6. V
Remerciements
Nous voudrions adresser nos remerciements à :
Nicole Mandon pour ses conseils, ses lectures critiques et ses encoura-
gements.
Tous les professionnels de la fonction RH qui ont accepté d’être inter-
viewés, nous fournissant ainsi le matériau à partir duquel nous avons pu
travailler, ainsi que ceux qui ont relu ces travaux pour les valider, les
actualiser, les compléter.
Nos collègues enseignants chercheurs pour leurs conseils et suggestions
lors des relectures.
Nous remercions enfin nos conjoints et nos familles pour leur patience
et leurs encouragements ainsi que nos amis qui ont facilité nos nombreu-
ses rencontres afin de pallier l’éloignement géographique.
7.
8. VII
Table des matières
Introduction 1
PREMIÈRE PARTIE – La fonction ressources humaines :
son évolution, ses métiers
CHAPITRE 1 ■ La fonction RH au cœur des évolutions
socio-économiques 11
Une évolution constante des missions et des outils 11
Problématiques et débats actuels 18
Une réorganisation de la fonction : décentralisation et externalisation 18
La gestion des compétences 21
Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH 22
La Responsabilité Sociale de l’Entreprise 25
La question des retraites et l’emploi des seniors 28
Le développement de la gestion des RH
dans les différentes fonctions publiques 31
La gestion des RH dans les turbulences de la mondialisation 33
CHAPITRE 2 ■ Le processus de production de la fonction RH 35
Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie, études, plans d’action,
logistique 38
Le sous-système stratégie 38
9. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
VIII
Le sous-système logistique 40
Le sous-système études 42
Le sous-système gestion des domaines d’action 42
Les trois domaines d’action : rémunération, emploi, risques sociaux 44
Le domaine rémunération 44
Le domaine emploi 45
Le domaine risques sociaux 45
CHAPITRE 3 ■ Les emplois-métiers identifiés 50
Positionnement des emplois-métiers étudiés dans le système
ressources humaines 50
Modalités de présentation de chaque emploi-métier :
des activités aux compétences 53
Le processus du domaine et ses emplois-métiers 54
Cinq rubriques descriptives de l’emploi-métier 54
Le résumé de l’emploi-métier 54
La chaîne d’activités de l’emploi-métier 54
Le réseau de relations de l’emploi-métier 55
Les évolutions de l’emploi-métier repérées 55
Les compétences, ou « savoirs en action » 56
DEUXIÈME PARTIE – Emplois-métiers spécialisés
dans un domaine, et compétences associées
CHAPITRE 4 ■ Les emplois-métiers du domaine rémunération 59
Le processus rémunération et ses emplois-métiers 59
L’emploi-métier de responsable paye et ses évolutions 64
Résumé 64
Réseau de relations du responsable paye 66
Les évolutions de l’emploi repérées 69
Les compétences de l’emploi-métier du responsable paye 70
CHAPITRE 5 ■ Les emplois-métiers du domaine emploi 74
Le processus de recrutement 76
L’emploi-métier externalisé de consultant en recrutement
et ses évolutions 82
Résumé 82
11. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
X
L’emploi-métier d’assistant ressources humaines spécialisé 155
Résumé 156
Réseau de relations de l’assistant ressources humaines spécialisé 160
Les évolutions de l’emploi repérées 161
Les compétences de l’emploi-métier d’assistant RH spécialisé 163
L’emploi-métier externalisé de consultant en ressources humaines
et ses évolutions 166
Résumé 166
Réseau de relations du consultant en ressources humaines 168
Les évolutions de l’emploi repérées 168
Les compétences de l’emploi-métier de consultant
en ressources humaines 172
CHAPITRE 8 ■ Des nouveaux métiers 177
L’emploi-métier du chargé d’études ressources humaines 178
Résumé 179
Réseau de relations du chargé d’études RH 181
Les compétences de l’emploi-métier de chargé d’études RH 182
L’emploi-métier de responsable organisation et gestion
des systèmes d’information ressources humaines 184
Résumé 184
Réseau de relations du responsable organisation et gestion
des systèmes d’information ressources humaines 187
Les compétences de l’emploi du responsable organisation
et gestion des systèmes d’information RH 188
Le métier de conseiller-accompagnateur en VAE
(Validation des Acquis de l’Expérience) 189
Processus VAE 190
Les débats sur la faisabilité de la VAE 191
Un nouveau métier est-il en émergence ? 195
Résumé de l’emploi de conseiller en VAP 195
13. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
XII
Conclusion 241
Glossaire 245
Sigles 247
Annexe – La méthode ETED 250
Première étape : le cadrage 250
Deuxième étape : l’échantillonnage de la population d’enquête 251
Troisième étape : l’enquête auprès de l’échantillon construit 252
Quatrième étape : l’exploitation des entretiens 253
Cinquième étape : la validation 254
Bibliographie 255
14. 1
Introduction
omment organiser et garantir la flexibilité productive nécessaire,
tout en développant les compétences indispensables à la croissance
de l’entreprise, mais en garantissant la création de valeur pour
l’actionnaire ?
Comment transformer le travail en compétence collective, tout en
optimisant les charges de personnel grâce à un contrôle de gestion
sociale efficace ?
Comment assurer une certaine équité entre des salariés qui partici-
pent à des collectifs de travail dans les processus de production alors
qu’ils disposent de statuts, de conditions d’emploi, de conditions de
travail complètement différents ?
Comment organiser le travail afin d’utiliser au mieux les compéten-
ces des seniors, comment les motiver dans un contexte social où les
jeunes retraités sont encore le modèle culturel dominant et assurer une
bonne coexistence des générations ?
Comment aménager et mettre en cohérence des pratiques et des
méthodes dans des organisations différentes et éclatées ?
Comment concilier les intérêts souvent contradictoires entre les diver-
ses parties prenantes au niveau micro et macroéconomique ou comment
concilier la recherche du profit et les préoccupations sociales, sociétales
et environnementales ?
Comment la fonction RH peut-elle apporter la preuve de son effica-
cité en optimisant ses propres coûts tout en répondant aux nouvelles
problématiques complexes liées aux évolutions du contexte économi-
que et social ?
La fonction ressources humaines
C
15. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
2
Ces questions et paradoxes sont au cœur des préoccupations des
entreprises et plus spécifiquement des DRH et de la fonction RH. La
gestion des ressources humaines connaît actuellement des transforma-
tions et des interrogations liées aux nombreuses contradictions qui
traversent les organisations de manière générale, liées principalement
aux tensions croissantes entre « local » et « global ». Si les niveaux
d’action et de régulation locaux sont tout aussi indispensables, ils se
sont complexifiés avec la mondialisation.
Nous pouvons affirmer avec Jean-Michel Plane que : « Aujourd’hui,
la gestion des ressources humaines est une fonction à part entière, avec
des outils reconnus, intégrée aux côtés de la Direction Générale. Elle
assure à la fois une fonction d’intégration pour le personnel (dialogue
social, communication de la stratégie) et une fonction de différencia-
tion (recrutement et pilotage des carrières, rémunérations individuali-
sées, etc.). Cette activité vise à gérer les effectifs, les qualifications et les
compétences à court, moyen et long termes. Sa mission : contribuer à la
modernisation et au développement de l’organisation à travers la mise
en œuvre d’un processus d’implication des salariés. Ce processus
s’inscrit dans une recherche de compatibilité entre des intérêts souvent
divergents des actionnaires de l’entreprise, des managers et des
employés. Ainsi la problématique du pouvoir et la gestion du conflit
sont-elles des questions essentielles pour les gestionnaires des ressources
humaines, de même que la gestion des relations professionnelles et la
négociation collective1. » La fonction RH, sa place et ses métiers
évoluent donc en fonction des politiques des entreprises et de la société.
L’objet de notre livre consiste précisément à fournir des réponses à ces
différentes questions. Il permet de découvrir, à travers la description
fine des emplois, la réalité de la fonction aujourd’hui, les raisons de
1. Plane J.-M., La gestion des ressources humaines, Economica, 2003.
Comment analyser finement l’évolution de la fonction ressources
humaines, voire anticiper ses nouveaux métiers ? Comment traduire la
réalité des métiers actuels et futurs en compétences ? Comment
ensuite décliner ces compétences en savoirs théoriques et en savoirs liés
à la pratique professionnelle ? Comment enfin construire des référen-
tiels de formation, tant en termes de contenus que de pédagogie ?
17. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
4
La question de la préparation des étudiants et des salariés aux compé-
tences des métiers est une question centrale aujourd’hui dans les univer-
sités1, dans les centres de formation et dans les entreprises.
La méthodologie choisie pour mener cette étude est empruntée au
CEREQ (Centre d’études et de recherches sur les qualifications). Il
s’agit de la méthode ETED2 mise au point par Nicole Mandon depuis
les années 1990, qui répond précisément à la préoccupation d’analyser
l’évolution des emplois.
« ETED est une méthode d’analyse des emplois qui situe ceux-ci dans leur
environnement (histoire, évolution des organisations, orientations actuelles
et questions en débat) et associe à cette première analyse une analyse fine du
travail à partir d’interviews auprès des titulaires d’emplois. »3 Elle « a pour
caractéristique d’accepter l’emploi comme essentiellement variable et
évolutif »4.
Nous avons adhéré à l’hypothèse que :
« cette approche des emplois, bien situés dans leur environnement, permet-
tait d’en appréhender la complexité, le sens “productif”, et les évolutions. La
dynamique des emplois est liée tant aux impulsions données par les person-
nes qui les occupent que par des facteurs considérés habituellement comme
extérieurs, les deux étant en interaction. Autant de raisons pour ne pas
gommer la diversité des cas de figure mais au contraire exploiter ce qu’elle
signifie. » « On essaie plus particulièrement de dégager (en intégrant diffé-
rentes données) les mouvements émergents ou tendances d’évolution. »5
Cette démarche, scientifique dans sa construction, plus qualitative
que quantitative, s’intéresse davantage à la diversité des situations dans
leur lien avec l’environnement et les individus eux-mêmes qu’à la répé-
tition d’éléments semblables dans différentes situations. Le noyau dur
1. Les réflexions au sein de l’Éducation nationale concernant la création de licences
professionnelles ainsi que la loi sur la réforme des Universités (LRU) initiée en 2007 et
se donnant pour objectif affiché une meilleure préparation au monde du travail, sont
des indicateurs de cette préoccupation.
2. Emploi type étudié dans sa dynamique.
3. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998.
4. Mandon N., préface de L’emploi-type étudié dans sa dynamique, CEREQ, document de
travail no 63, avril 1991.
5. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998.
19. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
6
des sous-systèmes (stratégie, études, logistique et plans d’action) et des
domaines d’application de la fonction (rémunération, emploi et risques
sociaux). Nous faisons l’hypothèse que ce système est invariant au-delà
de la taille ou de la conception que peuvent avoir des ressources humai-
nes les dirigeants d’entreprises. Cette étude de l’environnement,
appuyée par le modèle de la fonction RH en système, a guidé le choix
de l’échantillon des salariés interrogés pour parvenir à brosser un état
des lieux des métiers de la fonction, actuels et en devenir.
Dans les deuxième et troisième parties sont décrits les emplois-
métiers identifiés, classés en trois catégories : d’une part des emplois
spécialisés dans les domaines emploi, rémunérations et risques sociaux,
d’autre part des emplois dits transversaux à ces trois domaines, enfin des
emplois en émergence. Il s’agit des emplois suivants : responsable paye,
consultant en recrutement, responsable formation, responsable sécu-
rité, chargé des relations sociales, directeur des ressources humaines,
secrétaire administratif spécialisé ressources humaines, chargé d’études
ressources humaines, responsable organisation et gestion des systèmes
d’information ressources humaines, conseiller-accompagnateur en vali-
dation des acquis de l’expérience.
Ils résultent chacun d’une reconstruction à partir de l’interview de
plusieurs salariés et de leurs supérieurs hiérarchiques, et nous avons
élaboré différentes fiches pour les présenter :
– une fiche « finalité et résumé » de l’emploi,
– un organigramme intitulé « chaîne d’activités »,
– une description précise du « réseau de relations », identifiant les
partenaires, les circonstances et la spécificité des relations,
– une fiche sur les évolutions repérées de l’emploi,
– une fiche détaillée reprenant les compétences ou « savoirs en
action » de l’emploi.
La quatrième partie met en œuvre le passage de l’analyse des emplois à
l’élaboration d’un référentiel de formation pour les métiers des ressour-
ces humaines. Pour ce faire, sont d’abord définis les concepts utilisés et
le modèle théorique de référence pour la réflexion relative à l’acquisi-
tion des compétences1. En effet, « la compétence ne s’observant qu’en
1. Définies ainsi : « c’est le savoir-mobiliser ses connaissances, capacités et qualités pour
faire face à un problème donné ».
21. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
8
formés sont amenés à acquérir des connaissances et à les mettre en
œuvre. Sur ce point, nous ouvrons des pistes de réflexion en formalisant
la problématique pédagogique : en quoi consisterait un « référentiel de
formation » correspondant à ces définitions du concept de compétences
et du processus d’acquisition lié ?
Que vous soyez un professionnel de la fonction RH, un formateur,
un étudiant, un concepteur de programmes de formation, un lecteur
intéressé par les problématiques liées à la fonction, nous vous proposons
d’« entrer » dans cet ouvrage de différentes manières. Par exemple, il
vous est possible de débuter par la découverte des différents emplois-
métiers décrits (parties 2 et 3) ou bien vous pouvez passer d’un emploi
précis avec sa fiche compétences à une réflexion plus pédagogique en
vous reportant à la partie 4. La première partie, quant à elle, peut se lire
en introduction à une réflexion sur l’organisation de la fonction, mais
également après avoir étudié les divers emplois-métiers afin de les
mettre en perspective et prendre du recul.
Nous souhaitons que ces « entrées à la carte » vous permettent de
trouver matière à nourrir vos pratiques professionnelles et vos réflexions
sur les métiers et les compétences de la fonction ressources humaines
ainsi que les évolutions qui s’y dessinent.
Vous trouverez également tout au long de l’ouvrage des encadrés inti-
tulés « Comment utiliser… » à usage des DRH, des professionnels et
des étudiants qui donnent un mode d’emploi possible :
– d’un schéma (organisation systémique de la fonction);
– d’une rubrique d’un descriptif d’emploi (chaîne d’activités, fiche
compétences, réseau de relations);
– des tableaux (de connaissances théoriques ou des qualités liées à
l’emploi).
22. PA R T I E 1
La fonction ressources
humaines : son évolution,
ses métiers
UELLE EST aujourd’hui la place de la fonction ressources humai-
nes, qui se situe au cœur des contradictions économiques et socia-
les tant macro-économiques que micro-économiques ?
La première dimension, macro-économique, ne laisse aucun doute
sur l’incapacité du système, compte tenu des formes et des temps de
travail actuels, à résorber un volant important de chômage, devenu
structurel. La deuxième dimension, micro-économique, met en évidence
le passage d’une standardisation de produits et de procédés à une
personnalisation, à une modularité sous les contraintes de délais-coûts-
qualité. Les entreprises sont ainsi conduites à gérer non plus des proces-
sus longs mais des lots spécifiques, des projets ponctuels impliquant des
capacités d’adaptation et de flexibilité devenues incontournables. Danièle
Q
23. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
10
Linhart1 met en évidence les contradictions entre les discours (liés au
management participatif), les actions (recherche de consensus, particu-
lièrement depuis les années 1980) et les conséquences souvent contra-
dictoires (licenciements massifs) liées au passage difficile entre un mode
de production et surtout d’organisation taylorien-fordien-fayolien et
un mode de management adaptatif dit flexible.
Jean-Michel Plane dit, quant à lui : « Les réseaux horizontaux parais-
sent être les plus appropriés aujourd’hui pour faire face à la complexifi-
cation des performances à atteindre (coût, qualité, délais, flexibilité,
variété ou innovation). La coopération est donc envisagée comme une
intercompréhension, voire une intersubjectivité, entre les acteurs. On
parle de décloisonnement entre les fonctions, de gestion des interac-
tions, de logiques de projet ou de communication entre services ! »2.
On comprend ainsi que les contextes économiques, sociaux, organi-
sationnels vont contribuer à fournir des réponses différenciées (histori-
quement et spatialement) quant au rôle et à la place de la fonction.
Nous articulerons notre propos en deux parties en abordant, parallèle-
ment au champ économique et social, les grands traits de l’évolution
historique de la gestion des ressources humaines, pour déboucher sur les
discours actuels quant aux besoins en gestion des ressources humaines.
Nous montrerons, grâce à un bref historique, que les environnements
(théorique, culturel, économique, social, juridique, technologique, orga-
nisationnel) ont conditionné l’évolution de la fonction RH. Cette appro-
che nous permettra de confirmer notre hypothèse de travail.
1. Linhart D., La modernisation des entreprises, Éd. La Découverte, Paris, 1994.
2. Plane, J.-M. La Gestion des ressources humaines, Economica, 2003.
24. 11
CH A P I T RE 1
La fonction RH au cœur
des évolutions
socio-économiques
A FONCTION RH est-elle tributaire des environnements socio-
économiques ? Que nous enseignent les débats actuels ?
Une évolution constante des missions et des outils
L’histoire de la fonction RH ne se confond pas avec celle des entreprises
puisqu’elle concerne principalement les sociétés de plus de deux cents
personnes1. Comme le souligne Jean Fombonne, l’histoire de la fonc-
tion est liée à l’histoire du management, de ses paradigmes, de ses
méthodes. Elle emprunte à la sociologie et à la psychologie (fonctionne-
ment des organisations et des groupes, identification des couches sociales,
1. Fombonne J., Pour un historique de la fonction personnel, Paris, Éd. d’Organisation,
1992.
L
25. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
12
évolution des mentalités, nature de la subordination des travailleurs,
exercice des libertés, de la mobilité, du commandement, motivations…).
Elle est tributaire du droit social : des conventions internationales, des
lois nationales, des conventions collectives, des accords interprofession-
nels, des accords d’entreprise, de la jurisprudence. Le mouvement social
et l’action syndicale concernent dans tous les cas la fonction RH, soit
directement, soit indirectement. L’histoire des technologies influence
les qualifications, les formations, les salaires, les recrutements, les condi-
tions de travail. L’histoire économique avec ses cycles, ses mouvements
de concentration, les faillites, les restructurations, les échanges se réper-
cute sur les niveaux d’emploi et de rémunération.
L’histoire de la fonction emprunte ainsi à tous ces environnements
sans qu’aucun d’eux ne puisse revendiquer une influence déterministe
sur son contenu à un moment donné.
Une synthèse sous forme de tableau nous a fait retenir1 quatre gran-
des périodes, des prémices à 1945, les Trente Glorieuses, les années de
crise et la période actuelle durant lesquelles la fonction RH a subi de
profondes transformations (activité dominante, missions, acteurs,
métiers, compétences, responsabilités, moyens, outils, structure, noms
de la fonction et des acteurs), les politiques sociales menées par les
entreprises s’adaptant aux évolutions du macro-environnement (social
et idéologique, économique, technologique, politique, juridique).
Ainsi la fonction ressources humaines2 a évolué sous la double
influence de son environnement économique et social et de l’organisa-
tion du travail dans les entreprises. À chaque époque, et pour chaque
configuration d’organisation des entreprises3, elle a eu pour mission
principale de résoudre les problèmes qui se posaient pour les hommes,
salariés des organisations.
1. Inspiré de Peretti J.-M., Gestion des RH, Paris, Vuibert Entreprise, 1998.
2. Pour les lecteurs intéressés par une telle approche de la fonction RH, et en particulier
par les enjeux de pouvoir sous-jacents aux questions de la décentralisation de la fonc-
tion, lire Godelier E., « La place de la fonction RH au sein de la structure de
l’entreprise : un dilemme entre l’efficacité et la reconnaissance » in Ressources Humai-
nes, une gestion éclatée, Paris, Economica, 1998.
3. Le terme « entreprise » est entendu ici et dans le reste de l’ouvrage au sens générique. Il
serait plus exact de parler « d’organisation » au sens de la psychosociologie des organi-
sations, mais ce terme peut entraîner une confusion avec le concept d’organisation de
l’entreprise au sens de la structure organisationnelle.
27. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
14
Tableau
1.2
–
Répercussions
des
évolutions
sur
la
fonction
ressources
humaines
Périodes
Environnement
macro-économique
Des
prémices
à
1945
Les
Trente
Glorieuses,
de
1945
à
1975
Les
années
de
crise,
de
1975
à
1990
Le
passage
au
3
e
millénaire
Politique
sociale
et
fonction
ressources
humaines
Politiques
d’œuvres
sociales
Services
médicaux
et
sociaux
dans
les
entreprises
Assistance
aux
personnels
et
aux
familles
Création
de
centres
d’appren-
tissage
Transformation
des
condi-
tions
matérielles
de
travail
(sécurité,
rendement,
confort)
Développement
de
la
forma-
tion
Méthodes
d’analyse
et
d’évaluation
du
travail
Après
l’élargissement
des
tâches
des
années
1960,
enri-
chissement
des
tâches
Déclin
du
taux
de
syndicalisation
(11
%
en
1989
contre
20
%
en
1981
en
France)
Travail
à
la
chaîne
pour
7
%
de
la
population
ouvrière
en
1984
En
1989,
62
%
de
la
population
active
dans
les
services
Informatique
et
bureautique
trans-
formant
les
métiers
et
le
travail
Changement
des
politiques
socia-
les,
modification
de
la
gestion
des
dossiers
RH
en
liaison
avec
l’infor-
matisation.
Prise
de
conscience
par
l’entreprise
de
sa
responsabilité
par
rapport
à
l’emploi
dans
un
contexte
de
mondialisation
Rigueur
salariale
et
flexibilité
Problématique
contradictoire
entre
pré-retraites
et
allongement
de
la
durée
du
travail,
entre
plans
sociaux,
maladies
professionnelles
et
accroisse-
ment
de
productivité
Activité
dominante
de
la
fonction
RH
Avant
1916
:
pas
de
fonction
personnel
De
1917
à
1935
:
émergence
d’une
fonction
autonome
et
mixte
:
personnel
+
services
généraux
De
1936
à
1946
:
besoin
de
contacts
permanents
sala-
riés/direction
Droit
du
travail
Gestion
administrative
(paye
+
sanctions)
Dialogue
social
et
syndical
après
la
libération
Assistance
et
œuvres
sociales
82
%
d’entreprises
ont
une
direction
du
personnel
en
1961
qui
gère
effectifs,
embauches
et
qualifications,
réglementation,
discipline,
administration
du
personnel
Rationalisation
des
procédu-
res,
négociations
sociales,
relations
syndicales
Après
1960
:
motivation,
dynamisation,
formation,
information,
organisation
de
l’entreprise
La
fonction
est
devenue
centrale
Années
1970
à
1980
:
trois
missions
:
administration
sociale
du
contrat
de
travail,
gestion
des
personnes
et
développement
social
nécessitant
des
compétences
différentes
:
négociation,
anima-
tion,
écoute
psychologique,
analyse
sociologique
Informatisation
de
la
fonction
(paye
et
administration
en
1986
pour
10
%
du
coût
de
la
fonction)
Fonction
directement
confrontée
aux
changements
des
politiques
sociales
:
–
gestion
des
compétences,
VAE,
fidélisation
des
«
hauts
potentiels
»
–
gestion
des
effectifs
et
des
réorgani-
sations
:
35
h,
plans
sociaux,
reclas-
sements
–
démarches
qualité,
démarches
sécurité
–
communication
interne
et
externe
–
audit
social,
mesure
de
l’efficacité
et
des
coûts
du
service
RH
–
gestion
de
projets
conjoncturels
(35
h,
retraites,
VAE…)
–
gestion
du
climat
social
pour
mini-
miser
les
dégradations
des
condi-
tions
de
travail
–
«
développement
durable
»
29. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
16
C’est ce que confirment dans une publication récente Jean Nizet et
François Pichault1 :
« Certains traits de l’environnement retiendront notre attention dans la
mesure où ils exercent une influence spécifique sur l’adoption de tel ou tel
modèle de gestion des ressources humaines : le marché du travail, la politi-
que de réglementation sociale en vigueur, le marché des biens et services
concernés, et le contexte culturel. La plupart de ces traits peuvent se référer
à la fois au contexte national et au contexte sectoriel dans lesquels se trouve
l’organisation considérée ».
Il faut souligner que l’évolution de la fonction RH ne concerne pas
de façon identique toutes les entreprises. En effet, selon leur organisation,
leur activité, leur taille, elles vont développer de manière très inégale les
différentes missions de la fonction, contrairement à ce que peut laisser
supposer une lecture trop « historique » des tableaux précédents.
La constitution de notre échantillon tient compte de ces nouvelles
configurations des organisations, ainsi que des nouvelles problémati-
ques de l’environnement économique, social et juridique. Les caracté-
ristiques de la période récente et actuelle concernent principalement les
points suivants :
Le chômage a des conséquences en termes de plans sociaux à gérer
dans les entreprises.
La réduction du temps de travail présente des implications tant socia-
les (négociations, rémunérations) que réorganisationnelles.
L’évolution démographique (vieillissement de la population) et l’allon-
gement des durées de cotisation pour les retraites génèrent une remise
en question des équilibres antérieurs.
La concurrence résultant de la mondialisation avec ses fusions,
rachats, délocalisations, automatisation, réduction des coûts, normes
qualité… bouleverse la gestion des entreprises et donc la gestion du
personnel : réduction d’effectifs, reconversions, mobilité géographique
ou professionnelle, réduction des coûts du service RH, etc.
L’expansion du secteur des services (aux entreprises et aux person-
nes), avec ses potentialités de créations d’emplois génère de nouvelles
1. « L’éclatement des modèles en GRH, l’explication par la contingence, son intérêt et ses
limites », in Ressources Humaines, op. cit.
31. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
18
– de la taille des entreprises; en particulier il est apparu nécessaire de ne
pas limiter l’échantillon aux entreprises dans lesquelles un service RH
est toujours clairement identifié, et donc d’intégrer les PME;
– des nouvelles problématiques, économiques, sociales et juridiques.
Problématiques et débats actuels
Sans prétendre à une présentation exhaustive des débats actuels, il est
apparu quelques grandes constantes, à la fois chez les auteurs spécialis-
tes des questions RH ainsi que pour les professionnels de la fonction
que nous avons rencontrés.
Une réorganisation de la fonction : décentralisation
et externalisation
La décentralisation de la fonction, c’est-à-dire le partage des tâches
avec le management opérationnel n’est pas récent et est pratiquement
achevé, sauf dans les organisations de la fonction publique où la gestion
des ressources humaines est partagée avec les organisations syndicales et
non avec les managers de terrain, même si des tentatives vont dans ce
sens1. La généralisation des entretiens annuels, renforcée encore par les
mesures concernant le DIF2 et les entretiens de professionnalisation ont
de fait transféré à l’encadrement l’évaluation des compétences ainsi que
les décisions qui en découlent en matière de formation ou de gestion
des carrières. Le service RH, parallèlement à ce transfert, s’est doté de
systèmes d’information de plus en plus performants et intégrant des
modules auparavant dispersés. De ce fait l’offre de services informati-
que RH s’est développée, avec parallèlement l’apparition dans les orga-
nigrammes d’un « chargé de SIRH », ou d’un « responsable des systèmes
1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres
opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du
Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH,
sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a
concerné 470 personnes sur la période 2005-2007.
2. Droit individuel à la formation instauré en 2004 par le législateur.
33. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
20
sont en perte sensible de vitesse à mesure que les sites de recrutement
par l’Internet se développent et que les agences d’intérim doublent leur
offre de service. D’une fonction de pré-recrutement, les contrats d’inté-
rim se transforment en période d’essai à durée modulable.
D’autres se développent tels que la paye de plus en plus externalisée
soit à des cabinets d’expertise comptable voire même à des prestataires
qui délocalisent en Inde ou dans d’autres pays à faible coût de main-
d’œuvre. Les cabinets de Conseil en Ressources Humaines ont eu leur
heure de gloire avec la mise en place des 35 heures et se réorientent
aujourd’hui soit vers la mise en place de démarches compétences, soit
vers des dossiers encore à développer concernant la gestion des seniors
ou bien l’accompagnement des fusions et des restructurations. Les
entreprises de services informatiques RH se sont multipliées ces derniè-
res années, et la concurrence est maintenant rude sur ce marché. Les
entreprises clientes leur reprochent souvent d’avoir des compétences en
RH insuffisantes pour la compréhension en profondeur de leurs
problématiques et privilégient les prestataires capables de concevoir des
produits sur mesure, intégrant des logiciels déjà en place.
Quant aux prestataires de formation, ils se trouvent sur un marché en
recul, les entreprises ayant réintégré une partie de la formation en
interne ou bien diminué leurs dépenses, et ils ont dû se lancer dans des
démarches de certification qualité de façon à se démarquer les uns des
autres.
Enfin, les cabinets et avocats spécialisés en droit du travail sont de
plus en plus sollicités pour la rédaction des nouveaux contrats de travail
mis en place par le législateur, pour la gestion des plans de sauvegarde
de l’emploi, pour préparer ou accompagner les restructurations ou
rapprochements d’entreprises.
La tendance apparue dans les grandes entreprises au début des années
2000 semble se confirmer. On voit la fonction RH se répartir nette-
ment en deux pôles :
– d’une part les fonctions et métiers opérationnels, caractérisés par des
« correspondants RH » d’usines ou des Responsables Ressources
Humaines (RRH) de sites, avec leurs assistants opérationnels;
– et d’autre part une fonction prospective, chargée de réfléchir à moyen
ou long terme, sur les compétences ou la gestion des carrières, mais
en relation étroite avec la stratégie globale de l’entreprise voire
35. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
22
préoccupation majeure dans les entreprises, et l’arrivée des seniors dans
les effectifs du fait des réformes sur les retraites, associée à la pénurie
programmée de main-d’œuvre qualifiée dans certains secteurs ou métiers
va dans les prochaines années accentuer cet intérêt.1 Alors qu’en 2006
et 2007, les entreprises s’étaient centrées sur la gestion des hauts poten-
tiels, ou des compétences-clés, la nécessité d’affiner la gestion des carriè-
res pour fidéliser les salariés et pour gérer au mieux les départs en
retraite et les réorganisations qui s’ensuivront, vont réactiver la mise à
jour et le suivi des compétences. Cette tendance ne peut qu’être renfor-
cée par la généralisation des certifications, et l’obligation de négocier
sur la GPEC à partir de 2008.
« Les entreprises devront faire un diagnostic précis de leur gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences des seniors. (…) La pros-
pective des métiers par famille professionnelle a, dans certaines branches
et/ou entreprises, obtenu des résultats intéressants. Il est possible d’inté-
grer la dimension “âge” dans la gestion anticipatrice des emplois et
des compétences. Cette phase de diagnostic, de veille et d’anticipation
concerne l’entreprise – direction, salariés, partenaires sociaux – et son
environnement. »2
Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH
L’ancienne version des normes ISO 9000 (version 1994)3 tenait peu
compte de la dimension ressources humaines dans l’entreprise. Le
contexte économique et social du début des années 90 dans lequel s’est
inscrite l’élaboration de cette norme permet de comprendre la faible
place consacrée aux RH. En effet, beaucoup d’entreprises étaient en
proie à des difficultés économiques, à des plans sociaux à répétition. La
1. En juillet 2003, on trouvait en librairie des dizaines de titres traitant de ce thème :
Management des compétences, Le management des compétences dans les entreprises européen-
nes, Mesure des compétences, Gestion des compétences et Knowledge Management, Objectif
compétences, Valoriser les compétences : un levier pour l’entreprise, Construire les compétences
individuelles et collectives, Le management des connaissances et compétences en pratique, etc.
2. Marbot L. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Paris, Édition Village Mondial,
2004.
3. « 19 000 entreprises certifiées ISO 9000 en France en 2000 pour 3 000 en 1994 »,
Dossier certifications, Qualité références, juillet 2000.
37. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
24
– conserver les enregistrements appropriés concernant la forma-
tion initiale et professionnelle, le savoir-faire et l’expérience.
« Jusque-là, les directions des ressources humaines étaient peu concer-
nées par une démarche qualité. Désormais, elles vont devoir répondre à
des audits sur des points précis. Et les entreprises vont devoir se structurer
et se doter de véritables moyens de gestion des ressources humaines. »1
Pour répondre à ces exigences, l’entreprise sera amenée à instaurer
une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Impossible donc de mettre en place une procédure de recrutement sans
avoir au préalable travaillé sur la définition de fonction, sur l’évolution
des métiers, sans réfléchir à une gestion des compétences à long terme
(grâce à l’entretien annuel d’évaluation). Par ailleurs, la traçabilité des
dossiers individuels devra être parfaitement tenue à jour. Enfin, la
nouvelle norme ISO met l’accent sur la motivation du personnel et
ainsi les systèmes de rémunération pour agir sur la motivation et éviter
de voir fuir les meilleures compétences vers d’autres employeurs. De
plus, il apparaît que le responsable des ressources humaines devra entre-
prendre un travail d’information et de communication à l’égard du
comité d’entreprise (imposé par la loi) pour les questions d’organisation
du travail, à l’égard du CHSCT pour les infrastructures.
Cependant, si l’implication de la fonction RH dans la démarche
qualité est désormais reconnue ainsi que les principaux outils à mettre
en place, l’incertitude demeure quant à l’interprétation des organismes
certificateurs. À ce titre, Patrick Renaud, responsable du département
auditeurs salariés de l’AFAQ précise : « …nous allons nous attacher à
vérifier ce que l’entreprise a mis en place pour gérer ses compétences.
Nous allons aussi contrôler que l’entreprise met en œuvre de véritables
processus, par exemple en matière de formation afin de garantir les
niveaux de compétences, ou encore en matière de recrutement, pour
chercher à l’extérieur les compétences qui pourraient faire défaut en
interne. Nous serons enfin attentifs aux outils qui s’inscriront dans ce
processus de gestion des emplois, comme les matrices de compétences
ou encore des matrices de polyvalence. Sans oublier la sensibilisation de
l’ensemble du management à la qualité mais aussi à la “voix” du client
1. Propos de Guy Raynaud, Directeur Qualité et Ressources Humaines de la société de
construction mécanique Panhard dans « Chroniques des nouvelles normes ISO 9000 »,
Qualité en mouvement, no 48, avril-mai 2001.
39. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
26
Progressivement, des critiques et des contre-pouvoirs se sont déve-
loppés en réaction à des abus (licenciements boursiers, catastrophes
écologiques, travail des enfants, souffrance au travail). Les entreprises se
trouvent ainsi confrontées en externe et en interne à des acteurs à la fois
différents et ayant des intérêts contradictoires, qui se préoccupent de
leurs activités et de leurs répercussions, qui exercent des pressions ou
leur demandent des comptes : syndicats, associations de consomma-
teurs, fournisseurs, organisations non gouvernementales, agences de nota-
tion, investisseurs responsables, pouvoirs publics, médias…
La fonction RH se trouve au cœur de ces nouvelles problématiques
complexes et de ces nouveaux paradoxes. Dans cette optique, la mesure
de la performance ne s’effectue plus sur des critères essentiellement
économiques et financiers mais intègre des indicateurs sociaux, socié-
taux et environnementaux. Le souci d’améliorer l’image sociale et socié-
tale de leur entreprise est largement partagé par les DRH sous le vocable
« développement durable » ou RSE qui, traduit dans le domaine RH
une attention accrue envers les handicapés, l’égalité hommes/ femmes,
la diversité culturelle et l’intégration, l’embauche des jeunes... Cette
attention est cependant largement dopée par diverses obligations léga-
les1. Mais il y a encore loin de l’intention à l’action concrète… Et les
nombreux rapports et enquêtes dénonçant la dégradation des condi-
1. L’égalité salariale entre les deux sexes date de mars 2006 et la pression va être renforcée
en 2008.
Environnemental
Durable
Viable Vivable
Équitable
Économique Social
41. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
28
à venir, et les DRH semblent avoir réussi à se faire entendre des direc-
tions générales du moins dans les grandes entreprises. De ce fait, la
formation des managers opérationnels, qui avait été abandonnée quel-
que peu ces vingt dernières années, semble refleurir, avec des cycles de
deux à huit jours, intitulés souvent « initiation à la gestion des ressour-
ces humaines », ou « professionnalisation des managers ».
La question des retraites et l’emploi des seniors
Le débat sur l’âge de départ en retraite, qui s’est soldé en juillet 2003 par
l’adoption d’un projet de loi, relayé fin 2007 par la remise à plat de
certains régimes spéciaux, ainsi que les nouvelles négociations prévues
en 2008 pour passer à 41 ans de cotisations d’ici 2012 pour tous les
régimes ne supprime pas pour autant les nombreuses contradictions
auxquelles les entreprises, les salariés et donc les services des ressources
humaines sont confrontés.
En effet, alors que nous sortons d’une période de vingt années
pendant lesquelles l’âge du départ en retraite s’est stabilisé en moyenne
autour de 57 ans, il s’agit maintenant de faire rester tous les salariés
jusqu’à 60, voire 65 ans.
Cette question représente un défi majeur, auquel les DRH ne se sont
pas encore tous attelés tellement la question est complexe. Elle se heurte
à des stéréotypes bien ancrés tels que la moindre productivité, ou la
moindre résistance des seniors en occultant les qualités ou les compé-
tences qui leur sont spécifiques. Et un consensus se dégage, chez tous les
acteurs pour résister face à cette évolution.1
Face au vieillissement de la population, aux difficultés annoncées du
financement des retraites, face à la pénurie de main-d’œuvre à venir du
fait de la courbe démographique, l’enjeu pour les entreprises, pour les DRH
mais plus largement pour la société, pour le politique et les organisa-
tions syndicales, est de résoudre la contradiction suivante : comment
réorganiser le travail pour les seniors, et le « faire passer » dans l’opinion
1. « les pratiques évoluent encore trop peu en raison de la persistance des discriminations, des
préretraites et des dispenses de recherche d’emploi. On n’observe pas de changement notable
des comportements des seniors et des employeurs dans le sens d’un allongement de
l’activité ». COR (conseil d’orientation des retraites) compte-rendu de la séance du
30 mai 2007.
43. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
30
– ils ont eu un début d’activité plus tardif et n’auront pas acquis à
60 ans les trimestres suffisants;
– les progressions de carrière sont plus faibles à partir de 50 ans;
– les plans de formation ne sont pas adaptés à des personnes qui
maîtrisent leur métier »1.
Diverses pistes sont explorées dans les accords signés à Arcelor/
Mittal, à PSA, dans les Caisses d’Épargne, ou à la Caisse des Dépôts et
Consignations : un passage à temps partiel ou un taux d’activité dégres-
sif, le tutorat de jeunes embauchés, un réaménagement des postes, la
conception de nouvelles missions transversales intégrant des tâches
touchant à l’administratif, à la qualité et à la sécurité; des points carrière
à 45 ans.
Cependant l’analyse de Nicolas Rolland sur les seniors en tant que
variable stratégique dans la capitalisation et la transmission des connais-
sances, est encore loin d’être partagée2. « A la différence de nombreuses
ressources, la connaissance possède comme caractéristique de ne pas
s’user au fil du temps, si tant est qu’on l’utilise judicieusement. De plus,
les expériences et les apprentissages divers viennent se greffer à cette
connaissance pour l’améliorer, faisant par cela croître sa valeur absolue.
Au regard de cette approche, l’actif vieillissant, de par ses divers appren-
tissages et ses multiples expériences, aurait plutôt tendance, à l’image
du bon vin, à faire croître sa valeur au fil des années. La gestion de ces
personnes devient un enjeu stratégique pour les entreprises. (…) elles
doivent instaurer un système managerial leur assurant une capitalisa-
tion efficiente de leurs connaissances ».3
Dominique Thierry4, de Développement et Emploi, dit que « les entre-
prises devront apprendre à gérer des âges différents, avec des attentes
différentes. » Il leur faudra repenser la mobilité, la formation profes-
1. Marbot E. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Éditions Le Village Mondial,
2004.
2. Sur 45 étudiants en Master 2 RH en 2007/2008 (à Strasbourg et Reims), seulement 2
ont une mission en relation avec la problématique des seniors…
3. Rolland N., Management des connaissances et vieillissement de la population active,
in Perennité au travail. Âge, bouleversements et performance, sous la direction de Florian
Sala, Lyvie Guéret-Talon, Éditions Chronique sociale, Lyon, 2006.
4. « Passer d’une gestion par les âges à une gestion des âges », de Thierry D., in Entreprises
et Carrières, no 615, avril 2002.
45. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
32
collectivités. La difficulté reste cependant la culture de la fonction
publique avec le poids des statuts, des concours, et le rôle traditionnel
des syndicats dans la gestion des personnels. Pour faire évoluer cette
culture, plusieurs collectivités ont mis en place des formations intégrant
la GRH à destination des cadres opérationnels1. En effet, l’enjeu des
prochaines années va être le développement de la mobilité interne, qui
devra être basée sur les compétences pour atteindre les objectifs politi-
ques de réduction d’effectifs2 tout en maintenant la qualité des services
rendus aux usagers. Cette question de la modernisation de la fonction
publique n’est pas spécifique à la France.3
Pour ce qui concerne la fonction publique hospitalière, elle doit déjà
faire face à la pénurie de main d’œuvre qualifiée (médecins, infir-
mières), à une incapacité chronique à gérer sa masse salariale avec des
millions d’heures supplémentaires en retard de paiement, tout en subis-
sant des contraintes de service public incontournables : ouverture
365 jours par an et 24 h/24, des activités fluctuantes et non prévisibles
par essence. Les dysfonctionnements se rendent visibles actuellement
par des revendications catégorielles tournantes (grève des médecins
urgentistes en cette fin d’année 2007). Mais il faudra bien repenser
globalement la gestion des ressources humaines dans une institution où
les compétences humaines sont le cœur même de l’activité. C’est un
énorme chantier à venir.
Enfin, la fonction publique d’État. Un répertoire interministériel
des métiers de l’État (RIME) est en cours d’élaboration. Il a établi
230 « emplois-référence » répartis dans 23 « domaines fonctionnels ».
Mais sur le terrain, les DRH qui ont été nommés un peu partout dans
les rectorats, les inspections académiques, les casernes, les services minis-
tériels… n’arrivent pas à faire changer des règles statutaires très contrai-
1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres
opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du
Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH,
sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a
concerné 470 personnes sur la période 2005-2007.
2. Non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, comme l’a promis
Nicolas Sarkozy président.
3. Voir l’ouvrage collectif, sous la direction de Louise Lemire, Denis Proulx et Luc
Cooremans, Modernisation de l’État et gestion des ressources humaines, Éditions
Université du Québec et Haute École Francisco Ferrer, Belgique, 2005.
47. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
34
du travail, préfet, DDTE,1 mais également AFPA2, et université locale3
pour organiser la reconversion. La tendance, encouragée par le pouvoir
politique, est également de faire appel à des prestataires de reconversion
privés, avec un contrat sur objectifs. Les DRH devront également gérer
des grèves, des manifestations de salariés qui n’ont plus rien à perdre, et
seront en première ligne dans les négociations aux côtés des dirigeants.
Une autre conséquence se trouve dans la nécessité de savoir gérer les
ressources humaines dans de grandes multinationales, avec des différen-
ces culturelles, législatives et de pouvoir d’achat très importantes. Des
services se sont ainsi spécialisés dans la gestion des expatriés. Ce sont
généralement des salariés jeunes, bien formés, entreprenants, qu’il s’agit
de gérer au regard du marché de l’emploi de ces profils rares ou atypi-
ques. En effet, les entreprises sont en concurrence entre elles pour atti-
rer puis fidéliser ces candidats à l’expatriation ce qui signifie une veille
attentive sur les rémunérations et les avantages divers offerts par les
autres employeurs non seulement français mais mondiaux : aide à
l’emploi du conjoint ou compensation financière, inscription des
enfants dans des écoles internationales, logement fourni. Cela donne
également lieu à l’émergence d’emplois nouveaux, dont l’intitulé est
généralement anglo-saxon. Nous en avons rencontré deux. Il s’agit de
l’emploi de « Human Ressource Business Partner », c’est-à-dire l’inter-
locuteur RH des cadres dirigeants des sites implantés à l’étranger, et du
« RH Account Manager » c’est-à-dire un coordonnateur qui s’assure de
la cohérence des politiques RH vis à vis des plus gros clients (les
« grands comptes ») quel que soit le pays d’où proviennent les services
ou les produits pour ces clients. De nombreuses offres d’emploi appa-
raissent sur les sites internet de recrutement à l’international.
Ce tour d’horizon n’est probablement pas exhaustif. Il pointe néan-
moins les nombreux défis qui attendent les responsables de la fonction
ressources humaines dans les années à venir, et laissent augurer d’un
marché de l’emploi pour des diplômés en ressources humaines plein
d’opportunités et d’écueils…
1. Pour mobiliser des fonds pour la création de nouveaux emplois sur la zone ; en
subventionnant les entreprises qui viennent s’installer ou en subventionnant celles qui
embauchent des salariés à reclasser.
2. Association pour la Formation Professionnelle des Adultes.
3. Par exemple en Suède, reconversion des salariés des télécommunications par l’Université.
48. 35
CH A P I T RE 2
Le processus de production
de la fonction RH
UE PRODUIT la fonction RH et comment s’organise-t-elle pour
créer de la valeur ajoutée ?
La très grande diversité des organigrammes ressources humaines
rencontrés (allant de l’inexistence totale à des services très étoffés,
centralisés ou décentralisés), et l’extrême variété de la composition des
emplois rencontrés (les tâches confiées aux titulaires d’emploi sont
regroupées de façon très souvent différente d’une entreprise à l’autre)
nous ont conduites à nous interroger sur ce qui fonde la logique des
différents choix d’organisation des RH. Un exemple d’organigramme
(une mutualité agricole) va nous permettre d’illustrer les difficultés
rencontrées (figure 2.1).
Dans un tel organigramme, les intitulés ne permettent pas d’identifier :
– le contenu des postes : par exemple, que signifient « gestion admi-
nistrative », ou « coordination régionale » ?
– la différence entre les trois intitulés : assistante ressources humai-
nes, assistante formation et communication, et assistant de commu-
nication;
Q
49. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
36
– la différence entre les niveaux hiérarchiques : la chargée de
communication est-elle plutôt au niveau hiérarchique du DRH ou
au niveau des assistants ?
En extrapolant au-delà de cet exemple, il suffit de citer les intitulés
d’emplois (extraits de divers organigrammes réels) pour constater
l’instabilité des dénominations et par là même la difficulté de se repré-
senter les fonctions réelles. Ainsi, nous avons rencontré les intitulés
suivants : directeur des ressources humaines, directeur des relations
sociales, directeur du personnel, responsable du personnel, assistant
chargé de la gestion du personnel, assistant RH, assistant formation,
assistant chargé des études et de l’emploi, chargé de la gestion des
compétences et de la formation, responsable du contentieux et de la
gestion des carrières, assistant paye et administration du personnel,
employé chargé du suivi des contrats, secrétaire paye, pointeau, chargé
des relations sociales et des statistiques, responsable de coordination
paye, secrétaire rédacteur adjoint, secrétaire général, assistant RH et
service paye, responsable de la gestion de la formation, attaché chargé
de la gestion des carrières, ou plus récemment responsable ressources
humaines, correspondant ressources humaines, responsable du déve-
loppement ressources humaines, etc. Cette énumération est loin d’être
exhaustive mais suffit à illustrer les difficultés que nous avons rencon-
trées. À quel niveau de responsabilités ces divers emplois sont-ils situés ?
Figure 2.1 – Exemple d’organigramme
du service RH d’une mutualité agricole
Secrétariat général
gestion administrative du
conseil d’administration
Centre X (lieu)
gestion administrative
Échelon local
coordination régionale
Relations sociales
conseil d’entreprise
coordination des
instances départementales
Direction
Secrétariat de
direction
Chargé des ressources
humaines
Assistante
ressources
humaines
Assistante
formation et
communication
Assistant de
communication
Chargée de
communication
51. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
38
Autrement dit, il y aura de moins en moins d’activités correspondant
à des techniques stabilisées et de plus en plus d’activités correspondant
à des dispositifs toujours à reconstruire s’appuyant pour fonctionner sur
des réseaux relationnels. Ceci explique que dans certaines entreprises la
fonction RH se structure :
– d’une part en emplois opérationnels;
– d’autre part en emplois de prospective.
Ou encore que dans d’autres entreprises, les opérationnels RH (appe-
lés souvent « correspondants RH ») sont également chacun chargés
d’un dossier « transversal » (la formation, le recrutement, la communi-
cation, etc).
Pour rendre compte de cette complexité d’organisation de la fonction
RH, nous proposons une représentation sous forme d’un système.
Cet essai de formalisation systémique résulte des entretiens de
cadrage réalisés avec des directeurs des ressources humaines soit spécifi-
quement pour l’étude, soit lors du suivi de stagiaires en entreprise, soit
lors de nos travaux de consultant.
Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie,
études, plans d’action, logistique
Comment représenter les différents sous-systèmes RH, leur positionne-
ment relativement aux autres fonctions de l’entreprise, relativement à
l’extérieur ainsi que leurs interactions ? La configuration schématique
suivante permet de répondre à ces premières questions.
Le sous-système stratégie
Il correspond à la définition des différentes politiques en matière de RH :
emploi, rémunération, formation, communication, sécurité, etc. Celles-ci
sont très étroitement liées à la politique générale de l’entreprise car elles
doivent accompagner, voire précéder les choix en matière de politique
industrielle ou commerciale. Ce sous-système peut être développé
explicitement (par exemple lorsque le DRH a un poids dans l’équipe
dirigeante) ou bien être implicite, lorsque les choix stratégiques ne sont