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viter que les différents services travaillent en silo : un
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La méthode
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Pour calculer cet indice, il faut modéliser toutes les activités
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l’utilisent comme arbitre dans les discussions. « Pour chaque
projet envisagé, on regarde si cela améliore l’indicateur PIG.
Si oui, c’est qu’il y a une piste à creuser, si non, le projet est
abandonné, indique Jean-Yves Goblot. De telles décisions
peuvent être prises en moins d’une heure. » Pour cela, on
utilise comme un outil de simulation le modèle réalisé sous
Excel. « Nous créons des scénarios, ce qui permet d’identi-
fier les familles de produits les plus compétitives », raconte
Christian Romero, le responsable de l’unité de production
fibres et câbles optiques. Et, partant de ces scénarios, les diri-
geants peuvent prioriser leurs investissements. « La méthode
PIG nous a permis d’identifier quel type de machines nous
devions acheter et notre programme d’investissement 2014-
2016 a été défini en partie sur la base de ces résultats »,
assure Jean-Yves Goblot.
Bien sûr, comme tout outil d’aide à la décision fondé
sur la simulation, le modèle propose parfois des solutions
irréalistes. Une expertise humaine sera donc toujours
indispensable pour déterminer quelles pistes sont envisa-
geables. Néanmoins, il dégage des tendances générales qui
peuvent se transformer en préconisations. Notamment pour
les commerciaux. « Nous avons entré, dans le modèle, les
familles de produits et les familles de clients et démontré
aux commerciaux que si l’on vend un produit X à un client Y,
la performance globale de l’entreprise se dégrade », illustre
Lucas Zukervar, le directeur associé d’Interaxys, qui a conduit
le projet chez Acome. À terme, Acome déploiera la méthode
PIG dans ses autres divisions. « Sur l’activité automobile,
nous l’utiliserons pour l’aide à la décision, mais aussi pour le
pilotage des plans d’amélioration, prévoit Jean-Yves Goblot.
Les collaborateurs proposent de nombreux projets, mais la
méthode PIG permettra de définir les chantiers prioritaires
à lancer, chantiers qui offriront une réelle contribution à
la performance globale de l’entreprise avec les équipes et
ressources disponibles. » ❚❚
« On regarde, pour chaque projet envisagé,
s’il améliore l’indice PIG. Si oui, c’est
qu’il y a une piste à creuser. Si non, le projet
est abandonné. »
Jean-Yves Goblot,directeurdelastratégie,desprogrammesetdesprojetschezAcome

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