Quels choix et quels usages faisons-nous des média de communication ?
Je présente ici les résultats d'une étude menée à Telecom Paris Tech pour le laboratoire Bells d'Alcatel Lucent. Cette présentation a eu lieu le 4 janvier 2010 à Telecom Paris Tech.
1. LES COMMUNICATIONS
MÉDIATISÉES : CHOIX ET
USAGE
RÔLE DU LIEN SOCIO-AFFECTIF
ET DU CONTEXTE
Liv Lefebvre
À Telecom Paris Tech
le 4 janvier 2010
2. LES COMMUNICATIONS
MÉDIATISÉES
Systèmes techniques qui médiatisent
les communications humaines
Comment modifient-ils les interactions
sociales ?
4. USAGE DES COMMUNICATIONS
MÉDIATISÉES
choix des conséquences sur
communication l’interaction sociale,
média
les résultats obtenus…
Média synchrone versus asynchrone ?
Contenu audio seul versus audio-visuel ?
…
5. USAGE DES COMMUNICATIONS
MÉDIATISÉES
choix des conséquences sur
communication l’interaction sociale,
média
les résultats obtenus…
Déterminants
Contexte
exogène (environnement sonore, social :
seul ou en groupe…)
endogène (objectifs, contenu, coûts,
rapidité…)
Lien socio-affectif
Nature et état de la relation : proximité,
tensions…
État affectif des interlocuteurs
6. PLAN DE LA PRÉSENTATION
Cadre théorique
Usage des média et leurs conséquences sur l’interaction
Etudes sur le choix du média
Conclusion et problématique
Etude sur le choix des média : rôle du lien socio-
affectif et du contexte
Méthode
Résultats
lien socio-affectif
contexte
autres déterminants
Discussion et conclusion
8. choix des conséquences sur
communication l’interaction
média
Usage des média et leurs conséquences sur
l’interaction
9. CADRE THÉORIQUE POUR LES
COMMUNICATIONS MÉDIATISÉES ?
Théorie de la richesse des
média
Plus les modes de
communication se rapprochent
de la situation de face-à-face,
plus le média sera "efficace"
téléphone visio conférence face-à-face
< <
10. CADRE THÉORIQUE POUR LES
COMMUNICATIONS MÉDIATISÉES ?
Théorie de la richesse des média, OR :
Primauté de la parole (Chapanis et al., 1972)
L’augmentation des sources d’information n’améliore pas
nécessairement les communications
Pas de prise en compte du type de tâche
téléphone visio conférence face-à-face
<? <?
11. UTILISATION DU CADRE THÉORIQUE
DES AFFORDANCES
Affordances des systèmes de communication
médiatisée (Whittaker, 2003)
possibilités d’action entre le monde et un individu
(Norman, 1999 ; Zhang & Patel, 2006)
Taxonomie des affordances
Clark et Brennan (1991)
identifient des affordances
et des coûts
Whittaker (2003) identifie 2 affordances
12. UTILISATION DU CADRE THÉORIQUE
DES AFFORDANCES
Affordances et média
Clark et Brennan (1991)
l’absence de certaines affordances entraîne des coûts dans le
processus de grounding, exemple :
coût de changement d'émetteur en l’absence de visibilité en
audio-conférence
coût de production d'un message plus important par mail
13. UTILISATION DU CADRE THÉORIQUE
DES AFFORDANCES
Focus sur visibilité et interactivité
Whittaker (2003)
Whittaker (2003)
Conséquences des affordances des média
les processus
les contenus
les conséquences sur la communication (résultats)
Distingue les tâches cognitives et sociales
14. EFFET DE LA VISIBILITÉ
Tâches "cognitives" : l’absence de feedback visuels
perturbe les indices cognitifs
l’initiation de la conversation et la prise de tour de parole
la référence spatiale
l’interactivité
15. EFFET DE LA VISIBILITÉ
Tâches "sociales" : requérant une interaction d’ordre
socio-affectif
Changent les processus sociaux de haut niveau (Short,
Williams & Christie, 1976)
le contenu
le résultat de la communication
Tâches de négociation et consensus, en conditions audio
seul
plus d’impasses
changement de l’influence : les solutions des membres de
haut statut sont moins facilement acceptées
conversation plus impersonnelle et plus centrée sur la tâche
et moins sur les autres participants
16. EFFET DE L’INTERACTIVITÉ
Oviatt et Cohen (1991) : experts fournissent
instructions pour une tâche d’assemblage
Condition interactivité : téléphone : novices vont plus vite,
les feedback progressifs permettent la réparation des
incompréhensions
Condition sans interactivité : messages pré-enregistrés :
les explications sont complexifiées et redondantes
17. LIMITES
Découpage des affordances ?
Distinction tâches sociales versus cognitives
peu explicite
pas de typologies de tâches
Pas de remise en cause de la situation de face-à-
face comme situation de référence
Etudes expérimentales, il manque une mise en contexte de
l’usage des média
18. choix des conséquences sur
communication l’interaction
média
Etudes sur le choix du média
19. CHOIX DU MÉDIA
Peu d’études
Straub & Karahanna (1998) : questionnaires
Lorsque l’interlocuteur est dans son bureau : face-à-face : 61 %
Lorsque l’interlocuteur n’est pas dans son bureau : e-mail : 63 %
Cucchi (2004) e-mail et téléphone : nombre de
communications
Prévalence du mail pour les personnes ayant les meilleures
positions dans la hiérarchie
20. LIMITES
Seulement études dans le milieu professionnel
Pas d’analyse du lien socio-affectif des interlocuteurs
Les méthodes employées sont peu écologiques
Pas d’analyse du contexte et des indices socio-affectifs
22. LIMITES DES ÉTUDES EXISTANTES
Peu d’études sur les déterminants du choix des média
Peu d’études en contexte naturel d’usage mais plutôt
expérimentations
Peu d’études sur le rôle du contexte et du lien socio-affectif
?
?
23. PROBLÉMATIQUE
Prise en compte des caractéristiques des média =
affordances (synchrone / asynchrone, audibilité,
visibilité, reconsultabilité…)
Couplage entre les média et le contexte
Caractéristique des interlocuteurs, du lien socio affectif
Objectif de la communication
Dépasser la comparaison face-à-face versus
communications médiatisées
Interroger le face-à-face comme situation "idéale"
d’interaction
Exemple du talkie-walkie (Woodruff & Aoki, 2003)
Les média écrits focalisent sur la tâche (Hiltz)
24. CHOIX DES MÉDIA : RÔLE
DU LIEN SOCIO-AFFECTIF
ET DU CONTEXTE
25. MÉTHODE
Recueil d’informations sur l’usage en contexte en fonction
des situations
Population
25 à 30 ans (génération minitel)
Travaillent dans un bureau avec téléphone et internet
Situations professionnelles et personnelles
Recueil des données :
Journaux de bord
Entretiens inspirés de la technique d’explicitation (Vermersh,
1994)
26. MÉTHODE
12 journaux de bord 5 entretiens
7 femmes, 5 hommes 3 femmes, 2 hommes
27. MÉTHODE
Journaux de bord
consigne
« Nous vous demandons de choisir 6 événements de
communications qui relèvent par exemple : d’une communication
qui s’est mal passée, vous avez hésité quant au choix du média,
ou bien un événement que vous avez simplement envie de
commenter. »
28. MÉTHODE
Journaux de bord
consigne
un "espace libre"
des questions précises
exemple
29. MÉTHODE
Journaux de bord
consigne
un "espace libre"
des questions précises
interlocuteur
média utilisés
communication
contexte
un relevé des communications quotidiennes
30. MÉTHODE
Journaux de bord
consigne
un "espace libre"
des questions précises
interlocuteur
média utilisés
communication
contexte
un relevé quotidien
Entretiens
basés sur les traces écrites
31. EVÉNEMENTS RECUEILLIS
50 événements recueillis, dont :
33 simples
17 complexes, dont la plupart avec changement de média
32. EVÉNEMENTS RECUEILLIS
50 événements recueillis, dont :
33 simples
17 complexes, dont la plupart avec changement de média
33. RÉSULTATS
- LIEN SOCIO-AFFECTIF
- CONTEXTE
- AUTRES DÉTERMINANTS
34. RÉSULTATS
- LIEN SOCIO-AFFECTIF
- CONTEXTE
- AUTRES DÉTERMINANTS
35. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
• Sphère d’appartenance des interlocuteurs
(X²(12;72) = 40,7 ; p < 0,001)
• Degré d’intimité des interlocuteurs
(X² (6 ;72) = 13,9 ; p < 0,05)
36. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
• Sphère d’appartenance des interlocuteurs
sphère privée sphère pro
37. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
• Sphère d’appartenance des interlocuteurs
sphère privée sphère pro
• Degré d’intimité des interlocuteurs
intimes non intimes
38. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
Sphère privée et intime
média synchrones
Sphère professionnelle et non intime
média asynchrones, reconsultables (mail)
39. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
Sphère privée et intime : média synchrones
envie d’entendre et de voir son interlocuteur
partage émotionnel
besoin affectif
caractère agréable de la communication
40. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
Sphère privée et intime : un exemple
« valait mieux le faire de vive voix parce que, pour qu’il y ait plus d’échanges
réels »
« elle était encore sous le coup des émotions et j’avais envie de ressentir ça
pour lui répondre de la manière la plus appropriée possible »
41. DÉTERMINANTS RELATIF AU LIEN SOCIO-
AFFECTIF
Sphère professionnelle et non intime
média asynchrones, reconsultables (mail)
Cas atypique
stratégie de développement d’un lien de proximité avec un client
« je voulais lui montrer ma volonté de le "séduire" et ma réactivité »
42. RÉSULTATS
- LIEN SOCIO-AFFECTIF
- CONTEXTE
- AUTRES DÉTERMINANTS
44. DÉTERMINANTS LIÉS AU CONTEXTE
Urgence
Objectif de la communication
Forte finalisation : mail, ensuite téléphone
information à donner
question à poser
prendre un rendez-vous ou s’organiser
Faible finalisation : téléphone ou chat
discuter et prendre des nouvelles
facteur associé à la proximité affective
45. DÉTERMINANTS LIÉS AU CONTEXTE
Urgence
Objectif de la communication
Contexte social
Seuls
média interactifs (téléphone, chat, visio-conférence, SMS)
Entourés de monde
média écrits (mail ou chat), caractère confidentiel
Maintien du lien social en s’adaptant aux contextes
« la conversation a été morcelée tout au long de la journée »
« conversation qui s’est déroulée tout au long de la journée en 5 morceaux.
Début de la conversation le matin (par chat) devant mon PC perso durant
mon petit déjeuner. Suite de la conversation au boulot. Reprise de la
conversation après manger. Puis de nouveau chez moi. Enfin une
conversation téléphonique et une rencontre réelle. »
46. RÉSULTATS
- LIEN SOCIO-AFFECTIF
- CONTEXTE
- AUTRES DÉTERMINANTS
47. AUTRES DÉTERMINANTS LIÉS AU
CHOIX DU MÉDIA
Modèle de l’interlocuteur
représentation de la disponibilité, des préférences, des habitudes, de la
réactivité, du contexte…
Modèle construit
à partir d’expériences avec l’interlocuteur
Participante 3 : « Je sais qu’elle est au travail et qu’elle consulte ses mails
régulièrement, donc je suis sûr qu’elle va le recevoir et me répondre. »
Absence de modèle
hypothèses à partir de connaissances générales
Participante 1 : « c’était un lundi férié et souvent les gens sont en famille. »
48. AUTRES DÉTERMINANTS LIÉS AU
CHOIX DU MÉDIA
Mode de substitution…
…ou complémentarité des média
50. DISCUSSION ET CONCLUSION
Bonne appropriation des média
Connaissances des possibilités et limites des différents
média
Pas nécessairement de préférence pour la situation de
face-à-face
Par exemple le mail permet de transmettre une information à
un collègue de travail en évitant de le déranger
Affordances des média adaptées au contexte d’usage
spécifique
Par exemple le chat permet de garder le contact au travail,
avec une économie en temps
Usage des média "traditionnels"
51. DISCUSSION ET CONCLUSION
Originalité de la méthode
Méthode moins intrusive que l’observation
Résultats plus riches que les expérimentations
prise en compte de la complexité des situations
recueil de cas d’usage
52. DISCUSSION ET CONCLUSION
Le choix (plus ou moins réfléchi) du média est pluri-
déterminé
contexte social, urgence
lien socio-affectif : sphère d’appartenance et proximité
affective
l’objectif de la communication : forte ou faible finalisation
modèle de l’interlocuteur
Nécessité de prendre en compte ces facteurs dans la
modélisation de l’usage des média
56. RÉSULTATS
Entretiens :
Comment un média peut-il paraître moins couteux à
utiliser et s’avère finalement moins approprié ?
Notes de l'éditeur
Artefact qui médiatise les interactions sociales Notre comportement va s’adapter en conséquences (Brennan & Lockridge, 2006) : on étudie ce qui change Etudes empiriques qui comparent : face-à-face, condition audio condition audio-visuelle Postulat de la largeur de la bande passante (Whittaker, 2003), OR : Pas de prise en compte de la tâche Primauté de la parole Augmentation des informations n’améliore pas nécessairement les communications
Enchainement : une alternative à la théorie de la richesse des média : …
Il faut faire attention au fait que cet article très intéressant à rapprocher de nos recherches (même si ce n’est pas de la psycho et que les méthodes sont différentes), a été PUBLIE en 1998, donc très peu de temps après l’utilisation du mail (sachant qu’il y a encore des gens qui ne l’utilise que peu souvent). De plus, notre population est une population de jeunes gens et donc plus aguerris aux nouvelles technologies. Ce sont des facteurs qui peuvent expliquer les différences de résultats s’il y en a. « Le mail n’est pas vu comme un substitut lorsque la tâche nécessite une haute présence sociale. Le mail était acceptable lorsqu’ils ont des difficultés à échanger d’autres manières. » En fait le problème de la théorie de la richesse des média est que elle fixe les choses de manière linéaire, c'est-à-dire qu’elle ne permet pas d’analyser l’usage du mail comme adapté à des tâches différentes que le face-à-face ou téléphone, en fait elle présuppose de toutes manières que le mail est un média de communication « dégradé ». Or on peut considérer qu’il a tout un tas d’avantages.
Étendre les affordances communicationnelles ?
Étendre les affordances communicationnelles ?
Comme on peut le prévoir
Participant 5 : Évé 1 : SMS mais aurait dû appeler : regrets sur le choix du média : aurait voulu un feedback Comment un média peut paraître moins couteux à utiliser et s’avère finalement moins approprié ? Évé 2 : google talk plutôt que l’appel : prise en compte du contexte de son interlocuteur pour choisir le média Comment la prise en compte du contexte habituel de l’interlocuteur influence le choix du média ? Le choix du moindre coût Participant 2 : Discute par chat puis appel téléphonique : Comment le téléphone permet l’empathie ?