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Chroniques de Fouesnant - ct0uof
1. La ballade bretonne " Komt ar Chapel "
Tout le crédit de ces illustres familles ne put sauver la tête de François de Rosmadec,
comte des Chapelles, frère, cadet de Sébastien, marquis de Rosmadec. Le comte des
Chapelles, bravant les édits rigoureux rendus contre le duel, avait secondé son cousin François
de Montmorency-Bouteville dans une rencontre sur la Place Royale, à Paris en 1627, avec
François de Bussy d'Amboise et Guy d'Harcourt. Arretés alors qu'ils cherchaient à gagner la
Flandre, des Chapelles et Bouteville furent décapités un mois plus tard en Place de Grève,
mourant au dire d'un grand prélat, " ce dernier en chrétien, l'autre en saint ".
La ballade bretonne " Kom.t ar Chapel ", publiée par Luzel sous ce titre, et par La
Villemarqué sous celui du " Page de Louis XIII » exprime l'impression vive que la triste fin
du jeune comte produisit en Bretagne. Les premiers vers de cette gwerz sont un vrai chefd'oeuvre de concision dramatique :
Komt ar Chapel, breur ar Markiz,
A zo prisoniet en Paris
Le Comte des Chapelles, le frère du Marquis,
Est prisonnier à Paris
Petra an torfet hen eus gret,
M'eo Komt ar Chapeloprisoniet ?
Quel crime a-t-il donc commis,
Le Comte des Chapelles, pour être prisonnier
Torfet awwalc'h hen euz gret,
Paj ar Roué gant han lazet !
Son crime est bien assez grand,
Il a tué le page du ROI !
Lazet gant han paj ar Roué,
En he bresanz, gant ha glezé
Il a tué le page du Roi,
En sa présence, avec son épée
Plongé dans un cachot, le comte des Chapelles implore, au dire du poète, la faveur de
pouvoir envoyer un message à son frère à Bodinio. Mais ce n'est pas le marquis, alors absent,
qui reçoit cet appel désespéré: C'est la marquise, Renée de Kerc'hoent. Elle se jette à l'instant
dans un carrosse et s'élance au galop sur la route de Paris. Les, gens de la capitale se demandaient l'un à l'autre :
"Qu'y a-t-il de nouveau dans cette ville, que le pavé tremble de la sorte ? et l'on répondait: Un beau carrosse passe ici, attelé de douze chevaux de lice; les goupilles en sont d'argent, les
portières d'or jaune, et dedans est une demoiselle, la plus belle princesse de Basse-Bretagne "
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2. Mais dans la version de La
Villemarqué, cette arrivée en grand arroi
est trop tardive. Renée de Kerc'hoent ne
débouche sur la Place de Grève que pour
être témoin du supplice de des Chapelles.
Ecartant prévôts et archers, elle s'élance
vers le condamné, déjà courbé sur le billot:
« Quand elle fut près de l'échafaud, la tête
de son frère tombait et le sang jaillit sur
son voile, qu'il rougit du haut jusqu.en
bas ….»
« Ken a strinkaz goad war he lenn
Hag hen ruiaz a benn da benn. »
La version recueillie par Luzel
s'écarte de l'histoire vraie par son
dénouement moins tragique. Le jeune
comte est condamné mais il vit encore. Sa
courageuse belle-sœur sollicite sa grâce de
la Reine, qu'elle nomme "cousine". En vain
le grand juge lui répond-il que la sentence
est définitive et sera exécutée le lendemain.
Des prières, la Marquise passe
hardiment aux menaces; Il Tant que je
serai en vie, il ne manquera pas de guerre
au Roi! je vais retourner. à la maison pour
chercher un feu d'artifice qui incendiera le
palais royal, et de plus la moitié de la ville.
!",
Voici le Marquis lui-même qui
entre en scène "avec son armée" et qui
joint ses menaces à. celles de son
énergique épouse: " Si vous faites mourir
mon frère chéri, je mettrai le feu à votre
palais.
Effrayé, le Roi cède: Sur son ordre,
on libère le condamné, et tous trois
reviennent triomphalement à Bodigneau....
,.
Un souffle de fierté bretonne et
d'indépendance nationale anime ce beau
chant, auquel il ne manque, hélas, que
d'être conforme à la funeste réalité.
extrait du Barzaz –Breiz,
de La Villemarqué
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