2. 2 Mardi 12 décembre 2017
La mer notre avenir remercie ses parrains
Sommaire
Les gros besoins insatisfaits de la filière nautique......................3
L’aventure des bateaux à la fibre écolo.........................................4
Le premier bateau connecté est ligérien.......................................5
Une pratique de la voile moins physique .....................................6
La poubelle flottante fait son entrée dans les ports....................7
Jacques Rougerie : « Il faut donner un souffle à la mer »..........8
Le bois, un matériau d’avenir........................................................ 10
La pollution des navires fait surface.............................................11
Physiomer débouche les nez du monde entier........................ 12
Le retour des huîtres d’antan......................................................... 13
Les algues n’en finissent pas d’inspirer Olmix...........................14
Le Brexit voile l’horizon de la pêche française.......................... 15
À Tatihou, la bioluminescence éveille à la science.................. 16
Énergies marines renouvelables : relever le gant !
Aux Assises de l’économie de la mer, au Havre, Édouard Philippe
et Nicolas Hulot ont fait souffler un vent de prise de conscience,
presque de révolte, face au retard coupable pris par la France en
matière d’énergie marine renouvelable. Il était plus que temps,
car comme a lâché sèchement Jean-Luc Mélenchon dans les
coursives du Carré des docks havrais, « la France a plus de
3 000 kilomètres de côtes et pas une seule éolienne en mer
branchée sur le courant, c’est lamentable ».
À la tribune, Édouard Philippe n’a pas vraiment dit autre chose,
même si son vocabulaire était plus tempéré : « L’éolien en mer,
c’est surtout du retard qu’il faut chercher à rattraper. Et il va
falloir souquer ferme. »
Le chef du gouvernement a sa méthode, annonçant un travail
de simplification radicale des procédures. Nicolas Hulot, son mi-
nistre de la Transition énergétique, a ainsi promis que c’est dé-
sormais l’État qui organisera le débat public avant de lancer les
appels d’offres. « Cela devrait permettre de réduire la durée de
procédure, afin qu’elle soit de moins de 7 ans contre plus de
10 ans aujourd’hui », espère-t-il.
Les professionnels applaudissent cette mesure de simplifica-
tion administrative, réclamée depuis de longues années pour
surmonter les recours à répétition. Mais, en même temps, échau-
dés, ils réclament un calendrier précis et ambitieux pour enfin
faire décoller la filière.
L’enjeu est de taille pour la France. Les énergies marines re-
nouvelables sont fondamentales pour espérer être une alterna-
tive crédible aux énergies fossiles ou nucléaires. C’est aussi une
filière à soutenir, qui a créé déjà plus de 2 000 emplois.
Les belles paroles de tribune ne suffisent plus. Il faut désormais
des actes pour que les mots ne s’envolent pas au premier coup
de vent ! Et que la France maritime n’en soit plus à ramer derrière
nombre de pays européens.
Jean-Marie BIETTE.
Retrouvez également La mer, notre avenir
en version numérique :
http://apps.ouest-france.fr/esupplements/2017-
La-mer-notre-avenir-10
La mer, notre avenir c’est aussi un site internet :
www.lamernotreavenir.fr
Reuters
3. 3Mardi 12 décembre 2017
Les gros besoins insatisfaits de la filière nautique
Depuis trois mois, les annonces se
succèdent à cadence élevée. Bé-
néteau, Fountaine-Pajot, Privilège
Marine, Amel… Situés dans l’Ouest,
les chantiers embauchent en CDI
et pas qu’un peu ! Les besoins du
groupe Bénéteau pour ses diffé-
rentes filiales (nautisme et habitat)
et sites se montent à 500 postes
à pourvoir ; les grands du catama-
ran habitables (Fountaine-Pajot ou
Privilège) cherchent, à eux deux,
entre 130 et 180 personnes ; Amel,
50… Et de plus petits constructeurs
– à l’image de Marsaudon Composite
à Lorient – sont en déficit de salariés.
En Morbihan toujours, l’Afpa d’Au-
ray a organisé un job dating début
octobre pour le chantier Multiplast,
CDK Keroman ou le fabricant de
mât Lorima. Comme ce dernier, les
équipementiers ont aussi des be-
soins inassouvis tel NVequipement
en Vendée qui cherche une quin-
zaine de piqueuses pour subvenir à
la demande de capotes, protections
et autres biminis. Et ces embauches
concernent l’ensemble des corps de
métiers : opérateurs de production
(moulage, assemblage, mécanique,
électronique…), techniciens qualifiés
(qualité, maintenance, logistique…),
cadres (gestion, achats…).
Troisième année
de croissance
Alors que dans d’autres secteurs, les
fermetures de sites plombent l’acti-
vité, le nautisme recrute à tour de
bras. « Nous en sommes à notre
troisième année de croissance, ex-
plique Mirna Cienewicz, directrice
de la communication corporate du
groupe Bénéteau, et du coup, nous
avons une forte demande en CDI. »
Comme ses concurrents, le leader
français, qui a annoncé début no-
vembre une hausse de 12,06 % de
son chiffre d’affaires 2016-2017 par
rapport à l’exercice précédent, na-
vigue sur des océans de félicité !
Après le choc économique encaissé
en 2009, la reprise entrevue dès
2014, s’est peu à peu concrétisée.
En septembre, lors de sa confé-
rence de rentrée, la Fédération des
industries nautiques annonçait une
croissance à deux chiffres pour les
bateaux de plaisance neufs, voile (au-
tour de 12 %) comme moteur (13 %),
et une stabilisation du marché de
l’occasion. Sur le marché mondial, la
croissance en 2017 serait de l’ordre
de 3 à 5 %, grâce au dynamisme
retrouvé des marchés européens et
nord-américains et le boom en Amé-
rique du Sud. Ajoutez à cela les effets
dévastateurs du cyclone Irma qui a
ravagé des flottes entières aux Ca-
raïbes, et les carnets de commandes
sont pleins.
Mais alors que plus de mille postes
sont à pourvoir au plus vite, les indus-
triels peinent à recruter. Les journées
portes ouvertes comme les initiatives
locales avec Pôle Emploi et les so-
ciétés d’intérim qui se multiplient, ne
suffisent pas forcément. Méconnais-
sance des métiers, déficit d’image
du secteur, salaires jugés trop faibles
comme manque de candidats quali-
fiés expliquent cette réelle difficulté.
S’ils veulent honorer leurs carnets de
commandes, les professionnels du
nautisme se doivent d’augmenter au
plus vite leur attractivité.
Philippe JOUBIN.
NicolasClaris/Bénéteau
Emploi. Grâce à une belle reprise économique, la filière nautique recrute à tour de bras en CDI mais,
paradoxalement, peine à trouver des candidats.
Bénéteau multiplie les formations en interne
De manière à répondre au mieux à
l’adaptation des candidats à leurs
futures tâches liées au nautisme, les
formations internes se multiplient.
Le groupe Bénéteau s’appuie ainsi
sur son centre dédié, établi à Com-
mequiers (Vendée). Ouvert en 2012,
il a permis, sur l’exercice 2016-2017,
de former 2 000 salariés, nouveaux
arrivants comme personnels perma-
nents, voire intérimaires. Certaines
de ces 110 formations, longues d’un
à trois jours, donnant lieu à des certi-
fications de qualifications profession-
nelles.
Elles sont menées par onze for-
mateurs, issus de la production du
groupe Bénéteau, qui les encadrent
à temps plein. Ce centre vendéen est
ainsi appelé actuellement à prendre
en charge les employés récemment
embauchés, en particulier pour des
métiers en tension. Par exemple, les
candidats possédant un CAP polyes-
ter seront formés au moulage spéci-
fique des coques de bateaux à Com-
mequiers.
Les importants besoins en main-
d’œuvre du groupe Bénéteau ne
doivent pas masquer que toute la
filière recherche du personnel qua-
lifié. Et se multiplient ainsi des initia-
tives similaires à d’autres échelles.
Il en va ainsi, par exemple, de Multi-
plast qui compte aujourd’hui 120 sa-
lariés. Ce spécialiste vannetais de la
construction de bateaux de course
se diversifie beaucoup dans les in-
dustries de la défense, de l’aérona-
vale ou du bâtiment, à l’image de la
réalisation récente en composite des
bulbes de la nouvelle cathédrale or-
thodoxe de Paris. Pour satisfaire à
ses besoins de croissance (10 % de
salariés en plus chaque année), cette
filiale du groupe Carboman a monté
son propre Centre de formation com-
posites Multiplast (CFCM) ouvert aux
demandeurs d’emploi comme aux sa-
lariés d’entreprises utilisant des maté-
riaux composites.
Ph. J.
Bénéteau
Le site de formation du groupe Bénéteau de Commequiers, en Vendée.
Le groupe Bénéteau recrute à lui seul 500 personnes dans différents corps de métiers.
4. De nouvelles règles pour le recyclage des bateaux
Le cahier des charges de la Respon-
sabilité élargie du producteur (REP)
pour les déchets issus de bateaux
de plaisance et de sport va entrer en
vigueur le 1er
janvier 2018. Cette nou-
velle filière a été créée par la loi sur
l’économie bleue.
La décision gouvernementale vise
à structurer et surtout améliorer le re-
cyclage et la valorisation des déchets
des dizaines de milliers de bateaux
issus du « baby-boom » du nautisme
des années 60/70, dont beaucoup ar-
rivent désormais en fin de vie.
Désormais, le recyclage et la dé-
construction du bateau seront théo-
riquement prévus et financés dès la
construction du bateau. Jusqu’alors,
c’était au dernier propriétaire de se
charger de la déconstruction, avec
un coût moyen d’environ de 1 200 €
pour les bateaux allant de 4 à 10 m.
Un coût qui rebutait malheureuse-
ment nombre de propriétaires des
« ventouses » ou bateaux poubelle
encombrant les ports, mouillages de
fond de baie ou encore chantiers et
zones de gardiennage de bateaux de
plaisance.
La FIN (Fédération des industries
nautiques) joue un rôle moteur dans
la nécessaire prise de conscience
des plaisanciers pour respecter l’en-
vironnement et éviter les solutions
« inacceptables » que sont l’abandon,
la destruction sauvage ou encore le
naufrage volontaire. « Si vous aimez
la mer, n’en faites pas un cimetière »,
dit la FIN.
Depuis 2009, il existe d’ailleurs un
réseau de sociétés spécialisées dans
la déconstruction et la dépollution
des bateaux de plaisance, gérée par
l’Aper (les informations sont à trouver
sur le site www.fin.fr).
J.-M. B.
4
L’aventure des bateaux à la fibre écolo
ƒ Innovation. Les Français sont en pointe dans la recherche de construction de bateaux en fibres naturelles,
moins polluants et plus facilement recyclables.
Ils sont nombreux, skippers connus
comme Roland Jourdain ou Kito de
Pavant, pour ne citer qu’eux, et plai-
sanciers amateurs, à s’interroger sur
une contradiction : « Pourquoi la na-
vigation à la voile, dont le mode de
déplacement est propre et durable
avec le vent, se réalise-t-elle sur des
bateaux peu écologiques et difficile-
ment recyclables en fin de vie ? »
Sillonnant toutes les mers du monde,
Roland Jourdain en connaît les beau-
tés, mais aussi les fragilités. En créant
sa société Kaïros en 2007, il a sou-
haité, en marge du coaching de teams
de course, développer des projets à
caractère environnemental. C’est ainsi
qu’est né le trimaran Gwalaz, construit
en fibre de lin et en résine partielle-
ment biosourcée.
Mis à l’eau en 2013, le trimaran na-
vigue toujours et se porte à merveille.
Mieux, en lien avec Ifremer, un flotteur
a été sacrifié pour être examiné sous
toutes les coutures. « Les études
ont conclu à un excellent vieillisse-
ment », se réjouit Erwan Grossmann,
responsable du département compo-
sites de Kaïros.
Autre grande figure française de la
fibre narurelle, Corentin de Chatel-
perron s’est fait connaître en 2009 en
construisant au Bangladesh un petit
voilier, le Tara Tari, en remplaçant par-
tiellement la fibre de verre par de la
fibre de jute. Il rejoindra, à son bord, la
France après un périple de six mois.
En 2013, le jeune ingénieur lancera le
Gold of Bengal, un sampan tradition-
nel fabriqué entièrement en fibre végé-
tale de jute, simplement équipé d’un
dessalinisateur manuel, d’une serre
tropicale et… d’un poulailler.
Une Eco transat en projet
Dans l’aventure parfois vraiment folle
des voiliers en fibre naturelle, citons
encore Fipofix, un petit voilier jaune en
fibres volcaniques, à bord duquel l’Au-
trichien Harald Sedlacek a bouclé une
épique transat en solo.
L’histoire moderne des fibres écolo
se poursuit en France, du côté des
rives de l’Occitanie, avec l’associa-
tion Déferlante océane dont l’objec-
tif est de construire des voiliers de 25
pieds (7,60 m). Mais ce coup-ci, ce
seront des monotypes taillés pour la
vitesse, avec au programme une tran-
sat France-Brésil en 2019 et un tour de
l’Europe en 2020. Baptisé Eco Transat,
ce projet a pour ambition d’éprouver la
fiabilité, la résistance ou encore le prix
de revient de ces bateaux éco-conçus.
Le prototype en contreplaqué, le
Sterne 25, vient d’être mis à l’eau. Il ser-
vira de moule pour la construction de
ses petits frères en lin, chanvre, basalte,
jute ou bambou. Gilles Melon, respon-
sable technique du projet, croit d’au-
tant plus à ce projet que la construc-
tion des coques en fibre écolo ne re-
présente, selon lui, « qu’un faible sur-
coût par rapport à la fibre de verre ».
Le problème vient plutôt de la résine,
délicate à réaliser de façon 100 % na-
turelle. « Nous aurons le choix entre
un mélange, ou alors une solution en-
tièrement recyclable, du type de celle
utilisée à bord du voilier Arkema qui a
couru la mini transat », précise-t-il. La
belle histoire de la construction de voi-
liers va sans doute connaître de nou-
veaux chapitres avec l’association The
Bridge. Après avoir fait régater des tri-
marans Ultim face au Queen Mary 2,
un projet de faire naviguer des bateaux
plus « écologiquement propres » est à
l’étude, comme l’a récemment confié
Damien Grimont à Nantes.
Jean-Marie BIETTE.
RonanGladuJennyLaunayPhilippeChérel
Le trimaran Gwalaz est construit en fibre de lin et en résine partiellement biosourcée.
Les bateaux «ventouses» pourraient ainsi progressivement désencombrer les ports.
Le Fipofix, un voilier construit en matériaux recyclables par un navigateur autrichien.
Mardi 12 décembre 2017
5. 5
Le premier bateau connecté est ligérien
« C’est le premier bateau de plai-
sance intégralement connecté,
présente fièrement Ivain Bignon-
net, gérant de Kara. Il est équipé de
130 capteurs permettant au sys-
tème de récolter des informations
qui sont communiquées à l’utilisa-
teur du bateau via un écran, une ta-
blette ou une montre connectée. »
Conditions météorologiques, ni-
veau des réservoirs (eaux usées, car-
burant…), détection de présence… Le
bateau n’a plus de secret. L’utilisateur
peut aussi se connecter aux six ca-
méras installées à bord et avoir une vi-
sion sur l’ensemble de son navire. En
cas d’incident ? « L’intelligence arti-
ficielle gère, assure Ivain Bignonnet.
Le dispositif identifie le problème et
en informe l’utilisateur. Il lui indique
également où aller pour effectuer la
réparation. On peut aussi imaginer
que le bateau propose des idées
de sortie pour occuper la personne
pendant la maintenance. »
Ce système appelé Eva, pour Équi-
pement de voyage automatisé, peut
être installé sur n’importe quel bateau
de plus de 10 mètres. Et, côté tarif,
« il faut compter 10 % du prix du ba-
teau », poursuit le gérant.
Cette idée de navire du futur, Ivain
Bignonnet l’a eue il y a cinq ans,
en même temps que sa table à
bord connectée. « Je voulais créer
quelque chose qui rassemble mes
deux passions : les bateaux et les
objets connectés. J’ai d’abord créé
ma table à bord connectée, moins
coûteuse à réaliser. Je ne pouvais
pas lever 2 millions d’euros, comme
ça, pour mener à bien le projet EVA.
J’ai donc pris le temps. » Pour aider
l’entreprise à financer ce projet, la ré-
gion Pays de la Loire lui a d’ailleurs
attribué une aide de 200 000 €. Et
pour réaliser ce bateau, Ivain Bignon-
net s’est entouré de partenaires ligé-
riens comme le Grand large Yatching
(chantiers Alu Marine à Couëron, en
Loire-Atlantique), de RIIO (basée à
Mûrs-Érigné, dans le Maine-et-Loire)
ou encore de Laser 49 (basée à Écou-
flant, dans le Maine-et-Loire). Après
avoir été dévoilé au WEF à Angers, il
est présenté aux salons nautiques de
Paris et de Düsseldorf. Ce premier ba-
teau connecté sera ensuite mis à l’eau
début d’année 2018… aux Sables-
d’Olonne.
Clémentine MERCIER.
SébastienAubinaud
ƒ Nouveauté. La société Kara Technology, basée à côté d’Angers, a inventé une intelligence artificielle
adaptée aux bateaux de plaisance. Un projet réalisé avec des entreprises de la région.
Ivain Bignonnet, gérant de la société Kara Technology, sur le premier bateau de plaisance équipé d’une intelligence
artificielle.
Mardi 12 décembre 2017
Voiles et voiliers
Le magazine Voiles et Voiliers est
désormais à découvrir sur smart-
phones et tablettes. Grâce à une
appli disponible sur l’Appstore et
Google Play Store, les reportages,
les interviews, les diaporamas, les
essais de bateaux, les spots, les pho-
tos, les animations spécifiques, les
plans, les cartes… prennent une nou-
velle dimension. Et vous donneront
envie de prendre le large !
Pour y accéder, c’est facile : si vous
êtes abonnés au magazine, c’est gra-
tuit ! Il suffit de télécharger l’applica-
tion Voiles et Voiliers sur votre tablette
ou smartphone. Vous pourrez télé-
charger le dernier numéro. Si vous
n’êtes pas abonné à Voiles et Voiliers,
vous pouvez l’acheter au numéro, à
5,49 €. Il suffit de télécharger l’applica-
tion Voiles et Voiliers ; vous payez en
ligne sur l’Appstore ou Google Play
Store et vous pouvez le lire immédia-
tement. Prochainement, ce mode de
lecture sera adapté aussi aux ordina-
teurs via le site voilesetvoiliers.com
Découvrez les visages
du maritime
Ils et elles sont officiers, mécaniciens,
pêcheurs, capitaines, militants, scien-
tifiques, inventeurs, ouvriers, entrepre-
neurs… Embarqués ou à terre, à la
barre d’un navire ou d’une entreprise,
aux avant-postes du progrès indus-
triel ou sentinelles de la dégradation
de l’environnement, les travailleurs
du monde maritime mettent tous leur
énergie au service des hommes et
des océans. Derrière ces visages, des
parcours, des compétences, des per-
sonnalités. le marin a rencontré ces
hommes et ces femmes, de plus en
plus nombreuses dans les filières. Ils
et elles racontent leurs métiers, leurs
itinéraires, partagent leur fierté, leurs
peurs, leurs espoirs dans un hors-sé-
rie exception-
nel et passion-
nant de l’heb-
domadaire du
groupe Ouest-
France.
Disponible en
kiosque et sur
commande
www.marines-
editions.fr
Pourquoi, dans l’histoire des civilisa-
tions, certains peuples ont dominé
des continents tandis que d’autres
disparaissaient dans les limbes ?
Quels points communs ont ceux qui
aujourd’hui encore marquent notre
culture tandis que d’autres, pourtant
très raffinés, ont purement et sim-
plement sombré ? La mer. Le pro-
gramme Océanides, qui a rassemblé
260 chercheurs en histoire, issus du
monde entier pendant cinq ans, cher-
chait à déterminer le rôle de cet élé-
ment, dominant sur Terre, dans l’his-
toire humaine. Et l’Histoire, comme les
histoires, ont ramené, implacables,
l’évidence que les peuples qui ont
su s’emparer du maritime, pour ses
ressources mais aussi et surtout pour
sa formidable puissance de lien, de
transport, de communication, de po-
sitionnement stratégique, ont pris le
pas sur tous les autres, quelles que
soient les époques. C’est par la mer
que se firent les plus grandes migra-
tions humaines, mais aussi la diffu-
sion des idées, des croyances.
Illustrée de reproductions de cartes,
de documents historiques, de ta-
bleaux et de photos, cette passion-
nante fresque est l’objet de la La
grande histoire
vue de la mer,
écrite par Chris-
tian Buchet, di-
recteur scien-
tifique du pro-
gramme Océa-
nides, paru au
Cherche Midi.
Prix : 30 €.
En brefLa mer, nerf de l’histoire
6. 6
Une pratique de la voile moins physique
ƒ Nautisme. Naviguer sur un voilier n’est pas toujours de tout repos, surtout à partir d’un certain âge.
C’est pourquoi constructeurs et équipementiers proposent des solutions pour réduire les efforts physiques.
Pour manœuvrer facilement les voiles,
on connaissait déjà les winches élec-
triques. Solution efficace mais assez
coûteuse. Les voiliers d’une certaine
taille (au-delà de 14 ou 15 mètres)
peuvent en être équipés en standard,
mais il existe aussi des manivelles de
winch électriques, à utiliser sur des
winches manuels.
Les modèles disponibles jusqu’à
présent étaient assez lourds mais un
fabricant français, Chrysadev, pro-
pose depuis peu un modèle assez
convaincant baptisé Ewincher. Dotée
d’une batterie lithium dernière géné-
ration, cette manivelle est assez com-
pacte et légère (seulement 2,2 kg)
pour être utilisée aussi en mode ma-
nuel, comme une manivelle normale.
Un autre fabricant français a lancé
en 2014 un winch manuel intégrant
une véritable boîte de vitesses, ce qui
permet de manœuvrer un cordage
avec un effort moindre. Autre ten-
dance du moment : les spécialistes
de l’accastillage (équipement de
pont) se sont lancés depuis dans le
développement d’enrouleurs dédiés
aux voiles creuses et légères de type
spinnaker. Ces emmagasineurs de
spi sont censés remplacer la bonne
vieille chaussette à spi mais à ce jour,
ils restent plus coûteux et moins pra-
tiques, en dépit des efforts d’optimi-
sation déployés par certains concep-
teurs tels que Stocksails.
Enfin, pour ce qui est des ma-
nœuvres de port, le groupe Béné-
teau (marques Océanis, Sense
ou Sun Odyssey) propose depuis
quelques années une option « Dock
& Go » ou « 360 Docking ». Ce n’est
pas tout à fait la même chose que
l’aide au stationnement qui équipe
aujourd’hui de nombreuses voitures :
il faut encore manœuvrer soi-même,
simplement le moteur principal (à
l’arrière) et le « propulseur d’étrave »
(à l’avant) sont couplés de sorte que
l’on puisse faire pivoter le bateau sur
lui-même à l’aide d’un simple joys-
tick. Plutôt efficace.
S. M.
VoilesetVoiliers/SébastienMainguet
Cette manivelle électrique Ewincher, dotée d’une batterie lithium, est légère et
s’adapte très facilement sur tous les winches manuels.
C’est une idée qui semble s’impo-
ser : depuis quelques années, l’âge
moyen des pratiquants de la voile
habitable aurait tendance à s’élever.
Interrogé à ce sujet, Guillaume Ar-
nauld des Lions, délégué général ad-
joint de la Fédération des industries
nautiques (FIN), affirme cependant
ne pas disposer de données statis-
tiques sur le sujet. Une chose est
sûre : les fabricants d’équipement
nautique, ainsi que les chantiers na-
vals de plaisance, rivalisent d’inventi-
vité pour trouver le moyen de faciliter
la pratique. Avec l’intention, en par-
ticulier, de mieux séduire un public
relativement âgé.
Car sur un petit voilier habitable,
même dans des conditions météo
clémentes, il y a de vrais efforts phy-
siques à fournir, et aussi – cela n’a
pas moins d’importance – la néces-
sité de se déplacer à bord de ma-
nière sûre en dépit des mouvements
du bateau. La réflexion des construc-
teurs, et celle des fabricants d’équi-
pements, porte ainsi dans ces deux
directions : il faut pouvoir tout faire
(ou presque) depuis l’arrière du ba-
teau, et cela ne doit pas réclamer
une trop grande dépense d’énergie.
Quand on parle de « tout faire », il
s’agit essentiellement d’envoyer les
voiles, de les ramener sur le pont,
d’en réduire la surface mais aussi
de virer ou d’empanner sans oublier
bien sûr les délicates manœuvres de
port.
Réduction de voilure
et manœuvres de port
Les deux problèmes les plus ardus
sont d’une part la réduction de voi-
lure, qui intervient par définition
quand le vent est plus fort, d’autre
part les manœuvres de port, qui gé-
nèrent elles aussi un grand stress en
raison du risque d’endommager les
bateaux… Mais aussi à cause de la
présence éventuelle de spectateurs,
autres plaisanciers ou simples ba-
dauds, auxquels on prête volontiers
un esprit moqueur.
Pour ce qui est d’envoyer les voiles,
de les affaler et de les réduire, la so-
lution souvent retenue consiste à en-
rouler, que ce soit par le côté avant
de la voile (« guindant ») ou par le
côté du bas (« bordure »). Pour les
« spinnakers » (ou « spis »), ces voiles
très creuses (en forme de bulle) tail-
lées dans un tissu Nylon très léger,
la solution traditionnelle – imaginée
à l’origine par Éric Tabarly – prend
la forme d’une grande chaussette
dite « chaussette à spi », dans la-
quelle le spi est enfermé, et que l’on
peut retrousser jusqu’en haut de la
voile (pour déployer celle-ci) ou au
contraire descendre jusqu’en bas
afin d’étouffer la voile. Pour les ma-
nœuvres de port, de nombreux voi-
liers sont équipés d’une sorte de
moteur auxiliaire installé à l’avant
du bateau (on parle de « propulseur
d’étrave »).
Sébastien MAINGUET.
Mardi 12 décembre 2017
Le nouveau Sun Odyssey 440 du chantier Jeanneau adopte un plan de pont innovant qui facilite la circulation entre l’avant et
l’arrière du bateau.
VoilesetVoiliers/LoïcMadeline
Les dernières trouvailles pour faciliter les manœuvres
7. 7
La poubelle flottante fait son entrée dans les ports
Peter Ceglinski et Andrew Turton,
deux surfeurs australiens vivant à
Majorque avaient fait le buzz avec
leur idée : installer des poubelles flot-
tantes dans les ports pour aspirer les
déchets. Afin de mener leur projet au
bout ils avaient fait appel à du finance-
ment participatif et récolté 550 000 €.
Ensuite, de l’idée au produit, il aura
fallu un an et demi de travail entre
The Seabin Project, l’entreprise aus-
tralienne, et Poralu Marine, équipe-
mentier français de systèmes pour
les ports de plaisance, installé à Port,
dans l’Ain. « Nous avons rencontré
The Seabin Project lors du salon
du nautisme à Amsterdam, raconte
Claire Touvier, responsable produits à
Poralu. Ils cherchaient un savoir-faire
industriel et commercial ainsi qu’un
réseau de distribution, et Poralu
souhaite se développer autour du
développement durable et de l’envi-
ronnement. »
À partir de là, Poralu et The Sea-
bin Project ont conclu un accord
d’exclusivité mondial pour travailler
ensemble sur la réalisation du pro-
duit. « La problématique de la flot-
tabilité et de l’immersion était très
importante, cela a nécessité un vrai
développement », poursuit Claire
Touvier. Le projet a abouti début no-
vembre avec la commercialisation
des 500 premières poubelles de mer,
produites en France, sur le site de pro-
duction de Poralu.
La poubelle doit être installée
dans les points d’accumulation des
déchets, fixée au ponton flottant et
peut contenir jusqu’à 20kg de dé-
chets. Elle est vendue au prix public
de 3 300 €. « Pour l’instant elle ne
s’adapte qu’aux pontons flottants,
précise la responsable produits de
Poralu. Mais nous travaillons actuel-
lement sur une version qui pourra
s’adapter aux quais fixes, commer-
cialisables en 2018. »
Le prototype de The Seabin Project
avait été testé en partenariat avec le
port de la Grande Motte et installé
dans celui de Portsmouth en octobre
dernier. Poralu et The Seabin Project
seront présents ensemble sur le salon
du nautisme.
Isabelle JARJAILLE.
TheSeabinProject
ƒ Innovation. L’idée était portée par deux surfeurs australiens : immerger des poubelles dans les ports
pour aspirer les déchets flottants. C’est désormais une réalité, la commercialisation a débuté en novembre.
Produite en France, la poubelle peut avaler jusqu’à 20 kg de déchets.
Décembre 2017
10. 11
AlainLepigeon
Mardi 12 décembre 2017
La pollution des navires fait surface
Les derniers jours du carburant le
plus sale du monde sont comptés. À
partir du 1er
janvier 2020, le fuel lourd
surchargé en soufre ne sera plus auto-
risé à bord des navires de commerce.
Selon le principe largement partagé
« loin des yeux, loin du cœur », le
transport maritime n’était pas perçu
jusqu’ici comme une source de pol-
lution majeure de l’air. Et pourtant,
un gros paquebot de croisière à quai
relâche dans l’atmosphère autant de
matières polluantes que des milliers
de voitures particulières.
Autre souci encore moins connu,
l’eau de mer transportée dans les ci-
ternes à ballast des navires pour assu-
rer leur stabilité est responsable de la
dispersion de nombreuses espèces
végétales et animales mettant en
cause l’équilibre des écosystèmes cô-
tiers locaux. Le crabe à mitaine chinois
est désormais chez lui dans les es-
tuaires du nord de l’Allemagne où il a
commencé à saper méticuleusement
les rives de l’Elbe et de la Weser.
La transition en marche
Alors que les navires de commerce
transportent jusqu’à 90 % des mar-
chandises échangées dans le monde,
la réglementation internationale a dé-
cidé de s’attaquer sérieusement à ces
sources de pollution. Depuis le 1er
jan-
vier 2015, la mer de Manche a inau-
guré la nouvelle politique des zones
d’émissions spéciales où le taux de
soufre des carburants marins est li-
mité à 0,1 %.
Au Havre, la compagnie de croisière
allemande Aida Cruises utilise désor-
mais du gaz naturel liquéfié exempt
de soufre et de particules fines pour
alimenter ses paquebots à quai. La
grande bascule vers les carburants
alternatifs tels que le gaz mais aussi
l’appoint de batteries est attendu en
2020 avec l’abandon du fuel soufré à
3,5 % pour un nouveau plafond limité
à 0,5 % pour l’ensemble des mers du
globe, hors zones d’émissions spé-
ciales. La France va d’ailleurs propo-
ser à l’Organisation maritime interna-
tionale que la Méditerranée accède
au statut de zone d’émission spéciale
au même titre que la Manche-Mer du
Nord-Baltique.
Et pour les eaux de ballast, autre
bonne nouvelle. Le traitement systé-
matique des eaux avant leur rejet en
mer est désormais obligatoire pour
les nouveaux navires à partir de 2018
et jusqu’en 2024 pour les navires
existant. Les armateurs les plus ver-
tueux applaudissent tout en s’inter-
rogeant sur le niveau des contrôles
qui devront garantir les conditions de
concurrence entre tous les acteurs de
ce transport maritime mondialisé.
Frédérick AUVRAY.
ƒ Environnement. Réduction du taux de soufre, développement des carburants alternatifs... Longtemps ignorée,
la pollution de l’air engendrée par les navires est désormais encadrée.
Un gros paquebot de croisière, à quai, relâche dans l’atmosphère autant de matières polluantes que des milliers de voitures.
Le gaz carburant marin de l’avenir
259 navires dans le monde ont, à ce
jour, opté pour le gaz naturel liqué-
fié comme nouveau carburant. À
l’échelle mondiale, cela représente
à peine 0,2 % de la flotte mondiale
de navires de commerce, mais le pli
est pris. Exempt de soufre, n’émet-
tant aucune particule fine, le GNL a
pour lui d’être une ressource abon-
dante bénéficiant, de plus, de prix
très compétitifs. La compagnie Brit-
tany Ferries est le premier armateur
français à avoir franchi le pas avec la
commande d’un nouveau ferry, Hon-
fleur, qui sera alimenté au GNL pour
la ligne transmanche Caen-Ouistre-
ham-Portsmouth.
Un pas supplémentaire a encore
été franchi par CMA-CGM, le 3e
ar-
mateur mondial de porte-conteneurs.
La compagnie marseillaise a com-
mandé, en Chine, neuf navires d’une
capacité de 22 000 conteneurs équi-
valents vingt pieds (EVP) propulsé
au GNL. Ces très grands navires de
400 mètres de long seront les pre-
miers grands navires marchands au
gaz carburant exploités sur des lignes
transocéaniques reliant l’Asie à l’Eu-
rope du Nord. « Autant que l’avan-
tage écologique de ce carburant
propre, le GNL est une solution éco-
nomiquement viable pour ce type
de navires », confirme le PDG Ro-
dolphe Saadé.
F. A.
CMA-CGM
Les prochains porte-conteneurs géants au gaz de CMA-CGM mesureront 400 mètres de long.
11. Les bienfaits de l’eau de mer, un produit naturel
Chaque année, entre 3 et 4 millions
de litres d’eau de mer sont pompés
au large de Saint-Malo pour approvi-
sionner l’usine du Laboratoire de la
Mer. « Dans la baie de Saint-Malo,
nous avons la chance d’avoir des
marées aux marnages très impor-
tants. Ce qui permet d’avoir une
eau fortement oxygénée et une
bonne qualité microbiologique »,
explique Gaël Le Saux, directeur in-
dustriel du site.
L’eau de mer n’est pas diluée mais
elle est dessalinisée. « Nous enle-
vons le chlorure de sodium mais
nous conservons l’ensemble des
oligo-éléments marins, calcium,
magnésium ou potassium. »
L’entreprise fabrique différents sé-
rums marins. « Des solutions isoto-
niques pour laver le nez ou hyper-
toniques pour décongestionner,
comme le ferait un vasoconstric-
teur. »
Les sprays d’eau de mer per-
mettent de laver le nez et d’évacuer
les sécrétions, en cas de rhume.
Mais ce n’est pas tout. « Les oligo-
éléments, apportés en quantité suf-
fisante, permettent d’assurer le bon
fonctionnement de la muqueuse
nasale. »
Certains produits associent l’eau
de mer aux huiles essentielles
comme l’eucalyptus, le thym ou la
menthe des champs « pour lutter
contre l’inflammation ».
I. L. Laboratoire de la Mer est le numéro un du lavage nasal en Europe.
12 Mardi 12 décembre 2017
Physiomer débouche les nez du monde entier
L’usine du Laboratoire de la Mer
est située à l’entrée de Saint-Malo.
Un bâtiment discret qui abrite le lea-
der européen des sprays nasals à
l’eau de mer. Un concept que l’entre-
prise a été la première à développer.
« Nous sommes des spécialistes de
la sphère ORL (nez, gorge, oreille).
Nos sérums marins sont naturels.
Ils ne contiennent ni conservateur,
ni produit issu de la chimie synthé-
tique », précise Gaël Le Saux, direc-
teur industriel.
Le Laboratoire de la Mer a lancé
son activité de fabrication de sérums
marins, en 1988. Différents types de
sprays sont fabriqués. Ils sont desti-
nés à laver ou à décongestionner les
fosses nasales ou bien à soulager la
gorge. La société élabore également
des solutions à base d’eau de mer
pour nettoyer les oreilles.
Toute la production
à Saint-Malo
Les produits vont du mini-flacon à glis-
ser dans la poche, au kit d’irrigation
grand volume qui nettoie de façon
complète les fosses nasales. À l’ex-
ception des dosettes, conditionnées
chez un sous-traitant, « toute la pro-
duction est faite ici », appuie le res-
ponsable. D’ici la fin 2017, 30 millions
de produits seront sortis de l’usine.
Le site malouin regroupe les services
d’analyses et des affaires réglemen-
taires, le marketing, la vente, l’adminis-
tratif, les contrôles qualité. « Nous in-
vestissons principalement dans l’ou-
til industriel. Nous venons de rénover
le laboratoire de contrôle », poursuit
Gaël Le Saux. À l’intérieur du site de
production, les conditions d’hygiène
sont très strictes. « Nous remplissons
les contenants de façon stérile et ils
le resteront, y compris, au moment
de leur utilisation. »
Le Laboratoire de la Mer a réalisé un
chiffre d’affaires de 43 millions d’eu-
ros en 2016. « Ces cinq dernières an-
nées, nous connaissons une crois-
sance moyenne à deux chiffres. »
Le site recrute une petite dizaine de
salariés par an. « Il y a cinq ans, nous
étions 90. Nous serons 130 à la fin
de l’année, sans compter les intéri-
maires », complète Claudine Rouxel,
directeur administratif et financier.
Depuis le 30 mars 2015, le Labora-
toire de la Mer fait partie du groupe
américain Perrigo. L’entreprise est
présente dans 65 pays, de l’Amérique
du sud à l’Asie.
Isabelle LÊ.
PhilippeChérelPhilippeChérel
PhilippeChérel
PhilippeChérel
ƒ Entreprise. Les sprays nasals du Laboratoire de la mer sont fabriqués à partir d’eau de mer puisée dans la baie
de Saint-Malo. L’entreprise connaît une croissance soutenue.
Cette année, 30 millions de produits auront été fabriqués à l’usine de Saint-Malo.
L’hygiène... Une des conditions essentielles dans la fabrication des produits.
Gaël Le Saux, directeur industriel.
12. La France, championne du monde des exportations d’huîtres
L’huître française est tellement pri-
sée à l’étranger, qu’on en trouve des
contrefaçons ! Car si la Chine domine
très largement la production ostréi-
cole mondiale, la France est bien la
championne des exportations.
Les échanges mondiaux d’huîtres
se sont élevés à 270 millions d’eu-
ros en 2015, dont 70 millions pour
l’Hexagone. 74 millions en 2016 (pour
10 000 tonnes). À l’inverse du marché
domestique, l’export de coquillages
français, avec une hausse moyenne
de 10 % par an, connaît « une véri-
table dynamique », commente Jé-
rôme Lafon, délégué de filière pêche
et aquaculture chez FranceAgriMer.
L’huître française rime avec luxe et
séduit un public de plus en plus large.
Si elle s’exportait à 95 % en Europe
jusqu’en 2009, le Vieux Continent ne
représentait plus que 71 % des ventes
à l’étranger en 2015.
Les bourriches partent aujourd’hui
en Chine, à Hong Kong, aux Émirats
Arabes Unis, à Singapour… Mais at-
tention, prévient Jérôme Lafon, s’ou-
vrir aux consommateurs asiatiques
ou arabes ne s’improvise pas et « né-
cessite de bien connaître le marché
pour proposer le bon produit, assu-
rer le service attendu par les clients
et déjouer toutes les embûches
douanières, sanitaires, linguistiques
ou logistiques ».
M. L.-L.
MarionLarronde-Larretche
Mises en bourriche en France, les huîtres s’exportent aujourd’hui jusqu’au Moyen-
Orient ou en Asie.
13
Le retour des huîtres d’antan
L’huître plate Ostrea edulis est l’es-
pèce native de nos côtes, celle
consommée par nos ancêtres depuis
la nuit des temps. Fragilisée par une
pêche excessive et les maladies, elle
est supplantée à la fin du XIXe
siècle
par sa voisine la Portugaise, plus rus-
tique, de son petit nom Crassostrea
angulata. Elle-même éradiquée en
France à la suite de deux épizooties
successives, elle est à son tour rem-
placée par l’huître creuse japonaise,
Crassostrea gigas, celle que tout le
monde déguste encore aujourd’hui.
Réellement rayée de la carte, la Por-
tugaise ? C’était sans compter sur l’in-
géniosité d’Éric Marissal, qui a décidé
de la remettre au goût du jour. Son
écloserie, Grainocéan, implantée sur
l’île de Ré, fournit les ostréiculteurs en
naissain, les bébés huîtres, habituelle-
ment de l’espèce Crassostrea gigas.
Mais en 2012, l’écloseur ramène de
jeunes angulatas du Portugal. Il sélec-
tionne les meilleures, les fait se repro-
duire entre elles, teste la résistance,
les performances de la descendance,
réalise un nouveau tri. Et au printemps
2016, il propose ses bébés angulatas
aux ostréiculteurs.
Pour les fêtes de fin d’année
Cette résurrection de la Portugaise
fait frémir certains professionnels qui
craignent un impact sur les popula-
tions de Japonaises puisque les deux
variétés peuvent se croiser entre elles
et que la descendance est viable.
Mais d’autres saisissent l’opportunité,
comme le Morbihannais Jean-Fran-
çois Taugé, « à titre d’essai ». La mor-
talité est suivie de près, ainsi que la
croissance. « Au-dessus de la Loire,
ça ne pousse pas, rapporte Éric Ma-
rissal. Ça marche bien là où la tem-
pérature de l’eau est bonne. »
Une huître creuse met deux à trois
ans pour atteindre sa taille commer-
ciale. Noël Tessier, installé en Vendée,
espère pouvoir vendre ses toutes pre-
mières Portugaises pour les fêtes de
fin d’année. D’après les anciens, elle
serait moins sucrée que la Japonaise
mais moins âcre que la plate.
Marion LARRONDE-LARRETCHE.
MarionLarronde-Larretche
ƒ Consommation. À l’image de ce qui se passe avec les fruits et légumes, certains ostréiculteurs tentent
aujourd’hui de faire revivre une huître d’antan, la Portugaise, décimée par un virus au tout début des années 1970.
Près de cinquante ans après sa disparition des côtes françaises, une poignée d’ostréiculteurs font revivre l’huître portugaise.
Mardi 12 décembre 2017
En bref
Seul 1 % du plastique disséminé
dans les océans a été découvert.
Une nouvelle méthode, dévoilée le
23 novembre dernier par l’université
de Warwick (Royaume-Uni), explique
comment retrouver les 99 % restants,
à l’aide d’un colorant fluorescent qui
peut détecter des microplastiques
aussi fins qu’un cheveu humain.
Le colorant se lie spécifiquement aux
particules de plastique et les rend
facilement visibles sous un micros-
cope à fluorescence. Cela permet de
les distinguer parmi d’autres maté-
riaux naturels et de les quantifier. Ces
études ont par ailleurs confirmé que
les microplastiques étaient principa-
lement composés de polypropylène,
un polymère commun utilisé dans les
emballages et récipients alimentaires.
Le scientifique Pierre Mollo lance une
campagne de financement participatif
pour créer une symphonie de la mer.
Pour mettre en musique les mouve-
ments envoûtants du plancton marin, et
sensibiliser à leur protection en jouant
sur les émotions. Pierre Mollo, cher-
cheur biologiste, œuvre aujourd’hui
à faire du plancton « un aliment pour
tous » et alerter sur l’importance et la
vulnérabilité de ce petit monde fasci-
nant, premier maillon de la chaîne ali-
mentaire marine, et fournisseur d’oxy-
gène essentiel sur la planète.
L’association Plancton & innovations
souhaite produire cette symphonie en
juillet, lors du 400e
anniversaire de la
ville de Port-Louis. Pour soutenir ce
projet inhabituel : www.kisskissbank-
bank.com/la-symphonie-de-la-mer
Un colorant repère les microplastiques dans les océans Une symphonie de la mer pour sensibiliser au plancton
13. 14
Les algues n’en finissent pas d’inspirer Olmix
ƒ Sciences. L’entreprise bretonne, qui avait repris le volailler Tilly Sabco en 2014, poursuit son développement
et lève 70 millions d’euros pour booster son programme « Sans antibiotiques grâce aux algues ».
« Cela fait vingt ans qu’on travaille
pour démontrer qu’en introduisant
les algues dans la nutrition ani-
male, on peut baisser le recours à
la médication », affirme Hervé Ba-
lusson, fondateur de l’entreprise bre-
tonne Olmix.
Employant 800 salariés, la société,
dont le siège est dans le Morbihan,
enregistre un chiffre d’affaires de
160 millions d’euros en 2017.
Aujourd’hui, le concept Saga (Sans
antibiotiques grâce aux algues) a un
slogan pour communiquer auprès du
grand public : « Merci les algues ». À
l’image d’autres concepts marketing,
comme Bleu Blanc Cœur, Hervé
Balusson souhaite afficher un mes-
sage clair destiné au consommateur,
sur le poulet nourri aux algues par
exemple. « Nous travaillons déjà
avec les industriels sur le sujet mais
ils veulent plus de preuves de l’inté-
rêt nutritif des algues », résume le
dirigeant.
C’est notamment pour faire de la
recherche et obtenir ces preuves que
Olmix a entamé une levée de fonds il
y a deux ans, soldée en septembre
avec 70 millions d’euros, dont un
prêt sur trois ans de 30 millions d’eu-
ros de la Banque Européenne d’In-
vestissement.
Investissements récents
au Vietnam
Les cinq sites de recherche bretons
pilotés par Olmix, qui travaillent pour
extraire les enzymes des algues afin
de les utiliser dans la nutrition ani-
male ou dans des biostimulants des-
tinés à l’agriculture vont bénéficier
de cette levée de fonds pour passer
à la vitesse supérieure. En partena-
riat avec des acteurs comme la sta-
tion biologique de Roscoff, l’Anses
(Agence nationale de sécurité sani-
taire de l’alimentation, de l’environ-
nement et du travail), l’Inra (Institut
national de recherche agronomique)
ou l’Inserm (Institut national de la
santé et de la recherche médicale).
Ce financement conforte aussi les
choix d’investissements récents faits
par l’entreprise : une nouvelle usine
au Vietnam, pour desservir le mar-
ché asiatique représentant 40 % du
chiffre d’affaires ; le rachat de l’en-
treprise bretonne PRP, productrice
de biostimulants destinés à l’agricul-
ture ; ou la nouvelle usine de Merdri-
gnac destinée à l’élaboration de pro-
duits panés à base d’algues.
Olmix a désormais trois ans pour
transformer l’essai et introduire dura-
blement les algues dans l’industrie
agroalimentaire bretonne.
Isabelle JARJAILLE.
FunImagesFunImagesStudioFunImages
L’objectif est d’obtenir des molécules d’intérêts pour la nutrition et la santé.
Au début du process de transformation, les algues commencent d’abord par passer l’étape du lavage.
Mardi 12 décembre 2017
« L’école » bretonne accueille des professionnels du monde entier.
C’est à Saint-Étienne-du-Gué-de-
l’Isle, en plein centre Bretagne, que
Hervé Balusson a installé un centre
de formation dédié aux algues. Ici,
dans l’ancienne ferme de ses pa-
rents, le fondateur d’Olmix accueille
des professionnels venus du monde
entier pour partager le savoir-faire
d’Olmix sur l’usage des algues dans
la nutrition et la santé animale, végé-
tale ou humaine. Avec ses partenaires
de recherche (Inra, Anses, etc.), la
Breizh Algae School dispense des
formations sur-mesure, théoriques et
pratiques.
« Nous sommes entourés d’éle-
vages, de cultures et d’usines agro-
alimentaires, dans un rayon de
20 km, précise Nathalie Morice, res-
ponsable des formations. C’est un
atout majeur pour naviguer de la
théorie à la pratique. »
Les élèves passent plusieurs jours
sur place, nourris et hébergés, pour
approfondir leurs connaissances et
comprendre, par exemple, comment
« produire un poulet sans antibio-
tiques grâce aux algues » ou com-
ment « produire des légumes de ma-
nière performante sans pesticide et
grâce aux algues ».
La Breizh Algae School s’ouvre
aussi au grand public avec des mar-
chés saisonniers de producteurs lo-
caux et des ateliers thématiques, en-
viron quatre fois par an. La première
édition, en juin 2017, a permis aux visi-
teurs de déguster du bœuf nourri aux
algues.
I. J.
La Breizh Algae School, pour tout savoir sur les algues
14. 15
Le Brexit voile l’horizon de la pêche française
La pêche française est dans le brouil-
lard : 30 % de ses captures dé-
pendent des eaux britanniques, et
même 50 % pour les pêcheurs des
Hauts-de-France à la Bretagne. Or
ils craignent d’être écartés de ces
eaux par le Brexit. Les navires hau-
turiers normands jouent ainsi 70 %
de leur pêche. Ceux de l’armement
Scapêche à Lorient, de 30 à 98 %.
« Si les conditions de décrochage
sont mal négociées, cela pourrait
s’apparenter à un vrai séisme », pré-
vient le Comité national des pêches.
Il a convaincu en plus haut lieu : « Le
gouvernement considère la pêche
comme une priorité dans la négo-
ciation sur le retrait du Royaume-
Uni de l’Union européenne », assure
le Premier ministre Édouard Philippe.
Mais il n’est pas encore question de
pêche dans les négociations. Après
le référendum du 23 juin 2016, avec
52 % des voix en faveur de la sortie de
l’Union européenne (UE), la Première
ministre britannique Theresa May a
enclenché la procédure de divorce
le 29 mars 2017. Les négociations
de l’accord de sortie doivent durer
deux ans et sont clairement séquen-
cées : on règle en priorité les ques-
tions de droits des citoyens, frontière
irlandaise et facture britannique. Pour
l’instant, cela bloque et la prochaine
échéance est à la mi-décembre. En-
suite seulement s’ouvrira la 2e
phase
sur la relation future, qui parlera alors
de tout, pêche comprise.
Le secteur avance déjà ses pions.
L’Alliance européenne pour la pêche,
créée pour l’occasion, réunit France,
Belgique, Danemark, Allemagne,
Irlande, Pays-Bas, Pologne, Espagne
et Suède, soit plus de 18 000 pê-
cheurs. Elle demande aux décideurs
européens « de subordonner l’accès
aux marchés européens des pro-
duits de la mer britanniques à l’ac-
cès aux pêcheries de nos flottes ».
En clair, vos zones de pêche contre
notre marché, dont les Britanniques
sont très dépendants : 65 % de leurs
produits de la mer sont exportés vers
l’Europe. Mais les négociateurs ont
aussi en tête des enjeux financiers,
militaires, aériens, agricoles… Nul ne
peut prédire ce qui sortira de ce bras
de fer politique. Ni même si le 29 mars
2019, le Royaume-Uni larguera réelle-
ment les amarres.
Solène LE ROUX.
LionelFlageul
ƒ Réglementation. Le Brexit peut faire vaciller la pêche française qui fréquente assidûment les eaux britanniques.
Encore peu abordée dans les négociations, elle avance ses pions.
La pêche française dépend à 30 % des captures dans les eaux britanniques, et à 50 % entre le nord de la France et la Bretagne.
Mardi 12 décembre 2017
L’attitude manche
rendez-vous au 15, rue des halles
Du 14 au 23 Décembre
ouvert tous les jours de 10h30 à 20h30
Métro Châtelet-les-Halles, sortie directe
Porte Marguerite de Navarre
faites le plein d’idées cadeaux
100% Manche !