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Transition énergétique : quels investissements
pour quelle compétitivité ?
Comprendre les stratégies en Allemagne, en Espagne
et au Royaume-Uni
2. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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A propos de HEC Paris
Spécialisé dans le domaine de l’enseignement et de la recherche en management,
HEC Paris offre une gamme complète et unique de formations aux décideurs de
demain : le programme de la Grande Ecole, les Mastères Spécialisés, les MSc, le
MBA, l’Executive MBA, TRIUM Global Executive MBA, le Doctorat et une large
gamme de programmes pour cadres et dirigeants.
Créé en 1881 par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, HEC Paris,
membre fondateur de ParisTech, rassemble 110 professeurs permanents, plus de
4 000 étudiants et 8 500 cadres et dirigeants en formation chaque année.
A travers son Centre de Géopolitique, partenaire de Kurt Salmon pour cette
étude, HEC Paris entend contribuer à l’analyse d’une géopolitique de plus en plus
complexe et d’une géo-économie en plein bouleversement. Créé en 2013, le Centre
HEC de Géopolitique est un lieu de formation, de dialogue et de réflexion visant à
sensibiliser et former les dirigeants des secteurs privé et public aux nouveaux défis
allant du risque pays à l’analyse prospective.
www.hec.fr
A propos de Kurt Salmon
Kurt Salmon est un cabinet de conseil en transformation des entreprises.
La vocation des 1 400 consultants de Kurt Salmon est d’apporter aux dirigeants
des entreprises le conseil et les idées originales qui ont un impact direct et concret
sur la réussite de leurs projets et, en particulier, sur leurs projets de transformation.
Kurt Salmon accompagne les dirigeants dans l’exploration de nouvelles voies
pour les entreprises. Nos équipes de conseil interviennent à leurs côtés pour
mieux comprendre les attentes du marché, pour les aider à discerner les facteurs
d’évolution de leur secteur d’activité et à trouver la différenciation compétitive qui
leur permettra d’exprimer leur leadership.
www.kurtsalmon.com
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Editorial
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C’est avec plaisir que j’ai accepté, à l’invitation de l’équipe du secteur
Energy & Environment de Kurt Salmon, de vous présenter la première
édition de notre étude annuelle sur les implications économiques des
transitions énergétiques en Europe. L’objectif de cette première étude
est de faire le point sur les stratégies économiques sous jacentes aux
programmes de transition énergétique de trois pays, qui représentaient
à eux seuls près de 40 % de la consommation pétrolière de l’Union
européenne en 2012 : l’Allemagne, l’Espagne et le Royaume-Uni.
En partenariat avec HEC Paris à l’occasion de cette première étude,
et en structurant nos analyses à partir de l’expérience de notre centre
d’expertise des politiques sectorielles de l’énergie et du fonctionnement des marchés, nous
développons plusieurs clés de compréhension des implications des programmes de transition
énergétique en termes de niveaux d’investissements requis, d’approche du financement et de
gestion des risques économiques embarqués aux horizons 2030 et 2050.
Le constat est implacable : ce sont des centaines de milliards d’euros que nos pays vont devoir
financer au cours des deux prochaines décennies pour atteindre leurs objectifs en matière de
réduction des gaz à effet de serre. En fonction des caractéristiques des systèmes énergétiques
de chaque pays, les trajectoires de transformation privilégieront différemment le recours aux
énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique. L’équilibre d’ensemble reste fonction des
développements de l’Europe gazière, au Royaume-Uni, en Grèce et même en Israël par exemple.
Au final, deux stratégies économiques se distinguent : investissements pour l’amélioration de
la productivité du secteur électrique au service de la compétitivité prix au Royaume-Uni ou
bien recherche d’un nouveau modèle de croissance économique en Allemagne, appuyée par
une approche structurelle de la compétitivité énergétique et du pays. L’aboutissement de ces
ambitions demeure dépendant, vu d’aujourd’hui, des leaderships en œuvre tant à l’échelle des
Etats-membres qu’à l’échelle de la nécessaire coordination européenne des objectifs Energie Climat. Les implications sur l’emploi des européens de cette révolution annoncée que constitue
notamment la diminution par deux de la consommation en énergie primaire à l’horizon 2050,
mériteront d’être évaluées et pilotées dès cette décennie.
J’espère que vous apprécierez la lecture de ce premier rapport, et que les informations et les
analyses qu’il contient seront utiles pour vous.
Bien cordialement
Chiheb Mahjoub
Président et CEO Kurt Salmon
3
4. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Synthèse générale de l’étude
Le lancement à partir de mars 2013, par la Commission européenne, du processus d’élaboration
d’un « Cadre 2030 pour les politiques climatiques et énergétiques » fait émerger, dans le débat
entre les Etats membres de l’Union européenne, des options différentes, notamment en matière
de pilotage de la politique européenne de l’énergie et de l’éventuel maintien d’un objectif
contraignant de production d’énergie d’origine renouvelable.
Dans ce contexte, la présente étude vise à mieux comprendre les stratégies de transition
énergétique de trois pays européens : l’Allemagne, l’Espagne et le Royaume-Uni.
1.
Les trois pays présentent trois stratégies de transition énergétique distinctes avec des
résultats contrastés :
• ’Energiewende constitue bel et bien un tournant historique pour l’Allemagne et présente
L
d’ores et déjà des transformations substantielles de son offre en énergie, à travers la
montée en puissance des énergies renouvelables ;
• a doctrine de soutenabilité énergétique espagnole est en échec économique et aucune
L
relance du projet de transition énergétique ne semble envisageable sans une véritable
réforme structurelle du secteur électrique ;
• a stratégie de décarbonisation de l’économie du Royaume-Uni est une réflexion au long
L
cours, qui se traduit, à court terme, par la relance du programme nucléaire.
2.
Les implications économiques des programmes de transition énergétiques engagés sont
également distinctes :
• es besoins en investissements de l’Allemagne et du Royaume-Uni s’élèvent à 530 milliards
L
d’euros d’ici à 2030, dont 400 milliards d’euros pour le seul projet allemand ;
• ’Espagne fait désormais face à une dette cumulée de 26 milliards d’euros de son secteur
L
électrique.
3.
Deux approches du financement de la transition énergétique ressortent de l’étude :
• e Royaume-Uni fait porter l’essentiel du risque aux investisseurs privés pour le
L
financement de ses infrastructures et limite sa prise de risque public pour les politiques de
décarbonisation à 11 milliards d’euros à l’horizon 2022 ;
• n Allemagne, tous les leviers de financement semblent mobilisables face à l’ampleur des
E
besoins, à commencer par la hausse du prix de gros de l’électricité à l’horizon 2020 (+ 44 %
par rapport à 2013) et de la tonne CO2 (+ 467 %) et le projet politique de couplage de
l’Energiewende aux marchés financiers.
4. e sont bien deux stratégies économiques différenciées qui sont en œuvre en Allemagne et
C
au Royaume-Uni :
• Les investissements programmés dans le secteur électrique au Royaume-Uni sont
essentiellement des investissements de productivité destinés à consolider la compétitivité
prix du pays ;
• L’Allemagne s’est lancée dans une recherche globale de compétitivité structurelle qui
correspond en réalité à la recherche d’un nouveau modèle de croissance.
5. n’existe toutefois pas d’étude de référence au sujet de l’impact de la transition énergétique
Il
sur l’emploi : la mesure précise des mouvements, en termes de transferts/créations/
destructions d’emplois entre les secteurs conventionnels et les secteurs non conventionnels
devrait à l’évidence constituer un des critères de décision de la puissance publique.
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Synthèse par pays
Allemagne
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• Le tournant énergétique (Energiewende), désigné comme « une tâche herculéenne » par la
Chancelière Angela Merkel, correspond à un objectif de réduction de 50 % de la consommation
en énergie primaire et à l’accroissement de la part des énergies renouvelables jusqu’à 60 % dans
la consommation finale à l’horizon 2050 ;
• D’ici à 2030, 400 milliards d’euros sont nécessaires pour financer l’Energiewende, ce qui
correspond à un tiers de l’effort engagé pour la réunification de l’Allemagne de l’Ouest et de
l’Allemagne de l’Est (1 300 milliards d’euros), et en fait un véritable projet de société ;
• En formulant l’hypothèse d’une contribution constante du consommateur particulier d’électricité,
restent + 300 milliards d’euros à trouver à l’horizon 2030, ce qui appelle à la mise en œuvre
d’une stratégie de financement globale, mobilisant tous les leviers à disposition de la société
allemande ;
• L’augmentation du prix de gros de l’électricité (+ 44 %) et de la tonne CO2 (+ 467 %) à l’horizon
2020 par rapport à 2013 est d’ores et déjà assumée dans les hypothèses économiques de
référence ;
• e projet politique en négociation repose sur le couplage de l’Energiewende aux marchés
L
financiers, dont la recapitalisation du secteur bancaire allemand, un programme d’attractivité
des investisseurs privés, y compris internationaux. Les besoins de financement sont tels qu’ils
forcent en outre à interroger la tenabilité du frein à l’endettement public introduit dans la
Constitution allemande à partir de 2016. Une relance fiscale est-elle envisageable ? Si oui à
quelle échéance ?
• ’est l’ensemble de ces éléments qu’il conviendra d’apprécier dans le cadre de l’accord en
C
discussion entre CDU et SPD pour former le futur gouvernement allemand attendu fin 2013.
Espagne
• La trajectoire de transition énergétique amorcée au milieu des années 2000, et formalisée à
travers la doctrine de la Sostenibilidad Energética en 2007, est à l’arrêt ;
• Fondé sur la réduction de la dépendance aux importations en énergies fossiles et le
développement d’un leadership mondial dans les énergies renouvelables, le projet de
transition énergétique espagnol échoue sur les dysfonctionnements du secteur électrique qui
ont conduit à un déficit tarifaire record ;
• Le déficit tarifaire du système électrique espagnol résultant du fort niveau de soutien aux
énergies renouvelables (augmentation de 497 % en 8 ans) et de son non financement initial
par le consommateur particulier, aboutit à une dette cumulée entre 2005 et 2013 de + 26
milliards d’euros ;
• Le caractère tardif et limité de la réponse des pouvoirs publics à travers la Reforma del sistemo
electrico de 2013 a finalement conduit à une explosion de la facture pour les ménages : + 63 %
en 8 ans ;
• Selon toute vraisemblance, il ne devrait pas y avoir de relance de la transition énergétique
en Espagne sans véritable réforme structurelle du secteur électrique et assainissement des
finances publiques.
Royaume-Uni
• Positionné en leader mondial sur le changement climatique avec des objectifs ambitieux de
réduction des émissions de gaz à effet de serre (– 80 % à l’horizon 2050 par rapport à l’année
1990), le Royaume-Uni s’efforce de repenser la décarbonisation de l’économie à long terme,
en s’appuyant sur des mécanismes de marché et la recherche d’un prix plancher du carbone ;
• Les principaux investissements programmés visent avant tout à combler le déficit d’inves
tissement dans le secteur électrique, estimé à + 130 milliards d’euros d’ici à 2020-2030,
principalement à travers la sortie du charbon, le développement de cycles combinés à gaz et
la relance du nucléaire dans la prochaine décennie, avec une option désormais ouverte pour
un recours aux gaz de schiste ;
• algré l’existence d’une ingénierie en matière de politiques publiques parmi les plus sophistiM
quées au monde, les différents dispositifs en soutien à la politique de maîtrise de la demande
en énergie sont contraints de financement. Le Green Deal ne dispose pas à ce jour des incitations financières nécessaires à sa mise en œuvre, hormis sur le chapitre précarité énergétique. Nombre d’experts contestent même la soutenabilité des objectifs de réduction carbone
définis dans les plans budgétaires 2018-2022 et 2023-2027.
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Sommaire
K100
Propos préliminaires
7
Transition énergétique : un concept flou au regard de la diversité des formes
d’énergie, des coûts et des prix
7
Implications pour la compétitivité : compétitivité prix ou compétitivité structurelle ?
7
Des objectifs énergie-climat européens mais des stratégies de transition
énergétique nationales
8
Présentation de trois trajectoires de transition énergétique
10
Energiewende en Allemagne : une approche globale de la transition énergétique
au service d’un projet de société
10
Espagne : une trajectoire mise en échec par mauvaise anticipation des prix
des énergies fossiles et absence de réforme structurelle du secteur électrique
13
Royaume-Uni : une refonte de l’offre énergétique au profit de la décarbonisation
du secteur électrique mais des doutes sur la robustesse du financement
des dispositifs de maîtrise de la demande en énergie
14
Coûts, investissements et financement : des centaines de milliards
d’euros à trouver et du risque à gérer
Allemagne : entre 200 et 400 milliards d’euros d’ici à 2030
Espagne : déjà 26 milliards d’euros de dette cumulée pour le secteur électrique
entre 2005 et 2013
Royaume-Uni : 200 milliards d’euros d’ici à 2050 dont 130 milliards
pour la restructuration du secteur électrique à l’horizon 2030
Conclusion : compétitivité prix ou compétitivité structurelle ?
17
17
20
21
23
Un manque de recul évident sur les implications des transitions énergétiques
en matière d’emplois
23
Mais deux modèles qui commencent à se distinguer : le choix de la compétitivité
prix pour le Royaume-Uni contre la recherche d’un nouveau modèle de
croissance pour l’Allemagne
24
Annotations et références
6
26
7. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Propos préliminaires
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Transition énergétique : un concept flou au regard de la diversité des formes
d’énergie, des coûts et des prix
Envisager un travail de comparaison économique des stratégies de transition énergétique en débat ou en voie de mise en œuvre
au sein de divers pays implique de rappeler la
diversité des formes d’énergies2 ainsi que la
différence entre leurs coûts et leurs prix3.
Il n’y a pas une mais des énergies, qui ont des
spécificités, des domaines d’emploi, des usages
et des consommateurs différents, d’où une
multiplicité de marchés, ainsi que les effets de
substitution entre énergies, comme l’illustre le
graphique suivant. De ce point de vue, le concept
originel de transition énergétique tel qu’introduit
au début des années 80 par un influent institut
allemand de recherche sur l’environnement, visait
initialement le développement de solutions de
remplacement des combustibles fossiles et des
matières radioactives.
Trois décennies plus tard, la multiplication
des initiatives de transition énergétique et
les retours d’expérience invitent à préciser
cette première définition conceptuelle. Les
transitions énergétiques peuvent s’envisager
comme une combinaison d’enjeux en faveur
de la sécurité énergétique et de la diversification des sources d’approvisionnement
en énergie primaire, de la compétitivité des
secteurs de la transformation des énergies
secondaires et de la maîtrise de la demande
en énergie finale.
Les formes d’énergie et leurs usages principaux
Energie
primaire
Pétrole
brut
Hydraulique, éolien, PV
Electricité
primaire
Energies
secondaires
ou
dérivées
Produits pétroliers
• essence
• gazole
• FOD, FOL, etc.
Energie
finale
Produits
pétroliers
Energie
utile
Gaz
naturel
Charbon
Electricité
secondaire
Electricité
Gaz
EnR th
Gaz
manufacturé
Charbon
EnR th
Chaleur
Source : DGEC
Uranium
Equipements des utilisateurs (industrie, ménages, transport, etc.)
Energie mécanique
Elec. spécifique
Lumière
Electrolyse, etc.
Implications pour la compétitivité : compétitivité prix ou compétitivité
structurelle ?
Apprécier des stratégies de transition énergétique en termes d’investissements requis
et d’implications sur la compétitivité et l’emploi des pays étudiés implique d’opérer une
distinction fondamentale entre la compétitivité prix et la compétitivité structurelle.
Le débat peut alors porter sur la compétitivité
prix, c’est-à-dire la capacité à produire des
biens et des services à des prix inférieurs à
ceux des concurrents. Pour une entreprise, il
s’agit de sa capacité à maintenir ou accroître
ses parts de marché. La compétitivité prix
dépend des niveaux relatifs des coûts de
production, des marges des producteurs et
des niveaux du taux de change pour les entreprises qui exportent.
Il peut également porter sur la compétitivité
hors prix ou structurelle, c’est-à-dire la capacité à imposer des produits indépendamment
de leurs prix. Cette compétitivité est de
l’ordre du long terme et demande du temps
pour se construire. Elle dépend principalement de la qualité, des innovations et de la
réputation.
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8. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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L’Union européenne définit la compétitivité
comme la capacité d’un pays à améliorer
durablement le niveau de vie de ses habitants,
et à leur procurer un haut niveau d’emploi et
de cohésion sociale, dans un environnement
de qualité. C’est de ce point de vue le prix
des énergies finales qui doit être apprécié,
dans la mesure où ce prix constituant un coût
d’approvisionnement pour le consommateur
final, entreprise ou particulier, il est un élément
de leur compétitivité pour les premiers ou de
leur niveau de vie pour les seconds.
Des objectifs énergie-climat européens mais des stratégies de transition
énergétique nationales
Chaque pays de l’Union européenne s’est
engagé à travers le paquet énergie climat à
réduire de 20 % des émissions de gaz à effet
de serre, accroître de 20 % son efficacité
énergétique et développer de 20 % la part
des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale d’ici 2020.
déclinées selon un ensemble d’objectifs en
matière d’évolution du bilan énergétique, de
maîtrise de la demande en énergie et d’accroissement de la part des énergies renouvelables.
La comparaison des bilans énergétiques
historiques de l’Allemagne, de l’Espagne et
du Royaume-Uni illustre formidablement bien
la diversité des situations énergétiques en
Europe selon le niveau de dépendance/indépendance des pays vis-à-vis des importations
en énergies primaires, le poids des diverses
énergies fossiles dans la structure du bouquet
énergétique, les effets de substitution gazpétrole-charbon, le poids des technologies
décarbonées, l’évolution de la demande en
énergie primaire et les progrès réalisés en
matière d’efficacité énergétique.
Les conditions d’atteinte de ces objectifs
restent toutefois à la main des états qui
sont chargés d’élaborer leurs stratégies de
transition énergétique en cohérence avec les
caractéristiques particulières de leurs bilans
énergétiques, dans le respect des critères
de sécurité d’approvisionnement en énergie
et de compétitivité. L’élaboration des stratégies de transition énergétique repose sur
la simulation et la mise au débat de trajectoires énergétiques de moyen et long termes,
Allemagne, Espagne, Royaume-Uni : 3 bilans énergétiques contrastés
Allemagne
Espagne
Royaume-Uni
Approvisionnement total en énergie primaire - en milliers de tonnes équivalent pétrole (ktep)
400 000
350 000
150 000
400000
324 489
321 643
320000
337 289 306 498
240000
100 000
219 383
50 000
99 544
0
118 679
136 359
241 003 226 390 205 643
128 295
Bilan énergétique - en %
100
90
80
24
26
25
10
10
18
19
33
34
31
38
38
36
37
34
50
55
41
29
30
23
23
23
22
26
13
5
17
2
1990
Charbon
3
2000
7
9
3
9
2008
2011
11
14
12
0
8
15
38
44
45
40
10
16
40
60
20
15
29
70
50
Source : bilans en énergies primaires en Allemagne, Espagne et Royaume-Uni, AIE, 2012.
300 000
1
2
Pétrole
brut
4
Gaz
naturel
1990
22
12
14
14
2
3
11
2
2000
Electricité
nucléaire
4
2008
1
2
4
6
2
2011
Hydro
électricité
8
9
1990
2000
Géothermie,
solaire, etc.
1
9
6
2
2008
3
1
2011
Biocarburants
et déchets
Processus en lien avec les référentiels (plusieurs réponses étaient possibles)
160000
80000
0
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L’observation de la diversité des situations énergétiques permet avant tout de
comprendre comment chaque pays a été
amené à développer des cadres légaux et
réglementaires distincts pour amorcer sa
trajectoire de transition énergétique :
• n Allemagne, l’Energiewende, concept
E
initialement progressif de transition énergétique fondé sur la recherche d’un approvisionnement en énergie respectueux de
l’environnement, renforçant la sécurité
et la compétitivité du pays, formalisé en
septembre 2010, a été revu et radicalisé au
lendemain de la décision de l’Allemagne de
sortir du nucléaire à l’horizon 2022.
• n Espagne, nul concept ou texte législatif
E
fondateur ne permet d’éclairer simplement
l’intention stratégique du pays en matière
de transition énergétique. Il s’agit davantage
d’une histoire longue, amorcée à compter
du moratoire sur les nouvelles installations
nucléaires (promulgué dès 1983, toujours
en vigueur), et relancée à partir du milieu
des années 90, face à la montée des prix
des combustibles fossiles importés. C’est
à compter de cette date que l’Espagne va
tenter sa transition4 énergétique, en organisant le décollage des énergies renouvelables
à travers un système de tarifs d’achats fortement soutenu par le financement public.
• u Royaume-Uni, le Climate Change Act5
A
de 2008, complété par le UK Low Carbon
Transition Plan6 de 2009, ont fondé la plus
ambitieuse des politiques de décarbonisation de l’économie, alors observée en
Europe. Cet objectif s’est ultérieurement
traduit par un ensemble de mesures visant à
réformer le secteur électrique7, avec en ligne
de mire la sortie du charbon. Ce processus
législatif est en passe de se conclure à
travers l’introduction depuis novembre 2012
du paquet légal énergie (« Energy Bill8 »)
auprès des chambres parlementaires.
Ainsi, l’étude économique des trajectoires
de transition énergétique de chaque pays
implique de considérer de manière spécifique
les points de passage envisagés à court et
moyen termes par les pouvoirs publics des
différents pays, ceux-ci reflétant la nature
des leviers d’action envisagés, qu’il s’agisse
des politiques sectorielles ou des politiques
fiscales.
Elle implique également de comprendre la
nature des signaux de prix des énergies qui
fonde la gouvernance de la transition énergétique, c’est-à-dire le pilotage des trajectoires
et des points de passage dans le temps. In
fine, ce sont bien de ces signaux de prix de
l’énergie dont dépend la décision des agents
économiques, publics et privés, d’investir dans
un équipement de production d’énergie ou
dans des solutions d’efficacité énergétique
et, plus généralement, les comportements de
consommation ou de sobriété énergétiques.
9
10. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Présentation de trois trajectoires de transition énergétique
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Energiewende en Allemagne : une approche globale de la transition
énergétique au service d’un projet de société
Le projet de transition énergétique allemand
est complexe à appréhender tant il constitue
certainement le plus global et le plus sociétal
des projets observables en Europe à ce jour.
Qualifié de « tâche herculéenne » par la
Chancelière Merkel, de « plus grand projet
de reconstruction depuis la seconde guerre
mondiale » par Peter Altermaier, ministre de
l’environnement, de la conservation naturelle
et de la sûreté nucléaire, ce projet cible tous
les leviers de l’offre en energie primaire, secondaire et finale et tous les leviers de la demande
en énergie finale. D’un point de vue économique, l’objectif poursuivi est la recherche de
compétitivité structurelle à long terme. Dans
ce contexte, l’évaluation des implications
économiques de l’Energiewende implique une
analyse par horizons temporels distincts.
La transition énergétique allemande
a démarré dès la fin des années 1990
Messages clés
La transition énergétique démarre en
Allemagne bien avant l’Energiewende dès
la fin des années 90, par anticipation de la
fermeture de ses plus anciennes centrales à
charbon et le renforcement de ses approvisionnements en gaz.
Il s’agit alors de préparer l’application de la
directive européenne 2001/80/CE sur les
Grandes Installations de Combustion (GIC) qui,
en instaurant des normes DeSOx-DeNOx plus
sévères,9 conduit à fermer les plus anciennes
centrales à charbon au plus tard en 2015.
C’est cette perspective qui a ouvert le renforcement de la coopération entre l’Allemagne
et la Russie, incarnée par le projet de gazoduc
Nord Stream, lancé en 1997 par Gazprom,
avec notamment l’association de l’allemand
Ruhrgas (actuellement E.ON) et plus tard
de BASF. Le premier tronçon du gazoduc a
depuis lors été achevé en mai 2011 et inauguré le 6 septembre 2011 en présence de
Vladimir Poutine. Le projet, estimé à environ
6 milliards d’euros, a notamment bénéficié
d’un crédit d’1 milliard d’euros proposé par les
banques Deutsche Bank et KfW à Gazprom,
avec la garantie du gouvernement allemand de Gerhard Schröder. Peu après avoir
cédé le pouvoir à Angela Merkel, Gerhard
Schröder a été engagé par Gazprom pour
diriger le conseil de surveillance du consortium germano-russe chargé de construire ce
gazoduc, dont Gazprom détient 51 %.
• n Allemagne, le tournant énergétique (Energiewende), désigné comme
E
« une tâche herculéenne » par la Chancelière Angela Merkel, correspond à
un objectif de réduction de 50 % de la consommation en énergie primaire
et à l’accroissement de la part des énergies renouvelables jusqu’à 60 % dans
la consommation finale à l’horizon 2050 ;
• a transition énergétique allemande s’articule en trois temps :
L
– a décennie 1990-2000 dédiée à la préparation des conditions de transfert
L
des consommations en charbon vers des consommations en pétrole et en
gaz, qui s’est notamment traduite par le renforcement de la coopération
avec la Russie pour les approvisionnements en gaz ;
– a décennie 2000-2010 dédiée à la préparation de la substitution de
L
l’atome par les technologies renouvelables à travers la loi EEG et un
financement porté à 40 % par le consommateur final (+ 77 milliards
d’euros entre 2000 et 2013) ;
– a décennie 2010-2020 dédiée à l’élaboration et au déploiement de
L
l’Energiewende, vers une approche globale de la transition énergétique,
caractérisée par une prévision d’augmentation assumée du prix de gros
de l’électricité (+ 44 %) et de la tonne CO2 (+ 467 %) à l’horizon 2020
par rapport à 2013.
• a soutenabilité économique d’Energiewende repose désormais sur le
L
dépassement du seul financement par le consommateur particulier comme
ce fut principalement le cas à travers le dispositif EEG. Elle implique la
mobilisation de mutliples leviers :
– Programme d’efficacité énergétique, pour réduire la facture en volume
du consommateur ;
– Couplage de l’Energiewende aux marchés financiers.
10
Depuis la mise en place de la loi
sur les énergies renouvelables
(EEG) au début des années
2000, c’est le consommateur
particulier qui finance la
transition énergétique
L’EEG soutient les énergies
renouvelables en garantissant
des tarifs de rachat et des droits
d’injection prioritaires sur les
réseaux de distribution pendant
20 ans, avec des tarifs fixes pour
les diverses technologies pour
les dix prochaines années. En cas
de modification du régime EEG,
les droits sont protégés pour
les projets installés sous l’ancien régime. Ces deux facteurs
réduisent les risques pour les
investisseurs.
Jusqu’à ce jour, le développement des énergies renouvelables
a avant tout été financé par les
consommateurs particuliers :
jusqu’à 40 % de la capacité
installée en énergies renouvelables, équivalents à 77 milliards
d’euros10 entre 2000 et 2013.
11. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Structure du financement des énergies renouvelables en Allemagne
Certes, les investissements dans l’adaptation
jusqu’en 2013
des réseaux électriques nécessitent des capiStructure du financement des énergies renouvelables en Allemagne jusqu’en - en %
1%
Individus privés
11 %
Développeurs de projets1
9%
4 principaux fournisseurs2
40 %
Autres fournisseurs
11 %
Fonds/Banques
Industrie
7%
7 % 14 %
Agriculture
Autre
1- Les 4 principaux fournisseurs d’énergie sont : E.on, Vattenfall, RWE et EnBW.
2- Les développeurs de projets sont des entreprises chargées de planifier et réaliser
des projets.
taux privés, mais les coûts peuvent être répercutés sur les tarifs d’acheminement. Bien que
certains auteurs soutiennent que le mode de
financement actuel des réseaux électriques
constitue un obstacle dans la mesure où les
investisseurs redoutent des rendements insuffisants, le législateur n’envisage toujours pas
de régularisation ex post des rémunérations
de capitaux en fonction de l’efficacité physique
des investissements commis. Il continue même
de privilégier l’indemnisation des opérateurs
de parcs éoliens pour les pertes financières
engendrées par les raccordements retardés.
La proportion d’énergie produite à partir de
sources d’énergie renouvelable a augmenté
régulièrement au cours des dernières années
et représente aujourd’hui plus de 20 % de la
consommation totale d’énergie. La loi EEG
Les quatre principaux fournisseurs d’énergie
connaît des évolutions régulières afin d’adapter
n’ont financé que 6,5 % de la capacité renouprogressivement le modèle économique.
velable installée.
L’amendement de la loi EEG de 2011, entré
La rénovation des bâtiments est également
en étaient au 1er janvier 2012 (ErneuerbareProcessus en lien avec les référentiels (plusieurs réponses vigueur possibles)
en grande partie financée par des investisEnergien-Gesetz - EEG 2012), propose par
80
sements privés particuliers, soutenus par
exemple aux producteurs de commercialiser
70
des prêts à faible intérêt du programme
directement l’électricité issue de sources
72 %
70 %
de rénovation du bâtiment de la KfW. Le
60
renouvelables en fonction de l’offre et la
gouvernement 58 % 56 % décidé d’augallemand a
demande à la bourse (principe de la commer50
51 rénovation
menter les fonds alloués à la %
cialisation directe, Direktvermarktung).
40
thermique de 900 à 1 500 millions d’euros
30
35 %
Energiewende offre désormais une
par an. L’augmentation du financement pour
20
approche globale de la transformation
le programme de rénovation du bâtiment de
10
%
la KfW devait être initialement assurée par le 15énergétique du pays pour les deux
prochaines décennies
0
Fonds pour l’énergie et le climat, et la vente
de certificats d’émission de CO2. Le prix des
Les projections des prix des énergies servant
certificats de CO2 ayant chuté en raison de
d’hypothèses au calage de la trajectoire de
la crise économique, les revenus générés
l’Energiewende montrent qu’une augmentasont insuffisants et de nouvelles formes de
tion significative du prix de gros de l’électrifinancement sont envisagées en attendant
cité et de la tonne CO2 est intégrée à l’horizon
une relance du schéma de négociation des
2020.
émissions de carbone.
Source : Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung e. V - DIW Economic Bulletin,
Financing the Energy Transition, septembre 2012
Les prix de référence des énergies dans le cadre de l’Energiewende en Allemagne en 2013 et en 2020
– 24 %
+ 44 %
2
2013
2
2020
9
27
28
Prix du
charbon,
€/MWh
+ 77 %
39
39
0%
16
12
440
56
+4%
+ 33 %
576
+ 467 %
22
17
16
+ 100%
%
3
Prix du
gaz,
€/MWh
Prix du
pétrole,
€/GJ
Prix du
CO2,
€/t CO2
1
Prix de
l’électricité
sur le marché
de gros, €/MWh
Intensité en
CO2 du mix
energétique,
gCO2/kWh
2
Nombre
Part de la
de pompes
prod. totale
à chaleur,
créée à partir
millions
des renouvelable
Source : Opportunities for Germany’s energy transition, What can Germany learn from selected international case studies? a study conducted by
McKinsey together with Siemens, May 2013.
11
12. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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A court terme, la contrepartie à l’effort porté
par le consommateur final réside d’une
part dans le financement de la politique de
maîtrise de la demande en energie à destination des consommateurs particuliers, d’autre
part dans un système d’exemption fiscal à
destination des consommateurs industriels.
alors se prendre à envisager que l’Energiewende donne lieu à une nouvelle politique
de l’offre, à travers un soutien à la compétitivité de l’industrie allemande par de la dette
publique serait conditionné à la réduction de
la facture énergétique moyenne en volume
après 2020.
A moyen terme, les besoins de financements
associés à l’Energiewende impliquent une
stratégie de financement globale, mobilisant
tous les leviers à disposition de la société
allemande. Le projet politique repose sur le
couplage de l’Energiewende aux marchés
financiers, pour une stratégie de financement globale, actuellement en débat, dont la
restructuration du secteur bancaire allemand
à travers le conditionnement des apports
de recapitalisation par l’Etat fédéral, un
programme d’attractivité des investisseurs
privés, y compris internationaux, la mise en
place de garanties d’Etat sur marché obligataire. Des représentants du SPD ont également avancé l’option du recours à la taxation
des transactions financières.
A long terme, le pari est celui de la décarbonisation de l’économie allemande, mais aussi de
la réduction de la facture en énergie primaire
et de l’accès à de nouveaux relais de croissance, à travers l’innovation par exemple, par
les technologies de stockage de l’énergie et
les combustibles alternatifs dans le secteur
des transports et de l’automobile.
Dans cette perspective, le charbon, fondement de la puissance industrielle allemande
depuis plus d’un siècle, a d’ores et déjà
amorcé son recul dans l’économie allemande. En 2011, l’Allemagne n’est plus que le
18e producteur de charbon du monde, avec
13 Mt (0,2 % seulement)11 alors qu’elle était
encore 6e en 1970 avec 108,6 Mt. Seules trois
mines restent en activité dans la Ruhr, avec
une production annuelle d’environ 8 Mt ; la
mine Auguste Victoria à Marl doit fermer fin
2015, les deux autres fin 2018.
C’est à la lumière de cette perspective qu’il
convient également d’interpréter les tensions
fortes qui sont apparues ces derniers mois
entre l’industrie allemande et le gouvernement. S’y jouent en partie les conditions
du renouvellement du pacte de confiance
Etat-Industries-Territoires qui a fait la force
de l’Allemagne énergétique au cours de la
décennie écoulée. Faute de disposer d’éléments tangibles jusqu’à la publication du futur
accord CDU-SPD pour former le prochain
gouvernement attendu à la fin 2013, on peut
Les subventions de l’Etat fédéral aux charbonnages (RAG Deutsche Steinkohle AG)
en déclin (2 milliards d’euros en 2008, après
29,9 Mds de 1997 à 2006 (3 Mds/an), plus 4,9
Mds d’euros du Land de Rhénanie-du-NordWestphalie), seront stoppées au plus tard
d’ici 2018, suite à l’accord12 passé entre l’Etat
fédéral et les Länder de Sarre et de Rhénaniedu-Nord-Westphalie en 2007.
Projection du bilan des énergies primaires en Allemagne à l’horizon 2050
14 500
650
40
40
70
14 090
50
50
1 000 90
2 800
3 100
5 300
4 700
15
12 600
100
100 11 350
150 10 250
1 300 300
175
425
250
1 350
3 300
650 250
1 450
3 300
1 750
1 800
2005
300
400
1 550
1 000
900
800
700
2010
2015
2020
1 200
850
650
2025
450
2 000
3 000
1 300
8 150
650
750
1 500
2 750
Source : Energieszenarien 2011, valeurs exprimées en PJ/a
12
700
1 500
Photovoltaïque
3 550
2 000
1 550
9 250
3 150
4 000
2 050
Hydroélectricité,
géothermie
0
600
2030
Eolienne
7 250
Biomasse,
déchets
650
850
850
Gaz naturel
350
0
2 300 400
100
0
2040
1 750
2050
9
6
Pétrole
1 500
Charbon
1 550
2 650
12
100
0
0
Lignite
Nucléaire
3
13. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Espagne : une trajectoire mise en échec par mauvaise anticipation des prix
des énergies fossiles et absence de réforme du secteur électrique
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La gestion du signal prix énergie par la
puissance publique est incontestablement
délicate, d’autant plus délicate que la part
imposée de l’extérieur et non maîtrisée est
importante (cours du baril de pétrole par
exemple). C’est ce qu’illustre avant tout
l’étude du projet de transition énergétique en
Espagne, de ses premiers développements au
milieu des années 2000 à la dernière réforme
électrique en date de juillet 2013.
Structurellement exposée à la hausse des prix
des énergies fossiles et engagée dans un ambitieux programme de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, l’Espagne fut l’un
des premiers pays européens à se lancer dans
le développement massif des énergies renouvelables à partir du milieu des années 2000.
Projection du bilan des énergies primaires
en Espagne à l’horizon 2020
135 306
127 038
137 998
154 523
6%
7%
6%
40 %
37 %
15 %
45 %
45 %
22 %
12 %
2005
2010
Messages clés
10 %
12 %
13 %
11 %
6%
28 %
27 %
24 %
20 %
16 %
–1%
–1%
2015
2020
Charbon
Pétrole brut
• n Espagne, la trajectoire de transition énergétique amorcée au
E
milieu des années 2000, et formalisée à travers la doctrine de
la Sostenibilidad Energética en 2007, est à l’arrêt ;
• ssentiellement fondé sur la réduction de la dépendance
E
aux importations en énergies fossiles et le développement
d’un leadership mondial dans les énergies renouvelables, le
projet de transition énergétique espagnol échoue sur une
mauvaise anticipation des prix des énergies fossiles et les
dysfonctionnements du secteur électrique ;
• e prix de l’électricité pour le consommateur final y est désormais
L
l’un des plus élevés d’Europe en 2013, avec une augmentation
de la facture électrique de 63 % en 8 ans ;
Gaz naturel
Nucléaire
Renouvelables
Solde électrique
Source : objectifs de la stratégie de développement
durable espagnole de 2007, revus et ajustés lors du
programme national des réformes en 2011
Evolution de la facture d’électricité en 2003
et en 2011
• ucune relance du projet de transition énergétique en Espagne
A
ne semble envisageable sans réforme structurelle préalable du
secteur électrique.
751
47
+ 63 %
24
700
589
253
Sa stratégie économique était alors essentiellement caractérisée par la recherche d’un
leadership de filières, notamment dans les
énergies éoliennes, solaires et les biocarburants avec un soutien public de première
importance en Europe, dans un contexte de
croissance économique et de dynamisme
financier jusqu’à la crise de 2008.
Fin 2013, la trajectoire de transition énergétique espagnole est pourtant interrompue :
au cours des cinq dernières années, le prix
des énergies primaires est resté relativement
stable, la compétitivité des filières renouvelables n’est pas encore atteinte et l’état des
finances publiques espagnoles ne permet
plus de maintenir les prix de rachats garantis
aux productions renouvelables. Pendant cette
même période, les efforts de maîtrise de la
demande en énergie sont restés limités et le
prix de l’électricité a explosé.
800
+ 109 %
600
500
360
360
12
12
60
120
176
120
120
31
400
52
300
200
199
125
2003
100
2003
Facture
Coût de
consom. l’électricité
201
2011
0
Facture
Coût de
consom. l’électricité
Dette
Importations
Renouvelables
Distribution
Transport
Production
Source : ministerio de industria, energia y turismo, 12 de
julio 2013, reforma del sistema electrico – una reforma
necesaria
13
14. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Le coût élevé de l’électricité en Espagne
résulte d’une combinaison de facteurs :
• es nouvelles capacités de production
L
électrique, principalement renouvelables,
ont bénéficié dans les années 2000 d’un
système de soutien par la mise en place de
tarifs d’achats (feed-in tariffs) parmi les plus
élevés au monde ;
• a rémunération de ces capacités consiL
dérée a posteriori comme excessive a
conduit à une situation de capacités de
production électrique excédentaire. Cette
situation d’une offre excédentaire ne s’est
pas retranscrite par l’affaissement du prix
de gros en raison des caractéristiques particulières du système électrique en Espagne
(règles de « Pool » obligatoire, isolement
électrique de la péninsule ibérique) et les
tarifs d’achats n’ont été révisés à la baisse
que tardivement, au début de la décennie
suivante ;
• e phénomène a été accentué par la baisse
L
concomitante de la demande d’électricité
en raison des effets de crise économique, ce
qui a eu pour conséquences la diminution
des revenus du système électrique espagnol et l’augmentation du coût unitaire de
l’électricité consommée, faisant alors apparaître le déficit tarifaire et l’endettement du
secteur électrique.
En 2013, au prix de l’électricité s’ajoutent
désormais les amortissements et les intérêts issus du déficit tarifaire de l’électricité
et de la dette avec à la clé une réduction du
revenu disponible des ménages et la mise en
évidence d’une perte de compétitivité de l’industrie et de l’économie dans son ensemble.
Les objectifs 2020 développés dans le cadre
de la stratégie de développement durable ne
seront pas tenus alors même que le coût de
la fourniture d’électricité en Espagne, pour
les ménages et l’industrie, est un des plus
élevés dans l’Union européenne. La situation
espagnole relève d’un cas emblématique :
l’engagement d’un projet de transition énergétique doit se fonder sur des signaux de prix
de l’énergie robustes.
Royaume-Uni : une refonte de l’offre énergétique au profit de la
décarbonisation du secteur électrique mais des doutes sur la robustesse
du financement des dispositifs de maîtrise de la demande en énergie
Le Royaume-Uni envisage sa transition énergétique à travers des objectifs ambitieux de
réduction des émissions de gaz à effet de
serre :
• 0 % de réduction des émissions en 2050
8
par rapport à l’année de référence 1990 ;
• 4 % d’ici 2020, avec la promesse d’un
3
nouveau resserrement dans le cas d’un
accord mondial sur le climat.
Toutefois, les émissions de GES du
Royaume-Uni ont d’ores et déjà baissé de
23 % depuis 1990 du fait de l’externalisation
de sa production industrielle vers les pays en
développement et du « dash for gas » des
années 90, ce qui signifie qu’il a déjà atteint
son objectif, légalement contraignant de
Kyoto, de 12,5 % inférieur à l’année de référence.
Ces objectifs font l’objet de développements
réglementaires continus depuis le début des
années 2000 :
• es accords volontaires corrélés à de la
D
fiscalité : Climate Change Levy – CCL14,
Renewable Heat Incentives15 en 2012 ;
Messages clés
• ositionné en leader mondial sur le changement climatique avec des objectifs ambitieux
P
de réduction des émissions de gaz à effet de serre (– 80 % à l’horizon 2050 par rapport
à l’année 1990), le Royaume-Uni s’efforce de repenser la décarbonisation de l’économie
à long terme, en s’appuyant sur des mécanismes de marché et la recherche d’un prix
plancher du carbone ;
• es principaux investissements programmés visent avant tout à combler le déficit
L
d’investissement dans le secteur électrique, estimé à + 130 milliards d’euros d’ici à
2020-203013, principalement à travers la sortie du charbon, le développement de cycles
combinés à gaz et la relance du nucléaire dans la prochaine décennie, avec une option
désormais ouverte pour un recours aux gaz de schiste à partir de 2030 ;
• algré l’existence d’une ingénierie de politiques publiques sophistiquée, les différents
M
dispositifs en soutien à la politique de maîtrise de la demande en énergie demeurent
contraints en financement. Le Green Deal ne dispose pas à ce jour des incitations
financières nécessaires à sa mise en œuvre, hormis sur le chapitre précarité énergétique.
Nombre d’experts contestent même la soutenabilité des objectifs de réduction carbone
définis dans les plans budgétaires 2018-2022 et 2023-2027.
14
15. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Projection de production des gaz à effet
de serre au Royaume-Uni en 2020-2050
– 34 %
– 80 %
443
292
89
1990
2020
2050
Source : Low Carbon Transition Plan – Objectifs de
réduction des gaz à effet de serre au Royaume Uni à
l’horizon 2020 et 2050 (base 1990)
• es obligations faites aux fournisseurs
D
d’énergie : Carbon Emission Reduction
Target 16 et Renewable Transport Fuels
Obligations17 en 2008 ;
• es mécanismes de marché au sein desquels
D
la valorisation des droits carbone est déterminante (Carbon Reduction Commitment
Energy Efficiency Scheme18 en 2010).
Depuis 2012, le Energy Act complète le dispositif réglementaire en matière :
• e réforme du secteur électrique : la
D
construction de nouvelles centrales
nucléaires au Royaume-Uni est pilotée et
financée par le secteur privé. Cela transfère la responsabilité de tels projets à
l’investisseur-exploitant, tout en réduisant
(sans l’éliminer) la participation du gouvernement ainsi que son implication à long
terme (licence/autorisation d’exploitation,
déconstruction et déchets nucléaires) ;
• e financement de l’efficacité énergétique
D
dans le bâti résidentiel et non résidentiel :
autorisation des provisions pour des améliorations pré-déterminées du bâti, appuyée
sur une taxe nouvelle sur les factures
d’énergie qui permet de réduire l’investissement initial pour les consommateurs ;
• ’objectifs de rénovation : le Green Deal
D
(lancé à l’automne 2012) vise à rénover 14
millions de foyers au Royaume-Uni pour les
rendre plus économes en énergie.
A la différence de l’Allemagne, les instruments
mis en place pour organiser le financement
sont essentiellement fondés sur des mécanismes de marché, de la fiscalité carbone et
la recherche d’un prix plancher du marché
carbone :
• ystème de négociation européen des émisS
sions de gaz à effet de serre (ETS) et prix
plancher du carbone (accords sur le changement climatique et régime fiscal Levy) ;
• chéma d’efficacité énergétique fondé sur
S
des standards dans les secteurs du transport, du bâti et des produits et des mécanismes de marché ;
500
• bligations portées par les fournisseurs
O
d’énergie en matière de contribution à
400
l’amélioration de l’efficacité énergétique
(déploiement d’une infrastructure de comp300
tage intelligent, réduction des émissions de
gaz à effet de serre, obligations) ;
• Programme d’efficacité énergétique essen 200
tiellement fondé sur une approche de
100
marché (Green Deal, couplé aux obligations
portées par les fournisseurs d’énergie) ;
• Réforme du secteur électrique (obligations
0
d’achat des énergies renouvelables à travers
des contracts for difference, dans le cadre
d’un soutien limité, marché de capacités
pour les investissements électriques, standards technologies pour les émissions de
gaz à effet de serre).
Pour financer ces objectifs, la loi établit le
principe des budgets carbone à cinq ans.
Les trois premiers budgets ont été établis en
2009, pour une couverture 2008-2012, 20132017 et 2018-2022. Le quatrième budget,
2023-2027 a été soumis au processus législatif à partir de juin 2011.
Toutefois, malgré tous les efforts du
Department of Energy and Climate Change,
il semble que le gouvernement ne soit pas
encore au rendez-vous de la mise en œuvre
et de la coordination.
Une évaluation indépendante des progrès
du gouvernement britannique envers ses
objectifs suggère que la mise en œuvre du
Green Deal, c’est-à-dire le programme cadre
pour l’amélioration de l’efficacité énergétique dans les bâtiments, n’est pas effective
pas manque de financement. L’accent mis
sur la lutte contre la précarité énergétique
aurait notamment conduit à un gel des
incitations financières nécessaires au reste
des secteurs concernés. En outre, le Trésor
britannique constituerait un frein à la mise
en œuvre en limitant la capacité d’emprunt
de la Banque d’investissement verte. Bien
qu’en ligne avec sa trajectoire carbone 2017,
le Royaume-Uni ne serait pas pour l’heure en
mesure d’atteindre ses objectifs fixés pour le
troisième et le quatrième budget carbone à
cinq ans. Un débat est en ce moment en cours
quant à savoir si les politiques devraient être
simplifiées et rationalisées, notamment sous
l’impulsion de la communauté économique
qui conteste la nature des objectifs établis et
l’efficacité des dispositifs en chevauchement.
L’approche réglementaire atypique poursuivie
par le Royaume-Uni s’inscrit dans l’objectif
prioritaire de mettre en place un prix plancher
15
16. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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C’est également dans l’hypothèse d’un prix
plancher du carbone que le Royaume-Uni
envisage 4 trajectoires différenciées à l’horizon 2050, traduites par les projections de
consommation d’énergie primaire suivantes :
Projection du bilan en énergies primaires au Royaume-Uni selon
les 4 scénarios de référence à l’horizon 2050
9 650
9 000
8 000
7 500
Energies
renouvelable
Biomasse et déchets
Gaz naturel
Pétrole
Produits pétroliers
importés
Charbon
Electricité nucléaire
Electricité importée
REF
ADD
GAP
LC
Avec les nouvelles découvertes et technologies relatives aux ressources gazières non
conventionnelles, les scénarios envisagent une
décorrélation entre les prix du pétrole brut
et du gaz naturel, au moins dans certaines
parties du monde.
Les hypothèses de prix du gaz et du pétrole
dans les différents scénarios
Reference gas
Hypothèses de prix du gaz à l’importation £(2000)/GJ
2010
2015
2020
2025
2030
2035
4,5
4,9
5,2
5,5
5,7
5,7
4,5
4,6
4,6
4,7
4,8
4,8
Hypothèses de prix du pétrole à l’importation £(2000)/bbl
All scenarios
du carbone, et des mécanismes de marché
tels que les contracts for differences (CFD)
et les marchés de capacité, seuls à même de
permettre le soutien aux productions d’électricité décarbonées (EnR et nucléaire). C’est dans
ce contexte que fin 2013, les régulateurs britanniques (Office for Nuclear Regulation et l’Environment Agency) ont certifié la conception de
l’EPR par rapport à leurs préconisations relatives aux aspects sûreté, sécurité et environnement19. Le 21 octobre 2013, EDF a signé un
contrat de fourniture de 2 réacteurs nucléaires
de type EPR 1650 MW pour le site de Hinkley
Point. Les principaux actionnaires sont EDF,
AREVA, CGNPG (China General Nuclear
Power Groupe, CNNC (China National Nuclear
Corporation. Le prix est évalué à 16 milliards
de livres (environ 18,9 milliards d’euros). Le prix
garanti pendant 35 ans serait de 92,50 livres/
MWh (environ 109 euros/MWh)20.
2010
2015
2020
2025
2030
2035
39,1
41,9
44,7
47,5
50,3
50,3
Source : The UK energy system in 2050 - Comparing
Low-Carbon Resilient Scenarios, UKERC février 2013
Ces scénarios intègrent deux variantes de prix
du gaz : le prix en 2030 est seulement 6 %
supérieur à celui de 2010 alors que dans le
scénario de référence il est supérieur de 30 %.
Les variantes de prix charbon et pétrole sont
identiques à travers les scénarios : un peu plus
de 100 $ US (2005)/baril d’ici à 2030.
Dans l’hypothèse d’une décorrélation entre les
prix du pétrole brut et du gaz naturel, c’est
la question de l’adaptation de la trajectoire
de décarbonisation qui est posée à partir
de la décennie 2020-2030. De ce point de
vue, les simulations effectuées par l’UKERC
démontrent qu’en cas de prix bas du gaz, les
incitations à l’efficacité énergétique et aux
substitutions entre technologies carbonées
et non carbonées étant affaiblies, les technologies Captage, Séquestration du Carbone
(CSC) sont appelées à jouer un rôle accru.
10000
8000
6000
4000
2000
Source : The UK energy system in 2050 - Comparing Low-Carbon Resilient Scenarios,
UKERC février 2013
0
16
17. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Investissements : des centaines de milliards d’euros
à financer à plus ou moins long terme en fonction des
risques embarqués
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Allemagne : entre 200 et 400 milliards d’euros d’ici à 2030
Récapitulatif des besoins en investissements
Si la part des énergies renouvelables doit être doublée, des investissements cumulés s’élevant
à plus de 200 milliards d’euros seront nécessaires entre 2010 et 2020 (jusqu’à 580 milliards
d’euros entre 2020 et 2050).
0
731
1 966
436
71
432
2 476
576
87
0
103
2 979
0
355
4 520
2 768
7 288
0
455
5 349
2 994
8 343
Total
investment
0
594
60
Total heat
627
4 091
480
Total
electricity
3 404
88
950
Local heating
networks
54
514
Geothermal
energy
2001
2002
0
Energy import
264
Biogas/biomass
combined heat
and power
2 145
Biomass heat
90
Collectors
Photo-voltaïcs
2000
Water
Wind
Energy import
Estimation des investissements nécessaires dans les énergies renouvelables entre 2000 et 2050
1 524
4 503
2003
91
3 234
729
0
564
2 672
926
101
0
642
4 980
3 338
8 318
2004
94
2 464
3 048
0
573
1 988
745
116
0
819
6 351
1 677
9 028
2005
96
2 179
4 077
0
714
1 626
1 051
145
0
875
7 403
2 485
9 888
2006
92
2 639
3 494
0
1 041
1 910
2 191
238
0
885
8 415
3 188
11 603
2007
83
1 996
4 544
0
692
2 379
2 848
618
39
991
9 509
3 689
13 198
2008
84
2 021
7 007
0
901
1 660
1 356
1 066
0
1 045
10 468
3 627
14 095
2009
81
2 384
11 799
0
666
1 497
1 741
1 138
42
1 067
16 046
3 300
19 346
2010
87
2 666
23 800
0
827
1 625
1 256
1 281
40
758
27 848
3 733
31 581
2011
88
2 754
15 000
0
1 056
1 713
1 129
1 350
77
763
19 048
4 119
23 168
2012
101
3 001
9 240
0
1 280
1 627
1 070
1 391
105
773
13 516
4 298
17 814
2013
114
3 250
7 200
0
1 494
1 722
1 017
1 429
130
793
11 712
4 645
16 356
2014
128
3 680
6 270
0
1 672
1 831
1 093
1 450
162
843
11 332
4 953
16 285
2015
142
4 148
5 490
0
1 814
1 918
1 019
1 468
198
852
10 996
5 200
16 197
2016
158
4 456
4 670
0
1 932
1 996
1 104
1 474
241
895
10 627
5 402
16 030
2017
183
4 778
4 125
0
2 018
1 928
1 109
1 479
291
888
10 486
5 425
15 911
2018
184
5 121
3 710
370
1 996
1 735
943
1 475
348
865
10 676
5 207
15 882
2019
195
5 854
3 354
720
1 910
1 644
928
1 481
408
889
11 456
5 036
16 495
2020
195
6 204
3 048
980
1 866
1 536
552
1 486
496
829
11 475
4 889
16 364
2030
287
5 349
2 525
2 255
2 060
1 399
1 657
1 580
568
1 059
12 658
5 039
17 697
2040
315
4 523
3 498
3 240
2 950
1 511
1 044
1 690
960
1 291
13 580
6 151
19 731
2050
346
4 792
2 223
4 155
3 630
1 302
1 534
1 785
1 440
1 242
14 490
6 717
21 207
Average for the
years 2010 to 2020
143
4 174
7 810
188
1 624
1 752
1 020
1 433
227
832
13 561
4 810
18 371
1 574
45 911
85 907
2 070
17 865
19 276
11 220
15 766
2 495
9 147
149 176
316
4 888
2 749
3 217
2 880
1 401
1 418
1 685
989
1 197
13 576
5 969
19 545
9 470
146 636
82 461
96 500
86 400
42 125
42 530
50 550
29 680
35 925
407 277
179 075
586 353
Total for the years
2010 to 2020
Average for the
years 2021 to 2050
Total for the years
2021 to 2050
52 907 202 083
Source : selon une estimation du ministère fédéral de l’Environnement, de Conservation de la Nature et de sûreté nucléaire (BMU), reprise par le Deutsches
Institut für Wirtschaftsforschung e. V - DIW Economic Bulletin, Financing the Energy Transition, septembre 2012
17
18. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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La répartition entre les investissements pour
le développement des énergies renouvelables
et les investissements pour la réduction de la
demande en énergie n’est pas évidente à ce
stade de la littérature économique :
• ’Institut des Etudes Economiques Interna
L
tionales de Hambourg (HWWI) a récemment
estimé que la valeur nette des investissements jusqu’en 2030 s’élève à 335 milliards
d’euros, dont :
– 250 milliards d’euros pour le soutien aux
énergies renouvelables,
– 5 milliards d’euros d’investissements
8
supplémentaires dans les centrales,
réseaux et capacités de stockage. Pour
l’extension du seul réseau, l’Agence fédérale des réseaux (BNA) prévoit un investissement de 20 à 25 milliards d’euros sur
les 15 prochaines années. Des investissements pouvant aller jusqu’à 15 milliards
d’euros seront nécessaires pour développer de nouvelles centrales thermiques
gaz (jusqu’à 10 GW). Dans de nombreux
cas, la construction de nouvelles centrales
ainsi que le remplacement et l’entretien
des réseaux devraient également être
effectués en dehors de toute transition
énergétique.
• a banque fédérale de développement
L
Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW)
estime les investissements nécessaires pour
améliorer l’efficacité énergétique du bâtiment au cours des dix prochaines années à
75 milliards d’euros.
Cette littérature économique tend à relativiser les déclarations commises par le
ministre allemand de l’environnement, Peter
Altmaier qui affirmait dans le Frankfurter
Allgemeine Zeitung du 19 février 2013, que
« les coûts de la réforme de l’énergie et de
la restructuration de l’approvisionnement
énergétique pourraient s’élever à environ
mille milliards d’euros d’ici la fin des années
2030 ». Il s’agissait alors en pleine campagne
électorale de pré-positionner une éventuelle
réduction du financement en soutien au
développement des énergies renouvelables,
à travers un plan de réduction des tarifs
d’achats de 1,8 milliards d’euros à 1 milliard
par an. Si les tarifs d’achats des énergies
renouvelables ont été reconduits à l’identique pour 2014, tout laisse envisager que le
Messages clés
futur gouvernement CDU-SPD
poursuivra la réforme d’ores et
• ’ici à 2030, 400 milliards d’euros sont nécessaires pour financer
D
déjà amorcée de la loi EEG.
l’Energiewende, ce qui correspond à un tiers de l’effort engagé pour la
La perspective d’une réforme
réunification de l’Allemagne de l’Ouest et de l’Allemagne de l’Est (1 300
avancée de la loi EEG donne
milliards d’euros), ce qui en fait un véritable projet de société :
lieu à de nombreuses études et
– uelques soient les estimations, le développement des énergies
Q
prises de positions politiques.
renouvelables représente la plus grosse part des investissements : 200
Une étude de German Watch
milliards d’euros entre 2010 et 2020 ;
souligne que les prix (de plus en
– a modernisation du système électrique avec le développement
L
plus bas) obtenus sur les marchés
de nouvelles centrales, des réseaux et de solutions de stockage
« Energy only », sur lesquels seule
représenteraient jusqu’à 85 milliards d’euros, parmi lesquels une grande
l’électricité produite est rémupartie des investissements sont programmés indépendamment de la
transition énergétique ;
nérée et non la mise à disposition
de capacités de production, ne
– ’ici à 2020, l’amélioration de l’efficacité énergétique du bâtiment
D
créent pas suffisamment d’incitas’élèverait à 75 milliards d’euros selon la banque fédérale de développement
Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) ;
tions à investir dans de nouvelles
capacités de production (Missing
• n formulant l’hypothèse d’une contribution constante du consommateur
E
Money Problem). La construction
particulier d’électricité, restent + 300 milliards d’euros à trouver à l’horizon
de nouvelles centrales (néces2030, ce qui appelle à la mise en œuvre d’une stratégie de financement
saires surtout en Allemagne du
globale, mobilisant tous les leviers à disposition de la société allemande ;
Sud) et de ce fait, la sécurité
• e projet politique en négociation repose sur le couplage de l’Energiewende
L
d’approvisionnement, seraient
aux marchés financiers, dont la restructuration du secteur bancaire allemand
ainsi remises en question, d’où le
à travers le conditionnement des apports de recapitalisation par l’Etat
débat intense sur la possibilité de
fédéral, un programme d’attractivité des investisseurs privés, y compris
créer un marché de capacité, à
internationaux, la mise en place de garanties d’Etat sur marché obligataire.
l’instar de l’approche française21.
Des représentants du SPD ont également avancé l’option du recours à la
taxation des transactions financières.
Fin 2012 et mi-2013, le gouver• Les besoins de financement sont tels qu’ils forcent en outre à interroger
nement fédéral a adopté deux
la tenabilité du frein à l’endettement public introduit dans la Constitution
nouvelles directives afin de
allemande à partir de 2016. Une relance fiscale est-elle envisageable ? Si
garantir la sécurité d’approvisionoui à quelle échéance ?
nement du pays :
• ’est l’ensemble de ces éléments qu’il conviendra d’apprécier dans le
C
• Une directive sur les effacadre de l’accord en discussion entre CDU et SPD pour former le futur
cements de consommations
gouvernement allemand attendu fin 2013.
(Verordnung zu abschaltbaren
18
19. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Lasten). Les gestionnaires de réseaux sont
amenés à conclure des accords avec des
entreprises électro-intensives afin que cellesci effacent une partie de leur consommation
pour une durée déterminée.
• Une directive mettant en place une procé
dure de constitution d’une réserve de
puissance sur le réseau (Reservekraftwerksverordnung) dans le domaine des énergies
conventionnelles. A la différence du marché
de réserves de puissance prévoyant des
réserves à court terme, ces puissances sont
constituées dans le cadre d’un état des lieux
annuel des réserves existantes ainsi que des
prévisions des besoins en électricité pour les
5 ans à venir. Tous les ans, les gestionnaires
de réseaux et l’Agence fédérale des réseaux
vérifieront la sécurité du système du point
de vue des capacités de production et si
besoin, publieront un appel d’offres sur la
réserve de puissance à créer. Ces dispositions prennent fin au 31 décembre 2017 et
ne constituent qu’une solution de transition
vers un nouveau cadre législatif du marché
de l’électricité.
Une stratégie de financement fondée sur
le projet politique de coupler les marchés
financiers à la transition énergétique
En 2012 et 2013, la question du financement de la transition énergétique allemande
était donc au centre de tous les débats, en
Allemagne et en Europe.
L’accent longtemps mis sur risque polile
tique et réglementaire pour les investisseurs
potentiels ne semble plus justifié au regard de
la résilience de la loi sur les énergies renouvelables (EEG). Après avoir radicalement
changé le marché allemand de l’énergie en
quelques années, les sécurités de la loi EEG
pour les investisseurs se voient reconduites
dans le cadre de la nouvelle mandature, avec
des tarifs d’achat pour les énergies renouvelables à l’identique pour 2014.
S’il est encore trop tôt pour connaître les
conséquences précises de l’accord gouvernementale entre CDU et SPD sur l’Energiewende,
il ressort que les leviers à disposition de l’Allemagne sont multiples jusqu’à l’inflexion de
sa doctrine en matière de recours à la dette
publique.
La stabilisation du secteur bancaire, condition
de levée des fonds privés, est sur l’agenda
Afin de garantir l’accès des investisseurs au
crédit et de réduire le risque de pénurie de
financements privés pour les projets de transition énergétique, la nouvelle mandature
devrait en toute vraisemblance s’atteler à la
stabilisation du secteur bancaire.
Les efforts de stabilisation devraient se
concentrer sur le renforcement de l’assise
financière des banques : une étude sur les
prêts consentis par les banques allemandes,
au cours des dernières décennies, a montré
que les ratios de fonds propres élevés sont
associés à des niveaux élevés de prêts.
L’enjeu est celui de la répartition du risque : à
partir d’une phase de consolidation des capitaux et de restructuration des dettes par une
participation accentuée du système bancaire,
l’Allemagne devrait également s’engager dans
un programme d’attraction des fournisseurs
de capitaux tiers.
Le private equity (PE) pourrait en effet jouer
un rôle accru dans les actifs de long terme
tels que les fermes éoliennes offshore ou la
construction de nouvelles lignes électriques.
Le modèle de financement pourrait être
basé sur la technique du financement par
rachat structuré, où la création de sociétés
de projet permet de consolider la totalité
du capital emprunté auprès d’une diversité
d’institutions financières. La société de projet
est opérée par le financier qui exploite également l’infrastructure. L’objectif consiste à
faire levier sur le volume de financement et
dans le même temps, à limiter et répartir le
risque. La banque fédérale KfW et la Banque
européenne d’investissement sont appelées à
soutenir le démarrage de ces dispositifs.
Vers des emprunts obligataires de garantie ?
La taxation des transactions financières ?
La remise en cause du frein à l’endettement
public ?
Dans le cadre des besoins de financement et
du développement des modèles de financement, une partie du financement de la dette
pourrait être adossée à des emprunts obligataires garantis.
Emises par des emprunteurs privés et garanties par la Banque européenne d’investissement (BEI), ces obligations permettent
généralement de réduire la prime de
risque exigée par les investisseurs privés.
Actuellement, environ 230 millions d’euros du
budget de l’UE ont été mis de côté pour les
obligations de projet dans une phase pilote
qui durera jusqu’à la fin de 2013. Ce montant
devrait en toute vraisemblance être augmenté
de manière significative dans la prochaine
étape.
Enfin, tant que les revenus du marché des
droits d’émissions carbone restent faibles,
des revenus supplémentaires pourraient
être mobilisés afin de ne pas compromettre
les objectifs de déficit du gouvernement.
Plusieurs représentants du SPD ont défendu
la mise en place d’une taxe sur les transac-
19
20. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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tions financières. La Commission européenne
a elle même estimé que le chiffre d’affaires
annuel de la taxe sur les transactions financières (TTF) dans l’UE s’élèverait à 57 milliards
d’euros. Sur la base de ces chiffres, les recettes
de la TTF en Allemagne sont actuellement
estimées à plus de dix milliards d’euros.
Enfin, et même si cela n’est clairement pas à
l’agenda politique de l’Allemagne en 2013, les
besoins de financement de l’Energiewende
sont tels qu’ils forcent en outre à interroger la
tenabilité du frein à l’endettement public introduit dans la Constitution allemande à partir de
2016.
Espagne : déjà 26 milliards d’euros de dette cumulée entre 2005 et 2013
Récapitulatif des coûts entre 2005 et 2011
Le déficit tarifaire du système électrique espagnol résulte en une dette cumulée entre 2005
et 2013 de plus de 26 milliards d’euros.
Le gouvernement estime en outre que le
déficit tarifaire aurait atteint 10 milliards
d’euros en 2013 en l’absence des mesures
d’urgence prises à travers la dite Reforma del
sistemo electrico.
Evolution des coûts du secteur électrique entre 2003 et 2011
Coûts
Augmentation 2003-2011
Dette du secteur électrique
+ 567 %
Financement des renouvelables et du régime spécial
+ 497 %
Distribution
+ 66 %
Transport
+ 91 %
Autres coûts
+ 40 %
Une réforme électrique 2013 trop limitée
combinée à la dégradation des finances
publiques ne permet plus d’envisager
la relance de la transition énergétique
La situation considérée intenable a conduit à
une succession de réformes du secteur électrique jusqu’à juillet 201322 et l’arrêt du soutien
aux énergies renouvelables, mais sans remaniement des règles de fonctionnement du marché
de gros de l’électricité (« Pool espagnol »).
Le cas de l’Espagne illustre un principe fondamental : toute transformation de l’industrie
électrique engendre des coûts qui doivent
être adéquatement financés, sous peine de
compromettre la pérennité du système. Ainsi,
les difficultés financières des opérateurs
électriques espagnols sont-elles directement
imputables au refus politique prolongé de
faire supporter, aux consommateurs finaux, le
coût des mesures de soutien aux EnR23.
Le caractère tardif et limité de la réponse
des pouvoirs publics à travers la Reforma del
Source : ministerio de industria, energia y turismo, 12 de julio 2013, reforma del
sistema electrico – una reforma necesaria
sistemo electrico de 2013 et la dégradation
de la conjoncture économique espagnole
rendent ces réformes partiMessages clés
culièrement lourdes pour
les ménages et le secteur
• e déficit tarifaire du système électrique espagnol
L
privé. Ajoutons à la situation
résultant du fort niveau de soutien public aux énergies
le manque de concurrence
renouvelables (augmentation des coûts de 497 % en 8
entre les opérateurs d’élecans) et du refus de faire financer le développement des
tricité, l’opacité et l’instabiénergies renouvelables par les particuliers espagnols,
lité de la réglementation, la
aboutit à une dette cumulée entre 2005 et 2013 de plus
faiblesse des interconnexions
de 26 milliards d’euros, soit une explosion de 567 % en
électriques avec les pays
8 ans ;
voisins, des barrières élevées
• e caractère tardif et limité de la réponse des pouvoirs
L
à l’entrée sur les segments
publics à travers la Reforma del sistemo electrico de
de marché attractifs et l’on
2013 et la dégradation de la conjoncture économique
peut envisager qu’il n’y aura
espagnole rendent ces réformes particulièrement
pas de relance de la transilourdes pour les ménages et le secteur privé ;
tion énergétique en Espagne
• elon toute vraisemblance, il ne devrait pas y avoir de
S
sans véritable réforme
relance de la transition énergétique en Espagne sans
structurelle du secteur élecvéritable réforme structurelle du secteur électrique et
trique et assainissement des
assainissement des finances publiques.
finances publiques.
20
21. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Royaume-Uni : 200 milliards d’euros d’ici à 2050 dont 130 milliards pour
la restructuration du secteur électrique à l’horizon 2030
K100
Récapitulatif des besoins en investissements
Les besoins en investissements en appui aux
objectifs de décarbonisation du bouquet
énergétique et la promotion de l’efficacité
énergétique, particulièrement auprès des
secteurs intensifs en énergie sont estimés à
170 milliards de livres sterlings (200 milliards
d’euros) par le département énergie et changement climatique (hors Climate Change
Levy) à l’horizon 2050, dont 110 milliards de
livres sterlings (130 milliards d’euros) pour la
restructuration du secteur électrique à l’horizon 2030.
Messages clés
• es besoins d’investissements en appui aux objectifs de
L
décarbonisation du bouquet énergétique et la promotion de
l’efficacité énergétique, particulièrement auprès des secteurs
intensifs en énergie sont estimés à 200 milliards d’euros à
l’horizon 2050, dont 130 milliards d’euros pour la restructuration
du secteur électrique à l’horizon 2030.
• ela correspond à environ 10 % du stock de capital des secteurs
C
de la production d’énergie ainsi que des secteurs intensifs sur le
plan énergétique et 5 % du stock de capital total du RoyaumeUni (3 180 milliards de livres sterlings) ;
• ace aux besoins considérables de financement de la transition
F
énergétique, le Royaume-Uni cherche à définir un optimum
électrique et à mettre en œuvre une trajectoire de transformation
à moindre coût dans lequel la production nucléaire tient un
rôle prédominant, à moins que le lancement de l’exploration du
potentiel de gaz de schiste au Royaume-Uni ne conduise à une
révision de la trajectoire à partir de 2020 et au-delà ;
• haque programme et mesure des politiques publiques de
C
décarbonisation sont également monétisés et évalués en Valeur
Actuelle Nette, dans une logique de minimisation du risque
public, à ce jour estimé à 11 milliards d’euros à l’horizon 2022.
Ramenés aux horizons budgétés du plan
carbone, ces besoins en investissements
correspondent à une valeur nette présente
des politiques publiques engagées de 44
milliards de livres sterlings, – 9 milliards de
livres sterlings hors les hypothèses de valorisation du carbone, réputés sans impact sur
la croissance. La faiblesse du risque engagé
par le Royaume-Uni repose sur le fait que les
investissements du secteur électrique sont
entièrement portés par le secteur privé.
Les politiques en valeurs actuelles nettes
positives correspondent principalement à
des investissements d’efficacité énergétique
pour les secteurs intensifs. Les politiques en
valeurs actuelles nettes négatives correspondent principalement aux investissements
de soutien au développement technologique.
Les deux ensembles de politiques sont
réputés fournir des bénéfices non monétisables comme par exemple la réduction de
l’exposition aux chocs de prix des énergies
primaires24 et à la volatilité macro économique des projets d’efficacité énergétique
et d’énergies renouvelables, ou encore des
gains d’économie d’échelle dans le déploiement des technologies innovantes de décarbonisation et des filières nouvelles relais de
croissance.
Une stratégie de financement d’abord
et avant tout fondée sur la recherche de
l’optimum électrique pour une transition
à moindre coût à partir de 2025-2030
Monétisation des impacts financiers de
la politique publique de décarbonisation
au Royaume-Uni
Face aux besoins considérables de financement de la transition énergétique, le
Royaume-Uni cherche à définir un optimum
électrique et mettre en œuvre une trajectoire
de transformation à moindre coût.
100
120
Cela correspond à environ 10 % du stock
de capital des secteurs de la production
d’énergie ainsi que des secteurs intensifs
sur le plan énergétique et 5 % du stock de
capital total du Royaume-Uni (3 180 milliards
de livres sterlings).
80
45
0
–5
– 75 – 95
– 100
Positive
Negative
NPV policies NPV policies
Net impact
of policies
Un modèle développé par Energy Institute, et
présenté en juin 2013, démontre qu’en terme
de capacité installée, cette trajectoire de
transition à moindre coût s’appuiera jusqu’en
2050 sur des centrales nucléaires principalement, avec des nouveaux cycles combinés
gaz servant de capacités de réserve, tandis
que les éoliennes sont développées après
2030.
Total Monetised impacts
Non-carbon Montised impacts
Source : DECC, Carbon plan, 2011 – Valeurs exprimées en
milliards de livres sterlings
21
22. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Simulation de l’optimum électrique au Royaume-Uni entre 2010 et 2050
Installed capacity GW
250
NPV of coast G£(2010)
150
Produced electricity TWh/year
600
NPV of coast G£(2010)
150
Small CHP (other)
Small CHP (gas)
Large CHP (other)
Large CHP (gas)
Pumped storage
Import
Solar
Tidal
Wave
Biomass
Hydro
Wind (offshore)
Wind (onshore)
Nuclear
Gaz CCS
Coal CCS
Oil
Gas
Coal
NPV of coast
Total cost of 5 years G£(2010)
Cumulative investment 150
500
200
100
100
400
150
300
100
50
50
0
50
200
100
Installed capacity GW
2040
2010 2015 2020 2025 2030 2035 250 2045 2050
0
NPV of coast G£(2010)
Produced electricity TWh/year
0
2035 600 2045 2050
2040
2010 2015 2020 2025 2030 150
0
Source : Nearly perfect and poles apart: investment strategies into the UK power system until500
2050 Paper for the International EnergyWorkshop 2013,
200
19-21 June 2013, Paris Evelina Trutnevyte, Neil Strachan UCL Energy Institute, London, United Kingdom
100
Dans150
cette recherche du modèle de transition
énergétique à moindre coût, le Royaume-Uni
100
se distingue donc pour l’heure d’abord et avant
50
tout par la relance de son programme nucléaire,
50
100
400
financé par des capitaux privés et pour lequel
300
il se donne environ 10 ans pour structurer sa
doctrine en matière d’effets d’échelle 50 de
et
200
déploiement généralisé au-delà de 2025-2030.
100
0
0
0
Evolution des 2015 2020 de référence de2045 2050
2010 et 2020 2025
2010 coûts 2025 2030 2035 2040 l’électricité entre 2010 2015 2030
£(2010, real)/MWh
160
£(2010, real)/MWh
160
150
150
140
140
130
130
120
120
110
110
100
100
90
90
80
80
70
0
2030 2035 2040 2045 2050
70
60
60
2010
2015
O
Offshore
O
Onshore 5 MW
N
Nuclear - EPWR NOAK
2020
2025
2030
O
Offshore R3
N
Nuclear - EPWR FOAK
C
CCGT
2010
2015
C
CCGT CCS FOAK
C
CCGT CCS NOAK
C
CCGT
2020
C
Coal CCS FOAK
C
Coal CCS NOAK
2025
2030
O
Onshore 5 MW
Source : UK energy infrastructure: Investment, transition and long-run growth LSE Growth Commission, 23 May 2012,
Steven Fries, Chief Economist
Dans cette même période, l’autorisation
donnée à l’exploration des gaz de schiste
pourrait contribuer à infléchir tout ou partie
de la trajectoire vu d’aujourd’hui. En l’absence
d’information sécurisée sur les niveaux de
22
réserve et de recul sur une éventuelle commercialisation, aucun modèle public de référence
ne permet toutefois de mesurer l’impact
économique de cette option ouverte par le
Royaume-Uni.
Small CH
Small CH
Large CH
Large CH
Pumped
Import
Solar
Tidal
Wave
Biomass
Hydro
Wind (of
Wind (on
Nuclear
Gaz CCS
Coal CCS
Oil
Gas
Coal
Total cos
Cumulati
23. Transition énergétique : quels investissements pour quelle compétitivité ?
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Conclusion : compétitivité prix ou compétitivité
structurelle ?
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Un manque de recul évident sur les implications des transitions énergétiques
en matière d’emplois
A l’exception d’une étude produite le 4 juin 2012, à l’initiative de la Direction Générale de l’Emploi au sein de la Commission Européenne « The jobs potential of a shift towards a low-carbon
economy », il n’existe pas d’étude économique des implications des transitions énergétiques sur
l’emploi à l’échelle des pays. Chaque pays continue de présenter les bilans annuels de l’emploi
par secteur et filière, sans analyse des transferts/destructions/créations d’emplois induits par les
orientations de leurs politiques de l’énergie.
Dans ce contexte, nous ne pourrons ici que mettre en valeur les principales conclusions formulées dans l’étude précédemment mentionnée à l’occasion d’une analyse statistique des données
d’innovation transmises par 3 235 entreprises allemandes.
Synthèse des enseignements de l’étude statistique des implications de l’innovation
environnementale sur l’emploi en Allemagne
1
La majorité des entreprises innovent dans les produits et les processus environnementaux et non environnementaux en même temps. Les entreprises qui
n’introduisent que des innovations présentant des avantages environnementaux
constituent la plus faible portion de l’échantillon. Les entreprises des secteurs les
plus polluants introduisent rarement des innovations ne présentant aucun bénéfice
environnemental. Lorsqu’elles investissent dans l’innovation, au moins une partie de
leurs budgets est dédiée à l’innovation environnementale.
2
Les entreprises des secteurs les plus polluants introduisent généralement leurs
innovations environnementales en réponse à une exigence réglementaire ou dans
le cadre d’accords sectoriels volontaires, souvent corrélés à des exemptions fiscales.
En revanche, les plus grands porteurs d’innovations environnementales s’appuient
sur une demande tangible, actuelle ou sérieusement prévisible, de la part de leurs
clients.
3
Les secteurs les plus polluants emploient moins de 18 % de l’effectif total de l’échantillon et seulement 15 % des effectifs qualifiés. Les secteurs de la chimie et de l’électricité dépassent largement les autres secteurs émetteurs de carbone en termes de
chiffre d’affaires, d’exportations et de possibilités de formation pour les employés.
4
Les salaires et les possibilités de formation offertes par les entreprises les plus
innovantes sont supérieurs à ceux prévus par les entreprises les moins innovantes.
Cependant, les salaires et les possibilités de formation sont plus faibles en moyenne
pour les innovateurs de l’environnement par rapport aux innovateurs généralistes.
Cela est particulièrement vrai dans les services aux entreprises, l’informatique et la
RD.
5
Globalement, il ressort que l’association générale entre innovations et performances
supérieures du marché du travail est plus faible pour les entreprises qui ne sont
engagées que dans l’innovation environnementale par rapport à l’ensemble des
entreprises innovantes. Toutefois, cette étude ne permet pas d’établir si ce niveau
d’association plus faible est propre aux entreprises spécialisées dans l’innovation
environnementale ou, au contraire, s’il s’agit d’une différence structurelle entre les
entreprises innovantes dans de multiples domaines et les entreprises innovantes
dans un seul domaine.
Source : « The jobs potential of a shift towards a low-carbon economy » - Chapter 1B4 How environmental innovation
is reshaping employment: New evidence from German firm-level data, Direction Générale de l’Emploi au sein de la
Commission Européenne, 4 juin 2012
23
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Mais deux approches commencent à se distinguer : le choix de la compétitivité
prix pour le Royaume-Uni contre la recherche d’un nouveau modèle
de croissance pour l’Allemagne
Au Royaume-Uni, les investissements dans
les infrastructures du secteur de l’énergie, de
l’électricité en particulier au cours des deux
prochaines décennies, tels que définis dans
le UK Infrastructure Plan visent à renforcer la
productivité du pays et à reporter le risque
de la puissance publique vers les investisseurs
privés.
Les politiques visant à améliorer l’efficacité
énergétique et à accélérer le développement
des nouvelles technologies et nouveaux
procédés à faible intensité carbonique
demeurent pour l’heure sans financement
stabilisé et ce indépendamment du haut niveau
de communication produit sur ces enjeux par
le Department of Energy and Climate Change.
A cet égard, l’important document relatif
à la stratégie d’efficacité énergétique25 du
Royaume-Uni publié en novembre 2012 est
bien un document prospectif, non un document de cadrage des mesures politiques
immédiates. Certes, il y est fait mention du
formidable potentiel d’exportation de la filière
d’efficacité énergétique du Royaume-Uni. Le
chiffre d’affaires de celui-ci ne représente
toutefois « que » 2,1 milliards d’euros en 20112012, à comparer aux 13,4 milliards d’euros de
revenus du gouvernement britannique à partir
de son secteur pétro-gazier à la même date26.
Le pilotage de la transition énergétique
britannique s’effectue dans le cadre d’une
doctrine de neutralité sur la croissance et de
recherche d’une compétitivité des prix. Les
critères de soutenabilité et de bénéfices non
monétisables de la transition énergétique ne
sont envisagés que pour orienter les choix
technologiques et maximiser les nouveaux
relais de croissance. L’atteinte des objectifs du 4e budget carbone du Royaume-Uni
reste fortement dépendante de l’atteinte d’un
accord international sur le climat et la relance
du marché carbone européen.
En Allemagne, l’innovation est une condition
intrinsèque de la mise en œuvre effective
de l’Energiewende à long terme. C’est le
cas pour les énergies renouvelables pour
lesquelles l’innovation technologique vise
la réduction des coûts de production.
C’est aussi le cas pour la technologie CSC
(Captage, Séquestration du Carbone). Dans
tous les scénarios prospectifs allemands, la
séquestration de gaz carbonique est mise en
œuvre dès les années 2030. Ceci concerne
les centrales électriques au charbon (houille
ou lignite). Le tableau ci-dessous indique les
puissances concernées par ces installations.
Cartographie des exportations de la filière d’efficacité énergétique britannique
Europe
Amérique
du Nord
Asie
£541m
£937m
£141m
Amérique
du Sud
£84m
Afrique
£26m
Australie
£45m
Source : The Energy Efficiency Strategy: The Energy Efficiency Opportunity in the UK Department of Energy and
Climate Change by the Energy Efficiency Deployment Office (EEDO), November 2012
24
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2008
Total Charbon
Scénario de Référence 2050
53,1 GW (275 TWh)
Scénario 1A 2050
18,8 GW (116TWh)
Pour le scénario 1A, le CSC recouvre en 2050
la quasi-totalité du charbon utilisé pour la
production d’électricité (environ 30 TWh).
Pour le scénario de référence 70 TWh, sur un
total de 116 TWh produits à partir du charbon,
feraient l’objet de la séquestration.
15,8 GW (32 TWh)
11,9 GW (70 TWh)
Charbon avec CSC
11,3 GW (30 TWh)
C’est également le cas pour le secteur des transports qui représente 28 % de l’énergie finale et
20 % des rejets de gaz carbonique. L’approche
pour réduire les rejets et sortir du tout pétrole,
consiste à mettre l’accent sur les biocarburants
et sur un usage accru de l’électricité.
Projection du bilan des carburants dans le secteur des transports selon les deux scénarios
de référence de l’Energiewende
2 550
2 350
30
27
24
21
18
15
12
9
6
3
2 150
1 935
1 580
Biocarburant
Gaz
Electricitié
Diesel
Electricitié
Essence
Hydrogène
Aviation
2008
Scénario
Référence 2030
Scénario
I A 2030
Scénario
Référence 2050
Scénario
I A 2050
Source : Source : Energieszenarien 2011
A court terme, la déstabilisation du marché électrique continental par l’arrivée massive des énergies renouvelables et les impacts sur l’économie énergétique des pays voisins soulèvent la question de l’insertion de la politique énergétique allemande dans le cadre des objectifs de marché
intégré de l’énergie définis par l’Union européenne.
A long terme, l’Allemagne en s’attaquant à tous les segments des chaînes de valeur de l’énergie
s’engage dans la recherche d’un nouveau modèle de croissance économique, fondé sur la
recherche d’une compétitivité structurelle de son offre en énergie et plus largement de l’ensemble
des industries associées, et sur la maîtrise de sa compétitivité prix, par la réduction de la moitié
de sa consommation en énergie primaire.
25