1. CONSEIL D'ETAT
statuant
MM
au contentieux
REPUBLIQUE FRANÇAISE
N° 390059
AV NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
FEDERATION CFDT BANQUES ET
ASSURANCES
M. Bruno Bachini
Rapporteur
M. Frédéric Dieu
Rapporteur public
Séance du 16 octobre 2017
Lecture du 8 novembre 2017
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4lme et seme chambres réunies)
Vu la procédure suivante :
Sur le rapport de la 4<me chambre
de la Section du contentieux
La CFE-CGC fédération de l'assurance a demandé à la cour administrative
d'appel de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de
la formation professionnelle et du dialogue social du 24 décembre 2013 fixant la liste des
organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches des sociétés d'assurances.
Par un arrêt n° 14PA00961 du 9 mars 2015, la cour administrative d'appel de Paris a annulé
l'article 2 de cet arrêté et rejeté le smplus des conclusions de la requête.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en
réplique enregistrés les Il mai et Il août 2015 et le 28 avril 2016 au secrétariat du contentieux
du Conseil d'Etat, la fédération CFDT banques et assurances demande au Conseil d'Etat:
1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il annule l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre
2013 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'intégralité de la requête de la
CFE-CGC fédération de l'assurance ;
3°) de mettre à la charge de la CFE-CGC fédération de l'assurance la somme
de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La fédération CFDT banques et assurances soutient que cet arrêt est entaché :
-d'insuffisance de motivation et de dénaturation des faits en ce qu'il estime
que les syndicats affiliés à la fédération CFE-CGC fédération de 1'assurance ont présenté des
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candidats dans les deux collèges électoraux mis en place au sem des entreprises de cette
branche;
- d'erreur de droit en ce qu'il juge que les suffrages exprimés en faveur de la
CFE-CGC fédération de l'assurance dans le premier collège électoral défini par la convention
collective nationale devaient être pris en compte pour mesurer la représentativité de ce syndicat ;
- d'erreur de droit en ce que, excédant les limites du litige dont la cour était
saisie, il juge que la représentativité de la CFE-CGC fédération de l'assurance devait être
déterminée en tenant compte des résultats qu'elle avait obtenus dans l'ensemble des suffrages de
ce premier collège.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2016, la CFE-CGC
fédération de l'assurance conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit
mise à la charge de la fédération CFDT banques et assurances au titre de l'article L. 761-1 du
code de justice administrative. Elle soutient que les moyens du pourvoi ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 20 septembre 2017, la ministre du travail déclare
s'en remettre à la sagesse du Conseil d'Etat.
Le pourvoi a été communiqué à la Confédération générale du travail, à la
Confédération générale du travail- Force ouvrière, à l'Union nationale des syndicats autonomes
et à la Confédération française des travailleurs chrétiens qui n'ont pas produit de mémoire.
Par ordonnance du 4 septembre 2017, le président de la 4éme chambre de la
section du contentieux a ordormé la clôture de l'instruction le 20 septembre 2017 à 23h59.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu:
- le code du travail ;
-la convention collective nationale des sociétés d'assurance du 27 mai 1992;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,
-les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été dormée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-
Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de la fédération CFDT banques et assurances et à la
SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la CFE-CGC fédération de l'assurance ;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2122-11 du code
du travail : «Après avis du Haut Conseil du dialogue social, le ministre chargé du travail arrête
la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche
professionnelle (...) » ; qu'en application de ces dispositions, le ministre du travail, de l'emploi,
de la formation professiormelle et du dialogue social a pris, le 24 décembre 2013, un arrêté
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« fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches des
sociétés d'assurance >> ; que l'article 1er de cet arrêté mentionne la CFE-CGC au nombre de ces
organisations syndicales reconnues représentatives ; que son article 2 détermine, pour la
négociation des accords collectifs prévue au titre de l'article L. 2232-6 du même code, les
audiences respectives de ces organisations syndicales ; qu'à ce titre, il fixe l'audience de la
CFE-CGC à 14,24%; que par l'arrêt attaqué du 9 mars 2015, la cour administrative d'appel de
Paris, saisie par la CFE-CGC fédération de l'assurance d'une requête en annulation pour excès
de pouvoir de cet arrêté, a rejeté cette requête en tant qu'elle demandait l'annulation de son
article 1", faute d'intérêt pour agir de l'organisation syndicale requérante, mais a annulé son
article 2 ; que la fédération CFDT banque et assurances se pourvoit en cassation contre cet arrêt
en tant qu'il annule l'article 2 de l'arrêté du 24 décembre 2013 ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 2122-5 du code du travail
relatif à la détermination de la représentativité des organisations syndicales au niveau de la
branche dispose que « Dans les branchesprofessionnelles, sont représentatives les organisations
syndicales qui(...) J 0
Ont recueilli au moins 8% des suffrages exprimés résultant de l'addition,
au niveau de la branche, d'une part, des suffrages exprimés au premier tour des dernières
élections des titulaires aux comités d'entreprise au de la délégation unique du personnel ou, à
défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et, d'autre part, des
suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les
conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants(...) »;que, pour la détermination de
cette représentativité s'agissant des organisations syndicales catégorielles, l'article L. 2122-7 du
même code prévoit que « Sont représentatives au niveau de la branche à 1'égard des personnels
relevant des collèges électoraux dans lesquels leurs règles statutaires leur donnent vocation à
présenter des candidats les organisations syndicales catégorielles qui sont affiliées à une
confédération syndicale catégorielle interprofessionnelle nationale et qui remplissent les
conditions de l'article L. 2122-5 dans ces collèges » ; que ces dernières dispositions, qui
conduisent à ne prendre en considération que les seuls suffrages recueillis dans les collèges
électoraux dans lesquels un syndicat a statutairement vocation à présenter des candidats, sont
applicables, pour la branche des sociétés d'assurance, à la CFE-CGC fédération de l'assurance
pour la détermination de son caractère d'organisation syndicale représentative ; qne cette
détermination a fait l'objet de l'article !er de l'arrêté du 24 décembre 2013, qui n'est plus en
litige ;
3. Considérant, en second lieu, que, s'agissant en revanche de la mesure, au
sein d'une même branche professionnelle, des audiences respectives des organisations syndicales
représentatives, l'article L. 2232-6 du code du travail dispose, s'agissant des accords
intercatégoriels, que «La validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est
subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés
représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience
prévue au J0
de l'article L. 2122-5 ou, le cas échéant aux élections visées à l'article L. 2122-6,
au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives à ce
niveau, quel que soit le nombre de votants(...) >>; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque le
ministre chargé du travail fixe, en application des dispositions de l'article L. 2122-11 du même
code, les audiences respectives des différentes organisations syndicales reconnues
représentatives dans une même branche professionnelle en vue d'établir la validité de futurs
accords de branche intercatégoriels, il lui appartient de rapporter Je nombre des suffrages
exprimés en faveur de chacune des organisations reconnues représentatives au nombre total des
suffrages exprimés en faveur de l'ensemble des organisations reconnues représentatives dans
cette branche ; que tel est l'objet, pour la branche des sociétés d'assurance, de l'article 2 de
1'arrêté du 24 décembre 2013 ;
4. N° 390059 - 4-
4. Considérant que, pour annuler, par J'arrêt attaqué, l'article 2 de l'arrêté du
24 décembre 2013, la cour administrative d'appel a jugé que, pour fixer l'audience relative de la
CFE-CGC dans la branche des sociétés d'assurance, le ministre chargé du travail aurait dû tenir
compte, s'agissant du «premier collège »,prévu par l'article 19 de la convention collective
nationale du 27 mai 1992, rassemblant des ouvriers et employés ainsi que des techniciens et
agents de maîtrise, non pas seulement des résultats obtenus par cette organisation aux élections
pour lesquelles les procès-verbaux mentionnaient que ce collège comportait des salariés qu'elle
avait vocation à représenter, mais de ses résultats à la totalité des élections dans ce collège ;
qu'en statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Paris, dont l'arrêt est suffisamment motivé
sur ce point, n'a ni dénaturé les faits, ni excédé les termes du litige dont elle était saisie, ni
entaché sa décision d'erreur de droit;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fédération CFDT banques
et assurances n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque;
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de 1'espèce, de mettre à la
charge de la fédération CFDT banques et assurances la somme de 3 000 euros à verser à la
CFE-CGC fédération de J'assurance au titre des dispositions de J'article L. 761-1 du code de
justice administrative ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit
mise à ce titre à la charge de la CFE-CGC fédération de l'assurance qui n'est pas, dans la
présente instance, la partie perdante ;
DECIDE:
Article 1er : Le pourvoi la fédération CFDT banques et assurances est rejeté.
Article 2 : La fédération CFDT banques et assurances versera à la CFE-CGC fédération de
l'assurance une somme de 3 000 euros au titre de J'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la fédération CFDT banques et assurances, à la
CFE-CGC fédération de l'assurance et à la ministre du travail.
Copie en sera adressée à la Confédération générale du travail, à la Confédération générale du
travail-Force ouvrière, à 1'Union nationale des syndicats autonomes et à la Confédération
française des travailleurs chrétiens.
5. N" 390059 - 5 -
"Délibéré à l'issue de la séance du 16 octobre 2017 où siégeaient: M. Rémy
Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Denis Piveteau,
M. Didier Chauvaux, présidents de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Luc
Derepas, M. Jean-Philippe Mochon, Mme Delphine Hedary, Mme Maud Vialettes, conseillers
d'Etat et M. Bruno Bachini, maitre des requêtes-rapporteur.
Lu en séance publique le 8 novembre 201 7.
Le Président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Bruno Bachini
Le secrétaire :
Signé : Mme Nicole Gyppaz
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la
concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qw concerne les voies de droit commun
contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente · ision.