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La modernisation de l’infrastructure portuaire au Pérou : le port de Callao
Le Pérou est un pays émergent en pleine croissance confronté à un déficit formidable
d’infrastructure
La croissance économique du Pérou continue depuis une décennie, avec une variation du
PIB de +5% en 2013 qui ne représente qu’une petite diminution par rapport à la moyenne
d’environ +7% pour les années 2006-2012. Les projections du World Economic Outlook
(IMF, 2014) comptent avec une variation de +5,5% pour l’année en cours, un taux de
croissance qui en toute probabilité sera maintenu jusqu’à 2019. Le rapport de compétitivité
internationale le plus récent du Forum Économique Mondial confirme cet optimisme (WEF,
2013) en soulignant une forte performance macroéconomique et une consolidation des
gains de compétitivité des vingt dernières années. Cette croissance a été fortement poussée
par une libéralisation progressive du commerce international avec des partenaires tels que
les Etats-Unis, la Chine, la Corée du Sud et les autres membres de l’Alliance Pacifique
(Chile, Colombie, Mexique). Le Pérou dépend surtout de ses exportations de matières
premières (notamment les minéraux), la valeur desquelles représentait presque 41% du PIB
national en 2010 (World Bank, 2010), mais la richesse accrue de ses citoyens a également
stimulé les importations des biens de consommation. Il s’avère, donc, que le commerce
international joue un rôle décisif dans le développement du pays, et par extension, on peut
constater que les infrastructures de transport international sont encore plus essentielles au
Pérou que dans d’autres pays de l’Amérique Latine, moins ouverts ou avec un marché
interne plus important.
Le manque d’infrastructure de transport international (les routes, les ports et les aéroports) est
un des seuls échecs du Pérou en ce qui concerne la compétitivité économique. Cette étude
se concentre sur l’infrastructure portuaire en particulier, étant donné que la majorité du
commerce extérieur du pays se réalise à travers le transport maritime. Il est encore plus
important de reconnaître l’importance d’un seul port, celui de Callao, dans l’ensemble du
réseau portuaire du pays. En 2008, 86% (1,2m TEUs) des imports/exports de conteneurs au
Pérou se réalisaient à travers le port de Callao, ainsi que 80% (19,2m) des imports/exports
de cargaisons vrac (Ibid., p. 42). En 2012, les chiffres avaient augmenté à 90% (1,8m TEUs)
des imports/exports de conteneurs et 76% (29,7m) des imports/exports de cargaisons vrac.
Sixième port en volume dans le classement de la Commission Économique pour l’Amérique
Latine et les Caraïbes (Aguilar et al., 2007), le port de Callao a pourtant été placé en
dernière place par une étude réalisée par l’université polytechnique de Valence en ce qui
concerne l’efficacité, la dépendabilité et la sécurité des ports de la région (World Bank,
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2010, p.6) . Une autre étude avait estimé la valeur des surcoûts de Callao à $218 millions (le
double de ses revenus annuels (Ibid., p. 9). Les problèmes principaux cités étaient les
suivants : (1) la mauvaise qualité des services de transport, (2) le manque de fiabilité, et (3)
les surcoûts qui se traduisaient en prix plus chers pour les consommateurs finaux, qu’il
s’agisse des consommateurs étrangers des exportations péruviennes ou les consommateurs
nationaux des produits importés.
Il convient ici de présenter quelques chiffres pour mettre en avant l’ampleur du problème,
issus d’un rapport de la Banque Mondiale de 2010 sur le développement de l’infrastructure
au Pérou. Il s’est avéré, par exemple, que les frais de transport, de 20% à 35% plus élevés
que les frais équivalents au Chile (p. 9), expliquaient environ 32% de la valeur finale des
biens produits par les entreprises péruviennes (p. 17). Il est compréhensible, alors, que 50%
des entrepreneurs ont estimé que le manque d’infrastructure, le faible niveau d’intégration
des marchés et les surcoûts du transport étaient les obstacles majeurs confrontés par leurs
entreprises (p. 7). Dans le même rapport, la Banque Mondiale prévoyait qu’une amélioration
de l’infrastructure pourrait baisser les coûts unitaires des entreprises privées en 20% (p. 18).
La condition préalable, évidemment, était le besoin d’investir davantage dans le secteur.
Ayant investi une moyenne de 1,5% du PIB dans le secteur d’infrastructure entre 1980-2010
(p. 21), le Pérou se trouvait avec une note de 3,3 points dans le classement de compétitivité
infrastructurelle du WEF en 2010, ce qui se compare avec une note moyenne de 4,3 points
pour le reste du monde (p.6). Le Pérou s’inscrivait ainsi dans une tendance Sud-Américaine
de sous-investissement dans le secteur (2% du PIB pour la région Amérique Latine et
Caraïbes). Cela se compare avec un besoin d’investissement énorme dans le secteur au
niveau mondial, estimé par McKinsey à 3,5% du PIB mondial (MGI, p. 3), et avec l’acteur
de référence, la Chine, qui a investi 9% de son PIB dans les infrastructures dans une seule
année, 2007 (World Bank, 2010, p. 3). Le cœur de ce problème, bien sûr, est le dilemme de
l’allocation des finances publiques
dans un pays en voie de
développement avec des énormes
besoins dans tous les secteurs. En
ce sens, il semble que
l’investissement privé dans le
secteur de transport, où les
opportunités lucratives sont
Source: World Bank, 2010, p.25
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multiples et les externalités négatives sont prévisibles et évitables, peut apporter de
nombreux avantages aux décisionnaires, en libérant des ressources publiques pour des
projets d’infrastructure sociale proprement dit (hôpitaux, écoles) et en évitant les problèmes
de mauvaise gestion et de l’inefficacité du secteur publique. Le Chile est un exemple en cet
égard, ayant mobilisé beaucoup plus de ressources que les autres pays d’Amérique Latine
(World Bank, 2010, p. 25).
La mise en concession du port de Callao a été un moyen d’attirer de l’investissement du
secteur privé, a amélioré la qualité des services et a diminué les coûts pour l’usager
Le modèle qui a été choisi pour la mise en concession des ports au Pérou est connu comme
le modèle Landlord Port. Dans ce modèle, le gouvernement est toujours propriétaire du port,
mais le droit d’utilisation du terrain et de l’infrastructure est attribué à un opérateur privé
pour une période déterminée, normalement de 30 ans. En échange, l’opérateur privé est
responsable de l’amélioration et la modernisation de l’infrastructure à base de critères
spécifiques, préétablis dans le contrat de concession. Il jouit d’un monopole d’exploitation
pendant la période concernée et reçoit sa rémunération à travers la prestation de services
aux usagers de l’infrastructure. Les tarifs que reçoit l’opérateur, eux aussi, sont souvent
prédéterminés dans le contrat de concession. L’emploi des travailleurs et l’achat des
équipements demeurent la seule responsabilité de l’opérateur privé. Ce modèle, qui fait
partie d’une catégorie plus large des partenariats public-privés (PPP) connu sous l’acronyme
DBOT (Design, Build, Operate, Transfer) est spécialement adapté au cas péruvien pour
plusieurs raisons. Sans avoir recours à la privatisation totale, qui pourrait provoquer des
Source: World Bank, PPIAF and IFC, PPP in Infrastructure Resource Centre,
http://ppp.worldbank.org/public-private-partnership/sector/transportation/ports
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réactions populaires et des mouvements sociaux ingérables dans une région (l’Amérique
Latine) historiquement opposée à la privatisation des biens publics, la concession permet
quand-même de garantir à l’opérateur privé que le droit de tarification sera entièrement le
sien, l’incitant ainsi, en faisant appel aux possibles retours sur son investissement, à réaliser
les travaux. Au même temps, à la fin de la période de la concession, l’infrastructure (un actif)
est rendu à l’État en meilleure condition, sans les dettes et les obligations envers les
travailleurs (pensions de retraite et autres passifs) qui découlent normalement d’un projet
public.
La mise en concession du port de Callao a commencé en 2006, suite à un appel d’offres,
avec la signature d’un contrat de concession du Muelle Sur (terminal sud) avec DP World,
société émiratie spécialisé en conception de terminaux, manutention et opérations
portuaires. DP World s’est engagé à investir $617,11 millions et de compléter les travaux
dans un délai de 36 mois, et ensuite d’atteindre certains objectifs dans la prestation des
services, y compris une productivité minimum de 25 conteneurs par heure et un délai de
départ de 20 minutes maximum (OSITRAN, 2011). Le tarif est fixé depuis cette date à
$90/$135 par conteneur plein 20”/40”. À l’occasion, l’investissement a été de presque $700
millions et les travaux ont été complété dans un délai de 29 mois (7 mois moins que prévu)
montrant que la motivation commerciale du partenaire privé peut souvent stimuler de
l’efficacité dans les travaux sans nécessairement réduire la qualité de l’investissement. Le
Muelle Sur de 650m peut désormais accueillir deux navires de type Super Post-Panamax
(calaisons de 16m), qui transportent des quantités plus grandes et profitent ainsi des
économies d’échelle et des coûts moins élevés. Les opérations, d’autre part, sont facilitées
par un espace de travail optimisé avec des portiques modernes sur le quai (6) et dans le parc
à conteneurs (18). L’opérateur
n’est presque jamais au-dessous
de la productivité minimum
stipulé par le contrat et sa
conformité aux critères de
sécurité et protection de
l’environnement est contrôlée
par des agences qui délivrent
des certificats internationalement
reconnus (DP World Callao, 2013).
Source: DP World Callao, 2013
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Il n’y a aucune doute que la qualité des opérations et de l’infrastructure dans le Muelle Sur
s’est améliorée depuis la mise en concession, mais les coûts pour les usagers de
l’infrastructure sont-ils toujours les mêmes, ou ont-ils augmenté / diminué ? Il est difficile de
trouver la réponse à cette question à cause de l’opacité des coûts qui prévalaient avant la
mise en concession. Le manque d'espace de stockage, le déplacement fréquent de
conteneurs et les retards généraient des coûts additionnels qui n’étaient pas prévisibles ou
mesurables. Cependant, Martín Sgut a fait une tentative d’estimer les coûts encourus pour un
conteneur standard 20” dans le port de Callao avant las mise en concession et ses résultats
son présentés dans le tableau qui suit :
On voit ici que le coût des opérations (estimé à $152,43 par rapport au tarif actuel de $90) a
diminué de manière considérable. En outre, il faut constater qu’une source de DP World –
certes moins objective – considère que les gains ont été beaucoup plus importants que ne le
suggère ce tableau, ayant passé de $312 à $90 par conteneur 20” si on tient compte de tous
les coûts accessoires de l’opération conventionnelle (Negocios Internationales, entretien
avec Maciek Kwiatkowski).
En 2010, l’administration a repris la mise en concession avec l’initiation d’un nouvel appel
d’offres pour le Muelle Norte (terminal nord). L’entreprise gagnante – APM Terminals, filiale
du groupe Møller-Maersk qui détient la plus grande flotte de porte-conteneurs du monde –
s’est engagé à faire des investissements comparables dans l’autre moitié du port, consacrant
environ $750 millions pour les travaux d’amélioration de l’infrastructure. Cette fois-ci,
l’investissement n’est pas une somme stipulée à l’avance, mais sera déterminé par le niveau
de demande attendu, pouvant atteindre plus de $1 milliard avant 2022 (OSITRAN, 2012).
Les améliorations prévues consisteraient de portiques sur le quai (4) et dans le parc à
conteneurs (12), nouveaux bâtiments administratifs, dragage (16 m) jusqu’à fin 2014, ainsi
que la construction d’un terminal spécialisé de grains et l’achat d’une grue mobile et d’une
Source: Sgut, 2005
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machine de type CSU (Continuous Ship Unloader) jusqu’à fin 2015 (APM Terminals,
brochure). Les tarifs fixés sont les mêmes pour les deux opérateurs, et tous les deux doivent
verser 3% des revenus provenant des activités liées à la concession directement à l’État. En
plus, APM Terminals s’est engagé à embaucher une portion des travailleurs de l’entreprise
étatique ENAPU, qui était responsable des opérations avant la mise en concession, ainsi que
ses obligations envers les travailleurs en ce qui concerne la retraite (APN, Información Sobre
Propuesta De Iniciativa Privada Para La Concesión Del Muelle Norte).
Un partenariat public-privé mal-conçu peut engendrer des disputes entre le gouvernement
et la société privée
En juillet de 2011 DP World, le concessionnaire du Muelle Sur, a déposé une plainte au
CIRDI alléguant que son exclusion de l’appel d’offre pour la concession du Muelle Norte
était sans fondement et que son offre initiale pour le Muelle Sur était basée sur une
éventuelle participation dans la concession de l’autre terminal. Le gouvernement péruvien
insiste que l’exclusion de DP World avait toujours été prévue, pour ne pas créer de situation
de monopole dans le port et pour générer une tension compétitive entre les
concessionnaires (El Diario De Economía Y Negocios De Perú, 2011). Ce point est
absolument fondamental, car le plan d’affaires d’une concession de 30 ans doit se fonder sur
des prévisions de demande qui sont fortement influencés par l’existence (ou non) d’un
concurrent. Le tarif de $90 est-il toujours rentable étant donné le fait que le trafic de
conteneurs se partage désormais entre les deux concessionnaires ?
Toutefois, les inquiétudes de l’administration semblent être raisonnables, car le but de la
mise en concession était d’augmenter la qualité de l’infrastructure sans compromettre la
réduction des coûts. Un opérateur privé en situation de monopole, dans ce cas, n’est pas
incité à améliorer la qualité de ses services au-dessus des limites stipulées dans le contrat de
concession, surtout parce que ses prix ne peuvent pas être augmentés en parallèle. En
d’autres termes, l’augmentation des coûts qui découle d’une amélioration de la qualité des
services n’est pas accompagnée des recettes complémentaires, car le prix et la demande,
demeurent les mêmes. Dans une situation de tension concurrentielle, par contre, les deux
opérateurs courent le risque de perdre des clients au profit de leur concurrent si la qualité de
leurs services est relativement pire. Face aux mêmes prix, la demande de la part des usagers
devient une fonction de la qualité relative des services offerts par les opérateurs, c’est à dire,
la concurrence entraîne la qualité vers le haut.
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De plus, il semble que les conditions stipulées dans les deux contrats de concession soient
relativement équitables. APM Terminals n’est pas contraint par les mêmes critères de qualité
de service, mais compte tenu de ce qui précède, on peut supposer que la concurrence avec
DP World suffise pour garantir un minimum d’efficacité et de qualité dans le service. D’autre
part, pour la première concession, on observe un engagement de la part de l’État de garantir
un niveau minimum de demande (300.000 TEUs d’import/export + 100.000 TEUs de
déplacement par an), ce qui implique un risque de charges inattendues et importantes pour
les finances publiques, dans le cas d’une conjoncture économique imprévue ou de facteurs
externes hors du contrôle de l’État (p. ex. l’ouverture d’un autre port dans la région jouissant
d’avantages comparatifs). Au final, le concessionnaire n’a jamais eu l’occasion de faire
appel à cette garantie, grâce à la croissance persistante du commerce international et la
demande pour l’infrastructure et les services portuaires, mais il est néanmoins préférable que
ces garanties ne soient pas répliquées dans la deuxième concession. Il se peut que des telles
garanties aient été nécessaires pour attirer des soumissionnaires pour la première
concession, mais qu’elles aient pu être abandonnées lors de la deuxième, dans le contexte
d’une ambiance de confiance accrue et d’optimisme répandu parmi les acteurs du secteur
privé.
L’avenir de l’entreprise étatique ENAPU est en jeu, celle-ci ayant perdu la plupart de ses
revenus suite à la mise en concession du port de Callao
ENAPU, l’entreprise étatique responsable de l’administration et de l’entretien du port ainsi
que des opérations avant la mise en concession, avait dégagé des bénéfices pour l’État
pendant toute la période 2004-2010 : S/. 5,313 millions en 2005, S/. 10,717 millions en
2006, S/. 20,095 millions en 2007, S/. 97,651 millions en 2008 et S/. 81,227 millions en
2009 (Punto de Vista y Propuesta, 2012).1
En 2010, année d’achèvement des travaux du
Muelle Sur, une réduction des bénéfices à S/. 29,721 millions a été provoquée par une
hausse de dépenses liées aux pensions de retraite des travailleurs. Dans les années qui ont
suivi, une chute encore plus importante dans les produits d’exploitation (résultat d’une fuite
des clients envers les opérateurs privés) a provoqué pour la première fois une perte dans le
compte de résultat finale de l’entreprise. La perte en 2012 a été moins importante qu’elle
n’aurait pu l’être grâce à la dévestiture des engagements de retraite dans le cadre de la
concession du Muelle Norte, mais cela n’empêche que l’entreprise n’ait plus les moyens de
s’autofinancer et que la couverture médiatique commence à aborder la possibilité d’une
privatisation ou d’une liquidation de l’entreprise. Il est clair que cet échec est la preuve,
	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  	
  
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dans une certaine mesure, de la réussite relative des deux concessionnaires en ce qui
concerne la qualité et l’efficacité des opérations portuaires. On peut pourtant se demander si
la faillite de l’entreprise étatique, d’une telle importance pour la communauté de travailleurs
portuaires à Callao et dans les autres ports du pays, était inévitable ou s’il aurait été possible
de réaliser la modernisation du port de Callao d’une manière inclusive, sans marginaliser
l’opérateur national. En d’autres termes, les concessions ont-elles cédé trop de souveraineté
et contrôle à des entreprises étrangères qui ne sont pas concernées par le bien-être de la
communauté des travailleurs portuaires du Pérou et de leurs familles ? Une question liée
concerne le coût-opportunité des concessions. Les revenus provenant des concessions, sont-
ils plus importants que les dividendes versés auparavant par ENAPU ? La différence (si elle
est positive), justifie-t-elle la cession d’un bien public d’une telle importance que le port de
Callao ?
Ces questions seront abordées dans la prochaine partie de l’étude. D’abord, il convient de
noter que les concessions ont été faites dans le contexte d’une situation financière
insoutenable pour ENAPU. En 2007, avec des passifs à court terme (surtout liés au pensions
de retraite) qui dépassaient la valeur des actifs à court-terme, l’entreprise décide de
restructurer : la plupart les pensions sont recatégorisées comme des passifs à long-terme.
Cependant, ses obligations continuent à accroitre et dépassent la valeur des actifs à long-
terme en 2010-2011, d’où la décision de transmettre une partie des obligations de retraite
au nouveau concessionnaire APM Terminals. Ainsi, en 2012, l’entreprise retrouve une
situation d’équilibre mais n’arrive toujours pas à dégager un bénéfice. La théorie qui a
inspiré la mise en concession du port de Callao avait comme élément central
l’insoutenabilité de la situation financière de ENAPU, mais la concession en soi n’a pas
réussi à la rendre rentable. Cet échec et les dépenses à venir (en sauvetages, etc.) doivent
être pris en compte lors d’une évaluation de la réussite de la mise en concession du port de
Callao afin de déterminer si ses objectifs (de modernisation, rationalisation et épargne) ont
été atteints. Les pertes possibles qui auraient pu découler des obligations insoutenables de
ENAPU doivent, elles aussi, être tenue en compte.
Quel est l’impact de la mise en concession sur les finances publiques ?
Si on met de côté toutes les considérations présentées ci-dessus, on peut essayer d’évaluer
l’impact purement monétaire sur les finances publiques. Il faut reconnaître, dans ce
contexte, qu’il y a une quantité énorme d’effets indirects qui n’est pas incluse dans cette
évaluation, y compris l’augmentation de l’activité des entreprises et les recettes fiscales qui
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en résultent, les recettes douanières plus élevées grâce à l’augmentation du trafic de
cargaison dans le port, et le fait d’éviter le risque de dépenses extraordinaires (réparations,
accidents, etc.) en les transmettant à l’opérateur privé. Au niveau du taux de 3% de revenu
de l’opérateur, il s’avère qu’un montant de $2,794 millions (environ S/. 7,823 millions) a été
versé directement à l’agence nationale des ports (APN) par l’opérateur DP World en 2011.
S’ajoute à cela $0,931 millions (S/. 2,607 millions) versés à OSITRAN, l’agence régulatrice,
et $7,269 million (S/. 10,430 millions) d’impôts sur les revenus. Le total de S/. 30,783
millions est tout à fait respectable par rapport à la moyenne de S/. 28,015 de bénéfices
dégagés par ENAPU dans les années 2004-2009, et même si on le compare aux bénéfices
dégagés par ENAPU en 2008 (record de S/. 97, 651) vu qu’il s’agit d’un seul terminal
(Muelle Sur) et que c’était la première année complète d’activités du concessionnaire DP
World Callao. Il est facile d’imaginer que les montants qui seront versés à l’État par APM
Terminals dans les années à venir permettront les montants totaux à dépasser même le
record de 2008. Pour résumer, on peut espérer que, dans les années qui viennent, l’État ira
recevoir des deux concessionnaires un montant (impôts + 3% taux de concession + frais de
l’agence régulatrice) plus élevé que ce qu’elle recevait auparavant de ENAPU en forme de
dividendes. Pourvu que l’avenir de l’entreprise étatique soit réglé et que le risque des pertes
soit éliminé, l’État pourra non seulement profiter des paiements directs de la part des
concessionnaires mais aussi des avantages corollaires provenant de la meilleure qualité de
l’infrastructure portuaires, la réduction globale des coûts et l’amélioration des services en
termes d’efficacité.
Conclusion
Le cas de la mise en concession du port de Callao en deux phases (2006, 2011) a démontré
qu’un pays en voie de développement, avec des forts besoins d’investissement dans
l’infrastructure portuaire, peut bénéficier d’investissements privés sans recourir à la
privatisation totale et sans être obligé à dépenser de grandes sommes ou de s’endetter pour
réaliser les amélioration nécessaires. Le modèle Landlord Port a été utilisé pour exploiter le
savoir-faire et l’efficacité du secteur privé dans le projet de modernisation de l’infrastructure
et l’amélioration des services. La concession a également conduit à des coûts moins élevés
que ceux qui prévalaient avant la mise en concession, bien qu’il soit difficile de trouver des
chiffres qui expriment de manière plus précise cette réduction. La dispute entre DP World et
l’État péruvien est une tache noire dans l’histoire de la concession, et elle n’est toujours pas
résolue, ce qui met en évidence l’importance de planifier au long terme. Pourtant, il est
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indéniable que l’encouragement de concurrence entre les deux concessionnaires permet
d’améliorer la qualité des services disponibles.
Il n’est pas encore possible de dire sans équivoque que les concessions ont amélioré les
finances publiques du pays. L’entreprise étatique ENAPU a pu éviter l’accumulation des
obligations de retraite insoutenables, et a même pu se débarrasser d’une certaine quantité de
celles-ci grâce à la concession, mais elle subit encore des pertes et constitue un danger pour
les finances publiques. Les montants versés par DP World sont respectables mais
n’atteignent pas encore le niveau des bénéfices générés par ENAPU avant la mise en
concession. Il est possible que le bénéfice réel de la mise en concession ne soit pas connu
avant que le deuxième concessionnaire commence a travailler et a verser ses obligations
envers l’État.
Sources
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http://www.mincetur.gob.pe/comercio/otros/penx/pdfs/Costos_Sobrecostos_Portuarios_Marti
n_Sgut.pdf
WEF (World Economic Forum), 2013, Global Competitiveness Report (2013-2014), Geneva,
viewed online at http://www.weforum.org/reports/global-competitiveness-report-2013-2014
World Bank, 2010, Peru : Recent Economic Development in Infrastructure (REDI) (vol. 1) –
Investing in Infrastructure as an Engine for Growth: Spending More, Faster and Spending
Better, Washington, viewed online at
http://documents.worldbank.org/curated/en/2010/12/16278201/peru-recent-economic-
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  • 1. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 1 of 11 La modernisation de l’infrastructure portuaire au Pérou : le port de Callao Le Pérou est un pays émergent en pleine croissance confronté à un déficit formidable d’infrastructure La croissance économique du Pérou continue depuis une décennie, avec une variation du PIB de +5% en 2013 qui ne représente qu’une petite diminution par rapport à la moyenne d’environ +7% pour les années 2006-2012. Les projections du World Economic Outlook (IMF, 2014) comptent avec une variation de +5,5% pour l’année en cours, un taux de croissance qui en toute probabilité sera maintenu jusqu’à 2019. Le rapport de compétitivité internationale le plus récent du Forum Économique Mondial confirme cet optimisme (WEF, 2013) en soulignant une forte performance macroéconomique et une consolidation des gains de compétitivité des vingt dernières années. Cette croissance a été fortement poussée par une libéralisation progressive du commerce international avec des partenaires tels que les Etats-Unis, la Chine, la Corée du Sud et les autres membres de l’Alliance Pacifique (Chile, Colombie, Mexique). Le Pérou dépend surtout de ses exportations de matières premières (notamment les minéraux), la valeur desquelles représentait presque 41% du PIB national en 2010 (World Bank, 2010), mais la richesse accrue de ses citoyens a également stimulé les importations des biens de consommation. Il s’avère, donc, que le commerce international joue un rôle décisif dans le développement du pays, et par extension, on peut constater que les infrastructures de transport international sont encore plus essentielles au Pérou que dans d’autres pays de l’Amérique Latine, moins ouverts ou avec un marché interne plus important. Le manque d’infrastructure de transport international (les routes, les ports et les aéroports) est un des seuls échecs du Pérou en ce qui concerne la compétitivité économique. Cette étude se concentre sur l’infrastructure portuaire en particulier, étant donné que la majorité du commerce extérieur du pays se réalise à travers le transport maritime. Il est encore plus important de reconnaître l’importance d’un seul port, celui de Callao, dans l’ensemble du réseau portuaire du pays. En 2008, 86% (1,2m TEUs) des imports/exports de conteneurs au Pérou se réalisaient à travers le port de Callao, ainsi que 80% (19,2m) des imports/exports de cargaisons vrac (Ibid., p. 42). En 2012, les chiffres avaient augmenté à 90% (1,8m TEUs) des imports/exports de conteneurs et 76% (29,7m) des imports/exports de cargaisons vrac. Sixième port en volume dans le classement de la Commission Économique pour l’Amérique Latine et les Caraïbes (Aguilar et al., 2007), le port de Callao a pourtant été placé en dernière place par une étude réalisée par l’université polytechnique de Valence en ce qui concerne l’efficacité, la dépendabilité et la sécurité des ports de la région (World Bank,
  • 2. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 2 of 11 2010, p.6) . Une autre étude avait estimé la valeur des surcoûts de Callao à $218 millions (le double de ses revenus annuels (Ibid., p. 9). Les problèmes principaux cités étaient les suivants : (1) la mauvaise qualité des services de transport, (2) le manque de fiabilité, et (3) les surcoûts qui se traduisaient en prix plus chers pour les consommateurs finaux, qu’il s’agisse des consommateurs étrangers des exportations péruviennes ou les consommateurs nationaux des produits importés. Il convient ici de présenter quelques chiffres pour mettre en avant l’ampleur du problème, issus d’un rapport de la Banque Mondiale de 2010 sur le développement de l’infrastructure au Pérou. Il s’est avéré, par exemple, que les frais de transport, de 20% à 35% plus élevés que les frais équivalents au Chile (p. 9), expliquaient environ 32% de la valeur finale des biens produits par les entreprises péruviennes (p. 17). Il est compréhensible, alors, que 50% des entrepreneurs ont estimé que le manque d’infrastructure, le faible niveau d’intégration des marchés et les surcoûts du transport étaient les obstacles majeurs confrontés par leurs entreprises (p. 7). Dans le même rapport, la Banque Mondiale prévoyait qu’une amélioration de l’infrastructure pourrait baisser les coûts unitaires des entreprises privées en 20% (p. 18). La condition préalable, évidemment, était le besoin d’investir davantage dans le secteur. Ayant investi une moyenne de 1,5% du PIB dans le secteur d’infrastructure entre 1980-2010 (p. 21), le Pérou se trouvait avec une note de 3,3 points dans le classement de compétitivité infrastructurelle du WEF en 2010, ce qui se compare avec une note moyenne de 4,3 points pour le reste du monde (p.6). Le Pérou s’inscrivait ainsi dans une tendance Sud-Américaine de sous-investissement dans le secteur (2% du PIB pour la région Amérique Latine et Caraïbes). Cela se compare avec un besoin d’investissement énorme dans le secteur au niveau mondial, estimé par McKinsey à 3,5% du PIB mondial (MGI, p. 3), et avec l’acteur de référence, la Chine, qui a investi 9% de son PIB dans les infrastructures dans une seule année, 2007 (World Bank, 2010, p. 3). Le cœur de ce problème, bien sûr, est le dilemme de l’allocation des finances publiques dans un pays en voie de développement avec des énormes besoins dans tous les secteurs. En ce sens, il semble que l’investissement privé dans le secteur de transport, où les opportunités lucratives sont Source: World Bank, 2010, p.25
  • 3. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 3 of 11 multiples et les externalités négatives sont prévisibles et évitables, peut apporter de nombreux avantages aux décisionnaires, en libérant des ressources publiques pour des projets d’infrastructure sociale proprement dit (hôpitaux, écoles) et en évitant les problèmes de mauvaise gestion et de l’inefficacité du secteur publique. Le Chile est un exemple en cet égard, ayant mobilisé beaucoup plus de ressources que les autres pays d’Amérique Latine (World Bank, 2010, p. 25). La mise en concession du port de Callao a été un moyen d’attirer de l’investissement du secteur privé, a amélioré la qualité des services et a diminué les coûts pour l’usager Le modèle qui a été choisi pour la mise en concession des ports au Pérou est connu comme le modèle Landlord Port. Dans ce modèle, le gouvernement est toujours propriétaire du port, mais le droit d’utilisation du terrain et de l’infrastructure est attribué à un opérateur privé pour une période déterminée, normalement de 30 ans. En échange, l’opérateur privé est responsable de l’amélioration et la modernisation de l’infrastructure à base de critères spécifiques, préétablis dans le contrat de concession. Il jouit d’un monopole d’exploitation pendant la période concernée et reçoit sa rémunération à travers la prestation de services aux usagers de l’infrastructure. Les tarifs que reçoit l’opérateur, eux aussi, sont souvent prédéterminés dans le contrat de concession. L’emploi des travailleurs et l’achat des équipements demeurent la seule responsabilité de l’opérateur privé. Ce modèle, qui fait partie d’une catégorie plus large des partenariats public-privés (PPP) connu sous l’acronyme DBOT (Design, Build, Operate, Transfer) est spécialement adapté au cas péruvien pour plusieurs raisons. Sans avoir recours à la privatisation totale, qui pourrait provoquer des Source: World Bank, PPIAF and IFC, PPP in Infrastructure Resource Centre, http://ppp.worldbank.org/public-private-partnership/sector/transportation/ports
  • 4. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 4 of 11 réactions populaires et des mouvements sociaux ingérables dans une région (l’Amérique Latine) historiquement opposée à la privatisation des biens publics, la concession permet quand-même de garantir à l’opérateur privé que le droit de tarification sera entièrement le sien, l’incitant ainsi, en faisant appel aux possibles retours sur son investissement, à réaliser les travaux. Au même temps, à la fin de la période de la concession, l’infrastructure (un actif) est rendu à l’État en meilleure condition, sans les dettes et les obligations envers les travailleurs (pensions de retraite et autres passifs) qui découlent normalement d’un projet public. La mise en concession du port de Callao a commencé en 2006, suite à un appel d’offres, avec la signature d’un contrat de concession du Muelle Sur (terminal sud) avec DP World, société émiratie spécialisé en conception de terminaux, manutention et opérations portuaires. DP World s’est engagé à investir $617,11 millions et de compléter les travaux dans un délai de 36 mois, et ensuite d’atteindre certains objectifs dans la prestation des services, y compris une productivité minimum de 25 conteneurs par heure et un délai de départ de 20 minutes maximum (OSITRAN, 2011). Le tarif est fixé depuis cette date à $90/$135 par conteneur plein 20”/40”. À l’occasion, l’investissement a été de presque $700 millions et les travaux ont été complété dans un délai de 29 mois (7 mois moins que prévu) montrant que la motivation commerciale du partenaire privé peut souvent stimuler de l’efficacité dans les travaux sans nécessairement réduire la qualité de l’investissement. Le Muelle Sur de 650m peut désormais accueillir deux navires de type Super Post-Panamax (calaisons de 16m), qui transportent des quantités plus grandes et profitent ainsi des économies d’échelle et des coûts moins élevés. Les opérations, d’autre part, sont facilitées par un espace de travail optimisé avec des portiques modernes sur le quai (6) et dans le parc à conteneurs (18). L’opérateur n’est presque jamais au-dessous de la productivité minimum stipulé par le contrat et sa conformité aux critères de sécurité et protection de l’environnement est contrôlée par des agences qui délivrent des certificats internationalement reconnus (DP World Callao, 2013). Source: DP World Callao, 2013
  • 5. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 5 of 11 Il n’y a aucune doute que la qualité des opérations et de l’infrastructure dans le Muelle Sur s’est améliorée depuis la mise en concession, mais les coûts pour les usagers de l’infrastructure sont-ils toujours les mêmes, ou ont-ils augmenté / diminué ? Il est difficile de trouver la réponse à cette question à cause de l’opacité des coûts qui prévalaient avant la mise en concession. Le manque d'espace de stockage, le déplacement fréquent de conteneurs et les retards généraient des coûts additionnels qui n’étaient pas prévisibles ou mesurables. Cependant, Martín Sgut a fait une tentative d’estimer les coûts encourus pour un conteneur standard 20” dans le port de Callao avant las mise en concession et ses résultats son présentés dans le tableau qui suit : On voit ici que le coût des opérations (estimé à $152,43 par rapport au tarif actuel de $90) a diminué de manière considérable. En outre, il faut constater qu’une source de DP World – certes moins objective – considère que les gains ont été beaucoup plus importants que ne le suggère ce tableau, ayant passé de $312 à $90 par conteneur 20” si on tient compte de tous les coûts accessoires de l’opération conventionnelle (Negocios Internationales, entretien avec Maciek Kwiatkowski). En 2010, l’administration a repris la mise en concession avec l’initiation d’un nouvel appel d’offres pour le Muelle Norte (terminal nord). L’entreprise gagnante – APM Terminals, filiale du groupe Møller-Maersk qui détient la plus grande flotte de porte-conteneurs du monde – s’est engagé à faire des investissements comparables dans l’autre moitié du port, consacrant environ $750 millions pour les travaux d’amélioration de l’infrastructure. Cette fois-ci, l’investissement n’est pas une somme stipulée à l’avance, mais sera déterminé par le niveau de demande attendu, pouvant atteindre plus de $1 milliard avant 2022 (OSITRAN, 2012). Les améliorations prévues consisteraient de portiques sur le quai (4) et dans le parc à conteneurs (12), nouveaux bâtiments administratifs, dragage (16 m) jusqu’à fin 2014, ainsi que la construction d’un terminal spécialisé de grains et l’achat d’une grue mobile et d’une Source: Sgut, 2005
  • 6. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 6 of 11 machine de type CSU (Continuous Ship Unloader) jusqu’à fin 2015 (APM Terminals, brochure). Les tarifs fixés sont les mêmes pour les deux opérateurs, et tous les deux doivent verser 3% des revenus provenant des activités liées à la concession directement à l’État. En plus, APM Terminals s’est engagé à embaucher une portion des travailleurs de l’entreprise étatique ENAPU, qui était responsable des opérations avant la mise en concession, ainsi que ses obligations envers les travailleurs en ce qui concerne la retraite (APN, Información Sobre Propuesta De Iniciativa Privada Para La Concesión Del Muelle Norte). Un partenariat public-privé mal-conçu peut engendrer des disputes entre le gouvernement et la société privée En juillet de 2011 DP World, le concessionnaire du Muelle Sur, a déposé une plainte au CIRDI alléguant que son exclusion de l’appel d’offre pour la concession du Muelle Norte était sans fondement et que son offre initiale pour le Muelle Sur était basée sur une éventuelle participation dans la concession de l’autre terminal. Le gouvernement péruvien insiste que l’exclusion de DP World avait toujours été prévue, pour ne pas créer de situation de monopole dans le port et pour générer une tension compétitive entre les concessionnaires (El Diario De Economía Y Negocios De Perú, 2011). Ce point est absolument fondamental, car le plan d’affaires d’une concession de 30 ans doit se fonder sur des prévisions de demande qui sont fortement influencés par l’existence (ou non) d’un concurrent. Le tarif de $90 est-il toujours rentable étant donné le fait que le trafic de conteneurs se partage désormais entre les deux concessionnaires ? Toutefois, les inquiétudes de l’administration semblent être raisonnables, car le but de la mise en concession était d’augmenter la qualité de l’infrastructure sans compromettre la réduction des coûts. Un opérateur privé en situation de monopole, dans ce cas, n’est pas incité à améliorer la qualité de ses services au-dessus des limites stipulées dans le contrat de concession, surtout parce que ses prix ne peuvent pas être augmentés en parallèle. En d’autres termes, l’augmentation des coûts qui découle d’une amélioration de la qualité des services n’est pas accompagnée des recettes complémentaires, car le prix et la demande, demeurent les mêmes. Dans une situation de tension concurrentielle, par contre, les deux opérateurs courent le risque de perdre des clients au profit de leur concurrent si la qualité de leurs services est relativement pire. Face aux mêmes prix, la demande de la part des usagers devient une fonction de la qualité relative des services offerts par les opérateurs, c’est à dire, la concurrence entraîne la qualité vers le haut.
  • 7. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 7 of 11 De plus, il semble que les conditions stipulées dans les deux contrats de concession soient relativement équitables. APM Terminals n’est pas contraint par les mêmes critères de qualité de service, mais compte tenu de ce qui précède, on peut supposer que la concurrence avec DP World suffise pour garantir un minimum d’efficacité et de qualité dans le service. D’autre part, pour la première concession, on observe un engagement de la part de l’État de garantir un niveau minimum de demande (300.000 TEUs d’import/export + 100.000 TEUs de déplacement par an), ce qui implique un risque de charges inattendues et importantes pour les finances publiques, dans le cas d’une conjoncture économique imprévue ou de facteurs externes hors du contrôle de l’État (p. ex. l’ouverture d’un autre port dans la région jouissant d’avantages comparatifs). Au final, le concessionnaire n’a jamais eu l’occasion de faire appel à cette garantie, grâce à la croissance persistante du commerce international et la demande pour l’infrastructure et les services portuaires, mais il est néanmoins préférable que ces garanties ne soient pas répliquées dans la deuxième concession. Il se peut que des telles garanties aient été nécessaires pour attirer des soumissionnaires pour la première concession, mais qu’elles aient pu être abandonnées lors de la deuxième, dans le contexte d’une ambiance de confiance accrue et d’optimisme répandu parmi les acteurs du secteur privé. L’avenir de l’entreprise étatique ENAPU est en jeu, celle-ci ayant perdu la plupart de ses revenus suite à la mise en concession du port de Callao ENAPU, l’entreprise étatique responsable de l’administration et de l’entretien du port ainsi que des opérations avant la mise en concession, avait dégagé des bénéfices pour l’État pendant toute la période 2004-2010 : S/. 5,313 millions en 2005, S/. 10,717 millions en 2006, S/. 20,095 millions en 2007, S/. 97,651 millions en 2008 et S/. 81,227 millions en 2009 (Punto de Vista y Propuesta, 2012).1 En 2010, année d’achèvement des travaux du Muelle Sur, une réduction des bénéfices à S/. 29,721 millions a été provoquée par une hausse de dépenses liées aux pensions de retraite des travailleurs. Dans les années qui ont suivi, une chute encore plus importante dans les produits d’exploitation (résultat d’une fuite des clients envers les opérateurs privés) a provoqué pour la première fois une perte dans le compte de résultat finale de l’entreprise. La perte en 2012 a été moins importante qu’elle n’aurait pu l’être grâce à la dévestiture des engagements de retraite dans le cadre de la concession du Muelle Norte, mais cela n’empêche que l’entreprise n’ait plus les moyens de s’autofinancer et que la couverture médiatique commence à aborder la possibilité d’une privatisation ou d’une liquidation de l’entreprise. Il est clair que cet échec est la preuve,                                                                                                                 1  USD  1  =  PEN  2,80  (janvier  2010)  
  • 8. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 8 of 11 dans une certaine mesure, de la réussite relative des deux concessionnaires en ce qui concerne la qualité et l’efficacité des opérations portuaires. On peut pourtant se demander si la faillite de l’entreprise étatique, d’une telle importance pour la communauté de travailleurs portuaires à Callao et dans les autres ports du pays, était inévitable ou s’il aurait été possible de réaliser la modernisation du port de Callao d’une manière inclusive, sans marginaliser l’opérateur national. En d’autres termes, les concessions ont-elles cédé trop de souveraineté et contrôle à des entreprises étrangères qui ne sont pas concernées par le bien-être de la communauté des travailleurs portuaires du Pérou et de leurs familles ? Une question liée concerne le coût-opportunité des concessions. Les revenus provenant des concessions, sont- ils plus importants que les dividendes versés auparavant par ENAPU ? La différence (si elle est positive), justifie-t-elle la cession d’un bien public d’une telle importance que le port de Callao ? Ces questions seront abordées dans la prochaine partie de l’étude. D’abord, il convient de noter que les concessions ont été faites dans le contexte d’une situation financière insoutenable pour ENAPU. En 2007, avec des passifs à court terme (surtout liés au pensions de retraite) qui dépassaient la valeur des actifs à court-terme, l’entreprise décide de restructurer : la plupart les pensions sont recatégorisées comme des passifs à long-terme. Cependant, ses obligations continuent à accroitre et dépassent la valeur des actifs à long- terme en 2010-2011, d’où la décision de transmettre une partie des obligations de retraite au nouveau concessionnaire APM Terminals. Ainsi, en 2012, l’entreprise retrouve une situation d’équilibre mais n’arrive toujours pas à dégager un bénéfice. La théorie qui a inspiré la mise en concession du port de Callao avait comme élément central l’insoutenabilité de la situation financière de ENAPU, mais la concession en soi n’a pas réussi à la rendre rentable. Cet échec et les dépenses à venir (en sauvetages, etc.) doivent être pris en compte lors d’une évaluation de la réussite de la mise en concession du port de Callao afin de déterminer si ses objectifs (de modernisation, rationalisation et épargne) ont été atteints. Les pertes possibles qui auraient pu découler des obligations insoutenables de ENAPU doivent, elles aussi, être tenue en compte. Quel est l’impact de la mise en concession sur les finances publiques ? Si on met de côté toutes les considérations présentées ci-dessus, on peut essayer d’évaluer l’impact purement monétaire sur les finances publiques. Il faut reconnaître, dans ce contexte, qu’il y a une quantité énorme d’effets indirects qui n’est pas incluse dans cette évaluation, y compris l’augmentation de l’activité des entreprises et les recettes fiscales qui
  • 9. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 9 of 11 en résultent, les recettes douanières plus élevées grâce à l’augmentation du trafic de cargaison dans le port, et le fait d’éviter le risque de dépenses extraordinaires (réparations, accidents, etc.) en les transmettant à l’opérateur privé. Au niveau du taux de 3% de revenu de l’opérateur, il s’avère qu’un montant de $2,794 millions (environ S/. 7,823 millions) a été versé directement à l’agence nationale des ports (APN) par l’opérateur DP World en 2011. S’ajoute à cela $0,931 millions (S/. 2,607 millions) versés à OSITRAN, l’agence régulatrice, et $7,269 million (S/. 10,430 millions) d’impôts sur les revenus. Le total de S/. 30,783 millions est tout à fait respectable par rapport à la moyenne de S/. 28,015 de bénéfices dégagés par ENAPU dans les années 2004-2009, et même si on le compare aux bénéfices dégagés par ENAPU en 2008 (record de S/. 97, 651) vu qu’il s’agit d’un seul terminal (Muelle Sur) et que c’était la première année complète d’activités du concessionnaire DP World Callao. Il est facile d’imaginer que les montants qui seront versés à l’État par APM Terminals dans les années à venir permettront les montants totaux à dépasser même le record de 2008. Pour résumer, on peut espérer que, dans les années qui viennent, l’État ira recevoir des deux concessionnaires un montant (impôts + 3% taux de concession + frais de l’agence régulatrice) plus élevé que ce qu’elle recevait auparavant de ENAPU en forme de dividendes. Pourvu que l’avenir de l’entreprise étatique soit réglé et que le risque des pertes soit éliminé, l’État pourra non seulement profiter des paiements directs de la part des concessionnaires mais aussi des avantages corollaires provenant de la meilleure qualité de l’infrastructure portuaires, la réduction globale des coûts et l’amélioration des services en termes d’efficacité. Conclusion Le cas de la mise en concession du port de Callao en deux phases (2006, 2011) a démontré qu’un pays en voie de développement, avec des forts besoins d’investissement dans l’infrastructure portuaire, peut bénéficier d’investissements privés sans recourir à la privatisation totale et sans être obligé à dépenser de grandes sommes ou de s’endetter pour réaliser les amélioration nécessaires. Le modèle Landlord Port a été utilisé pour exploiter le savoir-faire et l’efficacité du secteur privé dans le projet de modernisation de l’infrastructure et l’amélioration des services. La concession a également conduit à des coûts moins élevés que ceux qui prévalaient avant la mise en concession, bien qu’il soit difficile de trouver des chiffres qui expriment de manière plus précise cette réduction. La dispute entre DP World et l’État péruvien est une tache noire dans l’histoire de la concession, et elle n’est toujours pas résolue, ce qui met en évidence l’importance de planifier au long terme. Pourtant, il est
  • 10. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 10 of 11 indéniable que l’encouragement de concurrence entre les deux concessionnaires permet d’améliorer la qualité des services disponibles. Il n’est pas encore possible de dire sans équivoque que les concessions ont amélioré les finances publiques du pays. L’entreprise étatique ENAPU a pu éviter l’accumulation des obligations de retraite insoutenables, et a même pu se débarrasser d’une certaine quantité de celles-ci grâce à la concession, mais elle subit encore des pertes et constitue un danger pour les finances publiques. Les montants versés par DP World sont respectables mais n’atteignent pas encore le niveau des bénéfices générés par ENAPU avant la mise en concession. Il est possible que le bénéfice réel de la mise en concession ne soit pas connu avant que le deuxième concessionnaire commence a travailler et a verser ses obligations envers l’État. Sources Aguilar, J.C., et al, 2007, ‘La Concesión Del Muelle Sur Del Puerto Del Callao: Una Buena Propuesta’, Coyuntura : Análisis Económico y Social de Actualidad, Año 3, No 12. APM Terminals, brochure, Puerto del Callao : El Corazón de Pacífico Sur, viewed online at http://www.apmterminals.com/uploadedFiles/latin-america/callao_es- PE/newsandpress/Brochure_APMTCallao.pdf APN (Agência Portuaria Nacional), Información Sobre Propuesta De Iniciativa Privada Para La Concesión Del Muelle Norte En El Terminal Portuario Del Callao, viewed online at http://www.apn.gob.pe/c/document_library/get_file?p_l_id=28267folderId=46192name= DLFE-3007.pdf DP World Callao, 2013, Plan de Negocios 2013 : Global Ports Connecting Global Markets, viewed online at http://www.ositran.gob.pe/RepositorioAPS/0/0/par/PLANDENEGOCIOS2012DPWC/DPWC %20Plan%20Anual%20de%20Negocios%202012.pdf El Diario De Economía Y Negocios De Perú, 2011, ‘DP World inicia un arbitraje contra el Perú’, 25/07/11, viewed online at http://gestion.pe/noticia/945090/dp-world-inicia-arbitraje- contra-peru El Diario De Economía Y Negocios De Perú, 2011, ‘APM Terminals asumirá concesión de Muelle Norte el 1 de julio’, 09/06/11, viewed online at http://gestion.pe/noticia/775162/apm-terminals-asumira-concesion-terminal-norte-julio ENAPU, Estados Financeiros Auditados, 2004-2012, viewed online at http://www.enapu.com.pe/spn/transparencia.asp IMF (International Monetary Fund), 2014, World Economic Outlook, Washington viewed online at http://www.imf.org/external/pubs/ft/weo/2014/update/01/
  • 11. Masters in International Development / PSIA Finances Publiques dans les Pays en Développement Name : Edwin Johan Santana Gaarder Student number : 100047222   Page 11 of 11 MGI (McKinsey Global Institute), 2013, Infrastructure Productivity : How to Save $1 Trillion a Year, viewed online at http://www.mckinsey.com/insights/engineering_construction/infrastructure_productivity Negocios Internationales, interview with Maciek Kwiatkowski, viewed online at http://www.comexperu.org.pe/archivos%5Crevista%5CJunio10%5CEntrevista_154.pdf OSITRAN, 2011, Ficha de Contrato de Concesión : DP World Callao S.R.L., Nuevo Terminal De Contenedores En El Terminal Portuario Del Callao – Zona Sur, viewed online at http://www.ositran.gob.pe OSITRAN, 2012, Ficha de Contrato de Concesión : APM Terminals Callao S.A., Modernización Del Terminal Norte Multipropósito En El Terminal Portuario Del Callao, viewed online at http://www.ositran.gob.pe Punto de Vista y Propuesta, 2012, ‘Privatización del muelle Norte Callao, corrupción de nivel exponencial. La Primera 09.03.2012’, viewed online at http://www.puntodevistaypropuesta.com/2012/03/privatizacion-del-muelle-norte- callao.html Sgut, Martín, 2005, Estudio de los Costos y Sobrecostos Portuarios del Puerto del Callao, viewed online at http://www.mincetur.gob.pe/comercio/otros/penx/pdfs/Costos_Sobrecostos_Portuarios_Marti n_Sgut.pdf WEF (World Economic Forum), 2013, Global Competitiveness Report (2013-2014), Geneva, viewed online at http://www.weforum.org/reports/global-competitiveness-report-2013-2014 World Bank, 2010, Peru : Recent Economic Development in Infrastructure (REDI) (vol. 1) – Investing in Infrastructure as an Engine for Growth: Spending More, Faster and Spending Better, Washington, viewed online at http://documents.worldbank.org/curated/en/2010/12/16278201/peru-recent-economic- development-infrastructure-investing-infrastructure-engine-growth-spending-more-faster- spending-better-vol-1-2