La déperdition scolaire et l’insertion socioprofessionnelle des jeunes aminata bolly
1. SOUS THÈME 2 : LA DÉPERDITION SCOLAIRE ET L’INSERTION
SOCIOPROFESSIONNELLE DES JEUNES: QUELLES RÉALITÉS,
PRIORITÉS ET PERSPECTIVES?
La scolarisation et l'insertion socioprofessionnelle des
jeunes en milieu pastoral/nomade: quelles réalités et
perspectives ?
COLLOQUE INTERNATIONAL ROCARE
Education et formation pour l’intégration, la paix et le développement
socioéconomique en Afrique
Bamako 2, 3 mars 2015
Aminata DIALLO/BOLY
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2. PLAN DE PRESENTATION
I. Brève présentation de l’association Andal &
Pinal
II. La problématique de l’éducation et la
formation en milieu pastorale/nomade
III. La formule éducative « Ecole du Berger et de
la Bergère » (EdB)
Continuum et passerelles de l’EdB
Les résultats et les effets de l’EdB de 2004 à 2012
Les déperditions scolaires, un défi à relever dans
les EdB
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3. L’ASSOCIATION ANDAL & PINAL (A&P)
Andal & Pinal en abrégé A&P est une organisation
socioprofessionnelle d’éleveurs
créée en 1997 à Korsimoro dans la Région du
Centre Nord du Burkina Faso
A&P vient en appui à ses membres,
majoritairement des agros pasteurs et des
pasteurs-transhumants, par le développement de
leurs compétence dans la pratique des activités
d’élevage extensif et intensif
« Andal& Pinal » est la traduction en langue fulfulde
des mots « Connaissance & Eveil » et signifie
"Savoir pour prendre conscience". 3
4. L’ASSOCIATION ANDAL & PINAL (A&P)
Les domaines d’intervention prioritaires:
Education/formation des adolescents/jeunes et des
adultes (Alphabétisation/Formation et Education
Non Formelle) ;
Santé (Causeries-débats sur la santé maternelle et
infantile et le VIH/SIDA pour faciliter la mise en
œuvre de certaines idées d’actions) ;
Développement rural (l’intensification de la
production agricole et végétale et la maximisation
de la rentabilité de l’élevage) ;
Environnement et cadre de vie (Promotion de haie
vive, récupération des terres dégradées).
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5. LA PROBLÉMATIQUE DE L’ÉDUCATION ET LA
FORMATION EN MILIEU PASTORALE/NOMADE
Les populations pastorales/nomades sont souvent
exclues du système éducatif formel à cause de leur
mode de vie caractérisé fortement par la mobilité;
Elles sont à la recherche permanente d’éléments vitaux
pour leurs troupeaux dans un environnement
caractérisé par:
cycle saisonnier de l’eau et de l’herbe très aléatoire,
gestion alternée de l’espace entre agriculteurs, éleveurs
et pêcheurs dans un climat sahélien ou les espaces
agricoles et pastoraux s’amenuisent de plus en plus. 5
6. LA PROBLÉMATIQUE DE L’ÉDUCATION ET LA
FORMATION EN MILIEU PASTORALE/NOMADE
Au Burkina Faso,
Plus de 80% de la population tirent entièrement ou
partiellement ses revenus de l’élevage
L’élevage contribue pour plus de 18% de la
formation du PIB
L’élevage représente près de 26% des recettes
d’exportation,
À peine 18% des éleveurs déclarent savoir lire et
écrire dans une quelconque langue
(Source PNDL 2010)
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7. LA PROBLÉMATIQUE DE L’ÉDUCATION ET LA
FORMATION EN MILIEU PASTORALE/NOMADE
Alors il ne serait pas insensé de poser les
questions suivantes :
que veulent apprendre les communautés
pastorales/nomades ?
De quels types de savoir ont-elles besoin ?
Qui est légitime pour transmettre ces savoirs et
comment les former ?
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8. LA PROBLÉMATIQUE DE L’ÉDUCATION ET LA
FORMATION EN MILIEU PASTORALE/NOMADE
Ces questionnements nous invitent à porter un
regard sur les évolutions récentes des politiques
d’éducation, les transformations du nomadisme et
les demandes d’éducation des populations
pastorales/nomades.
Comme réponses à ces demandes, est née la
formule éducative « Ecole du Berger et de la
Bergère », une alternative éducative pour les
adolescent-e-s du milieu pastoral/nomade.
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9. LA FORMULE ÉDUCATIVE ECOLE DU BERGER
ET DE LA BERGÈRE (EDB)
L’École du Berger et de la Bergère (EdB) est née d’un constat
général de faible fréquentation des structures éducatives par les
enfants d’éleveurs-pasteurs.
Moins de 1% des enfants d’éleveurs, notamment peulhs, étaient
inscrits dans des écoles formelles en 2003 dans la province du
Sanmatenga (source Andal & Pinal, 2003)
Après des concertations avec les leaders d’éleveurs, il ressort
que : «Un enfant que nous mettons dans cette école classique
est perdu d’office par nous ! Qu’il réussisse là-bas ou qu’il reste à
mi-chemin, nous perdons à jamais notre enfant!».
A partir de ce constat A&P a proposé une formule alternative qui
conviendrait à ce milieu spécifique : « École du Berger et de la
Bergère » (EdB), initialement dénommé « Dudal Suudu baba »
(le foyer ardent de la patrie)
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11. QU’EST-CE QUE L’EDB ?
Finalité : L’École du Berger et de la Bergère vise globalement à assurer aux
enfants des éleveurs-pasteurs sédentaires et transhumants un accès équitable à
des programmes adaptés d’éducation ayant pour objectif l’acquisition de
connaissances et de compétences nécessaires dans la vie courante.
Public cible : adolescent-e-s et jeunes de 9 à 15 ans non scolarisés ou très tôt
déscolarisés.
Organisation spatiale : Une salle de 40 m² pour les enseignements-
apprentissages, des latrines , une clôture en haie vive, un réservoir d’eau d’au
moins 5m³, un logement en banco amélioré ou matériaux définitifs pour le
facilitateur ou la facilitatrice, un hangar en matériaux locaux définitif de 20m² au
moins (local polyvalent pour les travaux pratiques de production),un magasin de
18m².
Organisation temporelle : 4 ans ; l’année scolaire se déroule sur six mois
(décembre à mai).
L’approche pédagogique utilisée : enseignements/apprentissages sous-tendus
par la Pédagogie du Texte (PdT), une approche globale, active et participative,
bilingue (fulfulde et français) dont les principes didactiques sont le bilinguisme,
l’interdisciplinarité et l’interculturalité.
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12. QU’EST-CE QUE L’EDB ?
Compétences acquises à l’EdB en termes de
savoir, savoir-faire, savoir-être :
Savoir : Lire, écrire, calculer en langue nationale
fulfulde et en français, s’exprimer oralement et à
l’écrit dans les deux langues dans différents
contextes de communication tout en confrontant les
savoirs locaux à ceux exogènes en vue d’asseoir
des connaissances vraies et complètes ;
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13. QU’EST-CE QUE L’EDB ?
Savoir-faire :
Résoudre des situations problèmes en s’appuyant sur
les connaissances acquises en langue, maths, sciences
sociales et les sciences de la vie et de la terre,
appliquer les techniques d’élevage et d’agriculture,
produire divers genres de textes en langue nationale et
en français, organiser son environnement de vie et de
production pour le rendre agréable et performant.
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14. QU’EST-CE QUE L’EDB ?
Savoir-être :
Respecter les règles d’hygiène, pratiquer les vertus
individuelles et collectives, pratiquer les règles de
civisme,
participer à la lutte contre toutes sortes de pollution
et de dégradation de l’environnement,
être un citoyen exemplaire qui s’intègre aux autres
communautés avec qui les valeurs humaines et
culturelles sont partagées pour une cohésion
sociale intégrale.
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16. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
La formule éducative EdB a été expérimentée dans
six (06) villages de la province du Sanmatenga de
2004 à 2008, puis dans 08 villages de la même
province de 2009 à 2012 pour sa phase de
consolidation.
La phase de passage à l’échelle entamée en 2013
s’est étendue aux zones pastorales des Régions de
l’Est et du Centre Sud avec 12 écoles
fonctionnelles.
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17. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
Ainsi, de 2004 à 2014, l’EdB est à sa 3e cohorte
avec des effectifs de 191 apprenants dont 96 filles
pour la 1e cohorte, 179 dont 98 filles pour la 2e et
244 apprenants dont 107 filles pour la 3e qui est en
cours.
Les résultats engrangés par le processus éducatif
EdB donnent des résultats non négligeables qui ont
contribué à la réduction de la sous-scolarisation en
milieu pastoral au Burkina Faso, notamment dans
les Régions où elle a été expérimentée.
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18. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
L’efficacité externe du processus éducatif de 2004
à 2012 donne les résultants ci-après :
118 apprenants dont 70 filles qui poursuivent leur
scolarité dans le formel entre les classes de CM2 et
la 2nd des lycées et collèges ;
116 dont 64 jeunes filles dans le volet formation
professionnelle et insertion socio-économique.
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19. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
A la fin du cursus scolaire de quatre ans à l’EdB, les choix sont orientés
soit vers la passerelle du formel ou les formations professionnelles. Dans
le second cas, le développement des compétences sont orientés
principalement vers les métiers du domaine pastoral.
Ainsi, des sortants de la 1e et 2e cohortes (2008 et 2012), 33 sorti-e-s
dont 13 filles ont été formé-e-s au métier de productions animale et
végétale ainsi qu’à la fabrication des produits cosmétiques au centre de
formation professionnelle non formelle de Hoggo Sambouel à Dori ouvert
par l’ONG TraDE ; 83 autres dont 51 jeunes filles ont été formé-e-s in
situ (dans leurs villages) à partir de modules FTS (Formations
techniques et spécifiques) pour la conduite d’activités génératrices de
revenus.
Les apprenant-e-s ayant porté le choix vers la formation in situ sont
organisé-e-s en sorte de coopératives nommées cellules AGR. Les
activités génératrices de revenus menées par les bénéficiaires des
cellules AGR sont la collecte et la transformation du lait, la fabrication du
savon à base de beurre de vache, l’embouche des ruminants, l’aviculture
villageoise améliorée, la teinture. 19
20. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
L’implantation des EdB dans les communautés pastorales a apporté
beaucoup de changements dont les plus importants sont :
Chez les apprenants :
L’appropriation de l’écrit en langue fulfulde et en français, leur permettant
de communiquer et de recevoir l’information aussi bien à l’écrit qu’à l’oral
par différents moyens (supports durs, oraux et numériques) ;
La connaissance de l’histoire de leurs villages, du Burkina Faso et des
ensembles sous-régionaux en Afrique ;
L’appropriation de techniques améliorées pour leurs activités pastorales
et agricoles ainsi que pour la protection de l’environnement (sols, cours
d’eau, forêts…);
La connaissance de l’origine des conflits, leurs conséquences et les
démarches pour leur résolution ;
L’intégration de pratiques d’hygiène individuelle et collective dans leurs
habitudes quotidiennes (hygiène corporelle, vestimentaire etc.) ;
La valorisation de la culture de l’apprenant-e, la découverte et
l’acceptation d’autres cultures.
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21. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
Chez les parents et les communautés :
L’intérêt croissant des parents pour l’école et l’avenir des
sortant-e-s de L’EdB ;
L’ouverture d’esprit des parents se traduisant par la
reconnaissance du statut de la fille de manière équitable dans
la scolarisation. Les parents permettent de plus en plus que
les filles achèvent leur scolarisation ; ce qui leur donne autant
de chances de poursuivre leurs études que les garçons. Ainsi,
les filles sont de moins en moins sujettes au mariage précoce
et forcé ;
La pratique de nouvelles techniques en agriculture et en
élevage ;
Une meilleure fréquentation des postes de santé primaire ;
La prise de conscience des communautés par rapport aux
actes de civismes et de citoyenneté pour la prévention et la
réduction des conflits entre agriculteurs et éleveurs.
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22. LES RÉSULTATS ET LES EFFETS DE L’EDB DE
2004 À 2012
Au niveau des structures de l’Etat
Le renforcement de compétences pédagogiques
des agents de l’Etat systématiquement associées
aux sessions de formations pédagogiques (initiale
et continue) sur l’approche PdT,
La reconnaissance de l’expérience éducative EdB
par l’Etat et ses partenaires de l’éducation et la
formation professionnelle ;
L’éligibilité depuis 2011 de l’EdB au Fonds national
pour l’alphabétisation et l’éducation non formelle
(FONAENF) qui a confirmé l’approche éducative
comme adaptée aux communautés pastorales
sédentaires et/ou mobiles. 22
23. LES DÉPERDITIONS SCOLAIRES, UN DÉFI À
RELEVER DANS LES EDB
Malgré le dispositif de mobilisation sociale
dynamique créé autour des EdB, le processus
éducatif n’échappe pas au problème des abadons
et déperditions. Les statistiques de 2004 à 2012
laissent ressortir des déperditions de 136
apprenants enregistrées dont 54 apprenants soit
24 filles pour la 1e cohorte et 82 dont 31 filles
au titre de la 2e.
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24. LES DÉPERDITIONS SCOLAIRES, UN DÉFI À
RELEVER DANS LES EDB
Partant des rapports capitalisant la mise en œuvre
du processus EdB de 2008 à 2012, les causes des
déperditions sont de plusieurs ordres dont les plus
notoires sont:
(i) la mobilité constante des apprenant-e-s avec
leurs familles pour manque de ressources
pastorales (eau et pâturage) pendant les mois
d’avril et de mai ; un état de fait qui affecte
significativement les taux de fréquentation et de
participation aux évaluations annuelles. Comme
cause sous-jacente, le fait pour certains
apprenants d’avoir manqué aux évaluations ne les
motivent plus à revenir en classe ; 24
25. LES DÉPERDITIONS SCOLAIRES, UN DÉFI À
RELEVER DANS LES EDB
(ii) Le développement de sites aurifères dans les
zones d’implantation des EdB a beaucoup affecté
le taux de maintien de la 2e cohorte, qui sur un
effectif de 172 inscrits dont 96 filles en 2009
seulement 88 dont 65 filles ont pu terminer le
cycle de quatre ans, ce qui chiffre les déperditions
de la promotion à 48,84% dont 32,29% chez les
filles.
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26. LES DÉPERDITIONS SCOLAIRES, UN DÉFI À
RELEVER DANS LES EDB
Il faut reconnaitre que depuis 2009, l’éclosion des sites
aurifères est de plus en plus la cause des déperditions
dans les structures d’éducation et de formation dans les
pays du sahel comme le Burkina Faso. C’est une
situation, qui en plus de la problématique de la mobilité,
a contribué fortement à émousser la motivation des
jeunes bergers pour l’école, toute chose qui si elle n’est
pas vite maîtrisée rendra les efforts vains en termes de
prise en charge de l’éducation/formation des
communautés spécifiques comme celle des éleveurs-
pasteurs surtout que c’est au sein de ces communautés
que perdure encore les taux de scolarisation et
d’alphabétisation les plus faibles. 26