Les incidents sociaux, dont la grève, constituent des symptômes de dysfonctionnement et une opportunité d’évolution pour l’organisation pour autant que nous prenions la peine de les relever, de les analyser et d’appliquer les conclusions qui en découlent non seulement par une réaction à court terme (curative), mais surtout par des ajustements qui auront un impact à moyen et long terme (préventifs).
1. P. Namotte 04/04/2011 1/2
La grève, menace ou opportunité ?
Ce 4 mars 2011, la Belgique a connu une grève générale à l’initiative de la CGSLB et de
la FGTB. Ce mouvement constituait une opposition au projet d’accord interprofessionnel
que ces organisations, dépassées et rattrapées par leurs bases, avaient initialement
négocié et validé.
Concrètement, du nord au sud, des entreprises ont été empêchées de fonctionner ou
contraintes de tourner au ralenti. Cette grève a été accompagnée de piquets, de
barrages filtrants aux entrées de Bruxelles et des principaux zonings industriels, de
manifestations, de perturbations dans les transports en commun et les aéroports,
l’intensité des actions menées variant fortement selon la région, le secteur, l’entreprise.
La perception de l’impact de cette grève générale est bien évidemment différente selon
les interlocuteurs : réussie, une mobilisation importante et forte pour les syndicats
concernés ; une erreur historique pour la FEB qui en estime le coût à 70 millions € pour
l’économie belge. Quelle que soit l’appréciation, cette action est le reflet d’un malaise
social.
Les enjeux
Les réactions des salariés portaient pour l’essentiel sur la limitation, identique pour
toutes les entreprises et tous les secteurs d’activités, de la marge salariale, sur une
ébauche d’harmonisation des statuts ouvrier et employé ainsi que sur ce qu’ils perçoivent
comme une remise en cause du système d’indexation automatique, cette dernière
perception étant confortée par les positions exprimées par des représentants du monde
patronal ainsi que par des leaders politiques européens.
Les revendications ? La libre négociation des salaires, l’augmentation décente du salaire
minimum brut interprofessionnel, la fin des discriminations entre ouvriers et employés
mais sans toucher au statut des employés, et enfin le renforcement de la sécurité sociale
et des services publics.
La grève et le droit de grève
La grève, qui n’est pas réservée aux seuls salariés - songeons à la grève du lait, des
transporteurs, de la magistrature en France – et est exercée pour des motifs qui ne sont
pas nécessairement uniquement liés aux rémunérations, constitue un droit tant dans les
législations internationales que belges. A l’exception des militaires ou de grèves jugées
abusives (motifs futiles, grèves accompagnées de faits comme la violence ou la
déprédation, etc.), la participation à une grève, y compris l’organisation de piquets de
grève, n’est pas un acte répréhensible.
Les motivations individuelles de faire grève
Les motifs qu’ont les personnes de faire grève, ou d’y apporter leur soutien, quel que soit
leur statut - ouvrier, employé, cadre - sont multiples :
par militantisme ;
parce qu’elles se sentent plus ou moins concernées par le ou les enjeux de la grève ;
parce qu’elles n’ont pas - ou plus - de motivation pour ce qu’elles font ;
en réaction à leurs propres conditions de travail (charge de travail, rythme, pression,
stress, absence de considération voire mépris, etc.) ;
pour se soustraire momentanément à ces désagréments ;
et aussi, pour certaines, parce que c’est simplement une occasion de prendre une
journée supplémentaire de congé.
2. P. Namotte 04/04/2011 2/2
Selon les individus, une ou plusieurs de ces motivations interviennent, à des degrés
divers.
Et concrètement dans les entreprises le 04/03/11 ?
Si le taux de participation à cette grève – comme à toute autre initiative de ce genre –
peut être lié à des motifs qui sont étrangers à l’entreprise, il est aussi, et pour une part
non négligeable, influencé par le fonctionnement de celle-ci.
Ajoutons que les organisations syndicales, quelle que soit leur volonté, sont bien
incapables de « mettre les salariés en grève » si ceux-ci n’ont pas de bonnes raisons
pour le faire et, sur base de mon expérience personnelle acquise en tant que permanent
syndical dans une vie professionnelle antérieure, je peux confirmer que même dans des
circonstances pénibles de restructuration, voire de fermeture, le personnel concerné s’est
abstenu de réagir de cette façon.
Concrètement le 04/03/11, face à une même sollicitation extérieure à l’entreprise, le
degré de participation des salariés à cette grève, ou autres mouvements du même ordre,
même comparé dans des organisations ayant des caractéristiques similaires, a été
variable d’une entreprise à l’autre et parfois, dans les divisions d’une même entreprise.
Alors, quelle est la différence qui fait la différence ? Quels sont les facteurs sur lesquels
nous avons réellement une influence dans l’entreprise ?
Les incidents sociaux, dont la grève, constituent des symptômes de dysfonctionnement
et une opportunité d’évolution pour l’organisation pour autant que nous prenions la peine
de les relever, de les analyser et d’appliquer les conclusions qui en découlent non
seulement par une réaction à court terme (curative), mais surtout par des ajustements
qui auront un impact à moyen et long terme (préventifs).
Une question ? Posez-la à namotte-patrick@skynet.be
L’auteur :
Patrick Namotte
Consultant indépendant http://tinyurl.com/pdodvq6