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« Nous avons l’opportunité
deconstruire unmonde meilleur »
1965 : naissance à Guildford, sud
est de l’Angleterre
1989 : entre au Sun
1994 : nommé directeur de la ré-
daction de News of The World
1996 : nommé directeur de la ré-
daction du Daily Mirror
2004 : licencié du Daily Mirror
2006 : nommé juge de America’s
Got Talent
2008 : remporte the Celebrity Ap-
prentice
2010 : nommé à la succession de
Larry King.
L
arry King, la star de CNN, a enfin un remplaçant !
Et, stupeur dans le monde américain de la télévi-
sion, le Prime Time de la chaîne du groupe Time
Warner sera occupé par un Anglais ! Piers Morgan aura
la lourde tâche de succéder début janvier à vingt-cinq
années d’interviews quotidiennes menées par celui qui
reste considéré comme l’un des meilleurs spécialistes
du domaine.
Piers Morgan ne part pourtant pas sans atout. En
1994, après cinq ans au Sun, il est nommé à 28 ans à la
tête de News of The World par Rupert Murdoch et de-
vient le plus jeune responsable d’un quotidien national
britannique. Il se fait rapidement connaître pour sa cou-
verture journalistique des célébrités : leur utilisation
des médias à leur propre intérêt doit selon lui avoir com-
me corollaire la perte de leur droit à l’intimité.
Il quitte son poste deux ans plus tard pour diriger un
autre tabloïd, le Daily Mirror. Il y poursuit son style trash
et populiste : il publie en mai 2004 des photos de sol-
dats britanniques torturant des Iraqiens sans s’être assu-
ré que les clichés n’étaient pas des faux… ce qu’ils se
révélèrent être. Refusant de s’excuser publiquement, il
est licencié sur le champ.
Qu’à cela ne tienne, Piers Morgan a depuis quelques
années déjà effectué ses premiers pas à la télévision et
va dès lors se concentrer entièrement à ce nouveau mé-
dia. Après avoir présenté sur BBC une série d’émissions
intitulée « l’importance d’être célèbre », il dirige sa pre-
mière émission d’actualité sur la chaîne britannique
Channel 4. Son échec ne l’empêche pas d’effectuer le
grand saut vers les Etats-Unis : il devient en 2006 l’un
des juges de l’émission de divertissement America’s
Got Talent, avant de prendre l’année suivante le même
rôle dans son équivalent britannique. Sa renommée est
née pourtant de sa participation et de sa victoire en
2008 dans l’émission menée par le milliardaire Donal
trump « The Celebrity Apprentice ». Méchant, cruel et hu-
miliant, il devient rapidement la terreur des écrans amé-
ricains.
La chaîne britannique ITV lui propose dès lors un con-
trat annuel de 2 millions de livres sterling pour poursui-
vre pendant deux ans son rôle de juge dans Britain’s
Got Talent, créer une émission à son nom, réaliser plu-
sieurs interviews et des documentaires dans différents
pays. Ce contrat a pourtant été rompu à l’amiable suite
à l’accord donné à CNN.
Pour ajouter un peu de piment à cette existence déjà
bien mouvementée, après quinze ans de mariage, Piers
Morgan se sépare en 2006 de la mère de ses trois en-
fants, dont il divorce en 2008. Il rend public au même
moment sa relation avec Celia Walden, romancière et
journaliste spécialisée dans les ragots. Leurs dix-neuf
années de différence et la beauté de sa jeune épouse
deviennent autant d’ingrédients pour satisfaire l’appé-
tit des médias people où Piers Morgan avait œuvré. Un
vrai retour à l’envoyeur… ■ TRISTAN DE BOURBON,
à Londres
ENQUÊTE
I
ls sont encore une minorité, disséminés aux
quatre coins de l’Europe et des Etats-Unis. Ils
sont apolitiques, mais conscientisés à la cause
écologiste et forment de petites communau-
tés. Tous ont compris une chose : il faut – vi-
te – changer le mode de vie de l’Occident pour con-
trer le pic des énergies fossiles. Les « transitioners »
tracent leur route hors de la consommation de mas-
se, la trinité « discount-malbouffe-gadgets tech-
nos » et les injonctions au « toujours plus ». Ils pré-
parent les villes, quartier par quartier, à la flambée
des prix du pétrole. Car le « Pic de Hubbert » est
inéluctable. Or, selon cette célèbre courbe en clo-
che, la production d’or noir devrait décliner après
avoir atteint son sommet, du fait de l’épuisement
des réserves de pétrole exploitables.
Le réseau des Transition Towns est né en 2006
en Angleterre en réaction au phénomène du pic pé-
trolier mondial (Peak Oil) et des changements cli-
matiques. « L’approche Transition veut amener les
citoyens et différents acteurs d’une communauté à
prendre conscience du pic pétrolier et des change-
ments climatiques pour ensuite passer à l’action
d’une manière créative, explique Rob Hopkins, ini-
tiateur du mouvement. En misant, entre autres, sur
la production alimentaire et énergétique à l’échelle
locale, le transport durable et l’efficacité énergéti-
que, une communauté augmente son autosuffisance
et réduit sa vulnérabilité aux contrecoups imprévi-
sibles reliés à ces phénomènes ainsi que l’instabilité
économique ». La notion de transition traduit ce tra-
vail sur la durée : on est en marche vers un autre
modèle, le changement est en cours.
Pionnière de la démarche, Totnes, ville de 8.000
âmes située dans le Devon, à l’extrême sud-ouest de
l’Angleterre, est la plus avancée dans le processus.
Tout a commencé en 2006, quand quelques habi-
tants se sont regroupés autour du professeur Hop-
kins pour passer du concept théorique à l’action.
Pour Hopkins, il appartient à chaque communau-
té, à chaque entité locale, de construire la « résilien-
ce » qui lui permettra d’encaisser les bouleverse-
ments sociétaux générés par le pic pétrolier et la cri-
se climatique. Il s’agit de préparer dès aujourd’hui
un futur moins gourmand en énergie en élaborant
des systèmes de production, de consommation et de
vie en commun conciliables avec les contraintes éco-
logiques, économiques et sociales qui s’annoncent.
Et les initiatives éclosent. Une monnaie, la Totnes
pound, a été créée afin d’encourager l’économie et
le commerce locaux. L’utilisation de cette devise
s’accompagned’une incitationà réfléchir aux dépen-
ses et à en parler, élément important dans une dé-
marche de sevrage des habitudes de (sur)consom-
mation. Un « garden share scheme », programme
departage des jardins privés, aété mis surpied. Tou-
te personne possédant un terrain inutilisé est invi-
tée à conclure un contrat avec des planteurs-jardi-
niers pour qu’ilscultivent cet espace. Objectif : déve-
lopper la production de fruits et légumes sur le terri-
toire. Côté mobilité, des pousse-pousse indiens ont
été adaptés et équipés de moteurs utilisant un car-
burant produit à partir d’huile de cuisine recyclée
localement.
A Bruxelles aussi
Après avoir essaimé en Grande-Bretagne et en Ir-
lande, le concept a fait des émules aux Etats-Unis,
en Nouvelle-Zélande, au Japon et au Chili. Des pro-
jets sont en gestation en France et en Italie. Il y a
aujourd’hui plus de 359 initiatives de Transition,
parmi lesquelles 169 se trouvent au Royaume-Uni.
Et 208 initiatives sont en phase d’affinage.
En Belgique aussi, les choses commencent à bou-
ger. Une dizaine de groupes sont déjà actifs, au
Nord comme au Sud, et l’on compte une centaine
de militants dans les cellules les plus actives. Du cô-
té néerlandophone, l’association Aardewerk a lan-
cé, à l’automne 2008, les premières séances d’infor-
mation sur la démarche. En Wallonie, ce sont Les
Amis de la Terre qui ont pris la main pour impulser
des « Comités de transition » avec une première concré-
tisation à Ottignies-Louvain-la-Neuve, Grez-Doiceau,
Amay, Floreffe, Nivelles et Bruxelles.
« Pour nous, nul besoin d’attendre les autorités, le pas-
sage à l’acte se fait ici et maintenant, localement et en-
semble », sourit Dries Maes, Flamand de Schaerbeek, pe-
tite trentaine et look premier de classe. Ingénieur en
construction, passionné par le biomimétisme, Dries tra-
vaille dans la consultance en durabilité pour les entrepri-
ses – il a créé sa boîte avec quelques associés en 2007. Il
est parmi les principaux instigateurs du mouvement Vil-
les en transition à Bruxelles. « La démarche transition-
nelle n’est pas subventionnée et n’est supportée par aucu-
ne structure ni organisme politique. C’est une volonté : il
s’agit de montrer qu’on n’a besoin de rien, qu’on a les res-
sources pour réaliser les choses nous-mêmes. Le but ulti-
me du mouvement est de diminuer notre dépendance au
pétrole, d’augmenter la résilience de la communauté lo-
cale et de créer du lien social. »
Dans la capitale, un groupe de pilotage a été créé fin
2009. Il se structure autour de groupes de travail axés
sur la mobilité, l’énergie, l’enseignement, l’alimentation,
le logement… Leurs armes ? Apprendre aux citadins à
moins puiser au robinet des énergies fossiles, à troquer
l’importation de la nourriture pour les ressources loca-
les. Avec l’appui de quelques enthousiastes, Driesorgani-
se la conversion de Schaerbeek. « Nous avançons lente-
ment, car à Bruxelles, c’est difficile de rassembler les gens
par quartier. C’est une ville avec des communautés parti-
culièrement éclatées ». Certains groupes se sont attaqués
au panier nourriture de leurs concitoyens, d’autres à
leurs poubelles, d’autres encore ciblent leur voiture ou
leur compteur électrique. « Il s’agit aussi de faire réali-
ser aux gens que la spéculation économique est à la sour-
ce du problème. Que consommer à outrance alimente la
croissance et le changement climatique. »
Fabian Féraux, jeune trentenaire au visage rieur, a
pris la tête du groupe de pilotage de Schaerbeek, pour
les prochains mois. Entre ateliers de recyclage, gestion
du compost et guerilla gardening, les transitioners
schaerbeekois ne carburent, selon lui, qu’à une seule phi-
losophie : la convivialité. « Les environnementalistes
manquent de perspectives dans leurs prévisions. Ils pa-
ralysent les gens plus qu’ils ne les encouragent. Notre
mouvement invite chacun à agir avec ce qui existe, com-
me les associations locales. On parle ici de transition,
pas de révolution : les actions touchent aux énergies re-
nouvelables, au recyclage, au respect de la terre nourri-
cière… La révolution est dans les mentalités, car il s’agit
de se prendre en main pour préparer l’après-pétrole non
comme la fin d’un monde, mais tel un commencement. »
A Schaerbeek, le troc ressurgit sous forme de monnaie
locale dans le SEL (Système d’échanges locaux) de la pla-
ce Dailly. « Ça nous permet d’échanger des savoir-faire,
parfois oubliés, à travers un système de troc sophistiqué.
Vous obtenez des services en rendant les vôtres à d’autres
personnes. Avec pour principe qu’aucun service n’est
meilleur qu’un autre. Vous apprenez à quelqu’un l’espa-
gnol, et quelqu’un d’autre fera du baby-sitting pour
vous. L’unité de l’échange est le Grain de SEL, qui a une
valeur horaire ». Une heure de travail équivaut à 60
grains de SEL. Une monnaie à forte valeur sociale : elle
retisse le tissu villageois, ressoude les liens intergénéra-
tionnels et revalorise les compétences ou-
bliées.
A Neufchâteau ou à Grez-Doiceau, des éo-
liennes citoyennes, des potagers collectifs, des
ateliers de cueillette sauvage ou des bibliothè-
ques spontanées essaiment sur quelques terri-
toires que se partagent badauds, designers de
permaculture et militants de l’après-effondre-
ment. « Nous veillons à faire des activités peu
consommatrices en énergie », confie Eric Luyc-
kx, 47 ans, en charge du groupe de Nethen.
Groupes d’achats
Côté nourriture, les transitioners font leurs
courses localement, se fournissent en fruits et
légumes bio à travers les réseaux de Gasap
(Groupes d’achats solidaires de l’agriculture
paysanne) ou cultivent dans des jardins collec-
tifs. Pour l’énergie, ils s’approvisionnent au-
près d’opérateurs verts de la région, cherchent
l’autonomie énergétique via les biomasses ou
autres sources d’énergie renouvelable et vont
améliorer l’isolation de leurs habitats. « On ne
demande pas à tout le monde de faire partie du
projet, dit Dries Maes. Il suffit d’une poignée
de gens pour construire un pont que des centai-
nes de personnes peuvent emprunter. »
Une dynamique solidaire
« L’humanité ne fonctionne pas sans lien so-
cial, embraye Ivan Markoff, quinqua, le che-
veu hirsute, la barbe drue, vivant entre Saint-
Josse et Namur. Le néolibéralisme a nié cet as-
pect des choses. Or même l’économie est essen-
tiellement faite de lien et d’échange ». « Et un
idéal de monde économique durable fonction-
ne comme un écosystème pérenne, postule Fa-
bian Féraux. Chaque espèce naturelle ou cha-
que unité économique travaille en balance
avec les autres, aucune ne peut vivre en indé-
pendance ». Une réflexion que les compères
souhaitent transposer à l’échelle du quartier.
« Plutôt que d’élaborer des structures vertica-
les, hiérarchiques, nos groupes de travail s’or-
ganisent sous forme de grappes éphémères. Au
terme d’un projet, le groupe se dissout pour en
former un autre, avec de nouveaux membres.
Ça permet aux idées de circuler de manière très
organique. Et aux membres de se mélanger,
comme des molécules », explique Fabian.
Le mouvement peut-il aller plus loin, con-
vaincre des bourgmestres, des ministres ? Ivan
Markoff n’y croit pas. « Il ne faut pas attendre
le gouvernement pour faire avancer les choses.
Les gouvernements font face à des situations
qui les dépassent. Il faut agir dès maintenant,
communauté par communauté ». Mais en
mars dernier, la commune de Forest est deve-
nue la première à se doter d’un échevin de la
Transition économique. « Cette requalifica-
tion de mes compétences illustre la volonté de
la commune d’engager une relocalisation de
l’économie afin de préparer la nécessaire “dé-
pendance zéro” à l’énergie fossile. Car la fin des
”poches de soleil gratuites” va nous forcer à to-
talement modifier notre système économique.
La bonne nouvelle, c’est que cette transition
nous apportera des nouveaux emplois non
délocalisables », dit l’échevin socialiste Grégor
Chapelle. A Totnes, les cousins britanniques
ne disent pas autre chose.■ RAFAL NACZYK
www.amisdelaterre.be/
www.villesentransition.net/
Pic pétrolier C’est l’ins-
tant à partir duquel la pro-
duction de pétrole décline-
ra, faute de réserves nou-
velles suffisantes. L’Agen-
ce internationale de l’éner-
gie (AIE), qui a longtemps
nié le sujet, a déclaré en
2009 que le pic viendra
peut-être vers 2020, mais
qu’il pourrait déjà interve-
nir en 2010 si la demande
mondiale dépasse l’offre.
En clair, il s’agit d’un chan-
gement d’ère, ni plus ni
moins. Car le pétrole est
le liquide matriciel de la
croissance depuis plus de
cinquante ans. En dehors
des crises politiques de
1973 et 1979, le monde ne
s’est jamais trouvé à
court.
Résilience C’est le de-
gré de capacité d’une loca-
lité à absorber un choc
(ici, la fin du pétrole abon-
dant et bon marché) sans
s’effondrer.
Permaculture C’est
une agriculture qui s’af-
franchit du pétrole. C’est
la culture de la permanen-
ce. Elle regroupe des prin-
cipes et des pratiques vi-
sant à créer une produc-
tion agricole soutenable,
économe en énergie, socia-
lement équitable et res-
pectueuse des êtres vi-
vants.
M
ené par Rob Hopkins, professeur de permacul-
ture, le mouvement de la Transition a pris
corps en 2006 à Totnes, ville anglaise de 8.000
habitants, avant d’essaimer dans le monde. Hopkins
est convaincu que « sans pétrole, nos sociétés s’effon-
drent ». En décortiquant notre mode de vie, nos dépla-
cements et nos assiettes, il est arrivé à cette conclu-
sion : on peut se désintoxiquer, mais il faut du temps.
Vous développez l’idée de la résilience par opposi-
tion à la rupture prônée par les objecteurs de crois-
sance. Pourquoi ?
Nous laissons derrière nous un temps où notre succès
économique, notre sentiment de réussite et de bien-être
individuel est directement lié à notre consommation de
pétrole pour entrer dans une période où notre degré de
dépendance au pétrole devient notre degré de vulnérabili-
té. Pour quatre barils de pétrole que nous consommons
nous en découvrons un. Et cet écart continue à grandir.
Actuellement, il y a 98 pays producteurs de pétrole dans
le monde. Dont 65 ont déjà dépassé leur pic. Il est donc
grand temps de penser à l’adaptation ou la « transition »
de nos communautés vers des solutions durables. D’où le
concept de résilience, qui désigne la capacité à résister
aux chocs, non par une solidité à toute épreuve, mais par
la faculté à reprendre forme aisément après une perturba-
tion importante. C’est l’opportunité pour l’humanité de
construire un monde meilleur.
Comment se structure le mouvement ?
Une ville entame sa transition lorsqu’un groupe d’indivi-
dus se rassemble autour d’une question : comment leur
communauté peut-elle atténuer les effets d’une potentiel-
le pénurie de pétrole et réduire drastiquement ses émis-
sions de carbone pour contrer le changement climati-
que ? Ou comment rendre leurs villes résilientes par la
quête de l’autarcie énergétique et alimentaire ? Le projet
remporte un tel succès que nous avons à ce jour 359 Villes
et cités en transition .
C’est un nouveau type de gouvernance ?
Nous n’en avons pas la prétention. Le mouvement veut
redonner la possibilité aux citoyens de concevoir et d’im-
pulser leurs initiatives. C’est une dynamique « bottom-
up » qui redonne une liberté créative aux citoyens. Le but
est de créer un maximum de connexions avec les autori-
tés politiques, notamment par la création de groupes de
liaison avec les gouvernements locaux. Idéalement, il fau-
drait que les autorités nationales s’inscrivent dans une dé-
marche transitionnelle plus globale.
Les Villes en transition ont initié des systèmes de
troc comme les monnaies complémentaires ou
l’échange de semences. Quelles autres initiatives ?
Les villes de Totnes et Lewes créent les premières socié-
tés énergétiques détenues et gérées par la communauté.
L’antenne de Stroud a elle-même rédigé la stratégie ali-
mentaire du conseil. En Ecosse, un groupe a mis au point
l’accès à la propriété pour les nouveaux lotissements
dans leur région. ■ Propos recueillis par R.N.
L’acteur
Piers Morgan
L’Anglais qui va remplacer Larry King
DES HOMMES ET DES FEMMES ont décidé
de prendre leur avenir en main et de préparer
la société de l’après-pétrole. Leur mouvement
porte un nom : la Transition.
Ils préparent déjà l’après-pétrole
zoom zoom
LEXIQUE
Il y a 2 ans, Lehman Brothers
faisait faillite.
Après la crise,
sommes-nous toujours
en crise ?
Neuf ans après
le 9/11, le procès
du cerveau
présumé
des attentats
se prépare
A lire demain
dans nos pages...
Un numéro
Spécial
Mode
Pourquoi
doit-on attendre
2011 pour lire
le meilleur livre
de l’année ?
Le plan B,
ils en ont parlé.
Le Soir l’a imaginé
5 pages spéciales
FRONTIÈRES, NOM, SYMBOLES
NATIONAUX, JUSTICE, SPORT
A quoi ressemblerait un
pays sans la Flandre ?
P
d
2
le
d
“L’après-pétrole n’est pas la fin
d’un monde, mais un com-
mencement. » Fabian, transitioner belge
Un journaliste du Soir
vous répond, tous les
jours de la semaine, à
11h02 précises, face camé-
ra. Aujourd’hui, Alain Lalle-
mand, sur la commémora-
tion du 11 septembre, la
menace de brûler le Coran
sur les lieux de la tragédie,
le projet de mosquée sur le
site... Posez vos questions
dès 10 heures, sur
www/lesoir.be/polemi-
ques/
Un livre peut-il
changer le monde ?
Participez à notre sondage
et faites connaître le livre
qui a changé votre vie :
www. lesoir.be/culture/li-
vres/
© DANIEL DEME/EPA.
ROB HOPKINS, l’initiateur du mouvement.
© ROSALIE PORTMAN / STEPHEN PRIOR.DRIES MAES ET FABIAN FÉRAUX, deux têtes de pont du mouvement « Villes en transition » en Belgique. © ALAIN DEWEZ.
Le Soir Vendredi 10 septembre 2010 Le Soir Vendredi 10 septembre 2010
16 17
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Accord PS-EELV
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Grands parents pour le climat (v 31-05-18)
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Etat des lieux sur les changements climatiques
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Villes en transition le soir 20100910

  • 1. « Nous avons l’opportunité deconstruire unmonde meilleur » 1965 : naissance à Guildford, sud est de l’Angleterre 1989 : entre au Sun 1994 : nommé directeur de la ré- daction de News of The World 1996 : nommé directeur de la ré- daction du Daily Mirror 2004 : licencié du Daily Mirror 2006 : nommé juge de America’s Got Talent 2008 : remporte the Celebrity Ap- prentice 2010 : nommé à la succession de Larry King. L arry King, la star de CNN, a enfin un remplaçant ! Et, stupeur dans le monde américain de la télévi- sion, le Prime Time de la chaîne du groupe Time Warner sera occupé par un Anglais ! Piers Morgan aura la lourde tâche de succéder début janvier à vingt-cinq années d’interviews quotidiennes menées par celui qui reste considéré comme l’un des meilleurs spécialistes du domaine. Piers Morgan ne part pourtant pas sans atout. En 1994, après cinq ans au Sun, il est nommé à 28 ans à la tête de News of The World par Rupert Murdoch et de- vient le plus jeune responsable d’un quotidien national britannique. Il se fait rapidement connaître pour sa cou- verture journalistique des célébrités : leur utilisation des médias à leur propre intérêt doit selon lui avoir com- me corollaire la perte de leur droit à l’intimité. Il quitte son poste deux ans plus tard pour diriger un autre tabloïd, le Daily Mirror. Il y poursuit son style trash et populiste : il publie en mai 2004 des photos de sol- dats britanniques torturant des Iraqiens sans s’être assu- ré que les clichés n’étaient pas des faux… ce qu’ils se révélèrent être. Refusant de s’excuser publiquement, il est licencié sur le champ. Qu’à cela ne tienne, Piers Morgan a depuis quelques années déjà effectué ses premiers pas à la télévision et va dès lors se concentrer entièrement à ce nouveau mé- dia. Après avoir présenté sur BBC une série d’émissions intitulée « l’importance d’être célèbre », il dirige sa pre- mière émission d’actualité sur la chaîne britannique Channel 4. Son échec ne l’empêche pas d’effectuer le grand saut vers les Etats-Unis : il devient en 2006 l’un des juges de l’émission de divertissement America’s Got Talent, avant de prendre l’année suivante le même rôle dans son équivalent britannique. Sa renommée est née pourtant de sa participation et de sa victoire en 2008 dans l’émission menée par le milliardaire Donal trump « The Celebrity Apprentice ». Méchant, cruel et hu- miliant, il devient rapidement la terreur des écrans amé- ricains. La chaîne britannique ITV lui propose dès lors un con- trat annuel de 2 millions de livres sterling pour poursui- vre pendant deux ans son rôle de juge dans Britain’s Got Talent, créer une émission à son nom, réaliser plu- sieurs interviews et des documentaires dans différents pays. Ce contrat a pourtant été rompu à l’amiable suite à l’accord donné à CNN. Pour ajouter un peu de piment à cette existence déjà bien mouvementée, après quinze ans de mariage, Piers Morgan se sépare en 2006 de la mère de ses trois en- fants, dont il divorce en 2008. Il rend public au même moment sa relation avec Celia Walden, romancière et journaliste spécialisée dans les ragots. Leurs dix-neuf années de différence et la beauté de sa jeune épouse deviennent autant d’ingrédients pour satisfaire l’appé- tit des médias people où Piers Morgan avait œuvré. Un vrai retour à l’envoyeur… ■ TRISTAN DE BOURBON, à Londres ENQUÊTE I ls sont encore une minorité, disséminés aux quatre coins de l’Europe et des Etats-Unis. Ils sont apolitiques, mais conscientisés à la cause écologiste et forment de petites communau- tés. Tous ont compris une chose : il faut – vi- te – changer le mode de vie de l’Occident pour con- trer le pic des énergies fossiles. Les « transitioners » tracent leur route hors de la consommation de mas- se, la trinité « discount-malbouffe-gadgets tech- nos » et les injonctions au « toujours plus ». Ils pré- parent les villes, quartier par quartier, à la flambée des prix du pétrole. Car le « Pic de Hubbert » est inéluctable. Or, selon cette célèbre courbe en clo- che, la production d’or noir devrait décliner après avoir atteint son sommet, du fait de l’épuisement des réserves de pétrole exploitables. Le réseau des Transition Towns est né en 2006 en Angleterre en réaction au phénomène du pic pé- trolier mondial (Peak Oil) et des changements cli- matiques. « L’approche Transition veut amener les citoyens et différents acteurs d’une communauté à prendre conscience du pic pétrolier et des change- ments climatiques pour ensuite passer à l’action d’une manière créative, explique Rob Hopkins, ini- tiateur du mouvement. En misant, entre autres, sur la production alimentaire et énergétique à l’échelle locale, le transport durable et l’efficacité énergéti- que, une communauté augmente son autosuffisance et réduit sa vulnérabilité aux contrecoups imprévi- sibles reliés à ces phénomènes ainsi que l’instabilité économique ». La notion de transition traduit ce tra- vail sur la durée : on est en marche vers un autre modèle, le changement est en cours. Pionnière de la démarche, Totnes, ville de 8.000 âmes située dans le Devon, à l’extrême sud-ouest de l’Angleterre, est la plus avancée dans le processus. Tout a commencé en 2006, quand quelques habi- tants se sont regroupés autour du professeur Hop- kins pour passer du concept théorique à l’action. Pour Hopkins, il appartient à chaque communau- té, à chaque entité locale, de construire la « résilien- ce » qui lui permettra d’encaisser les bouleverse- ments sociétaux générés par le pic pétrolier et la cri- se climatique. Il s’agit de préparer dès aujourd’hui un futur moins gourmand en énergie en élaborant des systèmes de production, de consommation et de vie en commun conciliables avec les contraintes éco- logiques, économiques et sociales qui s’annoncent. Et les initiatives éclosent. Une monnaie, la Totnes pound, a été créée afin d’encourager l’économie et le commerce locaux. L’utilisation de cette devise s’accompagned’une incitationà réfléchir aux dépen- ses et à en parler, élément important dans une dé- marche de sevrage des habitudes de (sur)consom- mation. Un « garden share scheme », programme departage des jardins privés, aété mis surpied. Tou- te personne possédant un terrain inutilisé est invi- tée à conclure un contrat avec des planteurs-jardi- niers pour qu’ilscultivent cet espace. Objectif : déve- lopper la production de fruits et légumes sur le terri- toire. Côté mobilité, des pousse-pousse indiens ont été adaptés et équipés de moteurs utilisant un car- burant produit à partir d’huile de cuisine recyclée localement. A Bruxelles aussi Après avoir essaimé en Grande-Bretagne et en Ir- lande, le concept a fait des émules aux Etats-Unis, en Nouvelle-Zélande, au Japon et au Chili. Des pro- jets sont en gestation en France et en Italie. Il y a aujourd’hui plus de 359 initiatives de Transition, parmi lesquelles 169 se trouvent au Royaume-Uni. Et 208 initiatives sont en phase d’affinage. En Belgique aussi, les choses commencent à bou- ger. Une dizaine de groupes sont déjà actifs, au Nord comme au Sud, et l’on compte une centaine de militants dans les cellules les plus actives. Du cô- té néerlandophone, l’association Aardewerk a lan- cé, à l’automne 2008, les premières séances d’infor- mation sur la démarche. En Wallonie, ce sont Les Amis de la Terre qui ont pris la main pour impulser des « Comités de transition » avec une première concré- tisation à Ottignies-Louvain-la-Neuve, Grez-Doiceau, Amay, Floreffe, Nivelles et Bruxelles. « Pour nous, nul besoin d’attendre les autorités, le pas- sage à l’acte se fait ici et maintenant, localement et en- semble », sourit Dries Maes, Flamand de Schaerbeek, pe- tite trentaine et look premier de classe. Ingénieur en construction, passionné par le biomimétisme, Dries tra- vaille dans la consultance en durabilité pour les entrepri- ses – il a créé sa boîte avec quelques associés en 2007. Il est parmi les principaux instigateurs du mouvement Vil- les en transition à Bruxelles. « La démarche transition- nelle n’est pas subventionnée et n’est supportée par aucu- ne structure ni organisme politique. C’est une volonté : il s’agit de montrer qu’on n’a besoin de rien, qu’on a les res- sources pour réaliser les choses nous-mêmes. Le but ulti- me du mouvement est de diminuer notre dépendance au pétrole, d’augmenter la résilience de la communauté lo- cale et de créer du lien social. » Dans la capitale, un groupe de pilotage a été créé fin 2009. Il se structure autour de groupes de travail axés sur la mobilité, l’énergie, l’enseignement, l’alimentation, le logement… Leurs armes ? Apprendre aux citadins à moins puiser au robinet des énergies fossiles, à troquer l’importation de la nourriture pour les ressources loca- les. Avec l’appui de quelques enthousiastes, Driesorgani- se la conversion de Schaerbeek. « Nous avançons lente- ment, car à Bruxelles, c’est difficile de rassembler les gens par quartier. C’est une ville avec des communautés parti- culièrement éclatées ». Certains groupes se sont attaqués au panier nourriture de leurs concitoyens, d’autres à leurs poubelles, d’autres encore ciblent leur voiture ou leur compteur électrique. « Il s’agit aussi de faire réali- ser aux gens que la spéculation économique est à la sour- ce du problème. Que consommer à outrance alimente la croissance et le changement climatique. » Fabian Féraux, jeune trentenaire au visage rieur, a pris la tête du groupe de pilotage de Schaerbeek, pour les prochains mois. Entre ateliers de recyclage, gestion du compost et guerilla gardening, les transitioners schaerbeekois ne carburent, selon lui, qu’à une seule phi- losophie : la convivialité. « Les environnementalistes manquent de perspectives dans leurs prévisions. Ils pa- ralysent les gens plus qu’ils ne les encouragent. Notre mouvement invite chacun à agir avec ce qui existe, com- me les associations locales. On parle ici de transition, pas de révolution : les actions touchent aux énergies re- nouvelables, au recyclage, au respect de la terre nourri- cière… La révolution est dans les mentalités, car il s’agit de se prendre en main pour préparer l’après-pétrole non comme la fin d’un monde, mais tel un commencement. » A Schaerbeek, le troc ressurgit sous forme de monnaie locale dans le SEL (Système d’échanges locaux) de la pla- ce Dailly. « Ça nous permet d’échanger des savoir-faire, parfois oubliés, à travers un système de troc sophistiqué. Vous obtenez des services en rendant les vôtres à d’autres personnes. Avec pour principe qu’aucun service n’est meilleur qu’un autre. Vous apprenez à quelqu’un l’espa- gnol, et quelqu’un d’autre fera du baby-sitting pour vous. L’unité de l’échange est le Grain de SEL, qui a une valeur horaire ». Une heure de travail équivaut à 60 grains de SEL. Une monnaie à forte valeur sociale : elle retisse le tissu villageois, ressoude les liens intergénéra- tionnels et revalorise les compétences ou- bliées. A Neufchâteau ou à Grez-Doiceau, des éo- liennes citoyennes, des potagers collectifs, des ateliers de cueillette sauvage ou des bibliothè- ques spontanées essaiment sur quelques terri- toires que se partagent badauds, designers de permaculture et militants de l’après-effondre- ment. « Nous veillons à faire des activités peu consommatrices en énergie », confie Eric Luyc- kx, 47 ans, en charge du groupe de Nethen. Groupes d’achats Côté nourriture, les transitioners font leurs courses localement, se fournissent en fruits et légumes bio à travers les réseaux de Gasap (Groupes d’achats solidaires de l’agriculture paysanne) ou cultivent dans des jardins collec- tifs. Pour l’énergie, ils s’approvisionnent au- près d’opérateurs verts de la région, cherchent l’autonomie énergétique via les biomasses ou autres sources d’énergie renouvelable et vont améliorer l’isolation de leurs habitats. « On ne demande pas à tout le monde de faire partie du projet, dit Dries Maes. Il suffit d’une poignée de gens pour construire un pont que des centai- nes de personnes peuvent emprunter. » Une dynamique solidaire « L’humanité ne fonctionne pas sans lien so- cial, embraye Ivan Markoff, quinqua, le che- veu hirsute, la barbe drue, vivant entre Saint- Josse et Namur. Le néolibéralisme a nié cet as- pect des choses. Or même l’économie est essen- tiellement faite de lien et d’échange ». « Et un idéal de monde économique durable fonction- ne comme un écosystème pérenne, postule Fa- bian Féraux. Chaque espèce naturelle ou cha- que unité économique travaille en balance avec les autres, aucune ne peut vivre en indé- pendance ». Une réflexion que les compères souhaitent transposer à l’échelle du quartier. « Plutôt que d’élaborer des structures vertica- les, hiérarchiques, nos groupes de travail s’or- ganisent sous forme de grappes éphémères. Au terme d’un projet, le groupe se dissout pour en former un autre, avec de nouveaux membres. Ça permet aux idées de circuler de manière très organique. Et aux membres de se mélanger, comme des molécules », explique Fabian. Le mouvement peut-il aller plus loin, con- vaincre des bourgmestres, des ministres ? Ivan Markoff n’y croit pas. « Il ne faut pas attendre le gouvernement pour faire avancer les choses. Les gouvernements font face à des situations qui les dépassent. Il faut agir dès maintenant, communauté par communauté ». Mais en mars dernier, la commune de Forest est deve- nue la première à se doter d’un échevin de la Transition économique. « Cette requalifica- tion de mes compétences illustre la volonté de la commune d’engager une relocalisation de l’économie afin de préparer la nécessaire “dé- pendance zéro” à l’énergie fossile. Car la fin des ”poches de soleil gratuites” va nous forcer à to- talement modifier notre système économique. La bonne nouvelle, c’est que cette transition nous apportera des nouveaux emplois non délocalisables », dit l’échevin socialiste Grégor Chapelle. A Totnes, les cousins britanniques ne disent pas autre chose.■ RAFAL NACZYK www.amisdelaterre.be/ www.villesentransition.net/ Pic pétrolier C’est l’ins- tant à partir duquel la pro- duction de pétrole décline- ra, faute de réserves nou- velles suffisantes. L’Agen- ce internationale de l’éner- gie (AIE), qui a longtemps nié le sujet, a déclaré en 2009 que le pic viendra peut-être vers 2020, mais qu’il pourrait déjà interve- nir en 2010 si la demande mondiale dépasse l’offre. En clair, il s’agit d’un chan- gement d’ère, ni plus ni moins. Car le pétrole est le liquide matriciel de la croissance depuis plus de cinquante ans. En dehors des crises politiques de 1973 et 1979, le monde ne s’est jamais trouvé à court. Résilience C’est le de- gré de capacité d’une loca- lité à absorber un choc (ici, la fin du pétrole abon- dant et bon marché) sans s’effondrer. Permaculture C’est une agriculture qui s’af- franchit du pétrole. C’est la culture de la permanen- ce. Elle regroupe des prin- cipes et des pratiques vi- sant à créer une produc- tion agricole soutenable, économe en énergie, socia- lement équitable et res- pectueuse des êtres vi- vants. M ené par Rob Hopkins, professeur de permacul- ture, le mouvement de la Transition a pris corps en 2006 à Totnes, ville anglaise de 8.000 habitants, avant d’essaimer dans le monde. Hopkins est convaincu que « sans pétrole, nos sociétés s’effon- drent ». En décortiquant notre mode de vie, nos dépla- cements et nos assiettes, il est arrivé à cette conclu- sion : on peut se désintoxiquer, mais il faut du temps. Vous développez l’idée de la résilience par opposi- tion à la rupture prônée par les objecteurs de crois- sance. Pourquoi ? Nous laissons derrière nous un temps où notre succès économique, notre sentiment de réussite et de bien-être individuel est directement lié à notre consommation de pétrole pour entrer dans une période où notre degré de dépendance au pétrole devient notre degré de vulnérabili- té. Pour quatre barils de pétrole que nous consommons nous en découvrons un. Et cet écart continue à grandir. Actuellement, il y a 98 pays producteurs de pétrole dans le monde. Dont 65 ont déjà dépassé leur pic. Il est donc grand temps de penser à l’adaptation ou la « transition » de nos communautés vers des solutions durables. D’où le concept de résilience, qui désigne la capacité à résister aux chocs, non par une solidité à toute épreuve, mais par la faculté à reprendre forme aisément après une perturba- tion importante. C’est l’opportunité pour l’humanité de construire un monde meilleur. Comment se structure le mouvement ? Une ville entame sa transition lorsqu’un groupe d’indivi- dus se rassemble autour d’une question : comment leur communauté peut-elle atténuer les effets d’une potentiel- le pénurie de pétrole et réduire drastiquement ses émis- sions de carbone pour contrer le changement climati- que ? Ou comment rendre leurs villes résilientes par la quête de l’autarcie énergétique et alimentaire ? Le projet remporte un tel succès que nous avons à ce jour 359 Villes et cités en transition . C’est un nouveau type de gouvernance ? Nous n’en avons pas la prétention. Le mouvement veut redonner la possibilité aux citoyens de concevoir et d’im- pulser leurs initiatives. C’est une dynamique « bottom- up » qui redonne une liberté créative aux citoyens. Le but est de créer un maximum de connexions avec les autori- tés politiques, notamment par la création de groupes de liaison avec les gouvernements locaux. Idéalement, il fau- drait que les autorités nationales s’inscrivent dans une dé- marche transitionnelle plus globale. Les Villes en transition ont initié des systèmes de troc comme les monnaies complémentaires ou l’échange de semences. Quelles autres initiatives ? Les villes de Totnes et Lewes créent les premières socié- tés énergétiques détenues et gérées par la communauté. L’antenne de Stroud a elle-même rédigé la stratégie ali- mentaire du conseil. En Ecosse, un groupe a mis au point l’accès à la propriété pour les nouveaux lotissements dans leur région. ■ Propos recueillis par R.N. L’acteur Piers Morgan L’Anglais qui va remplacer Larry King DES HOMMES ET DES FEMMES ont décidé de prendre leur avenir en main et de préparer la société de l’après-pétrole. Leur mouvement porte un nom : la Transition. Ils préparent déjà l’après-pétrole zoom zoom LEXIQUE Il y a 2 ans, Lehman Brothers faisait faillite. Après la crise, sommes-nous toujours en crise ? Neuf ans après le 9/11, le procès du cerveau présumé des attentats se prépare A lire demain dans nos pages... Un numéro Spécial Mode Pourquoi doit-on attendre 2011 pour lire le meilleur livre de l’année ? Le plan B, ils en ont parlé. Le Soir l’a imaginé 5 pages spéciales FRONTIÈRES, NOM, SYMBOLES NATIONAUX, JUSTICE, SPORT A quoi ressemblerait un pays sans la Flandre ? P d 2 le d “L’après-pétrole n’est pas la fin d’un monde, mais un com- mencement. » Fabian, transitioner belge Un journaliste du Soir vous répond, tous les jours de la semaine, à 11h02 précises, face camé- ra. Aujourd’hui, Alain Lalle- mand, sur la commémora- tion du 11 septembre, la menace de brûler le Coran sur les lieux de la tragédie, le projet de mosquée sur le site... Posez vos questions dès 10 heures, sur www/lesoir.be/polemi- ques/ Un livre peut-il changer le monde ? Participez à notre sondage et faites connaître le livre qui a changé votre vie : www. lesoir.be/culture/li- vres/ © DANIEL DEME/EPA. ROB HOPKINS, l’initiateur du mouvement. © ROSALIE PORTMAN / STEPHEN PRIOR.DRIES MAES ET FABIAN FÉRAUX, deux têtes de pont du mouvement « Villes en transition » en Belgique. © ALAIN DEWEZ. Le Soir Vendredi 10 septembre 2010 Le Soir Vendredi 10 septembre 2010 16 17 1NL www.lesoir.be