1. TABLE DES MATIERES
Introduction 11
PREMIERE PARTIE : GENERALITES
I- BIOLOGIE DU CHEVREUIL 13
A- Systématique et répartition géographique 13
1- Position systématique 13
2- Aire de répartition du Chevreuil européen 13
B- Particularités morphologiques du Chevreuil 13
1- La taille et le poids 13
2- Le pelage 14
3- Les bois 14
C- Habitat et alimentation du Chevreuil 16
1- Habitat 16
2- Comportement alimentaire 16
a- Généralités 16
b- Régime alimentaire du Chevreuil en milieu forestier 17
c- Régime alimentaire du Chevreuil en plaine 18
D- Physiologie de la reproduction 18
E- Comportements territorial et social 20
1- Comportement territorial 20
2- Vie sociale 21
3- Cas particulier des Chevreuils de plaine 22
F- Evolution et situation démographiques du Chevreuil en France 22
II- PRESENTATION DES PRINCIPALES CAUSES DE
MORTALITE DU CHEVREUIL EN FRANCE 24
A- Le réseau SAGIR 24
1- Présentation du réseau SAGIR 24
2- Fonctionnement du réseau SAGIR 24
3- Intérêt de la base de données SAGIR dans notre travail 25
B- Bilan des données SAGIR 27
1- Généralités 27
2- Les traumatismes 27
3- Les maladies bactériennes 29
4- Les maladies virales 31
5- Les maladies parasitaires 31
6- Les mycoses 32
7- Les intoxications 32
8- Autres causes de mortalité 33
Page - 1 -
2. C- Etude de la mortalité anormale du Chevreuil (« EMAC ») en France 34
1- Présentation de l’« EMAC » 34
2- Protocoles de l’« EMAC » 34
3- Résultats des protocoles « EMAC » 36
a- Résultats de l’étude rétrospective portant sur les années 1997 à 1999 36
b- Résultats de l’« EMAC » de 1999 à 2001 37
c- Cas particulier de la réserve de Trois-Fontaines (Marne) 38
DEUXIEME PARTIE :
MORTALITE DU CHEVREUIL EN FRANCE
I- MORTALITE DUE AUX TRAUMATISMES 41
A- La chasse et les blessures suite à une action de chasse 41
B- Les collisions avec un véhicule 42
1- Modalités des enquêtes 43
2- Caractéristiques des collisions entre les véhicules et les grands ongulés
sauvages 43
a- Evolution des collisions et espèces impliquées 43
b- Répartition géographique des collisions 44
c- Répartition des collisions dans le temps 45
c.1- Variations annuelles des collisions 45
c.2- Variations hebdomadaires des collisions 47
c.3- Variations des collisions au cours de la journée 47
3- Importance de la mortalité par collisions sur les populations de
Chevreuils 47
C- Combats intra-spécifiques 47
1- Caractéristiques épidémiologiques des méningo-encéphalites purulentes
liées aux combats intra-spécifiques 48
a- Age et sexe des animaux 48
b- Variations saisonnières de l’incidence des méningo-encéphalites
purulentes chez les brocards 48
2- Caractéristiques étio-pathogéniques des méningo-encéphalites
purulentes des brocards 49
a- Nature des lésions céphaliques traumatiques observées chez les
brocards 49
b- Pénétration et devenir des germes dans l’organisme 49
c- Conséquences des méningo-encéphalites purulentes sur le pronostic
vital de l’animal 50
d- Nature des germes isolés lors de méningo-encéphalites purulentes 50
3- Importance des combats sur la mortalité d’une population de Chevreuils 50
D- La prédation 51
1- Généralités 51
2- Prédation par les chiens errants 51
3- Prédation par les renards 52
4- Prédation par les lynx 54
5- Prédation par les loups 54
6- Prédateurs « occasionnels » 55
Page - 2 -
3. E- Le machinisme agricole 55
F- Traumatismes divers 58
II- MORTALITE DUE AUX MALADIES INFECTIEUSES 59
A- Les maladies bactériennes 59
1- Les principales maladies bactériennes du Chevreuil 59
a- Les affections pulmonaires 59
b- Les entérotoxémies 61
c- Les septicémies 63
d- Les méningites et méningo-encéphalites purulentes 65
d1- Caractéristiques épidémiologiques des méningo-encéphalites
purulentes 65
α- Age et sexe 65
β- Fluctuations saisonnières de l’incidence des méningo-
encéphalites purulentes 65
d2- Etio-pathogénie des méningo-encéphalites purulentes chez le
Chevreuil 66
α- Nature des germes mis en causes dans les méningo-
encéphalites purulentes 66
β- Importance relative de ces germes dans la mortalité des
Chevreuils 66
γ- Etiologie des germes impliqués dans les méningo-encéphalites
purulentes chez le Chevreuil 67
d3- Importance des méningo-encéphalites purulentes sur la mortalité
d’une population de Chevreuils 68
e- Les colibacilloses 69
2- Les autres maladies bactériennes 70
a- La pseudo-tuberculose 70
b- La paratuberculose 71
c- Les pasteurelloses 72
d- La listériose 73
e- Les salmonelloses 75
f- Les staphylococcoses 76
g- La maladie des abcès et abcès divers 78
3- Autres maladies bactériennes 79
a- Le botulisme 79
b- L’actinomycose et l’actinobacillose 80
c- La tuberculose 81
d- La yersiniose 82
e- Le rouget 82
f- Maladies bactériennes diverses 83
g- Bactérioses transmises par les tiques 86
g1- L’ehrlichiose 86
g2- La maladie de Lyme 88
g3- Les bartonelloses 88
B- Les maladies virales 89
1- La rage 89
2- Le BVD (Diarrhée Virale Bovine) 90
3- Autres maladies virales 92
Page - 3 -
4. C- Autres maladies potentielles 92
1- La fièvre aphteuse 92
2- La brucellose 93
3- Le charbon bactéridien 93
4- La maladie du dépérissement chronique des cervidés 94
III- MORTALITE DUE AUX MALADIES PARASITAIRES 95
A- Principaux parasites pathogènes du Chevreuil 96
1- Parasitoses dues aux nématodes 96
a- Caractères généraux des nématodes 96
b- Infestation par les nématodes digestifs 96
b1- Cycle évolutif des strongles digestifs du Chevreuil 96
b2- Principaux strongles gastro-intestinaux rencontrés chez les
Chevreuils 98
b3- Rôle pathogène des strongles gastro-intestinaux 98
α- Strongles de la caillette 98
β- Strongles de l’intestin grêle 104
γ- Strongles du caecum 105
δ- Strongles du colon 106
b4- Incidence du parasitisme gastro-intestinal sur l’état sanitaire et la
condition physique du Chevreuil 106
b5- Tableau clinique des strongyloses gastro-intestinales chez le
Chevreuil 107
c- Infestation par les nématodes pulmonaires 108
c1- Cycle évolutif des strongles pulmonaires 108
c2- Importance des strongyloses respiratoires 109
c3- Tableau clinique et épidémiologie de la « bronchite vermineuse » 110
d- Conclusion sur les parasitoses dues aux nématodes 112
2- Céphénémyiose et hypodermose 112
a- La céphénémyiose du Chevreuil 112
a1- Cycle biologique de Cephenemyia stimulator 113
a2- Symptomatologie de la céphénémyiose 114
a3- Importance de la céphénémyiose chez le Chevreuil en France 114
b- L’hypodermose du Chevreuil 115
b1- Cycle biologique d’Hypoderma diana 115
b2- Symptomatologie de l’hypodermose du Chevreuil 117
b3- Importance de l’hypodermose du Chevreuil en France 117
3- Le polyparasitisme 118
B- Parasitoses pathogènes secondaires du Chevreuil 118
1- Les mycoses 118
a- Les aspergilloses 118
b- Autres mycoses 119
2- Les protozooses 119
a- La coccidiose 119
b- La cryptosporidiose 120
c- Les babésioses 120
d- Autres protozooses 121
3- Parasitoses dues aux Trématodes 122
a- La fasciolose ou parasitose due à la grande douve 122
b- La dicrocoeliose ou parasitose due à la petite douve 124
4- Les cestodoses 125
5- Les parasitoses dues à des parasites externes 126
Page - 4 -
5. a- La démodécie 126
b- La gale 127
c- Les tiques 128
6- La strongyloïdose 129
7- Parasitoses dues aux nématodes de la cavité abdominale et du tissu
conjonctif 129
IV- MORTALITE D’ORIGINES DIVERSES 130
A- Les maladies métaboliques 130
1- L’acidose du rumen 130
2- La toxémie de gestation 132
B- Mortalité naturelle par vieillesse 133
C- Mortalité par épuisement 133
D- Mortalité par dénutrition et malnutrition 134
E- La diarrhée printanière du Chevreuil ou « mal de brout » 135
F- Les intoxications 136
1- Les intoxications d’origine végétale 136
2- Les intoxications par les pesticides agricoles 140
a- Nature des pesticides agricoles responsables d’intoxication
chez le Chevreuil 140
b- Les anticoagulants et les IDC 144
b1- Les anticoagulants 144
b2- Les IDC 146
c- Les autres toxiques responsables de toxicité aiguë chez le
Chevreuil 149
G- Les tumeurs 157
H- Les anomalies des bois : perruques ou têtes mitrées 157
I- Les accidents de gestation 158
V- FACTEURS A L’ORIGINE D’UN BIAIS DANS L’ETUDE ET
CONSEQUENCES SUR LA VALEUR DES RESULTATS
COLLECTES 158
A- Problèmes relatifs au suivi sanitaire des populations de Chevreuils 158
B- Les biais rencontrés aux différents niveaux du réseau SAGIR 160
1- Collecte des échantillons et demandes des analyses 160
2- Analyses des échantillons au LVD 161
3- Interprétation des résultats au niveau national 162
Conclusion 165
Page - 5 -
7. INDEX DES FIGURES
Figure 1 : Chevreuil mâle ou brocard (photo Manfred DANEGGER)
Figure 2 : Calendrier de la pousse des bois du brocard adulte (ANCGG)
Figure 3 : Evolution des bois avec l’âge, de la naissance à 24 mois (ANCGG)
Figure 4 : Chevreuil s’alimentant en milieu forestier (photo Manfred DANEGGER)
Figure 5 : Cycle de reproduction de la femelle du Chevreuil
Figure 6 et 7 : Parade amoureuse entre un mâle et une femelle, suivie de l’accouplement
(photos Stephan MEYER et Manfred DANEGGER)
Figure 8 : Jeune faon de Chevreuil âgé de quelques jours (photo Stephan LEVOYE)
Figure 9 : Les Chevreuils de plaine vivent en groupe de plusieurs individus
Figure 10 : Evolution annuelle du tableau de chasse national du Chevreuil de 1973 à 2001
(ONCFS)
Figure 11 : Fonctionnement du réseau SAGIR (SAGIR)
Figure 12 : Principales causes de mortalité du Chevreuil (données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=8200)
Figure 13 : Nature des traumatismes responsables de mortalité chez le Chevreuil (données
SAGIR de 1986 à 2003) (n=1351)
Figure 14 : Traumatismes mineurs responsables de mortalité chez le Chevreuil (données
SAGIR de 1986 à 2003) (n=35)
Figure 15 : Nature des principales maladies bactériennes diagnostiquées chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003) (n=1350)
Figure 16 : Nature des maladies bactériennes secondaires diagnostiquées chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003) (n=154)
Figure 17 : Nature des principaux parasites du Chevreuil (données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=500)
Figure 18 : Principaux parasites digestifs responsables de mortalité chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003) (n=173)
Figure 19 : Les collisions routières sont un des principaux traumatismes dont sont victimes les
Chevreuils (photo Manfred DANEGGER)
Figure 20 : Nombre de collisions annuelles impliquant le grand gibier de 1984 à 1986 et de
1993 à 1994
Page - 7 -
8. Figure 21 : Comparaison des collisions par type d’axes routiers entre 1984-1986 et 1993-1994
Figure 22 : Evolution de la répartition mensuelle des collisions entre 1984-1986 et 1993-1994
en pourcentage du total annuel
Figure 23 : Nombre de collisions mensuelles en fonction du sexe des Chevreuils en 1993-
1994
Figure 24 : Combat entre deux Chevreuils mâles
Figure 25 : Les faons de Chevreuils, cachés dans un couvert végétal exploité par l’homme,
sont fréquemment victimes des machines agricoles
Figure 26 : Mâchoire de Chevreuil atteint d’actinobacillose (photo D. MAILLARD)
Figure 27 : Schéma général du cycle évolutif des Nématodes gastro-intestinaux chez le
Chevreuil
Figure 28 : Nématodes du tube digestif du Chevreuil (d’après FERTE)
Figure 29 : Nature des helminthes parasites du Chevreuil en fonction de leur localisation dans
l’organisme (d’après FERTE et SAGIR)
Figure 30 : Nématodes du tractus respiratoire du Chevreuil (d’après FERTE)
Figure 31 : Cycle évolutif de Dictyocaulus noerneri
Figure 32 : Cycle évolutif de Varestrongylus capreoli
Figure 33 : Oestres en région naso-pharyngée chez un Chevreuil (photo A WANDELER)
Figure 34 : Chevreuil présentant un parasitisme massif par des varrons (photo G. CACARD)
Figure 35 : Répartition mensuelle des intoxications à l’if chez le Chevreuil de 1986 à 2003
(données SAGIR de 1986 à 2003) (n=8)
Figure 36 : Bilan des intoxications du Chevreuil entre 1992 et 1997 (n=30)
Figure 37 : Bilan des suspicions d’intoxications de Chevreuils entre 1992 et 1997 (n=120)
Figure 38 : Répartition annuelle des intoxications aux anticoagulants du Chevreuil de 1992 à
2003 (données SAGIR de 1986 à 2003) (n=38)
Figure 39 : Répartition mensuelle des intoxications aux IDC du Chevreuil de 1986 à 2003
(données SAGIR de 1986 à 2003)
Figure 40 : Répartition annuelle des intoxications aux IDC du Chevreuil de 1986 à 2003
((données SAGIR de 1986 à 2003) (n=27)
Page - 8 -
9. INDEX DES TABLEAUX
Tableau 1 : Nature des autres bactéries isolées lors de pathologies pulmonaires (données
SAGIR de 1986 à 2003)
Tableau 2 : Nature des bactéries responsables de septicémies chez le Chevreuil (données
SAGIR de 1986 à 2003)
Tableau 3 : Espèces de staphylocoques isolées chez le Chevreuil et syndromes provoquées par
celles-ci (données SAGIR de 1986 à 2003)
Tableau 4 : Espèces bactériennes responsables d’abcès mortels chez le Chevreuil (données
SAGIR de 1986 à 2003)
Tableau 5 : Maladies bactériennes diverses : espèces bactériennes isolées et syndromes
associés (données SAGIR de 1986 à 2003)
Tableau 6 : Principaux végétaux responsables d’intoxication chez les petits ruminants
domestiques en France
Page - 9 -
10. ABREVIATIONS
AFSSA : Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (siège principal du SAGIR à
Nancy)
ANCGG : Association Nationale des Chasseurs de Grand Gibier
BVD : Diarrhée Virale Bovine
DL 50 : Dose Létale 50
DNOC : Dinitro-2,4 orthocrésol
DSV : Direction des Services Vétérinaires
EMAC : Etude de la Mortalité Anormale du Chevreuil
ENV : Ecole Nationale Vétérinaire
ESB : Encéphalopathie Spongiforme Bovine
ESST : Encéphalopathies Spongiformes Subaiguës Transmissibles
FDC : Fédération Départementale des Chasseurs
IDC : Inhibiteurs Des Cholinéstérases
LABOTOX : Laboratoire de Toxicologie de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon
LVD : Laboratoire Vétérinaire Départementale
MAC : Mortalité Anormale du Chevreuil
MDC : Maladie du Dépérissement Chronique (des Cervidés)
ONC : Office Nationale de la Chasse
ONCFS : Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage
SAGIR : Réseau d’épidémiosurveillance et d’épidémiovigilance de la faune sauvage nationale
Page - 10 -
11. INTRODUCTION
Le Chevreuil (Capreolus capreolus) représente aujourd’hui le grand mammifère sauvage
incontournable des campagnes françaises. Il n’a certes pas la noblesse du cerf élaphe ni la
robustesse du sanglier, mais sa grâce, sa finesse et sa vivacité suscitent l’admiration de tous
ceux qui l’observent.
Le Chevreuil constituent également un gibier de choix pour les chasseurs : son intelligence et
sa ruse donnent lieu à des parties de chasse aux issues incertaines, et la tendreté et la finesse
de sa venaison en font un gibier très apprécié pour son goût.
Toutes ces qualités ont engendré ces dernières décennies un regain d’intérêt de l’homme pour
ce petit cervidé et une meilleure gestion des populations de Chevreuil a profondément modifié
leur démographie. Au cours de l’Histoire, l’influence de l’homme l’emporte de beaucoup sur
celle de l’environnement dans la constitution des Chevreuils et la dynamique de leur
population. Depuis son expansion à partir du néolithique (il y a environ cinq mille ans), la
démographie des populations de Chevreuils a fluctué en fonction des autorisations ou des
interdictions de chasse de ce petit cervidé. La révolution française de 1789 octroie au peuple
le droit de chasser le Chevreuil et l’augmentation de la pression cynégétique qui en découle
provoque un effondrement des populations. Il faut attendre la deuxième moitié du vingtième
siècle pour assister au redressement démographique des populations de Chevreuils en France.
La principale mesure ayant permis ce développement est la mise en place des plans de chasse
à partir de 1979. Depuis lors, on assiste à un accroissement spectaculaire des populations de
Chevreuils. Ce petit cervidé s’est répandu sur l’ensemble du territoire métropolitain, allant
jusqu’à coloniser des zones où il était absent. Il est même considéré comme très abondant
dans certaines régions (49).
Cette situation de surpopulation va alors poser un certain nombre de problèmes, avec tout
d’abord de nombreuses interférences antagonistes avec les activités humaines : dégâts aux
cultures ou aux plantations sylvicoles, collisions routières croissantes. Ce fort accroissement
démographique va aussi s’accompagner d’un dépassement des capacités d’accueil de certains
territoires, avec une dégradation du statut physique et sanitaire des animaux. Il en résulte des
animaux plus chétifs et plus exposés à de nombreux dangers : traumatismes divers, sensibilité
accrue vis-à-vis de pathologies infectieuses ou parasitaires… .
Cette abondance démographique s’accompagne d’un accroissement des mortalités de
Chevreuils sur le territoire français, avec parfois des épisodes de mortalité massive dans
certaines zones. De tels épisodes de mortalité importante se sont déjà produits par le passé
avec d’autres espèces gibiers (lapins de garenne décimés par la myxomatose), ce qui a amené
les acteurs du monde cynégétique à s’intéresser de plus près aux pathologies des animaux
sauvages. C’est ainsi qu’en 1986, l’Office National de la Chasse (ONC), crée un réseau
d’épidémiosurveillance et d’épidémiovigilance de la faune sauvage française : Le réseau
SAGIR.
Cet organisme a pour mission de collecter des renseignements sur les maladies ou les
principales causes de mortalité des espèces sauvages en France, avec comme objectif
principal la sauvegarde de ces espèces. L’étude des maladies de la faune sauvage présente
également deux enjeux de taille : d’abord, un enjeu en santé animale, dans la mesure où les
animaux sauvages constituent le réservoir naturel potentiel d’agents pathogènes transmissibles
aux animaux domestiques ; d’autre part, un enjeu en santé publique, puisque certaines
maladies sont des zoonoses graves.
L’expansion géographique et démographique du Chevreuil au cours de ces trente dernières
années en a fait une des principales espèces constituant la base de données SAGIR.
Page - 11 -
12. En plus de l’attrait crée par l’intelligence et la beauté de ce petit cervidé, l’apparition des
épisodes de mortalité massive à la fin des années 1990 nous a interpellé et a fait germer l’idée
de ce travail pour compléter nos connaissances sur les principales causes de mortalité de cette
espèce. Après avoir présenté les particularités biologiques du Chevreuil, nous nous
attacherons à décrire les différentes causes de mortalité de celui-ci en insistant sur les plus
importantes et les plus spécifiques.
Page - 12 -
13. PREMIERE PARTIE : GENERALITES
I- BIOLOGIE DU CHEVREUIL
A- Systématique et répartition géographique
1- Position systématique (41)
Embranchement : Vertébrés
Classe : Mammifères
Super-ordre : Ongulés
Ordre : Artiodactyles
Sous-ordre : Ruminants
Famille : Cervidés
Groupe : Télémétacarpaliens
Sous-famille : Odocoileinae
Genre : Capreolus
Espèce : Capreolus capreolus
Le Chevreuil est présent uniquement sur le continent eurasiatique. Cette espèce se subdivise
en trois sous-espèces dont une seule, Capreolus capreolus capreolus, se rencontre en Europe.
Les deux autres sous-espèces sont cantonnées à certaines régions du continent asiatique.
2- Aire de répartition du Chevreuil européen
Le Chevreuil occupe la presque totalité du continent européen puisqu’il est largement
représenté en Europe de l’est, centrale et occidentale. Il est également bien présent en
Scandinavie (au-delà du cercle polaire arctique) et en Angleterre. Sa présence dans les pays
méditerranéens se limite aux massifs montagneux. L’espèce est absente d’Irlande ainsi que
des îles méditerranéennes (Corse, Sardaigne, Sicile…) (41).
En France, on le rencontre sur l’ensemble du territoire, à l’exception des très hauts massifs
alpins et pyrénéens (au-dessus de 2000 mètres) et de la Corse. Il faut ajouter à cette liste
quelques communes de Normandie, du département du Nord et du pourtour méditerranéen.
Néanmoins, grâce à sa grande adaptabilité, le Chevreuil est en train de coloniser ces dernières
régions (39).
B- Particularités morphologiques du Chevreuil (41)
Les individus sont désignés par des noms différents selon leur âge et leur sexe. Quelque soit
le sexe, le jeune de 0 à 6 mois est appelé faon, puis chevrillard jusqu’à l’âge de 12 mois. Au-
delà, le mâle s’appelle brocard et la femelle chevrette.
1- Taille et poids
Le Chevreuil est le plus petit Cervidé européen : sa hauteur varie de 60 à 80 cm au garrot et sa
longueur totale de 1 à 1.25 m, pour un poids moyen de 20 à 25 kg à l’âge adulte.
A la naissance, le faon pèse entre 1.5 et 2 kg. Sa croissance est ensuite rapide et à l’âge de 6
mois, il a atteint 60% de son poids définitif (14 à 16 kg).
Page - 13 -
14. 2- Le pelage
Sa robe est de couleur grise en hiver et rousse en été. Le passage d’un pelage à l’autre se fait
au moyen de deux mues, l’une en avril-mai et l’autre en octobre.
Le faon possède un pelage caractéristique brun-roux tacheté de blanc et de jaune pendant ses
trois premiers mois. Il est alors dit « en livrée ». Puis ces mouchetures disparaissent
progressivement permettant au jeune d’acquérir sa robe d’adulte.
Figure 1 : Chevreuil mâle ou brocard (photo Manfred DANEGGER (5))
3- Les bois
Les bois constituent la marque essentielle du dimorphisme sexuel. Seuls les mâles portent des
bois.
Il s’agit de productions osseuses caduques qui tombent et repoussent chaque année. Les bois
se développent sur deux apophyses de l’os frontal appelés « pivots ». Ils tombent tous les ans
entre octobre et décembre et repoussent progressivement en 2 à 3 mois. Ils sont alors appelés
« velours » car ils sont protégés par une peau recouverte de poils fins. A la fin de l’hiver, le
brocard va « frayer » ses bois c’est-à-dire les dépouiller du velours et ainsi retrouver des bois
durs (figure 2 et 3).
Page - 14 -
15. M A
F M
J J
D J
N A
O S
1- Novembre: mâles sans bois. — 2- Décembre - janvier: repousse
progressive des bois en velours. — 3- Février - mars: le velours recouvre les
bois pendant leur repousse. — 4- Avril - mai : le velours se dessèche et
tombe par lambeaux sanguinolents. — 5- Juin à septembre: les bois sont
durs et dépouillés. — 6- Octobre - novembre: chute des bois.
Figure 2 : Calendrier de la pousse des bois du brocard adulte (ANCGG (4))
Figure 3 : Evolution des bois avec l’âge, de la naissance à 24 mois (ANCGG (4))
Page - 15 -
16. C- Habitat et alimentation du Chevreuil
1- Habitat (41)
Le Chevreuil est considéré communément comme un animal forestier. Il affectionne tout
particulièrement les forêts de feuillus et riches en couverts bas qui lui fournissent son gîte et
sa nourriture.
Le Chevreuil est plutôt un animal de lisière. Il est attiré par les transitions entre forêts et
cultures, par les bordures entre des peuplements forestiers de structure différente (vieux
taillis-jeune taillis, vieille futaie-jeune futaie au stade fourré), les accotements de chemins ou
de layons.
A la fin des années 70, le Chevreuil s’est mis à coloniser les milieux ouverts. Ce phénomène
est dû d’une part à l’évolution de l’environnement du Chevreuil en liaison avec les activités
humaines (tourisme, développement des réseaux routiers) et d’autre part à l’explosion
démographique des populations de Chevreuils. Cette tendance n’a cessé de progresser depuis
et elle s’accompagne de profondes modifications comportementales des animaux.
Sa plasticité remarquable permet donc au Chevreuil d’occuper tous les types d’habitats :
milieu forestier mais aussi plaine cultivée, landes à genêts et ajoncs garrigue à chênes verts du
pourtour méditerranéen, bocage et même certaines zones humides.
2- Comportement alimentaire
a- Généralités (41) (52)
Le Chevreuil est un animal polygastrique qui se nourrit exclusivement de végétaux. Son
appareil digestif lui permet de dégrader la cellulose et la lignine.
Le Chevreuil présente de nombreuses contraintes nutritionnelles en raison d’un manque de
réserves corporelles, de besoins énergétiques et coûts de reproduction importants qui le
rendent très dépendants d’une alimentation de bonne qualité sur toute l’année. De plus, son
estomac est de faible capacité : 4 à 6 litres environ soit 6% du volume corporel. Son régime
alimentaire varie fortement en fonction des ressources disponibles selon le milieu et la saison.
Toutefois, il consomme sélectivement des aliments à forte valeur nutritive et à digestibilité
élevée (sucres solubles).
Les besoins énergétiques d’un Chevreuil adulte sont de 0.3 UF/jour, ce qui correspond à
l’absorption journalière de trois à quatre kilogrammes de végétaux frais (soit quatre à cinq
cents grammes de matière sèche). Ses besoins en eau sont faibles et l’eau de constitution des
aliments absorbés lui suffit bien souvent. Il a besoin d’un gramme de sel par jour.
Les besoins alimentaires du Chevreuil sont surtout élevés entre la fin du rut et le début de
l’hiver.
L’activité du Chevreuil est constituée d’une dizaine de périodes de gagnage principalement
diurnes et crépusculaires, entrecoupées de périodes de rumination et de sieste. Il passe six à
sept heures par jour à ruminer. Ses gagnages de prédilection sont les clairières, le jeune taillis
et les lisières.
Son régime alimentaire est différent en fonction des différents habitats.
Page - 16 -
17. b- Régime alimentaire du Chevreuil en milieu forestier
En milieu forestier, le régime alimentaire du Chevreuil est essentiellement constitué d’une
part de végétaux ligneux chargés en sève et d’autre part, de végétaux semi-ligneux, dont la
richesse en calcium, phosphore et magnésium agit sur la croissance des faons et la repousse
des bois (52).
Parmi les essences semi-ligneuses, le Chevreuil consomme préférentiellement la ronce, le
lierre puis la callune. En second choix, il peut aussi se nourrir des feuilles de framboisier,
d’églantier, d’aubépine… . Cette consommation arbustivore a lieu toute l’année mais est
accentuée en automne et en hiver. Elle constitue une part importante du régime alimentaire du
Chevreuil (41).
Les aliments ligneux consommés sont des arbres à feuilles caduques ou des arbres à feuilles
persistantes ou encore, des arbustes (type cornouiller) mais en moins grande quantité que les
deux précédents.
Les essences ligneuses à feuilles caduques sont surtout utilisées au printemps et en été. Il
s’agit principalement de feuilles de chêne, de charme, de frêne, d’orme, d’érable… . Le
Chevreuil consomme les résineux plutôt en hiver et au début du printemps lorsque les arbres à
feuilles caduques n’ont plus leurs feuilles. Il affectionne particulièrement le sapin et le pin
maritime, surtout à l’état de jeunes plants. Cette consommation de résineux est accentuée lors
d’enneigement important (41).
Figure 4 : Chevreuil s’alimentant en milieu forestier (photo Manfred DANEGGER (5))
En milieu forestier, les plantes herbacées ne constituent qu’une faible part du régime
alimentaire du Chevreuil. Il en utilise toute l’année en faible quantité, avec toutefois une
augmentation de la consommation au printemps avec des plantes herbacées de type
cotylédones ou graminées.
Page - 17 -
18. Le Chevreuil se nourrit également de divers aliments qu’il trouve en fonction des saisons. Il
consomme des graines (grains de céréales, betteraves pour les animaux vivant au bord des
lisières) et des champignons. Il utilise aussi la fructification forestière (glands et faines
surtout, mais aussi framboises sauvages, mures, gousses de légumineuses, poires…). Le
Chevreuil consomme ces aliments divers en quantité relativement faible l’été, mais en
quantité plus importante l’automne puisqu’ils peuvent représenter jusqu’à 20% du régime
alimentaire (glands, champignons surtout) (41).
c- Régime alimentaire du Chevreuil en plaine
Le Chevreuil n’ayant colonisé ce milieu que depuis quelques années, les connaissances sur
son comportement alimentaire en plaine ne reflètent probablement pas l’entière réalité mais
donnent néanmoins une tendance générale.
En plaine, le Chevreuil se nourrit quasi-exclusivement de plantes herbacées. Elles
représentent 96% du régime alimentaire, avec une majorité de plantes cultivées (85% du
régime alimentaire) (52).
Une étude menée dans le nord de la Picardie en 1995 (52) donne les grandes tendances
alimentaires du Chevreuil en plaine. Le régime alimentaire varie selon les saisons, avec une
consommation de 90% de plantes cultivées en été et 77% en hiver, contre une égalité de
consommation des plantes cultivées et non cultivées en automne.
Les principales plantes cultivées consommées sont le blé et la betterave à raison de 63% du
régime alimentaire en été et 76% en hiver. Les céréales (feuilles et graines de pois, autres
végétaux et engrais verts) sont ingérés en moins grande quantité tout au long de l’année avec
des variations saisonnières liées au cycle végétal.
Les ronces sont les principales plantes non cultivées consommées en automne et en hiver. En
été, le lierre, les graminées non cultivées et les arbres et arbustes sont couramment ingérés.
Enfin, pour les animaux vivant dans les bosquets, des variations du régime alimentaire sont
observées. En effet, les ronces constituent une part plus importante du régime alimentaire
chez ces animaux.
L’examen de contenus ruminaux de Chevreuils (52) vivant en plaine permet de compléter ces
tendances. Il semblerait qu’en hiver et en été, les plantes cultivées soient les plus
consommées, tandis qu’en automne, après la saison de labour, ce soit les plantes non cultivées
qui prédominent dans le régime alimentaire de l’animal.
Le Chevreuil est donc un animal opportuniste c’est-à-dire que son régime alimentaire se
calque sur les ressources dont il dispose.
D- Physiologie de la reproduction (41)
L’activité reproductrice se caractérise par un cycle annuel parfaitement défini.
La maturité sexuelle est atteinte dans les deux sexes dès l’âge de un an.
Le rut s’étend de la mi-juillet à la mi-août, période au cours de laquelle l’activité et
l’agressivité des brocards atteignent leur maximum.
L’oestrus chez la femelle ne dure que deux jours. Elle doit être impérativement fécondée
pendant cette période car elle ne reviendra pas en chaleur avant l’année.
La caractéristique essentielle du cycle reproducteur du Chevreuil intervient à ce stade. Il s’agit
de l’ovoimplantation différée. L’œuf fécondé commence à se développer puis son
développement s’arrête au stade blastocyste. L’œuf reste libre et son implantation et sa
Page - 18 -
19. nidification dans la paroi utérine ne se réalisent que fin décembre-début janvier, l’œuf
reprenant alors un développement classique. La durée totale de la gestation est d’environ 300
jours mais la phase réelle de gestation n’est que de 130 jours, l’œuf étant en diapause
embryonnaire le reste du temps.
M A
F L
M
A
OVO
J C J
IMPLANTATION
T
D A J
T
N O I R
N A U
O S T
Figure 5 : Cycle de reproduction de la femelle du Chevreuil
Les mises-bas s’étalent d’avril à juin avec un pic lors de la deuxième quinzaine de mai. Une
femelle donne naissance de deux à trois faons en moyenne, à l’exception des primipares qui
mettent bas à un faon.
La figure 5 représente le cycle de reproduction d’une femelle Chevreuil.
Les femelles se reproduisent toute leur vie soit une dizaine d’année.
Les faons pèsent entre 1.5 et 2 kg à la naissance. Ils commencent à suivre leur mère dès l’âge
de huit jours et leur protection repose presque exclusivement sur le grand mimétisme que leur
procure leur robe caractéristique (pelage brun-roux tacheté de blanc et de jaune). Ils tètent leur
mère jusqu’à l’automne mais leur régime alimentaire devient principalement végétarien dès
deux mois. Leur croissance est très rapide et à la fin de l’hiver, il est difficile de distinguer les
jeunes de l’année et les adultes.
Page - 19 -
20. Figure 6 et 7 : Parade amoureuse entre un mâle et une femelle, suivie de l’accouplement
(photo du haut : Stephan MEYER, photo du bas : Manfred DANEGGER) (5)
E- Comportement territorial et social
1- Comportement territorial (17) (41)
La notion de territoire se définit par l’attachement d’un individu à une zone géographique plus
ou moins bien délimitée, qui, par des comportements spécifiques ou des signaux, s’oppose à
l’intrusion d’autres individus, en particulier ceux de la même espèce.
Chez le Chevreuil, le comportement territorial est l’apanage des brocards reproducteurs. Cette
attitude présente un caractère saisonnier marqué, puisqu’elle s’observe dès la fraye des bois
au printemps, et évolue progressivement vers un comportement reproducteur s’achevant fin
août après le rut.
La superficie de ces zones protégées varie entre 30 et 70 hectares et elle augmente en période
territoriale (printemps et été).
Les activités automnales et hivernales du brocard sont réduites et ce dernier se cantonne dans
une zone plus ou moins centrale de son territoire. A contrario, le mâle est très actif pendant le
printemps et l’été et explorent la totalité de son domaine.
Le Chevreuil est un animal sédentaire puisqu’un mâle peut conserver le même territoire
plusieurs années de suite.
Page - 20 -
21. Figure 8 : Jeune faon de Chevreuil âgé de quelques jours (photo Stephan LEVOYE (5))
Les femelles ne présentent pas de comportement territorial. Toutefois, elles exploitent souvent
le même domaine qu’un mâle territorial, qui est fréquemment celui avec lequel elles
s’accouplent. Tout comme les mâles, les chevrettes limitent leurs déplacements au cœur du
domaine pendant l’hiver. Elles ont également une mobilité réduite lors de la période entourant
la mise-bas.
La rupture de la relation mère-jeune impose une émigration des jeunes Chevreuils de l’année
précédente. Cette dispersion est surtout marquée pour les jeunes brocards qui entrent dans une
période d’errance plus ou moins longue, dans l’attente de leur établissement sur leur propre
territoire. Les jeunes femelles s’installent rapidement à proximité de leur lieu de naissance,
sur le territoire d’un mâle adulte.
Le comportement territorial du Chevreuil varie selon son statut social et rythme l’organisation
sociale de l’espèce au cours de l’année.
2- Vie sociale (17) (41)
Le noyau de base de l’organisation sociale se compose de la chevrette et de ses faons de
l’année. L’éclatement de la cellule familiale mère-jeune se produit en avril-mai au moment
des nouvelles mises-bas. Cette séparation est le facteur essentiel de dispersion de l’espèce et
de colonisation de nouveaux espaces.
Le mâle adulte est toujours solitaire et attaché à son territoire. Les relations avec ses
congénères se limitent d’une part à la défense de son domaine vital en développant un
comportement agressif vis-à-vis des autres mâles lors de la période de territorialité et de
reproduction, et d’autre part à la saillie des femelles au cours du rut. Néanmoins, des relations
de dominance-subordination permettent à plusieurs mâles de vivre côte-à-côte sur le même
domaine.
Les relations sociales du Chevreuil sont donc complexes et sont le reflet de la grande
adaptabilité de l’espèce face aux contraintes du milieu. Le cas des Chevreuils de plaine
illustre cette grande plasticité.
Page - 21 -
22. 3- Cas particulier des Chevreuils de plaine (17)
La caractéristique du Chevreuil vivant en plaine est la constitution de groupes de tailles
importantes pouvant atteindre plusieurs dizaines d’individus. Cette tendance grégaire a lieu
pendant la période automnale et hivernale. Ce regroupement ne correspond pas à une harde
bien structurée mais il permet au Chevreuil d’utiliser au mieux les disponibilités alimentaires
de la plaine agricole à une période défavorable sur le plan climatique. Ce grégarisme est aussi
un moyen de défense face à d’éventuels prédateurs.
L’utilisation de l’espace est modifiée puisque le domaine vital peut atteindre plusieurs
centaines d’hectares (200 à 300 hectares en moyenne).
Figure 9 : Les Chevreuils de plaine vivent en groupe de plusieurs individus (6)
F- Evolution et situation démographique du Chevreuil en France
(source ONCFS) (43)
Il est impossible de connaître avec précision les effectifs de la population de Chevreuils en
France. Nous ne pouvons faire que des estimations réalisées à partir des données des tableaux
de chasse annuels. Les variations de ces tableaux de chasse d’une année sur l’autre reflètent
l’évolution des effectifs de Chevreuil. Les prélèvements cynégétiques annuels recommandés
pour le Chevreuil sont de l’ordre de 25 à 30% de la population de départ.
En 27 ans, les tableaux de chasse ont fortement augmenté. Ils ont été multiplié par plus de huit
(52 849 Chevreuils tués durant la saison 1973-1974, 445 315 réalisations en 2001-2002). La
population de Chevreuils est donc en pleine expansion et doit probablement dépasser le
million d’individus.
Toutefois, nous observons un tassement dans le développement de la population de
Chevreuils depuis quelques années. Le témoin de ce phénomène est la baisse de la
progression des tableaux de chasse concernant le Chevreuil. Jusqu’à la saison cynégétique
1997-1998, le taux annuel moyen de progression des tableaux de chasse est de 8,5% sur les
vingt-cinq dernières années. Depuis, ce taux ne cesse de diminuer pour atteindre 3,5% en
2001-2002.
Page - 22 -
23. Il existe une disparité dans la progression des plans de chasse selon les départements. Dans
certains départements, la croissance des tableaux reste soutenue. Il s’agit souvent de
départements où les réalisations sont faibles par rapport aux autres départements français. Au
contraire, certains départements dont les populations de Chevreuils sont numériquement
importantes, observent une stagnation de leurs tableaux de chasse voire même une diminution
pour quelques uns. Ce dernier cas est généralement lié au dépassement de l’équilibre entre les
populations de Chevreuils et leurs milieux. Ce déséquilibre engendre des mortalités
infectieuses d’animaux pouvant survenir brutalement et entraîner une chute radicale du niveau
de la population.
L’augmentation régulière et soutenue des populations de Chevreuils s’accompagne donc
d’une progression des mortalités cynégétiques et extra-cynégétiques des animaux.
Figure 10 : Evolution annuelle du tableau de chasse national du Chevreuil de 1973 à 2001
(source ONCFS) (43)
600 000
Attributions
500 000 Réalisations
400 000
300 000
200 000
100 000
0
73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01
74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00
Saisons cynégétiques
Page - 23 -
24. II- PRESENTATION DES PRINCIPALES CAUSES DE
MORTALITE DU CHEVREUIL EN FRANCE
A- Le réseau SAGIR
1- Présentation du réseau SAGIR
Le réseau SAGIR ou Réseau National de Surveillance Sanitaire de la Faune Sauvage est un
système d’épidémiosurveillance et d’épidémiovigilance du statut sanitaire de la faune sauvage
sur l’ensemble du territoire national.
Ce réseau a été crée en 1986 par l’Office National de la Chasse (ONC). Son rôle principal est
de mettre en évidence et d’étudier les principales causes de mortalité de la faune sauvage en
France afin de réduire leur impact et de les éliminer.
Le fonctionnement du réseau SAGIR repose sur la collaboration étroite entre plusieurs
organismes ayant des rôles précis à différents niveaux (figure 11).
Depuis 1989, le réseau SAGIR procède à la saisie informatique de l’ensemble des rapports
d’autopsies en provenance de tous les départements français, ainsi que de toutes les autres
informations concernant les animaux examinés (fiches de renseignements SAGIR, résultats
analyses toxicologiques, parasitologiques…). Depuis sa création, le SAGIR a enregistré plus
de 22000 fiches, toutes espèces confondues, constituant ainsi l’une des banques de données
sur les pathologies de la faune sauvage la plus importante d’Europe. Les Lagomorphes (le
lièvre principalement) et le Chevreuil sont les espèces principales transmises au réseau.
Toutefois, de nombreux autres animaux ont fait l’objet d’études, et, au total, ce sont plus
d’une soixantaine d’espèces de mammifères (80% des fiches) et d’oiseaux (20% des fiches),
gibier ou non, qui ont été concernées par les analyses SAGIR.
2- Fonctionnement du réseau SAGIR
Les différents partenaires du réseau SAGIR sont l’Office National de la Chasse et de la Faune
Sauvage (ONCFS), l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) de
Nancy, le laboratoire de toxicologie de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon (LABOTOX),
les Laboratoires Vétérinaires Départementaux (LVD), les Fédérations Départementales des
Chasseurs (FDC) et parfois la Direction des Services Vétérinaires (DSV).
La figure 11 présente les interrelations entre ces différents organismes.
Au niveau local, c’est la Fédération Départementale des Chasseurs qui est chargée de la
collecte des cadavres et de leur envoi au LVD.
A ce niveau, si l’état de l’animal le permet (animal non putréfié), l’autopsie de l’animal est
réalisée avec d’éventuelles analyses parasitologiques et bactériologiques. Des prélèvements
peuvent également être effectués pour des recherches complémentaires et sont alors envoyés à
des laboratoires spécialisés. Par exemple, si une suspicion d’intoxication est émise, les
prélèvements sont envoyés au laboratoire de toxicologie de l’ENVL.
Page - 24 -
25. Au niveau local, le réseau possède deux correspondants par département : l’un appartient à la
FDC et l’autre est un représentant local de l’ONCFS. Ceux-ci rédigent une fiche de
commémoratifs SAGIR qui essaie de rassembler des données épidémiologiques les plus
précises possibles :
• Date et lieu précis de la découverte de l’animal
• L’espèce animale concernée
• L’âge, le sexe et la condition physique de l’individu
• Animal trouvé mort ou mourrant
• Existence éventuelle d’autres cas semblables à proximité
• Signes extérieurs visibles sur le cadavre
• Densité évaluée de l’espèce aux 100 hectares
• Cause supposée de la mort
• LVD auquel le cadavre a été transmis
Les correspondants locaux envoient ensuite la fiche SAGIR accompagnée des résultats du
LVD au laboratoire centralisateur (AFSSA de Nancy) du réseau SAGIR. Le centralisateur
SAGIR (Marie-Eve TERRIER) réalise alors la saisie informatique de toutes les données qu’il
reçoit (fiches SAGIR, résultats des LVD, du laboratoire de toxicologie de l’ENVL ou d’autres
laboratoires spécialisés).
Le centralisateur effectue une synthèse de ces résultats deux fois par an et dresse un bilan
annuel qu’il transmet à l’organisme coordinateur du réseau, l’ONCFS. Ce dernier va alors
diffuser ce bilan aux différents partenaires du réseau (LVD, FDC, DSV).
Les autres relations secondaires, ainsi les modalités de financement, sont reprises dans la
figure 11.
3- Intérêt de la base de données SAGIR dans notre travail
Les données de la base SAGIR permettent donc de connaître les causes de mortalités des
principales espèces, d’évaluer leur incidence et ses variations dans le temps et l’espace et les
différences de sensibilité en fonction du sexe et de l’âge. Les différentes analyses permettent
également de mettre en évidence les agents pathogènes circulants au sein des populations, y
compris ceux n’étant pas responsables d’une mortalité anormale.
En complément de son rôle de collecte d’informations, le SAGIR est un réseau d’alerte qui
permet non seulement de mettre en évidence des phénomènes pathologiques anormaux, mais
aussi de les signaler à l’ensemble des institutions intéressées par la santé de la faune sauvage
(FDC principalement mais aussi DSV…).
La consultation de la base de données informatiques nous a permis d’obtenir de nombreuses
informations nécessaires à notre étude. Le réseau SAGIR a enregistré depuis sa création un
peu plus de 8000 cas concernant la mortalité du Chevreuil.
Depuis 1997, un accroissement sensible du nombre de cas analysés a été observé. En outre,
certains correspondants locaux ont simultanément signalé un grand nombre de cas de
mortalités impliquant plusieurs cadavres de Chevreuils trouvés dans le même massif à la
même époque. C’est ainsi qu’en 1999 le comité de pilotage du réseau SAGIR a décidé de
réaliser une analyse de ce phénomène nouveau et le protocole EMAC (Etude de la Mortalité
Anormale du Chevreuil) a été mis en place. Nous reviendrons sur ce protocole après avoir
défini les grandes causes de mortalité extra-cynégétique du Chevreuil à partir de la base de
données SAGIR.
Page - 25 -
27. B- Bilan des données SAGIR
1- Généralités
L’analyse des 8200 fiches collectées par le réseau SAGIR sur le Chevreuil de 1986 à 2003
met en évidence de nombreuses causes de mortalité. Nous avons essayé de dégager quelques
grandes entités pathologiques que nous décrirons plus en détails dans des chapitres ultérieurs.
La figure 12 présente la fréquence des principales causes de mortalité du Chevreuil extraites
de la base de données SAGIR, pour la période allant de 1986 à 2003. Dix grandes catégories
d’étiologie se dégagent avec des fréquences très variables.
Si on exclut les catégories « contrôle », « impossible » et « indéterminée », la cause de la mort
a été identifiée avec précision dans 5336 cas soit dans un peu plus de deux tiers des cas. Ce
grand nombre de cas va nous permettre de tracer les grandes tendances dans les causes de
mortalité du Chevreuil.
Principales causes de mortalité du Chevreuil
SAGIR (1986-2003)
(n=8200)
virus bactéries champignons
traumatismes 0,46% 16,46% 0,06%
27,80% contrôle
3,51%
divers
9,12%
toxiques
1,37% impossible
4,96%
parasites
9,79% indéterminée
26,45%
Figure 12 : Principales causes de mortalité du Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=8200)
2- Les traumatismes
Les traumatismes constituent la première cause de mortalité extra-cynégétique des Chevreuils
en France. De 1986 à 2003, le réseau SAGIR a dénombré 2280 Chevreuils morts suite à un
traumatisme soit 27,80% de l’ensemble des Chevreuils répertoriés dans SAGIR.
La nature exacte du traumatisme a été précisée dans 1351 cas (figure 13).
Page - 27 -
28. Ce sont les blessures de chasse qui arrivent en première position parmi les traumatismes. Elles
représentent 49% des cas pour lesquels un diagnostic a pu être établi.
Les collisions routières ne constituent que 17% des traumatismes. On peut penser que ce
genre de traumatisme est largement sous-évalué si l’on se réfère au nombre de collisions
routières avec des Chevreuils rapportées dans les inventaires de 1984 – 1986 (1019
Chevreuils accidentés) et de 1993 – 1994 (2993 Chevreuils tués sur la route) réalisés dans 25
départements français.
Cette sous-estimation peut s’expliquer par le phénomène d’auto-diagnostic. Les personnes
trouvant des Chevreuils morts sur les bords de route attribuent, à juste titre, le décès à une
collision avec un véhicule. Ayant réalisé leur propre diagnostic, ils ne font pas appel au réseau
SAGIR pour déterminer la cause exacte de la mort de l’animal. De même, certains Chevreuils
tués par collision ne sont pas signalés car les automobilistes récupèrent secrètement ces
animaux pour les consommer ou bien les animaux, blessés, vont mourir plus loin et ne sont
pas retrouvés. Dans tous les cas, il s’agit d’animaux qui ne sont pas comptabilisés par le
réseau SAGIR, ce qui entraîne une sous-évaluation du nombre de Chevreuils tués par
collision routière.
Principaux traumatismes responsables de mortalité chez le
Chevreuil
SAGIR 1986 - 2003
(n=1351)
divers
prédation 3%
25%
blessures de chasse
49%
collisions routières
17% combats
6%
Figure 13 : Nature des traumatismes responsables de mortalité chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=1351)
La prédation représente un quart de la mortalité par traumatisme. Elle est principalement due
à des chiens de chasse ou des chiens errants et de façon secondaire à des prédateurs sauvages
(lynx, renards, « loups »?). Sur 341 décès attribués à la prédation, 247 sont imputés avec
certitude aux chiens, 2 aux lynx et pour les 92 restants, la nature du prédateur n’a pas été mise
en évidence.
Les combats intra spécifiques peuvent également se montrer mortels pour les Chevreuils. Ils
représentent 6% des traumatismes diagnostiqués. La mort peut être directement due au
traumatisme (enfoncement de la boîte crânienne, pénétration d’un bois dans le crâne de
Page - 28 -
29. l’adversaire…) mais elle peut être secondaire à une infection des structures encéphaliques
consécutive au traumatisme.
Enfin, les Chevreuils peuvent succomber à des traumatismes plus « anecdotiques ». La figure
14 reprend ces divers traumatismes pouvant causer la mort de Chevreuils.
Traumatismes mineurs responsables de mortalité chez le
Chevreuil.
Nombre de cas répertoriés par SAGIR de 1986 à 2003
(n=35)
machinisme
strangulation agricole
4 4
éventration
2
piège
braconnage 7
3
chute
noyade 4
11
Figure 14 : Traumatismes mineurs responsables de mortalité chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=35)
3- Les maladies bactériennes
Ces affections arrivent en deuxième position dans les causes de mortalité pour lesquelles un
agent a été trouvé. Elles représentent 16,46% de ces mortalités du Chevreuil soit 1350
animaux pour lesquels l’analyse bactériologique a confirmé l’origine de la mort.
Plusieurs grandes entités pathologiques bactériennes se dégagent : les entérotoxémies (28%
des affections bactériennes confirmées), les septicémies (27%), les infections respiratoires
(13%), les infections nerveuses (6%) et les colibacilloses (5%) (figure15).
Certaines entités bactériennes sont peut-être sous-estimées. En effet, plusieurs fiches
attribuent la mort de l’animal à l’atteint d’un organe particulier mais sans qu’aucun agent
pathogène n’ait été identifié. C’est principalement le cas d’atteintes respiratoires (190
animaux) et d’atteintes nerveuses (109 animaux). La mort des animaux est attribuée aux
lésions des organes touchés mais l’absence d’identification d’un agent pathogène ne permet
pas de conclure avec certitude du caractère infectieux de l’étiologie de la mort. Ces animaux
sont alors classés dans la catégorie « origine indéterminée de la cause de la mort ».
Page - 29 -
30. Principales maladies bactériennes diagnostiquées chez le Chevreuil
par le réseau SAGIR (1986 - 2003)
(n=1350)
Autres maladies Divers
bactériennes 6% Entérotoxémie
15% 28%
Colibacillose
5% Infections nerveuses
6%
Infections
Septicémie respiratoires
27%
13%
Figure 15 : Nature des principales maladies bactériennes diagnostiquées chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=1350)
A côté de ces grandes entités, le Chevreuil peut succomber à d’autres maladies bactériennes
dont l’incidence est beaucoup plus faible : de quelques cas à quelques dizaines de cas par an.
Il s’agit de la listériose, de pasteurellose, de la pseudotuberculose, de la paratuberculose, de
staphylococcose, de salmonellose et de la maladie des abcès. La figure 16 donne le
pourcentage de ces pathologies bactériennes secondaires.
Maladies bactériennes secondaires du Chevreuil
Nombre de cas répertoriés par SAGIR de 1986 à 2003
(n=154)
Staphylococcose
Pasteurellose
12%
Paratuberculose 18%
8%
Pseudo-tuberculose Listériose
9% 15%
Salmonellose
Maladie des abcès 10%
et abcès divers
28%
Figure 16 : Nature des maladies bactériennes secondaires diagnostiquées chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=154)
Page - 30 -
31. Dans les affections bactériennes diverses, on trouve des affections telles que des surinfections
(16 cas) ou des infections non spécifiques de tractus, d’appareils ou d’organes particuliers
(infections digestives, cardiaques, génitales, péritonite, hépatite, poly-arthrite…). Dans cette
catégorie, on trouve également quelques affections spécifiques, de pathogénicité plus ou
moins grave, mais qui atteignent rarement le Chevreuil. C’est le cas par exemple du botulisme
(2 cas), de l’actinobacillose (2 cas) ou de l’actinomycose (2 cas), de la tuberculose (3 cas), de
yersiniose (10 cas) autre que la pseudotuberculose, ou encore de toxiinfections à germes
anaérobies (2 cas).
Nous présenterons plus précisément les principales maladies bactériennes dans un chapitre
ultérieur.
4- Les maladies virales
Les virus n’ont été que très rarement identifiés comme agents pathogènes responsables de la
mort de Chevreuils : 0,46% des cas de mortalité identifiée et seulement deux virus trouvés.
Le principal virus mis en cause est le virus de la rage avec 36 cas répertoriés depuis 1986. Ce
virus n’a plus de nos jours qu’une incidence historique puisque le dernier cas de rage de
Chevreuil date de fin 1992.
L’autre virus isolé est le virus du BVD dans seulement deux cas. Ce virus donne lieu à de
nombreuses recherches à l’heure actuelle.
Le Chevreuil peut également être infecté par d’autres virus. Plusieurs études ont révélé des
sérologies positives vis-à-vis de certains virus, mais sans pouvoir déterminer l’impact de
ceux-ci sur l’état sanitaire des Chevreuils (50).
5- Les maladies parasitaires
Le parasitisme est considéré comme la principale cause de la mort pour 9,79% des Chevreuils
(803 animaux). Le type de parasitisme n’est précisé que pour 500 animaux (figure 17).
Le polyparasitisme (35% des animaux pour lesquels le type de parasitisme a pu être établi), le
parasitisme digestif (35%) et le parasitisme pulmonaire (20%) forment les trois principales
atteintes parasitaires du Chevreuil.
Les myiase (6% soit 29 animaux) sont constituées de quatre cas d’hypodermose, de 22 cas
d’oestrose et de trois cas de myiases non identifiées.
Pour les parasites divers, il s’agit surtout de parasites externes (18 cas) dont six cas de
démodécie, huit cas de babésiose, deux cas de gale et deux cas de polyparasitisme externe. Un
cas de teigne, classé parmi les mycoses, peut également être signalé parmi les parasitoses
externes.
Les autres parasites de cette catégorie sont des parasites peu pathogènes pour le Chevreuil ou
bien ne parasitant que très rarement cette espèce. La mort de l’animal a néanmoins été
attribuée à leur présence. Il s’agit d’un cas de sarcosporidiose, d’un cas de trichomonose et
d’un Chevreuil mort de péritonite et infesté par un grand nombre de parasites du genre
Setaria.
Page - 31 -
32. Répartition du tropisme parasitaire chez le Chevreuil
SAGIR (1986 - 2003)
(n=500)
Myiases Divers
6% 4%
Parasitisme digestif
35%
Polyparasitisme
35%
Parasitisme
pulmonaire
20%
Figure 17 : Nature des principaux parasites du Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=500)
Les parasites digestifs entraînant de la mortalité sont principalement représentés par des
nématodes. Les autres groupes de parasites digestifs ne provoquent que peu de cas de
mortalité directe de Chevreuils (figure 18). Cette faible incidence dans la mortalité de certains
parasites peut s’expliquer par la faible pathogénicité du parasite chez le Chevreuil (cestodes,
petite douve, coccidies à faible infestation) ou bien par la rareté du parasite (grande douve,
strongyloïdes, cryptosporidies).
Les parasites pulmonaires sont en majorité des strongles pulmonaires : sur les 100 cas de
parasitisme pulmonaire, dans 44 cas la nature du parasite n’est pas précisée et les 56 cas
restants sont des strongles pulmonaires.
Le Chevreuil est souvent parasité par plusieurs espèces de parasites dans un peu plus d’un
tiers des cas (35%). Il s’agit le plus souvent de polyparasitisme digestif ou bien d’une
infestation mixte avec des strongles digestifs et pulmonaires. Lors de polyparasitisme, on
retrouve parfois les autres groupes de parasites secondaires en plus des strongles.
Nous détaillerons les principales parasitoses dans un chapitre ultérieur.
6- Les mycoses
Les champignons ne sont qu’exceptionnellement mortels pour les Chevreuils. Le réseau
SAGIR ne répertorie que cinq cas de mycose ayant entraîné la mort de Chevreuils. Il s’agit de
quatre infections dues à des champignons du genre Aspergillus et d’un cas de teigne.
7- Les intoxications
Les toxiques ne sont en cause dans la mortalité du Chevreuil que très rarement. Ils
représentent 1,17% des cas de mortalité du Chevreuil dans la base SAGIR.
Les intoxications mortelles sont surtout dues à des pesticides agricoles, plus rarement à des
plantes vénéneuses.
Page - 32 -
33. Principaux parasites digestifs responsables de mortalité chez le Chevreuil
SAGIR (1986 - 2003)
(n=173)
Coccidies Cryptosporidies
10 3
Strongyloïdes Strongles digestifs
4 52
Grande douve
1
Petite Douve
3
Parasites digestifs non Cestodes
identifiés 4
96
Figure 18 : Principaux parasites digestifs responsables de mortalité chez le Chevreuil
(données SAGIR de 1986 à 2003)
(n=173)
8- Autres causes de mortalité
La catégorie « contrôle » comprend des animaux pour la plupart abattus à la chasse. Les
personnes ayant tué ces animaux ont demandé une analyse SAGIR car ils avaient un doute sur
l’état sanitaire de ces Chevreuils. Les analyses réalisées sur ces animaux n’ont pas révélé
d’atteinte de leur état sanitaire. Il s’agit juste de cas de contrôle.
Dans la catégorie « impossible », rentrent des animaux qui n’ont pas donné lieu à une autopsie
ou des analyses correctes, en raison le plus souvent de leur état de dégradation trop avancé.
Les cas « indéterminés » correspondent le plus souvent à l’atteinte d’un appareil ou d’un
organe précis mais sans qu’aucun agent causal n’ait pu être identifié (infections respiratoires,
digestives, rénales, encéphalites, péritonites, polyarthrites… d’étiologie inconnue). Dans cette
catégorie, la mort peut également s’expliquer par un symptôme prépondérant (anémie,
diarrhée, cachexie, paralysie, nécrose pulmonaire…), mais là aussi, sans identification d’un
agent précis (bactérien, parasitaire, traumatique ou autre).
Les cas de mortalité « divers » se composent principalement d’euthanasies (461 animaux sur
702 cas « divers »). Il s’agit d’animaux le plus souvent trouvés mourrant et dont on a abrégé
l’agonie. Aucune pathologie constatée sur ces animaux n’émerge franchement en dehors du
parasitisme.
On trouve également des causes très variées de mort. Celles-ci sont en général rares : acidose
(50 cas), animaux morts de vieillesse (20), corps étranger (2), dystocie (11), animaux morts
d’épuisement (16) ou de faim (9), hémorragie (32), insuffisance cardiaque (5), rénale (3) ou
cardio-respiratoire (9), tumeurs (27), malformations (6), misère physiologique (9), animal
Page - 33 -
34. mitré (1), orphelin (5), rupture d’anévrisme (1), stress (7), torsion de caillette (1), toxémie de
gestation (2), ulcère de caillette (1), occlusions digestives (8).
La base de données SAGIR permet de mettre en avant l’importance des traumatismes dans la
mortalité de Chevreuils en France. Les maladies bactériennes et parasitaires constituent les
deux autres grandes causes de mortalité parmi les étiologies identifiées, même si on peut
penser que ces deux causes de mortalité sont sous-estimées. En effet, l’importance de la
catégorie « indéterminée » peut expliquer cette sous-estimation. On peut penser qu’un certain
nombre de cas classés dans cette catégorie pourrait rentrer dans les causes bactériennes et
parasitaires. La plupart des mortalités dues à l’atteinte d’un appareil ou d’un organe
particulier (atteintes respiratoires, nerveuses, digestives, hémorragies…) auraient sans doute
pu rentrer dans ces causes infectieuses si un agent précis avait été isolé. Comme ce n’est pas
le cas, la cause de toutes ces mortalités restent « indéterminée ».
De même, l’impact du parasitisme (9,79% des causes totales de mortalité) sur l’état sanitaire
du Chevreuil n’est sans doute pas évalué à sa juste valeur. Cette classification ne tient pas
compte du fait que le parasitisme peut affaiblir les animaux et favoriser voire aggraver
d’autres causes de mortalité : animaux plus sensibles aux surinfections bactériennes, animaux
affaiblis plus exposés à la prédation, à la capture par l’homme et à l’euthanasie, aux
traumatismes… .
Nous allons maintenant nous intéresser à l’étude sur la mortalité anormale du Chevreuil pour
préciser certains points sur la mortalité du Chevreuil en France.
C- Etude de la mortalité anormale du Chevreuil (« EMAC ») en
France (2) (3)
1- Présentation de l’«EMAC » (3)
En 1997, plusieurs départements ont déclaré une mortalité massive de Chevreuils suite à la
découverte de plusieurs cadavres ou animaux affaiblis sur une petite surface en peu de temps.
Le phénomène s’est ensuite propagé à d’autres départements les années suivantes.
A partir des premières constatations, l’origine de ce phénomène restait floue. Nul ne savait
s’il résultait d’une régulation naturelle d’effectifs élevés par des mécanismes de densité
dépendance ou bien s’il était apparu une épizootie d’origine infectieuse dont les signes
cliniques ne seraient pas reconnaissables à l’examen anatomo-pathologique classique, mais
qui provoquerait la mort ou favoriserait l’apparition d’un polyparasitisme aggravé.
A partir de 1999, les différents acteurs du réseau SAGIR ont donc décidé de mettre en place
une étude de ce phénomène,appelé protocole « EMAC » (Etude de la Mortalité Anormale du
Chevreuil), avec pour but d’expliquer l’origine de celui-ci afin de pouvoir le juguler par la
suite.
2- Protocole de l’«EMAC» (2) (3)
Tout d’abord, il a été réalisé une analyse rétrospective portant sur les années 1997 à 1999 à
partir des données du réseau SAGIR. Pour cela, les FDC de certains départements touchés par
une mortalité massive de Chevreuils ont fait parvenir à l’«EMAC» l’ensemble des fiches
SAGIR des animaux morts dans un cadre de mortalité massive sur ces années-là. Cet
échantillon a ensuite été comparé à un lot de Chevreuils « témoins », analysés par SAGIR au
cours des mêmes années (1997 à 1999) dans des départements où la « MAC » était absente
Page - 34 -
35. (départements dont le numéro était inférieur d’une unité à ceux des départements d’où
provenaient les Chevreuils « MAC »).
A partir de 1999, un nouveau protocole a été mis en place. Pour la saison 1999-2000, il
consistait en une étude approfondie dans plusieurs départements pilotes (Loir et Cher, Landes,
Seine et Marne et la réserve de Trois-Fontaines dans la Marne). Dans chaque département,
deux types de territoires étaient sélectionnés : des territoires « atteints » où la « MAC »
sévissait et des territoires « témoins », indemnes de mortalité massive. A l’intérieur de
chacune de ces zones, l’étude portait à la fois sur des animaux malades (c’est-à-dire des
animaux apparemment morts de maladie) et des animaux sains (c’est-à-dire des animaux
présumés non malades, et tués à la chasse ou traumatisés de la route). L’autopsie de tous ces
animaux était réalisée, de même que les analyses bactériologiques et parasitologiques.
Certains départements ont même réalisé des analyses virologiques (recherche de BVD) et
toxicologiques. Il était en outre demandé aux responsables départementaux de fournir des
renseignements sur les animaux de l’étude : sexe, âge, poids, condition physique, densité des
populations de Chevreuils… .
Lors de la saison suivante (2000-2001), ce protocole a été reconduit en s’élargissant à d’autres
départements. D’autre part, certains départements, nouvellement touchés par la « MAC », et
qui ne faisaient pas partie du protocole initial ont fait parvenir des résultats d’autopsies.
D’autres départements, où le phénomène de « MAC » a disparu cette saison-là, ont également
fait parvenir des résultats d’autopsies.
L’interprétation des résultats de l’ « EMAC » a été délicate, de nombreux biais étant apparus
en cours d’étude, empêchant une analyse statistique valable.
En premier lieu, le protocole d’étude étant assez lourd, il n’a pas été scrupuleusement respecté
par tous.
Les départements ne sont pas comparables entre eux, les méthodes de collecte des animaux et
d’analyses de laboratoire variant d’une structure à l’autre. Les renseignements concernant les
animaux ne sont pas toujours précis : absence d’indication des poids, de l’âge, certaines
données ne sont que des approximations et non des valeurs objectives (estimation de la
densité aux 100 hectares).
D’une année sur l’autre, le phénomène « MAC » a disparu de certains départements et au
contraire est apparu dans d’autres départements. De même, certaines zones d’étude
initialement indemnes de « MAC » se sont transformées en zones atteintes en cours de
protocole (cas d’une zone du Loir et Cher pour la saison 1999 – 2000).
Il a donc fallu créer plusieurs catégories d’animaux en fonction de leur statut sanitaire
(« malades » ou « sains ») et en fonction de leur zone d’origine (« indemne », « atteinte » ou
« atteinte guérie » pour les zones où la « MAC » a disparu d’une saison à l’autre.
L’ « EMAC » distingue ainsi quatre catégories de Chevreuils : « K » animaux trouvés morts
ou mourrants en zone atteinte, « L » animaux sains abattus en zone atteinte, « T » animaux
témoins provenant de zones indemnes et « G » animaux provenant de zones atteints guéries.
Le faible nombre d’animaux de certaines catégories ne permet pas d’avoir des résultats précis
et représentatif.
Page - 35 -
36. 3- Résultats des protocoles « EMAC »
a. Résultats de l’étude rétrospective portant sur les années 1997 à 1999
(2)
Six départements sont impliquées dans cette étude rétrospective : Allier, Aube, Haute Marne,
Nièvre, Rhône et Yonne.
La comparaison de l’évolution de la mortalité des Chevreuils de 1990 à 1999 montre qu’il n’y
a pas de différence significative entre les départements « EMAC » et les départements « non
EMAC » jusqu’en 1993. A partir de 1994, une augmentation de la mortalité apparaît dans les
départements « EMAC » et s’accentue fortement à partir de 1997. Cette progression dans les
départements « non EMAC » n’a lieu qu’à partir de 1997 et à un degré moindre que dans les
départements « EMAC ».
Puis, les résultats de 88 Chevreuils morts dans un contexte de mortalité anormale dans les six
départements « EMAC » entre 1997 et 1999 sont comparés à ceux de 188 Chevreuils
provenant de départements « non EMAC » sur les deux mêmes années.
La comparaison des grandes causes de mortalité de Chevreuils issus d’un contexte de
mortalité massive et de Chevreuils non victimes de mortalité anormale, ne permet pas de
dégager des différences significatives. On note simplement plus de morts par traumatismes
chez les animaux « témoins » alors que les causes indéterminées sont deux fois plus
importantes chez les animaux morts dans un contexte de « MAC ». Cette constatation
renforce l’hypothèse d’un agent pathogène inconnu.
De même, la comparaison des lésions nécropsiques entre ces deux groupes de Chevreuils ne
fait pas apparaître de grandes différences : on trouve un peu plus de lésions d’origine
parasitaire parmi les Chevreuils « MAC », et un peu moins de lésions d’étiologie infectieuse.
La comparaison des résultats bactériologiques ne permet pas de mettre en évidence un germe
particulier qui pourrait expliquer le phénomène de mortalité massive. En effet, la plupart des
germes retrouvés chez les Chevreuils « MAC » se retrouvent également dans l’échantillon des
Chevreuils témoins.
L’absence de certains agents dans les analyses des Chevreuils « MAC » suggère que ces
germes ne sont pas impliqués dans l’étiologie du phénomène. C’est le cas principalement des
bactéries du genre Listeria, Salmonella et Yersinia, et du virus du BVD.
Cette étude rétrospective permet de confirmer l’apparition d’un phénomène de mortalité
massive de Chevreuils à partir de 1997. Elle ne renseigne pas sur l’étiologie de cette mortalité
anormale.
Toutefois, un certain nombre de points communs ont été dégagés dans les départements
atteints. Le phénomène est d’apparition brutale, de durée variable et n’intervient pas à une
saison précise de l’année. Les Chevreuils sont trouvés faibles et se laissent facilement attraper
ou capturer par les chiens. En outre, ils présentent souvent des troubles oculaires ou une perte
de vision. Toutes les classes d’âge sont touchées.
Le renforcement du protocole « EMAC » à partir de 1999 a pour but de compléter les
connaissances sur ce phénomène.
Page - 36 -
37. b. Résultats de l’ « EMAC » de 1999 à 2001 (3)
Pour la première saison (1999-2000), les résultats proviennent des trois départements pilotes :
le Loir et Cher, les Landes et la Seine et Marne. Viennent également s’ajouter les résultats de
la Réserve de Trois-Fontaines (Marne), où le phénomène de mortalité massive est apparu à
l’automne 1999. Au total, 31 animaux ont été analysés. Avec l’implication d’autres
départements la saison suivante, le nombre de Chevreuils rentrant dans l’ « EMAC » est
beaucoup plus important (99 animaux), même si plusieurs de ces départements n’ont pas suivi
le protocole précis. Cette augmentation du nombre d’animaux permet d’avoir des résultats
plus significatifs.
A partir des observations des correspondants locaux, on peut souligner quelques tendances sur
le phénomène
Il apparaît préférentiellement dans des massifs où la densité est forte par rapport à la capacité
d’accueil du milieu. Dans certains départements, le phénomène s’est accompagné d’une chute
des densités en Chevreuils, pouvant aller jusqu’à une baisse de moitié des densités (cas par
exemple des départements du Rhône et du Territoire de Belfort). Certains départements, au
contraire, n’ont pas vu diminuer la densité de leur population de Chevreuils. Enfin, lorsque les
densités étaient très fortes et ont considérablement chuté, l’état d’embonpoint des animaux
s’est amélioré.
Ces tendances proviennent d’observations sur le terrain et relèvent donc d’une part de
subjectivité.
Sur les deux saisons d’étude, la comparaison des résultats des analyses bactériologiques et des
lésions nécropsiques des différents groupes de Chevreuils ne permet pas d’identifier une
cause de mortalité spécifique des Chevreuils morts dans le cadre d’une mortalité massive.
Des causes de mort très variées ont été trouvées mais sans qu’aucune ne prédomine pour une
catégorie de Chevreuils. Il en va de même pour les lésions et les germes identifiés.
Les analyses bactériologiques ont permis d’isoler des germes très fréquents (Clostridium sp,
Escherichia coli, Staphylococcus sp) mais aussi des germes plus spécifiques : Streptococcus
bovis (réputé pathogène opportuniste), Pasteurella multocida (responsable de pneumonies),
Actinomyces pyogenes (responsable de la maladie des abcès).
Ces analyses mettent en avant l’absence de certains germes : Salmonelles, Listeria sp. De
même, aucun animal n’était atteint de tuberculose et de paratuberculose.
Les analyses virologiques (recherche du virus de la BVD sur six animaux) se sont toutes
révélées négatives, de même que les trois recherches toxicologiques (une pour les
anticoagulants et deux pour les Inhibiteurs Des Cholinéstérases).
L’absence de ces différents agents permet de les exclure dans les causes de mortalité du
phénomène de « MAC ».
Les recherches parasitologiques de la première saison mettent en évidence des niveaux de
charges parasitaires élevés en strongles digestifs.
Par exemple, sur six Chevreuils « K » du Loir et Cher, trois animaux (deux adultes et un jeune
de moins d’un an) présentent des valeurs supérieures à 1500 OPG (Oeufs Par Gramme) pour
les strongles digestifs, niveau qui peut être considéré comme représentatif d’une forte
infestation.
Il s’agit principalement de strongles de la caillette ou de l’intestin grêle appartenant à la
famille des Trichostrongylidae (Ostertagia, Spiculopteragia, Trichostrongylus). Ces parasites
Page - 37 -
38. représentent 80 à 90% des strongles isolés. Les autres nématodes présents (10 à 20%) sont des
Oesophagostomum sp. Compte tenu des valeurs en OPG trouvées et de la faible fécondité des
femelles de Trichostrongylidae, on peut considérer que la charge parasitaire est importante.
Deux jeunes animaux de moins d’un an sont parasités par Monieza sp, parasite considéré
comme assez pathogène chez les jeunes ruminants domestiques.
Enfin, le dernier Chevreuil, une femelle adulte, est faiblement parasité.
D’autres parasites, présents en grand nombre mais considérés comme peu pathogènes, n’ont
probablement pas un impact important sur la santé des Chevreuils. C’est le cas des nématodes
du genre Trichuris. Il en va de même pour les coccidies, hormis peut être pour les jeunes avec
des charges parasitaires supérieures à 10000 oocystes par gramme observées chez deux
individus.
Des observations similaires ont été faites sur la Réserve de Trois Fontaines. Sur les quatre
Chevreuils autopsiés, les charges parasitaires sont élevées (trois animaux ont des valeurs
supérieures à 1400 OPG). De plus, fait nouveau sur ce territoire, il a été isolé des
Haemonchinés du genre Ashworthius, parasite hématophage de la caillette dont la
pathogénicité est considérée comme assez élevée.
Remarque : on peut signaler que cette espèce de strongle digestif a également été
identifiée sur des Chevreuils du Loir et Cher dans le cadre du réseau SAGIR.
Lors de la saison 2000-2001, les analyses parasitologiques ont mis en avant l’impact du
parasitisme sur la santé des Chevreuils, mais sans toutefois démontrer de différences
significatives entre les quatre catégories d’animaux. Les parasites digestifs ont été considérés
comme affaiblissant l’animal dans plus de deux tiers des cas où des parasites digestifs ont été
trouvés. Les parasites pulmonaires ont un effet néfaste encore plus marqué sur la santé de
l’animal puisqu’ils sont considérés comme affaiblissant dans trois quarts des cas où ils ont été
isolés.
c. Cas particulier de la Réserve de Trois Fontaines (Marne) (3)
La Réserve de Trois Fontaines est un enclos de 1360 hectares, géré par l’ONCFS. Depuis
1975, ce site assure d’une part la production de Chevreuils pour le repeuplement et permet
d’autre part la réalisation d’études techniques et scientifiques sur cette espèce.
Un épisode de mortalité massive de Chevreuils s’est déclaré à l’automne 1999, avec la
découverte de dix cadavres de septembre à fin décembre. La densité de la population de
Chevreuils était environs de 18 animaux par 100 hectares. Le milieu forestier de type chênaie
hêtraie constitue une source alimentaire abondante pour les animaux de l’enclos. L’équilibre
entre la faune et la flore est tout à fait satisfaisant à Trois Fontaines.
Dans ce contexte, on ne peut attribuer la mortalité massive à un dépassement de la capacité
d’accueil du milieu, provoquant un déséquilibre entre la faune et la flore.
Les recherches effectuées sur quatre Chevreuils n’ont pas donné de résultats très intéressants :
trois animaux trouvés agonisants ont été euthanasiés et la cause de la mort du quatrième est
une infection à Clostridium perfringens. Aucun autre agent ni aucune lésion spécifique n’ont
été découverts, si ce n’est des charges parasitaires assez élevées.
Compte tenu de la surveillance régulière du territoire depuis de nombreuses années, cet
épisode de mortalité massive de Chevreuils dans la Réserve de Trois Fontaines confirme
l’existence d’un phénomène anormal.
Page - 38 -
39. La capacité d’accueil du milieu n’étant pas dépassée, il faut rechercher l’étiologie de ce
phénomène dans des causes indépendantes des effectifs, et plutôt liée à l’émergence de
pathologies.
Un phénomène de mortalité massive de Chevreuils a été observé dans de nombreux
départements français depuis 1997. Il a d’abord pris de l’ampleur les premières années, de
plus en plus de départements signalant des cas de mortalité massive de Chevreuils. A l’heure
actuelle, un certain nombre de départements ne déclarent plus ce phénomène alors que
d’autres au contraire sont aux prises avec lui depuis peu.
Il semble qu’il n’y ait pas une explication unique de ce phénomène à l’échelle nationale, des
constatations différentes ayant été faites selon les départements (3).
Dans certains départements, la mortalité observée peut tout à fait s’expliquer par les fortes
densités et la régulation naturelle des populations. Lorsqu’un certain seuil de densité de
population est dépassé, l’équilibre entre la population de Chevreuils et son milieu devient plus
instable. Certains agents pathogènes ou composants de l’environnement peuvent alors
affaiblir des individus au point d’augmenter la mortalité de façon perceptible.
Dans d’autres cas, on peut l’expliquer par l’augmentation de la pression de surveillance
provoquée par la découverte et la propagation de ce phénomène. On assiste alors à une
augmentation « anormale » des cas de mortalité par le simple résultat d’une augmentation de
la fréquence de découverte et de déclaration de ceux-ci.
Toutefois, l’apparition du phénomène dans la Réserve de Trois Fontaines, où la capacité
d’accueil du milieu n’a pas été dépassée et où le niveau de surveillance n’a pas été modifié,
laisse penser qu’un autre agent étiologique est impliqué dans certains cas (3).
Les analyses complémentaires réalisées dans le cadre du protocole « EMAC » n’ont rien
démontré de significatif.
A partir des lésions nécropsiques, des recherches bactériologiques et parasitologiques, aucun
agent particulier ne prédomine. De nombreux agents variés et des causes de morts diverses
ont été identifiées mais sans être plus spécifiques de Chevreuils morts dans un contexte de
« MAC » que de Chevreuils morts hors d’un contexte de « MAC ».
Seule une infestation parasitaire plus forte chez les Chevreuils morts dans un cadre de
mortalité massive a été observée lors de la saison 1999-2000. L’impact du parasitisme sur la
santé des Chevreuils a également été noté la saison suivante mais sans distinction entre les
Chevreuils « MAC » et les « non MAC ». Par contre, un certain nombre d’agent ont pu être
éliminé en raison de leur absence dans ces analyses (Listeria, Salmonelles par exemple).
Des études complémentaires, s’inscrivant dans la durée, sont nécessaires pour mieux cerner ce
phénomène.
L‘absence de facteur déterminant unique peut laisser penser à l’intervention de facteurs
favorisants tels que stress, sur densité par rapport à la capacité d’accueil du milieu ou encore
infections intercurrentes immunodépressives. Dans cette dernière catégorie, on peut citer le
parasitisme massif. On peut également évoquer l’ehrlichiose (3).
Cette pathologie, transmise par les tiques, induit un état immunodépressif compatible avec des
causes de mort très variées et une sensibilité accrue aux agents bactériens ou parasitaires
d’ordinaire peu pathogènes. La découverte de nombreux Chevreuil porteurs d’anticorps contre
Ehrlichia bovis en Bretagne conforte cette hypothèse.
Page - 39 -