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1
L’ère de
Opportunités et défis
l’IA
Emilie Allaert, Prof. Dr. Pascal Bouvry,
Prof. Dr. Michèle Finck, Dr. Emmanuel Kieffer,
Thierry Kremser, Hoai Thu Nguyen Doan,
Laurent Probst, Jean-Jacques Rommes
1
En tant que laboratoire d’idées, la Fondation IDEA asbl
s’est donné une mission qu’elle tâche de remplir
depuis près de dix ans désormais, celle de susciter et
d’alimenter un débat public de qualité par des
propositions constructives pour répondre aux défis
socioéconomiques d'envergure.
Auteurs :
Emilie Allaert, Prof. Dr. Pascal Bouvry,
Prof. Dr. Michèle Finck, Dr. Emmanuel Kieffer,
Thierry Kremser, Hoai Thu Nguyen Doan,
Laurent Probst et Jean-Jacques Rommes.
Édition : Vincent Hein, Ioana Pop.
Illustration de couverture : Julien Mpia Massa
© Novembre 2023, Fondation IDEA a.s.b.l.
www.fondation-idea.lu | info@fondation-idea.lu
2
Sommaire
3
Introduction......................................................... 5
Démystifier l’intelligence artificielle ..................... 9
Utilisation de l’IA dans le domaine du « private
equity » .............................................................. 15
AI in Luxembourg: increased maturity but still a
lot to invest in................................................... 23
L’IA, la Blockchain et les Fintechs : l’ère de la
finance intelligente............................................ 29
L’éthique face à l’intelligence artificielle............. 35
IA et la législation européenne : quo vadis ?....... 41
Références ......................................................... 47
Les auteurs........................................................ 51
4
5
Introduction
6
Le recueil « L’ère de l’IA : opportunités et défis » est
le fruit des discussions tenues lors d’un atelier or-
ganisé par la Fondation IDEA asbl en juillet 2023,
où les enjeux du déploiement de l’intelligence artifi-
cielle (IA) dans le secteur financier et au-delà ont été
débattus. L’objectif de ce recueil est d’apporter des
éléments de réflexion sur les opportunités, défis et
menaces de l’utilisation de l’IA dans nos sociétés.
L’intelligence artificielle est un domaine de l’infor-
matique qui vise à développer des systèmes ca-
pables de simuler des processus cognitifs humains,
comme la prise de décision. Avec ses progrès ré-
cents, de nombreux secteurs d’activité de l’écono-
mie sont en pleine transformation. Dans la finance
comme dans les sciences, l’Homme devra apprendre
à travailler avec l’IA à travers ses nombreuses ap-
plications. L’IA joue un rôle clé dans l'exploitation
des masses de données en les transformant en in-
formations précieuses. Différentes techniques d'IA
sont utilisées, allant du « Moteur de règles » au
« Deep Learning », permettant de créer des ma-
chines de plus en plus sophistiquées (voir le texte
de Hoai Thu Nguyen Doan). Pour ce qui concerne le
secteur financier, et plus spécifiquement l'investis-
sement en « private equity » et en actifs réels une
approche proposée consiste à utiliser l’IA pour ajus-
ter de manière optimale les politiques d'investisse-
ment. Plusieurs méthodes ont été développées pour
concevoir ces règles, dont certaines utilisent des
7
stratégies d'apprentissage automatique. Une étude
réalisée par l’Université du Luxembourg qui pro-
pose d'utiliser un algorithme évolutif pour ap-
prendre automatiquement des stratégies de réenga-
gement dans le « private equity » est résumée dans
ce recueil (voir le texte du Prof. Dr. Pascal Bouvry et
du Dr. Emmanuel Kieffer).
Si l’IA offrait de nombreuses opportunités de trans-
formation et d’optimisation des activités finan-
cières, il convient de regarder comment se posi-
tionne le Luxembourg en termes d’utilisation des
outils et de la disponibilité de main-d’œuvre quali-
fiée dans le secteur. Il semblerait en effet, que le
Luxembourg, qui a connu une utilisation croissante
des outils d'IA externes, nécessite encore d'impor-
tants investissements et gagnerait à développer une
stratégie nationale pour tirer le meilleur profit de
l’IA (voir le texte de Laurent Probst et Thierry Krem-
ser). En outre, le déploiement des Fintechs est une
tendance à suivre de près. Ces organisations exploi-
tent différentes technologies telles que l'analyse des
Big data, le cloud computing et l’IA, et recèlent un
fort potentiel de diffusion de l’innovation pour amé-
liorer les services financiers, notamment en permet-
tant la démocratisation des investissements. En
outre, l'éducation reste essentielle pour tirer parti
des bienfaits de l’IA (voir le texte d’Emilie Allaert).
Ces évolutions peuvent néanmoins soulever des
questions sur le remplacement de l'humain par la
8
technologie. D’un point de vue éthique et social, le
déploiement de l’IA remet en cause le monopole de
l’intelligence, ce qui pourrait entrainer des ap-
proches non éthiques en matière d’efficacité, de
prise de décision et de responsabilité (voir le texte
de Jean-Jacques Rommes). Cette incertitude pose
également la question de la législation encadrant le
développement de l'IA. En effet l’IA entraine des
changements sociaux majeurs et il est difficile de la
réglementer dans un environnement concurrentiel.
À ce sujet, l'Union européenne a décidé d'adopter
un nouveau cadre réglementaire afin d'encourager
l'innovation tout en tenant compte des risques as-
sociés. Ce cadre législatif vise à prendre en compte
les caractéristiques uniques de l'IA et à harmoniser
les normes réglementaires (voir le texte de la Prof.
Dr. Michèle Finck).
9
Démystifier l’intelligence
artificielle
Hoai Thu Nguyen Doan, Senior Economist à la
Chambre de Commerce du Grand-Duché
10
L’intégration des technologies digitales, concomi-
tante à la baisse du coût de la collecte, du stockage
et du traitement des données, a fait émerger un en-
vironnement où mondes numérique et physique
s’entrelacent.
Une nouvelle révolution industrielle
Selon l’International Data Corporation (lDC), entre
2021 et 2026, la quantité de données contenues
dans la datasphère devrait évoluer à un taux de
croissance annuel composé (TCAC1) de +21,2% et
atteindrait plus de 221.000 exaoctets à l’horizon
2026. Si l’on considère que la plupart des smart-
phones actuels détiennent une capacité de 64Go,
alors un exaoctet représente plus de 16 millions de
smartphones. Par conséquent, la datasphère en
2026 devrait faire l’équivalent de plus de 3.710 mil-
liards de smartphones. Cette quantité colossale de
données érige le 21ème siècle comme le théâtre d’une
nouvelle révolution industrielle, celle du « Big Data
».
L’IA transforme les données en or
Le Big Data désigne l’existence d’un ensemble de
données complexes, volumineuses et valorisables
qui dépassent les capacités d’analyse du cerveau
humain et des outils informatiques classiques. De
telles mines d’informations sont aujourd’hui
1 Le TCAC estime la croissance moyenne annuelle entre 2 dates.
Hoai Thu Nguyen Doan
11
devenues accessibles grâce à l’Intelligence artifi-
cielle (ci-après « IA »). Cet « ensemble des théories et
des techniques mises en œuvre en vue de réaliser
des machines capables de simuler l’intelligence2 »
couvre un large éventail de technologies des plus
anciennes aux plus nouvelles, et dont souvent le
seul point commun réside dans le fait d’être guidées
par des objectifs définis par la main humaine, tout
en jouissant d’un certain degré d’autonomie.
Diverses techniques pour imiter l’intelligence
humaine
Parmi les techniques d’IA les plus couramment uti-
lisées, on compte le « Moteur de règles » (où la ma-
chine est programmée pour faire une action définie
lorsqu’un évènement en particulier se produit), le
« Machine Learning » (entrainement des machines,
sans programmation explicite, via l’apprentissage
de modèles et la génération de prédictions basées
sur des données) et le « Deep Learning » (imitation
du fonctionnement des réseaux de neurones hu-
mains).
Des machines de plus en plus évoluées
Ces techniques ont permis de développer des IA di-
verses, parmi lesquelles, les « machines réactives »
qui obéissent à un ensemble de règles prédéfinies
(par exemple les logiciels de jeu d’échec et de Go :
2 Définition de l’Encyclopédie Larousse.
12
Deep Blue et Alpha Go), ou encore les « machines à
mémoire limitée », plus évoluées, qui disposent
d’une représentation préprogrammée du monde et
prennent des décisions grâce aux expériences pas-
sées et aux données présentes (ex : voitures auto-
nomes, chatbots).
La création de machines jouissant de la capacité de
compréhension contextuelle, c’est-à-dire l’aptitude
à comprendre que les êtres vivants sont doués de
pensées et d’émotions, à former une représentation
du monde et à agir de façon autonome en fonction
de ces critères, est un objectif visé par la recherche.
Ce type d’IA, nommé « Theory of mind machines »,
n’existe pour l’instant que dans la science-fiction
(ex : le robot R2-D2 de l’univers Star Wars). Les in-
telligences artificielles douées de conscience ne sont
à l’heure actuelle que des produits de l’imagination.
L’IA : un vecteur de progrès social…
L’IA constitue le sésame d’une révolution indus-
trielle réussie, ainsi qu’un vecteur de transforma-
tions économiques et sociales. Elle peut apporter le
progrès, via par exemple l’amélioration des diagnos-
tics médicaux ou une meilleure utilisation des res-
sources grâce aux technologies intelligentes (ex :
villes intelligentes, agriculture durable, etc.). En
outre, le déploiement de cette technologie fait appa-
raitre de nouvelles industries, de nouveaux biens et
services et de nouveaux processus à l’origine
Hoai Thu Nguyen Doan
13
d’avantages compétitifs significatifs dans tous les
secteurs économiques. C’est ainsi qu’une étude3 ré-
alisée par McKinsey en 2018, montre que l’utilisa-
tion des outils d’IA a le potentiel de contribuer à la
croissance à hauteur de 3,5 à 5,8 trillons de dollars
annuellement, dans 19 secteurs.
…et de progrès économique
L’IA a notamment la capacité de stimuler la crois-
sance via 4 canaux principaux, à savoir les gains de
productivité, l’automatisation intelligente (grâce à la
mise en place de logiciels capables de résoudre des
problèmes et d’évoluer par eux-mêmes en acqué-
rant de l’expérience via les données), l’innovation en
cascade dans d’anciens et nouveaux secteurs éco-
nomiques et la création d’un cercle vertueux de
croissance. Dans ce cadre, une étude4 réalisée par
PricewaterhouseCoopers estime que le déploiement
de l’IA pourrait contribuer à l’horizon 2030 à 14%
de la croissance mondiale.
Une opportunité à saisir pour les entreprises
L’utilisation des applications relatives à l’IA com-
porte de nombreux avantages pour les entreprises.
Elle permet entre autres d’améliorer les processus
de prise de décision, de sécuriser et d’augmenter les
revenus tout en réduisant les coûts, d’optimiser
3 McKinsey (2018), Crossing the frontier collection.
4 PriceWaterhouseCoopers (2018), The macroeconomic impact of AI.
14
l’ensemble des processus de production, de réaliser
des gains de productivité et de saisir de nouvelles
opportunités d’affaires. En outre, comme l’IA sera à
terme présente dans tous les pans de l’économie,
les premières entreprises à l’intégrer dans leur stra-
tégie de développement profiteront d’un bonus de
compétitivité par rapport à leurs concurrentes («
first mover advantage »). Ainsi, selon l’étude « The
State of AI in 2021 » réalisée au niveau mondial par
le cabinet McKinsey, 67% des organisations inter-
rogées ont constaté une augmentation de leurs re-
venus d’au moins 5% directement attribuable à l’in-
tégration de l’IA. De même, 79% ont déclaré une ré-
duction de leurs coûts d’au moins 10% grâce à la
mise en place de cette technologie.
Pour aider les entreprises à saisir les tenants et
aboutissants de la révolution du Big Data ainsi que
ses bénéfices, la Chambre de Commerce a publié un
« Actualité & tendances » qui démystifie l’IA. Le do-
cument de travail est disponible gratuitement en
ligne5.
5 Actualités et tendances n°27, Bulletin économique de la Chambre de
commerce (2022), Intelligence artificielle & Big data: guide pour naviguer
dans la future «data-driven economy» luxembourgeoise,
https://www.cc.lu/toute-linformation/publications/detail/actualite-
tendances-n27-intelligence-artificielle-big-data-guide-pour-naviguer-
dans-la-future-data-driven-economy-luxembourgeoise.
15
Utilisation de l’IA dans le
domaine du « private equity »
Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer,
Département d'Informatique de la Faculté des
Sciences, de la Technologie et de Médecine,
Université du Luxembourg
16
Au cours des dernières décennies, l'investissement
en « private equity » » et actifs réels a gagné consi-
dérablement en importance. Réaliser une exposi-
tion élevée au « private equity » est un défi auquel
sont confrontés les investisseurs institutionnels tels
que les assureurs, les fonds de pension, les
banques, les fondations et les fonds souverains qui,
ces dernières années, ont constitué des allocations
substantielles à ce véhicule d'investissement alter-
natif. Acquérir, gérer et céder avec succès ces inves-
tissements demande une expertise solide et des in-
citations que la plupart des investisseurs institu-
tionnels ne possèdent pas. C'est la raison pour la-
quelle ces investisseurs préfèrent généralement in-
vestir indirectement en tant que partenaires limités
(LP) dans le « private equity » par le biais de fonds
de partenariat limité (désignés ci-après sous le nom
de « fonds »), dans lesquels ils s'engagent à investir
une somme importante pour une période donnée.
Les engagements envers les fonds sont en pratique
immuables et le capital investi est appelé progressi-
vement par la direction du fonds à sa seule discré-
tion. En réalité, les appels de fonds ne peuvent pas
être déterminés à l'avance, ce qui conduit à un ca-
pital engagé mais non investi en attente d'être ap-
pelé. De plus, le capital engagé ne sera générale-
ment pas intégralement utilisé. Par conséquent,
seuls entre 60 % et 70 % des engagements du fonds
seront réellement investis dans le « private equity »
Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer
17
et généreront un rendement conforme à ces actifs.
Au fur et à mesure de l'avancement du fonds, il y
aura également des distributions provenant de ces-
sions anticipées. Ces flux de trésorerie entrants doi-
vent être réinvestis dans de nouveaux fonds.
Le travail fondateur de de Zwart, Brian Frieser et
van Dijk (2012) constitue une première tentative ré-
ussie de concevoir des stratégies de réengagement
dynamiques. Au lieu de se baser sur des prévisions
de flux de trésorerie pour résoudre, à chaque pé-
riode, un problème d'optimisation de portefeuille à
période unique, ils ont choisi de construire des
fonctions de réengagement ne reposant que sur
l'évolution actuelle et passée du portefeuille. Dans
le même esprit, Oberli (2015) étend le travail de de
Zwart à un portefeuille multi-classes d'actifs com-
prenant des actions et des obligations. Ces deux
dernières tentatives sont des contributions solides
et en amélioration pour faire face à l'imprévisibilité
des flux de trésorerie en générant des règles pour
ajuster dynamiquement le degré d'investissement.
Cette similarité avec la théorie du contrôle, c'est-à-
dire un domaine traitant du contrôle des systèmes
dynamiques dans les processus et machines,
semble évidente. Nous visons à construire un sys-
tème de contrôle en boucle fermée ou un régulateur
pour amener la sortie du système à un état désiré
et garantir un certain niveau de stabilité. Comme
un système physique dans lequel l'environnement
ne peut être perçu mais pas prédit, le système de
18
contrôle en « private equity » doit réagir pour com-
penser toute déviation par rapport à la sortie cible.
Néanmoins, un tel système de contrôle en « private
equity » aurait de longs délais et ne serait pas auto-
risé à dépasser la cible, avec le risque de créer des
situations de pénurie de trésorerie.
Les règles de réengagement proposées par de Zwart,
Brian Frieser et van Dijk (2012) sont simples et très
efficaces. Et si nous pouvions générer de telles ex-
pressions de réengagement automatiquement et
considérer que notre système de contrôle serait
composé d'un ensemble de stratégies à appliquer
dans des conditions de marché spécifiques ? Ap-
prendre des fonctions mathématiques, c'est-à-dire
des expressions symboliques, n'est pas un phéno-
mène récent et a été largement étudié par les phy-
siciens computationnels pour développer des mo-
dèles compréhensibles en utilisant la régression
symbolique. Les avancées récentes en matière d'ap-
prentissage évolutif et d'optimisation basée sur la
simulation ont ouvert la voie à de nouveaux para-
digmes d'apprentissage. Nous proposons donc ici
une démonstration de faisabilité consistant à ap-
prendre des expressions mathématiques symbo-
liques dans le même format que celui proposé par
de Zwart, Brian Frieser et van Dijk (2012) et Oberli
(2015) à l'aide d'un algorithme évolutif (voir Freitas
(2003)). Ces expressions symboliques seront en-
suite évaluées par le biais de simulations intensives
Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer
19
afin de mesurer leurs performances en termes de
maintien d'un système de contrôle stable et efficace
pour maintenir l'allocation en « private equity » au
niveau cible.
Dans ce travail, nous avons proposé d'apprendre
automatiquement ces stratégies de réengagement à
l'aide d'un algorithme bio-inspiré. Appelé « appren-
tissage évolutif », un algorithme de programmation
génétique assemble des stratégies de réengagement
basées sur une représentation en arbre de syntaxe
abstraite. Cet algorithme s'appuie sur la théorie de
l'évolution de Darwin pour imiter la sélection natu-
relle en générant de génération en génération des
stratégies nouvelles et prometteuses garantissant
un réengagement efficace à chaque période. En uti-
lisant une approche bi-objectif, un ensemble de
stratégies de réengagement de Pareto a été généré
et comparé à l'œuvre fondatrice de de Zwart publiée
en 2012. Les résultats empiriques obtenus à l'aide
de simulations intensives ont montré que le degré
d'investissement moyen maximal peut être considé-
rablement maximisé tout en offrant différentes al-
ternatives en termes de sur-engagement lié au ca-
pital initial.
Contrairement au sur-engagement statique observé
jusqu'à présent, les stratégies obtenues par l'évolu-
tion et validées par des simulations offrent un véri-
table aperçu en termes de capital supplémentaire
20
injecté dans les portefeuilles au cours de leur durée
de vie. Les sur-engagements statiques appliqués à
chaque période sont assez difficiles à mesurer en
termes de capital initial et ne reflètent pas réelle-
ment le capital réinjecté.
Des investigations supplémentaires seront réalisées
avec des portefeuilles multi-actifs pour tirer parti
des différents niveaux de liquidité apportés par les
actifs du marché public.
Remerciements
Le Prof. Dr. Pascal Bouvry et le Dr. Emmanuel
Kieffer remercient le soutien de la Banque
européenne d'investissement à travers son
programme STAREBEI et de la société LuxProvide à
travers son programme d'accès anticipé au
supercalculateur national Meluxina.
Références
de Zwart, Gerben, Brian Frieser, and van Dijk
(2012), Private Equity Recommitment
Strategies for Institutional Investors, Financial Ana-
lysts Journal 68:3, 81-
99, doi: 10.2469/faj.v68.n3.1.
Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer
21
Kieffer, Emmanuel, Thomas Meyer, Georges
Gloukoviezoff, Hakan Lucius and Pascal Bouvry
(2023), Learning private equity recommitment strate-
gies for institutional investors, Front. Artif. Intell.,
Sec. Artificial Intelligence in Finance, Volume 6,
https://doi.org/10.3389/frai.2023.1014317
Oberli, Adrian (2015), Private Equity Asset Alloca-
tion: How to Recommit? , The Journal
of Private Equity 18: 9–22.
22
23
AI in Luxembourg: increased
maturity but still a lot
to invest in
Laurent Probst & Thierry Kremser,
Partners at PricewaterhouseCoopers
24
2023 has been a formidable year for AI. Elaborated
reports with a single click, studio quality photo-
graphs with a simple text query - we are truly living
in the age of generative AI. Luxembourg’s compa-
nies are already investigating the use of this tech-
nology as part of their broader strategy around data
& AI.
PwC Luxembourg has conducted the third edition
of this study to generate insights on the use of Data
& AI technologies in Luxembourg. The last study
was conducted in 2021 and highlighted how Lux-
embourg is increasingly data-driven, while facing a
challenging talent and investment landscape.
Things are progressing at astonishing speed. With
new EU Regulations expected by the end of 2023
and the explosion of generative AI solutions on the
market, the time is right to look at this topic again.
Increased maturity of the AI market in Luxem-
bourg
The market for AI is constantly evolving, with new
tools and technologies being continuously devel-
oped. Our survey also assessed the maturity of the
AI market and identified trends and changes over
time. One of the key findings of the survey is that
external AI tools are more commonly used. In 2021,
only 20% of organizations surveyed reported using
external AI tools, while in 2023 this figure increased
Laurent Probst & Thierry Kremser
25
to 35%. In contrast, the use of internal AI tools de-
creased from 50% in 2021 to 27% in 2023. This sug-
gests that organizations are increasingly relying on
external AI tools to meet their needs, rather than
developing their own in-house solutions, as the
market for those solutions has become more ma-
ture.
The survey also found that there has been an in-
creased drive towards investment in data and AI so-
lutions. Specifically, 16% of organizations surveyed
indicated that they would allocate more than 5% of
their turnover to these solutions. Luxembourg’s
26
organizations acknowledge the importance of in-
vesting in data and AI as a way to drive innovation
and reduce costs.
The age of generative AI
The survey found that the current hype around gen-
erative AI is only partially translating into interest
among Luxembourg's companies. Specifically, 27%
of respondents indicated that they would be inter-
ested in using generative AI for text generation,
while only 4% expressed interest in using image
generation or other forms of generative AI. Interest
in natural language processing (NLP) was higher
still.
Uncertainty regarding AI legislation is still high
Given the significance of the financial services sec-
tor in Luxembourg, it may be considered a surprise
that there is a high level of uncertainty regarding
the upcoming AI legislation in Europe. While there
is general acknowledgement on the potential impact
and additional needs towards compliance in this
domain, organizations in Luxembourg still need to
gain a level of maturity in this regard.
Laurent Probst & Thierry Kremser
27
Strong differences between sectors
Our increased rate of responses has allowed us to
look at more detail into the use of data & AI of dif-
ferent sectors in Luxembourg. It is notable that not
all financial services are the same, our respondents
from the Funds Industry (in graphics referred as As-
set and Wealth Management) are reporting less ma-
turity in topics around data governance and use of
machine learning, compared to banking and insur-
ance. The public sector is much more inclined to
use internally developed POCs, while less frequently
using data visualization and storytelling as tech-
niques. The detailed responses are found in the full
survey results.
It’s still early days in the age of generative AI
The age of generative AI has just begun, with our
surveyed companies being interested in the topic,
but not yet ready to incorporate the technology
deeply into their daily operations. This is not sur-
prising, as there are numerous open topics around
the trustworthiness and compliance of the applica-
tions, as well as discussions of lawmakers on their
regulation in Europe. Despite the current hype,
Luxembourg’s organizations will need to investigate
and experiment further. We are keenly interested in
following up on this topic in a future edition of the
survey.
28
For further details and data, we recommend you to
read the Use of Data Analytics and Artificial Intelli-
gence in Luxembourg - 2023 edition - The age of
generative AI6.
PricewaterhouseCoopers, Société coopérative, 2 rue
Gerhard Mercator, B.P. 1443, L-1014 Luxembourg
T : +352 494848 1, F : +352 494848 2900,
www.pwc.lu
Cabinet de révision agréé. Expert-comptable (auto-
risation gouvernementale n°10028256)
R.C.S. Luxembourg B 65 477 - TVA LU25482518
6PricewaterhouseCoopers (2023), Use of Data Analytics and Artificial In-
telligence in Luxembourg, The age of generative AI, www.pwc.lu/en/ad-
visory/digital-tech-impact/analytics/data-analytics-and-ai-survey-
luxembourg- 2023.html.
29
L’IA, la Blockchain et les
Fintechs : l’ère de la finance
intelligente
Emilie Allaert, Fondatrice et CEO,
Digital Minds SARL
30
Depuis la percée de ChatGPT, l'intelligence artifi-
cielle occupe une place centrale dans toutes les con-
versations et est devenue un élément clé des straté-
gies d'innovation au sein du milieu financier, en
pleine mutation depuis quelques années. En effet,
le secteur financier semble jouer un rôle de cataly-
seur dans l'adoption de nouvelles technologies. Se
pose alors la question de savoir si ChatGPT repré-
sente une révolution technologique ou simplement
une avancée dans une technologie déjà établie.
Pour commencer, il est nécessaire de définir ce
qu'est une « fintech » ou « Financial Technology ».
Ces entreprises spécialisées dans le secteur finan-
cier répondent aux défis imposés par un monde de
plus en plus réglementé, une clientèle en constante
évolution et des prises de conscience qui influen-
cent les comportements d'investissement. Les fin-
techs exploitent différentes technologies, utilisées
individuellement ou combinées, afin de répondre à
diverses problématiques. Plus qu’un mot, c’est une
variété d’acteurs ciblés par cette évolution et tirant
parti de ces avancées. Les secteurs de la gestion
d'actifs, de l'assurance et de la conformité, entre
autres, peuvent bénéficier de ces innovations pour
améliorer leurs processus et faire évoluer leur offre
de services. Ainsi, on constate qu’un accès aux ser-
vices financiers est désormais possible pour les
non-bancarisés, par exemple, et les services
Emilie Allaert
31
répondent de façon plus adéquate aux besoins des
équipes et des clients.
Les technologies utilisées sont variées, parmi elles
se trouvent l'analyse des big data, le cloud compu-
ting, les robots-conseillers, l'intelligence artificielle
et la technologie des registres distribués (DLT ou
blockchain), ou encore l'automatisation des proces-
sus (RPA). Ces technologies aboutissent à des résul-
tats très diversifiés. En ce qui concerne la gestion
d’actifs, on note une démocratisation des investis-
sements, l’émergence de nouvelles sources de fi-
nancement et surtout de nouveaux instruments fi-
nanciers, comportant parfois des risques associés
parfois non maitrisés. Les technologies permettent
d’améliorer les conseils à l’investissement, favori-
sent une concurrence plus développée et permet la
prise en compte de facteurs jusque-là non inté-
grables dans les stratégies d’investissement (impact
ESG notamment).
En ce qui concerne l’assurance, l’utilisation des
données et l’intelligence artificielle permettent, en
étudiant le comportement des consommateurs, de
développer des produits adaptés et d’encourager
des habitudes de vie bénéfiques aux assurés
(sports, hygiène alimentaire, sécurité, image satelli-
taire dans le cas de catastrophes climatiques).
Dans le domaine réglementaire, qui ne cesse de
croître, une veille approfondie est nécessaire et
32
exige des ressources toujours plus nombreuses et
formées. L’utilisation des innovations technolo-
giques favorise une analyse d’impact plus approfon-
die et objective, réduisant les risques d’erreurs et
automatisant des processus qui peuvent se révéler
fastidieux. Dès lors, les professionnels actifs dans
le domaine de la conformité peuvent se concentrer
davantage sur la relation humaine et l’expérience
client. L’humain intervient pour expliquer les résul-
tats et fournir des indications sur la résolution des
problèmes identifiés.
L’intelligence artificielle, lorsqu’elle est utilisée
seule, possède une certaine puissance, mais elle at-
teint son plein potentiel lorsqu'elle est associée à
des données massives (big data) ou à la technologie
des registres distribués, qui donne accès à des mil-
lions de données pouvant être utilisées pour établir
des modèles puissants tout en assurant leur traça-
bilité et leur véracité.
Chaque nouvelle technologie suscite des question-
nements, et l'intelligence artificielle n'échappe pas à
cette règle, notamment en ce qui concerne le risque
de remplacer l'humain par la technologie. L'intelli-
gence artificielle comporte de nombreuses facettes
et applications qui sont appelées à remplacer l'hu-
main dans les tâches hautement automatisables et
à faible valeur ajoutée, car l'humain est attendu
pour son aspect relationnel. Il doit être en mesure
d'expliquer les résultats obtenus et de guider le
Emilie Allaert
33
client pour optimiser ses processus et ses politiques
d'investissement, par exemple.
Bien que l’intelligence artificielle, incarnée par
ChatGPT, est en plein essor depuis le début de l'an-
née 2023, il ne s’agit là que de la partie émergée de
l’iceberg. En effet, la technologie a connu un déve-
loppement quasi-constant depuis les années 1950,
avec de nombreuses avancées connues de tous. Les
craintes actuelles n’avaient alors pas leurs places
car les innovations telles que Sophia le robot huma-
noïde, Siri l’assistant intelligent d’Apple ou les ordi-
nateurs battant des joueurs de Go semblaient anec-
dotiques et étaient perçues comme des complé-
ments dans notre vie plutôt que des assistants ca-
pables de nous remplacer. Cela reste toujours vrai,
car, comme pour toute technologie, des dérives peu-
vent exister, mais l’éducation est essentielle pour en
tirer parti de manière bénéfique pour tous. Les ap-
plications dans le domaine financier le démontrent,
où la technologie est utilisée depuis une dizaine
d’années pour créer des solutions innovantes, qui
se révèlent être des alliées pour les employés et les
clients, apportant des gains financiers, des proces-
sus efficients et une revalorisation des tâches.
Notre société doit permettre à tous, experts, grand
public, professionnels, jeunes et moins jeunes, de
se former sur les technologies concernées afin de les
appréhender et de les utiliser en toute sécurité.
L’humain possède une capacité d’évolution,
34
d’émotions et d’interactions qui lui est propre. Une
force qui doit rester préservée. La peur ne doit pas
devenir son pire ennemi, car l’innovation est dans
notre essence et doit le rester. L’innovation peut ré-
soudre des problématiques plus grandes, et peut
contribuer à réduire les inégalités, notamment en
ouvrant l’accès au plus grand nombre à des services
jusque-là réservés à une partie de la population.
35
L’éthique face à l’intelligence
artificielle
Jean-Jacques Rommes, Président du Conseil
Scientifique de la Fondation IDEA a.s.b.l.
36
Il est généralement admis que l’intelligence artifi-
cielle lance ou lancera un défi éthique inédit. Mais
où ce défi est-il précisément ? En fait, il est multiple:
1. Pendant longtemps, l’humain a considéré qu’il
avait le monopole de l’intelligence et le statut parti-
culier de l’humain, l’humanisme, reste à la base de
presque toutes nos convictions morales et juri-
diques, mais cette vision est déjà contestée et elle le
sera encore une fois par l’IA.
2. La faculté unique des humains de percevoir le
monde est prédéterminée par des filtres incontour-
nables : les cinq sens, la façon du cerveau de tra-
duire l’information des sens en un modèle du
monde et les expériences précédentes du sujet. Ces
trois filtres sont radicalement différents de la façon
dont une IA recueille ses informations : l’accès à In-
ternet, les applications sur nos portables, la récolte
de données médicales par bracelet, tout est imagi-
nable pour permettre à une IA de « connaître » le
monde. La différence à l’entrée entraîne inévitable-
ment des différences à la sortie.
3. À partir du moment où l’Humanité déléguera de
plus en plus de tâches à l’intelligence artificielle,
celle-ci risque de les accomplir au mieux en igno-
rant nos aspirations vers le progrès humain. La re-
cherche d’efficacité tend cependant vite à ce que la
fin justifie les moyens ce qui est l’exact opposé d’une
Jean-Jacques Rommes
37
approche éthique.
4. L’impossibilité systémique à inventer une IA avec
une compétence morale a trois raisons :
− Le sens moral humain n’obéit pas à une
science axiomatique : il n’existe pas de sys-
tème formel de pensée morale.
− L’IA souffre d’un biais systémique dû à un
souci d’efficacité par rapport aux problèmes
qu’on lui pose. La question consiste à savoir
s’il est justifiable d’appliquer d’incontes-
tables vérités statistiques à une personne in-
dividuelle sans tenir compte des spécificités
– sociales, familiales, économiques ou autres
– du cas d’espèce.
− Il manque à l’intelligence artificielle l’intelli-
gence émotionnelle. Surtout, elle est privée
de l’empathie, sans laquelle la morale
n’existe plus.
5. Exiger que l’intelligence artificielle reste expli-
cable risque de freiner la recherche scientifique à
son égard et n’est sans doute pas réaliste au vu du
monde concurrentiel dans lequel évoluent ces re-
cherches. Par ailleurs, retraçables ex post ou non,
les décisions de l’IA resteront par principe imprévi-
sibles. Il est à craindre qu’avec les progrès techno-
logiques les machines deviennent de moins en
moins compréhensibles.
38
6. L’IA tend typiquement vers des résultats discri-
minatoires ou offensants. Elle est dépendante de
l’information à laquelle elle a accès et celle-ci n’est
jamais neutre. En prenant l’exemple sur la société
humaine et ses idéologies, l’IA risque d’en repro-
duire et amplifier les insuffisances alors que le sens
moral humain consiste justement à les corriger.
7. En cas d'erreurs, de mauvaises décisions ou de
préjudices causés par l’IA, la difficulté de savoir si
la faute incombe au modèle, aux concepteurs, aux
opérateurs ou aux utilisateurs est un problème pu-
rement juridique. Par contre, l’impossibilité d’une
machine ou d’un programme informatique à assu-
mer des décisions implique qu’un humain doit en
rester moralement responsable.
8. Les facultés proprement humaines sont insépa-
rablement liées au contenu subjectif de l'expérience
humaine, les « qualia » dont la machine est dépour-
vue. À supposer que le pas vers une IA vraiment
consciente soit franchi un jour, deux questions
éthiques entièrement nouvelles se posent : celle de
la justification de l’humanisme si la conscience phé-
noménale se sera révélée comme obéissant à des
énoncés de physique réduisant l’humain au niveau
d’un ordinateur neurologique et celle de notre res-
ponsabilité morale potentielle vis-à-vis de l’IA qui
sera devenue demanderesse d’altruisme.
Jean-Jacques Rommes
39
9. L’homme osera-t-il s’opposer à l’intelligence su-
périeure de la machine alors que l’erreur offre deux
options inégales : le décideur infortuné pourra dire
qu’il a été induit en erreur par la machine ou son
erreur sera sans excuse autre que sa faute person-
nelle.
10. Les textes générés par l’IA créeront une boucle
des connaissances et de l’histoire. À terme, notre
modèle du monde, ses vérités de toutes sortes et les
solutions à tous problèmes seront décrits pas des
IAs et risquent d’échapper à notre contrôle.
11. Le sujet de la Cyber Security changera de na-
ture, car l’IA sera utilisée par des criminels et des
États ennemis. Les dangers potentiels à cet égard
sont immenses. Cela impose aux concepteurs et
aux utilisateurs d’IA des responsabilités morales
d’un nouvel ordre.
12. À l’image de toutes les mutations technolo-
giques des derniers siècles, l’IA aussi entraînera
inévitablement des transformations sociétales ma-
jeures.
13. La question de savoir si on peut gérer tous ces
défis par un plus de réglementation dans un monde
qui reste fondamentalement concurrentiel n’est pas
nouvelle. En cette matière comme dans d’autres,
l’Europe prend le risque de devenir le moralisateur
40
de la planète à propos d’innovations faites par
d’autres.
41
IA et la législation européenne :
quo vadis ?
Prof. Dr. Michèle Finck, Professeure en Droit et
Intelligence artificielle, Université de Tübingen
42
L'intelligence artificielle (IA) étant de plus en plus
répandue dans divers secteurs, son impact pratique
est appelé à s'accroître dans les années à venir. Par
conséquent, une multitude de débats surgiront au
fur et à mesure que les économies et les sociétés
seront confrontées aux changements apportés par
l'IA. Ces débats engloberont inévitablement des
considérations d'ordre réglementaire. L'Union euro-
péenne (UE) a décidé de devancer certains de ces
développements en adoptant dès à présent un nou-
veau cadre législatif pour l'IA. Le règlement à venir
vise à encourager l'innovation dans le domaine de
l'IA et à établir un cadre réglementaire qui offre une
sécurité juridique pour le déploiement de l'IA tout
en tenant compte des risques individuels et socié-
taux associés à l'IA.
Il convient de noter que l'IA ne fonctionne pas de
manière isolée, mais qu'elle relève déjà des cadres
juridiques existants. Par conséquent, différentes
normes sont appliquées en fonction du type d'IA uti-
lisé et de son contexte spécifique. Néanmoins, l'opi-
nion la plus répandue est que des réglementations
supplémentaires sont nécessaires pour prendre en
compte les caractéristiques uniques de l'IA, en par-
ticulier sa nature de système d'apprentissage.
L'UE est actuellement en train de créer le premier
cadre législatif complet pour l'IA. En 2021, la Com-
mission européenne a présenté le projet de loi sur
Prof. Dr. Michèle Finck
43
l'intelligence artificielle (AIA7), qui est une proposi-
tion de règlement supranational. Par la suite, des
débats approfondis et des efforts de lobbying ont eu
lieu à Bruxelles, et les étapes finales du processus
législatif, connues sous le nom de trilogues, sont ac-
tuellement en cours. L'AIA devrait être adopté fin
2023 et devenir juridiquement contraignant en
2025. Son impact s'étendra au-delà de l'UE en rai-
son de sa large portée territoriale.
Alors que les dispositions spécifiques de la législa-
tion sont encore en cours de délibération par les
trois colégislateurs de l'UE, la structure générale de
la loi sur l'intelligence artificielle devrait rester in-
changée.
Tout d'abord, l'AIA préempte les mesures supplé-
mentaires prises par les États membres concernant
l'IA, avec une exception probable dans le domaine
de la protection des travailleurs. Cela signifie
qu'une fois l'AIA adopté, les États membres ne
pourront pas adopter de règles juridiques supplé-
mentaires sur l'IA. Cela souligne l'objectif de l'AIA
qui est de soutenir l'innovation et le marché inté-
rieur en évitant les obstacles réglementaires et la
fragmentation du marché.
Deuxièmement, l'AIA interdira certains systèmes
d'IA. La liste exacte des pratiques interdites reste à
définir, mais il est probable qu'elle inclue les
7 Artificial Intelligence Act
44
systèmes de manipulation, de notation sociale, de
reconnaissance faciale et de reconnaissance des
émotions.
Troisièmement, la majeure partie de l'accord régle-
mente les systèmes d'IA considérés comme présen-
tant un risque élevé, conformément au cadre juri-
dique européen existant en matière de responsabi-
lité du fait des produits. Cette approche exige que
les systèmes d'IA respectent diverses exigences.
Dans la pratique, de nombreux fournisseurs se
mettront en conformité en suivant des normes har-
monisées, bien que la détermination de ces normes
par ceux qui y sont soumis par la suite ait été un
point de discorde. Les fournisseurs d'IA à haut
risque doivent mettre en place un système de ges-
tion des risques, adhérer aux règles de gouvernance
des données, mettre en œuvre des mécanismes de
surveillance humaine et garantir l'exactitude, la ro-
bustesse et la sécurité de leurs systèmes.
Quatrièmement, le projet de la Commission prévoit
que certains systèmes d'IA, en particulier ceux con-
çus pour interagir avec les humains, tels que les
deep fakes ou les systèmes de catégorisation biomé-
trique, doivent informer les individus qu'ils intera-
gissent avec l'IA et non avec un être humain.
Cinquièmement, la loi sur l'intelligence artificielle
introduira des mesures supplémentaires, notam-
ment celles destinées à promouvoir l'innovation
Prof. Dr. Michèle Finck
45
dans l'UE et la mise en place d'organismes publics
chargés d'administrer la réglementation à venir.
En résumé, la loi sur l'intelligence artificielle sera
une réglementation essentielle pour les systèmes
d'intelligence artificielle. Son impact pratique sera
également déterminé par son interaction avec
d'autres normes, telles que la loi européenne sur la
protection des données. Les personnes soumises à
la nouvelle législation devront commencer à se pré-
parer et à adapter leurs processus pour se confor-
mer au cadre juridique à venir.
46
47
Références
48
Actualités et tendances n°27, Bulletin économique
de la Chambre de commerce (2022), Intelligence ar-
tificielle & Big data: guide pour naviguer dans la fu-
ture «data-driven economy» luxembourgeoise,
https://www.cc.lu/toute-linformation/publica-
tions/detail/actualite-tendances-n27-intelligence-
artificielle-big-data-guide-pour-naviguer-dans-la-
future-data-driven-economy-luxembourgeoise.
de Zwart, Gerben, Brian Frieser, and van Dijk
(2012), Private Equity Recommitment
Strategies for Institutional Investors, Financial Ana-
lysts Journal 68:3, 81-
99, doi: 10.2469/faj.v68.n3.1.
Kieffer, Emmanuel, Thomas Meyer, Georges
Gloukoviezoff, Hakan Lucius and Pascal Bouvry
(2023), Learning private equity recommitment strate-
gies for institutional investors, Front. Artif. Intell.,
Sec. Artificial Intelligence in Finance, Volume 6,
https://doi.org/10.3389/frai.2023.1014317.
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Oberli, Adrian (2015), Private Equity Asset Alloca-
tion: How to Recommit? , The Journal
of Private Equity 18: 9–22.
PricewaterhouseCoopers (2018), The macroeco-
nomic impact of AI.
49
PricewaterhouseCoopers (2023), Use of Data Analyt-
ics and Artificial Intelligence in Luxembourg, The age
of generative AI, www.pwc.lu/en/advisory/digital-
tech-impact/analytics/data-analytics-and-ai-sur-
vey-luxembourg- 2023.html.
50
51
Les auteurs
52
Emilie Allaert, Fondatrice et CEO, Digital Minds
SARL
Prof. Dr. Pascal Bouvry, Professeur en informa-
tique, responsable de l’infrastructure de high-per-
formance-computing et doyen de la Faculté des
Sciences, des Technologies et de Médecine de l’Uni-
versité du Luxembourg
Prof. Dr. Michèle Finck, Professeure en Droit et
Intelligence artificielle, Université de Tübingen
Dr. Emmanuel Kieffer, Chercheur au Département
d'Informatique de la Faculté des Sciences, de la
Technologie et de Médecine, Université du Luxem-
bourg
Thierry Kremser, Partner at PwC
Hoai Thu Nguyen Doan, Senior Economist à la
Chambre de Commerce du Grand-Duché
Laurent Probst, Partner at PwC
Jean-Jacques Rommes, Président du Conseil
Scientifique de la Fondation IDEA a.s.b.l.
53
54
Ce recueil est le fruit des discussions tenues lors d’un
atelier organisé par la Fondation IDEA asbl en juillet
2023, où les enjeux du déploiement de l’intelligence
artificielle (IA) dans le secteur financier et au-delà ont
été débattus. L’objectif de ce recueil est d’apporter des
éléments de réflexion sur les opportunités, défis et
menaces de l’utilisation de l’IA dans nos sociétés.
Fondation IDEA a.s.b.l | www.fondation-idea.lu

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  • 1. 1 L’ère de Opportunités et défis l’IA Emilie Allaert, Prof. Dr. Pascal Bouvry, Prof. Dr. Michèle Finck, Dr. Emmanuel Kieffer, Thierry Kremser, Hoai Thu Nguyen Doan, Laurent Probst, Jean-Jacques Rommes
  • 2.
  • 3. 1 En tant que laboratoire d’idées, la Fondation IDEA asbl s’est donné une mission qu’elle tâche de remplir depuis près de dix ans désormais, celle de susciter et d’alimenter un débat public de qualité par des propositions constructives pour répondre aux défis socioéconomiques d'envergure. Auteurs : Emilie Allaert, Prof. Dr. Pascal Bouvry, Prof. Dr. Michèle Finck, Dr. Emmanuel Kieffer, Thierry Kremser, Hoai Thu Nguyen Doan, Laurent Probst et Jean-Jacques Rommes. Édition : Vincent Hein, Ioana Pop. Illustration de couverture : Julien Mpia Massa © Novembre 2023, Fondation IDEA a.s.b.l. www.fondation-idea.lu | info@fondation-idea.lu
  • 5. 3 Introduction......................................................... 5 Démystifier l’intelligence artificielle ..................... 9 Utilisation de l’IA dans le domaine du « private equity » .............................................................. 15 AI in Luxembourg: increased maturity but still a lot to invest in................................................... 23 L’IA, la Blockchain et les Fintechs : l’ère de la finance intelligente............................................ 29 L’éthique face à l’intelligence artificielle............. 35 IA et la législation européenne : quo vadis ?....... 41 Références ......................................................... 47 Les auteurs........................................................ 51
  • 6. 4
  • 8. 6 Le recueil « L’ère de l’IA : opportunités et défis » est le fruit des discussions tenues lors d’un atelier or- ganisé par la Fondation IDEA asbl en juillet 2023, où les enjeux du déploiement de l’intelligence artifi- cielle (IA) dans le secteur financier et au-delà ont été débattus. L’objectif de ce recueil est d’apporter des éléments de réflexion sur les opportunités, défis et menaces de l’utilisation de l’IA dans nos sociétés. L’intelligence artificielle est un domaine de l’infor- matique qui vise à développer des systèmes ca- pables de simuler des processus cognitifs humains, comme la prise de décision. Avec ses progrès ré- cents, de nombreux secteurs d’activité de l’écono- mie sont en pleine transformation. Dans la finance comme dans les sciences, l’Homme devra apprendre à travailler avec l’IA à travers ses nombreuses ap- plications. L’IA joue un rôle clé dans l'exploitation des masses de données en les transformant en in- formations précieuses. Différentes techniques d'IA sont utilisées, allant du « Moteur de règles » au « Deep Learning », permettant de créer des ma- chines de plus en plus sophistiquées (voir le texte de Hoai Thu Nguyen Doan). Pour ce qui concerne le secteur financier, et plus spécifiquement l'investis- sement en « private equity » et en actifs réels une approche proposée consiste à utiliser l’IA pour ajus- ter de manière optimale les politiques d'investisse- ment. Plusieurs méthodes ont été développées pour concevoir ces règles, dont certaines utilisent des
  • 9. 7 stratégies d'apprentissage automatique. Une étude réalisée par l’Université du Luxembourg qui pro- pose d'utiliser un algorithme évolutif pour ap- prendre automatiquement des stratégies de réenga- gement dans le « private equity » est résumée dans ce recueil (voir le texte du Prof. Dr. Pascal Bouvry et du Dr. Emmanuel Kieffer). Si l’IA offrait de nombreuses opportunités de trans- formation et d’optimisation des activités finan- cières, il convient de regarder comment se posi- tionne le Luxembourg en termes d’utilisation des outils et de la disponibilité de main-d’œuvre quali- fiée dans le secteur. Il semblerait en effet, que le Luxembourg, qui a connu une utilisation croissante des outils d'IA externes, nécessite encore d'impor- tants investissements et gagnerait à développer une stratégie nationale pour tirer le meilleur profit de l’IA (voir le texte de Laurent Probst et Thierry Krem- ser). En outre, le déploiement des Fintechs est une tendance à suivre de près. Ces organisations exploi- tent différentes technologies telles que l'analyse des Big data, le cloud computing et l’IA, et recèlent un fort potentiel de diffusion de l’innovation pour amé- liorer les services financiers, notamment en permet- tant la démocratisation des investissements. En outre, l'éducation reste essentielle pour tirer parti des bienfaits de l’IA (voir le texte d’Emilie Allaert). Ces évolutions peuvent néanmoins soulever des questions sur le remplacement de l'humain par la
  • 10. 8 technologie. D’un point de vue éthique et social, le déploiement de l’IA remet en cause le monopole de l’intelligence, ce qui pourrait entrainer des ap- proches non éthiques en matière d’efficacité, de prise de décision et de responsabilité (voir le texte de Jean-Jacques Rommes). Cette incertitude pose également la question de la législation encadrant le développement de l'IA. En effet l’IA entraine des changements sociaux majeurs et il est difficile de la réglementer dans un environnement concurrentiel. À ce sujet, l'Union européenne a décidé d'adopter un nouveau cadre réglementaire afin d'encourager l'innovation tout en tenant compte des risques as- sociés. Ce cadre législatif vise à prendre en compte les caractéristiques uniques de l'IA et à harmoniser les normes réglementaires (voir le texte de la Prof. Dr. Michèle Finck).
  • 11. 9 Démystifier l’intelligence artificielle Hoai Thu Nguyen Doan, Senior Economist à la Chambre de Commerce du Grand-Duché
  • 12. 10 L’intégration des technologies digitales, concomi- tante à la baisse du coût de la collecte, du stockage et du traitement des données, a fait émerger un en- vironnement où mondes numérique et physique s’entrelacent. Une nouvelle révolution industrielle Selon l’International Data Corporation (lDC), entre 2021 et 2026, la quantité de données contenues dans la datasphère devrait évoluer à un taux de croissance annuel composé (TCAC1) de +21,2% et atteindrait plus de 221.000 exaoctets à l’horizon 2026. Si l’on considère que la plupart des smart- phones actuels détiennent une capacité de 64Go, alors un exaoctet représente plus de 16 millions de smartphones. Par conséquent, la datasphère en 2026 devrait faire l’équivalent de plus de 3.710 mil- liards de smartphones. Cette quantité colossale de données érige le 21ème siècle comme le théâtre d’une nouvelle révolution industrielle, celle du « Big Data ». L’IA transforme les données en or Le Big Data désigne l’existence d’un ensemble de données complexes, volumineuses et valorisables qui dépassent les capacités d’analyse du cerveau humain et des outils informatiques classiques. De telles mines d’informations sont aujourd’hui 1 Le TCAC estime la croissance moyenne annuelle entre 2 dates.
  • 13. Hoai Thu Nguyen Doan 11 devenues accessibles grâce à l’Intelligence artifi- cielle (ci-après « IA »). Cet « ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence2 » couvre un large éventail de technologies des plus anciennes aux plus nouvelles, et dont souvent le seul point commun réside dans le fait d’être guidées par des objectifs définis par la main humaine, tout en jouissant d’un certain degré d’autonomie. Diverses techniques pour imiter l’intelligence humaine Parmi les techniques d’IA les plus couramment uti- lisées, on compte le « Moteur de règles » (où la ma- chine est programmée pour faire une action définie lorsqu’un évènement en particulier se produit), le « Machine Learning » (entrainement des machines, sans programmation explicite, via l’apprentissage de modèles et la génération de prédictions basées sur des données) et le « Deep Learning » (imitation du fonctionnement des réseaux de neurones hu- mains). Des machines de plus en plus évoluées Ces techniques ont permis de développer des IA di- verses, parmi lesquelles, les « machines réactives » qui obéissent à un ensemble de règles prédéfinies (par exemple les logiciels de jeu d’échec et de Go : 2 Définition de l’Encyclopédie Larousse.
  • 14. 12 Deep Blue et Alpha Go), ou encore les « machines à mémoire limitée », plus évoluées, qui disposent d’une représentation préprogrammée du monde et prennent des décisions grâce aux expériences pas- sées et aux données présentes (ex : voitures auto- nomes, chatbots). La création de machines jouissant de la capacité de compréhension contextuelle, c’est-à-dire l’aptitude à comprendre que les êtres vivants sont doués de pensées et d’émotions, à former une représentation du monde et à agir de façon autonome en fonction de ces critères, est un objectif visé par la recherche. Ce type d’IA, nommé « Theory of mind machines », n’existe pour l’instant que dans la science-fiction (ex : le robot R2-D2 de l’univers Star Wars). Les in- telligences artificielles douées de conscience ne sont à l’heure actuelle que des produits de l’imagination. L’IA : un vecteur de progrès social… L’IA constitue le sésame d’une révolution indus- trielle réussie, ainsi qu’un vecteur de transforma- tions économiques et sociales. Elle peut apporter le progrès, via par exemple l’amélioration des diagnos- tics médicaux ou une meilleure utilisation des res- sources grâce aux technologies intelligentes (ex : villes intelligentes, agriculture durable, etc.). En outre, le déploiement de cette technologie fait appa- raitre de nouvelles industries, de nouveaux biens et services et de nouveaux processus à l’origine
  • 15. Hoai Thu Nguyen Doan 13 d’avantages compétitifs significatifs dans tous les secteurs économiques. C’est ainsi qu’une étude3 ré- alisée par McKinsey en 2018, montre que l’utilisa- tion des outils d’IA a le potentiel de contribuer à la croissance à hauteur de 3,5 à 5,8 trillons de dollars annuellement, dans 19 secteurs. …et de progrès économique L’IA a notamment la capacité de stimuler la crois- sance via 4 canaux principaux, à savoir les gains de productivité, l’automatisation intelligente (grâce à la mise en place de logiciels capables de résoudre des problèmes et d’évoluer par eux-mêmes en acqué- rant de l’expérience via les données), l’innovation en cascade dans d’anciens et nouveaux secteurs éco- nomiques et la création d’un cercle vertueux de croissance. Dans ce cadre, une étude4 réalisée par PricewaterhouseCoopers estime que le déploiement de l’IA pourrait contribuer à l’horizon 2030 à 14% de la croissance mondiale. Une opportunité à saisir pour les entreprises L’utilisation des applications relatives à l’IA com- porte de nombreux avantages pour les entreprises. Elle permet entre autres d’améliorer les processus de prise de décision, de sécuriser et d’augmenter les revenus tout en réduisant les coûts, d’optimiser 3 McKinsey (2018), Crossing the frontier collection. 4 PriceWaterhouseCoopers (2018), The macroeconomic impact of AI.
  • 16. 14 l’ensemble des processus de production, de réaliser des gains de productivité et de saisir de nouvelles opportunités d’affaires. En outre, comme l’IA sera à terme présente dans tous les pans de l’économie, les premières entreprises à l’intégrer dans leur stra- tégie de développement profiteront d’un bonus de compétitivité par rapport à leurs concurrentes (« first mover advantage »). Ainsi, selon l’étude « The State of AI in 2021 » réalisée au niveau mondial par le cabinet McKinsey, 67% des organisations inter- rogées ont constaté une augmentation de leurs re- venus d’au moins 5% directement attribuable à l’in- tégration de l’IA. De même, 79% ont déclaré une ré- duction de leurs coûts d’au moins 10% grâce à la mise en place de cette technologie. Pour aider les entreprises à saisir les tenants et aboutissants de la révolution du Big Data ainsi que ses bénéfices, la Chambre de Commerce a publié un « Actualité & tendances » qui démystifie l’IA. Le do- cument de travail est disponible gratuitement en ligne5. 5 Actualités et tendances n°27, Bulletin économique de la Chambre de commerce (2022), Intelligence artificielle & Big data: guide pour naviguer dans la future «data-driven economy» luxembourgeoise, https://www.cc.lu/toute-linformation/publications/detail/actualite- tendances-n27-intelligence-artificielle-big-data-guide-pour-naviguer- dans-la-future-data-driven-economy-luxembourgeoise.
  • 17. 15 Utilisation de l’IA dans le domaine du « private equity » Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer, Département d'Informatique de la Faculté des Sciences, de la Technologie et de Médecine, Université du Luxembourg
  • 18. 16 Au cours des dernières décennies, l'investissement en « private equity » » et actifs réels a gagné consi- dérablement en importance. Réaliser une exposi- tion élevée au « private equity » est un défi auquel sont confrontés les investisseurs institutionnels tels que les assureurs, les fonds de pension, les banques, les fondations et les fonds souverains qui, ces dernières années, ont constitué des allocations substantielles à ce véhicule d'investissement alter- natif. Acquérir, gérer et céder avec succès ces inves- tissements demande une expertise solide et des in- citations que la plupart des investisseurs institu- tionnels ne possèdent pas. C'est la raison pour la- quelle ces investisseurs préfèrent généralement in- vestir indirectement en tant que partenaires limités (LP) dans le « private equity » par le biais de fonds de partenariat limité (désignés ci-après sous le nom de « fonds »), dans lesquels ils s'engagent à investir une somme importante pour une période donnée. Les engagements envers les fonds sont en pratique immuables et le capital investi est appelé progressi- vement par la direction du fonds à sa seule discré- tion. En réalité, les appels de fonds ne peuvent pas être déterminés à l'avance, ce qui conduit à un ca- pital engagé mais non investi en attente d'être ap- pelé. De plus, le capital engagé ne sera générale- ment pas intégralement utilisé. Par conséquent, seuls entre 60 % et 70 % des engagements du fonds seront réellement investis dans le « private equity »
  • 19. Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer 17 et généreront un rendement conforme à ces actifs. Au fur et à mesure de l'avancement du fonds, il y aura également des distributions provenant de ces- sions anticipées. Ces flux de trésorerie entrants doi- vent être réinvestis dans de nouveaux fonds. Le travail fondateur de de Zwart, Brian Frieser et van Dijk (2012) constitue une première tentative ré- ussie de concevoir des stratégies de réengagement dynamiques. Au lieu de se baser sur des prévisions de flux de trésorerie pour résoudre, à chaque pé- riode, un problème d'optimisation de portefeuille à période unique, ils ont choisi de construire des fonctions de réengagement ne reposant que sur l'évolution actuelle et passée du portefeuille. Dans le même esprit, Oberli (2015) étend le travail de de Zwart à un portefeuille multi-classes d'actifs com- prenant des actions et des obligations. Ces deux dernières tentatives sont des contributions solides et en amélioration pour faire face à l'imprévisibilité des flux de trésorerie en générant des règles pour ajuster dynamiquement le degré d'investissement. Cette similarité avec la théorie du contrôle, c'est-à- dire un domaine traitant du contrôle des systèmes dynamiques dans les processus et machines, semble évidente. Nous visons à construire un sys- tème de contrôle en boucle fermée ou un régulateur pour amener la sortie du système à un état désiré et garantir un certain niveau de stabilité. Comme un système physique dans lequel l'environnement ne peut être perçu mais pas prédit, le système de
  • 20. 18 contrôle en « private equity » doit réagir pour com- penser toute déviation par rapport à la sortie cible. Néanmoins, un tel système de contrôle en « private equity » aurait de longs délais et ne serait pas auto- risé à dépasser la cible, avec le risque de créer des situations de pénurie de trésorerie. Les règles de réengagement proposées par de Zwart, Brian Frieser et van Dijk (2012) sont simples et très efficaces. Et si nous pouvions générer de telles ex- pressions de réengagement automatiquement et considérer que notre système de contrôle serait composé d'un ensemble de stratégies à appliquer dans des conditions de marché spécifiques ? Ap- prendre des fonctions mathématiques, c'est-à-dire des expressions symboliques, n'est pas un phéno- mène récent et a été largement étudié par les phy- siciens computationnels pour développer des mo- dèles compréhensibles en utilisant la régression symbolique. Les avancées récentes en matière d'ap- prentissage évolutif et d'optimisation basée sur la simulation ont ouvert la voie à de nouveaux para- digmes d'apprentissage. Nous proposons donc ici une démonstration de faisabilité consistant à ap- prendre des expressions mathématiques symbo- liques dans le même format que celui proposé par de Zwart, Brian Frieser et van Dijk (2012) et Oberli (2015) à l'aide d'un algorithme évolutif (voir Freitas (2003)). Ces expressions symboliques seront en- suite évaluées par le biais de simulations intensives
  • 21. Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer 19 afin de mesurer leurs performances en termes de maintien d'un système de contrôle stable et efficace pour maintenir l'allocation en « private equity » au niveau cible. Dans ce travail, nous avons proposé d'apprendre automatiquement ces stratégies de réengagement à l'aide d'un algorithme bio-inspiré. Appelé « appren- tissage évolutif », un algorithme de programmation génétique assemble des stratégies de réengagement basées sur une représentation en arbre de syntaxe abstraite. Cet algorithme s'appuie sur la théorie de l'évolution de Darwin pour imiter la sélection natu- relle en générant de génération en génération des stratégies nouvelles et prometteuses garantissant un réengagement efficace à chaque période. En uti- lisant une approche bi-objectif, un ensemble de stratégies de réengagement de Pareto a été généré et comparé à l'œuvre fondatrice de de Zwart publiée en 2012. Les résultats empiriques obtenus à l'aide de simulations intensives ont montré que le degré d'investissement moyen maximal peut être considé- rablement maximisé tout en offrant différentes al- ternatives en termes de sur-engagement lié au ca- pital initial. Contrairement au sur-engagement statique observé jusqu'à présent, les stratégies obtenues par l'évolu- tion et validées par des simulations offrent un véri- table aperçu en termes de capital supplémentaire
  • 22. 20 injecté dans les portefeuilles au cours de leur durée de vie. Les sur-engagements statiques appliqués à chaque période sont assez difficiles à mesurer en termes de capital initial et ne reflètent pas réelle- ment le capital réinjecté. Des investigations supplémentaires seront réalisées avec des portefeuilles multi-actifs pour tirer parti des différents niveaux de liquidité apportés par les actifs du marché public. Remerciements Le Prof. Dr. Pascal Bouvry et le Dr. Emmanuel Kieffer remercient le soutien de la Banque européenne d'investissement à travers son programme STAREBEI et de la société LuxProvide à travers son programme d'accès anticipé au supercalculateur national Meluxina. Références de Zwart, Gerben, Brian Frieser, and van Dijk (2012), Private Equity Recommitment Strategies for Institutional Investors, Financial Ana- lysts Journal 68:3, 81- 99, doi: 10.2469/faj.v68.n3.1.
  • 23. Prof. Dr. Pascal Bouvry & Dr. Emmanuel Kieffer 21 Kieffer, Emmanuel, Thomas Meyer, Georges Gloukoviezoff, Hakan Lucius and Pascal Bouvry (2023), Learning private equity recommitment strate- gies for institutional investors, Front. Artif. Intell., Sec. Artificial Intelligence in Finance, Volume 6, https://doi.org/10.3389/frai.2023.1014317 Oberli, Adrian (2015), Private Equity Asset Alloca- tion: How to Recommit? , The Journal of Private Equity 18: 9–22.
  • 24. 22
  • 25. 23 AI in Luxembourg: increased maturity but still a lot to invest in Laurent Probst & Thierry Kremser, Partners at PricewaterhouseCoopers
  • 26. 24 2023 has been a formidable year for AI. Elaborated reports with a single click, studio quality photo- graphs with a simple text query - we are truly living in the age of generative AI. Luxembourg’s compa- nies are already investigating the use of this tech- nology as part of their broader strategy around data & AI. PwC Luxembourg has conducted the third edition of this study to generate insights on the use of Data & AI technologies in Luxembourg. The last study was conducted in 2021 and highlighted how Lux- embourg is increasingly data-driven, while facing a challenging talent and investment landscape. Things are progressing at astonishing speed. With new EU Regulations expected by the end of 2023 and the explosion of generative AI solutions on the market, the time is right to look at this topic again. Increased maturity of the AI market in Luxem- bourg The market for AI is constantly evolving, with new tools and technologies being continuously devel- oped. Our survey also assessed the maturity of the AI market and identified trends and changes over time. One of the key findings of the survey is that external AI tools are more commonly used. In 2021, only 20% of organizations surveyed reported using external AI tools, while in 2023 this figure increased
  • 27. Laurent Probst & Thierry Kremser 25 to 35%. In contrast, the use of internal AI tools de- creased from 50% in 2021 to 27% in 2023. This sug- gests that organizations are increasingly relying on external AI tools to meet their needs, rather than developing their own in-house solutions, as the market for those solutions has become more ma- ture. The survey also found that there has been an in- creased drive towards investment in data and AI so- lutions. Specifically, 16% of organizations surveyed indicated that they would allocate more than 5% of their turnover to these solutions. Luxembourg’s
  • 28. 26 organizations acknowledge the importance of in- vesting in data and AI as a way to drive innovation and reduce costs. The age of generative AI The survey found that the current hype around gen- erative AI is only partially translating into interest among Luxembourg's companies. Specifically, 27% of respondents indicated that they would be inter- ested in using generative AI for text generation, while only 4% expressed interest in using image generation or other forms of generative AI. Interest in natural language processing (NLP) was higher still. Uncertainty regarding AI legislation is still high Given the significance of the financial services sec- tor in Luxembourg, it may be considered a surprise that there is a high level of uncertainty regarding the upcoming AI legislation in Europe. While there is general acknowledgement on the potential impact and additional needs towards compliance in this domain, organizations in Luxembourg still need to gain a level of maturity in this regard.
  • 29. Laurent Probst & Thierry Kremser 27 Strong differences between sectors Our increased rate of responses has allowed us to look at more detail into the use of data & AI of dif- ferent sectors in Luxembourg. It is notable that not all financial services are the same, our respondents from the Funds Industry (in graphics referred as As- set and Wealth Management) are reporting less ma- turity in topics around data governance and use of machine learning, compared to banking and insur- ance. The public sector is much more inclined to use internally developed POCs, while less frequently using data visualization and storytelling as tech- niques. The detailed responses are found in the full survey results. It’s still early days in the age of generative AI The age of generative AI has just begun, with our surveyed companies being interested in the topic, but not yet ready to incorporate the technology deeply into their daily operations. This is not sur- prising, as there are numerous open topics around the trustworthiness and compliance of the applica- tions, as well as discussions of lawmakers on their regulation in Europe. Despite the current hype, Luxembourg’s organizations will need to investigate and experiment further. We are keenly interested in following up on this topic in a future edition of the survey.
  • 30. 28 For further details and data, we recommend you to read the Use of Data Analytics and Artificial Intelli- gence in Luxembourg - 2023 edition - The age of generative AI6. PricewaterhouseCoopers, Société coopérative, 2 rue Gerhard Mercator, B.P. 1443, L-1014 Luxembourg T : +352 494848 1, F : +352 494848 2900, www.pwc.lu Cabinet de révision agréé. Expert-comptable (auto- risation gouvernementale n°10028256) R.C.S. Luxembourg B 65 477 - TVA LU25482518 6PricewaterhouseCoopers (2023), Use of Data Analytics and Artificial In- telligence in Luxembourg, The age of generative AI, www.pwc.lu/en/ad- visory/digital-tech-impact/analytics/data-analytics-and-ai-survey- luxembourg- 2023.html.
  • 31. 29 L’IA, la Blockchain et les Fintechs : l’ère de la finance intelligente Emilie Allaert, Fondatrice et CEO, Digital Minds SARL
  • 32. 30 Depuis la percée de ChatGPT, l'intelligence artifi- cielle occupe une place centrale dans toutes les con- versations et est devenue un élément clé des straté- gies d'innovation au sein du milieu financier, en pleine mutation depuis quelques années. En effet, le secteur financier semble jouer un rôle de cataly- seur dans l'adoption de nouvelles technologies. Se pose alors la question de savoir si ChatGPT repré- sente une révolution technologique ou simplement une avancée dans une technologie déjà établie. Pour commencer, il est nécessaire de définir ce qu'est une « fintech » ou « Financial Technology ». Ces entreprises spécialisées dans le secteur finan- cier répondent aux défis imposés par un monde de plus en plus réglementé, une clientèle en constante évolution et des prises de conscience qui influen- cent les comportements d'investissement. Les fin- techs exploitent différentes technologies, utilisées individuellement ou combinées, afin de répondre à diverses problématiques. Plus qu’un mot, c’est une variété d’acteurs ciblés par cette évolution et tirant parti de ces avancées. Les secteurs de la gestion d'actifs, de l'assurance et de la conformité, entre autres, peuvent bénéficier de ces innovations pour améliorer leurs processus et faire évoluer leur offre de services. Ainsi, on constate qu’un accès aux ser- vices financiers est désormais possible pour les non-bancarisés, par exemple, et les services
  • 33. Emilie Allaert 31 répondent de façon plus adéquate aux besoins des équipes et des clients. Les technologies utilisées sont variées, parmi elles se trouvent l'analyse des big data, le cloud compu- ting, les robots-conseillers, l'intelligence artificielle et la technologie des registres distribués (DLT ou blockchain), ou encore l'automatisation des proces- sus (RPA). Ces technologies aboutissent à des résul- tats très diversifiés. En ce qui concerne la gestion d’actifs, on note une démocratisation des investis- sements, l’émergence de nouvelles sources de fi- nancement et surtout de nouveaux instruments fi- nanciers, comportant parfois des risques associés parfois non maitrisés. Les technologies permettent d’améliorer les conseils à l’investissement, favori- sent une concurrence plus développée et permet la prise en compte de facteurs jusque-là non inté- grables dans les stratégies d’investissement (impact ESG notamment). En ce qui concerne l’assurance, l’utilisation des données et l’intelligence artificielle permettent, en étudiant le comportement des consommateurs, de développer des produits adaptés et d’encourager des habitudes de vie bénéfiques aux assurés (sports, hygiène alimentaire, sécurité, image satelli- taire dans le cas de catastrophes climatiques). Dans le domaine réglementaire, qui ne cesse de croître, une veille approfondie est nécessaire et
  • 34. 32 exige des ressources toujours plus nombreuses et formées. L’utilisation des innovations technolo- giques favorise une analyse d’impact plus approfon- die et objective, réduisant les risques d’erreurs et automatisant des processus qui peuvent se révéler fastidieux. Dès lors, les professionnels actifs dans le domaine de la conformité peuvent se concentrer davantage sur la relation humaine et l’expérience client. L’humain intervient pour expliquer les résul- tats et fournir des indications sur la résolution des problèmes identifiés. L’intelligence artificielle, lorsqu’elle est utilisée seule, possède une certaine puissance, mais elle at- teint son plein potentiel lorsqu'elle est associée à des données massives (big data) ou à la technologie des registres distribués, qui donne accès à des mil- lions de données pouvant être utilisées pour établir des modèles puissants tout en assurant leur traça- bilité et leur véracité. Chaque nouvelle technologie suscite des question- nements, et l'intelligence artificielle n'échappe pas à cette règle, notamment en ce qui concerne le risque de remplacer l'humain par la technologie. L'intelli- gence artificielle comporte de nombreuses facettes et applications qui sont appelées à remplacer l'hu- main dans les tâches hautement automatisables et à faible valeur ajoutée, car l'humain est attendu pour son aspect relationnel. Il doit être en mesure d'expliquer les résultats obtenus et de guider le
  • 35. Emilie Allaert 33 client pour optimiser ses processus et ses politiques d'investissement, par exemple. Bien que l’intelligence artificielle, incarnée par ChatGPT, est en plein essor depuis le début de l'an- née 2023, il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg. En effet, la technologie a connu un déve- loppement quasi-constant depuis les années 1950, avec de nombreuses avancées connues de tous. Les craintes actuelles n’avaient alors pas leurs places car les innovations telles que Sophia le robot huma- noïde, Siri l’assistant intelligent d’Apple ou les ordi- nateurs battant des joueurs de Go semblaient anec- dotiques et étaient perçues comme des complé- ments dans notre vie plutôt que des assistants ca- pables de nous remplacer. Cela reste toujours vrai, car, comme pour toute technologie, des dérives peu- vent exister, mais l’éducation est essentielle pour en tirer parti de manière bénéfique pour tous. Les ap- plications dans le domaine financier le démontrent, où la technologie est utilisée depuis une dizaine d’années pour créer des solutions innovantes, qui se révèlent être des alliées pour les employés et les clients, apportant des gains financiers, des proces- sus efficients et une revalorisation des tâches. Notre société doit permettre à tous, experts, grand public, professionnels, jeunes et moins jeunes, de se former sur les technologies concernées afin de les appréhender et de les utiliser en toute sécurité. L’humain possède une capacité d’évolution,
  • 36. 34 d’émotions et d’interactions qui lui est propre. Une force qui doit rester préservée. La peur ne doit pas devenir son pire ennemi, car l’innovation est dans notre essence et doit le rester. L’innovation peut ré- soudre des problématiques plus grandes, et peut contribuer à réduire les inégalités, notamment en ouvrant l’accès au plus grand nombre à des services jusque-là réservés à une partie de la population.
  • 37. 35 L’éthique face à l’intelligence artificielle Jean-Jacques Rommes, Président du Conseil Scientifique de la Fondation IDEA a.s.b.l.
  • 38. 36 Il est généralement admis que l’intelligence artifi- cielle lance ou lancera un défi éthique inédit. Mais où ce défi est-il précisément ? En fait, il est multiple: 1. Pendant longtemps, l’humain a considéré qu’il avait le monopole de l’intelligence et le statut parti- culier de l’humain, l’humanisme, reste à la base de presque toutes nos convictions morales et juri- diques, mais cette vision est déjà contestée et elle le sera encore une fois par l’IA. 2. La faculté unique des humains de percevoir le monde est prédéterminée par des filtres incontour- nables : les cinq sens, la façon du cerveau de tra- duire l’information des sens en un modèle du monde et les expériences précédentes du sujet. Ces trois filtres sont radicalement différents de la façon dont une IA recueille ses informations : l’accès à In- ternet, les applications sur nos portables, la récolte de données médicales par bracelet, tout est imagi- nable pour permettre à une IA de « connaître » le monde. La différence à l’entrée entraîne inévitable- ment des différences à la sortie. 3. À partir du moment où l’Humanité déléguera de plus en plus de tâches à l’intelligence artificielle, celle-ci risque de les accomplir au mieux en igno- rant nos aspirations vers le progrès humain. La re- cherche d’efficacité tend cependant vite à ce que la fin justifie les moyens ce qui est l’exact opposé d’une
  • 39. Jean-Jacques Rommes 37 approche éthique. 4. L’impossibilité systémique à inventer une IA avec une compétence morale a trois raisons : − Le sens moral humain n’obéit pas à une science axiomatique : il n’existe pas de sys- tème formel de pensée morale. − L’IA souffre d’un biais systémique dû à un souci d’efficacité par rapport aux problèmes qu’on lui pose. La question consiste à savoir s’il est justifiable d’appliquer d’incontes- tables vérités statistiques à une personne in- dividuelle sans tenir compte des spécificités – sociales, familiales, économiques ou autres – du cas d’espèce. − Il manque à l’intelligence artificielle l’intelli- gence émotionnelle. Surtout, elle est privée de l’empathie, sans laquelle la morale n’existe plus. 5. Exiger que l’intelligence artificielle reste expli- cable risque de freiner la recherche scientifique à son égard et n’est sans doute pas réaliste au vu du monde concurrentiel dans lequel évoluent ces re- cherches. Par ailleurs, retraçables ex post ou non, les décisions de l’IA resteront par principe imprévi- sibles. Il est à craindre qu’avec les progrès techno- logiques les machines deviennent de moins en moins compréhensibles.
  • 40. 38 6. L’IA tend typiquement vers des résultats discri- minatoires ou offensants. Elle est dépendante de l’information à laquelle elle a accès et celle-ci n’est jamais neutre. En prenant l’exemple sur la société humaine et ses idéologies, l’IA risque d’en repro- duire et amplifier les insuffisances alors que le sens moral humain consiste justement à les corriger. 7. En cas d'erreurs, de mauvaises décisions ou de préjudices causés par l’IA, la difficulté de savoir si la faute incombe au modèle, aux concepteurs, aux opérateurs ou aux utilisateurs est un problème pu- rement juridique. Par contre, l’impossibilité d’une machine ou d’un programme informatique à assu- mer des décisions implique qu’un humain doit en rester moralement responsable. 8. Les facultés proprement humaines sont insépa- rablement liées au contenu subjectif de l'expérience humaine, les « qualia » dont la machine est dépour- vue. À supposer que le pas vers une IA vraiment consciente soit franchi un jour, deux questions éthiques entièrement nouvelles se posent : celle de la justification de l’humanisme si la conscience phé- noménale se sera révélée comme obéissant à des énoncés de physique réduisant l’humain au niveau d’un ordinateur neurologique et celle de notre res- ponsabilité morale potentielle vis-à-vis de l’IA qui sera devenue demanderesse d’altruisme.
  • 41. Jean-Jacques Rommes 39 9. L’homme osera-t-il s’opposer à l’intelligence su- périeure de la machine alors que l’erreur offre deux options inégales : le décideur infortuné pourra dire qu’il a été induit en erreur par la machine ou son erreur sera sans excuse autre que sa faute person- nelle. 10. Les textes générés par l’IA créeront une boucle des connaissances et de l’histoire. À terme, notre modèle du monde, ses vérités de toutes sortes et les solutions à tous problèmes seront décrits pas des IAs et risquent d’échapper à notre contrôle. 11. Le sujet de la Cyber Security changera de na- ture, car l’IA sera utilisée par des criminels et des États ennemis. Les dangers potentiels à cet égard sont immenses. Cela impose aux concepteurs et aux utilisateurs d’IA des responsabilités morales d’un nouvel ordre. 12. À l’image de toutes les mutations technolo- giques des derniers siècles, l’IA aussi entraînera inévitablement des transformations sociétales ma- jeures. 13. La question de savoir si on peut gérer tous ces défis par un plus de réglementation dans un monde qui reste fondamentalement concurrentiel n’est pas nouvelle. En cette matière comme dans d’autres, l’Europe prend le risque de devenir le moralisateur
  • 42. 40 de la planète à propos d’innovations faites par d’autres.
  • 43. 41 IA et la législation européenne : quo vadis ? Prof. Dr. Michèle Finck, Professeure en Droit et Intelligence artificielle, Université de Tübingen
  • 44. 42 L'intelligence artificielle (IA) étant de plus en plus répandue dans divers secteurs, son impact pratique est appelé à s'accroître dans les années à venir. Par conséquent, une multitude de débats surgiront au fur et à mesure que les économies et les sociétés seront confrontées aux changements apportés par l'IA. Ces débats engloberont inévitablement des considérations d'ordre réglementaire. L'Union euro- péenne (UE) a décidé de devancer certains de ces développements en adoptant dès à présent un nou- veau cadre législatif pour l'IA. Le règlement à venir vise à encourager l'innovation dans le domaine de l'IA et à établir un cadre réglementaire qui offre une sécurité juridique pour le déploiement de l'IA tout en tenant compte des risques individuels et socié- taux associés à l'IA. Il convient de noter que l'IA ne fonctionne pas de manière isolée, mais qu'elle relève déjà des cadres juridiques existants. Par conséquent, différentes normes sont appliquées en fonction du type d'IA uti- lisé et de son contexte spécifique. Néanmoins, l'opi- nion la plus répandue est que des réglementations supplémentaires sont nécessaires pour prendre en compte les caractéristiques uniques de l'IA, en par- ticulier sa nature de système d'apprentissage. L'UE est actuellement en train de créer le premier cadre législatif complet pour l'IA. En 2021, la Com- mission européenne a présenté le projet de loi sur
  • 45. Prof. Dr. Michèle Finck 43 l'intelligence artificielle (AIA7), qui est une proposi- tion de règlement supranational. Par la suite, des débats approfondis et des efforts de lobbying ont eu lieu à Bruxelles, et les étapes finales du processus législatif, connues sous le nom de trilogues, sont ac- tuellement en cours. L'AIA devrait être adopté fin 2023 et devenir juridiquement contraignant en 2025. Son impact s'étendra au-delà de l'UE en rai- son de sa large portée territoriale. Alors que les dispositions spécifiques de la législa- tion sont encore en cours de délibération par les trois colégislateurs de l'UE, la structure générale de la loi sur l'intelligence artificielle devrait rester in- changée. Tout d'abord, l'AIA préempte les mesures supplé- mentaires prises par les États membres concernant l'IA, avec une exception probable dans le domaine de la protection des travailleurs. Cela signifie qu'une fois l'AIA adopté, les États membres ne pourront pas adopter de règles juridiques supplé- mentaires sur l'IA. Cela souligne l'objectif de l'AIA qui est de soutenir l'innovation et le marché inté- rieur en évitant les obstacles réglementaires et la fragmentation du marché. Deuxièmement, l'AIA interdira certains systèmes d'IA. La liste exacte des pratiques interdites reste à définir, mais il est probable qu'elle inclue les 7 Artificial Intelligence Act
  • 46. 44 systèmes de manipulation, de notation sociale, de reconnaissance faciale et de reconnaissance des émotions. Troisièmement, la majeure partie de l'accord régle- mente les systèmes d'IA considérés comme présen- tant un risque élevé, conformément au cadre juri- dique européen existant en matière de responsabi- lité du fait des produits. Cette approche exige que les systèmes d'IA respectent diverses exigences. Dans la pratique, de nombreux fournisseurs se mettront en conformité en suivant des normes har- monisées, bien que la détermination de ces normes par ceux qui y sont soumis par la suite ait été un point de discorde. Les fournisseurs d'IA à haut risque doivent mettre en place un système de ges- tion des risques, adhérer aux règles de gouvernance des données, mettre en œuvre des mécanismes de surveillance humaine et garantir l'exactitude, la ro- bustesse et la sécurité de leurs systèmes. Quatrièmement, le projet de la Commission prévoit que certains systèmes d'IA, en particulier ceux con- çus pour interagir avec les humains, tels que les deep fakes ou les systèmes de catégorisation biomé- trique, doivent informer les individus qu'ils intera- gissent avec l'IA et non avec un être humain. Cinquièmement, la loi sur l'intelligence artificielle introduira des mesures supplémentaires, notam- ment celles destinées à promouvoir l'innovation
  • 47. Prof. Dr. Michèle Finck 45 dans l'UE et la mise en place d'organismes publics chargés d'administrer la réglementation à venir. En résumé, la loi sur l'intelligence artificielle sera une réglementation essentielle pour les systèmes d'intelligence artificielle. Son impact pratique sera également déterminé par son interaction avec d'autres normes, telles que la loi européenne sur la protection des données. Les personnes soumises à la nouvelle législation devront commencer à se pré- parer et à adapter leurs processus pour se confor- mer au cadre juridique à venir.
  • 48. 46
  • 50. 48 Actualités et tendances n°27, Bulletin économique de la Chambre de commerce (2022), Intelligence ar- tificielle & Big data: guide pour naviguer dans la fu- ture «data-driven economy» luxembourgeoise, https://www.cc.lu/toute-linformation/publica- tions/detail/actualite-tendances-n27-intelligence- artificielle-big-data-guide-pour-naviguer-dans-la- future-data-driven-economy-luxembourgeoise. de Zwart, Gerben, Brian Frieser, and van Dijk (2012), Private Equity Recommitment Strategies for Institutional Investors, Financial Ana- lysts Journal 68:3, 81- 99, doi: 10.2469/faj.v68.n3.1. Kieffer, Emmanuel, Thomas Meyer, Georges Gloukoviezoff, Hakan Lucius and Pascal Bouvry (2023), Learning private equity recommitment strate- gies for institutional investors, Front. Artif. Intell., Sec. Artificial Intelligence in Finance, Volume 6, https://doi.org/10.3389/frai.2023.1014317. McKinsey (2018), Crossing the frontier collection. Oberli, Adrian (2015), Private Equity Asset Alloca- tion: How to Recommit? , The Journal of Private Equity 18: 9–22. PricewaterhouseCoopers (2018), The macroeco- nomic impact of AI.
  • 51. 49 PricewaterhouseCoopers (2023), Use of Data Analyt- ics and Artificial Intelligence in Luxembourg, The age of generative AI, www.pwc.lu/en/advisory/digital- tech-impact/analytics/data-analytics-and-ai-sur- vey-luxembourg- 2023.html.
  • 52. 50
  • 54. 52 Emilie Allaert, Fondatrice et CEO, Digital Minds SARL Prof. Dr. Pascal Bouvry, Professeur en informa- tique, responsable de l’infrastructure de high-per- formance-computing et doyen de la Faculté des Sciences, des Technologies et de Médecine de l’Uni- versité du Luxembourg Prof. Dr. Michèle Finck, Professeure en Droit et Intelligence artificielle, Université de Tübingen Dr. Emmanuel Kieffer, Chercheur au Département d'Informatique de la Faculté des Sciences, de la Technologie et de Médecine, Université du Luxem- bourg Thierry Kremser, Partner at PwC Hoai Thu Nguyen Doan, Senior Economist à la Chambre de Commerce du Grand-Duché Laurent Probst, Partner at PwC Jean-Jacques Rommes, Président du Conseil Scientifique de la Fondation IDEA a.s.b.l.
  • 55. 53
  • 56. 54 Ce recueil est le fruit des discussions tenues lors d’un atelier organisé par la Fondation IDEA asbl en juillet 2023, où les enjeux du déploiement de l’intelligence artificielle (IA) dans le secteur financier et au-delà ont été débattus. L’objectif de ce recueil est d’apporter des éléments de réflexion sur les opportunités, défis et menaces de l’utilisation de l’IA dans nos sociétés. Fondation IDEA a.s.b.l | www.fondation-idea.lu