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La fonction
Ressources
Humaines
Jacqueline BARRAUD
Martine GUILLEMIN
Françoise KITTEL
Métiers,compétences et formation
3e
édition
La fonction
Ressources Humaines
La fonction
Ressources Humaines
Métiers, compétences
et formation
Jacqueline BARRAUD
Martine GUILLEMIN
Françoise KITTEL
3e édition
© Dunod, Paris, 2008
ISBN 978-2-10-054422-6
V
Remerciements
Nous voudrions adresser nos remerciements à :
Nicole Mandon pour ses conseils, ses lectures critiques et ses encoura-
gements.
Tous les professionnels de la fonction RH qui ont accepté d’être inter-
viewés, nous fournissant ainsi le matériau à partir duquel nous avons pu
travailler, ainsi que ceux qui ont relu ces travaux pour les valider, les
actualiser, les compléter.
Nos collègues enseignants chercheurs pour leurs conseils et suggestions
lors des relectures.
Nous remercions enfin nos conjoints et nos familles pour leur patience
et leurs encouragements ainsi que nos amis qui ont facilité nos nombreu-
ses rencontres afin de pallier l’éloignement géographique.
VII
Table des matières
Introduction 1
PREMIÈRE PARTIE – La fonction ressources humaines :
son évolution, ses métiers
CHAPITRE 1 ■ La fonction RH au cœur des évolutions
socio-économiques 11
Une évolution constante des missions et des outils 11
Problématiques et débats actuels 18
Une réorganisation de la fonction : décentralisation et externalisation 18
La gestion des compétences 21
Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH 22
La Responsabilité Sociale de l’Entreprise 25
La question des retraites et l’emploi des seniors 28
Le développement de la gestion des RH
dans les différentes fonctions publiques 31
La gestion des RH dans les turbulences de la mondialisation 33
CHAPITRE 2 ■ Le processus de production de la fonction RH 35
Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie, études, plans d’action,
logistique 38
Le sous-système stratégie 38
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
VIII
Le sous-système logistique 40
Le sous-système études 42
Le sous-système gestion des domaines d’action 42
Les trois domaines d’action : rémunération, emploi, risques sociaux 44
Le domaine rémunération 44
Le domaine emploi 45
Le domaine risques sociaux 45
CHAPITRE 3 ■ Les emplois-métiers identifiés 50
Positionnement des emplois-métiers étudiés dans le système
ressources humaines 50
Modalités de présentation de chaque emploi-métier :
des activités aux compétences 53
Le processus du domaine et ses emplois-métiers 54
Cinq rubriques descriptives de l’emploi-métier 54
Le résumé de l’emploi-métier 54
La chaîne d’activités de l’emploi-métier 54
Le réseau de relations de l’emploi-métier 55
Les évolutions de l’emploi-métier repérées 55
Les compétences, ou « savoirs en action » 56
DEUXIÈME PARTIE – Emplois-métiers spécialisés
dans un domaine, et compétences associées
CHAPITRE 4 ■ Les emplois-métiers du domaine rémunération 59
Le processus rémunération et ses emplois-métiers 59
L’emploi-métier de responsable paye et ses évolutions 64
Résumé 64
Réseau de relations du responsable paye 66
Les évolutions de l’emploi repérées 69
Les compétences de l’emploi-métier du responsable paye 70
CHAPITRE 5 ■ Les emplois-métiers du domaine emploi 74
Le processus de recrutement 76
L’emploi-métier externalisé de consultant en recrutement
et ses évolutions 82
Résumé 82
TABLE DES MATIÈRES
IX
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
Réseau de relations du consultant en recrutement 83
Les évolutions de l’emploi repérées 83
Les compétences de l’emploi-métier de consultant en recrutement 87
Le processus de formation 91
L’emploi-métier de responsable de formation et ses évolutions 96
Résumé 96
Réseau de relations du responsable formation 97
Les évolutions de l’emploi repérées 101
Les compétences de l’emploi-métier de responsable de formation 102
Évolutions repérées : l’activité de gestion de l’emploi
et des compétences 105
CHAPITRE 6 ■ Les emplois-métiers du domaine risques sociaux 109
L’emploi-métier de responsable sécurité et ses évolutions 111
Résumé 111
Réseau de relations du responsable sécurité 113
Les évolutions de l’emploi repérées 116
Les compétences de l’emploi-métier de responsable sécurité 116
L’emploi-métier de responsable des relations sociales et ses évolutions 119
Résumé 119
Réseau de relations du responsable des relations sociales 122
Les compétences de l’emploi-métier de responsable
des relations sociales 124
Les évolutions de l’emploi repérées 129
TROISIÈME PARTIE – Emplois-métiers
transversaux et nouveaux métiers
CHAPITRE 7 ■ Des emplois-métiers transversaux aux domaines 137
Le concept d’emploi transversal 137
L’emploi-métier de directeur des ressources humaines (DRH)
et ses évolutions 142
Résumé 142
Réseau de relations du directeur des ressources humaines 145
Les évolutions de l’emploi repérées 148
Les compétences de l’emploi-métier de DRH 151
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
X
L’emploi-métier d’assistant ressources humaines spécialisé 155
Résumé 156
Réseau de relations de l’assistant ressources humaines spécialisé 160
Les évolutions de l’emploi repérées 161
Les compétences de l’emploi-métier d’assistant RH spécialisé 163
L’emploi-métier externalisé de consultant en ressources humaines
et ses évolutions 166
Résumé 166
Réseau de relations du consultant en ressources humaines 168
Les évolutions de l’emploi repérées 168
Les compétences de l’emploi-métier de consultant
en ressources humaines 172
CHAPITRE 8 ■ Des nouveaux métiers 177
L’emploi-métier du chargé d’études ressources humaines 178
Résumé 179
Réseau de relations du chargé d’études RH 181
Les compétences de l’emploi-métier de chargé d’études RH 182
L’emploi-métier de responsable organisation et gestion
des systèmes d’information ressources humaines 184
Résumé 184
Réseau de relations du responsable organisation et gestion
des systèmes d’information ressources humaines 187
Les compétences de l’emploi du responsable organisation
et gestion des systèmes d’information RH 188
Le métier de conseiller-accompagnateur en VAE
(Validation des Acquis de l’Expérience) 189
Processus VAE 190
Les débats sur la faisabilité de la VAE 191
Un nouveau métier est-il en émergence ? 195
Résumé de l’emploi de conseiller en VAP 195
TABLE DES MATIÈRES
XI
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
CHAPITRE 9 ■ Des enseignements à tirer de l’étude
des emplois-métiers 198
Le conseil à la direction dans le pilotage des changements 198
Le conseil aux autres services : relation de type client/fournisseur 200
Le contrôle de gestion sociale et budgétaire 202
Le réaménagement de la fonction RH 202
La pression des actionnaires sur la politique sociale 203
QUATRIÈME PARTIE – Comment passer des compétences
de l’emploi à un référentiel de formation ?
CHAPITRE 10 ■ Forme-t-on à des compétences en situation
de travail ou à des compétences intermédiaires ? 207
Le concept de compétence 207
Le processus de production des compétences 210
CHAPITRE 11 ■ De l’utilisation des rubriques « compétences »
pour élaborer un référentiel de formation 212
Des connaissances incontournables à acquérir
en formation initiale et/ou continue 212
Des capacités liées à la pratique professionnelle
avec les connaissances correspondantes 223
Des qualités à mettre en œuvre 228
CHAPITRE 12 ■ Formations en ressources humaines :
quelques pistes… 230
Quelles formations pour quels métiers ? 230
Une approche pédagogique à repenser 233
Instruments verbaux 237
Relation au temps 237
Relation à l’espace 237
Conceptualisation 238
Pensée hypothétique 238
Prise en compte d’informations simultanées 238
Distinction entre des données pertinentes 238
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
XII
Conclusion 241
Glossaire 245
Sigles 247
Annexe – La méthode ETED 250
Première étape : le cadrage 250
Deuxième étape : l’échantillonnage de la population d’enquête 251
Troisième étape : l’enquête auprès de l’échantillon construit 252
Quatrième étape : l’exploitation des entretiens 253
Cinquième étape : la validation 254
Bibliographie 255
1
Introduction
omment organiser et garantir la flexibilité productive nécessaire,
tout en développant les compétences indispensables à la croissance
de l’entreprise, mais en garantissant la création de valeur pour
l’actionnaire ?
Comment transformer le travail en compétence collective, tout en
optimisant les charges de personnel grâce à un contrôle de gestion
sociale efficace ?
Comment assurer une certaine équité entre des salariés qui partici-
pent à des collectifs de travail dans les processus de production alors
qu’ils disposent de statuts, de conditions d’emploi, de conditions de
travail complètement différents ?
Comment organiser le travail afin d’utiliser au mieux les compéten-
ces des seniors, comment les motiver dans un contexte social où les
jeunes retraités sont encore le modèle culturel dominant et assurer une
bonne coexistence des générations ?
Comment aménager et mettre en cohérence des pratiques et des
méthodes dans des organisations différentes et éclatées ?
Comment concilier les intérêts souvent contradictoires entre les diver-
ses parties prenantes au niveau micro et macroéconomique ou comment
concilier la recherche du profit et les préoccupations sociales, sociétales
et environnementales ?
Comment la fonction RH peut-elle apporter la preuve de son effica-
cité en optimisant ses propres coûts tout en répondant aux nouvelles
problématiques complexes liées aux évolutions du contexte économi-
que et social ?
La fonction ressources humaines
C
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
2
Ces questions et paradoxes sont au cœur des préoccupations des
entreprises et plus spécifiquement des DRH et de la fonction RH. La
gestion des ressources humaines connaît actuellement des transforma-
tions et des interrogations liées aux nombreuses contradictions qui
traversent les organisations de manière générale, liées principalement
aux tensions croissantes entre « local » et « global ». Si les niveaux
d’action et de régulation locaux sont tout aussi indispensables, ils se
sont complexifiés avec la mondialisation.
Nous pouvons affirmer avec Jean-Michel Plane que : « Aujourd’hui,
la gestion des ressources humaines est une fonction à part entière, avec
des outils reconnus, intégrée aux côtés de la Direction Générale. Elle
assure à la fois une fonction d’intégration pour le personnel (dialogue
social, communication de la stratégie) et une fonction de différencia-
tion (recrutement et pilotage des carrières, rémunérations individuali-
sées, etc.). Cette activité vise à gérer les effectifs, les qualifications et les
compétences à court, moyen et long termes. Sa mission : contribuer à la
modernisation et au développement de l’organisation à travers la mise
en œuvre d’un processus d’implication des salariés. Ce processus
s’inscrit dans une recherche de compatibilité entre des intérêts souvent
divergents des actionnaires de l’entreprise, des managers et des
employés. Ainsi la problématique du pouvoir et la gestion du conflit
sont-elles des questions essentielles pour les gestionnaires des ressources
humaines, de même que la gestion des relations professionnelles et la
négociation collective1. » La fonction RH, sa place et ses métiers
évoluent donc en fonction des politiques des entreprises et de la société.
L’objet de notre livre consiste précisément à fournir des réponses à ces
différentes questions. Il permet de découvrir, à travers la description
fine des emplois, la réalité de la fonction aujourd’hui, les raisons de
1. Plane J.-M., La gestion des ressources humaines, Economica, 2003.
Comment analyser finement l’évolution de la fonction ressources
humaines, voire anticiper ses nouveaux métiers ? Comment traduire la
réalité des métiers actuels et futurs en compétences ? Comment
ensuite décliner ces compétences en savoirs théoriques et en savoirs liés
à la pratique professionnelle ? Comment enfin construire des référen-
tiels de formation, tant en termes de contenus que de pédagogie ?
INTRODUCTION
3
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
l’extrême variété des organisations des services RH, non seulement en
raison de la taille de l’entreprise, mais parce que les missions qu’elle doit
prendre en charge varient constamment avec la politique choisie, avec
ses contraintes propres, et en raison de l’utilisation des compétences qui
existent dans le service. En effet, la fonction ressources humaines
présente une très grande sensibilité à l’utilisation optimale des compé-
tences et organise donc les tâches non seulement en fonction de ses
priorités, mais également en fonction des hommes et des femmes dont
elle dispose.
Nous repérons dans notre étude d’une part les compétences nécessai-
res à l’exercice des emplois de gestion des ressources humaines décrits,
et explorons d’autre part la question de la construction de ces compé-
tences. Cette dimension intéressera plus particulièrement les concep-
teurs de programmes de formation et les formateurs, mais également
tous les salariés exerçant une fonction dans les métiers de la GRH, afin
de faire le point sur leurs propres compétences pour un bilan personnel
ou dans une perspective d’évolution de carrière. Les cadres des services
ressources humaines pourront s’appuyer sur cette recherche pour faire
le point sur les compétences collectives de leur service et l’évolution
souhaitable à prévoir. Quelquefois, on se rendra compte qu’il suffit
pour rendre compétent un salarié de modifier l’organisation de son
travail. D’autres fois, le salarié devra acquérir des connaissances de base
qui lui manquent, ou bien encore il lui faudra développer ses capacités
cognitives, celles qui font qu’il est capable d’établir un lien entre deux
événements, qu’il sait utiliser à bon escient ce qu’il a appris lors d’une
expérience antérieure ou à l’occasion d’une formation. Enfin il sera peut-
être nécessaire de recruter une personne ayant des compétences complé-
mentaires, permettant ainsi aux autres personnes du service de bien
fonctionner ensemble. Les étudiants qui souhaitent s’orienter vers ces
métiers profiteront également des descriptions des emplois et pourront
mieux se représenter les compétences qu’ils pourront acquérir au cours
de leur formation et choisir des stages adaptés à leur projet professionnel.
Il paraît somme toute logique qu’en ces temps où toutes les structures
organisationnelles se penchent sur la question d’une meilleure gestion
des compétences, les services chargés de la mettre en place s’appliquent
à eux-mêmes les principes à l’œuvre dans cette évolution.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
4
La question de la préparation des étudiants et des salariés aux compé-
tences des métiers est une question centrale aujourd’hui dans les univer-
sités1, dans les centres de formation et dans les entreprises.
La méthodologie choisie pour mener cette étude est empruntée au
CEREQ (Centre d’études et de recherches sur les qualifications). Il
s’agit de la méthode ETED2 mise au point par Nicole Mandon depuis
les années 1990, qui répond précisément à la préoccupation d’analyser
l’évolution des emplois.
« ETED est une méthode d’analyse des emplois qui situe ceux-ci dans leur
environnement (histoire, évolution des organisations, orientations actuelles
et questions en débat) et associe à cette première analyse une analyse fine du
travail à partir d’interviews auprès des titulaires d’emplois. »3 Elle « a pour
caractéristique d’accepter l’emploi comme essentiellement variable et
évolutif »4.
Nous avons adhéré à l’hypothèse que :
« cette approche des emplois, bien situés dans leur environnement, permet-
tait d’en appréhender la complexité, le sens “productif”, et les évolutions. La
dynamique des emplois est liée tant aux impulsions données par les person-
nes qui les occupent que par des facteurs considérés habituellement comme
extérieurs, les deux étant en interaction. Autant de raisons pour ne pas
gommer la diversité des cas de figure mais au contraire exploiter ce qu’elle
signifie. » « On essaie plus particulièrement de dégager (en intégrant diffé-
rentes données) les mouvements émergents ou tendances d’évolution. »5
Cette démarche, scientifique dans sa construction, plus qualitative
que quantitative, s’intéresse davantage à la diversité des situations dans
leur lien avec l’environnement et les individus eux-mêmes qu’à la répé-
tition d’éléments semblables dans différentes situations. Le noyau dur
1. Les réflexions au sein de l’Éducation nationale concernant la création de licences
professionnelles ainsi que la loi sur la réforme des Universités (LRU) initiée en 2007 et
se donnant pour objectif affiché une meilleure préparation au monde du travail, sont
des indicateurs de cette préoccupation.
2. Emploi type étudié dans sa dynamique.
3. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998.
4. Mandon N., préface de L’emploi-type étudié dans sa dynamique, CEREQ, document de
travail no 63, avril 1991.
5. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998.
INTRODUCTION
5
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
des tâches afférentes aux emplois de GRH est très bien étudié dans
divers ouvrages mais ce qui nous intéresse dans cette étude ce sont les
différences, les évolutions et les causes possibles. Notre approche est
autant diachronique que synchronique.
Concrètement, le contenu de cet ouvrage résulte d’une analyse fine
des emplois de gestion des ressources humaines, à partir d’interviews
réalisés auprès de salariés et de leurs hiérarchies directes. L’échantillon
comprend 90 interviews de titulaires d’emplois de gestion des ressour-
ces humaines, dans diverses fonctions et appartenant à des organisa-
tions de tailles et de secteurs d’activités variés, et autant d’interviews de
leurs hiérarchies.
Dans cet ouvrage, nous présentons la démarche complète allant de
l’analyse des métiers à un référentiel de formation, et ce faisant, nous
illustrons une démarche méthodologique pouvant intéresser tous ceux
qui souhaitent réfléchir à la définition de compétences : les recruteurs,
les formateurs, les professionnels de gestion des ressources humaines, les
concepteurs et décideurs de nouveaux diplômes, ceux qui veulent
mettre en place des procédures de validation d’acquis professionnels
(VAP), ou de l’expérience (VAE) dans le cadre de bilans de compétences
pour la reprise d’études ou la reconversion professionnelle. Le schéma
suivant illustre et résume la démarche ainsi que le plan de l’ouvrage.
Dans une première partie, sont étudiées les forces qui influencent les
évolutions de la fonction, à travers une approche historique d’une part,
et à travers l’étude des écrits les plus récents sur la gestion des ressources
humaines d’autre part. Au-delà des différences apparentes, une appro-
che formalisée de la fonction RH en système est proposée, distinguant
LES COMPÉTENCES
actuelles et futures
UN RÉFÉRENTIEL
DE FORMATION
contenus et questions de pédagogie
LES MÉTIERS DE LA GRH
et leurs évolutions
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
6
des sous-systèmes (stratégie, études, logistique et plans d’action) et des
domaines d’application de la fonction (rémunération, emploi et risques
sociaux). Nous faisons l’hypothèse que ce système est invariant au-delà
de la taille ou de la conception que peuvent avoir des ressources humai-
nes les dirigeants d’entreprises. Cette étude de l’environnement,
appuyée par le modèle de la fonction RH en système, a guidé le choix
de l’échantillon des salariés interrogés pour parvenir à brosser un état
des lieux des métiers de la fonction, actuels et en devenir.
Dans les deuxième et troisième parties sont décrits les emplois-
métiers identifiés, classés en trois catégories : d’une part des emplois
spécialisés dans les domaines emploi, rémunérations et risques sociaux,
d’autre part des emplois dits transversaux à ces trois domaines, enfin des
emplois en émergence. Il s’agit des emplois suivants : responsable paye,
consultant en recrutement, responsable formation, responsable sécu-
rité, chargé des relations sociales, directeur des ressources humaines,
secrétaire administratif spécialisé ressources humaines, chargé d’études
ressources humaines, responsable organisation et gestion des systèmes
d’information ressources humaines, conseiller-accompagnateur en vali-
dation des acquis de l’expérience.
Ils résultent chacun d’une reconstruction à partir de l’interview de
plusieurs salariés et de leurs supérieurs hiérarchiques, et nous avons
élaboré différentes fiches pour les présenter :
– une fiche « finalité et résumé » de l’emploi,
– un organigramme intitulé « chaîne d’activités »,
– une description précise du « réseau de relations », identifiant les
partenaires, les circonstances et la spécificité des relations,
– une fiche sur les évolutions repérées de l’emploi,
– une fiche détaillée reprenant les compétences ou « savoirs en
action » de l’emploi.
La quatrième partie met en œuvre le passage de l’analyse des emplois à
l’élaboration d’un référentiel de formation pour les métiers des ressour-
ces humaines. Pour ce faire, sont d’abord définis les concepts utilisés et
le modèle théorique de référence pour la réflexion relative à l’acquisi-
tion des compétences1. En effet, « la compétence ne s’observant qu’en
1. Définies ainsi : « c’est le savoir-mobiliser ses connaissances, capacités et qualités pour
faire face à un problème donné ».
INTRODUCTION
7
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
situation » et résultant de la « mobilisation d’un ensemble de ressources »,
nous avons formalisé un processus dans lequel la compétence apparaît
grâce à la confrontation dynamique entre des « ressources » (connais-
sances ou savoirs disciplinaires ou méthodologiques, connaissances tirées
de l’expérience, motivation), des « capacités cognitives » et une « situa-
tion de travail précise ».
Par rapport à ce schéma théorique, nous situons ce qu’il est possible
de réaliser lors du processus de formation proprement dit, sachant que
nous estimons que les compétences utilisent des savoirs de diverses
natures qui ont été appris et qui peuvent faire l’objet de formation.
Cette démarche nous conduit à développer trois axes majeurs.
D’une part les ressources qui peuvent être acquises en formation, et
qui sont les connaissances ou savoirs, disciplinaires mais également
méthodologiques. Nous avons utilisé les fiches « compétences » des
divers emplois-métiers décrits pour recenser de façon précise l’ensemble
de ces connaissances, les avons classées en référence au système préala-
blement élaboré, c’est-à-dire selon les activités dominantes d’une part
(stratégie, études, plans d’action ou logistique) et d’autre part selon
trois niveaux de maîtrise (niveau de connaissances élémentaires à niveau
d’expertise). Les documents élaborés peuvent permettre à des concep-
teurs de formation en RH de construire leurs modules en fonction des
objectifs visés (recensés dans le tableau par la reprise de la finalité
globale).
D’autre part les connaissances qui ne peuvent s’acquérir qu’à l’occa-
sion de la pratique professionnelle (et donc dans l’organisation elle-
même). Il nous a semblé intéressant de nous arrêter quelque peu sur ce
que l’analyse des métiers et leur évolution nous a permis de découvrir à
ce propos, car s’il existe de nombreux écrits pour débattre du lieu
(l’école ou l’entreprise) pour former à un métier, rien n’était jusqu’à
présent très précis sur les contenus qu’il est nécessaire d’apprendre dans
l’entreprise pour pouvoir manifester de la compétence. Nous pensons
que cette démarche peut être particulièrement utile pour les pratiques
d’intégration des nouveaux embauchés, ou de mutation dans un emploi
ou un site différents.
Enfin, « les ressources cognitives » qui sont toujours nécessaires à la
production de compétences. Pour ce faire, les réponses sont à chercher
dans les démarches pédagogiques, c’est-à-dire dans la façon dont les
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
8
formés sont amenés à acquérir des connaissances et à les mettre en
œuvre. Sur ce point, nous ouvrons des pistes de réflexion en formalisant
la problématique pédagogique : en quoi consisterait un « référentiel de
formation » correspondant à ces définitions du concept de compétences
et du processus d’acquisition lié ?
Que vous soyez un professionnel de la fonction RH, un formateur,
un étudiant, un concepteur de programmes de formation, un lecteur
intéressé par les problématiques liées à la fonction, nous vous proposons
d’« entrer » dans cet ouvrage de différentes manières. Par exemple, il
vous est possible de débuter par la découverte des différents emplois-
métiers décrits (parties 2 et 3) ou bien vous pouvez passer d’un emploi
précis avec sa fiche compétences à une réflexion plus pédagogique en
vous reportant à la partie 4. La première partie, quant à elle, peut se lire
en introduction à une réflexion sur l’organisation de la fonction, mais
également après avoir étudié les divers emplois-métiers afin de les
mettre en perspective et prendre du recul.
Nous souhaitons que ces « entrées à la carte » vous permettent de
trouver matière à nourrir vos pratiques professionnelles et vos réflexions
sur les métiers et les compétences de la fonction ressources humaines
ainsi que les évolutions qui s’y dessinent.
Vous trouverez également tout au long de l’ouvrage des encadrés inti-
tulés « Comment utiliser… » à usage des DRH, des professionnels et
des étudiants qui donnent un mode d’emploi possible :
– d’un schéma (organisation systémique de la fonction);
– d’une rubrique d’un descriptif d’emploi (chaîne d’activités, fiche
compétences, réseau de relations);
– des tableaux (de connaissances théoriques ou des qualités liées à
l’emploi).
PA R T I E 1
La fonction ressources
humaines : son évolution,
ses métiers
UELLE EST aujourd’hui la place de la fonction ressources humai-
nes, qui se situe au cœur des contradictions économiques et socia-
les tant macro-économiques que micro-économiques ?
La première dimension, macro-économique, ne laisse aucun doute
sur l’incapacité du système, compte tenu des formes et des temps de
travail actuels, à résorber un volant important de chômage, devenu
structurel. La deuxième dimension, micro-économique, met en évidence
le passage d’une standardisation de produits et de procédés à une
personnalisation, à une modularité sous les contraintes de délais-coûts-
qualité. Les entreprises sont ainsi conduites à gérer non plus des proces-
sus longs mais des lots spécifiques, des projets ponctuels impliquant des
capacités d’adaptation et de flexibilité devenues incontournables. Danièle
Q
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
10
Linhart1 met en évidence les contradictions entre les discours (liés au
management participatif), les actions (recherche de consensus, particu-
lièrement depuis les années 1980) et les conséquences souvent contra-
dictoires (licenciements massifs) liées au passage difficile entre un mode
de production et surtout d’organisation taylorien-fordien-fayolien et
un mode de management adaptatif dit flexible.
Jean-Michel Plane dit, quant à lui : « Les réseaux horizontaux parais-
sent être les plus appropriés aujourd’hui pour faire face à la complexifi-
cation des performances à atteindre (coût, qualité, délais, flexibilité,
variété ou innovation). La coopération est donc envisagée comme une
intercompréhension, voire une intersubjectivité, entre les acteurs. On
parle de décloisonnement entre les fonctions, de gestion des interac-
tions, de logiques de projet ou de communication entre services ! »2.
On comprend ainsi que les contextes économiques, sociaux, organi-
sationnels vont contribuer à fournir des réponses différenciées (histori-
quement et spatialement) quant au rôle et à la place de la fonction.
Nous articulerons notre propos en deux parties en abordant, parallèle-
ment au champ économique et social, les grands traits de l’évolution
historique de la gestion des ressources humaines, pour déboucher sur les
discours actuels quant aux besoins en gestion des ressources humaines.
Nous montrerons, grâce à un bref historique, que les environnements
(théorique, culturel, économique, social, juridique, technologique, orga-
nisationnel) ont conditionné l’évolution de la fonction RH. Cette appro-
che nous permettra de confirmer notre hypothèse de travail.
1. Linhart D., La modernisation des entreprises, Éd. La Découverte, Paris, 1994.
2. Plane, J.-M. La Gestion des ressources humaines, Economica, 2003.
11
CH A P I T RE 1
La fonction RH au cœur
des évolutions
socio-économiques
A FONCTION RH est-elle tributaire des environnements socio-
économiques ? Que nous enseignent les débats actuels ?
Une évolution constante des missions et des outils
L’histoire de la fonction RH ne se confond pas avec celle des entreprises
puisqu’elle concerne principalement les sociétés de plus de deux cents
personnes1. Comme le souligne Jean Fombonne, l’histoire de la fonc-
tion est liée à l’histoire du management, de ses paradigmes, de ses
méthodes. Elle emprunte à la sociologie et à la psychologie (fonctionne-
ment des organisations et des groupes, identification des couches sociales,
1. Fombonne J., Pour un historique de la fonction personnel, Paris, Éd. d’Organisation,
1992.
L
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
12
évolution des mentalités, nature de la subordination des travailleurs,
exercice des libertés, de la mobilité, du commandement, motivations…).
Elle est tributaire du droit social : des conventions internationales, des
lois nationales, des conventions collectives, des accords interprofession-
nels, des accords d’entreprise, de la jurisprudence. Le mouvement social
et l’action syndicale concernent dans tous les cas la fonction RH, soit
directement, soit indirectement. L’histoire des technologies influence
les qualifications, les formations, les salaires, les recrutements, les condi-
tions de travail. L’histoire économique avec ses cycles, ses mouvements
de concentration, les faillites, les restructurations, les échanges se réper-
cute sur les niveaux d’emploi et de rémunération.
L’histoire de la fonction emprunte ainsi à tous ces environnements
sans qu’aucun d’eux ne puisse revendiquer une influence déterministe
sur son contenu à un moment donné.
Une synthèse sous forme de tableau nous a fait retenir1 quatre gran-
des périodes, des prémices à 1945, les Trente Glorieuses, les années de
crise et la période actuelle durant lesquelles la fonction RH a subi de
profondes transformations (activité dominante, missions, acteurs,
métiers, compétences, responsabilités, moyens, outils, structure, noms
de la fonction et des acteurs), les politiques sociales menées par les
entreprises s’adaptant aux évolutions du macro-environnement (social
et idéologique, économique, technologique, politique, juridique).
Ainsi la fonction ressources humaines2 a évolué sous la double
influence de son environnement économique et social et de l’organisa-
tion du travail dans les entreprises. À chaque époque, et pour chaque
configuration d’organisation des entreprises3, elle a eu pour mission
principale de résoudre les problèmes qui se posaient pour les hommes,
salariés des organisations.
1. Inspiré de Peretti J.-M., Gestion des RH, Paris, Vuibert Entreprise, 1998.
2. Pour les lecteurs intéressés par une telle approche de la fonction RH, et en particulier
par les enjeux de pouvoir sous-jacents aux questions de la décentralisation de la fonc-
tion, lire Godelier E., « La place de la fonction RH au sein de la structure de
l’entreprise : un dilemme entre l’efficacité et la reconnaissance » in Ressources Humai-
nes, une gestion éclatée, Paris, Economica, 1998.
3. Le terme « entreprise » est entendu ici et dans le reste de l’ouvrage au sens générique. Il
serait plus exact de parler « d’organisation » au sens de la psychosociologie des organi-
sations, mais ce terme peut entraîner une confusion avec le concept d’organisation de
l’entreprise au sens de la structure organisationnelle.
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
13
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
Tableau
1.1
–
Évolutions
de
l’environnement
macro-économique
Périodes
Environnement
macro-économique
Des
prémices
à
1945
Les
Trente
Glorieuses,
de
1945
à
1975
Les
années
de
crise,
de
1975
à
1990
Le
passage
au
3
e
millénaire
Environnement
social
et
mouvement
des
idées
Combat
contre
les
excès
du
libéralisme
Triomphe
du
Front
populaire
en
1936
Grèves,
chômage
Charte
des
syndicalistes
en
1940
Rejet
des
formules
de
cogestion
dès
1960
Grandes
grèves
pour
augmenta-
tions
de
salaires
Interrogations
sur
les
inégalités
sociales
et
l’autorité
Désétatisation,
dérégle-
mentation,
désinflation
à
partir
des
années
80
Discours
:
l’investisse-
ment
dans
le
capital
humain
est
majeur
Mouvement
«
éthique
»
Généralisation
de
la
«
pensée
unique
»,
malgré
quelques
grandes
luttes
sociales
pour
préserver
les
acquis
(retraites,
santé…)
Précarisation
Discriminations
Stress
et
individualisme
Environnement
économique
et
entreprises
Essor
du
capitalisme
industriel
et
financier
Recherche
de
gains
de
productivité
de
la
main-
d’œuvre
directe
Forte
croissance
industrielle
Contrôle
de
gestion,
contrôle
budgétaire
et
commercial
en
développement
Concurrence
exacerbée
Crise
de
surproduction
Chômage
massif
croissant
Plans
sociaux
à
répétition
Euro,
élargissement
de
l’Europe
Mondialisation,
délocalisations,
fusions-acquisitions
Désindustrialisation
Chômage
croissant,
conjoncture
ralentie,
crises
politiques
et
économiques
dans
de
nombreuses
régions
du
monde
Entreprises
réseaux
Gisements
d’emploi
:
PME
et
services
Environnement
technologique
et
production
Séparation
concep-
tion/exécution
Rationalisation
des
équi-
pements
Progression
du
savoir-
faire
artisanal
Produits
standardisés
Approfondissement
du
taylorisme
Chaînes
de
montage,
mécanisa-
tion,
informatisation
Diversification
limitée
des
produits
Contrôle
direct
du
temps
de
travail
Compromis
salariaux
Nouvelles
technologies
(électronique)
Nouveaux
métiers
Opérateurs
polyvalents
Recomposition
des
tâches,
organisation
flexible
Production
diversifiée
en
petites
séries
Technologies
de
l’information
et
de
la
communication
(TIC)
Qualité
et
certifications
Recomposition
des
tâches
(production,
maintenance,
contrôle
qualité…)
Production
à
la
fois
de
masse
et
différenciée
Environnement
politico-légal
et
droit
social
Rapport
Villermé
(sur
l’apprentissage)
Développement
des
lois
sociales
(élections
de
délégués,
congés
payés,
40
heures,
conventions
collectives,
comités
d’entreprise)
Sécurité
sociale
Droit
de
grève
Retraites
Congés
payés
(1958)
Accords
de
Grenelle
(1968)
Création
ANPE
(1966),
APEC
(1967)
Nombreuses
lois
sociales
:
SMIC
(1970),
formation
continue
(1971),
limitation
du
droit
de
licenciement
(1973)
1983
:
année
la
plus
proli-
fique
de
l’histoire
du
droit
du
travail
:
39
heures,
5
e
semaine
de
congés
payés,
lois
Auroux,
contrats
de
solidarité,
retraite
à
60
ans…
Gouvernement
socialiste
(1997)
et
«
cohabitation
»
puis
montée
du
FN
et
retour
de
la
droite
Lois
sur
les
35
heures
Loi
sur
la
GPEC,
réforme
de
la
formation
professionnelle
Revenu
minimum
d’insertion
et
couverture
maladie
universelle,
chèque
emploi
service
universel
Loi
de
modernisation
sociale
(2001)
Remise
en
cause
de
certains
acquis
sociaux
antérieurs
:
durée
légale
du
travail,
retraites
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
14
Tableau
1.2
–
Répercussions
des
évolutions
sur
la
fonction
ressources
humaines
Périodes
Environnement
macro-économique
Des
prémices
à
1945
Les
Trente
Glorieuses,
de
1945
à
1975
Les
années
de
crise,
de
1975
à
1990
Le
passage
au
3
e
millénaire
Politique
sociale
et
fonction
ressources
humaines
Politiques
d’œuvres
sociales
Services
médicaux
et
sociaux
dans
les
entreprises
Assistance
aux
personnels
et
aux
familles
Création
de
centres
d’appren-
tissage
Transformation
des
condi-
tions
matérielles
de
travail
(sécurité,
rendement,
confort)
Développement
de
la
forma-
tion
Méthodes
d’analyse
et
d’évaluation
du
travail
Après
l’élargissement
des
tâches
des
années
1960,
enri-
chissement
des
tâches
Déclin
du
taux
de
syndicalisation
(11
%
en
1989
contre
20
%
en
1981
en
France)
Travail
à
la
chaîne
pour
7
%
de
la
population
ouvrière
en
1984
En
1989,
62
%
de
la
population
active
dans
les
services
Informatique
et
bureautique
trans-
formant
les
métiers
et
le
travail
Changement
des
politiques
socia-
les,
modification
de
la
gestion
des
dossiers
RH
en
liaison
avec
l’infor-
matisation.
Prise
de
conscience
par
l’entreprise
de
sa
responsabilité
par
rapport
à
l’emploi
dans
un
contexte
de
mondialisation
Rigueur
salariale
et
flexibilité
Problématique
contradictoire
entre
pré-retraites
et
allongement
de
la
durée
du
travail,
entre
plans
sociaux,
maladies
professionnelles
et
accroisse-
ment
de
productivité
Activité
dominante
de
la
fonction
RH
Avant
1916
:
pas
de
fonction
personnel
De
1917
à
1935
:
émergence
d’une
fonction
autonome
et
mixte
:
personnel
+
services
généraux
De
1936
à
1946
:
besoin
de
contacts
permanents
sala-
riés/direction
Droit
du
travail
Gestion
administrative
(paye
+
sanctions)
Dialogue
social
et
syndical
après
la
libération
Assistance
et
œuvres
sociales
82
%
d’entreprises
ont
une
direction
du
personnel
en
1961
qui
gère
effectifs,
embauches
et
qualifications,
réglementation,
discipline,
administration
du
personnel
Rationalisation
des
procédu-
res,
négociations
sociales,
relations
syndicales
Après
1960
:
motivation,
dynamisation,
formation,
information,
organisation
de
l’entreprise
La
fonction
est
devenue
centrale
Années
1970
à
1980
:
trois
missions
:
administration
sociale
du
contrat
de
travail,
gestion
des
personnes
et
développement
social
nécessitant
des
compétences
différentes
:
négociation,
anima-
tion,
écoute
psychologique,
analyse
sociologique
Informatisation
de
la
fonction
(paye
et
administration
en
1986
pour
10
%
du
coût
de
la
fonction)
Fonction
directement
confrontée
aux
changements
des
politiques
sociales
:
–
gestion
des
compétences,
VAE,
fidélisation
des
«
hauts
potentiels
»
–
gestion
des
effectifs
et
des
réorgani-
sations
:
35
h,
plans
sociaux,
reclas-
sements
–
démarches
qualité,
démarches
sécurité
–
communication
interne
et
externe
–
audit
social,
mesure
de
l’efficacité
et
des
coûts
du
service
RH
–
gestion
de
projets
conjoncturels
(35
h,
retraites,
VAE…)
–
gestion
du
climat
social
pour
mini-
miser
les
dégradations
des
condi-
tions
de
travail
–
«
développement
durable
»
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
15
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
Acteurs,
métiers,
com-
pétences,
responsabili-
tés,
moyens,
Avant
1916
:
fonction
exercée
par
les
patrons
ou
par
les
contremaîtres
De
1917
à
1935
:
un
respon-
sable
des
questions
du
personnel
(parfois
d’anciens
militaires)
De
1936
à
1946
:
appel
à
des
juristes,
journaux
d’entre-
prise,
assistance
directe
au
personnel
Décentralisation
de
la
fonc-
tion
dans
de
grandes
entrepri-
ses
dès
1960
Informatisation
Relations
humaines
au
premier
rang
des
préoccupa-
tions
après
1960
avec
la
gestion
administrative
et
la
formation
Mais
retour
à
des
préoccupa-
tions
techniques
dans
les
années
1970
Début
des
plans
sociaux,
recherche
d’implication
du
personnel
86
%
des
entreprises
ont
une
fonc-
tion
personnel
spécifique
en
1977
Femmes
sous-représentées
dans
la
fonction
Début
de
la
«
fonction
partagée
»
par
:
–
le
responsable
RH
et
la
direction
générale
pour
élaborer
politique
méthodologie
et
règlement
–
et
l’encadrement
pour
former
ou
faire
former,
apprécier
promou-
voir,
rémunérer
Rôle
central
de
conseil
à
la
hiérarchie
et
aux
dirigeants
Deux
volets
de
la
fonction
se
dessi-
nent
:
1)
fonction
opérationnelle
dans
la
coopération
avec
la
hiérarchie
(concep-
tion
des
postes,
gestion
des
carrières,
formation)
avec
mission
:
obtenir
un
rendement
optimum
des
RH
2)
fonction
stratégique
:
gestion
d’environnements
complexes,
prospective
(ce
second
volet
n’est
pas
présent
partout)
Appel
à
des
consultants
externes
à
des
«
coachs
»…
Outils
de
gestion
Tests
pour
recrutements
Méthodes
Centor,
Hay,
Corbin,
d’analyse
du
travail
Appréciation
annuelle,
plan
de
formation,
bilan
social
Certification
qualité
Audit
social
SIRH
(recrutement,
gestion
de
carriè-
res,
e-learning)
Logiciels
spécialisés
en
RH
ou
inté-
grés
à
la
gestion
globale
(SAP)
Internet,
Intranet
Structure,
intitulés
de
la
fonction
et
des
acteurs
Service
paye,
service
person-
nel
Chef
de
la
main-d’œuvre
puis
chef
du
personnel
Chef
des
services
sociaux
Directeur
du
personnel
Directeur
du
personnel
puis
directeur
des
relations
du
travail,
souvent
des
ingé-
nieurs
Formations
spécifiques
(IUT…)
dans
les
années
1970
Chef
du
service
personnel,
direc-
teur
des
RH,
directeur
des
affaires
sociales
dans
les
grandes
entreprises
Recours
croissant
à
des
consultants
Des
formations
spécifiques
RH
se
développent
:
DESS,
maîtrises…
Responsable
du
développement
RH,
Responsable
du
développement
des
compétences
Manager
des
Ressources
Humaines,
Directeur
ou
Responsable
des
RH
Responsable
des
Relations
Sociales,
Responsable
de
la
gestion
de
l’emploi,
Responsable
paye,
Responsable
sécu-
rité,
correspondant
RH
Emplois
externalisés
:
consultants,
coachs,
mais
aussi
paie
en
cabinet
d’expert
comptable…
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
16
C’est ce que confirment dans une publication récente Jean Nizet et
François Pichault1 :
« Certains traits de l’environnement retiendront notre attention dans la
mesure où ils exercent une influence spécifique sur l’adoption de tel ou tel
modèle de gestion des ressources humaines : le marché du travail, la politi-
que de réglementation sociale en vigueur, le marché des biens et services
concernés, et le contexte culturel. La plupart de ces traits peuvent se référer
à la fois au contexte national et au contexte sectoriel dans lesquels se trouve
l’organisation considérée ».
Il faut souligner que l’évolution de la fonction RH ne concerne pas
de façon identique toutes les entreprises. En effet, selon leur organisation,
leur activité, leur taille, elles vont développer de manière très inégale les
différentes missions de la fonction, contrairement à ce que peut laisser
supposer une lecture trop « historique » des tableaux précédents.
La constitution de notre échantillon tient compte de ces nouvelles
configurations des organisations, ainsi que des nouvelles problémati-
ques de l’environnement économique, social et juridique. Les caracté-
ristiques de la période récente et actuelle concernent principalement les
points suivants :
Le chômage a des conséquences en termes de plans sociaux à gérer
dans les entreprises.
La réduction du temps de travail présente des implications tant socia-
les (négociations, rémunérations) que réorganisationnelles.
L’évolution démographique (vieillissement de la population) et l’allon-
gement des durées de cotisation pour les retraites génèrent une remise
en question des équilibres antérieurs.
La concurrence résultant de la mondialisation avec ses fusions,
rachats, délocalisations, automatisation, réduction des coûts, normes
qualité… bouleverse la gestion des entreprises et donc la gestion du
personnel : réduction d’effectifs, reconversions, mobilité géographique
ou professionnelle, réduction des coûts du service RH, etc.
L’expansion du secteur des services (aux entreprises et aux person-
nes), avec ses potentialités de créations d’emplois génère de nouvelles
1. « L’éclatement des modèles en GRH, l’explication par la contingence, son intérêt et ses
limites », in Ressources Humaines, op. cit.
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
17
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
compétences : accueil, qualité, disponibilité, réactivité, orientation
client… Cette tendance induit l’émergence de nouveaux métiers, de
nouvelles qualifications et de nouvelles questions posées à la gestion des
ressources humaines mais elle entraîne également des déqualifications
et la pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs (hôtellerie, santé,
bâtiment…).
Enfin, pour ce qui concerne le secteur public, il semblait impensable,
dans les années 1980, de mettre en place une gestion des ressources
humaines, tant les rigidités liées au statut de la fonction publique ou
territoriale paraissaient freiner toute initiative (recrutements normalisés
par concours, avancement et salaires fixés dès l’entrée dans le corps…).
Or, depuis quelques années, le contexte économique ambiant de recher-
che de la qualité, l’évolution de la demande dans tous les secteurs,
l’Europe de Maastricht et ses critères de convergence imposent aux États,
et donc aux administrations, aux collectivités et aux services publics,
une politique de réduction des coûts. La mise en concurrence de
certains secteurs jusqu’ici protégés (télécommunications, transports, élec-
tricité, etc.), ont aussi contribué fortement à l’émergence d’une politi-
que de gestion des compétences dans toutes les collectivités et organismes
publics : mairies, rectorats, conseils régionaux ou généraux, etc. Des
missions nouvelles se sont développées dans le cadre de la fonction publi-
que, avec des études sur les métiers, des enquêtes sur le climat social, des
outils de communication interne, des plans de gestion prévisionnelle,
créant ainsi de véritables gisements d’emplois en ressources humaines1.
L’échantillon2 comprend donc des salariés et leurs supérieurs hiérarchi-
ques ayant eu à gérer ces divers types de problèmes. Il tient compte :
– du secteur d’activité des entreprises (industries de production, secteur
des services, collectivités publiques);
1. « D’ici 2010, les trois fonctions publiques (Éducation nationale, hospitalière, territoriale)
devront faire face au départ de 45 % de leurs agents (près de deux millions). L’Éduca-
tion nationale est la plus touchée avec 37 000 enseignants qui partiront à la retraite
tous les ans. Pour faire face, le ministère de la fonction publique table sur trois outils :
élaboration de plans de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compé-
tences, diversification des modes de recrutement et développement de la mobilité des
fonctionnaires. La fonction publique doit tenir compte de la concurrence des employeurs
privés, confrontés à la même nécessité de renouvellement de leurs compétences et aux
contraintes démographiques. », in Entreprise et Carrières, no 621, mai 2002.
2. Voir l’annexe : Méthode ETED : les différentes étapes.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
18
– de la taille des entreprises; en particulier il est apparu nécessaire de ne
pas limiter l’échantillon aux entreprises dans lesquelles un service RH
est toujours clairement identifié, et donc d’intégrer les PME;
– des nouvelles problématiques, économiques, sociales et juridiques.
Problématiques et débats actuels
Sans prétendre à une présentation exhaustive des débats actuels, il est
apparu quelques grandes constantes, à la fois chez les auteurs spécialis-
tes des questions RH ainsi que pour les professionnels de la fonction
que nous avons rencontrés.
Une réorganisation de la fonction : décentralisation
et externalisation
La décentralisation de la fonction, c’est-à-dire le partage des tâches
avec le management opérationnel n’est pas récent et est pratiquement
achevé, sauf dans les organisations de la fonction publique où la gestion
des ressources humaines est partagée avec les organisations syndicales et
non avec les managers de terrain, même si des tentatives vont dans ce
sens1. La généralisation des entretiens annuels, renforcée encore par les
mesures concernant le DIF2 et les entretiens de professionnalisation ont
de fait transféré à l’encadrement l’évaluation des compétences ainsi que
les décisions qui en découlent en matière de formation ou de gestion
des carrières. Le service RH, parallèlement à ce transfert, s’est doté de
systèmes d’information de plus en plus performants et intégrant des
modules auparavant dispersés. De ce fait l’offre de services informati-
que RH s’est développée, avec parallèlement l’apparition dans les orga-
nigrammes d’un « chargé de SIRH », ou d’un « responsable des systèmes
1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres
opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du
Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH,
sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a
concerné 470 personnes sur la période 2005-2007.
2. Droit individuel à la formation instauré en 2004 par le législateur.
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
19
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
d’information RH », comme nous avions pu en voir la préfiguration
lors de notre première étude en 2000.
Déjà en 1992, M. Thévenet1 proposait
« une liste indicative des activités et missions de GRH qui sont susceptibles
d’être réalisées par les responsables d’équipes. Les managers opérationnels
peuvent être amenés à participer à des activités de recrutement (phase de
spécification des besoins mais aussi de sélection), d’appréciation des perfor-
mances, de formation du personnel et d’analyse des besoins individuels, de
rémunération dans des démarches d’individualisation, d’analyse de poste ou
d’emploi… ».
Cette décentralisation de la fonction s’est accompagnée d’une recher-
che de productivité de l’ensemble des services fonctionnels, ce qui a
amené des réductions d’effectifs dans les services RH. Aujourd’hui, avec
la généralisation des SIRH d’une part, et l’externalisation d’une partie
des tâches, on arrive au bout de la réorganisation des services et on
commence à constater les limites de cette politique. En effet, dans de
nombreuses entreprises, les référentiels emplois et compétences n’ont
plus été actualisés faute d’effectifs suffisants. Les gros chantiers d’élabo-
ration de référentiels semblaient marquer le pas en 20072 au profit
de chantiers plus ciblés sur certains emplois au cœur du métier de
l’entreprise. On s’est recentré sur l’exploitation des entretiens annuels
d’évaluation, pour la formation d’une part, et les évolutions de carrières
d’autre part.
Il est cependant probable que la loi sur la négociation à propos de la
GPEC va au minimum obliger les entreprises à une remise à jour de
leurs référentiels emplois et compétences, et de nouveaux chantiers vont
s’ouvrir.
Comme nous l’avons déjà évoqué à propos des services informatiques
et des SIRH, l’externalisation de la fonction RH a créé un marché externe
d’offres de prestation RH. Certaines comme les cabinets de recrutement,
1. Cité par Alain Bernard, Dominique Besson et Slimane Haddaj : « La compétence écla-
tée dans les effets d’organisation. Le dilemme américain : développer ou recruter les
compétences ? », in Ressources Humaines, une gestion éclatée, op. cit.
2. Ceci est peut-être dû aux diminutions d’effectifs dans les services RH qui ont rendu la
maintenance de ces outils trop lourde ? Cette absence risque de poser rapidement
problème si l’on veut proposer des évolutions de carrière pertinentes à l’ensemble des
salariés.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
20
sont en perte sensible de vitesse à mesure que les sites de recrutement
par l’Internet se développent et que les agences d’intérim doublent leur
offre de service. D’une fonction de pré-recrutement, les contrats d’inté-
rim se transforment en période d’essai à durée modulable.
D’autres se développent tels que la paye de plus en plus externalisée
soit à des cabinets d’expertise comptable voire même à des prestataires
qui délocalisent en Inde ou dans d’autres pays à faible coût de main-
d’œuvre. Les cabinets de Conseil en Ressources Humaines ont eu leur
heure de gloire avec la mise en place des 35 heures et se réorientent
aujourd’hui soit vers la mise en place de démarches compétences, soit
vers des dossiers encore à développer concernant la gestion des seniors
ou bien l’accompagnement des fusions et des restructurations. Les
entreprises de services informatiques RH se sont multipliées ces derniè-
res années, et la concurrence est maintenant rude sur ce marché. Les
entreprises clientes leur reprochent souvent d’avoir des compétences en
RH insuffisantes pour la compréhension en profondeur de leurs
problématiques et privilégient les prestataires capables de concevoir des
produits sur mesure, intégrant des logiciels déjà en place.
Quant aux prestataires de formation, ils se trouvent sur un marché en
recul, les entreprises ayant réintégré une partie de la formation en
interne ou bien diminué leurs dépenses, et ils ont dû se lancer dans des
démarches de certification qualité de façon à se démarquer les uns des
autres.
Enfin, les cabinets et avocats spécialisés en droit du travail sont de
plus en plus sollicités pour la rédaction des nouveaux contrats de travail
mis en place par le législateur, pour la gestion des plans de sauvegarde
de l’emploi, pour préparer ou accompagner les restructurations ou
rapprochements d’entreprises.
La tendance apparue dans les grandes entreprises au début des années
2000 semble se confirmer. On voit la fonction RH se répartir nette-
ment en deux pôles :
– d’une part les fonctions et métiers opérationnels, caractérisés par des
« correspondants RH » d’usines ou des Responsables Ressources
Humaines (RRH) de sites, avec leurs assistants opérationnels;
– et d’autre part une fonction prospective, chargée de réfléchir à moyen
ou long terme, sur les compétences ou la gestion des carrières, mais
en relation étroite avec la stratégie globale de l’entreprise voire
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travailler sur différentes hypothèses. On parle alors de « Dévelop-
pement RH ». Il s’agit, par exemple, de réfléchir aux conséquences
à 10 ans de la politique de la promotion interne vers les fonctions
de cadre de façon à éviter d’avoir un jour des cadres quinquagénaires
non mobiles qui entreront en conflit de génération avec de jeunes
ingénieurs nouvellement embauchés… C’est également réfléchir
aux conséquences d’une fusion ou acquisition, ou encore à la
gestion des âges dans le cadre du vieillissement prévisible de la
population salariée.
La gestion des compétences
En « recentrant son métier », la fonction RH oriente de plus en plus sa
politique de gestion sur des aspects qualitatifs des ressources humaines.
En particulier les compétences – celles détenues par les salariés, celles
associées aux métiers existants et celles associées à leurs évolutions –
deviennent une donne stratégique. Les coordonner et les anticiper
devient une nécessité pour introduire plus de flexibilité et d’adaptabilité
afin de continuer à produire autrement.
Nous pouvons dire, avec Anne Dietrich et Didier Cazal, que « dans
les entreprises observées, la gestion des compétences déborde le strict
domaine de la gestion des ressources humaines pour devenir un atout
stratégique. Elle est l’instrument d’une dynamique de changement qui
implique plus globalement le management de l’entreprise »1. C’est sans
doute la raison qui explique que nous sommes passés, en six ans (de
1999 à 2005) de l’observation de l’émergence d’un emploi-métier qui
aurait pu être intitulé « Responsable de gestion des compétences », mais
qui se trouvait rarement formulé explicitement ainsi dans les offres
d’emploi, à un emploi qui aujourd’hui s’intitule bien plus souvent :
« Chargé (ou Responsable) du développement RH » ou « Responsable
développement du management ». Les DRH sont souvent appelés
aujourd’hui « Directeur du développement des ressources humaines »
ou « Manager des ressources humaines ». Il s’agit en tout cas d’une
1. « Gestion des compétences, savoirs tacites et production de connaissances », Dietrich A.
et Cazal D., in Gestion des compétences et Knowledge Management, Éditions Liaisons,
Paris, 2002.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
22
préoccupation majeure dans les entreprises, et l’arrivée des seniors dans
les effectifs du fait des réformes sur les retraites, associée à la pénurie
programmée de main-d’œuvre qualifiée dans certains secteurs ou métiers
va dans les prochaines années accentuer cet intérêt.1 Alors qu’en 2006
et 2007, les entreprises s’étaient centrées sur la gestion des hauts poten-
tiels, ou des compétences-clés, la nécessité d’affiner la gestion des carriè-
res pour fidéliser les salariés et pour gérer au mieux les départs en
retraite et les réorganisations qui s’ensuivront, vont réactiver la mise à
jour et le suivi des compétences. Cette tendance ne peut qu’être renfor-
cée par la généralisation des certifications, et l’obligation de négocier
sur la GPEC à partir de 2008.
« Les entreprises devront faire un diagnostic précis de leur gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences des seniors. (…) La pros-
pective des métiers par famille professionnelle a, dans certaines branches
et/ou entreprises, obtenu des résultats intéressants. Il est possible d’inté-
grer la dimension “âge” dans la gestion anticipatrice des emplois et
des compétences. Cette phase de diagnostic, de veille et d’anticipation
concerne l’entreprise – direction, salariés, partenaires sociaux – et son
environnement. »2
Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH
L’ancienne version des normes ISO 9000 (version 1994)3 tenait peu
compte de la dimension ressources humaines dans l’entreprise. Le
contexte économique et social du début des années 90 dans lequel s’est
inscrite l’élaboration de cette norme permet de comprendre la faible
place consacrée aux RH. En effet, beaucoup d’entreprises étaient en
proie à des difficultés économiques, à des plans sociaux à répétition. La
1. En juillet 2003, on trouvait en librairie des dizaines de titres traitant de ce thème :
Management des compétences, Le management des compétences dans les entreprises européen-
nes, Mesure des compétences, Gestion des compétences et Knowledge Management, Objectif
compétences, Valoriser les compétences : un levier pour l’entreprise, Construire les compétences
individuelles et collectives, Le management des connaissances et compétences en pratique, etc.
2. Marbot L. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Paris, Édition Village Mondial,
2004.
3. « 19 000 entreprises certifiées ISO 9000 en France en 2000 pour 3 000 en 1994 »,
Dossier certifications, Qualité références, juillet 2000.
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version 94 a surtout focalisé son attention sur la mise en place de procé-
dures (assurance de la reproductibilité) que des hommes étaient chargés
d’appliquer (travail prescrit). À tel point que la fonction RH s’est
jusqu’à présent sentie peu concernée par la certification.
À l’inverse, la version 2000 des normes ISO est élaborée dans une
période où des compétences viennent à manquer, où le management
prend conscience (tardivement) que le facteur humain est décisif pour
la bonne marche de l’entreprise et la qualité des produits et des services.
Cette version, qui prévoit explicitement un chapitre « management des
ressources » et « ressources humaines », replace donc les hommes au
centre des processus qualité.
« La norme ISO 9000 version 2000 ouvre des perspectives dynami-
ques en matière de management des ressources humaines à travers les
exigences qu’elle prévoit. La mise en œuvre de ces exigences est l’occa-
sion pour l’entreprise de faire du management des ressources humaines
un processus fortement contributeur à l’obtention des objectifs qualité,
voire le processus capital. »1
– En termes de management des ressources, la nouvelle norme précise :
l’organisme doit déterminer et fournir les ressources nécessaires pour
mettre en œuvre et entretenir le système de management de la
qualité. Il doit améliorer en permanence son efficacité pour accroître
la satisfaction des clients en respectant leurs exigences.
– En termes de ressources humaines : le personnel effectuant des tâches
ayant une incidence sur la qualité doit être compétent sur la base
de la formation initiale et professionnelle, du savoir-faire et de
l’expérience. L’organisme doit :
– déterminer les compétences nécessaires pour le personnel effec-
tuant un travail ayant une incidence sur la qualité du produit;
– pourvoir à la formation ou entreprendre d’autres actions pour
satisfaire ces besoins;
– s’assurer que les membres de son personnel ont conscience de la
pertinence et de l’importance de leurs activités et de la manière
dont ils contribuent à la réalisation des objectifs qualité;
1. Propos de Bernard Seno, directeur qualité à la CEGOS dans « Chroniques des nouvel-
les normes ISO 9000 », Qualité en mouvement, no 48, avril-mai 2001.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
24
– conserver les enregistrements appropriés concernant la forma-
tion initiale et professionnelle, le savoir-faire et l’expérience.
« Jusque-là, les directions des ressources humaines étaient peu concer-
nées par une démarche qualité. Désormais, elles vont devoir répondre à
des audits sur des points précis. Et les entreprises vont devoir se structurer
et se doter de véritables moyens de gestion des ressources humaines. »1
Pour répondre à ces exigences, l’entreprise sera amenée à instaurer
une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Impossible donc de mettre en place une procédure de recrutement sans
avoir au préalable travaillé sur la définition de fonction, sur l’évolution
des métiers, sans réfléchir à une gestion des compétences à long terme
(grâce à l’entretien annuel d’évaluation). Par ailleurs, la traçabilité des
dossiers individuels devra être parfaitement tenue à jour. Enfin, la
nouvelle norme ISO met l’accent sur la motivation du personnel et
ainsi les systèmes de rémunération pour agir sur la motivation et éviter
de voir fuir les meilleures compétences vers d’autres employeurs. De
plus, il apparaît que le responsable des ressources humaines devra entre-
prendre un travail d’information et de communication à l’égard du
comité d’entreprise (imposé par la loi) pour les questions d’organisation
du travail, à l’égard du CHSCT pour les infrastructures.
Cependant, si l’implication de la fonction RH dans la démarche
qualité est désormais reconnue ainsi que les principaux outils à mettre
en place, l’incertitude demeure quant à l’interprétation des organismes
certificateurs. À ce titre, Patrick Renaud, responsable du département
auditeurs salariés de l’AFAQ précise : « …nous allons nous attacher à
vérifier ce que l’entreprise a mis en place pour gérer ses compétences.
Nous allons aussi contrôler que l’entreprise met en œuvre de véritables
processus, par exemple en matière de formation afin de garantir les
niveaux de compétences, ou encore en matière de recrutement, pour
chercher à l’extérieur les compétences qui pourraient faire défaut en
interne. Nous serons enfin attentifs aux outils qui s’inscriront dans ce
processus de gestion des emplois, comme les matrices de compétences
ou encore des matrices de polyvalence. Sans oublier la sensibilisation de
l’ensemble du management à la qualité mais aussi à la “voix” du client
1. Propos de Guy Raynaud, Directeur Qualité et Ressources Humaines de la société de
construction mécanique Panhard dans « Chroniques des nouvelles normes ISO 9000 »,
Qualité en mouvement, no 48, avril-mai 2001.
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
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un
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dans l’entreprise, qui me semblent être des éléments essentiels à valider
lors des audits de certification »1.
La Responsabilité Sociale de l’Entreprise
Si les grandes entreprises transnationales sont devenues de plus en plus
puissantes, si l’actionnaire est progressivement devenu l’acteur central
du système économique, des critiques ont émergé dès les années 1980
aux États-Unis pour mettre en cause la création de valeur pour le seul
actionnaire et la recherche du profit immédiat. La théorie des parties
prenantes (stakeholder theory) développe l’idée selon laquelle capita-
lisme et moralité sont compatibles. De plus, les entreprises socialement
responsables, (satisfaisant aux obligations juridiques applicables, mais
allant au-delà en investissant davantage dans le capital humain, l’envi-
ronnement et les relations avec les parties prenantes) qui accordent
de l’intérêt à tous les acteurs concernés (directement, les salariés, les
clients, les fournisseurs, et indirectement, les riverains, les pouvoirs
publics, les consommateurs, les générations futures…) sont jugées
plus efficaces.
La Responsabilité Sociale d’Entreprise (RSE) s’est développée dans
les années 1990 dans le contexte de mondialisation et de déréglementa-
tion de l’activité économique. « On peut assimiler ce mouvement à une
remise en cause du dogme de la création de valeur pour l’actionnaire.
On passe, avec cette approche d’un jeu à deux acteurs à un jeu beau-
coup plus complexe dans lequel doivent être présents ou représentés
tous les acteurs concernés par les agissements et la politique de la firme »2.
Pour Michel Capron3 l’acronyme RSE concerne à la fois les aspects
sociaux (qui relèvent des relations entre les personnes au sein d’une
collectivité) et sociétaux (relatifs à la société dans son ensemble). Il
propose un schéma permettant d’établir un lien entre la RSE et la triple
performance, économique, sociale et environnementale.
1. « Chroniques des nouvelles normes ISO 9000 », Qualité en mouvement, no 48, avril-
mai 2001.
2. Cadin L., Guérin F., Pigeyre F, Gestion des Ressources Humaines, Paris, Dunod
(3e édition), 2007.
3. Capron M., Quairel F., Mythes et réalités de l’entreprise responsable : Acteurs, enjeux,
stratégies, Paris, La découverte, 2004.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
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Progressivement, des critiques et des contre-pouvoirs se sont déve-
loppés en réaction à des abus (licenciements boursiers, catastrophes
écologiques, travail des enfants, souffrance au travail). Les entreprises se
trouvent ainsi confrontées en externe et en interne à des acteurs à la fois
différents et ayant des intérêts contradictoires, qui se préoccupent de
leurs activités et de leurs répercussions, qui exercent des pressions ou
leur demandent des comptes : syndicats, associations de consomma-
teurs, fournisseurs, organisations non gouvernementales, agences de nota-
tion, investisseurs responsables, pouvoirs publics, médias…
La fonction RH se trouve au cœur de ces nouvelles problématiques
complexes et de ces nouveaux paradoxes. Dans cette optique, la mesure
de la performance ne s’effectue plus sur des critères essentiellement
économiques et financiers mais intègre des indicateurs sociaux, socié-
taux et environnementaux. Le souci d’améliorer l’image sociale et socié-
tale de leur entreprise est largement partagé par les DRH sous le vocable
« développement durable » ou RSE qui, traduit dans le domaine RH
une attention accrue envers les handicapés, l’égalité hommes/ femmes,
la diversité culturelle et l’intégration, l’embauche des jeunes... Cette
attention est cependant largement dopée par diverses obligations léga-
les1. Mais il y a encore loin de l’intention à l’action concrète… Et les
nombreux rapports et enquêtes dénonçant la dégradation des condi-
1. L’égalité salariale entre les deux sexes date de mars 2006 et la pression va être renforcée
en 2008.
Environnemental
Durable
Viable Vivable
Équitable
Économique Social
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tions de travail ou la souffrance au travail montrent que de nombreux
progrès sont à accomplir.1
Ces dernières années, les suicides sur le lieu de travail se sont multi-
pliés, obligeant les entreprises à prendre en compte un peu mieux les
« risques psychosociaux ». Cependant, direction et syndicats ne sont pas
à l’aise sur ce sujet. Bien qu’ils dénoncent régulièrement la pression
croissante qui s’exerce sur les salariés grâce à des enquêtes ou des
« observatoires du stress », les syndicats n’osent pas exploiter à chaud les
cas de suicides. Quant aux dirigeants, ils préfèrent mettre en place une
gestion individuelle de la question, (accompagnement psychologique
personnalisé, numéro vert ou hotline…) que d’accepter d’ouvrir la
boîte de Pandore en reconnaissant un lien entre ces suicides et le travail,
car alors ils devraient accepter de s’interroger sur leur organisation.
Les médecins et inspecteurs du travail constatent de plus en plus de
violences verbales, d’insultes proférées en public, d’incivilités. Plusieurs
raisons sont avancées : la loi du silence (par crainte de perdre son
emploi, ou pour le manager la peur de se voir reproché de ne pas savoir
tenir son équipe); le manque de temps des managers de proximité -eux-
mêmes stressés- pour jouer leur rôle d’écoute et de médiateurs; les
moments conviviaux pendant lesquels l’équipe se soudait ont disparu
(pauses, machine à café); les services RH enfin, qui « ne savent plus
faire face à des situations conflictuelles et se cantonnent à une gestion
disciplinaire »2.
Les symptômes à surveiller sont les réactions de défense individuelle
(absentéisme, violences faites à des biens) ainsi que les mouvements de
grève suivis massivement alors que le mot d’ordre est flou, ou bien qui
débordent les consignes des autorités syndicales.
L’image sociale et sociétale sera un élément déterminant en termes
d’attractivité des entreprises envers les hauts potentiels dans les années
1. Voir la couverture de Liaisons Sociales, no 86 de Novembre 2007 : « Insultes, coups,
suicides. Violences au travail ».
Voir également le no 182 de Mai 2007 de la revue Sciences Humaines : « Conflits ordi-
naires en famille, au travail, entre amis », l’article de Jean François Dortier : « les
conflits au travail ».
Voir également des enquêtes menées par la CFDT.
2. Interview de Yves Grasset, animateur de Violence, Travail, Environnement, à St-
Étienne.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
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à venir, et les DRH semblent avoir réussi à se faire entendre des direc-
tions générales du moins dans les grandes entreprises. De ce fait, la
formation des managers opérationnels, qui avait été abandonnée quel-
que peu ces vingt dernières années, semble refleurir, avec des cycles de
deux à huit jours, intitulés souvent « initiation à la gestion des ressour-
ces humaines », ou « professionnalisation des managers ».
La question des retraites et l’emploi des seniors
Le débat sur l’âge de départ en retraite, qui s’est soldé en juillet 2003 par
l’adoption d’un projet de loi, relayé fin 2007 par la remise à plat de
certains régimes spéciaux, ainsi que les nouvelles négociations prévues
en 2008 pour passer à 41 ans de cotisations d’ici 2012 pour tous les
régimes ne supprime pas pour autant les nombreuses contradictions
auxquelles les entreprises, les salariés et donc les services des ressources
humaines sont confrontés.
En effet, alors que nous sortons d’une période de vingt années
pendant lesquelles l’âge du départ en retraite s’est stabilisé en moyenne
autour de 57 ans, il s’agit maintenant de faire rester tous les salariés
jusqu’à 60, voire 65 ans.
Cette question représente un défi majeur, auquel les DRH ne se sont
pas encore tous attelés tellement la question est complexe. Elle se heurte
à des stéréotypes bien ancrés tels que la moindre productivité, ou la
moindre résistance des seniors en occultant les qualités ou les compé-
tences qui leur sont spécifiques. Et un consensus se dégage, chez tous les
acteurs pour résister face à cette évolution.1
Face au vieillissement de la population, aux difficultés annoncées du
financement des retraites, face à la pénurie de main-d’œuvre à venir du
fait de la courbe démographique, l’enjeu pour les entreprises, pour les DRH
mais plus largement pour la société, pour le politique et les organisa-
tions syndicales, est de résoudre la contradiction suivante : comment
réorganiser le travail pour les seniors, et le « faire passer » dans l’opinion
1. « les pratiques évoluent encore trop peu en raison de la persistance des discriminations, des
préretraites et des dispenses de recherche d’emploi. On n’observe pas de changement notable
des comportements des seniors et des employeurs dans le sens d’un allongement de
l’activité ». COR (conseil d’orientation des retraites) compte-rendu de la séance du
30 mai 2007.
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alors que ni les entreprises ni les salariés (seniors ou pas) n’ont réelle-
ment envie de rester dans l’emploi après 60 ans voire après 55 ans ?
En effet, les problèmes soulevés par cette question sont nombreux :
depuis la gestion des rémunérations (les salariés âgés coûtent cher…),
en passant par des questions techniques telles que la réorganisation des
postes entraînant la redistribution du travail, ou encore l’introduction
de dispositifs d’épargne retraite dans les rémunérations et donc dans les
négociations, en continuant par la gestion des carrières et la formation…
Les directions des ressources humaines vont ainsi être confrontées à
plusieurs questions :
– Comment organiser le travail afin d’utiliser au mieux les compé-
tences des seniors ? Rythme allégé ? Activités nouvelles ? Place au
sein des services ?
– Comment motiver des salariés qui avaient espéré partir à la retraite
à 60 ans (voire avant) et qui vont devoir rester au travail dans un
contexte social où les jeunes retraités sont encore le modèle cultu-
rel dominant ?
– Comment assurer une bonne coexistence des différentes généra-
tions et modifier la politique de promotion sans pénaliser ou
démotiver les plus jeunes ?
– Comment maîtriser la masse salariale si le pourcentage des seniors
augmente, ou alors quels salaires pour les seniors ?
– Comment faire changer les représentations sur les compétences
des salariés âgés, à la fois de l’encadrement mais également des sala-
riés âgés eux-mêmes ainsi que de leur entourage ?
Les services RH ont des positions disparates sur cette question. Éleo-
nore Marbot et Jean Marie Peretti ont étudié de nombreux accords
d’entreprises signés ces dernières années, par exemple dans la grande
distribution :
« L’accord signé le 15 janvier 2004 sur la valorisation de l’expérience,
la gestion de secondes carrières et la mise à la retraite à partir de 60 ans »
dans la grande distribution est particulièrement intéressant. Les raisons
pour lesquelles les plus de 50 ans nécessitent une attention particulière
sont précisées dans l’accord :
– leurs aînés ont bénéficié de pré-retraites…;
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
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– ils ont eu un début d’activité plus tardif et n’auront pas acquis à
60 ans les trimestres suffisants;
– les progressions de carrière sont plus faibles à partir de 50 ans;
– les plans de formation ne sont pas adaptés à des personnes qui
maîtrisent leur métier »1.
Diverses pistes sont explorées dans les accords signés à Arcelor/
Mittal, à PSA, dans les Caisses d’Épargne, ou à la Caisse des Dépôts et
Consignations : un passage à temps partiel ou un taux d’activité dégres-
sif, le tutorat de jeunes embauchés, un réaménagement des postes, la
conception de nouvelles missions transversales intégrant des tâches
touchant à l’administratif, à la qualité et à la sécurité; des points carrière
à 45 ans.
Cependant l’analyse de Nicolas Rolland sur les seniors en tant que
variable stratégique dans la capitalisation et la transmission des connais-
sances, est encore loin d’être partagée2. « A la différence de nombreuses
ressources, la connaissance possède comme caractéristique de ne pas
s’user au fil du temps, si tant est qu’on l’utilise judicieusement. De plus,
les expériences et les apprentissages divers viennent se greffer à cette
connaissance pour l’améliorer, faisant par cela croître sa valeur absolue.
Au regard de cette approche, l’actif vieillissant, de par ses divers appren-
tissages et ses multiples expériences, aurait plutôt tendance, à l’image
du bon vin, à faire croître sa valeur au fil des années. La gestion de ces
personnes devient un enjeu stratégique pour les entreprises. (…) elles
doivent instaurer un système managerial leur assurant une capitalisa-
tion efficiente de leurs connaissances ».3
Dominique Thierry4, de Développement et Emploi, dit que « les entre-
prises devront apprendre à gérer des âges différents, avec des attentes
différentes. » Il leur faudra repenser la mobilité, la formation profes-
1. Marbot E. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Éditions Le Village Mondial,
2004.
2. Sur 45 étudiants en Master 2 RH en 2007/2008 (à Strasbourg et Reims), seulement 2
ont une mission en relation avec la problématique des seniors…
3. Rolland N., Management des connaissances et vieillissement de la population active,
in Perennité au travail. Âge, bouleversements et performance, sous la direction de Florian
Sala, Lyvie Guéret-Talon, Éditions Chronique sociale, Lyon, 2006.
4. « Passer d’une gestion par les âges à une gestion des âges », de Thierry D., in Entreprises
et Carrières, no 615, avril 2002.
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sionnelle, transformer les conditions de travail, aménager le temps de
travail en fonction des âges, et enfin reconstruire une identité au travail
spécifique pour ces tranches d’âge, conciliant activité professionnelle et
extra-professionnelle.
Le développement de la gestion des RH dans les différentes
fonctions publiques
Les collectivités territoriales (villes, départements, régions) se sont
dotées depuis quelques années d’outils de GPEC1 permettant de clari-
fier les emplois et compétences existants. En effet elles ont eu à recruter
massivement du fait des transferts de compétences liées à la décentrali-
sation2, et elles doivent également anticiper des départs à la retraite3 qui
vont engendrer d’une part des recrutements qui s’annoncent difficiles
dans un contexte de pénurie annoncée de certaines compétences,
d’autre part des réorganisations avec des opportunités accrues d’évolu-
tions de carrières.
De véritables démarches GPEC se sont mises en place dans de très
nombreuses collectivités, et des cadres RH ont été recrutés en tant que
contractuels. En effet le statut de la fonction publique territoriale
permet d’intégrer des spécialistes de façon plus souple que dans la fonc-
tion publique d’État, en particulier dans des fonctions supports telles
que les finances, les achats, la gestion des ressources humaines ou les
services techniques. Pour faciliter ces recrutements sur titres certaines
collectivités pour attirer des profils intéressants offrent des stages longs
rémunérés, des bourses4 et sont présents sur des forums de recrutement.
Les entretiens d’évaluation, les entretiens professionnels avec l’exten-
sion du DIF et de la VAE, font désormais partie des pratiques des
1. Le CNFPT (centre national de la fonction publique territoriale) a élaboré le « réper-
toire des métiers territoriaux » qui décrit 253 métiers ainsi qu‘un « dictionnaire des
compétences » qui servent de base de travail aux collectivités qui veulent décrire leurs
propres emplois.
2. Les effectifs de la fonction publique territoriale ont crû de 43% entre 1986 et 2006.
3. 30% de fonctionnaires de la fonction publique territoriale vont partir d’ici 2012, et
parmi eux, 50% de cadres A.
4. Le Conseil Général de Moselle, proche du Luxembourg aux salaires attractifs, offre des
bourses de 1000 euros par mois à des élèves assistantes sociales et puéricultrices.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
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collectivités. La difficulté reste cependant la culture de la fonction
publique avec le poids des statuts, des concours, et le rôle traditionnel
des syndicats dans la gestion des personnels. Pour faire évoluer cette
culture, plusieurs collectivités ont mis en place des formations intégrant
la GRH à destination des cadres opérationnels1. En effet, l’enjeu des
prochaines années va être le développement de la mobilité interne, qui
devra être basée sur les compétences pour atteindre les objectifs politi-
ques de réduction d’effectifs2 tout en maintenant la qualité des services
rendus aux usagers. Cette question de la modernisation de la fonction
publique n’est pas spécifique à la France.3
Pour ce qui concerne la fonction publique hospitalière, elle doit déjà
faire face à la pénurie de main d’œuvre qualifiée (médecins, infir-
mières), à une incapacité chronique à gérer sa masse salariale avec des
millions d’heures supplémentaires en retard de paiement, tout en subis-
sant des contraintes de service public incontournables : ouverture
365 jours par an et 24 h/24, des activités fluctuantes et non prévisibles
par essence. Les dysfonctionnements se rendent visibles actuellement
par des revendications catégorielles tournantes (grève des médecins
urgentistes en cette fin d’année 2007). Mais il faudra bien repenser
globalement la gestion des ressources humaines dans une institution où
les compétences humaines sont le cœur même de l’activité. C’est un
énorme chantier à venir.
Enfin, la fonction publique d’État. Un répertoire interministériel
des métiers de l’État (RIME) est en cours d’élaboration. Il a établi
230 « emplois-référence » répartis dans 23 « domaines fonctionnels ».
Mais sur le terrain, les DRH qui ont été nommés un peu partout dans
les rectorats, les inspections académiques, les casernes, les services minis-
tériels… n’arrivent pas à faire changer des règles statutaires très contrai-
1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres
opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du
Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH,
sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a
concerné 470 personnes sur la période 2005-2007.
2. Non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, comme l’a promis
Nicolas Sarkozy président.
3. Voir l’ouvrage collectif, sous la direction de Louise Lemire, Denis Proulx et Luc
Cooremans, Modernisation de l’État et gestion des ressources humaines, Éditions
Université du Québec et Haute École Francisco Ferrer, Belgique, 2005.
LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
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gnantes, et défendues âprement par les syndicats. La culture égalitariste
privilégie les promotions à l’ancienneté alors que le pouvoir politique
voudrait introduire une dose de rémunération au mérite… La forma-
tion, initiale et continue, est également contestée par les agents de l’État
car pas suffisamment adaptée aux besoins du terrain. Enfin, les politi-
ques ressources humaines dans la fonction publique d’État sont menées
par des hauts fonctionnaires généralistes, rompus à la négociation avec
les syndicats et connaissant bien les textes, mais ils ne sont générale-
ment pas des spécialistes RH. Néanmoins, la modernisation de l’État,
avec des enjeux forts de réduction des coûts, entraînera nécessairement
des réformes dans la gestion de ses agents. A quelle échéance, et avec
quelles méthodes et quels moyens ?
La gestion des RH dans les turbulences de la mondialisation
Chaque jour l’actualité nous informe de cas d’entreprises dans la tour-
mente, obligées de s’adapter à la mondialisation, aux décisions de dirigeants
ou actionnaires de racheter un concurrent, de délocaliser, de fusion-
ner… Chaque fois, des hommes et des femmes salariés sont concernés.
Le rachat ne se solde pas toujours par une fermeture ni même des
suppressions d’emplois. En effet, les acheteurs peuvent relancer l’acti-
vité et redonner une dynamique à l’entreprise. Néanmoins cela n’est pas
sans une nécessaire adaptation des salariés à la nouvelle culture, à la
nouvelle organisation. A ce moment là, le service RH doit être très
présent pour communiquer sur les projets, accompagner les change-
ments par de la formation, un suivi au plus près des entretiens annuels.
Mais ces turbulences peuvent malheureusement entraîner ce qu’on
appelle pudiquement aujourd’hui un PSE (plan de sauvegarde de
l’emploi). Les DRH sont alors fortement sollicités à innover… et para-
doxalement, c’est à cette occasion que les représentants du personnel
retrouvent leur légitimité maximale, pour négocier, accompagner, inven-
ter les mesures d’un plan social1. Les DRH doivent également travailler
avec des partenaires publics dans la recherche de solutions : inspection
1. En Grande Bretagne, des délégués syndicaux chargés spécifiquement de la formation
sont nommés par les syndicats (12 000 en 2005). Leur rôle est d’encourager les non
qualifiés à se former et engager la concertation avec l’employeur sur les actions à mettre
en place.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
34
du travail, préfet, DDTE,1 mais également AFPA2, et université locale3
pour organiser la reconversion. La tendance, encouragée par le pouvoir
politique, est également de faire appel à des prestataires de reconversion
privés, avec un contrat sur objectifs. Les DRH devront également gérer
des grèves, des manifestations de salariés qui n’ont plus rien à perdre, et
seront en première ligne dans les négociations aux côtés des dirigeants.
Une autre conséquence se trouve dans la nécessité de savoir gérer les
ressources humaines dans de grandes multinationales, avec des différen-
ces culturelles, législatives et de pouvoir d’achat très importantes. Des
services se sont ainsi spécialisés dans la gestion des expatriés. Ce sont
généralement des salariés jeunes, bien formés, entreprenants, qu’il s’agit
de gérer au regard du marché de l’emploi de ces profils rares ou atypi-
ques. En effet, les entreprises sont en concurrence entre elles pour atti-
rer puis fidéliser ces candidats à l’expatriation ce qui signifie une veille
attentive sur les rémunérations et les avantages divers offerts par les
autres employeurs non seulement français mais mondiaux : aide à
l’emploi du conjoint ou compensation financière, inscription des
enfants dans des écoles internationales, logement fourni. Cela donne
également lieu à l’émergence d’emplois nouveaux, dont l’intitulé est
généralement anglo-saxon. Nous en avons rencontré deux. Il s’agit de
l’emploi de « Human Ressource Business Partner », c’est-à-dire l’inter-
locuteur RH des cadres dirigeants des sites implantés à l’étranger, et du
« RH Account Manager » c’est-à-dire un coordonnateur qui s’assure de
la cohérence des politiques RH vis à vis des plus gros clients (les
« grands comptes ») quel que soit le pays d’où proviennent les services
ou les produits pour ces clients. De nombreuses offres d’emploi appa-
raissent sur les sites internet de recrutement à l’international.
Ce tour d’horizon n’est probablement pas exhaustif. Il pointe néan-
moins les nombreux défis qui attendent les responsables de la fonction
ressources humaines dans les années à venir, et laissent augurer d’un
marché de l’emploi pour des diplômés en ressources humaines plein
d’opportunités et d’écueils…
1. Pour mobiliser des fonds pour la création de nouveaux emplois sur la zone ; en
subventionnant les entreprises qui viennent s’installer ou en subventionnant celles qui
embauchent des salariés à reclasser.
2. Association pour la Formation Professionnelle des Adultes.
3. Par exemple en Suède, reconversion des salariés des télécommunications par l’Université.
35
CH A P I T RE 2
Le processus de production
de la fonction RH
UE PRODUIT la fonction RH et comment s’organise-t-elle pour
créer de la valeur ajoutée ?
La très grande diversité des organigrammes ressources humaines
rencontrés (allant de l’inexistence totale à des services très étoffés,
centralisés ou décentralisés), et l’extrême variété de la composition des
emplois rencontrés (les tâches confiées aux titulaires d’emploi sont
regroupées de façon très souvent différente d’une entreprise à l’autre)
nous ont conduites à nous interroger sur ce qui fonde la logique des
différents choix d’organisation des RH. Un exemple d’organigramme
(une mutualité agricole) va nous permettre d’illustrer les difficultés
rencontrées (figure 2.1).
Dans un tel organigramme, les intitulés ne permettent pas d’identifier :
– le contenu des postes : par exemple, que signifient « gestion admi-
nistrative », ou « coordination régionale » ?
– la différence entre les trois intitulés : assistante ressources humai-
nes, assistante formation et communication, et assistant de commu-
nication;
Q
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
36
– la différence entre les niveaux hiérarchiques : la chargée de
communication est-elle plutôt au niveau hiérarchique du DRH ou
au niveau des assistants ?
En extrapolant au-delà de cet exemple, il suffit de citer les intitulés
d’emplois (extraits de divers organigrammes réels) pour constater
l’instabilité des dénominations et par là même la difficulté de se repré-
senter les fonctions réelles. Ainsi, nous avons rencontré les intitulés
suivants : directeur des ressources humaines, directeur des relations
sociales, directeur du personnel, responsable du personnel, assistant
chargé de la gestion du personnel, assistant RH, assistant formation,
assistant chargé des études et de l’emploi, chargé de la gestion des
compétences et de la formation, responsable du contentieux et de la
gestion des carrières, assistant paye et administration du personnel,
employé chargé du suivi des contrats, secrétaire paye, pointeau, chargé
des relations sociales et des statistiques, responsable de coordination
paye, secrétaire rédacteur adjoint, secrétaire général, assistant RH et
service paye, responsable de la gestion de la formation, attaché chargé
de la gestion des carrières, ou plus récemment responsable ressources
humaines, correspondant ressources humaines, responsable du déve-
loppement ressources humaines, etc. Cette énumération est loin d’être
exhaustive mais suffit à illustrer les difficultés que nous avons rencon-
trées. À quel niveau de responsabilités ces divers emplois sont-ils situés ?
Figure 2.1 – Exemple d’organigramme
du service RH d’une mutualité agricole
Secrétariat général
gestion administrative du
conseil d’administration
Centre X (lieu)
gestion administrative
Échelon local
coordination régionale
Relations sociales
conseil d’entreprise
coordination des
instances départementales
Direction
Secrétariat de
direction
Chargé des ressources
humaines
Assistante
ressources
humaines
Assistante
formation et
communication
Assistant de
communication
Chargée de
communication
LE PROCESSUS DE PRODUCTION DE LA FONCTION RH
37
©
Dunod
–
La
photocopie
non
autorisée
est
un
délit
Quelle est la mission principale de leur emploi ? Un assistant dans une
entreprise a-t-il le même niveau de responsabilités que dans une autre
entreprise ? À titre d’illustration, pour le même emploi intitulé
« assistant RH », certaines entreprises recherchent un bac + 2 (DUT
GEA option RH), d’autres un DESS RH (Bac + 5)…
De plus, les organigrammes des grandes entreprises étudiés pour
cette étude ou pour le suivi des stages étudiants ne sont pas du tout
stabilisés, et changent pratiquement chaque année1.
Présenter des organigrammes types en fonction de la taille des entre-
prises, de leur statut public ou privé, du fait qu’elles sont siège ou site
ou filiale est donc insuffisant pour rendre compte du fonctionnement
de la fonction RH et en particulier de ce qu’elle « produit », c’est-à-dire
de son objectif, de sa raison d’être, de sa finalité.
Pour ce faire il n’y a pas de processus linéaire de production corres-
pondant à une succession d’activités prises en charge les unes après les
autres comme on le trouve dans la production de biens ou de services,
activités correspondant à tels emplois avec telles technicités. Cependant
il existe des chaînes d’activités2 par service produit (paye, formation,
recrutement, plan social, etc.), mais ces chaînes d’activités ne sont pas
forcément liées entre elles.
La fonction ressources humaines ne fonctionne pas linéairement avec
« inputs », transformations, « outputs », mais la plupart du temps et de
plus en plus en réseau, en communication permanente avec les autres
services de l’entreprise sur la mise en place de projets (35 heures, plans
de retraite progressive, introduction de nouvelles technologies et forma-
tion, etc.) avec le recours fréquent à des organismes conseil (gestion des
ressources humaines externalisée)3.
1. À ce propos, lire l’article intitulé « Renault remanie sa DRH… de fond en comble », in
Liaisons Sociales, décembre 1997.
Si elle produit en majeure partie des services aux autres entités de
l’entreprise, la fonction ressources humaines a une mission, une préoc-
cupation principale, celle d’optimiser la productivité des hommes.
2. Voir par exemple la chaîne d’activités du responsable paye.
3. Voir à ce propos le métier de consultant RH décrit au chapitre 7.
LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS
38
Autrement dit, il y aura de moins en moins d’activités correspondant
à des techniques stabilisées et de plus en plus d’activités correspondant
à des dispositifs toujours à reconstruire s’appuyant pour fonctionner sur
des réseaux relationnels. Ceci explique que dans certaines entreprises la
fonction RH se structure :
– d’une part en emplois opérationnels;
– d’autre part en emplois de prospective.
Ou encore que dans d’autres entreprises, les opérationnels RH (appe-
lés souvent « correspondants RH ») sont également chacun chargés
d’un dossier « transversal » (la formation, le recrutement, la communi-
cation, etc).
Pour rendre compte de cette complexité d’organisation de la fonction
RH, nous proposons une représentation sous forme d’un système.
Cet essai de formalisation systémique résulte des entretiens de
cadrage réalisés avec des directeurs des ressources humaines soit spécifi-
quement pour l’étude, soit lors du suivi de stagiaires en entreprise, soit
lors de nos travaux de consultant.
Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie,
études, plans d’action, logistique
Comment représenter les différents sous-systèmes RH, leur positionne-
ment relativement aux autres fonctions de l’entreprise, relativement à
l’extérieur ainsi que leurs interactions ? La configuration schématique
suivante permet de répondre à ces premières questions.
Le sous-système stratégie
Il correspond à la définition des différentes politiques en matière de RH :
emploi, rémunération, formation, communication, sécurité, etc. Celles-ci
sont très étroitement liées à la politique générale de l’entreprise car elles
doivent accompagner, voire précéder les choix en matière de politique
industrielle ou commerciale. Ce sous-système peut être développé
explicitement (par exemple lorsque le DRH a un poids dans l’équipe
dirigeante) ou bien être implicite, lorsque les choix stratégiques ne sont
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  • 1. La fonction Ressources Humaines Jacqueline BARRAUD Martine GUILLEMIN Françoise KITTEL Métiers,compétences et formation 3e édition
  • 3.
  • 4. La fonction Ressources Humaines Métiers, compétences et formation Jacqueline BARRAUD Martine GUILLEMIN Françoise KITTEL 3e édition
  • 5. © Dunod, Paris, 2008 ISBN 978-2-10-054422-6
  • 6. V Remerciements Nous voudrions adresser nos remerciements à : Nicole Mandon pour ses conseils, ses lectures critiques et ses encoura- gements. Tous les professionnels de la fonction RH qui ont accepté d’être inter- viewés, nous fournissant ainsi le matériau à partir duquel nous avons pu travailler, ainsi que ceux qui ont relu ces travaux pour les valider, les actualiser, les compléter. Nos collègues enseignants chercheurs pour leurs conseils et suggestions lors des relectures. Nous remercions enfin nos conjoints et nos familles pour leur patience et leurs encouragements ainsi que nos amis qui ont facilité nos nombreu- ses rencontres afin de pallier l’éloignement géographique.
  • 7.
  • 8. VII Table des matières Introduction 1 PREMIÈRE PARTIE – La fonction ressources humaines : son évolution, ses métiers CHAPITRE 1 ■ La fonction RH au cœur des évolutions socio-économiques 11 Une évolution constante des missions et des outils 11 Problématiques et débats actuels 18 Une réorganisation de la fonction : décentralisation et externalisation 18 La gestion des compétences 21 Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH 22 La Responsabilité Sociale de l’Entreprise 25 La question des retraites et l’emploi des seniors 28 Le développement de la gestion des RH dans les différentes fonctions publiques 31 La gestion des RH dans les turbulences de la mondialisation 33 CHAPITRE 2 ■ Le processus de production de la fonction RH 35 Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie, études, plans d’action, logistique 38 Le sous-système stratégie 38
  • 9. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES VIII Le sous-système logistique 40 Le sous-système études 42 Le sous-système gestion des domaines d’action 42 Les trois domaines d’action : rémunération, emploi, risques sociaux 44 Le domaine rémunération 44 Le domaine emploi 45 Le domaine risques sociaux 45 CHAPITRE 3 ■ Les emplois-métiers identifiés 50 Positionnement des emplois-métiers étudiés dans le système ressources humaines 50 Modalités de présentation de chaque emploi-métier : des activités aux compétences 53 Le processus du domaine et ses emplois-métiers 54 Cinq rubriques descriptives de l’emploi-métier 54 Le résumé de l’emploi-métier 54 La chaîne d’activités de l’emploi-métier 54 Le réseau de relations de l’emploi-métier 55 Les évolutions de l’emploi-métier repérées 55 Les compétences, ou « savoirs en action » 56 DEUXIÈME PARTIE – Emplois-métiers spécialisés dans un domaine, et compétences associées CHAPITRE 4 ■ Les emplois-métiers du domaine rémunération 59 Le processus rémunération et ses emplois-métiers 59 L’emploi-métier de responsable paye et ses évolutions 64 Résumé 64 Réseau de relations du responsable paye 66 Les évolutions de l’emploi repérées 69 Les compétences de l’emploi-métier du responsable paye 70 CHAPITRE 5 ■ Les emplois-métiers du domaine emploi 74 Le processus de recrutement 76 L’emploi-métier externalisé de consultant en recrutement et ses évolutions 82 Résumé 82
  • 10. TABLE DES MATIÈRES IX © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit Réseau de relations du consultant en recrutement 83 Les évolutions de l’emploi repérées 83 Les compétences de l’emploi-métier de consultant en recrutement 87 Le processus de formation 91 L’emploi-métier de responsable de formation et ses évolutions 96 Résumé 96 Réseau de relations du responsable formation 97 Les évolutions de l’emploi repérées 101 Les compétences de l’emploi-métier de responsable de formation 102 Évolutions repérées : l’activité de gestion de l’emploi et des compétences 105 CHAPITRE 6 ■ Les emplois-métiers du domaine risques sociaux 109 L’emploi-métier de responsable sécurité et ses évolutions 111 Résumé 111 Réseau de relations du responsable sécurité 113 Les évolutions de l’emploi repérées 116 Les compétences de l’emploi-métier de responsable sécurité 116 L’emploi-métier de responsable des relations sociales et ses évolutions 119 Résumé 119 Réseau de relations du responsable des relations sociales 122 Les compétences de l’emploi-métier de responsable des relations sociales 124 Les évolutions de l’emploi repérées 129 TROISIÈME PARTIE – Emplois-métiers transversaux et nouveaux métiers CHAPITRE 7 ■ Des emplois-métiers transversaux aux domaines 137 Le concept d’emploi transversal 137 L’emploi-métier de directeur des ressources humaines (DRH) et ses évolutions 142 Résumé 142 Réseau de relations du directeur des ressources humaines 145 Les évolutions de l’emploi repérées 148 Les compétences de l’emploi-métier de DRH 151
  • 11. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES X L’emploi-métier d’assistant ressources humaines spécialisé 155 Résumé 156 Réseau de relations de l’assistant ressources humaines spécialisé 160 Les évolutions de l’emploi repérées 161 Les compétences de l’emploi-métier d’assistant RH spécialisé 163 L’emploi-métier externalisé de consultant en ressources humaines et ses évolutions 166 Résumé 166 Réseau de relations du consultant en ressources humaines 168 Les évolutions de l’emploi repérées 168 Les compétences de l’emploi-métier de consultant en ressources humaines 172 CHAPITRE 8 ■ Des nouveaux métiers 177 L’emploi-métier du chargé d’études ressources humaines 178 Résumé 179 Réseau de relations du chargé d’études RH 181 Les compétences de l’emploi-métier de chargé d’études RH 182 L’emploi-métier de responsable organisation et gestion des systèmes d’information ressources humaines 184 Résumé 184 Réseau de relations du responsable organisation et gestion des systèmes d’information ressources humaines 187 Les compétences de l’emploi du responsable organisation et gestion des systèmes d’information RH 188 Le métier de conseiller-accompagnateur en VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) 189 Processus VAE 190 Les débats sur la faisabilité de la VAE 191 Un nouveau métier est-il en émergence ? 195 Résumé de l’emploi de conseiller en VAP 195
  • 12. TABLE DES MATIÈRES XI © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit CHAPITRE 9 ■ Des enseignements à tirer de l’étude des emplois-métiers 198 Le conseil à la direction dans le pilotage des changements 198 Le conseil aux autres services : relation de type client/fournisseur 200 Le contrôle de gestion sociale et budgétaire 202 Le réaménagement de la fonction RH 202 La pression des actionnaires sur la politique sociale 203 QUATRIÈME PARTIE – Comment passer des compétences de l’emploi à un référentiel de formation ? CHAPITRE 10 ■ Forme-t-on à des compétences en situation de travail ou à des compétences intermédiaires ? 207 Le concept de compétence 207 Le processus de production des compétences 210 CHAPITRE 11 ■ De l’utilisation des rubriques « compétences » pour élaborer un référentiel de formation 212 Des connaissances incontournables à acquérir en formation initiale et/ou continue 212 Des capacités liées à la pratique professionnelle avec les connaissances correspondantes 223 Des qualités à mettre en œuvre 228 CHAPITRE 12 ■ Formations en ressources humaines : quelques pistes… 230 Quelles formations pour quels métiers ? 230 Une approche pédagogique à repenser 233 Instruments verbaux 237 Relation au temps 237 Relation à l’espace 237 Conceptualisation 238 Pensée hypothétique 238 Prise en compte d’informations simultanées 238 Distinction entre des données pertinentes 238
  • 13. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES XII Conclusion 241 Glossaire 245 Sigles 247 Annexe – La méthode ETED 250 Première étape : le cadrage 250 Deuxième étape : l’échantillonnage de la population d’enquête 251 Troisième étape : l’enquête auprès de l’échantillon construit 252 Quatrième étape : l’exploitation des entretiens 253 Cinquième étape : la validation 254 Bibliographie 255
  • 14. 1 Introduction omment organiser et garantir la flexibilité productive nécessaire, tout en développant les compétences indispensables à la croissance de l’entreprise, mais en garantissant la création de valeur pour l’actionnaire ? Comment transformer le travail en compétence collective, tout en optimisant les charges de personnel grâce à un contrôle de gestion sociale efficace ? Comment assurer une certaine équité entre des salariés qui partici- pent à des collectifs de travail dans les processus de production alors qu’ils disposent de statuts, de conditions d’emploi, de conditions de travail complètement différents ? Comment organiser le travail afin d’utiliser au mieux les compéten- ces des seniors, comment les motiver dans un contexte social où les jeunes retraités sont encore le modèle culturel dominant et assurer une bonne coexistence des générations ? Comment aménager et mettre en cohérence des pratiques et des méthodes dans des organisations différentes et éclatées ? Comment concilier les intérêts souvent contradictoires entre les diver- ses parties prenantes au niveau micro et macroéconomique ou comment concilier la recherche du profit et les préoccupations sociales, sociétales et environnementales ? Comment la fonction RH peut-elle apporter la preuve de son effica- cité en optimisant ses propres coûts tout en répondant aux nouvelles problématiques complexes liées aux évolutions du contexte économi- que et social ? La fonction ressources humaines C
  • 15. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 2 Ces questions et paradoxes sont au cœur des préoccupations des entreprises et plus spécifiquement des DRH et de la fonction RH. La gestion des ressources humaines connaît actuellement des transforma- tions et des interrogations liées aux nombreuses contradictions qui traversent les organisations de manière générale, liées principalement aux tensions croissantes entre « local » et « global ». Si les niveaux d’action et de régulation locaux sont tout aussi indispensables, ils se sont complexifiés avec la mondialisation. Nous pouvons affirmer avec Jean-Michel Plane que : « Aujourd’hui, la gestion des ressources humaines est une fonction à part entière, avec des outils reconnus, intégrée aux côtés de la Direction Générale. Elle assure à la fois une fonction d’intégration pour le personnel (dialogue social, communication de la stratégie) et une fonction de différencia- tion (recrutement et pilotage des carrières, rémunérations individuali- sées, etc.). Cette activité vise à gérer les effectifs, les qualifications et les compétences à court, moyen et long termes. Sa mission : contribuer à la modernisation et au développement de l’organisation à travers la mise en œuvre d’un processus d’implication des salariés. Ce processus s’inscrit dans une recherche de compatibilité entre des intérêts souvent divergents des actionnaires de l’entreprise, des managers et des employés. Ainsi la problématique du pouvoir et la gestion du conflit sont-elles des questions essentielles pour les gestionnaires des ressources humaines, de même que la gestion des relations professionnelles et la négociation collective1. » La fonction RH, sa place et ses métiers évoluent donc en fonction des politiques des entreprises et de la société. L’objet de notre livre consiste précisément à fournir des réponses à ces différentes questions. Il permet de découvrir, à travers la description fine des emplois, la réalité de la fonction aujourd’hui, les raisons de 1. Plane J.-M., La gestion des ressources humaines, Economica, 2003. Comment analyser finement l’évolution de la fonction ressources humaines, voire anticiper ses nouveaux métiers ? Comment traduire la réalité des métiers actuels et futurs en compétences ? Comment ensuite décliner ces compétences en savoirs théoriques et en savoirs liés à la pratique professionnelle ? Comment enfin construire des référen- tiels de formation, tant en termes de contenus que de pédagogie ?
  • 16. INTRODUCTION 3 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit l’extrême variété des organisations des services RH, non seulement en raison de la taille de l’entreprise, mais parce que les missions qu’elle doit prendre en charge varient constamment avec la politique choisie, avec ses contraintes propres, et en raison de l’utilisation des compétences qui existent dans le service. En effet, la fonction ressources humaines présente une très grande sensibilité à l’utilisation optimale des compé- tences et organise donc les tâches non seulement en fonction de ses priorités, mais également en fonction des hommes et des femmes dont elle dispose. Nous repérons dans notre étude d’une part les compétences nécessai- res à l’exercice des emplois de gestion des ressources humaines décrits, et explorons d’autre part la question de la construction de ces compé- tences. Cette dimension intéressera plus particulièrement les concep- teurs de programmes de formation et les formateurs, mais également tous les salariés exerçant une fonction dans les métiers de la GRH, afin de faire le point sur leurs propres compétences pour un bilan personnel ou dans une perspective d’évolution de carrière. Les cadres des services ressources humaines pourront s’appuyer sur cette recherche pour faire le point sur les compétences collectives de leur service et l’évolution souhaitable à prévoir. Quelquefois, on se rendra compte qu’il suffit pour rendre compétent un salarié de modifier l’organisation de son travail. D’autres fois, le salarié devra acquérir des connaissances de base qui lui manquent, ou bien encore il lui faudra développer ses capacités cognitives, celles qui font qu’il est capable d’établir un lien entre deux événements, qu’il sait utiliser à bon escient ce qu’il a appris lors d’une expérience antérieure ou à l’occasion d’une formation. Enfin il sera peut- être nécessaire de recruter une personne ayant des compétences complé- mentaires, permettant ainsi aux autres personnes du service de bien fonctionner ensemble. Les étudiants qui souhaitent s’orienter vers ces métiers profiteront également des descriptions des emplois et pourront mieux se représenter les compétences qu’ils pourront acquérir au cours de leur formation et choisir des stages adaptés à leur projet professionnel. Il paraît somme toute logique qu’en ces temps où toutes les structures organisationnelles se penchent sur la question d’une meilleure gestion des compétences, les services chargés de la mettre en place s’appliquent à eux-mêmes les principes à l’œuvre dans cette évolution.
  • 17. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 4 La question de la préparation des étudiants et des salariés aux compé- tences des métiers est une question centrale aujourd’hui dans les univer- sités1, dans les centres de formation et dans les entreprises. La méthodologie choisie pour mener cette étude est empruntée au CEREQ (Centre d’études et de recherches sur les qualifications). Il s’agit de la méthode ETED2 mise au point par Nicole Mandon depuis les années 1990, qui répond précisément à la préoccupation d’analyser l’évolution des emplois. « ETED est une méthode d’analyse des emplois qui situe ceux-ci dans leur environnement (histoire, évolution des organisations, orientations actuelles et questions en débat) et associe à cette première analyse une analyse fine du travail à partir d’interviews auprès des titulaires d’emplois. »3 Elle « a pour caractéristique d’accepter l’emploi comme essentiellement variable et évolutif »4. Nous avons adhéré à l’hypothèse que : « cette approche des emplois, bien situés dans leur environnement, permet- tait d’en appréhender la complexité, le sens “productif”, et les évolutions. La dynamique des emplois est liée tant aux impulsions données par les person- nes qui les occupent que par des facteurs considérés habituellement comme extérieurs, les deux étant en interaction. Autant de raisons pour ne pas gommer la diversité des cas de figure mais au contraire exploiter ce qu’elle signifie. » « On essaie plus particulièrement de dégager (en intégrant diffé- rentes données) les mouvements émergents ou tendances d’évolution. »5 Cette démarche, scientifique dans sa construction, plus qualitative que quantitative, s’intéresse davantage à la diversité des situations dans leur lien avec l’environnement et les individus eux-mêmes qu’à la répé- tition d’éléments semblables dans différentes situations. Le noyau dur 1. Les réflexions au sein de l’Éducation nationale concernant la création de licences professionnelles ainsi que la loi sur la réforme des Universités (LRU) initiée en 2007 et se donnant pour objectif affiché une meilleure préparation au monde du travail, sont des indicateurs de cette préoccupation. 2. Emploi type étudié dans sa dynamique. 3. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998. 4. Mandon N., préface de L’emploi-type étudié dans sa dynamique, CEREQ, document de travail no 63, avril 1991. 5. Mandon N., réunion de travail, 19/07/1998.
  • 18. INTRODUCTION 5 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit des tâches afférentes aux emplois de GRH est très bien étudié dans divers ouvrages mais ce qui nous intéresse dans cette étude ce sont les différences, les évolutions et les causes possibles. Notre approche est autant diachronique que synchronique. Concrètement, le contenu de cet ouvrage résulte d’une analyse fine des emplois de gestion des ressources humaines, à partir d’interviews réalisés auprès de salariés et de leurs hiérarchies directes. L’échantillon comprend 90 interviews de titulaires d’emplois de gestion des ressour- ces humaines, dans diverses fonctions et appartenant à des organisa- tions de tailles et de secteurs d’activités variés, et autant d’interviews de leurs hiérarchies. Dans cet ouvrage, nous présentons la démarche complète allant de l’analyse des métiers à un référentiel de formation, et ce faisant, nous illustrons une démarche méthodologique pouvant intéresser tous ceux qui souhaitent réfléchir à la définition de compétences : les recruteurs, les formateurs, les professionnels de gestion des ressources humaines, les concepteurs et décideurs de nouveaux diplômes, ceux qui veulent mettre en place des procédures de validation d’acquis professionnels (VAP), ou de l’expérience (VAE) dans le cadre de bilans de compétences pour la reprise d’études ou la reconversion professionnelle. Le schéma suivant illustre et résume la démarche ainsi que le plan de l’ouvrage. Dans une première partie, sont étudiées les forces qui influencent les évolutions de la fonction, à travers une approche historique d’une part, et à travers l’étude des écrits les plus récents sur la gestion des ressources humaines d’autre part. Au-delà des différences apparentes, une appro- che formalisée de la fonction RH en système est proposée, distinguant LES COMPÉTENCES actuelles et futures UN RÉFÉRENTIEL DE FORMATION contenus et questions de pédagogie LES MÉTIERS DE LA GRH et leurs évolutions
  • 19. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 6 des sous-systèmes (stratégie, études, logistique et plans d’action) et des domaines d’application de la fonction (rémunération, emploi et risques sociaux). Nous faisons l’hypothèse que ce système est invariant au-delà de la taille ou de la conception que peuvent avoir des ressources humai- nes les dirigeants d’entreprises. Cette étude de l’environnement, appuyée par le modèle de la fonction RH en système, a guidé le choix de l’échantillon des salariés interrogés pour parvenir à brosser un état des lieux des métiers de la fonction, actuels et en devenir. Dans les deuxième et troisième parties sont décrits les emplois- métiers identifiés, classés en trois catégories : d’une part des emplois spécialisés dans les domaines emploi, rémunérations et risques sociaux, d’autre part des emplois dits transversaux à ces trois domaines, enfin des emplois en émergence. Il s’agit des emplois suivants : responsable paye, consultant en recrutement, responsable formation, responsable sécu- rité, chargé des relations sociales, directeur des ressources humaines, secrétaire administratif spécialisé ressources humaines, chargé d’études ressources humaines, responsable organisation et gestion des systèmes d’information ressources humaines, conseiller-accompagnateur en vali- dation des acquis de l’expérience. Ils résultent chacun d’une reconstruction à partir de l’interview de plusieurs salariés et de leurs supérieurs hiérarchiques, et nous avons élaboré différentes fiches pour les présenter : – une fiche « finalité et résumé » de l’emploi, – un organigramme intitulé « chaîne d’activités », – une description précise du « réseau de relations », identifiant les partenaires, les circonstances et la spécificité des relations, – une fiche sur les évolutions repérées de l’emploi, – une fiche détaillée reprenant les compétences ou « savoirs en action » de l’emploi. La quatrième partie met en œuvre le passage de l’analyse des emplois à l’élaboration d’un référentiel de formation pour les métiers des ressour- ces humaines. Pour ce faire, sont d’abord définis les concepts utilisés et le modèle théorique de référence pour la réflexion relative à l’acquisi- tion des compétences1. En effet, « la compétence ne s’observant qu’en 1. Définies ainsi : « c’est le savoir-mobiliser ses connaissances, capacités et qualités pour faire face à un problème donné ».
  • 20. INTRODUCTION 7 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit situation » et résultant de la « mobilisation d’un ensemble de ressources », nous avons formalisé un processus dans lequel la compétence apparaît grâce à la confrontation dynamique entre des « ressources » (connais- sances ou savoirs disciplinaires ou méthodologiques, connaissances tirées de l’expérience, motivation), des « capacités cognitives » et une « situa- tion de travail précise ». Par rapport à ce schéma théorique, nous situons ce qu’il est possible de réaliser lors du processus de formation proprement dit, sachant que nous estimons que les compétences utilisent des savoirs de diverses natures qui ont été appris et qui peuvent faire l’objet de formation. Cette démarche nous conduit à développer trois axes majeurs. D’une part les ressources qui peuvent être acquises en formation, et qui sont les connaissances ou savoirs, disciplinaires mais également méthodologiques. Nous avons utilisé les fiches « compétences » des divers emplois-métiers décrits pour recenser de façon précise l’ensemble de ces connaissances, les avons classées en référence au système préala- blement élaboré, c’est-à-dire selon les activités dominantes d’une part (stratégie, études, plans d’action ou logistique) et d’autre part selon trois niveaux de maîtrise (niveau de connaissances élémentaires à niveau d’expertise). Les documents élaborés peuvent permettre à des concep- teurs de formation en RH de construire leurs modules en fonction des objectifs visés (recensés dans le tableau par la reprise de la finalité globale). D’autre part les connaissances qui ne peuvent s’acquérir qu’à l’occa- sion de la pratique professionnelle (et donc dans l’organisation elle- même). Il nous a semblé intéressant de nous arrêter quelque peu sur ce que l’analyse des métiers et leur évolution nous a permis de découvrir à ce propos, car s’il existe de nombreux écrits pour débattre du lieu (l’école ou l’entreprise) pour former à un métier, rien n’était jusqu’à présent très précis sur les contenus qu’il est nécessaire d’apprendre dans l’entreprise pour pouvoir manifester de la compétence. Nous pensons que cette démarche peut être particulièrement utile pour les pratiques d’intégration des nouveaux embauchés, ou de mutation dans un emploi ou un site différents. Enfin, « les ressources cognitives » qui sont toujours nécessaires à la production de compétences. Pour ce faire, les réponses sont à chercher dans les démarches pédagogiques, c’est-à-dire dans la façon dont les
  • 21. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 8 formés sont amenés à acquérir des connaissances et à les mettre en œuvre. Sur ce point, nous ouvrons des pistes de réflexion en formalisant la problématique pédagogique : en quoi consisterait un « référentiel de formation » correspondant à ces définitions du concept de compétences et du processus d’acquisition lié ? Que vous soyez un professionnel de la fonction RH, un formateur, un étudiant, un concepteur de programmes de formation, un lecteur intéressé par les problématiques liées à la fonction, nous vous proposons d’« entrer » dans cet ouvrage de différentes manières. Par exemple, il vous est possible de débuter par la découverte des différents emplois- métiers décrits (parties 2 et 3) ou bien vous pouvez passer d’un emploi précis avec sa fiche compétences à une réflexion plus pédagogique en vous reportant à la partie 4. La première partie, quant à elle, peut se lire en introduction à une réflexion sur l’organisation de la fonction, mais également après avoir étudié les divers emplois-métiers afin de les mettre en perspective et prendre du recul. Nous souhaitons que ces « entrées à la carte » vous permettent de trouver matière à nourrir vos pratiques professionnelles et vos réflexions sur les métiers et les compétences de la fonction ressources humaines ainsi que les évolutions qui s’y dessinent. Vous trouverez également tout au long de l’ouvrage des encadrés inti- tulés « Comment utiliser… » à usage des DRH, des professionnels et des étudiants qui donnent un mode d’emploi possible : – d’un schéma (organisation systémique de la fonction); – d’une rubrique d’un descriptif d’emploi (chaîne d’activités, fiche compétences, réseau de relations); – des tableaux (de connaissances théoriques ou des qualités liées à l’emploi).
  • 22. PA R T I E 1 La fonction ressources humaines : son évolution, ses métiers UELLE EST aujourd’hui la place de la fonction ressources humai- nes, qui se situe au cœur des contradictions économiques et socia- les tant macro-économiques que micro-économiques ? La première dimension, macro-économique, ne laisse aucun doute sur l’incapacité du système, compte tenu des formes et des temps de travail actuels, à résorber un volant important de chômage, devenu structurel. La deuxième dimension, micro-économique, met en évidence le passage d’une standardisation de produits et de procédés à une personnalisation, à une modularité sous les contraintes de délais-coûts- qualité. Les entreprises sont ainsi conduites à gérer non plus des proces- sus longs mais des lots spécifiques, des projets ponctuels impliquant des capacités d’adaptation et de flexibilité devenues incontournables. Danièle Q
  • 23. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 10 Linhart1 met en évidence les contradictions entre les discours (liés au management participatif), les actions (recherche de consensus, particu- lièrement depuis les années 1980) et les conséquences souvent contra- dictoires (licenciements massifs) liées au passage difficile entre un mode de production et surtout d’organisation taylorien-fordien-fayolien et un mode de management adaptatif dit flexible. Jean-Michel Plane dit, quant à lui : « Les réseaux horizontaux parais- sent être les plus appropriés aujourd’hui pour faire face à la complexifi- cation des performances à atteindre (coût, qualité, délais, flexibilité, variété ou innovation). La coopération est donc envisagée comme une intercompréhension, voire une intersubjectivité, entre les acteurs. On parle de décloisonnement entre les fonctions, de gestion des interac- tions, de logiques de projet ou de communication entre services ! »2. On comprend ainsi que les contextes économiques, sociaux, organi- sationnels vont contribuer à fournir des réponses différenciées (histori- quement et spatialement) quant au rôle et à la place de la fonction. Nous articulerons notre propos en deux parties en abordant, parallèle- ment au champ économique et social, les grands traits de l’évolution historique de la gestion des ressources humaines, pour déboucher sur les discours actuels quant aux besoins en gestion des ressources humaines. Nous montrerons, grâce à un bref historique, que les environnements (théorique, culturel, économique, social, juridique, technologique, orga- nisationnel) ont conditionné l’évolution de la fonction RH. Cette appro- che nous permettra de confirmer notre hypothèse de travail. 1. Linhart D., La modernisation des entreprises, Éd. La Découverte, Paris, 1994. 2. Plane, J.-M. La Gestion des ressources humaines, Economica, 2003.
  • 24. 11 CH A P I T RE 1 La fonction RH au cœur des évolutions socio-économiques A FONCTION RH est-elle tributaire des environnements socio- économiques ? Que nous enseignent les débats actuels ? Une évolution constante des missions et des outils L’histoire de la fonction RH ne se confond pas avec celle des entreprises puisqu’elle concerne principalement les sociétés de plus de deux cents personnes1. Comme le souligne Jean Fombonne, l’histoire de la fonc- tion est liée à l’histoire du management, de ses paradigmes, de ses méthodes. Elle emprunte à la sociologie et à la psychologie (fonctionne- ment des organisations et des groupes, identification des couches sociales, 1. Fombonne J., Pour un historique de la fonction personnel, Paris, Éd. d’Organisation, 1992. L
  • 25. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 12 évolution des mentalités, nature de la subordination des travailleurs, exercice des libertés, de la mobilité, du commandement, motivations…). Elle est tributaire du droit social : des conventions internationales, des lois nationales, des conventions collectives, des accords interprofession- nels, des accords d’entreprise, de la jurisprudence. Le mouvement social et l’action syndicale concernent dans tous les cas la fonction RH, soit directement, soit indirectement. L’histoire des technologies influence les qualifications, les formations, les salaires, les recrutements, les condi- tions de travail. L’histoire économique avec ses cycles, ses mouvements de concentration, les faillites, les restructurations, les échanges se réper- cute sur les niveaux d’emploi et de rémunération. L’histoire de la fonction emprunte ainsi à tous ces environnements sans qu’aucun d’eux ne puisse revendiquer une influence déterministe sur son contenu à un moment donné. Une synthèse sous forme de tableau nous a fait retenir1 quatre gran- des périodes, des prémices à 1945, les Trente Glorieuses, les années de crise et la période actuelle durant lesquelles la fonction RH a subi de profondes transformations (activité dominante, missions, acteurs, métiers, compétences, responsabilités, moyens, outils, structure, noms de la fonction et des acteurs), les politiques sociales menées par les entreprises s’adaptant aux évolutions du macro-environnement (social et idéologique, économique, technologique, politique, juridique). Ainsi la fonction ressources humaines2 a évolué sous la double influence de son environnement économique et social et de l’organisa- tion du travail dans les entreprises. À chaque époque, et pour chaque configuration d’organisation des entreprises3, elle a eu pour mission principale de résoudre les problèmes qui se posaient pour les hommes, salariés des organisations. 1. Inspiré de Peretti J.-M., Gestion des RH, Paris, Vuibert Entreprise, 1998. 2. Pour les lecteurs intéressés par une telle approche de la fonction RH, et en particulier par les enjeux de pouvoir sous-jacents aux questions de la décentralisation de la fonc- tion, lire Godelier E., « La place de la fonction RH au sein de la structure de l’entreprise : un dilemme entre l’efficacité et la reconnaissance » in Ressources Humai- nes, une gestion éclatée, Paris, Economica, 1998. 3. Le terme « entreprise » est entendu ici et dans le reste de l’ouvrage au sens générique. Il serait plus exact de parler « d’organisation » au sens de la psychosociologie des organi- sations, mais ce terme peut entraîner une confusion avec le concept d’organisation de l’entreprise au sens de la structure organisationnelle.
  • 26. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 13 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit Tableau 1.1 – Évolutions de l’environnement macro-économique Périodes Environnement macro-économique Des prémices à 1945 Les Trente Glorieuses, de 1945 à 1975 Les années de crise, de 1975 à 1990 Le passage au 3 e millénaire Environnement social et mouvement des idées Combat contre les excès du libéralisme Triomphe du Front populaire en 1936 Grèves, chômage Charte des syndicalistes en 1940 Rejet des formules de cogestion dès 1960 Grandes grèves pour augmenta- tions de salaires Interrogations sur les inégalités sociales et l’autorité Désétatisation, dérégle- mentation, désinflation à partir des années 80 Discours : l’investisse- ment dans le capital humain est majeur Mouvement « éthique » Généralisation de la « pensée unique », malgré quelques grandes luttes sociales pour préserver les acquis (retraites, santé…) Précarisation Discriminations Stress et individualisme Environnement économique et entreprises Essor du capitalisme industriel et financier Recherche de gains de productivité de la main- d’œuvre directe Forte croissance industrielle Contrôle de gestion, contrôle budgétaire et commercial en développement Concurrence exacerbée Crise de surproduction Chômage massif croissant Plans sociaux à répétition Euro, élargissement de l’Europe Mondialisation, délocalisations, fusions-acquisitions Désindustrialisation Chômage croissant, conjoncture ralentie, crises politiques et économiques dans de nombreuses régions du monde Entreprises réseaux Gisements d’emploi : PME et services Environnement technologique et production Séparation concep- tion/exécution Rationalisation des équi- pements Progression du savoir- faire artisanal Produits standardisés Approfondissement du taylorisme Chaînes de montage, mécanisa- tion, informatisation Diversification limitée des produits Contrôle direct du temps de travail Compromis salariaux Nouvelles technologies (électronique) Nouveaux métiers Opérateurs polyvalents Recomposition des tâches, organisation flexible Production diversifiée en petites séries Technologies de l’information et de la communication (TIC) Qualité et certifications Recomposition des tâches (production, maintenance, contrôle qualité…) Production à la fois de masse et différenciée Environnement politico-légal et droit social Rapport Villermé (sur l’apprentissage) Développement des lois sociales (élections de délégués, congés payés, 40 heures, conventions collectives, comités d’entreprise) Sécurité sociale Droit de grève Retraites Congés payés (1958) Accords de Grenelle (1968) Création ANPE (1966), APEC (1967) Nombreuses lois sociales : SMIC (1970), formation continue (1971), limitation du droit de licenciement (1973) 1983 : année la plus proli- fique de l’histoire du droit du travail : 39 heures, 5 e semaine de congés payés, lois Auroux, contrats de solidarité, retraite à 60 ans… Gouvernement socialiste (1997) et « cohabitation » puis montée du FN et retour de la droite Lois sur les 35 heures Loi sur la GPEC, réforme de la formation professionnelle Revenu minimum d’insertion et couverture maladie universelle, chèque emploi service universel Loi de modernisation sociale (2001) Remise en cause de certains acquis sociaux antérieurs : durée légale du travail, retraites
  • 27. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 14 Tableau 1.2 – Répercussions des évolutions sur la fonction ressources humaines Périodes Environnement macro-économique Des prémices à 1945 Les Trente Glorieuses, de 1945 à 1975 Les années de crise, de 1975 à 1990 Le passage au 3 e millénaire Politique sociale et fonction ressources humaines Politiques d’œuvres sociales Services médicaux et sociaux dans les entreprises Assistance aux personnels et aux familles Création de centres d’appren- tissage Transformation des condi- tions matérielles de travail (sécurité, rendement, confort) Développement de la forma- tion Méthodes d’analyse et d’évaluation du travail Après l’élargissement des tâches des années 1960, enri- chissement des tâches Déclin du taux de syndicalisation (11 % en 1989 contre 20 % en 1981 en France) Travail à la chaîne pour 7 % de la population ouvrière en 1984 En 1989, 62 % de la population active dans les services Informatique et bureautique trans- formant les métiers et le travail Changement des politiques socia- les, modification de la gestion des dossiers RH en liaison avec l’infor- matisation. Prise de conscience par l’entreprise de sa responsabilité par rapport à l’emploi dans un contexte de mondialisation Rigueur salariale et flexibilité Problématique contradictoire entre pré-retraites et allongement de la durée du travail, entre plans sociaux, maladies professionnelles et accroisse- ment de productivité Activité dominante de la fonction RH Avant 1916 : pas de fonction personnel De 1917 à 1935 : émergence d’une fonction autonome et mixte : personnel + services généraux De 1936 à 1946 : besoin de contacts permanents sala- riés/direction Droit du travail Gestion administrative (paye + sanctions) Dialogue social et syndical après la libération Assistance et œuvres sociales 82 % d’entreprises ont une direction du personnel en 1961 qui gère effectifs, embauches et qualifications, réglementation, discipline, administration du personnel Rationalisation des procédu- res, négociations sociales, relations syndicales Après 1960 : motivation, dynamisation, formation, information, organisation de l’entreprise La fonction est devenue centrale Années 1970 à 1980 : trois missions : administration sociale du contrat de travail, gestion des personnes et développement social nécessitant des compétences différentes : négociation, anima- tion, écoute psychologique, analyse sociologique Informatisation de la fonction (paye et administration en 1986 pour 10 % du coût de la fonction) Fonction directement confrontée aux changements des politiques sociales : – gestion des compétences, VAE, fidélisation des « hauts potentiels » – gestion des effectifs et des réorgani- sations : 35 h, plans sociaux, reclas- sements – démarches qualité, démarches sécurité – communication interne et externe – audit social, mesure de l’efficacité et des coûts du service RH – gestion de projets conjoncturels (35 h, retraites, VAE…) – gestion du climat social pour mini- miser les dégradations des condi- tions de travail – « développement durable »
  • 28. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 15 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit Acteurs, métiers, com- pétences, responsabili- tés, moyens, Avant 1916 : fonction exercée par les patrons ou par les contremaîtres De 1917 à 1935 : un respon- sable des questions du personnel (parfois d’anciens militaires) De 1936 à 1946 : appel à des juristes, journaux d’entre- prise, assistance directe au personnel Décentralisation de la fonc- tion dans de grandes entrepri- ses dès 1960 Informatisation Relations humaines au premier rang des préoccupa- tions après 1960 avec la gestion administrative et la formation Mais retour à des préoccupa- tions techniques dans les années 1970 Début des plans sociaux, recherche d’implication du personnel 86 % des entreprises ont une fonc- tion personnel spécifique en 1977 Femmes sous-représentées dans la fonction Début de la « fonction partagée » par : – le responsable RH et la direction générale pour élaborer politique méthodologie et règlement – et l’encadrement pour former ou faire former, apprécier promou- voir, rémunérer Rôle central de conseil à la hiérarchie et aux dirigeants Deux volets de la fonction se dessi- nent : 1) fonction opérationnelle dans la coopération avec la hiérarchie (concep- tion des postes, gestion des carrières, formation) avec mission : obtenir un rendement optimum des RH 2) fonction stratégique : gestion d’environnements complexes, prospective (ce second volet n’est pas présent partout) Appel à des consultants externes à des « coachs »… Outils de gestion Tests pour recrutements Méthodes Centor, Hay, Corbin, d’analyse du travail Appréciation annuelle, plan de formation, bilan social Certification qualité Audit social SIRH (recrutement, gestion de carriè- res, e-learning) Logiciels spécialisés en RH ou inté- grés à la gestion globale (SAP) Internet, Intranet Structure, intitulés de la fonction et des acteurs Service paye, service person- nel Chef de la main-d’œuvre puis chef du personnel Chef des services sociaux Directeur du personnel Directeur du personnel puis directeur des relations du travail, souvent des ingé- nieurs Formations spécifiques (IUT…) dans les années 1970 Chef du service personnel, direc- teur des RH, directeur des affaires sociales dans les grandes entreprises Recours croissant à des consultants Des formations spécifiques RH se développent : DESS, maîtrises… Responsable du développement RH, Responsable du développement des compétences Manager des Ressources Humaines, Directeur ou Responsable des RH Responsable des Relations Sociales, Responsable de la gestion de l’emploi, Responsable paye, Responsable sécu- rité, correspondant RH Emplois externalisés : consultants, coachs, mais aussi paie en cabinet d’expert comptable…
  • 29. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 16 C’est ce que confirment dans une publication récente Jean Nizet et François Pichault1 : « Certains traits de l’environnement retiendront notre attention dans la mesure où ils exercent une influence spécifique sur l’adoption de tel ou tel modèle de gestion des ressources humaines : le marché du travail, la politi- que de réglementation sociale en vigueur, le marché des biens et services concernés, et le contexte culturel. La plupart de ces traits peuvent se référer à la fois au contexte national et au contexte sectoriel dans lesquels se trouve l’organisation considérée ». Il faut souligner que l’évolution de la fonction RH ne concerne pas de façon identique toutes les entreprises. En effet, selon leur organisation, leur activité, leur taille, elles vont développer de manière très inégale les différentes missions de la fonction, contrairement à ce que peut laisser supposer une lecture trop « historique » des tableaux précédents. La constitution de notre échantillon tient compte de ces nouvelles configurations des organisations, ainsi que des nouvelles problémati- ques de l’environnement économique, social et juridique. Les caracté- ristiques de la période récente et actuelle concernent principalement les points suivants : Le chômage a des conséquences en termes de plans sociaux à gérer dans les entreprises. La réduction du temps de travail présente des implications tant socia- les (négociations, rémunérations) que réorganisationnelles. L’évolution démographique (vieillissement de la population) et l’allon- gement des durées de cotisation pour les retraites génèrent une remise en question des équilibres antérieurs. La concurrence résultant de la mondialisation avec ses fusions, rachats, délocalisations, automatisation, réduction des coûts, normes qualité… bouleverse la gestion des entreprises et donc la gestion du personnel : réduction d’effectifs, reconversions, mobilité géographique ou professionnelle, réduction des coûts du service RH, etc. L’expansion du secteur des services (aux entreprises et aux person- nes), avec ses potentialités de créations d’emplois génère de nouvelles 1. « L’éclatement des modèles en GRH, l’explication par la contingence, son intérêt et ses limites », in Ressources Humaines, op. cit.
  • 30. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 17 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit compétences : accueil, qualité, disponibilité, réactivité, orientation client… Cette tendance induit l’émergence de nouveaux métiers, de nouvelles qualifications et de nouvelles questions posées à la gestion des ressources humaines mais elle entraîne également des déqualifications et la pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs (hôtellerie, santé, bâtiment…). Enfin, pour ce qui concerne le secteur public, il semblait impensable, dans les années 1980, de mettre en place une gestion des ressources humaines, tant les rigidités liées au statut de la fonction publique ou territoriale paraissaient freiner toute initiative (recrutements normalisés par concours, avancement et salaires fixés dès l’entrée dans le corps…). Or, depuis quelques années, le contexte économique ambiant de recher- che de la qualité, l’évolution de la demande dans tous les secteurs, l’Europe de Maastricht et ses critères de convergence imposent aux États, et donc aux administrations, aux collectivités et aux services publics, une politique de réduction des coûts. La mise en concurrence de certains secteurs jusqu’ici protégés (télécommunications, transports, élec- tricité, etc.), ont aussi contribué fortement à l’émergence d’une politi- que de gestion des compétences dans toutes les collectivités et organismes publics : mairies, rectorats, conseils régionaux ou généraux, etc. Des missions nouvelles se sont développées dans le cadre de la fonction publi- que, avec des études sur les métiers, des enquêtes sur le climat social, des outils de communication interne, des plans de gestion prévisionnelle, créant ainsi de véritables gisements d’emplois en ressources humaines1. L’échantillon2 comprend donc des salariés et leurs supérieurs hiérarchi- ques ayant eu à gérer ces divers types de problèmes. Il tient compte : – du secteur d’activité des entreprises (industries de production, secteur des services, collectivités publiques); 1. « D’ici 2010, les trois fonctions publiques (Éducation nationale, hospitalière, territoriale) devront faire face au départ de 45 % de leurs agents (près de deux millions). L’Éduca- tion nationale est la plus touchée avec 37 000 enseignants qui partiront à la retraite tous les ans. Pour faire face, le ministère de la fonction publique table sur trois outils : élaboration de plans de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compé- tences, diversification des modes de recrutement et développement de la mobilité des fonctionnaires. La fonction publique doit tenir compte de la concurrence des employeurs privés, confrontés à la même nécessité de renouvellement de leurs compétences et aux contraintes démographiques. », in Entreprise et Carrières, no 621, mai 2002. 2. Voir l’annexe : Méthode ETED : les différentes étapes.
  • 31. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 18 – de la taille des entreprises; en particulier il est apparu nécessaire de ne pas limiter l’échantillon aux entreprises dans lesquelles un service RH est toujours clairement identifié, et donc d’intégrer les PME; – des nouvelles problématiques, économiques, sociales et juridiques. Problématiques et débats actuels Sans prétendre à une présentation exhaustive des débats actuels, il est apparu quelques grandes constantes, à la fois chez les auteurs spécialis- tes des questions RH ainsi que pour les professionnels de la fonction que nous avons rencontrés. Une réorganisation de la fonction : décentralisation et externalisation La décentralisation de la fonction, c’est-à-dire le partage des tâches avec le management opérationnel n’est pas récent et est pratiquement achevé, sauf dans les organisations de la fonction publique où la gestion des ressources humaines est partagée avec les organisations syndicales et non avec les managers de terrain, même si des tentatives vont dans ce sens1. La généralisation des entretiens annuels, renforcée encore par les mesures concernant le DIF2 et les entretiens de professionnalisation ont de fait transféré à l’encadrement l’évaluation des compétences ainsi que les décisions qui en découlent en matière de formation ou de gestion des carrières. Le service RH, parallèlement à ce transfert, s’est doté de systèmes d’information de plus en plus performants et intégrant des modules auparavant dispersés. De ce fait l’offre de services informati- que RH s’est développée, avec parallèlement l’apparition dans les orga- nigrammes d’un « chargé de SIRH », ou d’un « responsable des systèmes 1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH, sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a concerné 470 personnes sur la période 2005-2007. 2. Droit individuel à la formation instauré en 2004 par le législateur.
  • 32. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 19 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit d’information RH », comme nous avions pu en voir la préfiguration lors de notre première étude en 2000. Déjà en 1992, M. Thévenet1 proposait « une liste indicative des activités et missions de GRH qui sont susceptibles d’être réalisées par les responsables d’équipes. Les managers opérationnels peuvent être amenés à participer à des activités de recrutement (phase de spécification des besoins mais aussi de sélection), d’appréciation des perfor- mances, de formation du personnel et d’analyse des besoins individuels, de rémunération dans des démarches d’individualisation, d’analyse de poste ou d’emploi… ». Cette décentralisation de la fonction s’est accompagnée d’une recher- che de productivité de l’ensemble des services fonctionnels, ce qui a amené des réductions d’effectifs dans les services RH. Aujourd’hui, avec la généralisation des SIRH d’une part, et l’externalisation d’une partie des tâches, on arrive au bout de la réorganisation des services et on commence à constater les limites de cette politique. En effet, dans de nombreuses entreprises, les référentiels emplois et compétences n’ont plus été actualisés faute d’effectifs suffisants. Les gros chantiers d’élabo- ration de référentiels semblaient marquer le pas en 20072 au profit de chantiers plus ciblés sur certains emplois au cœur du métier de l’entreprise. On s’est recentré sur l’exploitation des entretiens annuels d’évaluation, pour la formation d’une part, et les évolutions de carrières d’autre part. Il est cependant probable que la loi sur la négociation à propos de la GPEC va au minimum obliger les entreprises à une remise à jour de leurs référentiels emplois et compétences, et de nouveaux chantiers vont s’ouvrir. Comme nous l’avons déjà évoqué à propos des services informatiques et des SIRH, l’externalisation de la fonction RH a créé un marché externe d’offres de prestation RH. Certaines comme les cabinets de recrutement, 1. Cité par Alain Bernard, Dominique Besson et Slimane Haddaj : « La compétence écla- tée dans les effets d’organisation. Le dilemme américain : développer ou recruter les compétences ? », in Ressources Humaines, une gestion éclatée, op. cit. 2. Ceci est peut-être dû aux diminutions d’effectifs dans les services RH qui ont rendu la maintenance de ces outils trop lourde ? Cette absence risque de poser rapidement problème si l’on veut proposer des évolutions de carrière pertinentes à l’ensemble des salariés.
  • 33. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 20 sont en perte sensible de vitesse à mesure que les sites de recrutement par l’Internet se développent et que les agences d’intérim doublent leur offre de service. D’une fonction de pré-recrutement, les contrats d’inté- rim se transforment en période d’essai à durée modulable. D’autres se développent tels que la paye de plus en plus externalisée soit à des cabinets d’expertise comptable voire même à des prestataires qui délocalisent en Inde ou dans d’autres pays à faible coût de main- d’œuvre. Les cabinets de Conseil en Ressources Humaines ont eu leur heure de gloire avec la mise en place des 35 heures et se réorientent aujourd’hui soit vers la mise en place de démarches compétences, soit vers des dossiers encore à développer concernant la gestion des seniors ou bien l’accompagnement des fusions et des restructurations. Les entreprises de services informatiques RH se sont multipliées ces derniè- res années, et la concurrence est maintenant rude sur ce marché. Les entreprises clientes leur reprochent souvent d’avoir des compétences en RH insuffisantes pour la compréhension en profondeur de leurs problématiques et privilégient les prestataires capables de concevoir des produits sur mesure, intégrant des logiciels déjà en place. Quant aux prestataires de formation, ils se trouvent sur un marché en recul, les entreprises ayant réintégré une partie de la formation en interne ou bien diminué leurs dépenses, et ils ont dû se lancer dans des démarches de certification qualité de façon à se démarquer les uns des autres. Enfin, les cabinets et avocats spécialisés en droit du travail sont de plus en plus sollicités pour la rédaction des nouveaux contrats de travail mis en place par le législateur, pour la gestion des plans de sauvegarde de l’emploi, pour préparer ou accompagner les restructurations ou rapprochements d’entreprises. La tendance apparue dans les grandes entreprises au début des années 2000 semble se confirmer. On voit la fonction RH se répartir nette- ment en deux pôles : – d’une part les fonctions et métiers opérationnels, caractérisés par des « correspondants RH » d’usines ou des Responsables Ressources Humaines (RRH) de sites, avec leurs assistants opérationnels; – et d’autre part une fonction prospective, chargée de réfléchir à moyen ou long terme, sur les compétences ou la gestion des carrières, mais en relation étroite avec la stratégie globale de l’entreprise voire
  • 34. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 21 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit travailler sur différentes hypothèses. On parle alors de « Dévelop- pement RH ». Il s’agit, par exemple, de réfléchir aux conséquences à 10 ans de la politique de la promotion interne vers les fonctions de cadre de façon à éviter d’avoir un jour des cadres quinquagénaires non mobiles qui entreront en conflit de génération avec de jeunes ingénieurs nouvellement embauchés… C’est également réfléchir aux conséquences d’une fusion ou acquisition, ou encore à la gestion des âges dans le cadre du vieillissement prévisible de la population salariée. La gestion des compétences En « recentrant son métier », la fonction RH oriente de plus en plus sa politique de gestion sur des aspects qualitatifs des ressources humaines. En particulier les compétences – celles détenues par les salariés, celles associées aux métiers existants et celles associées à leurs évolutions – deviennent une donne stratégique. Les coordonner et les anticiper devient une nécessité pour introduire plus de flexibilité et d’adaptabilité afin de continuer à produire autrement. Nous pouvons dire, avec Anne Dietrich et Didier Cazal, que « dans les entreprises observées, la gestion des compétences déborde le strict domaine de la gestion des ressources humaines pour devenir un atout stratégique. Elle est l’instrument d’une dynamique de changement qui implique plus globalement le management de l’entreprise »1. C’est sans doute la raison qui explique que nous sommes passés, en six ans (de 1999 à 2005) de l’observation de l’émergence d’un emploi-métier qui aurait pu être intitulé « Responsable de gestion des compétences », mais qui se trouvait rarement formulé explicitement ainsi dans les offres d’emploi, à un emploi qui aujourd’hui s’intitule bien plus souvent : « Chargé (ou Responsable) du développement RH » ou « Responsable développement du management ». Les DRH sont souvent appelés aujourd’hui « Directeur du développement des ressources humaines » ou « Manager des ressources humaines ». Il s’agit en tout cas d’une 1. « Gestion des compétences, savoirs tacites et production de connaissances », Dietrich A. et Cazal D., in Gestion des compétences et Knowledge Management, Éditions Liaisons, Paris, 2002.
  • 35. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 22 préoccupation majeure dans les entreprises, et l’arrivée des seniors dans les effectifs du fait des réformes sur les retraites, associée à la pénurie programmée de main-d’œuvre qualifiée dans certains secteurs ou métiers va dans les prochaines années accentuer cet intérêt.1 Alors qu’en 2006 et 2007, les entreprises s’étaient centrées sur la gestion des hauts poten- tiels, ou des compétences-clés, la nécessité d’affiner la gestion des carriè- res pour fidéliser les salariés et pour gérer au mieux les départs en retraite et les réorganisations qui s’ensuivront, vont réactiver la mise à jour et le suivi des compétences. Cette tendance ne peut qu’être renfor- cée par la généralisation des certifications, et l’obligation de négocier sur la GPEC à partir de 2008. « Les entreprises devront faire un diagnostic précis de leur gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des seniors. (…) La pros- pective des métiers par famille professionnelle a, dans certaines branches et/ou entreprises, obtenu des résultats intéressants. Il est possible d’inté- grer la dimension “âge” dans la gestion anticipatrice des emplois et des compétences. Cette phase de diagnostic, de veille et d’anticipation concerne l’entreprise – direction, salariés, partenaires sociaux – et son environnement. »2 Impact des nouvelles normes ISO et problématique RH L’ancienne version des normes ISO 9000 (version 1994)3 tenait peu compte de la dimension ressources humaines dans l’entreprise. Le contexte économique et social du début des années 90 dans lequel s’est inscrite l’élaboration de cette norme permet de comprendre la faible place consacrée aux RH. En effet, beaucoup d’entreprises étaient en proie à des difficultés économiques, à des plans sociaux à répétition. La 1. En juillet 2003, on trouvait en librairie des dizaines de titres traitant de ce thème : Management des compétences, Le management des compétences dans les entreprises européen- nes, Mesure des compétences, Gestion des compétences et Knowledge Management, Objectif compétences, Valoriser les compétences : un levier pour l’entreprise, Construire les compétences individuelles et collectives, Le management des connaissances et compétences en pratique, etc. 2. Marbot L. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Paris, Édition Village Mondial, 2004. 3. « 19 000 entreprises certifiées ISO 9000 en France en 2000 pour 3 000 en 1994 », Dossier certifications, Qualité références, juillet 2000.
  • 36. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 23 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit version 94 a surtout focalisé son attention sur la mise en place de procé- dures (assurance de la reproductibilité) que des hommes étaient chargés d’appliquer (travail prescrit). À tel point que la fonction RH s’est jusqu’à présent sentie peu concernée par la certification. À l’inverse, la version 2000 des normes ISO est élaborée dans une période où des compétences viennent à manquer, où le management prend conscience (tardivement) que le facteur humain est décisif pour la bonne marche de l’entreprise et la qualité des produits et des services. Cette version, qui prévoit explicitement un chapitre « management des ressources » et « ressources humaines », replace donc les hommes au centre des processus qualité. « La norme ISO 9000 version 2000 ouvre des perspectives dynami- ques en matière de management des ressources humaines à travers les exigences qu’elle prévoit. La mise en œuvre de ces exigences est l’occa- sion pour l’entreprise de faire du management des ressources humaines un processus fortement contributeur à l’obtention des objectifs qualité, voire le processus capital. »1 – En termes de management des ressources, la nouvelle norme précise : l’organisme doit déterminer et fournir les ressources nécessaires pour mettre en œuvre et entretenir le système de management de la qualité. Il doit améliorer en permanence son efficacité pour accroître la satisfaction des clients en respectant leurs exigences. – En termes de ressources humaines : le personnel effectuant des tâches ayant une incidence sur la qualité doit être compétent sur la base de la formation initiale et professionnelle, du savoir-faire et de l’expérience. L’organisme doit : – déterminer les compétences nécessaires pour le personnel effec- tuant un travail ayant une incidence sur la qualité du produit; – pourvoir à la formation ou entreprendre d’autres actions pour satisfaire ces besoins; – s’assurer que les membres de son personnel ont conscience de la pertinence et de l’importance de leurs activités et de la manière dont ils contribuent à la réalisation des objectifs qualité; 1. Propos de Bernard Seno, directeur qualité à la CEGOS dans « Chroniques des nouvel- les normes ISO 9000 », Qualité en mouvement, no 48, avril-mai 2001.
  • 37. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 24 – conserver les enregistrements appropriés concernant la forma- tion initiale et professionnelle, le savoir-faire et l’expérience. « Jusque-là, les directions des ressources humaines étaient peu concer- nées par une démarche qualité. Désormais, elles vont devoir répondre à des audits sur des points précis. Et les entreprises vont devoir se structurer et se doter de véritables moyens de gestion des ressources humaines. »1 Pour répondre à ces exigences, l’entreprise sera amenée à instaurer une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Impossible donc de mettre en place une procédure de recrutement sans avoir au préalable travaillé sur la définition de fonction, sur l’évolution des métiers, sans réfléchir à une gestion des compétences à long terme (grâce à l’entretien annuel d’évaluation). Par ailleurs, la traçabilité des dossiers individuels devra être parfaitement tenue à jour. Enfin, la nouvelle norme ISO met l’accent sur la motivation du personnel et ainsi les systèmes de rémunération pour agir sur la motivation et éviter de voir fuir les meilleures compétences vers d’autres employeurs. De plus, il apparaît que le responsable des ressources humaines devra entre- prendre un travail d’information et de communication à l’égard du comité d’entreprise (imposé par la loi) pour les questions d’organisation du travail, à l’égard du CHSCT pour les infrastructures. Cependant, si l’implication de la fonction RH dans la démarche qualité est désormais reconnue ainsi que les principaux outils à mettre en place, l’incertitude demeure quant à l’interprétation des organismes certificateurs. À ce titre, Patrick Renaud, responsable du département auditeurs salariés de l’AFAQ précise : « …nous allons nous attacher à vérifier ce que l’entreprise a mis en place pour gérer ses compétences. Nous allons aussi contrôler que l’entreprise met en œuvre de véritables processus, par exemple en matière de formation afin de garantir les niveaux de compétences, ou encore en matière de recrutement, pour chercher à l’extérieur les compétences qui pourraient faire défaut en interne. Nous serons enfin attentifs aux outils qui s’inscriront dans ce processus de gestion des emplois, comme les matrices de compétences ou encore des matrices de polyvalence. Sans oublier la sensibilisation de l’ensemble du management à la qualité mais aussi à la “voix” du client 1. Propos de Guy Raynaud, Directeur Qualité et Ressources Humaines de la société de construction mécanique Panhard dans « Chroniques des nouvelles normes ISO 9000 », Qualité en mouvement, no 48, avril-mai 2001.
  • 38. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 25 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit dans l’entreprise, qui me semblent être des éléments essentiels à valider lors des audits de certification »1. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise Si les grandes entreprises transnationales sont devenues de plus en plus puissantes, si l’actionnaire est progressivement devenu l’acteur central du système économique, des critiques ont émergé dès les années 1980 aux États-Unis pour mettre en cause la création de valeur pour le seul actionnaire et la recherche du profit immédiat. La théorie des parties prenantes (stakeholder theory) développe l’idée selon laquelle capita- lisme et moralité sont compatibles. De plus, les entreprises socialement responsables, (satisfaisant aux obligations juridiques applicables, mais allant au-delà en investissant davantage dans le capital humain, l’envi- ronnement et les relations avec les parties prenantes) qui accordent de l’intérêt à tous les acteurs concernés (directement, les salariés, les clients, les fournisseurs, et indirectement, les riverains, les pouvoirs publics, les consommateurs, les générations futures…) sont jugées plus efficaces. La Responsabilité Sociale d’Entreprise (RSE) s’est développée dans les années 1990 dans le contexte de mondialisation et de déréglementa- tion de l’activité économique. « On peut assimiler ce mouvement à une remise en cause du dogme de la création de valeur pour l’actionnaire. On passe, avec cette approche d’un jeu à deux acteurs à un jeu beau- coup plus complexe dans lequel doivent être présents ou représentés tous les acteurs concernés par les agissements et la politique de la firme »2. Pour Michel Capron3 l’acronyme RSE concerne à la fois les aspects sociaux (qui relèvent des relations entre les personnes au sein d’une collectivité) et sociétaux (relatifs à la société dans son ensemble). Il propose un schéma permettant d’établir un lien entre la RSE et la triple performance, économique, sociale et environnementale. 1. « Chroniques des nouvelles normes ISO 9000 », Qualité en mouvement, no 48, avril- mai 2001. 2. Cadin L., Guérin F., Pigeyre F, Gestion des Ressources Humaines, Paris, Dunod (3e édition), 2007. 3. Capron M., Quairel F., Mythes et réalités de l’entreprise responsable : Acteurs, enjeux, stratégies, Paris, La découverte, 2004.
  • 39. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 26 Progressivement, des critiques et des contre-pouvoirs se sont déve- loppés en réaction à des abus (licenciements boursiers, catastrophes écologiques, travail des enfants, souffrance au travail). Les entreprises se trouvent ainsi confrontées en externe et en interne à des acteurs à la fois différents et ayant des intérêts contradictoires, qui se préoccupent de leurs activités et de leurs répercussions, qui exercent des pressions ou leur demandent des comptes : syndicats, associations de consomma- teurs, fournisseurs, organisations non gouvernementales, agences de nota- tion, investisseurs responsables, pouvoirs publics, médias… La fonction RH se trouve au cœur de ces nouvelles problématiques complexes et de ces nouveaux paradoxes. Dans cette optique, la mesure de la performance ne s’effectue plus sur des critères essentiellement économiques et financiers mais intègre des indicateurs sociaux, socié- taux et environnementaux. Le souci d’améliorer l’image sociale et socié- tale de leur entreprise est largement partagé par les DRH sous le vocable « développement durable » ou RSE qui, traduit dans le domaine RH une attention accrue envers les handicapés, l’égalité hommes/ femmes, la diversité culturelle et l’intégration, l’embauche des jeunes... Cette attention est cependant largement dopée par diverses obligations léga- les1. Mais il y a encore loin de l’intention à l’action concrète… Et les nombreux rapports et enquêtes dénonçant la dégradation des condi- 1. L’égalité salariale entre les deux sexes date de mars 2006 et la pression va être renforcée en 2008. Environnemental Durable Viable Vivable Équitable Économique Social
  • 40. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 27 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit tions de travail ou la souffrance au travail montrent que de nombreux progrès sont à accomplir.1 Ces dernières années, les suicides sur le lieu de travail se sont multi- pliés, obligeant les entreprises à prendre en compte un peu mieux les « risques psychosociaux ». Cependant, direction et syndicats ne sont pas à l’aise sur ce sujet. Bien qu’ils dénoncent régulièrement la pression croissante qui s’exerce sur les salariés grâce à des enquêtes ou des « observatoires du stress », les syndicats n’osent pas exploiter à chaud les cas de suicides. Quant aux dirigeants, ils préfèrent mettre en place une gestion individuelle de la question, (accompagnement psychologique personnalisé, numéro vert ou hotline…) que d’accepter d’ouvrir la boîte de Pandore en reconnaissant un lien entre ces suicides et le travail, car alors ils devraient accepter de s’interroger sur leur organisation. Les médecins et inspecteurs du travail constatent de plus en plus de violences verbales, d’insultes proférées en public, d’incivilités. Plusieurs raisons sont avancées : la loi du silence (par crainte de perdre son emploi, ou pour le manager la peur de se voir reproché de ne pas savoir tenir son équipe); le manque de temps des managers de proximité -eux- mêmes stressés- pour jouer leur rôle d’écoute et de médiateurs; les moments conviviaux pendant lesquels l’équipe se soudait ont disparu (pauses, machine à café); les services RH enfin, qui « ne savent plus faire face à des situations conflictuelles et se cantonnent à une gestion disciplinaire »2. Les symptômes à surveiller sont les réactions de défense individuelle (absentéisme, violences faites à des biens) ainsi que les mouvements de grève suivis massivement alors que le mot d’ordre est flou, ou bien qui débordent les consignes des autorités syndicales. L’image sociale et sociétale sera un élément déterminant en termes d’attractivité des entreprises envers les hauts potentiels dans les années 1. Voir la couverture de Liaisons Sociales, no 86 de Novembre 2007 : « Insultes, coups, suicides. Violences au travail ». Voir également le no 182 de Mai 2007 de la revue Sciences Humaines : « Conflits ordi- naires en famille, au travail, entre amis », l’article de Jean François Dortier : « les conflits au travail ». Voir également des enquêtes menées par la CFDT. 2. Interview de Yves Grasset, animateur de Violence, Travail, Environnement, à St- Étienne.
  • 41. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 28 à venir, et les DRH semblent avoir réussi à se faire entendre des direc- tions générales du moins dans les grandes entreprises. De ce fait, la formation des managers opérationnels, qui avait été abandonnée quel- que peu ces vingt dernières années, semble refleurir, avec des cycles de deux à huit jours, intitulés souvent « initiation à la gestion des ressour- ces humaines », ou « professionnalisation des managers ». La question des retraites et l’emploi des seniors Le débat sur l’âge de départ en retraite, qui s’est soldé en juillet 2003 par l’adoption d’un projet de loi, relayé fin 2007 par la remise à plat de certains régimes spéciaux, ainsi que les nouvelles négociations prévues en 2008 pour passer à 41 ans de cotisations d’ici 2012 pour tous les régimes ne supprime pas pour autant les nombreuses contradictions auxquelles les entreprises, les salariés et donc les services des ressources humaines sont confrontés. En effet, alors que nous sortons d’une période de vingt années pendant lesquelles l’âge du départ en retraite s’est stabilisé en moyenne autour de 57 ans, il s’agit maintenant de faire rester tous les salariés jusqu’à 60, voire 65 ans. Cette question représente un défi majeur, auquel les DRH ne se sont pas encore tous attelés tellement la question est complexe. Elle se heurte à des stéréotypes bien ancrés tels que la moindre productivité, ou la moindre résistance des seniors en occultant les qualités ou les compé- tences qui leur sont spécifiques. Et un consensus se dégage, chez tous les acteurs pour résister face à cette évolution.1 Face au vieillissement de la population, aux difficultés annoncées du financement des retraites, face à la pénurie de main-d’œuvre à venir du fait de la courbe démographique, l’enjeu pour les entreprises, pour les DRH mais plus largement pour la société, pour le politique et les organisa- tions syndicales, est de résoudre la contradiction suivante : comment réorganiser le travail pour les seniors, et le « faire passer » dans l’opinion 1. « les pratiques évoluent encore trop peu en raison de la persistance des discriminations, des préretraites et des dispenses de recherche d’emploi. On n’observe pas de changement notable des comportements des seniors et des employeurs dans le sens d’un allongement de l’activité ». COR (conseil d’orientation des retraites) compte-rendu de la séance du 30 mai 2007.
  • 42. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 29 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit alors que ni les entreprises ni les salariés (seniors ou pas) n’ont réelle- ment envie de rester dans l’emploi après 60 ans voire après 55 ans ? En effet, les problèmes soulevés par cette question sont nombreux : depuis la gestion des rémunérations (les salariés âgés coûtent cher…), en passant par des questions techniques telles que la réorganisation des postes entraînant la redistribution du travail, ou encore l’introduction de dispositifs d’épargne retraite dans les rémunérations et donc dans les négociations, en continuant par la gestion des carrières et la formation… Les directions des ressources humaines vont ainsi être confrontées à plusieurs questions : – Comment organiser le travail afin d’utiliser au mieux les compé- tences des seniors ? Rythme allégé ? Activités nouvelles ? Place au sein des services ? – Comment motiver des salariés qui avaient espéré partir à la retraite à 60 ans (voire avant) et qui vont devoir rester au travail dans un contexte social où les jeunes retraités sont encore le modèle cultu- rel dominant ? – Comment assurer une bonne coexistence des différentes généra- tions et modifier la politique de promotion sans pénaliser ou démotiver les plus jeunes ? – Comment maîtriser la masse salariale si le pourcentage des seniors augmente, ou alors quels salaires pour les seniors ? – Comment faire changer les représentations sur les compétences des salariés âgés, à la fois de l’encadrement mais également des sala- riés âgés eux-mêmes ainsi que de leur entourage ? Les services RH ont des positions disparates sur cette question. Éleo- nore Marbot et Jean Marie Peretti ont étudié de nombreux accords d’entreprises signés ces dernières années, par exemple dans la grande distribution : « L’accord signé le 15 janvier 2004 sur la valorisation de l’expérience, la gestion de secondes carrières et la mise à la retraite à partir de 60 ans » dans la grande distribution est particulièrement intéressant. Les raisons pour lesquelles les plus de 50 ans nécessitent une attention particulière sont précisées dans l’accord : – leurs aînés ont bénéficié de pré-retraites…;
  • 43. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 30 – ils ont eu un début d’activité plus tardif et n’auront pas acquis à 60 ans les trimestres suffisants; – les progressions de carrière sont plus faibles à partir de 50 ans; – les plans de formation ne sont pas adaptés à des personnes qui maîtrisent leur métier »1. Diverses pistes sont explorées dans les accords signés à Arcelor/ Mittal, à PSA, dans les Caisses d’Épargne, ou à la Caisse des Dépôts et Consignations : un passage à temps partiel ou un taux d’activité dégres- sif, le tutorat de jeunes embauchés, un réaménagement des postes, la conception de nouvelles missions transversales intégrant des tâches touchant à l’administratif, à la qualité et à la sécurité; des points carrière à 45 ans. Cependant l’analyse de Nicolas Rolland sur les seniors en tant que variable stratégique dans la capitalisation et la transmission des connais- sances, est encore loin d’être partagée2. « A la différence de nombreuses ressources, la connaissance possède comme caractéristique de ne pas s’user au fil du temps, si tant est qu’on l’utilise judicieusement. De plus, les expériences et les apprentissages divers viennent se greffer à cette connaissance pour l’améliorer, faisant par cela croître sa valeur absolue. Au regard de cette approche, l’actif vieillissant, de par ses divers appren- tissages et ses multiples expériences, aurait plutôt tendance, à l’image du bon vin, à faire croître sa valeur au fil des années. La gestion de ces personnes devient un enjeu stratégique pour les entreprises. (…) elles doivent instaurer un système managerial leur assurant une capitalisa- tion efficiente de leurs connaissances ».3 Dominique Thierry4, de Développement et Emploi, dit que « les entre- prises devront apprendre à gérer des âges différents, avec des attentes différentes. » Il leur faudra repenser la mobilité, la formation profes- 1. Marbot E. et Peretti JM., Les seniors dans l’entreprise, Éditions Le Village Mondial, 2004. 2. Sur 45 étudiants en Master 2 RH en 2007/2008 (à Strasbourg et Reims), seulement 2 ont une mission en relation avec la problématique des seniors… 3. Rolland N., Management des connaissances et vieillissement de la population active, in Perennité au travail. Âge, bouleversements et performance, sous la direction de Florian Sala, Lyvie Guéret-Talon, Éditions Chronique sociale, Lyon, 2006. 4. « Passer d’une gestion par les âges à une gestion des âges », de Thierry D., in Entreprises et Carrières, no 615, avril 2002.
  • 44. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 31 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit sionnelle, transformer les conditions de travail, aménager le temps de travail en fonction des âges, et enfin reconstruire une identité au travail spécifique pour ces tranches d’âge, conciliant activité professionnelle et extra-professionnelle. Le développement de la gestion des RH dans les différentes fonctions publiques Les collectivités territoriales (villes, départements, régions) se sont dotées depuis quelques années d’outils de GPEC1 permettant de clari- fier les emplois et compétences existants. En effet elles ont eu à recruter massivement du fait des transferts de compétences liées à la décentrali- sation2, et elles doivent également anticiper des départs à la retraite3 qui vont engendrer d’une part des recrutements qui s’annoncent difficiles dans un contexte de pénurie annoncée de certaines compétences, d’autre part des réorganisations avec des opportunités accrues d’évolu- tions de carrières. De véritables démarches GPEC se sont mises en place dans de très nombreuses collectivités, et des cadres RH ont été recrutés en tant que contractuels. En effet le statut de la fonction publique territoriale permet d’intégrer des spécialistes de façon plus souple que dans la fonc- tion publique d’État, en particulier dans des fonctions supports telles que les finances, les achats, la gestion des ressources humaines ou les services techniques. Pour faciliter ces recrutements sur titres certaines collectivités pour attirer des profils intéressants offrent des stages longs rémunérés, des bourses4 et sont présents sur des forums de recrutement. Les entretiens d’évaluation, les entretiens professionnels avec l’exten- sion du DIF et de la VAE, font désormais partie des pratiques des 1. Le CNFPT (centre national de la fonction publique territoriale) a élaboré le « réper- toire des métiers territoriaux » qui décrit 253 métiers ainsi qu‘un « dictionnaire des compétences » qui servent de base de travail aux collectivités qui veulent décrire leurs propres emplois. 2. Les effectifs de la fonction publique territoriale ont crû de 43% entre 1986 et 2006. 3. 30% de fonctionnaires de la fonction publique territoriale vont partir d’ici 2012, et parmi eux, 50% de cadres A. 4. Le Conseil Général de Moselle, proche du Luxembourg aux salaires attractifs, offre des bourses de 1000 euros par mois à des élèves assistantes sociales et puéricultrices.
  • 45. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 32 collectivités. La difficulté reste cependant la culture de la fonction publique avec le poids des statuts, des concours, et le rôle traditionnel des syndicats dans la gestion des personnels. Pour faire évoluer cette culture, plusieurs collectivités ont mis en place des formations intégrant la GRH à destination des cadres opérationnels1. En effet, l’enjeu des prochaines années va être le développement de la mobilité interne, qui devra être basée sur les compétences pour atteindre les objectifs politi- ques de réduction d’effectifs2 tout en maintenant la qualité des services rendus aux usagers. Cette question de la modernisation de la fonction publique n’est pas spécifique à la France.3 Pour ce qui concerne la fonction publique hospitalière, elle doit déjà faire face à la pénurie de main d’œuvre qualifiée (médecins, infir- mières), à une incapacité chronique à gérer sa masse salariale avec des millions d’heures supplémentaires en retard de paiement, tout en subis- sant des contraintes de service public incontournables : ouverture 365 jours par an et 24 h/24, des activités fluctuantes et non prévisibles par essence. Les dysfonctionnements se rendent visibles actuellement par des revendications catégorielles tournantes (grève des médecins urgentistes en cette fin d’année 2007). Mais il faudra bien repenser globalement la gestion des ressources humaines dans une institution où les compétences humaines sont le cœur même de l’activité. C’est un énorme chantier à venir. Enfin, la fonction publique d’État. Un répertoire interministériel des métiers de l’État (RIME) est en cours d’élaboration. Il a établi 230 « emplois-référence » répartis dans 23 « domaines fonctionnels ». Mais sur le terrain, les DRH qui ont été nommés un peu partout dans les rectorats, les inspections académiques, les casernes, les services minis- tériels… n’arrivent pas à faire changer des règles statutaires très contrai- 1. Au Conseil Général de Moselle, la GPEC est systématiquement expliquée aux cadres opérationnels lors d’un stage de sensibilisation aux RH de 2 jours 1/2. La ville du Havre forme tous ses encadrants (4 niveaux hiérarchiques) au management et aux RH, sur une durée de 7 jours. Cette action s’intitule « les ateliers du management » et a concerné 470 personnes sur la période 2005-2007. 2. Non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, comme l’a promis Nicolas Sarkozy président. 3. Voir l’ouvrage collectif, sous la direction de Louise Lemire, Denis Proulx et Luc Cooremans, Modernisation de l’État et gestion des ressources humaines, Éditions Université du Québec et Haute École Francisco Ferrer, Belgique, 2005.
  • 46. LA FONCTION RH AU CŒUR DES ÉVOLUTIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES 33 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit gnantes, et défendues âprement par les syndicats. La culture égalitariste privilégie les promotions à l’ancienneté alors que le pouvoir politique voudrait introduire une dose de rémunération au mérite… La forma- tion, initiale et continue, est également contestée par les agents de l’État car pas suffisamment adaptée aux besoins du terrain. Enfin, les politi- ques ressources humaines dans la fonction publique d’État sont menées par des hauts fonctionnaires généralistes, rompus à la négociation avec les syndicats et connaissant bien les textes, mais ils ne sont générale- ment pas des spécialistes RH. Néanmoins, la modernisation de l’État, avec des enjeux forts de réduction des coûts, entraînera nécessairement des réformes dans la gestion de ses agents. A quelle échéance, et avec quelles méthodes et quels moyens ? La gestion des RH dans les turbulences de la mondialisation Chaque jour l’actualité nous informe de cas d’entreprises dans la tour- mente, obligées de s’adapter à la mondialisation, aux décisions de dirigeants ou actionnaires de racheter un concurrent, de délocaliser, de fusion- ner… Chaque fois, des hommes et des femmes salariés sont concernés. Le rachat ne se solde pas toujours par une fermeture ni même des suppressions d’emplois. En effet, les acheteurs peuvent relancer l’acti- vité et redonner une dynamique à l’entreprise. Néanmoins cela n’est pas sans une nécessaire adaptation des salariés à la nouvelle culture, à la nouvelle organisation. A ce moment là, le service RH doit être très présent pour communiquer sur les projets, accompagner les change- ments par de la formation, un suivi au plus près des entretiens annuels. Mais ces turbulences peuvent malheureusement entraîner ce qu’on appelle pudiquement aujourd’hui un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi). Les DRH sont alors fortement sollicités à innover… et para- doxalement, c’est à cette occasion que les représentants du personnel retrouvent leur légitimité maximale, pour négocier, accompagner, inven- ter les mesures d’un plan social1. Les DRH doivent également travailler avec des partenaires publics dans la recherche de solutions : inspection 1. En Grande Bretagne, des délégués syndicaux chargés spécifiquement de la formation sont nommés par les syndicats (12 000 en 2005). Leur rôle est d’encourager les non qualifiés à se former et engager la concertation avec l’employeur sur les actions à mettre en place.
  • 47. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 34 du travail, préfet, DDTE,1 mais également AFPA2, et université locale3 pour organiser la reconversion. La tendance, encouragée par le pouvoir politique, est également de faire appel à des prestataires de reconversion privés, avec un contrat sur objectifs. Les DRH devront également gérer des grèves, des manifestations de salariés qui n’ont plus rien à perdre, et seront en première ligne dans les négociations aux côtés des dirigeants. Une autre conséquence se trouve dans la nécessité de savoir gérer les ressources humaines dans de grandes multinationales, avec des différen- ces culturelles, législatives et de pouvoir d’achat très importantes. Des services se sont ainsi spécialisés dans la gestion des expatriés. Ce sont généralement des salariés jeunes, bien formés, entreprenants, qu’il s’agit de gérer au regard du marché de l’emploi de ces profils rares ou atypi- ques. En effet, les entreprises sont en concurrence entre elles pour atti- rer puis fidéliser ces candidats à l’expatriation ce qui signifie une veille attentive sur les rémunérations et les avantages divers offerts par les autres employeurs non seulement français mais mondiaux : aide à l’emploi du conjoint ou compensation financière, inscription des enfants dans des écoles internationales, logement fourni. Cela donne également lieu à l’émergence d’emplois nouveaux, dont l’intitulé est généralement anglo-saxon. Nous en avons rencontré deux. Il s’agit de l’emploi de « Human Ressource Business Partner », c’est-à-dire l’inter- locuteur RH des cadres dirigeants des sites implantés à l’étranger, et du « RH Account Manager » c’est-à-dire un coordonnateur qui s’assure de la cohérence des politiques RH vis à vis des plus gros clients (les « grands comptes ») quel que soit le pays d’où proviennent les services ou les produits pour ces clients. De nombreuses offres d’emploi appa- raissent sur les sites internet de recrutement à l’international. Ce tour d’horizon n’est probablement pas exhaustif. Il pointe néan- moins les nombreux défis qui attendent les responsables de la fonction ressources humaines dans les années à venir, et laissent augurer d’un marché de l’emploi pour des diplômés en ressources humaines plein d’opportunités et d’écueils… 1. Pour mobiliser des fonds pour la création de nouveaux emplois sur la zone ; en subventionnant les entreprises qui viennent s’installer ou en subventionnant celles qui embauchent des salariés à reclasser. 2. Association pour la Formation Professionnelle des Adultes. 3. Par exemple en Suède, reconversion des salariés des télécommunications par l’Université.
  • 48. 35 CH A P I T RE 2 Le processus de production de la fonction RH UE PRODUIT la fonction RH et comment s’organise-t-elle pour créer de la valeur ajoutée ? La très grande diversité des organigrammes ressources humaines rencontrés (allant de l’inexistence totale à des services très étoffés, centralisés ou décentralisés), et l’extrême variété de la composition des emplois rencontrés (les tâches confiées aux titulaires d’emploi sont regroupées de façon très souvent différente d’une entreprise à l’autre) nous ont conduites à nous interroger sur ce qui fonde la logique des différents choix d’organisation des RH. Un exemple d’organigramme (une mutualité agricole) va nous permettre d’illustrer les difficultés rencontrées (figure 2.1). Dans un tel organigramme, les intitulés ne permettent pas d’identifier : – le contenu des postes : par exemple, que signifient « gestion admi- nistrative », ou « coordination régionale » ? – la différence entre les trois intitulés : assistante ressources humai- nes, assistante formation et communication, et assistant de commu- nication; Q
  • 49. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 36 – la différence entre les niveaux hiérarchiques : la chargée de communication est-elle plutôt au niveau hiérarchique du DRH ou au niveau des assistants ? En extrapolant au-delà de cet exemple, il suffit de citer les intitulés d’emplois (extraits de divers organigrammes réels) pour constater l’instabilité des dénominations et par là même la difficulté de se repré- senter les fonctions réelles. Ainsi, nous avons rencontré les intitulés suivants : directeur des ressources humaines, directeur des relations sociales, directeur du personnel, responsable du personnel, assistant chargé de la gestion du personnel, assistant RH, assistant formation, assistant chargé des études et de l’emploi, chargé de la gestion des compétences et de la formation, responsable du contentieux et de la gestion des carrières, assistant paye et administration du personnel, employé chargé du suivi des contrats, secrétaire paye, pointeau, chargé des relations sociales et des statistiques, responsable de coordination paye, secrétaire rédacteur adjoint, secrétaire général, assistant RH et service paye, responsable de la gestion de la formation, attaché chargé de la gestion des carrières, ou plus récemment responsable ressources humaines, correspondant ressources humaines, responsable du déve- loppement ressources humaines, etc. Cette énumération est loin d’être exhaustive mais suffit à illustrer les difficultés que nous avons rencon- trées. À quel niveau de responsabilités ces divers emplois sont-ils situés ? Figure 2.1 – Exemple d’organigramme du service RH d’une mutualité agricole Secrétariat général gestion administrative du conseil d’administration Centre X (lieu) gestion administrative Échelon local coordination régionale Relations sociales conseil d’entreprise coordination des instances départementales Direction Secrétariat de direction Chargé des ressources humaines Assistante ressources humaines Assistante formation et communication Assistant de communication Chargée de communication
  • 50. LE PROCESSUS DE PRODUCTION DE LA FONCTION RH 37 © Dunod – La photocopie non autorisée est un délit Quelle est la mission principale de leur emploi ? Un assistant dans une entreprise a-t-il le même niveau de responsabilités que dans une autre entreprise ? À titre d’illustration, pour le même emploi intitulé « assistant RH », certaines entreprises recherchent un bac + 2 (DUT GEA option RH), d’autres un DESS RH (Bac + 5)… De plus, les organigrammes des grandes entreprises étudiés pour cette étude ou pour le suivi des stages étudiants ne sont pas du tout stabilisés, et changent pratiquement chaque année1. Présenter des organigrammes types en fonction de la taille des entre- prises, de leur statut public ou privé, du fait qu’elles sont siège ou site ou filiale est donc insuffisant pour rendre compte du fonctionnement de la fonction RH et en particulier de ce qu’elle « produit », c’est-à-dire de son objectif, de sa raison d’être, de sa finalité. Pour ce faire il n’y a pas de processus linéaire de production corres- pondant à une succession d’activités prises en charge les unes après les autres comme on le trouve dans la production de biens ou de services, activités correspondant à tels emplois avec telles technicités. Cependant il existe des chaînes d’activités2 par service produit (paye, formation, recrutement, plan social, etc.), mais ces chaînes d’activités ne sont pas forcément liées entre elles. La fonction ressources humaines ne fonctionne pas linéairement avec « inputs », transformations, « outputs », mais la plupart du temps et de plus en plus en réseau, en communication permanente avec les autres services de l’entreprise sur la mise en place de projets (35 heures, plans de retraite progressive, introduction de nouvelles technologies et forma- tion, etc.) avec le recours fréquent à des organismes conseil (gestion des ressources humaines externalisée)3. 1. À ce propos, lire l’article intitulé « Renault remanie sa DRH… de fond en comble », in Liaisons Sociales, décembre 1997. Si elle produit en majeure partie des services aux autres entités de l’entreprise, la fonction ressources humaines a une mission, une préoc- cupation principale, celle d’optimiser la productivité des hommes. 2. Voir par exemple la chaîne d’activités du responsable paye. 3. Voir à ce propos le métier de consultant RH décrit au chapitre 7.
  • 51. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES : SON ÉVOLUTION, SES MÉTIERS 38 Autrement dit, il y aura de moins en moins d’activités correspondant à des techniques stabilisées et de plus en plus d’activités correspondant à des dispositifs toujours à reconstruire s’appuyant pour fonctionner sur des réseaux relationnels. Ceci explique que dans certaines entreprises la fonction RH se structure : – d’une part en emplois opérationnels; – d’autre part en emplois de prospective. Ou encore que dans d’autres entreprises, les opérationnels RH (appe- lés souvent « correspondants RH ») sont également chacun chargés d’un dossier « transversal » (la formation, le recrutement, la communi- cation, etc). Pour rendre compte de cette complexité d’organisation de la fonction RH, nous proposons une représentation sous forme d’un système. Cet essai de formalisation systémique résulte des entretiens de cadrage réalisés avec des directeurs des ressources humaines soit spécifi- quement pour l’étude, soit lors du suivi de stagiaires en entreprise, soit lors de nos travaux de consultant. Quatre sous-systèmes identifiés : stratégie, études, plans d’action, logistique Comment représenter les différents sous-systèmes RH, leur positionne- ment relativement aux autres fonctions de l’entreprise, relativement à l’extérieur ainsi que leurs interactions ? La configuration schématique suivante permet de répondre à ces premières questions. Le sous-système stratégie Il correspond à la définition des différentes politiques en matière de RH : emploi, rémunération, formation, communication, sécurité, etc. Celles-ci sont très étroitement liées à la politique générale de l’entreprise car elles doivent accompagner, voire précéder les choix en matière de politique industrielle ou commerciale. Ce sous-système peut être développé explicitement (par exemple lorsque le DRH a un poids dans l’équipe dirigeante) ou bien être implicite, lorsque les choix stratégiques ne sont