq. Pour la partie formation et application, je voudrais remercier les personnes qui ont rendu possible la réalisation du 7e Mastère : Mar- cello Cavalcaselle pour les bourses d’études attribuées par la Direc- tion générale pour la coopération au développement du Ministère ita- lien des Affaires étrangères au Politecnico di Torino, Gennaro Genti- le, directeur de l’Unité technique locale auprès de l’Ambassade d’Italie à Dakar qui a permis la participation des candidats Sénégalais ainsi que Roberta Battista pour l’organisation logistique à Dakar. Je remercie également l’Ambassade d’Italie à Abidjan qui a permis aux candidats Burkinabés et Nigériens de participer. COSPE et LVIA ont proposé quelques candidats au Mastère et ont collaboré au succès de toutes les phases de la formation en Italie et sur place. Un remercie- ment spécial à Gianfranco Cattai, Marco Alban et Giovanni Armando (LVIA) ainsi qu’à Alessandra Brunelli et à Claudio Russo (COSPE). Je remercie également Marzia Sica qui a facilité le cofinancement de la Compagnia di San Paolo pour le Mastère. Enfin, je souhaite rappeler le personnel du Mastère du COREP, Emanuela Ovcin, responsable de la formation, Mario Artuso qui s’est chargé de la coordination com- plexe avec d’excellents résultats et Federica Piazza qui a organisé la logistique avec une grande efficacité. Silvia Bergamasco (COSPE) et Giancarlo Palma (Unité technique centrale de la DGCS – Ministère des Affaires étrangères) ont apporté une importante contribution à la méthode d’évaluation ensuite utilisée dans chaque cas d’étude et je leur en suis particulièrement reconnaissant. Je suis débiteur envers Silvia Macchi (Université de Rome « La Sapienza »), Vieri Tarchiani (IBIMET-CNR) pour le temps qu’ils ont consacré à la lecture du premier, du deuxième et du sixième chapitres et pour les précieuses considérations qui ont enrichi ma vision des événements environnementaux et dont j’espère avoir tenu compte de façon adéquate. Enfin je remercie Eleonora Nadal pour la mise en pa- ge du livre, Paolo Cantamessa et Enrico Ponte pour la réalisation des figures et Sarah Braccio (Politecnico di Torino) pour la couverture, les cartes des chapitres 1, 2, 6 et l’élaboration des données.
  • 13. 23 État et dynamique de l’environnement à l’échelle locale au Sahel Maurizio Tiepolo1 Par le terme environnement, on entend les ressources naturelles (RN) renouvelables et non renouvelables (air, terre, eau, ressources halieutiques, minérales, pâturages, forêts, faune et biodiversité) et le « cadre de vie », à son tour organisé en assainissement (déchets liquides, solides et gazeux, eaux pluviales), rayonnements et paysage2. En Afrique occidentale, dans les Pays traversés par le Sahel3, l’environnement est soumis à des menaces constantes : pression anthropique et pastorale sur les RN, pluies hors saison ou intenses, élévation du niveau de la mer, séche- resse, prédateurs des cultures, exploitation minière. Lors- que ces menaces se vérifient dans des économies aussi pauvres et non préparées à les affronter, celles-ci condui- sent à des inondations, à la destruction des cultures, à des famines et à une pollution à grande échelle. Quand l’économie est fondée sur les RN, la gouvernance de l’environnement devient importante pour le développe- ment, et revêt également un intérêt théorique et pratique par- ticulier. 1 Je remercie Sarah Braccio (Politecnico di Torino) et Vieri Tarchiani (IBIMET-CNR) pour les commentaires et les informations. 2 Selon les Plans d’action nationale pour l’environnement (PANE) du Burkina Faso, du Niger et du Sénégal. L’OCDE (2008) et le PNUE (2012) englobent dans l’environnement aussi le climat, la couche d’ozone et les ressources énergétiques. 3 Burkina Faso, Tchad, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger et Sénégal.
  • 14. 24 Fig. 1 – Burkina Faso, Niger et Sénégal. Subdivision en collectivités territo- riales et isohyètes des 200 mm et des 500 mm (1971 - 2000) délimitant la bande sahélienne (source isohyète : Centre Régional Agrhymet-CNR CeSIA, élaboration de S. Braccio) Chaque RN présente des dynamiques qui lui sont propres (tab. 1). Les terres sahéliennes, par exemple, sont soumises à l’érosion, à la salinisation et à la perte de fertili- té. Ces phénomènes se produisent suite à l’utilisation de terres inadaptées aux cultures (expansion incessante du front agricole en zone pastorale), en raison d’une surexploi- tation du sol pour la production d’arachides, de riz, de co- ton, de canne à sucre (Burkina Faso, Sénégal), de biocarbu- rants (Sénégal) et aux pratiques de ramassage des résidus des cultures.
  • 15. 25 Tab. 1 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. État et dynamiques environnementaux ma- jeurs selon l’État de l’environnement ou le PANE (sources : RBF, MECV 2008, RN, CPM, CNEDD 2005, RS, MEPN 2005, RS, MEPN 1997) Composante État ou dynamique BF N S Climat Baisse pluviométrie ● Eau Baisse apports eaux de surface Espèces envahissantes Pollution, baisse nappe Ensablement cours d’eau Envasement retenues eaux ● ● ● ● ● Halieutiques Réduction Destruction habitat de reproduction Pollution Surexploitation Envahissement des eaux par les plantes ● ● ● ● ● ● Terres Érosion Érosion littoral Salinisation Faible rendement Contamination ● ● ● ● ● ● ● ● Mines Dégradation eaux souterraines et superficielles Pollution atmosphérique Destruction forêts ● ● ● ● Pâturages Réduction biomasse Diminution espèces appétées Dépassement capacité de charge Réduction espace pastoral Feux de brousse ● ● ● ● ● ● Forêts Forte pression Dégradation (sécheresse, surexploitation) Destruction mangroves Réduction diversité biologique ● ● ● ● ● ● Faune Régression, recul de biodiversité Réduction d’habitat ● ● ● Biodiversité Érosion génétique ● ● Déchets liquides Latrines hygiéniquement inadéquates Inorganisation gestion boues de vidange ● ● ● Déchets solides Industries sans mesures protection Pas de décharges contrôlées Collecte déchets inferieure au 50% ● ● ● ● ● ● Eaux pluviales Réseau très faible ● ● Paysage Occupation illégale des espaces Prolifération d’espèces envahissantes ● ● ●
  • 16. 26 La conservation des eaux et des sols (CES) est une solu- tion reconnue : elle implique la reforestation, également avec des espèces d’arbres utiles comme l’Acacia senegal qui donne la gomme arabique. Mais il s’agit d’une opération introduite par les projets de développement rural que chaque agriculteur, habituellement, ne reproduit pas parce que celle-ci est trop coûteuse (llliassou 2012) ou pour éviter que le champ ne lui soit soustrait par le propriétaire une fois que l’amélioration a porté ses fruits. C’est justement pour conjurer cette éventualité que les projets encouragent la formation de comités de gestion des terres récupérées. Au fil des ans, d’autres techniques ont été testées avec suc- cès, comme la régénération naturelle, la protection des bords des champs avec des haies et des bandes d’herbe. Les bassins hydriques sont soumis à ensablement et à la pollution. Cette dernière incidence concerne aussi les nappes d’eau ; si celles-ci entrent en contact avec le percolât des décharges et des latrines. Les ressources halieutiques subissent la pollution des eaux et celles marines diminuent et s’appauvrissent. La cause est la mauvaise gestion de la pêche : du nombre de personnes qui la pratiquent jusqu’à l’abandon des équipe- ments de pêche (filets fantômes), pratique qui entraîne une réduction de la biodiversité (Macfadyen, Huntington 2010). Les pâturages sont en régression en raison de l’avancée du front agricole et enregistrent une diminution des es- pèces herbacées appétibles. Les activités minières peuvent polluer les eaux des nappes d’eau où elles s’approvisionnent. C’est ce qui semble se produire au Niger, au nord d’Agadez (Collectif Tchinaghen 2008). Les forêts s’éclaircissent de façon accélérée en raison de la demande croissante en bois de chauffage, en charbon et en bois d’œuvre de la part d’une population en augmenta-
  • 17. 27 tion. Bien que des dispositifs de gestion locale des forêts aient été introduits, comme les marchés ruraux du bois au Niger et les foyers améliorés à basse consommation la de- mande reste bien supérieure à la capacité de régénération des forêts. En ce qui concerne le cadre de vie, les réseaux d’évacuation des eaux pluviales sont encore rares et ceux-ci sont mal entretenus. Par conséquent, dès la plus petite pluie, des inondations se produisent. D’autre part, les habi- tats occupent désormais aussi les bas fonds qui sont les plus exposés aux inondations comme à Dakar (Dasylva 2009). Les eaux récupérées ne sont pas ensuite épurées. Les égouts sûrs font défaut (même dans les capitales se sont les latrines qui prévalent) et l’élimination des boues des fosses septiques est désorganisée. Le ramassage des ordures mé- nagères est peu diffus et le transport dans les décharges n’est pas contrôlé. Les activités industrielles qui existent désormais dans plusieurs villes n’éliminent pas les déchets de façon sécurisée. Le cadre dressé sommairement jusqu’à présent a été tiré du Plan d’action nationale pour l’environnement (PANE) du Burkina Faso et du Sénégal, ainsi que de l’État de l’environnement du Niger et de la littérature en la matière disponible. La gouvernance environnementale locale ne peut ce- pendant pas se limiter à ces connaissances mais elle doit partir de l’état et des dynamiques vérifiées dans chaque contexte. Faire le point sur ces connaissances et les comparer avec celles indiquées par les PANE et dans la littérature est l’objectif de ce chapitre (paragraphe 1). Les connaissances sur l’environnement peuvent être perfectionnées. Je vérifie- rai les procédures utilisées localement pour les regrouper (paragraphe 2). Ensuite, j’identifierai les limites des sources
  • 18. 28 d’information actuelles et leur utilisation (paragraphe 3) afin de vérifier quelles contributions peuvent venir des sys- tèmes d’information nationaux, du suivi communautaire et de la photo-interprétation d’images satellitales haute défi- nition pour la création d’un système d’information local sur l’environnement (paragraphe 4). J’ai utilisé différentes sources d’information pour effec- tuer ce parcours analytique. L’existence de nombreux Plans de développement communal (PDC) dans tout le Sahel m’a facilité la tâche. Cet outil se base sur un diagnostic qui con- cerne aussi l’environnement. Je ferai largement recours aux PDC en ce qui concerne les paragraphes 1 et 2. Aux fins de cette étude, la bande sahélienne est définie par les isohyètes annuelles de 200 mm et de 500 mm telles qu’elles ont été vé- rifiées au cours de la période 1971-2000. A l’intérieur, on trouve 246 collectivités réparties entre communes urbaines et communautés rurales. Parmi ces collectivités locales, j’ai choisi de façon aléatoire un échantillon à 8% tant pour le Ni- ger, que pour le Sénégal, Pays dont une partie importante du territoire national se trouve dans la bande sahélienne (fig. 2, tab. 2) et à 6% pour le Burkina Faso. L’importance moindre de ce dernier est liée au fait qu’au moment où j’écris, la plu- part des communes sahéliennes du Burkina Faso ne possède pas ou n’a pas encore approuvé le PDC. Une fois les PDC ré- cupéré pour chacune des communes tirées au sort, j’ai con- trôlé que la série des précipitations totales annuelles de la dernière décennie tombait pour la plus grande partie des années sous les 500 mm. L’échantillon se compose de 10 communes nigériennes, 8 communes sénégalaises et 2 com- munes burkinabés. Pour l’assainissement, j’ai fait référence à 39 Plans Locaux d’Hydraulique et d’Assainissement rédi- gés au Sénégal entre 2007 et 2011 pour autant de communes de la bande sahélienne.
  • 19. 29 Le quatrième paragraphe est rédigé en se référant à ce que j’ai découvert sur les sources d’information locales et na- tionales durant mes expériences de suivi-évaluation de l’environnement au Niger et au Sénégal entre 2004 et 2012 et à la littérature disponible. 1. État et dynamique de l’environnement à l’échelle locale L’état et les dynamiques de l’environnement ébauchées dans l’introduction se fondent sur les PANE et sur l’État de l’environnement. L’état et les dynamiques énoncées valent aussi à l’échelle locale? La question est pertinente dans la me- sure où le cadre national de l’environnement n’est pas compo- sé comme une mosaïque des PDC mais avec d’autres sources d’information4. Nous partirons donc précisément de la connaissance lo- cale de l’état et des dynamiques de l’environnement. Ce parcours sera effectué au moyen de l’analyse des diagnos- tics des PDC qui rendent compte de l’état, et parfois, aussi des dynamiques environnementales locales. Il s’agit de rapports presque simultanés aux PANE. Par conséquent, il sera aussi possible de comparer les résultats produits par les niveaux de connaissances nationales et locales. J’ai identifié 20 PDC de communautés rurales et de com- munes urbaines disposant d’un territoire essentiellement ru- ral de façon aléatoire à l’intérieur de la bande sahélienne. Deux tiers des PDC ont été préparés entre 2001 et 2006. 4 Dans le cas du PANE sénégalais, en 1995, 30 ateliers départementaux furent organisés, mobilisant 2.300 participants pour discuter des contraintes, des priorités et des expériences de GRN et des mécanismes financiers pour soutenir les initiatives locales. Mais pour rédiger le diagnostic environnemental des données complémentaires furent recueillies dans un questionnaire envoyé à 175 collectivités locales (RS, MEPN 1997: 11).
  • 20. 30 Fig. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. Localisation des 20 communes et communautés rurales objet d’analyse dans la bande sahélienne : 1. Dori, 2. Ouahigouya (Burkina Faso), 3. Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Garhan- ga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9. Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Toumour (Niger), 13. Agnam Civol, 14. Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17. Ndiébène Gandiol, 18. Ndiéne Lagane, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal) (source isohyète : Centre Régional Agrhymet et IBIMET-CNR ; élaboration de S. Braccio) Tab. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2012. Communes et communautés ru- rales dont le territoire administratif se trouve entièrement ou partiellement dans la bande sahélienne (isohyète 200-500 mm, 1971-2000) (élaboration de S. Braccio) Bande sahélienne BF N S BF+N+S Superficies, % du territoire national 15 34 43 32 Collectivités locales qui s’y trouvent entièrement, n 20 67 70 157 partiellement, n 15 46 28 89 total, n 35 113 98 246 échantillon, n 2 10 8 20 échantillon, % 6 8 8 8
  • 21. 31 Tab. 3 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. État et dynamiques de l’environnement locale selon les PDC Composante environnementale État Dynamiques Fréquence max : 20 Pluviométrie Insuffisante 11 Fluctuations, baisse 6 Eau Qualité baisse 5 Ensablement sources 12 Terres Érosion 9 Appauvrissement 3 Pâturages Feux de brousse 7 Occupation agricole 6 Végéta. ligneuse Coupe abusive 11 Assainissement Évacuation eaux absente 10 Décharge absente 8 Latrines rares ou absentes 7 Le tiers restant a été rédigé entre 2008 et 2011 L’analyse locale met en évidence des caractères structuraux de l’environnement sahélien. Tout d’abord il y a la pluviomé- trie insuffisante (55%) et les signes du changement clima- tique : chute et fluctuation du cumul annuel, vagues de chaleur (tab. 3). Il y a ensuite la basse qualité des eaux (tab. 4) et parfois la profondeur de la nappe, la présence de couches rocheuses qui empêchent de l’atteindre (30% des cas) et la pauvreté des sols (15%). De plus, celle-ci révèle des évolutions. Celle la plus fréquemment signalée est le proces- sus d’ensablement des sources hydriques superficielles (60%), dû à l’érosion des sols (45%) avec les conséquences bien connues sur l’abreuvage du bétail. Une autre dynamique signalée est la coupe abusive de la végétation ligneuse (55% des cas), qui conduit, dans un cas sur quatre, à la détérioration de la ressource. L’absence d’assainissement à caractère permanent. Pour le moment, les PDC signalent le manque de réseaux d’évacuation des eaux pluviales (63% des cas examinés), de
  • 22. 32 décharges où déposer les ordures ménagères (50%) et l’absence ou la rareté des latrines (35%). Certains PDC ne traitent pas l’assainissement en soi, surtout au Sénégal (Gagnick, Ndiené Lagane), mais comme cause secondaire de problèmes sanitaires tels que la prolifé- ration des moustiques et le fort taux de maladies diar- rhéiques). Des informations plus précises sont aujourd’hui possibles uniquement pour le Sénégal, seul Pays à s’être doté, entre 2007 et 2011, de façon quadrillée, de Plans Lo- caux d’Hydraulique et d’Assainissement dans le cadre du PEPAM de la Banque Mondiale. Selon les 39 PLHA prépa- rés dans la bande sahélienne, il faudrait 711 latrines dans les bâtiments publics et plus de 43.000 latrines individuelles et bacs à laver pour un coût total de 36,1 millions d’Euros. Ce chiffre permettrait d’intervenir dans un bassin de 972.000 habitants (2011) pour y améliorer les conditions de 45% des familles. Enfin, on signale la réduction des pâturages en raison de l’avancée du front agricole (30%) et des feux de brousse (35%). Jusqu’à présent, on constate une coïncidence significa- tive entre les dynamiques relevées à l’échelle nationale et celles à l’échelle locale. Cependant, à l’échelle nationale, l’assainissement n’est pas présenté comme le problème en- vironnemental local le plus courant. Et pourtant, les localités concernées ne sont pas des vil- lages comme c’est souvent le cas dans le Sahel sénégalais, mais des petits centres et par fois des villes : au Burkina Fa- so, les chefs-lieux des communes examinées ont entre 20.000 et 73.000 habitants et au Niger entre 11.000 et 24.000 habi- tants. Les conditions hygiéniques précaires concernent donc un nombre important de personnes et pas seulement dans la bande sahélienne (Ouedraogo C. 2012 ; Sandwidi 2012). L’analyse locale par rapport au cadre délimité par les PANE signale l’ensablement.
  • 23. 33 Tab. 4 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. Etat et dynamique de l’environnement local identifiés par 20 PDC de la bande sahélienne : 1. Dori, 2. Ouahigouya (Burkina Faso), 3. Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Gar- hanga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9. Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Tou- mour (Niger), 13. Agnam Civol, 14. Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17. Ndiébène Gandiol, 18. Ndiéne Lagane, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal) État et dynamique Collectivité locale 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 1920 Climat/pluies, tempér. Insuffisance ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Mauvaise répartition ● Fluctuations, baisse ● ● ● Forte chaleur ● Eaux Profondeur nappe ● ● ● ● ● ● Elévation niveau mer ● Raréfaction PE naturels ● ● Ensablement ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Baisse nappe phréatique ● ● Salinisation, qualité ● ● ● ● ● Terres ● Inaptes, pauvres ● ● ● ● Exploitation carrières ● Erosion, ravinement ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Salinisation ● Dégradation, perte fert. ● ● ● ● Mouvements dunes Désertification ● Pâturages Insuffisance ● ● ● ● Dégradation, surpatur. ● ● ● ● Occupation agricole ● ● ● ● ● ● Espèces non appétées ● ● ● Feux de brousse ● ● ● ● ● ● ● Végétation ligneuse Dégradation ● ● ● ● ● Coupe abusive ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Défrichement ● ● Biodiversité ● Raréfaction poissons ● ● ● ● Braconnage ● Disparition faune ● ● ● ● Assainissement ● ●
  • 24. 34 Rues insalubres ● Latrines absentes ● ● ● ● ● ● ● Déversement eaux rue ● ● ● Évacuation eaux pluie ● ● ● ● ● ● ● ● ● Pollution ● ● Absence décharge ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Pression démographiq. ● ● ● Au Sénégal, l’érosion éolienne est considérée comme étant liée à la fertilité des sols. Au Niger, l’érosion est hy- drique et elle est mise en relation avec l’ensablement des eaux de surface qui servent à l’irrigation mais aussi pour l’approvisionnement hydrique des populations (Issoufou 2012 ; Yayé 2012). Troisièmement, l’analyse locale signale la basse qualité des eaux liée à la présence de chlore ou de fluor (Gawane, Ndiebé Gandiol) et de sodium (Ouahigouya, Nguigmi et Gagnick) présents au-delà des limites fixées par l’Organisation Mondiale de la Santé. Au Sénégal, 41% des PLHA enregistrent les caractéristiques physico-chimiques des nappes aquifères. Les relevés effectués ont révélé que dans 69% des cas, l’eau des nappes du Maestrichtien (supé- rieures à 250 m), paléocène (supérieures à 100 – 250 m) y compris aussi celle du Continental Terminal (15-50 m) pré- sente des chlorures, fluorures ou sodium au-dessus des li- mites fixées par l’OMS et celles établies par l’Union Euro- péenne résultant de qualité médiocre ou inadaptée à la con- sommation des personnes. Malgré tout les populations re- courent à l’eau de la nappe phréatique voire aux eaux su- perficielles. Quelques écarts importants concernent aussi les dyna- miques environnementales. En ce qui concerne les res- sources forestières, les PANE parlent de dégradation sans fournir de détails sur les facteurs qui la génèrent sauf la sé- cheresse et l’exploitation.
  • 25. 35 Fig. 3 – Burkina Faso et Niger, 1960-2009. Glissement vers Sud de l’isohyète annuelle des 500 mm de 1960 au 1990 (gris) et de 1991 au 2009 (noir) et localisation des communes étudiées (points noir) (source : USGS, élaboration de S. Braccio) Par ailleurs, la littérature existante a récemment mis l’accent sur les processus de régénération de la végétation arborée, présentés carrément comme un reverdissement du Sahel (Abdoulaye et al 2006) mais les expériences observées se trouvent aux limites méridionales de la bande sahélienne où la pluviométrie est clairement favorable. A l’inverse, deux tiers des collectivités locales indiquent la coupe abu- sive de la végétation ligneuse même si celle-ci ne soutient pas cette dynamique avec des informations plus précises. La méthodologie est cependant disponible comme je l’ai montré dans l’étude sur Téra, Niger (Tiepolo 2011). Les cadres nationaux ne remarquent pas le changement climatique. Au cours des vingt dernières années la baisse de la pluviométrie porte l’isohyète des 500 mm à glisser
  • 26. 36 jusqu’à 80 kilomètres vers le sud dans la région de Zinder au Niger, notamment dans le département de Margaria, exposant ainsi des territoires qui, auparavant, n’avaient pas de problèmes de pluviosité aux aléas sahéliens où les sé- cheresses se répètent (fig. 3). Les PDC sont beaucoup plus spécifiques. Dans un cas sur trois, ils mentionnent la mau- vaise répartition, la chute ou la fluctuation du cumul plu- viométrique annuel et se réfèrent à la constatation de vagues de chaleur. De la même manière, ceux-ci signalent la réduction des espaces pastoraux due aux feux de brousse et à l’expansion du front agricole. 2. Les informations utilisées par les collectivités locales pour connaître l’environnement Quels sont les instruments utilisés par les collectivités locales pour connaître l’état et les dynamiques de l’environnement ? J’examinerai sous ce profil l’échantillon de 20 PDC sahéliens (tableaux 5 et 6). L’aspect le plus fréquemment documenté par les PDC est l’évolution de la pluviométrie au fil du temps : cumul annuel (80% des cas) et nombre de jours de pluie (55%). La série ne dépasse pas les dix ans et seuls les PDC de la der- nière génération, c.-à-d. ceux rédigés après 2008, présentent une série plus longue qui va parfois jusqu’à 20 ans. Les températures sont analysées dans 15% des cas sous forme de moyennes mensuelles sur une seule année. La nature des sols est rarement traitée à l’aide de cartes ou avec la quantification des surfaces correspondantes (un cas sur quatre).
  • 27. 37 Tab. 5 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2003-2011. Indicateurs environne- mentaux plus fréquemment utilisés dans les 20 PDC Indicateur Fréquence (max 20) Climat Pluviométrie totale annuelle, mm 16 Sols Type 5 Occupation, Ha 5 Eaux Profondeur de la nappe phréatique, m 13 Qualité 3 Ressources halieutiques Prises, T 1 Végétation arborée Espèces, noms 16 Assainissement Réseau eaux pluviales, m 3 Localités et population Nombre 13 Population, n 8 Accroissement de la population, % 6 Pour les eaux, dans deux cas sur trois, la profondeur de la nappe phréatique est fournie ainsi que celle fossile et les éventuels obstacles rencontrés pour les atteindre, comme la présence de couches rocheuses. En ce qui concerne la végétation arborée, une liste des principales espèces ligneuses présentes est presque tou- jours dressée. Le cadre décrit concerne l’ensemble des 20 cas. En réali- té, les PDC sont plutôt hétérogènes. Les sénégalais, par exemple, tels que rédigés entre 2003 et 2005, présentent un dispositif analytique plus structuré de ceux du Niger. Il y a ensuite des informations qui ne concernent pas strictement l’environnement mais la pression qui est exercée sur ce der- nier. Le nombre de la population des localités est indiqué uniquement dans 40% des cas et le taux de croissance dans à peine 30% des cas.
  • 28. 38 Tab. 6 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2001-2010. Informations utilisés dans 20 PDC de la bande sahélienne: 1. Dori, 2. Ouahigouya (Burkina Faso ), 3. Abalak, 4. Attantane, 5. Bagaroua, 6. Garhanga, 7. Ibohamane, 8. Keita, 9. Nguigmi, 10. Tamaské, 11. Téra, 12. Toumour (Niger), 13. Agnam Civol, 14. De Dabia, 15. Gagnick, 16. Gawane, 17. Ndiébène Gandiol, 18. Ndiéne Laga- ne, 19. Ndiob, 20. Ogo (Sénégal) Indicateur environnement Collectivité locale 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 Année validation 08 09 07 04 05 06 06 06 03 05 0604 11 10 03 05 10 01 04 09 Sup. km2 *1 000 2,5 6,5 3 0,7 2,5 0,82,4 0,60,40,10,2 1 0,20,12,7 Localités, n ● ● ● ● ● ● ● Climat Pluviométrie an, mm ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Jours de pluie, n. ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Temp. Mensuelle, mm ● ● ● Terres Type, Ha ● ● ● ● ● ● ● Occupation, Ha ● Cultivable, Ha ● Eaux Qualité ● ● ● Mares, n. ● ● ● ● ● ● Profond. nappe, m ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Couverture eau, % ● Halieutiques Prises, T/an ● Espèces noms ● Pâturages et forêts Classés, Ha ● ● Espèces, noms ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Espèces dispar., noms ● Végé. herbacée, noms ● ● ● ● Faune, noms ● ● ● ● ● ● ● Assainissement Boues vidange ● Réseau eaux pluie, m ● ● ● Latrines publiques, n ● Bac ordures, n ● Population totale, n ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Localités, n ● ● ● ● ● ● ● ● Accroissement an, % ● ● ● ● ●
  • 29. 39 En effet, dans le Sahel, les collectivités locales sont des en- tités récentes qui souvent ne correspondent pas aux limites d’entités administratives précédentes comme les cantons, sur lesquels il existe une série de relevés du nombre d’habitants. Il s’avère donc difficile, comme cela a été souligné (Braccio 2009), de connaître leur population passée en utilisant, par exemple, les recensements généraux de la population mais cela n’est pas impossible. Par conséquent, dans les PDC les taux d’écart de la population au cours des années sont calcu- lés en appliquant aux communes des taux courants de crois- sance relatifs à des entités administratives supérieurs aux- quels ceux-ci appartiennent : départements voire régions. La rareté des informations s’explique par les ressources dispo- nibles pour les recueillir. Je me réfère avant tout au dit « capital humain ». A Bagaroua, au Niger, il n’y a pas en- core de « services techniques communaux ». Par contre, il existe « quelques services techniques décentralisés de l’État… mais le service de l’agriculture, de l’élevage, de l’environnement ne comptent qu’un seul agent chacun » (RN, Commune rurale de Bagaroua 2005 : 9). 3. Lacunes dans les connaissances locales de l’environnement sahélien L’analyse de 20 PDC montre l’utilisation à des fins de gouvernance des connaissances locales sur l’environnement. Celles-ci s’avèrent insuffisantes en ce qui concerne l’état de l’environnement, rares sur les dynamiques et presque inexistantes en ce qui concerne les relations entre les diffé- rents facteurs environnementaux. Observons quelques exemples. Partons du climat. La pluviométrie décrite au moyen d’une brève série de préci- pitations totales annuelles ne suffit pas à identifier un éven- tuel changement climatique. En revanche, il est important
  • 30. 40 d’analyser les précipitations journalières pour juger une saison agropastorale. Parfois, une saison pluvieuse par le cumul total annuel présente des intervalles trop longs entre les pluies et durant ces intervalles, les cultures et la végéta- tion en général, en absence d’irrigation, souffrent et meu- rent. Par contre, un cumul annuel bas peut s’avérer mieux réparti (Tiepolo 2011: 142). Il s’agit ensuite de mettre en re- lation les précipitations avec les besoins des cultures plu- viales et de la végétation. Les températures ne font pas l’objet d’analyse dans les PDC même si celles-ci sont rele- vées localement. Dans ce cas aussi, une analyse historique journalière permettrait de vérifier l’évolution des vagues de chaleur en termes de plus grande fréquence et de durée du phénomène. La série de relevés pluviométriques est géné- ralement disponible auprès des stations météorologiques qui, généralement, conservent des données bien au-delà de la décennie qui est habituellement utilisée dans les PDC et elles conservent également les données sur les précipita- tions journalières. Parlons maintenant des sols. Les PDC nigériens, no- tamment, n’indiquent aucun chiffre à cet égard. A l’inverse, 60% des PDC sénégalais représentent les différents types de sols sur des cartes ou en fournissent les superficies. A cet égard, il convient de rappeler que ces informations permet- traient, associées à d’autres, d’identifier les terres aptes aux cultures, celles aptes à la plantation forestière, aux pâtu- rages en plus de celles qui devraient faire l’objet d’une pro- tection totale. L’étendue des zones forestières reste inconnue. Pour ne pas parler de leur contenu. Les inventaires forestiers sont conduits uniquement au moment de la gestion des massifs forestiers, par ex. dans le cas des marchés ruraux du bois au Niger. D’une manière plus générale, on constate l’absence d’informations sur la consistance des espaces végétalisés
  • 31. 41 (arborés, buissonnants, herbacés) : dans un cas seulement on trouve des informations exhaustives à cet égard. Le pro- blème n’est pas que les informations n’existent pas. Les PDC sénégalais fournissent des cartes d’occupation du sol mais celles-ci sont rarement utilisées pour mesurer l’étendue de ces types d’occupation du sol. Pour la biodiversité, les informations sont relativement sommaires et quoiqu’il en soit, sporadiques. Par exemple, les ressources halieutiques demeurent inconnues, sauf la quantité de poisson exporté vers le Nigeria telle qu’elle est relevée à Nguigmi par le Service des douanes. Jusqu’à présent, les informations principales sont four- nies sous forme d’état des lieux, sur une seule année. La mesure des dynamiques n’est pas fondée sur des me- sures mais sur les opinions de la population locale. La po- pulation (40% des cas) et l’occupation des sols (5%) font ex- ception. Enfin, les informations susmentionnées ne sont pas mises en relation entre elles c’est-à-dire qu’elles n’ont pas été utilisées pour une analyse cherchant à identifier les rai- sons des dynamiques ou pourquoi certaines dynamiques intéressent des parties spécifiques du territoire communal plutôt que d’autres. Et parmi ces causes, il conviendrait de prendre en compte l’effet des actions de conservation, de protection et de restauration de l’environnement précé- dentes, aspect presque ignoré par les PDC. Enfin il serait aussi utile de vérifier quels types de sols sont concernés par la diminution des surfaces forestières et ceux concernés par l’expansion du front agricole et s’il existe une relation entre l’augmentation de la densité démographique (celle-ci étant présentée comme un problème dans 15% des cas) et la di- minution des zones forestières.
  • 32. 42 4. Vers un système d’information local sur l’environnement Les informations utilisées dans les PDC sont collectées auprès de certaines institutions et de vive voix auprès des habitants eux-mêmes de la part du cabinet chargé de rédi- ger le plan. Il est rare que ces informations proviennent de la Commune. La gouvernance environnementale locale pourrait être améliorée, s’il était possible d’utiliser un sys- tème d’information local sur l’environnement auprès de la Commune ou dans une agence de soutien aux communes comme cela se fait au Sénégal avec les Agences régionales de développement (ARD) que le Burkina Faso s’apprête à introduire. Le fait de s’arrêter sur l’organisation d’un tel centre de service aux communes sort du cadre de cette étude. En revanche, il est intéressant de raisonner sur l’amélioration des informations locales dans la perspective de créer un système d’information local. Trois voies sem- blent possibles. La première est l’identification, l’évaluation et l’utilisation éventuelle des informations sur l’environnement recueillies et sauvegardées par les systèmes d’information nationaux ou transnationaux. La deuxième est d’expérimenter le suivi communautaire des dyna- miques environnementales. La troisième est la photo- interprétation d’images satellitales haute définition. 4.1. Systèmes d’information nationaux et transnationaux Il y a au moins quatre secteurs sur lesquels une synergie avec les systèmes d’information nationaux peut s’avérer utile à l’échelle locale. Avant tout les informations sur les sols. Les cartes pédo- logiques réalisées par l’ORSTOM dans les années 1960 et 1970 sur les Pays sahéliens et celles réalisées dans le cadre
  • 33. 43 de différents projets de développement (surtout au Mali) constituent une avancée des informations sur l’environnement si elles sont interprétées par un pédo- logue. Celles-ci sont disponibles auprès de plusieurs minis- tères et depuis quelques années, elles sont finalement ac- cessibles gratuitement en ligne sur le site de la cartothèque de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et de celui de l’European Soil Map Digital Archive (EU- DASM). Les différentes classes de terre peuvent être uni- fiées pour identifier les terres non adaptées aux cultures, celles plus adaptées au pâturage et à la foresterie ainsi que celles adaptées à la seule protection intégrale. L’échelle des cartes pédologiques est au 1 : 500.000 pour le Burkina Faso, pour le Niger et pour le Sénégal. Dans certaines zones, les cartes pédologiques sont à l’échelle 1 : 100.000 (Ader Dout- chi Maggia, Gourouol–Beli et Lac Tchad au Niger, Siné Sa- loum au Sénégal), à l’échelle 1 : 50.000 (pour la Mare d’Oursi au Burkina Faso) et aussi à l’échelle 1 : 5.000 pour certaines parties particulièrement intéressantes du point de vue agronomique comme le département de Keita (Niger) et les environs de Dori (Burkina Faso). Un deuxième aspect uniquement traité, pour le moment, par certains PDC sénégalais, concerne l’occupation du sol. La couverture arborée et herbacée ainsi que les pâturages sont surveillés par satellite par différents organismes. Le Centre Régional Agrhymet du Comité permanent Inter- états de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS), basé à Niamey calcule l’indice de végétation sur images SPOT VGS à 1 km de résolution et produit des comptes-rendus mensuels permettant de surveiller l’évolution de la cam- pagne agricole dans toute la région sahélienne. Le projet Africover de la FAO propose sa propre classification et sa cartographie à partir d’images Landsat à 30 m de résolu- tion. Ces images peuvent fournir une toute première base
  • 34. 44 en l’absence d’informations plus détaillées. L’unité d’analyse est cependant trop grande (pixel 30 m au sol) pour répondre aux nécessités locales comme l’a montré Braccio (2011: 174). Celle-ci ne permet pas de localiser les lentes transformations de la végétation dans les zones fo- restières typiques des climats semi-arides, ni les jachères et encore moins de saisir l’impact des ouvrages de conserva- tion des eaux et des sols. Sans parler de la variation du nombre de plantes dans les massifs forestiers aménages par les marchés ruraux du bois. Le troisième secteur est celui de l’assainissement. Les re- censements de la population et de l’habitat, effectués envi- ron tous les dix ans, depuis la fin des années 1970, peuvent aider dans la mesure où ils constatent le dispositif des égouts utilisé par les ménages et qu’ils indiquent cette in- formation par petites unités d’analyses (ilot). Aucun dispo- sitif d’évacuation des eaux pluviales ou de ramassage des ordures n’est signalé. Par ailleurs, dans les trois Pays, dans le milieu rural, ces infrastructures sont pratiquement inexistantes. Toutes ces informations ne présentent pas un intérêt en soi mais seulement si elles sont croisées entre elles et si elles sont mises en relation avec la pression anthropique. Le quatrième secteur est donc celui de la population. Les informations sont collectées à l’occasion des recensements généraux et elles sont conservées par les instituts nationaux de statistiques. Aujourd’hui encore, au moins trois relevés sont disponibles (années 70, 80, 90 ou 2000). Au Niger, le quatrième recensement de la population est prévu pour 2012. Les données concernent l’échelle locale dans la me- sure où celles-ci sont désagrégées géographiquement par petites unités territoriales. Les données des trois premiers recensements sont publiées à l’échelle du département. Des répartitions plus précises sont possibles. Pour vérifier les
  • 35. 45 dynamiques du peuplement, il est nécessaire de disposer d’une observation dans le temps et cet exercice, comme nous l’avons déjà fait remarquer pour le Niger, est faisable même s’il est entravé par l’état où se trouvent actuellement les archives de l’INS (Braccio 2009 : 158). 4.2. Le suivi communautaire L’idée de mobiliser la communauté pour le suivi de la biodiversité (forêts, plantes, poissons et coquillages) n’est certes pas nouvelle (WWF). Il s’agit d’une manière rapide et économique d’évaluer l’évolution des espèces présentes sur le territoire communal. Souvent, les communautés ont une connaissance approfondie des plantes et des animaux présents sur le territoire rural où elles vivent. Le suivi part de l’établissement d’un inventaire, exactement comme cela se fait à l’occasion des marchés ruraux de bois, quand il s’agit de contrôler les espèces présentes dans un massif fo- restier faisant l’objet d’un aménagement. Mais dans ce cas, on fait en revanche appel à la population locale. Des groupes spécialisés sur les forêts, les plantes, la faune ter- restre, les ressources halieutiques sont identifiés. Il est en- suite demandé à chaque groupe d’identifier les espèces présentes et celles qui abondent ou qui sont en diminution. Cette activité exige que chaque groupe soit composé de personnes connaissant bien l’environnement en question : agriculteurs, bûcherons, éleveurs, pêcheurs etc. Le suivi n’est pas seulement un moyen de recueillir rapidement des informations mais c’est aussi une occasion de discuter avec la communauté de la question de la biodiversité et de la mettre en relation avec d’autres phénomènes comme le changement climatique et la déforestation.
  • 36. 46 4.3. Photo-interprétation d’images satellites haute définition Les images Landsat ou SPOT ne sont pas en mesure de capturer les détails qui nous intéressent à l’échelle locale et les relevés au sol ne sont pas non plus en mesure de le faire étant donnée l’ampleur des collectivités territoriales sahéliennes : les coûts seraient incompatibles avec le budget communal et les temps dépasseraient les délais de rédaction des PDC éta- blis par la loi. Dans ces conditions, la photo-interprétation d’images satellitaires à haute résolution s’avère extrêmement précieuse pour mesurer l’état de l’environnement local. Les archives de reprises des images satellites sur différentes zones du Sahel peuvent, en outre, permettre de mesurer les dyna- miques environnementales sur une période de temps qui ac- tuellement est d’environ dix ans. Les images satellites haute définition saisissent l’état de la couverture arborée et végétale et s’avèrent utiles pour vérifier au moins trois composantes environnementales très importantes : • La densité arborée par unité de superficie qui permet de mesurer les effets de la coupe abusive hors des zones pro- tégées ou aménagées (Tiepolo 2011) ou celle excessive à l’intérieur de ces dernières. De plus, celle-ci se prête à l’évaluation de l’impact des ouvrages de CES en termes de reforestation et de régénération du manteau herbacé. • Les jachères. C’est une pratique peu étudiée par la littéra- ture et souvent décrite par les populations locales comme étant en voie de disparition en raison de la pression an- thropique. Nos analyses à Téra, Niger, au moyen de la photo-interprétation d’images satellites haute définition prises à la fin des la saison des pluies ont constaté exac- tement l’inverse : sur un zone de 36 km2 les champs en culture ont la même superficie des jachères (47%) (fig. 4). • Les dynamiques de la végétation ripicole, indicatrice des processus d’érosion et de l’impact de la sécheresse.
  • 37. 47 Fig. 4 – Commune de Téra, Niger, 17 septembre 2011. Jachères identifiées sur une image satellitale GeoEye avec définition au sol de 0,50 m (gris foncé en haut) et représentées sur l’ensemble des 36 km2 du territoire photo- interprété (banc en bas) (photo-interprétation de P. Cantamessa, élaboration de S. Braccio) Conclusion Un premier pas pour vérifier l’état et les dynamiques de l’environnement à l’échelle locale a été fait en 1996 à l’occasion du PANE sénégalais en interpellant les départe- ments et les communes sur l’état de l’environnement. Entre 2003 et 2006, la rédaction des premiers plans de développement communaux a encouragé les collectivités territoriales à collecter et à utiliser les connaissances locales sur l’environnement aux fins de l’aménagement. Nous avons vérifié que ces connaissances dans le cas des 20 PDC analysés ici, confirment en bonne partie ce que l’on savait sur l’environnement sahélien à l’échelle nationale mais elles signalent aussi certains aspects peu connus. Par exemple, la
  • 38. 48 coupe abusive de la végétation arborée omniprésente, l’ensablement des points d’eau naturels, la faible qualité d’eau potable, l’absence d’assainissement dans des centres ayant des dimensions parfois relativement importantes : entre 11.000 et 24.000 habitants au Niger et entre 20.000 et 73.000 au Burkina Faso. Ceci étant, différentes lacunes subsistent comme la quali- té de l’air et les dynamiques de presque tous les composants environnementaux. L’absence de ces informations se reflète sur la qualité de l’aménagement, comme nous le verrons au chapitre sui- vant. Mais ce que l’on rencontre de façon systématique, in- dépendamment de la qualité des informations disponibles, c’est l’absence de croisement entre les dynamiques qui pourraient s’avérer utile pour la prise de décision. Le dia- gnostic semble, en bref, être préparé plus dans le respect de lignes directrices ministérielles qui précisent quels thèmes couvrir avec l’état des lieux, que pour comprendre des dy- namiques pertinentes pour l’aménagement environnemen- tal. Un exemple est la variation de l’occupation des sols en relation avec la qualité de ces derniers et en relation avec la pression démographique. Il semble que les questions aux- quelles l’état de l’environnement de son évolution au fil du temps qui devraient permettre de planifier et de proposer des scénarios de réponse sont absentes. Comment y remédier ? Avant tout en introduisant des critères de qualité des données. Et ensuite en rendant la col- lecte, le traitement et la communication systématiques. Le long de ce parcours, il est possible de prévoir quatre étapes : un système d’information environnemental local (SIEL), la rédaction de PDC pilotes de nouvelle génération, la mise à jour des lignes directrices ministérielles pour la rédaction des PDC et le renforcement des capacité de plani-
  • 39. 49 fication des cabinets auxquels la rédaction des PDC est ha- bituellement confiée. Les systèmes d’information nationaux peuvent fournir des informations utiles à l’échelle locale. Des programmes pour le suivi de la part de la population elle-même peuvent être lancés. La photo-interprétation d’images satellitales à haute définition peut fournir un grand nombre d’informations utiles. Il reste une inconnue : qui doit l’effectuer et de qui doit gérer les informations. Les com- munes présentent un personnel technique encore trop res- treint. Peut-être que le dispositif sénégalais des ARD, dont le modèle est prévu aussi au Burkina Faso, pourrait être utile au Niger et en tous les cas, il mériterait que ces capaci- tés soient renforcées à travers des formations en géoma- tique. Références bibliographiques Abdoulaye M., Larwanou M., Reji C. (2006), Étude de la végétation naturelle assistédans la région de Zinder (Niger), USAID, Julliet Braccio S. (2009), « Fonti d’informazione » in Tiepolo M., Lo sviluppo delle aree rurali remote. Petrolio, uranio e governante locale in Niger, Milano, Franco Angeli, 155-164 Braccio S., Chiabrando F., Ponte E., Tiepolo M. (2010), « Sistema insedia- tivo e risorse naturali rinnovabili a Téra (Niger), 1956-2009 » in Turco A. (sous la dir.), Governance ambientale e sviluppo locale in Africa. Coope- razioni, saperi, cartografie, Milano, Franco Angeli, 119-150 Braccio S., Ponte E. (2011), « Sources et méthodes », in Tiepolo M. (2011), Suivi et évaluation des plans de développement communal au Sahel. Avec le cas d’étude de Téra, Turin, L’Harmattan Italia, 169-188 Colletif Tchinaghen (2008), La malédiction de l’uranium. Le nord Niger vic- time de ses richesses. Dossier d’information, aout Dasylva S. (2009), Inondations à Dakar et au Sahel. Gestion durable des eaux de pluie, Dakar, Enda Tiers Monde, 265 Illiassou M. (2012), « Evaluation ex-post du Projet sécurité alimentaire, Région de Tahoua, Département Illéla, Niger, 2009-2011 », in Tiepolo
  • 40. 50 M. (sous la dir. de), Évaluer l’environnement au Sahel. Premières ré- flexions sur la gouvernance locale, Turin, L’Harmattan Italia, 307-334 Issoufou I. (2012), « Evaluation mi-parcours du projet de gestion de la mare de Tabalak (Niger), 2011-2012 », in Tiepolo M. (sous la dir. de), Évaluer l’environnement au Sahel. Premières réflexions sur la gouvernance locale, Turin, L’Harmattan Italia, 335-350 Macfayden G., Huntington T. (2010), Engins de pêche abandonnés, perdus ou rejetés, Rome, FAO-UNEP Ouedraogo C. (2012), « Evaluation ex-post de la composante environne- mentale du PIP de Ziniaré, Burkina Faso », in Tiepolo M. (sous la dir. de), Évaluer l’environnement au Sahel. Premières réflexions sur la gouver- nance locale, Turin, L’Harmattan Italia, 227-254 RBF, Ministère de l’environnement et du cadre de vie (2008), Programme décennal d’action du secteur de l’environnement et du cadre de vie à l’horizon 2015 PDA/ECV – Document de base RBF, Commune de Dori (2008), Plan communal de développement de Dori 2009-2013. Version finale, octobre RBF, Commune de Ouahigoua (2009), Plan communal de développement 2009-2013 RN, CPM, CNEDD (2005), Rapport sur l’état de l’environnement au Niger. Rapport final, novembre RN, Commune urbaine d’Abalak (2008), Plan de développement communal 2007-2010, avril RN, Commune rurale d’Attantane (2004), Plan de développement communal (PDC) d’Attantane (2005-2008), décembre RN, Commune rurale de Bagaroua (2005), Plan de développement communal (PDC) de la commune rurale de Bagaroua, novembre RN, Commune rurale de Garhanga (2006), Plan de développement commu- nal (PDC) 2007-2010, décembre RN, Commune rurale de Ibohamane (2006), Plan de développement commu- nal (PDC) Commune rurale de Ibohamane. Version provisoire, décembre RN, Commune urbaine de Keita (2006), Plan de développement communal (PDC) 2007-2010, décembre RN, Commune urbaine de N’Guigmi (2003), Plan de développement com- munal de Nguigmi (2004-2008), septembre RN, Commune urbaine de Téra (2005), Plan communal de développement 2007-2010, décembre RN, Commune rurale de Tamaské (2004), Plan de développement communal . Version validée, septembre RN, Commune rurale de Toumour (2004), Plan de développement communal de Toumour (2004-2008), janvier
  • 41. 51 RS, Communauté rurale d’Agnam Civol (2011), Plan local de développe- ment, janvier RS, Communauté rurale de Dabia (2010), Plan local de développement de la CR de Dabia, décembre RS, Commune de Gagnik (2003), Plan local de développement de la commu- nauté rurale de Gagnick, avril RS, Communauté rurale de Ndiebène Gandiole (2010), Plan local de déve- loppement (PLD) de Ndiebebe Gandiol. Version finale, aout RS, Commune de Ndiéne Lagane (2001), Plan local de développement de la communauté rurale de Ndiéne Lagane, aout RS, Communauté rurale de Ndiob (2004), Plan local de développement de la Communauté rurale de Ndiob, janvier RS, Communauté rurale d’Ogo (2009), Plan local de développement de la communauté rurale d’Ogo, décembre RS, MAE, DCL, PNIR (2005), Plan local de développement de communication et de formation de la communauté rurale de Gawane. Rapport final, janvier RS, MEPN-Ministère de l’environnement et de la protection de la nature (2005), Rapport sur l’état de l’environnement au Sénégal. Edition 2005, Centre de suivi écologique RS, MEPN-Ministère de l’environnement et de la protection de la nature (1997), Plan national d’action pour l’environnement Sandwidi A.P. (2012), « Suivi de la composante ‘assainissement ‘du PCD de Pouytenga, Burkina Faso, 2011-2012 » in Tiepolo M. (sous la dir. de), Évaluer l’environnement au Sahel. Premières réflexions sur la gouver- nance locale, Turin, L’Harmattan Italia, 255-276 Tiepolo M. (2011), Suivi et évaluation des plans de développement communal au Sahel. Avec le cas d’étude de Téra, Turin, L’Harmattan Italia Tiepolo M. (1999), Lo sviluppo delle aree rurali remote. Petrolio, uranio e go- vernante locale in Niger, Milano, Franco Angeli Tiepolo M. (1996), « Fonti d’informazione », in Carozzi C., Tiepolo M., Sahel nigerino. Quando sopravvivere è difficile. Pressione demografica e ri- sorse naturali, Milano, Franco Angeli, 153-160 WWF (sans date), Climate witness community toolkit, WWF South Pacific programme Yayé O. (2012), « Evaluation ex-post des actions de préservation contre l’ensablement du barrage de Téra, Niger, 2006-2011 » in Tiepolo M. (sous la dir. de), Évaluer l’environnement au Sahel. Premières réflexions sur la gouvernance locale, Turin, L’Harmattan Italia, 351-370
  • 42. 53 Aménagement et gestion locale de l’environnement au Sahel Maurizio Tiepolo1 Ce chapitre est consacré à l’aménagement et à la gestion de l’environnement à l’échelle locale. Nous employons l’expression « aménagement local » d’après la définition proposée par le Code de gestion des collectivités territoriales (CGCT) de chacun des trois Pays pris en considération. Le Code établit les compétences de régions et communes en ma- nière d’environnement (tab. 1). De la même manière, par gestion locale, nous entendons toujours en référence au Code toutes les activités de prévention, de protection, de conserva- tion et d’autorisation relatives au « cadre de vie » et aux res- sources naturelles (RN) confiées, en vertu de la loi, aux ré- gions, aux communes, aux autorités coutumières ou aux or- ganisations de base. Parmi les activités de gestion figure le suivi-évaluation (à noter que cette activité sera traitée ex- pressément dans le sixième chapitre). La gestion de l’environnement fut initialement axée sur le suivi de la sécheresse et des cultures et sur l’alerte précoce à l’échelle nationale. La gestion environnementale à l’échelle des villages ou des grappes de villages fut introduite par les projets d’aide au développement qui suivaient l’approche de « gestion des terroirs » et par les projets forestiers du début des années 80. Depuis la fin des années 90 au Sénégal, et plus tard au Mali, au Niger et au Burkina Faso, les compétences en ma- tière de gestion de l’environnement furent transférées aux 1 Je remercie Silvia Macchi (Université de Rome « La Sapienza ») et Vieri Tarchiani (IBIMET CNR) pour les commentaires.
  • 43. 54 administrations locales. Les outils les plus utilisés furent les Plans de développement communaux (PDC). A côté de ces instruments qui auraient dû identifier les priorités locales grâce à des études diagnostiques, ont apparu d’autres outils de gestion environnementale (plan pilote de gestion envi- ronnementale, Agenda 21 local, Plan local d’hydraulique et d’assainissement). Malgré tout, la gestion environnementale locale reste peu incisive. En ce qui concerne les effets positifs pour l’environnement, le débat demeure animé. Les parte- naires techniques et financiers (PTF) ont des positions diffé- rentes sur les bénéficiaires de leur action. Ils se montrent par- fois plus en faveur du soutien direct des organisations de base que des collectivités territoriales (CT). Ce chapitre a deux objectifs. Avant tout, identifier l’apparition de la gestion locale de l’environnement liée à l’évolution de l’action et de l’aide internationale dans ce sec- teur. Deuxièmement, identifier les approches et les pratiques innovantes d’aménagement et de gestion locale de l’environnement au Burkina Faso, au Niger et au Sénégal. On vérifiera le niveau d’affirmation de la gestion locale de l’environnement ainsi que les approches récentes (para- graphes 1, 2, 3 et 4) et les obstacles qui entravent leur réalisa- tion (paragraphe 5). Enfin, nous fournirons des recommanda- tions aux ministères, aux communes et aux PTF. On a exploité la vaste documentation disponible sur la législation environnementale relative aux trois Pays, comme le matériel toute aussi important sur les plans environne- mentaux à tous les niveaux (plans de développement com- munal, plans locaux d’hydraulique et d’assainissement, plans de développement communaux sectoriels sur l’eau po- table et l’assainissement). En raison d’aspects spécifiques comme les indicateurs environnementaux, on a en outre uti- lisé les principaux documents produits par les organismes internationaux compétents (OCDE, UNEP).
  • 44. 55 Tab. 1 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 1997-2001. Compétences des régions et des communes en matière d’aménagement et gestion de l’environnement selon le CGCT Compétences en matière d’environnement Burkina Faso Niger Sénégal État / aménagement Politique environnementale, PANA ● Contrôle pollutions et nuisances, PANA ● État /gestion Application politiques protection environnement, CE ● Situation de l’environnement ● Veille actions entreprises, compatibilité écologique, CE ● Région / aménagement Plan pour l’environnement, L 2002-012 ● Plan d’action forestière, L 2002-012 ● Plan de gestion des risques, L 2002, 012 ● Création aires protégées, L 2002-012 ● Région / gestion Protection et entretien forets et zones naturelles, L… ● Autorisation de défrichement domaine forestier, L… ● Protection de la faune ● Commune / aménagement Plan communal action environnement, CGCT ● Plan d’action pour l’environnement et GRN, L 2002-013 ● POS, CGCL ● Commune / gestion Préservation et protection, L 2002-013 ● Protection eaux et ressources halieutiques, CGCT ● Régime d’accès aux points d’eau, CGCL ● Enlèvement élimination déchets ménagères, CGCT ● Autorisation coupe de bois, CGCT ● ● Délivrance permis de chasse, de pèche, CGCT ● Conservation GRN ● ● Prévention et lutte contre les feux de brousse, CGCT ● ● ● Protection faune, CGCT ● Avis installation établissements insalubres, CGCT ● ●
  • 45. 56 En ce qui concerne la gestion environnementale, on a re- cueilli 40 projets lancés entre 2001 et 2012 (dont 22 conclus) par 12 partenaires techniques et financiers multi-bilatéraux et, enfin, on a exploité différentes interviews effectuées au fil des ans à des administrateurs locaux. 1. Á l’aube de la gestion de l’environnement Les premières formes de protection de l’environnement sahélien remontent à l’époque coloniale et consistent en la conservation des forêts, une mesure importante dans la ré- gion. La première législation remonte à juillet 1900. Celle-ci prévoyait des permis, des concessions, des zones et des es- pèces protégées. Les populations locales pouvaient cultiver, prélever du bois, faire pâturer le bétail hors des conces- sions. La délivrance des concessions était une prérogative du gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française (AOF)2 et la coupe des espèces devait être autorisée par le commandant du cercle. Si, d’une part, dans certaines colonies de l’AOF, le bois était une ressource tellement abondante qu’il était possible de l’exporter, en revanche, dans le Sahel semi-aride, celui-ci manquait et devait être conservé pour éviter que le climat ne dégrade les sols. La discipline de conservation est redéfinie par le décret 1935 établissant un Code forestier pour l’Afrique Occidentale Française, qui classait les forêts en deux catégories : les forêts classées, domaine privé de l’État, et les forêts protégées en 2 L’AOF (1895-1958) était composée, dans sa configuration finale, de la Côte d’Ivoire, du Dahomey (devenu le Bénin), de la Guinée, de la Haute Volta (devenue le Burkina Faso), de la Mauritanie, du Niger, du Sénégal, du Soudan français (devenu le Mali). Du point de vue administratif, la Fédération était divisée en colonies puis en cercles (101), qui à leur tour étaient divisés en cantons.
  • 46. 57 prévoyant une répression sévère des délits. Quelques zones classées devinrent ensuite des parcs ou des réserves de faune. Le classement interdisait à la population d’utiliser la forêt. Dans les trois Pays, la surface classée était supérieure à celle transformée en parcs ou en réserves de faune. Au Bur- kina Faso, les quinze premières forêts classées remontent à 1936. Celles-ci couvraient une zone de 1.583 km2 soit 15% de la surface qui sera classée. Au Niger, la première forêt clas- sée fut celle de Gorou Bassounga qui se trouve dans l’actuelle région de Dosso (1937) et qui représente une sur- face de 100 km2, c.-à-d. 15% du total qui sera classé. Les autres modalités de conservation furent les parcs et les réserves de faune partielles ou totales. Sur le total des parcs et des réserves actuels, au moins 2/3 remontent à l’époque colo- niale. Mais en termes de superficie, la zone protégée repré- sente à peine 11% de celle d’aujourd’hui. La situation varie beaucoup d’un Pays à l’autre. Au Sénégal, 78% de la surface transformée en parc est créée à l’époque coloniale, au Niger uniquement 2%. A la seule exception du Niger, le classement ne se poursuit pas après les indépendances nationales et il laisse en héritage 376 aires classées sur 80.582 km2, dont ¾ au Sénégal (tab. 2). Les zones protégées sont désormais conver- ties en zones bâties, en champs ou en zones occupées par une végétation arborescente extrêmement dégradée et, en tous les cas, sujettes à des coupes abusives. Seulement pour une partie infime, celles-ci sont conservées et gérées, pour la plupart pour la production de bois de chauffage ou du bois d’œuvre. La Direction des eaux, des forêts et de la chasse, chargée de faire respecter les textes, est créée d’abord en Mauritanie et au Sénégal (1937), puis au Soudan (Mali) (1938), en Haute Volta (Burkina Faso) (1948) et enfin au Niger (1953). Avec les indé- pendances nationales, la politique forestière était loin de cons- tituer une priorité, comme le montre l’utilisation d’à peine 3% du budget du Niger pour le secteur forestier.
  • 47. 58 Tab. 2 – Burkina Faso, Niger, Sénégal. Aires classées (sources : RS, CSE 2012, Ada et Mahamane 1999, Nikiema et al 2001, RS, MEPN 1997) Aires Burkina Faso* Niger* Sénégal* Σ Aires classées Km2 10 810 7 406 62 376 80 592 n° 66 97 213 376 Avant 1960, n° 66 77 Parcs, réserves de faune Km2 30 969 181 141 11 794 223 04 Avant 1960, Km2 11 987 2 960 9 180 24 127 * BF 68, 13.029 km2, N 90, 6.247 km2, S 242, 10.557 km2 selon Tarchiani et al (2008). Au Niger les premières actions de reboisement remon- tent à 1966, autour des centres urbains les plus importants. 2. Grandes sécheresses et embryons de législation environnementale En 1972-73 et en 1981-84, deux grandes sécheresses font passer au second plan tout autre problème environnemental dans le Sahel. Au Niger, l’isohyète des 300 mm, que Durand jugeait être la limite Nord pour la culture du millet et du sorgho, s’est déplacée vers le Sud de 80 km à 110 km. « La première conséquence de la sécheresse est la disparition de la végétation herbacée… les pâturages se réduisent toujours plus, obligeant le bétail à parcourir des distances toujours plus longues entre les points d’eau. Pendant ces trajets, les bêtes, surtout les bovins, meurent d’épuisement et de faim » (Durand 1977: 396-97). A la quantité totale insuffisante de pluie, s’ajoute sa dis- tribution inégale au fil du temps. En juin, on enregistra de fortes pluies. Les cultures se développèrent mais les pluies revinrent uniquement en août et donc les cultures séchèrent entre temps. D’autre part, la crue du Niger n’arrivait pas et compromettait les cultures de décrue. Bref, la sècheresse
  • 48. 59 toucha le monde rural dans son ensemble : élevage, cul- tures pluviales et de décrue. En 1973, la production du millet chuta d’un tiers par rapport à 1971, celle du sorgho de cin- quante pour cent et celle des arachides chuta de soixante-dix pour cent. Le nombre de bovins fut divisé par deux (Voir : 18- 21). La nappe d’eau diminua. Les arbres de gomme arabique moururent. Le phénomène ne toucha pas seulement le Niger. On estime que la sécheresse provoqua, dans le Sahel, la mort de plus de cent mille personnes et qu’elle rendit 750 mille per- sonnes totalement dépendantes de l’aide alimentaire au Mali, en Mauritanie, au Niger et en Haute Volta (l’actuel Burkina Faso) et qu’elle réduisit d’un quart le bétail obligeant ainsi la population nomade à se sédentariser dans les centres urbains (MacDonald 1986). Le Séminaire sur les sociétés pastorales en Afrique Tropi- cale, qui se tint à Niamey en novembre 1972 sous la prési- dence de Théodore Monod et le Colloque de Nouakchott de décembre 1973 sur la désertification au Sud du Sahara atti- rèrent l’attention sur le phénomène. Le 15 décembre 1972 fut créé le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) suite à la Conférence des Nations Unies à Stockholm. Les ministères et des organismes régionaux furent créés ayant pour objectif de réduire les conséquences de la séche- resse, de promouvoir l’autosuffisance alimentaire, d’accélérer le développement économique (CILSS, 1973), de développer la recherche (INSAH, 1976) et d’améliorer l’aide (Club du Sa- hel, 1976). Ceux-ci prirent le relais des Nations Unies (UNDRC, UNSO) qui étaient intervenues d’urgence afin de réduire les conséquences de la sécheresse (Carozzi, Tiepolo 1996 : 20). C’est durant cette phase que le dispositif législatif en matière d’environnement fut mis en place. Au Niger, par exemple, une nouvelle législation forestière vit le jour (RN 1974) (tab. 3). Celle-ci montrait l’empreinte coloniale dans son maintien de la gestion étatique. Dans les forêts classées, les
  • 49. 60 communautés locales conservaient les droits de passage, de récolte du bois mort, des fruits, de la gomme, des plantes mé- dicinales mais elles ne pouvaient ni acquérir ni vendre des terres, ni couper les arbres, ni cultiver ou allumer des feux (Elbow, Rochegude 1991 : 10). Au Sénégal, en revanche, l’ensemble du domaine forestier était zone classée (L 74-46 18 juillet 1974). Le ramassage de bois mort, la collecte de fruits, de paille à usage personnel, exigent l’obtention d’un permis délivré gratuitement par le Service des eaux et forêts. Le pâtu- rage était autorisé. Tous les droits d’usage étaient suspendus dans les parcs nationaux, réserves naturelles intégrales et partielles. Il était interdit de défricher et cultiver dans le do- maine forestier. Entre 1972 et 1991, le Sénégal et le Niger ont étendu les zones protégées. Des parcs nationaux et des réserves de la faune furent ainsi institués, correspondant à 35% de la zone protégée actuelle dans les trois Pays (tab. 4). Au Sénégal, la ré- serve de la faune du Ferlo Nord et Sud (1972), les parcs natio- naux du Delta du Saloum (1976) et de la Langue de Barbarie (1976) virent le jour ainsi que 4 réserves plus petites (Gou- moul, Papenguin, Mbour et Bandia). Au Niger, l’immense parc national de l’Aïr-Ténéré (1991) fut créé. Ce dernier, avec ses 77.360 km2, compte parmi les plus vastes parcs d’Afrique (tab. 4). Entre 1981 et 1989, le Code forestier fut suivi de ceux de l’eau, de l’environnement, de la chasse/faune et des res- sources minières. En ce qui concerne la gestion locale de l’environnement, celle-ci relevait du corps forestier dans les sièges régionaux et départementaux qui, d’habitude, avaient un seul agent pour des territoires extrêmement étendus (Carozzi, Tiepolo 2006).
  • 50. 61 Tab. 3 – Burkina Faso, Niger, Sénégal, 2012. Outils de gestion environne- mentale selon niveau administratif (sources : RBF, MECV 2010, RBF 2007, RBF, MAHRH 2006, RBF, MMCE 2005, RBF 1997, RBF, MET 1994, RN, MHELCD 2005, RN, MHELCD 2005, RN, MP 1998, RN 1998, RS, ME 1997, RS 2001, RS 1999, RS, MEPN 1998, RS 1986, RS, PRESDAS -) Niveau Burkina Faso Niger Sénégal État Stratégie croissance accélérée et DD 2010 - - Stratégie réduction pauvreté 2004 2002, 2007 2003, 2011 Stratégie n. développement durable 2003a - 2005 Stratégie développement rural 2004 2006 … Stratégie n. par diversité biologique - 2000 - Stratégie énergie domestique 2005 1992 2008 Lettre politique sectorielle environnem. - - 2004 Lettre politique rurale décentralis. 2002 … Prog. action national adaptation CC 2007 2006 2006 Plan action aires protégées 2012 - - Plan d’action foncier 1996 Plan décennal action environnement 2008 2005 - Plan a. national environnement 2007 2005 1998 Plan action forestier - - 1993 Plan action national LCD GRN 2000 1985, 2000 1998 EIE 1997 Code de l’eau 2001 1993 1981 Code/L. chasse / faune - 1962 1986 Code environnement 1997 1998 1983*, 2001 Code forestier 1997 1974, 2004 1965-1998 Code minier/pétrolier 2003 2007 1989 Code pastoral 2002 - - Code pêche - 1971 1998 Code rural 1993 Loi biosécurité - - 2009 Région Plan action environnementale - - 1997 Commune PLHA 2012 - 2007 Plan action spécifique environnement … - - PCD/PLD 2007-2009 2003-2007 2001-2008 Profil environnemental/État de l’envi. 2004-2008 2006 1993-2005 A21L 2004 - 2006 *Non opérationnel faute de décret d’application.
  • 51. 62 Tab. 4 – Burkina Faso, Niger et Sénégal, 2012. Aires protégées : Parcs natio- naux (PN), Parc national marin (PNm), Réserves de faune (RF), Réserve oi- seaux (RO) (sources : RBF 2012, UICN, PAPACO 2009, UICN 2010) Burkina Faso Niger Sénégal Année Km2 Type Kaboré Tambi 1936 2 427 PN Deux Balés 1937 566 PN Mare aux hippos 1937 192 RO Arly 1950 1 300 RFp W 1954 2 200 PN Basse Casamance 1954 50 PN Niokolo Koba 1954 9 130 PNm Singou 1955 1 920 RFT Pama 1955 2 230 RFp Gadabedji 1956 760 RFT Bontioli 1957 127 RFT Nabéré 1957 365 RFp W 1957 2 350 PN Kourtiagou 1957 510 RFp Dosso 1962 3 065 RFp Tamou 1962 756 RFT Ndiael 1965 465 RF Komoé Leraba 1968 2 800 PN Madjoari 1970 170 RTF Sahel 1970 16 000 RSP Djoudj 1971 160 PNm Ferlo N-S 1972 1 121 RF Delta du Saloum 1976 760 PN Langue Barbarie 1976 8 PN Iles Madeleine 1976 0,4 PN Guembeul 1983 7 RSF Popenguine 1986 10 RN Mbour 1987 … REE Bandia 1990 15 RN Aïr et Ténéré 1991 77 360 RNN Bamboung 2003 68 AMP Mare d’Oursi 2006 12 R Termit TinToumma 2012 97 000 RNN A ceux-ci s’ajoutent les agents des services hydrauliques, des ressources animales, du génie rural. Ces services décen- tralisés établissaient un programme annuel qu’ils présen- taient au ministère compétent pour le financement. Mais les
  • 52. 63 ressources étaient tellement réduites que, dans nombre de cas, elles ne permettaient même pas d’acquérir un moyen de transport, outil essentiel pour exercer les fonctions du service. Au début des années 80, le CILSS a commencé à envisager la possibilité d’un aménagement des forêts naturelles ; c’est-à- dire de protéger les forêts des feux de brousse et du pâturage, d’organiser la production de bois et d’étudier les incidences de la coupe. L’aménagement fut lancé dans les forêts classées. En 1987, à Bamako, un séminaire régional fut consacré à l’élaboration des plans d’aménagement forestier (Adamou et al. 2005). Au Sénégal, selon le Code forestier de 1965, la popu- lation entre 15 ans et 65 ans était mobilisée pour lutter contre le feu, principal facteur de détérioration des forêts. Au Burkina Faso l’un des axes majeurs de la politique inté- rieure du président Thomas Sankara (1983-1987) a été l’environnement. Les « Trois luttes » contre la coupe abusive du bois, la divagation des animaux, les feux de brousse com- prenait la sensibilisation des populations afin qu’elles s’engagent dans un reboisement massif (ceinture verte de Ouagadougou, bosquets de village), dans l’utilisation de foyers améliorés, dans la récolte de semences forestières, dans la création de pépinières et de bosquets entretenus par les écoles. A cette époque date la création du Ministère de l’eau. Rien qu’au Sénégal, entre 1975 et 1992, une trentaine de projets de développement forestier a été réalisée. Ces der- niers couvrent toutes les régions et de nombreux domaines (Bontinot 2001). Au Niger, la participation de la population locale fut invoquée par l’Engagement de Maradi (mai 1984). Par conséquent, à partir de 1989 la politique fores- tière a été caractérisée par une plus grande responsabilisa- tion des communautés locales dans la gestion des res- sources de leur terroir. En 1992 le Pays adopta la Stratégie énergie domestique (SED), liant la gestion de l’offre en bois
  • 53. 64 à celle de la demande énergétique. La SED repose sur l’élaboration de schémas directeurs d’approvisionnement en bois énergie, sur le transfert de la perception des taxes fores- tières de l’État aux communautés locales, sur le transfert de la gestion des massifs forestiers aux populations et sur le renforcement du contrôle forestier (Tarchiani et al. 2008). Au Sénégal le président Abdou Diouf souhaita un effort de reboisement à l’occasion de la Conférence interministé- rielle de 1984. A l’exception du Niger qui avait adopté un Plan de lutte contre la désertification, dans les autres Pays, la partie stratégique et d’aménagement de l’environnement restait encore peu développée. Cette période s’achève avec la création, en 1991, du Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) doté d’1 milliard de dollars financés par différents Partenaires techniques et fi- nanciers (PTF). Initialement, le FEM est mis en place par la Banque Mondiale, par le PNUD et par PNUE. En 1994, le FEM devint un organisme autonome. Son action a pour ob- jectif de mettre en œuvre les conventions sur la diversité bio- logique (1992), sur le changement climatique, sur les pol- luants organiques persistants (2001), sur la lutte contre la dé- sertification (2003). Pendant les vingt premières années d’activité, le FEM a financé, comme nous le verrons dans les paragraphes suivants, un nombre élevé de projets dans la bande sahélienne des trois Pays étudiés. 3. De Rio aux OMD : la naissance de la gestion locale de l’environnement, 1992-2000 La gestion locale de l’environnement a des origines mul- tiples et lointaines. Les performances insatisfaisantes de la gestion centralisée de l’aide au développement des Années 70 sont une des explications les plus fréquemment présen- tées pour justifier la nouvelle orientation de l’aide publique
  • 54. 65 au développement (APD). Celle-ci est également mentionnée dans l’International development and food assistance Act of 1978, promulgué sous la présidence de Carter. Cette loi exige, au- jourd’hui encore, de développer l’aide américaine aux pauvres à travers des institutions au niveau local. Cepen- dant, il ne faut pas négliger la politique des privatisations (thatchérisme) qui, dans les années 80, de façon consciente ou non, a contaminé l’APD. Mais si l’aide au développement devait être retirée à l’état central à qui devait-elle être trans- férée ? La réponse est probablement à l’origine du processus de décentralisation, du moins en Afrique occidentale. La gestion locale trouve sa consécration avec le Sommet de la Terre organisé par les Nations Unies à Rio en 1992 et avec l’Action 21 (ainsi appelée parce qu’elle se réfère au XXIe siècle) qui introduit la participation et le localisme dans la ges- tion environnementale : « Les organismes des Nations Unies, les autres organisations in- ternationales de développement et de financement et les gouverne- ments devraient… prendre… les mesures suivantes… : b) fournir une assistance technique et financière au titre du renforce- ment des capacités des populations autochtones et de leurs com- munautés ; renforcer les programmes de recherche et d’éducation visant à : i) mieux comprendre le savoir faire et l’expérience des populations autochtones en matière de gestion de l’environnement ii) Renforcer l’efficacité des systèmes de gestion des ressources des populations autochtones… d) s’associer aux efforts des populations autochtones et de leurs communautés en ce qui concerne la gestion des ressources et les stratégies de conservation… notamment les programmes d’utilisation des données et d’autres informations à l’appui des projets de développement durable » (Nations Unies 1993 : 199). Sur la base des recommandations du Sommet de Rio, une procédure appelée Agenda 21 Local (A21L) fut mise au point
  • 55. 66 pour établir des plans stratégiques locaux pour l’environnement (ICLEI et al. 1996). Au milieu des années 2000, le CNUEH-Habitat soutenait la création de quelques A21L au Sénégal (RS, MUAT 2004). La démarche commença avec la création du comité municipal A21L qui fut suivie par la rédaction du Profil environnemental, c’est-à-dire l’état de l’environnement secteur par secteur : eaux (approvisionne- ment, eaux souterraines), air, forêts et espaces végétaux, as- sainissement (déchets liquides et solides, réseau d’eaux plu- viales) et patrimoine culturel. Les risques furent ensuite iden- tifiés et décrits. Ces derniers concernaient les problèmes de ruissellement et d’érosion du sol, la désertification, l’insalubrité avec leur impact sur la morbidité et parfois la pol- lution industrielle/artisanale. Enfin, le Profil présentait les protagonistes pouvant être mobilisés, des acteurs institu- tionnels aux associations. Le rapport consentait enfin d’identifier les thèmes prioritaires sur lesquels organiser les consultations. Des groupes de travail sectoriels furent donc créés sur chacun de ces thèmes avec pour objectif de formu- ler des stratégies et des plans d’action thématiques. Les fo- rums communautaires avaient, eux, pour rôle de valider les stratégies et les plans d’action. Ensuite, les Profils de projet de démonstration étaient formulés. C’est à ce moment-là seulement que l’A21L était préparé. Celui-ci récapitulait les stratégies et les plans d’action thématiques. Il était validé par des consultations pour la mise en œuvre de l’A21 et des pactes urbains étaient établis comprenant les engagements de chaque protagoniste. Enfin, des rencontres avec les PTF étaient organisées afin de trouver les financements néces- saires à la réalisation des projets de démonstration. En 2002, selon l’ICLEI (2012), 80% des A21L étaient en vi- gueur dans les économies avancées. Dans les trois Pays objet de ce livre, l’A21L est une expérience essentiellement sénéga- laise, urbaine et circonscrite à sept villes (tab. 5).