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LE FINANCEMENT DE L’INNOVATION            1/ 3




les Matinales                                C Y C L E   4




L’évaluation financière d’une technologie innovante




  Evaluation financière, business plan, investisseurs
L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N



                                                                      les Matinales
         Fort du succès des trois cycles de Matinales qui se sont tenues tout au long de l’année 2005 sur :
         • la propriété intellectuelle,
         • l’accompagnement de l’innovation,
         • l’intelligence économique,
         l’Agence de développement du Val de Marne a ouvert en 2006, le 4ème cycle des Matinales sur le « financement
         de l’innovation ».
         Ces rencontres sont destinées à sensibiliser et informer les entreprises, les laboratoires de recherche, les organismes
         de formation et les créateurs d’entreprises sur des thèmes d’actualité relatifs à l’innovation.
         Les conférences sont animées par des spécialistes du domaine et des témoignages apportent un éclairage de
         terrain. Les Matinales constituent un moment privilégié de partages d’expériences entre les différents acteurs
         publics et privés afin d’approfondir des sujets spécifiques.
         Ce document de synthèse retrace le plus fidèlement possible les présentations orales des intervenants et intègre les
         échanges avec l’auditoire : un accès à des informations essentielles pour s’orienter vers les outils les plus pertinents.


                4                                         5                                           6                            9
     Définitions et contexte            L’environnement d’une technologie innovante         Evaluation et valorisation   Débat avec le conférencier

Les caractéristiques de l’innovation                                                          Les notions de base
    Les exercices d’évaluation                                                                   Les méthodes




                                                          1ÈRE PARTIE
                                                                                     « L’évaluation financière
                                                                                     d’une technologie innovante »
                                                                                     Conférencier :
                                                                                     • Alain KAISER, Directeur du département Droit
                                                                                       et Economie au Cabinet Breese Derambure Majerowicz




                                                                                                                                                     3
L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N



    les Matinales

                 Définitions et contexte
                 Les caractéristiques de l’innovation

                 Qu’est ce qui caractérise les technologies innovantes ?
                 Il va de soi qu’une technologie innovante est d’abord
                 une technologie nouvelle. Pour être reconnue comme
                 telle, elle doit entrer dans le champ de la brevetabilité
                 qui exige que les critères de nouveauté, d’activité in-
                 ventive et d’application industrielle soient satisfaits.
                 Une technologie innovante met en général en œuvre un
                 savoir-faire original et des techniques nouvelles. Elle
                 présente, par rapport aux technologies existantes, des
                 avantages substantiels. Sur le plan juridique, elle consti-
                 tue une invention ou un savoir-faire protégé. A ce titre,
                 elle donne des droits à son titulaire.
                 Afin de protéger l’invention, son auteur peut déposer
                 un brevet : la technologie est brevetée après analyse de
                 « l’état de l’art antérieur ». Par cette procédure, la puis-
                 sance publique cherche à s’assurer que la technologie
                 est bien nouvelle entre autres caractéristiques.
                 Les champs d’applications sont extrêmement vastes.
                 De fait, l’ensemble des secteurs économiques est con-
                 cerné par l’innovation technologique. Banques et com-
                 pagnies d’assurance peuvent aussi déposer des brevets.
                 Dans leur cas, les nouvelles techniques développées
                 concernent notamment les modalités d’appréhension et
                 de mesure des risques de diverses natures.


                 Les exercices d’évaluation

            Il y a une dizaine d’années, les droits incorporels n’intervenaient que de façon très marginale dans
            la création de richesses et dans la génération de flux de trésorerie. Aussi la question de l’évaluation
            des technologies innovantes ne faisait-elle pas débat. Elle est au contraire aujourd’hui une question
            centrale. C’est là une des conséquences de l’émergence d’une économie virtuelle et de l’économie
            de l’immatériel.
            Les actifs dits incorporels sont principalement constitués des technologies et des marques, mais pas
            seulement. Ces deux éléments tendent d’ailleurs parfois à se confondre pour certaines marques. Recon-
            nues et plébiscitées par les consommateurs, les technologies peuvent se transformer petit à petit et «
            imprégner » des marques dans leurs qualités et caractéristiques; elles peuvent aussi contribuer à forger



    “   L’image de marque
                                                      l’image de marque de l’entreprise qui la diffuse. L’image de mar-
                                                      que d’une société à forte dimension technologique peut créer
    d’une société à forte dimension une valeur de très haut niveau. Au sein des entreprises de la
      technologique peut créer une « nouvelle économie », le poids des actifs incorporels devient


                                                ”
    valeur de très haut niveau                        prépondérant voire écrasant pour certaines d’entre elles.
4
L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N



                                     les Matinales
                                                Un exemple illustre remarquablement cette évolution : les ac-
                                                tifs corporels et financiers de Microsoft ne représentent plus
                                                que 5 % de la valeur boursière du fabricant de logiciels. Si,
                                                au sein des entreprises de « l’ancienne économie », le poids
                                                des actifs incorporels est logiquement moins important, il est
                                                loin d’être négligeable. Pour le chimiste Dow Chemical, la
                                                proportion atteint 37 %. L’intégration de nouvelles marques
                                                et technologies est également productrice de valeur parmi
                                                les entreprises les plus traditionnelles.
                                                Ceci étant, la mise en valeur des actifs incorporels reste,
                                                encore de nos jours, très difficile car l’évaluation des tech-
                                                nologies n’est pas encore entrée dans les mœurs. En la
                                                matière, la loi n’édicte aucune obligation. Dans les bilans,
                                                les entreprises sont simplement tenues d’enregistrer les
frais de dépôt des droits créés. Or ceux-ci n’équivalent jamais à la valeur réelle du brevet déposé.
Les exercices d’évaluation se heurtent donc à un manque de visibilité. Ils sont pourtant primordiaux : sans
droits clairement identifiés, reconnus (brevets, licences, savoir faire, logiciels…), et protégés, l’entreprise
innovante pourra difficilement jouir des revenus auxquels elle peut prétendre au titre de son invention.
Or, la technologie lui permet de bénéficier d’importants avantages compétitifs tant que les concurrents
n’ont pas accès à la technologie en question. Si la protection est faible, la technologie innovante ne pourra
apporter de revenus associés et elle n’aura donc aucune valeur pour l’entreprise qui la développe.




                                                                          “
L’environnement d’une technologie innovante
                                                                                Sans droits clairement
 Le développement et la mondialisation des échanges économiques           identifiés, l’entreprise
conduisent à une multiplication des dépôts de brevets. Mais ces                  innovante pourra
facteurs sont aussi une source de plus forte instabilité. L‘accélé-          difficilement jouir
ration de la mise sur le marché de produits innovants se traduit
                                                                          des revenus auxquels
logiquement par une diminution de la durée de vie moyenne d’une
                                                                               elle peut prétendre au
technologie. C’est dans ce nouveau contexte qu’il convient d’appré-



                                                                                                                  ”
                                                                          titre de son invention
cier les modalités d’évaluation et de valorisation.




                                                                                                                      5
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    les Matinales

             Evaluation et valorisation
                                                              L’innovation est toujours le fait des individus ou de groupes
                                                              d’individus. Autrement dit, une entreprise (société, labora-
                                                              toire) ne peut pas être à l’initiative d’une création, ce qui
                                                              entraîne certaines conséquences importantes quant à la
                                                              titularité, lorsqu’une entreprise commercialise ensuite les
                                                              droits issus de ces créations.
                                                              L’évaluation des droits incorporels peut être effectuée
                                                              pour les besoins des tribunaux. Les cas de contentieux
                                                              relatifs à la propriété industrielle (PI) des brevets ne sont
                                                              pas rares. Au cours des dernières années, quelques ba-
                                                              tailles judiciaires ont défrayé la chronique. Au titre de
                                                              l’arrêt Polaroïd– Kodak, une condamnation à une indem-
                                                              nisation record de 873 millions de dollars fut prononcée.
                                                              Cet exemple illustre de nouveau, si besoin était, l’impor-
                                                              tance croissante de la valeur des actifs incorporels.


             Les notions de base

             Deux concepts économiques sont trop souvent confondus : la valeur du droit, d’une part, et le prix de
             ce même droit, d’autre part.
             La valeur est une estimation financière du droit. Son expression est le fruit d’un exercice intellectuel émi-
             nemment subjectif : les individus n’attachent pas la même valeur aux biens et droits. Le prix est le résultat
             d’une négociation ou d’une transaction. Il s’agit d’un élément factuel, par nature non contestable. Le
             travail d’évaluation consiste à estimer la valeur du droit, afin de pouvoir proposer ensuite un « prix juste ».
             En France, cette approche a été consacrée par la jurisprudence fiscale du Conseil d’Etat. L’administration
             fiscale considère que la valeur est l’estimation la plus probable du prix.
             Sur le plan économique, la valeur reflète d’abord les avantages comparatifs générés par l’innovation
             technologique. Elle résulte aussi des marges financières
             dégagées grâce à la commercialisation des nouveaux pro-
             duits. La valeur n’est donc pas figée. Elle s’appréciera ou
             se dépréciera en fonction de l’évolution du positionnement
             concurrentiel de la technologie exploitée. La valeur de la
             propriété industrielle est le résultat de la combinaison des
             actifs de l’entreprise, actifs corporels, financiers et incor-
             porels. Dans la pratique, cette combinaison se traduit par
             l’agrégat des valeurs de l’entreprise.


             Les méthodes

             Évaluation et valorisation sont deux concepts différents.
             Évaluer est l’opération qui consiste à « dire la valeur ».
             Valoriser consiste à créer de la valeur à partir d’un actif.

6
L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N



                                    les Matinales
                             a. Les méthodes d’évaluation
                             Il convient d’abord de distinguer l’évaluation de la technologie proprement
                             dite de l’évaluation du contrat qui peut la supporter. Nous nous consa-
                             crerons ici à la première pour éviter les complications.
                             Quatre techniques d’évaluation sont communément acceptées même s’il
                             en existe d’autres :
                             • l’évaluation par le coût historique
                             • l’évaluation par les redevances actualisées
                             • l’évaluation par les cash flow
                             • l’évaluation par référence au marché.

Les deux premières techniques citées sont les plus fréquemment utilisées. Il est conseillé de les associer
ou de les combiner.
L’évaluation par le coût historique des technologies consiste à récapituler l’ensemble des droits à évaluer,
puis, à recenser l’ensemble des dépenses constatées dans le développement de la technologie. A cette fin,
il est procédé à la reconstitution du cheminement de l’entreprise pour développer sa technologie.
Facile d’utilisation, la technique dite de l’évaluation par les redevances actualisées a en outre le mérite
d’avoir été reconnue par la jurisprudence du Conseil d’Etat. Dans cette perspective, la valeur du droit
résulte de l’appréciation des fruits tirés de la location d’un droit.

Dans tous les cas, une technologie doit être évaluée à l’aune de deux paramètres principaux : l’état du
marché, d’une part, les niveaux de risques pesant sur le droit, d’autre part (voir graphique).
L’innovation doit correspondre à un marché. L’évaluation de toute nouvelle technologie suppose la
réalisation préalable d’études de marché. Dans ce cadre, il convient notamment de se demander quels
prix les consommateurs (ou les usagers) seront prêts à payer pour l’innovation proposée.
Dans certains cas, ils ne seront même pas prêts à accepter le concept fondant l’originalité du pro-
duit. Les nouveaux supports mis en avant sont parfois



                                                              “
trop avant-gardistes, trop novateurs. Initialement, les CD
de Philips devaient prendre la forme de petites cartes              La valeur de la propriété
à puces mais les conseillers marketing de l’électroni- industrielle est le résultat de la
cien dissuadèrent l’entreprise d’opter pour ce choix.             combinaison des actifs de
Les consommateurs n’étaient pas prêts. Inversement,           l’entreprise, actifs corporels,


                                                                                                        ”
des technologies très bien « marketées » ont connu financiers et incorporels
de formidables succès, et ce alors qu’elles étaient,
d’un point de vue purement technologique, inférieures.
Le VHS constitue à cet égard un très bon exemple.
Si le marché n’existe pas encore, la réussite de la technologie pourra aussi s’avérer très incertaine ou
risquée. Indépendamment de cette éventualité, l’entrepreneur se doit aussi d’analyser préalablement
l’ensemble des risques potentiellement attachés à l’innovation technologique. Ils peuvent être d’ordre
économique mais aussi technique et juridique. Ces derniers ne sont pas les moins importants car les
brevets peuvent disparaître ou connaître des affaiblissements de diverses natures.
Dans le cadre des exercices d’évaluation, il convient naturellement aussi d’apprécier l’environ-
nement immédiat de l’entreprise : la qualité et la réputation de l’entreprise conditionneront aussi
la valeur finale attribuée aux brevets. Ce principe vaut à plus forte raison en cas de licences : le
résultat de l’évaluation reflètera aussi la capacité des sociétés licenciées à imposer la technologie
sur de nouveaux marchés.

                                                                                                               7
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    les Matinales
                 Quelle que soit la méthode privilégiée, l’identification et
                 l’évaluation préalables des droits constituent deux étapes
                 nécessaires. Ces exercices sont d’autant plus importants
                 que les droits ne sont pas figés. Ils peuvent se transmettre
                 ou disparaître. Ils peuvent être contestés, annulés ou réta-
                 blis. En négligeant de procéder à l’évaluation préalable de
                 ses droits, l’entrepreneur s’expose à des risques de contes-
                 tation ou d’usurpation. In fine, il risque aussi de perdre les
                 avan tages concurrentiels liés à l’utilisation de la technologie.
                 C’est pourquoi il est primordial, pour une entreprise, de pro-
                 téger sa technologie par des outils juridiques adaptés.

            b. Les méthodes de valorisation
            La valorisation est fondamentalement un processus de gestion visant à optimiser les revenus ou à
            rentabiliser les actifs d’une entreprise.
            La croissance ou l’augmentation du chiffre d’affaires est le premier moyen d’accroître la valeur
            attachée à une technologie. C’est aussi le plus classique. Il peut être décidé, dans cette perspective,
            d’accélérer la mise sur le marché d’un produit.
            Un second moyen de valorisation consiste à diminuer les charges induites par le développement. Trois
            leviers peuvent être utilisés à cette fin : le cross licensing ; l’optimisation des coûts d’entretien liés
            à la propriété industrielle ; la rationalisation des programmes de recherche, de développement et de
            marketing, notamment via la multiplication des partenariats industriels.
            L’optimisation de la rotation des capitaux investis est un autre facteur de valorisation. Dans cette
            logique, les fonds non utilisés ou peu rentables doivent pouvoir êtres réaffectés à d’autres investis-
            sements ou activités de l’entreprise. Pour les laboratoires pharmaceutiques, la capacité à réinvestir



    “
                                               s’avère souvent primordiale. Les médicaments produits n’étant ren-
        les entreprises sont                   tables que sur de très longues périodes, ils sont relativement plus
     souvent conduites à                       exposés que les autres catégories d’entreprises aux risques d’échec
       nouer des alliances,                    technologique.
                                               Dans tous les cas, la valorisation des actifs poursuit trois objectifs


                              ”
    des partenariats
                                               principaux :
            • l’accroissement des avantages compétitifs
            • la minimisation des risques
            • la croissance de l’entreprise.

                 Pour atteindre ces objectifs, les entreprises sont souvent conduites à nouer des alliances, des
                 partenariats. Ce mouvement se comprend aisément : afin de pouvoir répondre à la demande, les
                 acteurs doivent structurer et rationaliser leur offre, surtout si elle est innovante pour atteindre le
                 marché plus vite et avec de plus gros volumes.




8
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                                    les Matinales

Débat avec le conférencier
• Que pensez-vous de la technique dite de la valeur actuelle nette ?

  Cette méthode vise à mesurer la valeur actuelle de l’ensemble des flux futurs potentiellement dégagés
  par un actif. Comme son nom le rappelle, la méthode s’appuie sur des formules d’actualisation. Il est
  supposé que, dans dix ans, une somme de 100 000 euros ne vaudra pas 100 000 euros actuels. La
  fixation du taux d’actualisation dépendra naturellement de la rentabilité attendue des fonds ainsi que
  de la nature des projets de développement.

• Je dirige une entreprise de haute technologie. J’éprouve de récurrentes difficultés à valoriser,
  au regard des marchés que nous pourrions investir, notre innovation technologique. Quelle
  approche privilégierez-vous ?

  Une étape préalable sera la réalisation d’une étude de marché.

• Il n’existe pas encore de marché pour la technologie que nous souhaitons promouvoir. De fait, nous
  créerons un nouveau marché. Aussi nous sera-il difficile de procéder à une étude préalable.

Il convient de se demander, dans votre cas, si le développement de la technologie innovante pourra
être à l’origine d’un nouveau marché ou s’il ne sera qu’une simple alternative à un marché déjà
existant. En l’occurrence, vous vous situez dans le premier cas de figure.
Le développement d’une nouvelle technologie est par nature risqué. Il le sera, à plus forte raison,
dans votre cas : vous ne savez pas encore comment le marché réagira. Dans ce contexte, le choix
des partenaires financiers et commerciaux s’avèrera primordial.
Par ailleurs, si le marché n’existe pas encore, la réalisation d’études prévisionnelles n’en restera pas
moins nécessaire. Vous devrez, en concertation avec vos prescripteurs, évaluer préalablement les
volumes de production qui pourraient être écou-
lés, au cours de la phase de développement,
sans difficulté. De même, les moyens financiers
pouvant être investis afin de répondre à la de-
mande devront être programmés. Votre société
devra faire preuve d’une solide assise financière.
Vous le constaterez rapidement, dans votre situ-
ation, la négociation d’appuis extérieurs est né-
cessaire. Avant de valoriser votre apport techno-
logique, il serait d’ailleurs pertinent d’évaluer le
coût du recours à ces tiers.

• Vous avez parlé de la propriété intellectuelle.
  Se distingue-t-elle de la propriété industrielle ?
  Certains défendent la propriété intellectuelle au
  moyen de la propriété industrielle.

La propriété intellectuelle se compose de deux
champs principaux : les créations d’auteur,
d’une part, la propriété industrielle (brevets,
marques…), d’autre part.
                                                                                                           9
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     les Matinales
                                                                Mais la frontière n’est pas clairement établie.
                                                                Ainsi les logiciels sont-ils protégés par le droit
                                                                d’auteur alors que ce sont clairement des créa-
                                                                tions industrielles.
                                                                Le classement de la propriété n’est cependant
                                                                pas le point le plus important. Il convient d’atta-
                                                                cher davantage d’importance à la procédure de
                                                                protection visant à constater l’originalité d’une
                                                                œuvre ou de dépôt d’une technologie. En cas de
                                                                contestation d’un droit au brevet, la jouissance
                                                                de l’exploitation revient en général à la première
                                                                personne ayant présenté la demande de dépôt du
                                                                brevet par exemple (sauf cas spécifique).
                                                                Au sein des entreprises, si le droit n’a pas été
                                                                reconnu et protégé, la propriété intellectuelle des
                                                                travaux revient, par défaut, au salarié qui a pro-
              duit l’oeuvre. Au nom de cette logique juridique, les salariés sont fondés à réclamer la jouissance
              d’une certaine propriété, et ce même plusieurs années après la réalisation de travaux. Le cas
              échéant, ils peuvent prétendre à une indemnisation conséquente. Pour pouvoir jouir d’un droit de
              propriété, il faut avoir engagé un processus de protection de l’œuvre ou du savoir-faire. C’est là un
              principe de base.

              • Une personne physique pourra-t-elle protéger une invention personnelle plusieurs années
                après sa diffusion ?

              Pas après sa diffusion puisque le critère de nouveauté ne sera pas satisfait, critère exigé pour la
              brevetabilité.

              • Je constate que les modalités d’évaluation peuvent varier fortement d’un marché à l’autre.

              Les évaluations dépendent d’une grande variété de paramètres : les degrés de maturation des marchés,
              la nature des structures de financement (cash flow), les conditions d’exploitation, la qualité des parte-
              naires. Ces éléments sont généralement spécifiés dans les contrats. Les contrats traduisent bien sûr
              des pratiques spécifiques aux marchés. La valorisation d’une technologie dépendra aussi de la qualité
              rédactionnelle des contrats industriels.




10
Crédit photos : Agence de Développement du Val de Marne / Marc Beaudenon - mai 2006 - Tout droit de reproduction réservé.




Les Matinales
sont une intiative de
                                                      www.valdemarne.com
                                                                                        PÉRIGRAPHIC - 01 42 53 33 00




                                                      23 rue Raspail
                                                      94200 Ivry-sur-Seine

                                                      Tél. : (+33) 01 43 90 64 00
                                                                                        Réalisation/impression :




                                                      Fax : (+33) 01 43 90 64 01


                                   Directeur général : Joël GAYSSOT
                        Directrice de Projet Innovation : Dominique PARGANIN

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Cycle 4 : financement de l'innovation, matinales : évaluation financière d'une technologie innovante (1/3)

  • 1. LE FINANCEMENT DE L’INNOVATION 1/ 3 les Matinales C Y C L E 4 L’évaluation financière d’une technologie innovante Evaluation financière, business plan, investisseurs
  • 2. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Fort du succès des trois cycles de Matinales qui se sont tenues tout au long de l’année 2005 sur : • la propriété intellectuelle, • l’accompagnement de l’innovation, • l’intelligence économique, l’Agence de développement du Val de Marne a ouvert en 2006, le 4ème cycle des Matinales sur le « financement de l’innovation ». Ces rencontres sont destinées à sensibiliser et informer les entreprises, les laboratoires de recherche, les organismes de formation et les créateurs d’entreprises sur des thèmes d’actualité relatifs à l’innovation. Les conférences sont animées par des spécialistes du domaine et des témoignages apportent un éclairage de terrain. Les Matinales constituent un moment privilégié de partages d’expériences entre les différents acteurs publics et privés afin d’approfondir des sujets spécifiques. Ce document de synthèse retrace le plus fidèlement possible les présentations orales des intervenants et intègre les échanges avec l’auditoire : un accès à des informations essentielles pour s’orienter vers les outils les plus pertinents. 4 5 6 9 Définitions et contexte L’environnement d’une technologie innovante Evaluation et valorisation Débat avec le conférencier Les caractéristiques de l’innovation Les notions de base Les exercices d’évaluation Les méthodes 1ÈRE PARTIE « L’évaluation financière d’une technologie innovante » Conférencier : • Alain KAISER, Directeur du département Droit et Economie au Cabinet Breese Derambure Majerowicz 3
  • 3. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Définitions et contexte Les caractéristiques de l’innovation Qu’est ce qui caractérise les technologies innovantes ? Il va de soi qu’une technologie innovante est d’abord une technologie nouvelle. Pour être reconnue comme telle, elle doit entrer dans le champ de la brevetabilité qui exige que les critères de nouveauté, d’activité in- ventive et d’application industrielle soient satisfaits. Une technologie innovante met en général en œuvre un savoir-faire original et des techniques nouvelles. Elle présente, par rapport aux technologies existantes, des avantages substantiels. Sur le plan juridique, elle consti- tue une invention ou un savoir-faire protégé. A ce titre, elle donne des droits à son titulaire. Afin de protéger l’invention, son auteur peut déposer un brevet : la technologie est brevetée après analyse de « l’état de l’art antérieur ». Par cette procédure, la puis- sance publique cherche à s’assurer que la technologie est bien nouvelle entre autres caractéristiques. Les champs d’applications sont extrêmement vastes. De fait, l’ensemble des secteurs économiques est con- cerné par l’innovation technologique. Banques et com- pagnies d’assurance peuvent aussi déposer des brevets. Dans leur cas, les nouvelles techniques développées concernent notamment les modalités d’appréhension et de mesure des risques de diverses natures. Les exercices d’évaluation Il y a une dizaine d’années, les droits incorporels n’intervenaient que de façon très marginale dans la création de richesses et dans la génération de flux de trésorerie. Aussi la question de l’évaluation des technologies innovantes ne faisait-elle pas débat. Elle est au contraire aujourd’hui une question centrale. C’est là une des conséquences de l’émergence d’une économie virtuelle et de l’économie de l’immatériel. Les actifs dits incorporels sont principalement constitués des technologies et des marques, mais pas seulement. Ces deux éléments tendent d’ailleurs parfois à se confondre pour certaines marques. Recon- nues et plébiscitées par les consommateurs, les technologies peuvent se transformer petit à petit et « imprégner » des marques dans leurs qualités et caractéristiques; elles peuvent aussi contribuer à forger “ L’image de marque l’image de marque de l’entreprise qui la diffuse. L’image de mar- que d’une société à forte dimension technologique peut créer d’une société à forte dimension une valeur de très haut niveau. Au sein des entreprises de la technologique peut créer une « nouvelle économie », le poids des actifs incorporels devient ” valeur de très haut niveau prépondérant voire écrasant pour certaines d’entre elles. 4
  • 4. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Un exemple illustre remarquablement cette évolution : les ac- tifs corporels et financiers de Microsoft ne représentent plus que 5 % de la valeur boursière du fabricant de logiciels. Si, au sein des entreprises de « l’ancienne économie », le poids des actifs incorporels est logiquement moins important, il est loin d’être négligeable. Pour le chimiste Dow Chemical, la proportion atteint 37 %. L’intégration de nouvelles marques et technologies est également productrice de valeur parmi les entreprises les plus traditionnelles. Ceci étant, la mise en valeur des actifs incorporels reste, encore de nos jours, très difficile car l’évaluation des tech- nologies n’est pas encore entrée dans les mœurs. En la matière, la loi n’édicte aucune obligation. Dans les bilans, les entreprises sont simplement tenues d’enregistrer les frais de dépôt des droits créés. Or ceux-ci n’équivalent jamais à la valeur réelle du brevet déposé. Les exercices d’évaluation se heurtent donc à un manque de visibilité. Ils sont pourtant primordiaux : sans droits clairement identifiés, reconnus (brevets, licences, savoir faire, logiciels…), et protégés, l’entreprise innovante pourra difficilement jouir des revenus auxquels elle peut prétendre au titre de son invention. Or, la technologie lui permet de bénéficier d’importants avantages compétitifs tant que les concurrents n’ont pas accès à la technologie en question. Si la protection est faible, la technologie innovante ne pourra apporter de revenus associés et elle n’aura donc aucune valeur pour l’entreprise qui la développe. “ L’environnement d’une technologie innovante Sans droits clairement Le développement et la mondialisation des échanges économiques identifiés, l’entreprise conduisent à une multiplication des dépôts de brevets. Mais ces innovante pourra facteurs sont aussi une source de plus forte instabilité. L‘accélé- difficilement jouir ration de la mise sur le marché de produits innovants se traduit des revenus auxquels logiquement par une diminution de la durée de vie moyenne d’une elle peut prétendre au technologie. C’est dans ce nouveau contexte qu’il convient d’appré- ” titre de son invention cier les modalités d’évaluation et de valorisation. 5
  • 5. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Evaluation et valorisation L’innovation est toujours le fait des individus ou de groupes d’individus. Autrement dit, une entreprise (société, labora- toire) ne peut pas être à l’initiative d’une création, ce qui entraîne certaines conséquences importantes quant à la titularité, lorsqu’une entreprise commercialise ensuite les droits issus de ces créations. L’évaluation des droits incorporels peut être effectuée pour les besoins des tribunaux. Les cas de contentieux relatifs à la propriété industrielle (PI) des brevets ne sont pas rares. Au cours des dernières années, quelques ba- tailles judiciaires ont défrayé la chronique. Au titre de l’arrêt Polaroïd– Kodak, une condamnation à une indem- nisation record de 873 millions de dollars fut prononcée. Cet exemple illustre de nouveau, si besoin était, l’impor- tance croissante de la valeur des actifs incorporels. Les notions de base Deux concepts économiques sont trop souvent confondus : la valeur du droit, d’une part, et le prix de ce même droit, d’autre part. La valeur est une estimation financière du droit. Son expression est le fruit d’un exercice intellectuel émi- nemment subjectif : les individus n’attachent pas la même valeur aux biens et droits. Le prix est le résultat d’une négociation ou d’une transaction. Il s’agit d’un élément factuel, par nature non contestable. Le travail d’évaluation consiste à estimer la valeur du droit, afin de pouvoir proposer ensuite un « prix juste ». En France, cette approche a été consacrée par la jurisprudence fiscale du Conseil d’Etat. L’administration fiscale considère que la valeur est l’estimation la plus probable du prix. Sur le plan économique, la valeur reflète d’abord les avantages comparatifs générés par l’innovation technologique. Elle résulte aussi des marges financières dégagées grâce à la commercialisation des nouveaux pro- duits. La valeur n’est donc pas figée. Elle s’appréciera ou se dépréciera en fonction de l’évolution du positionnement concurrentiel de la technologie exploitée. La valeur de la propriété industrielle est le résultat de la combinaison des actifs de l’entreprise, actifs corporels, financiers et incor- porels. Dans la pratique, cette combinaison se traduit par l’agrégat des valeurs de l’entreprise. Les méthodes Évaluation et valorisation sont deux concepts différents. Évaluer est l’opération qui consiste à « dire la valeur ». Valoriser consiste à créer de la valeur à partir d’un actif. 6
  • 6. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales a. Les méthodes d’évaluation Il convient d’abord de distinguer l’évaluation de la technologie proprement dite de l’évaluation du contrat qui peut la supporter. Nous nous consa- crerons ici à la première pour éviter les complications. Quatre techniques d’évaluation sont communément acceptées même s’il en existe d’autres : • l’évaluation par le coût historique • l’évaluation par les redevances actualisées • l’évaluation par les cash flow • l’évaluation par référence au marché. Les deux premières techniques citées sont les plus fréquemment utilisées. Il est conseillé de les associer ou de les combiner. L’évaluation par le coût historique des technologies consiste à récapituler l’ensemble des droits à évaluer, puis, à recenser l’ensemble des dépenses constatées dans le développement de la technologie. A cette fin, il est procédé à la reconstitution du cheminement de l’entreprise pour développer sa technologie. Facile d’utilisation, la technique dite de l’évaluation par les redevances actualisées a en outre le mérite d’avoir été reconnue par la jurisprudence du Conseil d’Etat. Dans cette perspective, la valeur du droit résulte de l’appréciation des fruits tirés de la location d’un droit. Dans tous les cas, une technologie doit être évaluée à l’aune de deux paramètres principaux : l’état du marché, d’une part, les niveaux de risques pesant sur le droit, d’autre part (voir graphique). L’innovation doit correspondre à un marché. L’évaluation de toute nouvelle technologie suppose la réalisation préalable d’études de marché. Dans ce cadre, il convient notamment de se demander quels prix les consommateurs (ou les usagers) seront prêts à payer pour l’innovation proposée. Dans certains cas, ils ne seront même pas prêts à accepter le concept fondant l’originalité du pro- duit. Les nouveaux supports mis en avant sont parfois “ trop avant-gardistes, trop novateurs. Initialement, les CD de Philips devaient prendre la forme de petites cartes La valeur de la propriété à puces mais les conseillers marketing de l’électroni- industrielle est le résultat de la cien dissuadèrent l’entreprise d’opter pour ce choix. combinaison des actifs de Les consommateurs n’étaient pas prêts. Inversement, l’entreprise, actifs corporels, ” des technologies très bien « marketées » ont connu financiers et incorporels de formidables succès, et ce alors qu’elles étaient, d’un point de vue purement technologique, inférieures. Le VHS constitue à cet égard un très bon exemple. Si le marché n’existe pas encore, la réussite de la technologie pourra aussi s’avérer très incertaine ou risquée. Indépendamment de cette éventualité, l’entrepreneur se doit aussi d’analyser préalablement l’ensemble des risques potentiellement attachés à l’innovation technologique. Ils peuvent être d’ordre économique mais aussi technique et juridique. Ces derniers ne sont pas les moins importants car les brevets peuvent disparaître ou connaître des affaiblissements de diverses natures. Dans le cadre des exercices d’évaluation, il convient naturellement aussi d’apprécier l’environ- nement immédiat de l’entreprise : la qualité et la réputation de l’entreprise conditionneront aussi la valeur finale attribuée aux brevets. Ce principe vaut à plus forte raison en cas de licences : le résultat de l’évaluation reflètera aussi la capacité des sociétés licenciées à imposer la technologie sur de nouveaux marchés. 7
  • 7. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Quelle que soit la méthode privilégiée, l’identification et l’évaluation préalables des droits constituent deux étapes nécessaires. Ces exercices sont d’autant plus importants que les droits ne sont pas figés. Ils peuvent se transmettre ou disparaître. Ils peuvent être contestés, annulés ou réta- blis. En négligeant de procéder à l’évaluation préalable de ses droits, l’entrepreneur s’expose à des risques de contes- tation ou d’usurpation. In fine, il risque aussi de perdre les avan tages concurrentiels liés à l’utilisation de la technologie. C’est pourquoi il est primordial, pour une entreprise, de pro- téger sa technologie par des outils juridiques adaptés. b. Les méthodes de valorisation La valorisation est fondamentalement un processus de gestion visant à optimiser les revenus ou à rentabiliser les actifs d’une entreprise. La croissance ou l’augmentation du chiffre d’affaires est le premier moyen d’accroître la valeur attachée à une technologie. C’est aussi le plus classique. Il peut être décidé, dans cette perspective, d’accélérer la mise sur le marché d’un produit. Un second moyen de valorisation consiste à diminuer les charges induites par le développement. Trois leviers peuvent être utilisés à cette fin : le cross licensing ; l’optimisation des coûts d’entretien liés à la propriété industrielle ; la rationalisation des programmes de recherche, de développement et de marketing, notamment via la multiplication des partenariats industriels. L’optimisation de la rotation des capitaux investis est un autre facteur de valorisation. Dans cette logique, les fonds non utilisés ou peu rentables doivent pouvoir êtres réaffectés à d’autres investis- sements ou activités de l’entreprise. Pour les laboratoires pharmaceutiques, la capacité à réinvestir “ s’avère souvent primordiale. Les médicaments produits n’étant ren- les entreprises sont tables que sur de très longues périodes, ils sont relativement plus souvent conduites à exposés que les autres catégories d’entreprises aux risques d’échec nouer des alliances, technologique. Dans tous les cas, la valorisation des actifs poursuit trois objectifs ” des partenariats principaux : • l’accroissement des avantages compétitifs • la minimisation des risques • la croissance de l’entreprise. Pour atteindre ces objectifs, les entreprises sont souvent conduites à nouer des alliances, des partenariats. Ce mouvement se comprend aisément : afin de pouvoir répondre à la demande, les acteurs doivent structurer et rationaliser leur offre, surtout si elle est innovante pour atteindre le marché plus vite et avec de plus gros volumes. 8
  • 8. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Débat avec le conférencier • Que pensez-vous de la technique dite de la valeur actuelle nette ? Cette méthode vise à mesurer la valeur actuelle de l’ensemble des flux futurs potentiellement dégagés par un actif. Comme son nom le rappelle, la méthode s’appuie sur des formules d’actualisation. Il est supposé que, dans dix ans, une somme de 100 000 euros ne vaudra pas 100 000 euros actuels. La fixation du taux d’actualisation dépendra naturellement de la rentabilité attendue des fonds ainsi que de la nature des projets de développement. • Je dirige une entreprise de haute technologie. J’éprouve de récurrentes difficultés à valoriser, au regard des marchés que nous pourrions investir, notre innovation technologique. Quelle approche privilégierez-vous ? Une étape préalable sera la réalisation d’une étude de marché. • Il n’existe pas encore de marché pour la technologie que nous souhaitons promouvoir. De fait, nous créerons un nouveau marché. Aussi nous sera-il difficile de procéder à une étude préalable. Il convient de se demander, dans votre cas, si le développement de la technologie innovante pourra être à l’origine d’un nouveau marché ou s’il ne sera qu’une simple alternative à un marché déjà existant. En l’occurrence, vous vous situez dans le premier cas de figure. Le développement d’une nouvelle technologie est par nature risqué. Il le sera, à plus forte raison, dans votre cas : vous ne savez pas encore comment le marché réagira. Dans ce contexte, le choix des partenaires financiers et commerciaux s’avèrera primordial. Par ailleurs, si le marché n’existe pas encore, la réalisation d’études prévisionnelles n’en restera pas moins nécessaire. Vous devrez, en concertation avec vos prescripteurs, évaluer préalablement les volumes de production qui pourraient être écou- lés, au cours de la phase de développement, sans difficulté. De même, les moyens financiers pouvant être investis afin de répondre à la de- mande devront être programmés. Votre société devra faire preuve d’une solide assise financière. Vous le constaterez rapidement, dans votre situ- ation, la négociation d’appuis extérieurs est né- cessaire. Avant de valoriser votre apport techno- logique, il serait d’ailleurs pertinent d’évaluer le coût du recours à ces tiers. • Vous avez parlé de la propriété intellectuelle. Se distingue-t-elle de la propriété industrielle ? Certains défendent la propriété intellectuelle au moyen de la propriété industrielle. La propriété intellectuelle se compose de deux champs principaux : les créations d’auteur, d’une part, la propriété industrielle (brevets, marques…), d’autre part. 9
  • 9. L E F I N A N C E M E N T D E L’ I N N O V AT I O N les Matinales Mais la frontière n’est pas clairement établie. Ainsi les logiciels sont-ils protégés par le droit d’auteur alors que ce sont clairement des créa- tions industrielles. Le classement de la propriété n’est cependant pas le point le plus important. Il convient d’atta- cher davantage d’importance à la procédure de protection visant à constater l’originalité d’une œuvre ou de dépôt d’une technologie. En cas de contestation d’un droit au brevet, la jouissance de l’exploitation revient en général à la première personne ayant présenté la demande de dépôt du brevet par exemple (sauf cas spécifique). Au sein des entreprises, si le droit n’a pas été reconnu et protégé, la propriété intellectuelle des travaux revient, par défaut, au salarié qui a pro- duit l’oeuvre. Au nom de cette logique juridique, les salariés sont fondés à réclamer la jouissance d’une certaine propriété, et ce même plusieurs années après la réalisation de travaux. Le cas échéant, ils peuvent prétendre à une indemnisation conséquente. Pour pouvoir jouir d’un droit de propriété, il faut avoir engagé un processus de protection de l’œuvre ou du savoir-faire. C’est là un principe de base. • Une personne physique pourra-t-elle protéger une invention personnelle plusieurs années après sa diffusion ? Pas après sa diffusion puisque le critère de nouveauté ne sera pas satisfait, critère exigé pour la brevetabilité. • Je constate que les modalités d’évaluation peuvent varier fortement d’un marché à l’autre. Les évaluations dépendent d’une grande variété de paramètres : les degrés de maturation des marchés, la nature des structures de financement (cash flow), les conditions d’exploitation, la qualité des parte- naires. Ces éléments sont généralement spécifiés dans les contrats. Les contrats traduisent bien sûr des pratiques spécifiques aux marchés. La valorisation d’une technologie dépendra aussi de la qualité rédactionnelle des contrats industriels. 10
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