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Eco-logis
Quelle est la philosophie de vos projets?
Edouard François: Je suis un artiste dont le médium est
l’architecture. Je m’intéresse donc à une architecture qui
corresponde à notre époque. J’aimerais que dans 50 ans
on dise “Lui, il a bien compris son temps”. L’écologie est
intéressante pour le travail sur la nature. Mais la tentation
positive du développement durable ne m’intéresse pas en
soi. Il faut que tout ça devienne plus ludique, moins
culpabilisant. À prendre comme un sourire et pas une
obsession. Cet attrait doit avant tout créer de l’envie, sinon
ça devient vite un mouvement artificiel.
Et la crise dans tout ça?
E. F.: C’est la seule manière de changer d’état, il fallait
un déclic pour revenir à des choses accessibles.
En quoi la vision de l’architecture a déjà changé?
E. F.: Visuellement il y a ce retour à des bâtiments accessi-
bles. Depuis la fin du modernisme, on cherchait par des
coûts exorbitants à créer quelque chose à caractère unique.
Pour moi, la question humaine a toujours été essentielle
aussi bien dans l’Eden Bio (ndlr: des logements sociaux dans
le XXe) qu’en ce moment dans mon projet du Club Med
au Sénégal. Je place l’homme au centre.
Pourquoi votre vision est outrancière?
E. F.: J’arrive à échapper à la beauté par l’outrance. Ce
Club Med correspond à une échelle de plus en plus grande
dans mes travaux: 100 hectares et plus de 400 employés.
La dimension humaine est donc importante. La question
de l’homme vient avant celle de la beauté: comment va-
t-on servir les gens? Qu’est-ce que c’est que les vacances?
ARCHITECTE URBANISTE QUI INTÈGRE LA NATURE,
EDOUARDFRANÇOISS’INSCRITDANSSONÉPOQUE.
ENTRE CRISE ET VERDURE, IL DONNE LA COULEUR
DUTEMPSAVECDESBÂTIMENTSQUIONTDUSENS.
PROPOS RECUEILLIS PAR SABINE BOUVET.
l’appel du végétal
Ci-contre, cheminée de ventilation
à La Défense, 2004, et ci-dessous,
la Tower Flower près de la Porte
d’ Asnières à Paris, 2004.
©PHOTOSEDOUARDFRANÇOIS
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Eco-logis
Quels sont vos autres projets?
E. F.: Après la réhabilitation du Fouquet’s à Paris, je réfléchis en
Norvège sur l’idée de la suppression du logement social pour réta-
blir les équilibres sociologiques dans la ville. Quelque soit le pro-
jet, je travaille toujours sur l’humanité, la sociabilité.
Quelle relation y-a-t’il entre Paris et le jardin?
E. F.: Le jardin est une notion urbaine, une idée d’interstice. Il
est indispensable parce qu’il agit comme un filtre face à la den-
sité citadine. C’est le cas de la Tower Flower avec ses gros pots de
plantes. Il permet aussi de retourner à la notion de saisonnalité
qu’on a perdue. Et ça inspire! L’asperge, c’est un moment magique.
La fraise, on ne sait même plus quand c’est…
Quelle est votre dernière émotion forte vécue dans la nature?
E. F. : Au Japon, sur une île biotope j’ai marché pendant des
heures sur des mousses, dans 100% d’humidité. Un paysage très
primitif. Je me promène toujours avec ma chambre photogra-
phique pour mes photos. J’ai dû ensuite la démonter pièce par
pièce pour la faire sécher!
Et la prochaine?
E.F.: Elle est à venir! (ndlr: nous sommes en avril au moment de l’in-
terview). Tous les ans au printemps je shoote un cerisier en fleurs
en face de mon bureau dans le XVe. Un quartier assez pourri où
ce bouquet de fleurs roses gigantesque est improbable. Au moment
où la floraison est à fond, je me demande “Comment je vais me le
taper cette année?”! Eh bien, ce sera de nuit, je resterai au bureau.
Si vous étiez un paysage?
E. F.: Des mousses ou une plage à l’eau très claire qui fait des
moirages sur le sable.
Si vous étiez une plante?
E. F.: Un cactus au Maghreb ou un baobab au Sénégal.
Est-ce que la nature vous rend heureux?
E. F.: Elle me rend complètement idiot! Je n’ai plus envie de rien
faire. C’est un tel état de bien-être qu’on n’a pas envie de travailler.
On vous verra où cet été?
E. F.: Je vais profiter de cette opération au Sénégal pour tourner
en Afrique de l’Ouest à la découverte des artisans, des savoir-faire.
Ci-contre,
Cabane de
plumes pour
l’IFA et l’Ecole
Alsacienne à
Paris, 2002.
Ci-dessous,
l’Eden Bio,
un îlot de
logements
sociaux dans
le XXe
à Paris,
2008, et, à
droite, parking
des Ternes
à Paris, 2003.
Edouard François
en 6 dates
1957 Naissance.
1986 Diplômes de l’Ecole
Nationale des Beaux-Arts
et l’Ecole Nationale des ponts
et chaussées.
1998 Création de son agence
d’architecture, urbanisme
et design et œuvres au
Guggenheim à New York.
2004 Tower Flower à
Asnières.
2005 Exposition au Victoria &
Albert Museum à Londres.
2008 Biennale de Venise.
“B2B2SP”, sa première
monographie, éd. Archibooks.
edouardfrancois.com
©EDOUARDFRANÇOIS
©PAULRAFETRY
©D.R.
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