Les démocraties émergentes courent un risque accru de régresser en régimes autoritaires, notamment par la concentration du pouvoir entre les mains du pouvoir exécutif. Des garanties constitutionnelles peuvent aider à prévenir ce genre de concentration antidémocratique du pouvoir.
Les garanties utilisées par nombre de constitutions dans le monde, incluent entre autres:
Des limitations du pouvoir exécutif
Des limites au mandat présidentiel ;
Des dispositions claires et restrictives concernant la déclaration de l'état d'urgence.
Des lignes directrices claires pour la révision de la Constitution
Des dispositions ou principes constitutionnels indérogeables ou non susceptibles de révision ;
Des majorités législatives qualifiées pour l'approbation des amendements constitutionnels ;
Des dispositions claires et détaillées pour les référendums constitutionnels.
Redevabilité et autres mécanismes
Des garanties pour des élections transparentes et gérées en toute indépendance ;
Le contrôle juridictionnel de constitutionnalité ;
Le contrôle parlementaire du budget ;
Les limitations aux forces antidémocratiques.
Etant donné les expériences de concentrations antidémocratiques du pouvoir dans le monde arabe, les constituants en Tunisie, Libye et Egypte devraient envisager la mise en place de ces garanties. Bien que les garanties constitutionnelles ne peuvent à elles seules prévenir la dictature, elles rendent la concentration du pouvoir plus difficile
La Tunisie, porte de l'Afrique et frontiere de l'Europe
Prévenir la Dictature : Les Garanties Constitutionnelle Contre les Renforcements Antidémocratiques du Pouvoir
1. 1
Cette note d’information s’est inspirée d'une présentation de Thomas
Markert à la table ronde de DRI intitulée « Les défis des réformes
constitutionnelles dans le monde arabe », le 2 décembre 2011.
RÉSUMÉ
Les démocraties émergentes courent un risque accru de
régresser en régimes autoritaires, notamment par la
concentration du pouvoir entre les mains du pouvoir exécutif.
Des garanties constitutionnelles peuvent aider à prévenir ce
genre de concentration antidémocratique du pouvoir.
Les garanties utilisées par nombre de constitutions dans le
monde, incluent entre autres:
Des limitations du pouvoir exécutif
Des limites au mandat présidentiel ;
Des dispositions claires et restrictives concernant la
déclaration de l'état d'urgence.
Des lignes directrices claires pour la révision de la
Constitution
Des dispositions ou principes constitutionnels
indérogeables ou non susceptibles de révision ;
Des majorités législatives qualifiées pour
l'approbation des amendements constitutionnels ;
Des dispositions claires et détaillées pour les
référendums constitutionnels.
Redevabilité et autres mécanismes
Des garanties pour des élections transparentes et
gérées en toute indépendance ;
Le contrôle juridictionnel de constitutionnalité ;
Le contrôle parlementaire du budget ;
Les limitations aux forces antidémocratiques.
Etant donné les expériences de concentrations
antidémocratiques du pouvoir dans le monde arabe, les
constituants en Tunisie, Libye et Egypte devraient envisager la
mise en place de ces garanties. Bien que les garanties
constitutionnelles ne peuvent à elles seules prévenir la
dictature, elles rendent la concentration du pouvoir plus
difficile.
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NOTE D’INFORMATION N° 29
OCTOBRE 2012
PRÉVENIR LA DICTATURE :
LES GARANTIES CONSTITUTIONNELLES
CONTRE LES RENFORCEMENTS
ANTIDÉMOCRATIQUES DU POUVOIR1
2. 2
1. INTRODUCTION
De nouvelles constitutions vont voir le jour en Egypte, Libye et
Tunisie. Les constituants desdits pays aspirent à la
consécration des objectifs de leurs révolutions respectives
par des institutions et des lois.
Le risque est de voir la démocratie régresser en autoritarisme
après un certain temps. Dans les pays arabes, le
renforcement antidémocratique du pouvoir par les exécutifs
nationaux, s'est largement étendu lors des dernières
décennies. Les deux présidents de la Tunisie, Habib
Bourguiba et Zine El Abidine Ben Ali, ont tous deux concentré
de vastes pouvoirs par le biais constitutionnel, tôt durant
leurs règnes respectifs. Bourguiba s'est assuré la présidence
à vie en 1975. Ben Ali, confronté à la fin proche de son
mandat, a usé d'un référendum constitutionnel en 2002 afin
de briguer encore deux élections. En 2007, les réformes
constitutionnelles en Egypte ont rendu difficile la possibilité
pour les partis d’opposition de présenter des candidats,
préparant ainsi la voie à la candidature de Jamel Moubarak2
.
En Syrie, Bachar Al-Assad a déçu tous les espoirs de réformes
politiques, en prolongeant l'état d'urgence quand il arriva au
pouvoir en 20003
.
Ces exemples suggèrent que les constituants convaincus par
l’idéal démocratique prennent en considération les garanties
contre la concentration antidémocratique du pouvoir, c'est-à-
dire la revendication de l'autorité par l’un des pouvoirs
politiques (habituellement le pouvoir exécutif) à travers la
manipulation des lois dans le but de bouleverser l'équilibre
des pouvoirs. Le présent document examine certaines
dispositions constitutionnelles utilisées dans le monde pour
se protéger contre le consolidation antidémocratique du
pouvoir. Il pourrait servir aux constituants partout dans le
monde, mais il s'inspire d'exemples qui ciblent plus
particulièrement les assemblées constituantes de l'Egypte,
de la Libye et de la Tunisie.
Une riche littérature est associée à chacune des garanties
énumérées ici, mais ce document esquisse les points clés à
l'usage des décideurs politiques constitutionnels. Toutes les
garanties examinées dans ce document constituent des
options pour les constituants désireux d'éviter la
consolidation des pouvoirs entre les mains de l'exécutif. Les
avantages et inconvénients potentiels de chaque option sont
résumés. Il n'y a aucun ordre de priorité dans la liste
présentée. Un tableau récapitulatif reprend ces options à la
fin du document.
Cette note d'information décrit les dispositions
constitutionnelles susceptibles de préserver les institutions
démocratiques. Ces dispositions ne constituent pas à elles
seules la gouvernance démocratique. Ces éléments
constitutionnels - y compris la séparation des pouvoirs, le
2
Voir la note d’information n°7 de DRI, novembre 2010, Egyptian Elections:
Paving the Way for Presidential Succession.
3
Roger Owen, « The Rise and Fall of Arab Presidents for Life » (Cambridge ;
Harvard University Press, 2012).
contrôle civil des forces armées, la protection des droits
politiques, entre autres - ont été décrits dans d'autres
publications de DRI qui mettent l'accent sur le consensus
international autour des éléments essentiels d'une
démocratie4
.
2. LES GARANTIES ESSENTIELLES
LES CONTROLES SUR LE POUVOIR EXÉCUTIF
a. La limitation des mandats présidentiels
Un régime autoritaire concentre souvent le pouvoir entre les
mains d'une seule personne, souvent un président au pouvoir
depuis longtemps. Pour éviter un régime autocratique,
personnalisé et non redevable, de nombreuses constitutions
limitent la longueur et le nombre de mandats qu'un candidat à
l'exécutif peut briguer. La durée des mandats, dans la plupart
des constitutions du monde, va généralement de quatre à six
ans. Certaines constitutions n'autorisent qu'un mandat
unique, d'autres les limitent à un total de deux et d'autres
encore limitent le nombre de mandats consécutifs à deux,
mais ne posent aucune restriction quant au nombre total de
mandats5
.
Certains pays, comme l'Azerbaïdjan, ne posent aucune limite
de mandats pour le Président. Durant le référendum
constitutionnel de 2009 qui a supprimé la limitation à deux
mandats, le Président azéri Ilham Aliyev avait soutenu que la
suppression de la limitation des mandats consacrait mieux la
liberté des électeurs azéris de choisir leur Président. Dans un
commentaire sur le référendum proposé, la Commission de
Venise du Conseil de l'Europe a écrit ce qui suit :
Tandis que cet argument peut sembler être attrayant en
théorie du moins, les limitations explicites sont nécessaires
dans la pratique, car un président en exercice peut facilement
utiliser des moyens plébiscitaires afin de renforcer sa position
et de garantir sa réélection.6
Certains présidents cherchent à étendre ou abolir les
limitations du nombre des mandats afin de renforcer leurs
pouvoirs. Des tentatives récentes de changement de
limitations de mandats ont induit des crises politiques à
travers le monde, surtout en Afrique sub-saharienne. Depuis
1990, sept présidents en Afrique sub-saharienne ont prolongé
leurs mandats, fixés à deux par référendum, et ont gagné un
troisième. Au Tchad, un référendum en 2005 a permis au
président Idriss Déby de briguer un troisième mandat en 2006,
4
« Consensus International : Eléments essentiels de la démocratie », DRI
(octobre 2011) ; « Renforcement du droit international pour soutenir la
gouvernance et des élections démocratiques », DRI et le Centre Carter,
juillet 2012.
5
Ces références aux conceptions constitutionnelles comparées, ainsi que
celles qui suivent, sont tirées de la base de données des caractéristiques
des constitutions nationales (version 1.0, 14 mai 2010) du "Comparative
Constitutions Project", compilé par Zachary Elkins, Tom Ginsburg et James
Melton.
6
Commission de Venise, 10 mars 2009,
http://www.venice.coe.int/docs/2009/CDL(2009)053-e.asp.
3. 3
qu'il a gagné lors d'élections boycottées par les partis
d'opposition7
.
En plus de la méthode de Déby, d'autres présidents à travers
le monde ont essayé de contourner les restrictions de
mandats de différentes façons, dont :
La suppression des dispositions pertinentes par révision
constitutionnelle effectuée par l'Assemblée législative (la
Tunisie en 1975).
La suppression des dispositions pertinentes par révision
constitutionnelle par référendum (l'Ouganda en 2005,
l'Azerbaïdjan en 2009, le Venezuela en 2009, le Tchad en 2006
et la Tunisie en 2002).
La suppression de dispositions pertinentes à travers la
décision d'une Cour partisane (le Nicaragua en 2009).
Prétendre qu'une révision constitutionnelle qui vise le
prochain Président soit applicable au Président en exercice (le
Sénégal en 2012).
L'enrôlement du remplaçant, comme un allié politique par
exemple, pour briguer la présidence afin de contourner les
restrictions sur les mandats successifs, tout en gardant un
pouvoir considérable sur le remplaçant (la Russie en 2012).
En janvier 2011, une année avant son éviction, l'ex-Président
yéménite Ali Abdullah Saleh a cherché à réviser la
Constitution afin de lui permettre de briguer un troisième
mandat aux élections présidentielles de 2013. Cet
amendement a provoqué une vive opposition, et n'a pas pu
être soumis au vote.
Plusieurs présidents arabes ne sont pas liés par des
limitations de mandats. Le Président de l'Algérie peut être élu
pour un nombre indéterminé de mandats d'une durée de cinq
ans. Du temps de la Constitution syrienne de 1973
(officiellement remplacée en 2012), le candidat à la
présidence du parti Baath a été reconduit par référendum
tous les sept ans, et la Constitution égyptienne pré-
révolutionnaire appelait à un référendum sur le candidat
choisi par le Parlement pour un mandat de cinq ans.
En vue d'éviter toute manipulation, la Constitution du
Honduras prévoit que tout dirigeant qui proposerait l'abolition
ou la révision des limitations des mandats serait
immédiatement démis de ses fonctions. Tel fut le cas de l'ex-
Président Manuel Zelaya en 2009 lorsqu'il proposa une
révision constitutionnelle lui permettant de briguer un
troisième mandat8
.
Il existe un certain nombre de barrières légales susceptibles
d’être érigées à travers les textes constitutionnels afin
d'éviter les présidences à vie par manipulation des limitations
des mandats. Les rédacteurs devraient envisager des
dispositions qui pourraient :
7
Voir Daniel Vencovsky, « Les limites aux mandats présidentiels en
Afrique», Conflict Trends, Issue 2 (2007), pp. 15-21.
8
Tom Ginsburg, « Le puzzle des dispositions indérogeables : débat-règles
altérées contre le renforcement substantiel », Projets constitutionnels
comparés, 12 août 2009.
Restreindre le nombre et la durée des mandats des
détenteurs du pouvoir exécutif.
Clarifier dans le texte que même si certaines parties de la
Constitution sont révisées, les limitations des mandats
continuent à s'appliquer.
Clarifier dans le texte si le Président en exercice au moment
de l'adoption d'une constitution tombe déjà sous le coup de la
limitation de mandat, ou seulement ses futurs mandats.
Déclarer que les dispositions relatives à la limitation des
mandats ne sont pas susceptibles de révision de quelque
façon que ce soit, y compris par un amendement
constitutionnel ordinaire, une décision judiciaire ou un
référendum.
b. Des dispositions claires et restrictives en matière
de déclaration de l'état d'urgence
L'état d'urgence est la situation pendant laquelle l'exécutif
gouverne ce qui, par définition, compromet l'équilibre
constitutionnel des pouvoirs dans une démocratie. L'état
d'urgence peut doter les exécutifs nationaux d’outils pour
sortir leurs pays de crises et sans que ces outils soient limités
par des restrictions sur la façon dont ils peuvent être utilisés
ni dans quelles circonstances l'état d'urgence peut aussi être
détourné pour consolider le pouvoir pendant de longues
périodes. L'état d'urgence a été, durant des décennies, un
outil privilégié de la consolidation antidémocratique du
pouvoir dans les pays arabes, notamment en Algérie, en
Egypte et en Syrie.
Parmi les constitutions qui autorisent l'exécutif à déclarer
l'état d'urgence, quatre-vingt pour cent (80%) d’entre elles
prévoient son approbation par un autre organe étatique : le
Chef de l'Etat ou le Chef du gouvernement (dans les régimes
ayant un exécutif bicéphale), l'Assemblée législative ou le
Conseil (voir graphique 1). Quatre-vingt quatre pour cent
(84%) des constitutions prévoyant l'état d'urgence, exigent
des conditions explicites pour déclarer l'état d'urgence,
comme une guerre, une invasion, une catastrophe naturelle,
une urgence économique, ou un danger pour le régime
constitutionnel.9
En effet, l'article 4 du Pacte International sur les Droits Civils
et Politiques (PIDCP) prévoit des limitations strictes sur les
applications de l'état d'urgence.10
Il permet des dérogations
« dans la stricte mesure où la situation l’exige » et inclue des
droits auxquels il ne peut être dérogé à l’instar des droits
protégés par les articles 6, 7, 8, 11, 15, 16 et 18. L'observation
générale du Comité des Droits de l'Homme sur l'article 4
stipule que les états d'urgence sont «de nature exceptionnelle
et temporaire et ne peuvent durer qu'aussi longtemps que la
vie de la nation concernée est menacée».
9
Données tirées des «Caractéristiques des constitutions nationales»,
supra.
10
Pour en savoir plus sur les restrictions induites par les pouvoirs d’urgence
prévues par l’article 4 du PIDCP, voir « Le Renforcement du droit
international pour soutenir la gouvernance et des élections
démocratiques », DRI et le Centre Carter, pages 19-20 :
http://www.democracy-reporting.org/publications/thematic-
papers/research-report.html.
4. 4
Les Principes de Syracuse limitent également les pouvoirs
d'urgence. Adoptés par le Conseil Economique et Social des
Nations Unies en 1984, les Principes de Syracuse donnent une
interprétation détaillée des limites de l'état d'urgence. Les
Principes de Syracuse exigent, entre autres restrictions :
Des conditions spécifiques qui doivent être réunies pour
déclarer l'état d'urgence.
La protection de droits et libertés spécifiques, même durant
l’état d'urgence, conformément à l'article 4 du PIDCP.
Les pouvoirs extraordinaires se limitent aux prérogatives
accordées au pouvoir exécutif durant l'Etat d'urgence.
Hormis les garanties ci-dessus énumérées, les constituants
peuvent également envisager d'exiger :
L'approbation de l'état d'urgence par une majorité qualifiée
de l'organe législatif ou par un autre organe de gouvernement.
Le renouvellement périodique de l'approbation par une
autorité nationale.
L'aval d'un organisme indépendant qui permet de
déterminer si les conditions autorisant l'état d'urgence sont
réunies.
La limitation de la durée durant laquelle un état d'urgence
peut s'appliquer.
Des garanties pour protéger les autres pouvoirs de
l'ingérence de l'exécutif, en interdisant de façon explicite à
l'exécutif, par exemple, de dissoudre le parlement ou d'en
proroger le mandat, de réviser la Constitution ou de légiférer
par décret.
Graphique 1. La constitution autorise-t-elle des pouvoirs d'urgence?
DES LIGNES DIRECTRICES CLAIRES POUR LES
RÉVISIONS CONSTITUTIONNELLES
c. Des dispositions ou principes constitutionnels au
statut renforcé ou non révisables
Les constitutions peuvent consolider certaines dispositions,
une pratique rendant la révision de certaines dispositions plus
difficile que pour d'autres. Certaines constitutions vont même
jusqu'à inclure l’interdiction de réviser certaines dispositions;
trente cinq pour cent (35%) des constitutions dans le monde
contiennent ce genre de dispositions, appelées «clauses
d'éternité»11
. Les dispositions non modifiables sont destinées
à la protection de certains principes qui sont tellement
fondamentaux au caractère démocratique de l'Etat qu'ils
doivent rester hors de portée d'un organe législatif ou exécutif
autoritaire. Afin de préserver une certaine souplesse au texte
constitutionnel, ce sont en général des principes et non des
articles qui sont déclarés intangibles. Des exemples de ces
principes peuvent inclure :
«La forme républicaine du gouvernement ne peut faire
l'objet d'une révision » (la France, article 89) ;
«La révision des conditions essentiels de l'Etat de droit
démocratique est inadmissible » (la République Tchèque,
article 9.2) ;
«Toute modification de la présente Loi fondamentale qui
toucherait à l’organisation de la Fédération en Länder, au
principe de leur participation au processus législatif ou aux
principes énoncés aux articles 1 et 20, est interdite » (la
République Fédérale d'Allemagne, article 79.3). L'article 1 de
la Loi Fondamentale allemande dispose que la dignité
humaine est inviolable, et l'article 20 consacre les principes
de démocratie sociale fédérale et d'Etat de droit.
Le renforcement de certains articles de la Constitution -
plutôt que des principes - est nettement moins fréquent.
L'article 4 de la Constitution de la République de Turquie
déclare les articles un, deux et trois de la Constitution comme
non susceptibles de révision. L'article 2 dispose :
La République de Turquie est un Etat de droit démocratique,
laïc et social, respectueux des droits de l'Homme dans un
esprit de paix sociale, de solidarité nationale et de justice,
attaché au nationalisme d'Atatürk et s'appuyant sur les
principes fondamentaux exprimés dans le préambule.
Ledit article révèle ensuite les risques inhérents à
l’interdiction de révision de certains articles, à savoir qu'une
génération de rédacteurs de la Constitution confine les
générations futures dans des idéologies politiques
particulières, tel le «nationalisme d'Atatürk».
Dans son évaluation des dispositions non susceptibles de
révision, la Commission de Venise :
Considère que l'indérogeabilité est un instrument
constitutionnel complexe et potentiellement controversé, qui
devrait être appliqué avec soin, et être réservé uniquement
aux principes fondamentaux de l'ordre démocratique. Une
démocratie constitutionnelle devrait en principe permettre
une discussion ouverte sur la réforme, même si elle porte sur
ses principes les plus fondamentaux et sur ses structures de
gouvernement.12
11
Données tirées de "Characteristics of National Constitutions" , supra.
12
Point 218, http://www.venice.coe.int/docs/2010/CDL-AD(201O)001-
e.asp.
5. 5
Une question fondamentale émerge du débat sur
l'indérogeabilité : le texte en devient-il trop rigide et risque de
devenir un obstacle au changement légitime, ou le risque est-
il plus grand de le voir manipulé en vue de concentrer le
pouvoir?
Une question technique est de savoir si une disposition qui
déclare certains principes ou articles comme indérogeables
devrait elle-même être non révisable. S'il est vrai que
l'interprétation constitutionnelle peut conclure que ces
articles par leur objectif doivent eux-mêmes être non
révisables, cela peut rendre les choses plus claires si cela est
indiqué dans le texte.
Certaines constitutions prévoient des dispositions plus faciles
à modifier que d'autres. L'article 62 de la Constitution
islandaise de 1944 dispose que : « L'Eglise évangélique
luthérienne est l'Eglise d'Etat en Islande, et, à ce titre, elle est
entretenue et protégée par l'Etat. Ces dispositions peuvent
être modifiées par la loi ».
d. Des majorités parlementaires qualifiées pour
l'approbation des révisions constitutionnelles
En matière de révision constitutionnelle, les rédacteurs
doivent trouver un équilibre entre stabilité et flexibilité. En
tant que loi fondamentale du pays, une Constitution ne doit
pas être à la merci de la majorité parlementaire du moment.
De la même façon, une Constitution doit par ailleurs pouvoir
s'adapter aux changements significatifs de l'opinion publique
et à l'évolution institutionnelle, à travers le temps.
En effet, une Constitution pourrait être soit trop facile, soit
trop difficile à amender. La Constitution tunisienne de 1959,
par exemple, pouvait être modifiée par une majorité des deux-
tiers des membres de la Chambre des députés, organe sous la
très haute influence du Président. Le Président Bourguiba
pouvait aisément réviser la Constitution par la voie de cette
procédure. Par ailleurs, la Constitution des Etats-Unis
pourrait être trop difficile à modifier. Aux Etats-Unis, la
révision de la Constitution requiert la majorité des deux-tiers
des deux chambres au niveau national, suivie par son
approbation par trois-quarts des assemblées des Etats.
Plus de quatre-vingt-dix pour cent (90%) des constitutions à
travers le monde exigent l'approbation de la révision par des
majorités qualifiées, allant de la majorité absolue (majorité
des membres de l'Assemblée et non pas des présents) à celle
de trois quarts13
de l'organe législatif. Le type de système
électoral est un élément important dans la détermination de
la majorité qualifiée appropriée pour une révision. Dans les
systèmes électoraux majoritaires, par exemple, un parti peut
avoir des majorités significatives lui permettant d'obtenir une
révision constitutionnelle.14
Voir le graphique n°2 sur les
13
Données tirées de "Characteristics of National Constitutions" , supra.
14
Par exemple, dans les élections hongroises de 2010, le parti de centre-
droite FIDESZ a gagné environ 53% des votes, lui accordant plus des 2/3
des sièges. Le parti a ensuite adopté des réformes constitutionnelles à
portée considérable et très controversées.
procédures comparées en matière de révisions
constitutionnelles.
L’exigence d’un seuil élevé pour la majorité qualifiée peut
constituer un danger car cela peut renforcer de façon
disproportionnée la position de négociation de minorités ou
groupes marginaux. Les incitations à la fraude augmentent
lorsque le nombre d'électeurs requis pour créer une minorité
de blocage est limité.
Graphique 2. Quelle majorité requise pour réviser la Constitution?
*: 50% + 1 à l'Assemblée, suivi d'un référenedum
Certaines constitutions (le Liechtenstein, la Suède) exigent
deux votes successifs du pouvoir législatif sur le même
amendement proposé avant qu'il ne soit adopté. Ces délais
réduisent la probabilité d'ingénierie constitutionnelle
politisée, mais en même temps ne permettent pas des
changements rapides dans des situations exceptionnelles.
D'autres constitutions (l'Italie, la Guyane, le Burkina Faso, la
Lettonie) exigent un référendum pour approuver une révision
votée par le pouvoir législatif sauf si une certaine majorité
qualifiée est atteinte lors de ce vote. D'autres constitutions (le
Chili, Malte, l'Islande) exigent des majorités différentes selon
le type de disposition à réviser. D'autres constitutions avec
des assemblées bicamérales (la République de Corée, le
Swaziland) exigent différents seuils selon la chambre.
e. Des dispositions claires et détaillées pour les
référendums constitutionnels
Certaines constitutions exigent des référendums populaires
pour la ratification de révisions constitutionnelles. La
Constitution lituanienne réserve ainsi l’amendement de
certaines dispositions uniquement au référendum. L’article
148 stipule que « les dispositions du titre premier de la
Constitution (l’Etat de la Lituanie), et celles du chapitre XIV
(révision de la Constitution) ne peuvent être modifiées que par
référendum».
Le référendum peut servir d’instrument utile supplémentaire
de sauvegarde contre les amendements partisans. Mais les
dispositions relatives aux référendums constitutionnels
peuvent également servir les régimes autoritaires qui tentent
de contourner les textes constitutionnels. En prétendant que
le verdict populaire doit supplanter tout texte constitutionnel,
6. 6
les réferendums ont été utilisé, par l'ex Union Soviétique pour
contourner les guaranties constitutionnelles.
L’Ukraine a par exemple souffert d’un conflit politique
prolongé à la fin des années 1990 en raison d’un référendum
constitutionnel controversé. Lors d’une confrontation sévère
avec le Parlement, le Président de l’époque Leonid Koutchma
a appelé un référendum constitutionnel qui restreint
largement les pouvoirs du Parlement en conférant au
président le droit de dissoudre le parlement, d’établir une
seconde chambre, et de réduire l’immunité des députés. Dix
ans après le référendum, la Commission de Venise a conclu
que ce référendum était à l’origine de l’instabilité politique
chronique du pays. La Commission a ainsi relevé que la
Constitution ukrainienne n’était pas suffisamment claire pour
protéger les référendums des falsifications populistes des
constitutions.15
Une façon d'équilibrer l'approbation publique des révisions,
tout en limitant la menace potentielle de populisme, consiste
à prévoir une seule procédure de révision de la constitution :
le référendum populaire, suivi par l'approbation à la majorité
absolue par le parlement. La Constitution italienne ne peut
ainsi être modifiée que par un vote au parlement et un
référendum, à moins d’atteindre une majorité des deux tiers
du pouvoir législatif.
Les rédacteurs de constitutions peuvent réduire le risque de
l’utilisation des référendums en vue de porter atteinte à la
constitution en précisant clairement :
Le processus d’établissement des référendums, y compris
leurs calendriers (avant ou après que la révision ait été
approuvée par la majorité parlementaire) ;
Les types d'articles qui ne peuvent être modifiés que par
référendum ;
Que tous les référendums doivent se dérouler conformément
aux procédures énoncées dans la constitution, et que ces
procédures doivent y être consacrées ;
Qu’un référendum suivi d'un vote à la majorité qualifiée au
parlement est la seule façon de réviser la constitution.
REDEVABILITÉ ET AUTRES MÉCANISMES
f. Les garanties pour des élections transparentes,
gérées de façon indépendante
Le droit international, en particulier l'article 25 du PIDCP,
comporte des obligations claires et détaillées sur la
signification d'une véritable élection.16
Cependant, ni les
constitutions, ni les lois électorales ne peuvent spécifier tous
les détails du déroulement des élections. Par conséquent, il
est de bon escient d’inclure dans les constitutions des
15
Commission de Venise, Avis en date du 30 mars 2000 :
http://www.venice.coe.int/docs/2000/CDL-INF(2000)011-e.pdf,
Commission de Venise, « Avis sur la situation constitutionnelle de
l’Ukraine » : http://www.venice.coe.int/docs/2010/CDL-AD(2010)044-e.pdf.
16
Renforcement du droit international à l'appui de la gouvernance
démocratique et des élections honnêtes, - Democracy Reporting
International et le Centre Carter, Juillet 2012.
principes de fonctionnement généraux non inclus dans le droit
international, tels que la transparence, la confiance du public
et le contrôle indépendant.
La manipulation des élections est souvent un facteur
déterminant lorsque les démocraties basculent vers un
régime autoritaire. La fraude électorale est souvent confortée
par le manque de transparence. Avant 2012 dans les
dictatures arabes, les résultats des élections n'étaient pas
publiés de manière détaillée et les partis politiques ainsi que
les organisations de la société civile n’étaient pas, en règle
générale, autorisés à surveiller le processus de comptage et
d'aggrégation des résultats. En outre, les élections ont été
pour la plupart gérées par les ministères de l'intérieur, dont le
rôle dans le cadre de l'appareil de sécurité nationale avait
pour conséquence le manque de confiance du peuple dans
leur impartialité.
Les élections présidentielles de 2012 en Egypte, les premières
depuis la chute de Hosni Moubarak, démontreront
l’importance des garanties constitutionnelles afin de garantir
la transparence des élections. Bien que la loi électorale de
transition ait conféré à la Commission électorale
présidentielle égyptienne (PEC) un large pouvoir de prise de
décisions juridiques, les observateurs internationaux ont
révélé qu'elle l'a fait « souvent d'une manière contraire aux
principes de la démocratie ».17
La PEC n'a pas accordé, par
exemple, aux candidats le droit d'accéder aux listes
électorales, car la loi électorale ne garantit pas explicitement
ledit accès. Une contestation de cette décision se fondant sur
des motifs constitutionnels de transparence électorale aurait
pu être formulée si les dispositions requises étaient mises en
place.
Les constitutions peuvent également garantir la supervision
indépendante des élections. Plus de la moitié des pays du
monde consacrent dans leurs constitutions la supervision des
élections, soit par le système judiciaire, soit par un organisme
de gestion indépendant, et beaucoup d’autres pays le
consacrent à travers des dispositions légales non
constitutionnelles.
g. Le contrôle juridictionnel de constitutionnalité
Même si la constitution consacre des dispositions claires et
démocratiques à l’encontre de la concentration du pouvoir,
celles-ci demeureront faibles en l’absence d’un mécanisme
d’application constitutionnel. De nombreux systèmes
judiciaires à travers le monde incluent, par conséquent, la
possibilité du contrôle de constitutionnalité des actes légaux
par les autres branches du pouvoir. L’on relève que dans des
systèmes juridiques différents, le pouvoir de contrôle de
constitutionnalité est soit conféré à une Cour
constitutionnelle, à une Cour suprême, soit à des tribunaux
subalternes. Bien que le contrôle de constitutionnalité n'était
17
« Déclaration préliminaire du Centre Carter portant sur le second round
des élections présidentielles de l'Egypte » - Le Centre Carter, 19 Juin 2012.
Pour un examen complet du cadre électoral en Egypte, voir Democracy
Reporting International, Évaluation du cadre juridique pour les élections
présidentielles, février 2012 (anglais et arabe).
7. 7
pas explicitement inclus dans les premières constitutions, à
l’instar de la Constitution américaine de 1789,18
il se révèle
désormais comme un principe communément inscrit dans les
constitutions démocratiques et ce, partout dans le monde.
Il existe en vérité de nombreux modèles possibles du contrôle
de constitutionnalité. Un modèle approprié dépendra de
facteurs complexes tels que les systèmes et traditions
juridiques, le contexte politique et les objectifs des
rédacteurs de la constitution.19
Néanmoins, il est avéré que le
principe général de contrôle juridictionnel de
constitutionnalité des pouvoirs exécutif et législatif constitue
une garantie essentielle.
La constitution devrait toutefois comprendre des dispositions
à même de limiter la compétence des tribunaux en guise de
protection contre l’activisme des juridictions qui peuvent
devenir soit un instrument entre les mains de l'exécutif soit
servir d’ersatz du parlement. Au Pakistan, le pouvoir judiciaire
a joué un rôle essentiel dans le renversement du Président
Musharraf en 2008, mais ce rôle éminemment politique de la
Cour suprême a néanmoins été critiqué par de nombreux
analystes. En Egypte, l’arrêt de la Cour suprême
constitutionnelle datant de juin 2012 portant dissolution du
premier Parlement démocratiquement élu a été considérée
par de nombreux auteurs comme un véritable coup d'Etat
militaire par la voie judiciaire.
h. Le contrôle parlementaire du budget
Le pouvoir conféré au parlement d'approuver le budget
national, lequel est consacré par 84% des constitutions dans
le monde entier, constitue un élément essentiel de toute
démocratie. Il s’agit par ailleurs d'un instrument spécifique de
protection contre la réapparition de l’autoritarisme (cf.
graphique n° 3). En effet, les dépenses non contrôlées
engagées par le pouvoir exécutif lui permettent de canaliser
ces dépenses vers les organes d'Etat qui s’inscrivent sous son
contrôle au dépend d'autres, est à même de bouleverser le
système de pouvoirs et de contrepouvoirs. Durant les
premières années de son régime, le Président Ben Ali a par
exemple investi des parts significatives du budget de l'Etat
afin de construire un appareil sécuritaire sans précédent à
même de faire taire ses détracteurs et de se protéger des
interventions démocratiques.20
Par conséquent, un bon suivi
des dépenses de l'exécutif est essentiel au maintien de
l'équilibre des pouvoirs.
Des contrôles législatifs similaires ciblant les dépenses, les
finances et la politique monétaire – comprenant des comités
législatifs, des conseils économiques consultatifs, et une
banque centrale indépendante – sont susceptibles de
18
Le contrôle de constitutionnalité fut ensuite consacré comme un principe
fondamental de la Cour suprême américaine dans la jurisprudence Marbury
v. Madison en 1803.
19
Consultez “A Practical Guide to Constitution Building, –The Design of the
Judicial Branch”, International IDEA (2011), pp. 223-245.
20
Voir Kenneth Perkins, Une histoire de la Tunisie moderne (Londres:
Cambridge University Press, 2004).
prévenir le renforcement antidémocratique du pouvoir
exécutif à travers la politique économique.
Graphique 3. La constitution exige-t-elle l'approbation parlementaire du
budget?
i. Les limites des forces antidémocratiques
La compétition des partis politiques s’avère déterminante
pour la gouvernance démocratique, certains partis peuvent
néanmoins avoir des plates-formes antidémocratiques. Les
partis politiques dominants ont ainsi fourni une assise pour la
concentration du pouvoir au Soudan et en Algérie, ainsi qu’en
Egypte, en Tunisie et au Yémen par le passé. La Constitution
syrienne de 1973 a même établi le parti Baath comme étant le
seul parti légal du pays.
Certaines constitutions interdisent expressément les partis
politiques antidémocratiques. Il en est ainsi par exemple de
l'article 48 de la Constitution du Honduras qui prévoit qu’ « il
est interdit aux partis politiques de porter atteinte au
gouvernement républicain, démocratique et représentatif ».
L'article 21(2) de la Loi Fondamentale allemande comporte
une disposition similaire et prévoit un mode de règlement :
« Les partis qui, d'après leurs buts ou d'après le
comportement de leurs adhérents, ont pour but de porter
atteinte à l'ordre constitutionnel libéral et démocratique, ou à
le renverser, ou à mettre en péril l'existence de la République
fédérale d'Allemagne, sont inconstitutionnels. La Cour
constitutionnelle fédérale statue sur la question de
l'inconstitutionnalité ».
Il faut relever que les dispositions inhérentes aux partis
politiques comportent un risque, car elles peuvent être
exploitées par de puissantes forces politiques en vue de
marginaliser l'opposition. Ces dispositions et leur application
doivent ainsi être soigneusement conçues.
La Commission de Venise recommande que les restrictions
ciblant les partis politiques « doivent être clairement
énoncées dans la loi et fondées sur des critères objectifs ».21
L'article 22 du PIDCP dispose en outre que la liberté
21
La Commission de Venise, point 68,
http://www.venice.coe.int/docs/2010/CDL-AD (2010) 024-f.asp.
8. 8
d'association ne peut être restreinte que par la loi et dans
«l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de
l'ordre public, ou pour protéger la santé ou la moralité
publiques ou les droits et les libertés d'autrui».22
La
Commission de Venise poursuit en affirmant que : «la
possibilité de dissoudre ou d'interdire la formation d’un parti
politique doit être édictée de manière exceptionnellement
précise et appliquée uniquement dans des cas extrêmes ».23
Dans le cas des constitutions qui interdisent les partis
politiques non démocratiques, l’autorité d'exclure ou
d'autoriser les partis politiques relève rarement du pouvoir
législatif ou du pouvoir exécutif. Ces décisions sont
généralement dévolues aux juges ou à une commission
électorale indépendante.
3. CONCLUSION
Afin que les constitutions soient considérées comme étant
démocratiques, elles doivent comprendre un certain nombre
d'éléments essentiels intrinsèques à toute démocratie,
comme de l’organisation d’élections transparentes, de la
séparation des pouvoirs, de la protection des droits
politiques, des médias libres et du contrôle civil exercé sur le
secteur de la sécurité. Au-delà de ces éléments constitutifs
d'une démocratie, les constitutions comprennent souvent des
garanties à même de prévenir l'érosion vers un régime
autoritaire. Les rédacteurs de constitutions dans les pays
arabes et ailleurs devraient envisager d'inclure ces garanties
dans les nouveaux textes constitutionnels.
Chacune des garanties mentionnées dans ce document
comporte des risques et implique un examen attentif.
L'argument le plus souvent formulé à l’encontre de telles
garanties, et même à l’encontre de tout texte constitutionnel
qui semblerait trop détaillé étant le risque de rendre le cadre
juridique rigide et inapte à répondre à des changements
politiques signifiants. Il incombe finalement aux nouvelles
assemblées constituantes de trouver l’équilibre entre le
besoin de flexibilité et la nécessité de réduire les risques de
réapparition de l'autoritarisme. Désormais, trouver le juste
équilibre constitue un défi en Tunisie, et bientôt en Libye et en
Egypte.
22
Voir : Renforcement du droit international à l'appui de la gouvernance
démocratique et des élections honnêtes, - Democracy Reporting
International et le Centre Carter, (Juillet 2012), page 22.
23
Orientations de la Commission de Venise sur la réglementation des partis
politiques, - adoptées lors de la 84e session plénière, 15-16 Octobre 2010.
A PROPOS DE DEMOCRACY
REPORTING INTERNATIONAL
La présente publication a été élaborée avec le soutien du
Ministère des Affaires étrangères de la République fédérale
d'Allemagne et du Département fédéral suisse des Affaires
étrangères. Le contenu de la publication relève de la seule
responsabilité de Democracy Reporting International et ne
peut aucunement être considéré comme reflétant le point de
vue du Ministère des Affaires étrangères de la République
fédérale d'Allemagne et du Département fédéral suisse des
Affaires étrangères.
Democracy Reporting International (DRI) est une
organisation à but non-lucratif, indépendante et non-
partisane, ayant son siège à Berlin, en Allemagne. DRI
soutient la participation politique des citoyens, ainsi que
la redevabilité des organes gouvernementaux et le
développement d’institutions démocratiques dans le
monde entier. DRI appuie les processus locaux de
promotion du droit universel des citoyens à participer à la
vie politique de leur pays, conformément à ce qui est
stipulé dans la Déclaration universelle des droits de
l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits
civils et politiques.
Pour plus d’informations:
http://www.democracy-reporting.org
Ou contacter:
info@democracy-reporting.org
9. 9
ANNEXE
Garantie Options de mise en œuvre Risques
Limites du mandat présidentiel
Limiter le nombre et la durée des mandats de
l'exécutif.
Préciser que la limite du nombre des mandats
s’applique même si d'autres parties de la
constitution ont été modifiées.
Préciser si le mandat du président en exercice au
moment de l'adoption d'une constitution est
concerné par la limitation ou si seuls le seront les
futures mandats.
Déclarer l'indérogeabilité de la limitation des
mandats présidentiels.
Imposer des sanctions strictes sur les chefs de
l’exécutif qui tentent de manipuler les nombres de
mandat.
Les présidents sont susceptibles de
manipuler la limitation des mandats
afin de rester longtemps au pouvoir.
Dispositions claires et
contraignantes pour déclarer
l'état d'urgence
Exiger l'approbation du cabinet ou du parlement
pour déclarer l'état d'urgence.
Stipuler des conditions spécifiques à l'état
d'urgence et désigner un organisme indépendant
afin de déterminer si ces conditions sont réunies.
Définir de manière spécifique les droits ou
libertés qui sont garantis, même en cas d'état
d'urgence.
Définir de manière stricte les pouvoirs
extraordinaires que l'exécutif détient en vertu de
l'état d'urgence.
Limiter la durée de l'état d'urgence.
Exiger le renouvellement périodique de l'état
d'urgence, et ce, par le législateur.
Protéger le reste des organes de gouvernement de
l'interférence du pouvoir exécutif.
Les restrictions peuvent se révéler
trop rigides dans un véritable état
d'urgence.
Dispositions constitutionnelles
renforcées ou ne pouvant faire
l’objet d’aucune révision
Interdire la révision de certains articles, en
particulier ceux comportant une prévention à
l’encontre des méthodes habituelles de
renforcement antidémocratique du pouvoir.
Consacrer l’interdiction de réviser les grands
principes démocratiques.
Les rédacteurs peuvent enfermer les
générations futures dans une
idéologie particulière.
Majorité législative qualifiée
nécessaire à l’approbation des
amendements constitutionnels
Exiger l'approbation de tout amendement par les
deux tiers, les trois cinquièmes, ou les trois quarts
des députés.
Exiger l'approbation des amendements par le
pouvoir législatif des entités fédérées dans le cas
d’un système fédéral.
Exiger l'approbation de tout amendement par
deux assemblées législatives nationales
consécutives.
Manque de souplesse pour répondre
à de potentiels changements
importants ou à des crises.
Les majorités qualifiées confèrent
aux petites formations un pouvoir de
négociation assez substantiel.
Dispositions claires et détaillées
pour les référendums
constitutionnels
Clarifier le processus de référendum,
spécialement le calendrier de sa tenue.
Enumérer les types d'articles qui ne peuvent être
modifiées que par référendum.
Insister sur la nécessité de respecter les
procédures décrites dans la constitution pour la
tenue des référendums, et sur l’interdiction de
révision desdites procédures.
Encourager les garanties pour des élections
démocratiques.
L’adoption du référendum pourrait
s’avérer trop difficile.
10. 10
Garanties pour des élections
transparentes, et gérées de
façon indépendante
Insérer des engagements pour des élections
crédibles au-delà des obligations internationales,
telles que la transparence.
Stipuler le recours à des organes indépendants de
gestion des élections et de règlement des
différends y afférents.
Les exigences constitutionnelles
requises pour les élections pourraient
s’avérer rigides face à l'évolution des
contraintes politiques ou techniques.
Contrôle juridictionnel de
constitutionnalité
Prévoir qu'une cour suprême ou constitutionnelle
soit investie du contrôle de constitutionnalité.
Définir clairement la façon dont la compétence
est déterminée, séparément de la plus haute Cour
en place dans le pays.
Possibilité de voir les juges
manipulés par l'exécutif.
Possibilité de voir les tribunaux agir
comme un ersatz du pouvoir législatif.
Contrôle budgétaire du
Parlement
Soumettre les dépenses de l'exécutif à un
contrôle législatif détaillé.
Créer des contrôles similaires sur la politique
financière et monétaire, y compris un auditeur
indépendant du gouvernement.
Les assemblées législatives peuvent
faire preuve de lenteur pour approuver
les lois de dépenses.
Un processus de longue durée peut
accroître l'influence des intérêts
particuliers.
Limites à l’encontre des forces
antidémocratiques
Interdire certains partis politiques qui constituent
une menace pour la démocratie par certains
critères objectifs.
Interdire les partis politiques qui adhèrent aux
principes antidémocratiques.
Nommer ou désigner une commission
indépendante chargée de réglementer les
interdictions concernant les partis politiques.
Les pouvoirs exécutifs pourraient
utiliser les restrictions sur les partis
politiques de manière à marginaliser
les groupes d'opposition.
Limites au pouvoir exécutif
Des lignes directrices claires pour les modifications constitutionnelles
Responsabilité et autres mécanismes