1. vie d ’ hec / L U X E & C R É AT I O N
DANS LES PAS
DE J.M. WESTON
Gilles Aulibé, responsable de la relation client chez Wes-
ton, a été notre guide dans cette quête de l’excellence
à la française. Weston se définit à travers le sourcing des
matières et les hommes. Ainsi, chez Weston, le savoir-
faire se transmet de génération en génération via le com-
pagnonnageetsonespritformateur.Cetespritsefaçonne
au quotidien, de l’ouvrage en journée au partage des
mets dînatoires. Le sourcing est l’autre pierre angulaire
de cette maison créée par Eugène Blanchard il y a plus
de cent ans. J.M. Weston, c’est aussi l’excellence des
matières premières et le soin porté à leur transformation.
La découverte de la tannerie est un saut dans le temps.
Unique chausseur à posséder sa propre tannerie végétale
de cuir à semelles, la manufacture attend que le temps
fasse son devoir à Saint-Léonard-de-Noblat, au cœur de
la tannerie Bastin. C’est ici que la peau deviendra cuir.
Cette peau, tendue sur un cadre, passera de bain de
tanin en bain de tanin, qui la rendront imputrescible.
La peau suit ici un long parcours d’une année, jalonné
Paris 6h15. Un froid matin d’avril. Gare d’Austerlitz. Tel est le point de départ d’un voyage
unique pour découvrir J.M. Weston, son univers, son histoire et son savoir-faire. Récit.
d’étapesoùlanature,letempsetl’artisanœuvrentconjoin-
tement.
La tannerie se distingue par ses méthodes ancestrales
de tannage végétal, qui confèrent une résistance inéga-
lée au cuir et donnent aux chaussures leur caractère
d’exception. Éloge de la lenteur et du geste rare, la tan-
nerie perpétue un savoir-faire manuel, éloigné de toute
mécanique industrielle. Symbole de cet héritage et du
tempsquipasse,lacheminéedelatannerieestaujourd’hui
monument historique.
Notrevoyagedansletempssepoursuitavecladécouverte
de la manufacture. J.M. Weston n’en possède qu’une
seuleetuniqueàLimogesquiproduitencoreaujourd’hui
toutes les collections cousues sur semelles cuir, dans
le respect du savoir-faire bottier. Une chaussure J.M.
Weston est une histoire d’hommes et de femmes de
métier : plus de 140 collaborateurs assurent la production
dans les ateliers.
Deux mois sont nécessaires à la réalisation d’une paire
de chaussures sur lesquelles 150 étapes sont exécutées
(découpe de la peau, piqûre de la tige, découpe de la
semelle, montage, bichonnage...). Tout est affaire de
détails car tout ce qui ne se voit pas se ressent, tels les
fils de coton, les doublures en veau, les contreforts en
cuir... et ce pour chaque modèle, qui se décline en sept
largeurs pour chaque demi-mesure, en 160 peaux de
différentesfleurs,desplusexotiquesauxplusrépandues,
mais toujours avec ce même souci d’excellence et de
durabilité.
Une part du savoir-faire de J.M. Weston, ainsi que son
nom, est l’héritage immédiat d’Eugène Blanchard, fils
de bottier qui souhaite partir à la découverte d’autres
territoires, d’autres mondes. Eugène Blanchard quitte
alors Limoges pendant trois ans et part s’établir dans la
ville de Weston (États-Unis) pour parfaire son art et
l’enrichir. Il y apprendra une nouvelle manière de façon-
ner des chaussures, notamment la technique du cousu
Goodyear, qui permet de ressemeler durablement les
chaussures, et donnera à la manufacture familiale une
nouvelle ampleur, en la rebaptisant, à son retour en 1902,
J.M. Weston.
Nous sommes saisis par les odeurs et les couleurs “rouille intense” devant les bassins
chargés en tanins végétaux.
Accueil devant la tannerie J.M.Weston
à 20 km de Limoges, devant les bâtiments
historiques dont la cheminée date
de 1860.
84 juin-juillet 2016
2. Lavisiond’EugèneBlanchardvaau-delàdelaseulemanu-
facture.Ilinnovedenouveauen1922enouvrantlapremière
boutique de la maison, rue de Courcelles à Paris, comme
lieu de rencontre et de vente des chaussures sans inter-
médiaire. La seconde boutique suivra dix ans plus tard
surlesChamps-Élysées.Westonadepuisétendusonréseau
et possède 45 boutiques, dont 8 au Japon, deuxième mar-
ché de Weston après la France.
Aujourd’huiencore,J.M.Westonpoursuitl’espritd’Eugène
Blanchard : la préservation des savoir-faire d’exception via
les actions de la Fondation qui valorise le travail manuel
et la création. Les 50 000 formes constituent le patrimoine
de la maison sur lesquelles il est possible de créer trois ou
quatre modèles différents. Le “Moc’ Yves Klein”, l’une
des dernières créations emblématiques de la maison, hom-
mage à ce bleu si profond, porte en elle les valeurs, la
vision et le savoir-faire exceptionnel de Weston.
20 h 16. Paris. Gare d’Austerlitz. Retour à la réalité. Ce
voyage dans l’univers Weston nous a conquis. D’aucuns
ont exprimé le désir d’entrer dans la famille Weston. •
Par Dalila Fraouet (M.12)
Les dessins sont de Marie-Clémence Leveel (M.07)
La manufacture compte 140 personnes, nous allons à la rencontre
des artisans.
Observation méticuleuse des peaux pour soustraire à la coupe
la moindre imperfection.
Perforation des modèles fleuris à la “machine Idéale”.
La tige est maintenue sur la forme en bois avant la pose des semelles.
Le “cousu norvégien” nécessite 1h de travail à la main pour un tour
complet de chaussure.
La tige est composée de différentes pièces et de leur doublure qui
peuvent être assemblées par piqures.
Contrôle qualité : le bichonnage sera la dernière étape,
les chaussures seront baptisées J.M. Weston et toutes les petites
traces de colle nettoyées.
juin-juillet 2016 85