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Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 
Par Elodie Manthé 
1 
UNIVERSITÉ PAUL CÉZANNE – AIX-MARSEILLE II 
INSTITUT D’ÉTUDES POLITIQUES d’AIX 
MÉMOIRE en vue de l’obtention du Master MIS parcours MGE 
Sciences Po Aix en Provence 
Peut-on faire confiance au crowdequity ? 
Par Elodie MANTHÉ 
Soutenu le 3 septembre 2014
Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 
Par Elodie Manthé 
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UNIVERSITÉ PAUL CÉZANNE – AIX-MARSEILLE II 
INSTITUT D’ÉTUDES POLITIQUES d’AIX 
MÉMOIRE en vue de l’obtention du Master MIS parcours MGE 
Sciences Po Aix en Provence 
Peut-on faire confiance au crowdequity ? 
Par Elodie MANTHÉ 
Soutenu le 3 septembre 2014
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Les opinions émises dans ce document n'engagent que son auteur. L'Institut d'Etudes Politiques d'Aix-en- Provence ne saurait en aucun cas être tenu responsable du contenu du présent document 
Nous attestons que dans ce texte toute affirmation qui n'est pas le fruit de notre réflexion personnelle est attri- buée à sa source et que tout passage recopié d'une autre source est en outre placé entre guillemets, et cité en référence. 
Elodie Manthé, 
Aix-en-Provence le 30 juillet 2014.
Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 
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Résumé 
Le crowdfunding, ou financement par la foule, s’est développé aux Etats-Unis au début des années 2000 notamment grâce à des plateformes de financement d’artistes (comme MyMajorCompagny). Le crow- dequity est le dernier développement en date de cette tendance. Cette forme de financement participatif per- met d’investir dans des entreprises (PME et startups), et en échange, d’obtenir des actions de celles- ci. L’equity crowdfunding permet aux investisseurs particuliers et professionnels de devenir actionnaires de startup et PME en croissance. En France et en Europe, le crowdequity est aujourd’hui au coeur d’une réflexion réglementaire, économique, politique et sociétale sur laquelle nous souhaitons nous pencher ici. 
A l’heure où la France se met au rythme du crowdfunding, en voulant devenir la « Startup République » et en démontant le monopole bancaire, il est temps de s’arrêter un instant sur ce phénomène. Le crowdequity se positionne comme un concurrent direct des acteurs traditionnels du financement que sont notamment les busi- ness angels. 
Ce nouvel acteur chamboule le paysage du financement en France pourtant nous le connaissons très mal. Il convient alors de se poser la question : peut-on faire confiance au crowdequity ? 
Mots-clés 
Crowdfunding ; crowdequity ; financement participatif ; business angels ; finance entrepreneuriale ; confiance ; « internaute-investisseur » ; NTIC ; investissement ; equity-based crowdfunding ; equity gap ; règlementation ; levée de fonds.
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Remerciements 
Je souhaiterais remercier Michel Vacher, président du réseau Alumni Business Angels qui a toujours montré un intérêt sincère à l’avancée de mon travail. Je le remercie par ailleurs pour la confiance qu’il a su me porter et pour m’avoir toujours considérée comme son égale. 
Merci aux membres du réseau Alumni pour leur accueil, leur gentillesse et leur bienveillance. Je tente l’exercice périlleux de les citer car j’en oublie forcément : Julia Santi, Tünde Amphoux, Philippe Domini, Jean-François Lucas, Marie-Christine Pessiot, Denis Garnier, Pascale Bruyat, Régine Lorenzi, Didier Avé, Olivier Plotton, Renaud Vincent… 
Merci à Benjamin Bréhin et Arnaud Longueville de France Angels pour leur accueil toujours chaleureux et leur disponibilité. A Jean-Patrice Anciaux pour m’avoir orientée dans mes recherches. Merci au Professeur Jean Redis et à Benjamin Wattine pour s’être prêtés au jeu de l’interview. 
Merci à mon tuteur, Florian Paris, pour les encouragements et les petits articles glanés au gré de ses lectures venus enrichir mon travail. 
Merci à mes camarades et amis de ce master MGE 2014 qui ont toujours eu le mot pour rire ou pour motiver, en cette dernière année dans les murs de Sciences po, riche en émotions et en défis : Nicolas de Chalonge, Léo Carpentier, Robin Legrand, Victor Estrade mais surtout Coline Piveteau. 
Enfin merci à vous, lecteurs, en espérant que ce travail viendra enrichir votre propre réflexion sur le sujet.
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Sommaire 
Avant-propos .................................................................................................................................................................................... 7 
Introduction ........................................................................................................................................................................................ 8 
PARTIE 1. REDONNER CONFIANCE AUX ENTREPRENEURS ET AUX INVESTISSEURS ................................................... 13 
Chapitre 1 – Constat ..................................................................................................................................................................... 14 
Chapitre 2. Un manque dans la chaîne de financement des entreprises. ..................................................................... 20 
Chapitre 3. L’explosion du crowdfunding : évolution ou révolution ? ........................................................................... 34 
PARTIE 2. LE CROWDEQUITY : ENTRE ESPÉRANCE ET SUSPICION .................................................................................... 42 
Chapitre 4. Crowdequity et angélat en France : entre confiance et défiance mutuelle. ......................................... 43 
Chapitre 5. L’espoir de faire de la France la Startup République. ................................................................................... 56 
Chapitre 6. Donner sa confiance à une foule d’investisseurs ou à une foule sentimentale ? ................................. 64 
PARTIE 3. PRÉCONISATIONS ET LEÇONS MUTUELLES. .......................................................................................................... 80 
Chapitre 7. Challenges .................................................................................................................................................................. 81 
Chapitre 8. Préconisations. .......................................................................................................................................................... 88
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Avant-propos 
Ce présent mémoire s’adresse à un public large, d’initiés ou d’amateurs. Ainsi le vocabulaire employé sera tech- nique mais toutes les expressions, abréviations et sigles seront explicités et annotés. 
Lors de la rédaction de ce document il est apparu qu’il était extrêmement difficile d’avoir du recul sur le phé- nomène du crowdfunding, d’autant plus en France où il fait ne fait l’objet d’une couverture médiatique que depuis quelques mois. Ce sujet est hautement d’actualité et rend ardue l’analyse. Bien que celle proposée ici soit la plus neutre possible, le lecteur doit garder en tête que l’éclairage de ce sujet dépend, en partie, des convictions de chacun. 
L’objet de ce mémoire est bien de donner une vision d’ensemble du contexte dans lequel le phénomène du financement participatif s’épanouie et de la façon dont les acteurs du financement interagissent entre eux.
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Introduction 
Rappels 1. 
La plateforme de financement participatif Ulule propose une définition simple de ce qu’est le crowdfunding (ou financement participatif) : « il désigne l’application d’une méthode de financement d’un projet par la mise en commun d’une multitude d’apports individuels. » Avec la généralisation et la démocratisation des NTIC il y a eu un engouement considérable autour de ce mode de financement. Les particuliers, depuis leur ordinateur, sont désormais impliqués pleinement dans la microéconomie. Ils ont accès à des blogs, des sites web, des fo- rums sur lesquels des entrepreneurs partagent leurs ambitions et leurs projets. Ce mode de financement per- met de faire interagir un nombre suffisamment grand d’investisseurs pour minimiser le risque au maximum. Le modèle permet de s’affranchir en partie des procédures de demandes subventions et de financements exté- rieurs. 
Un des plus célèbres exemples de crowdfunding est la dernière campagne de Barak Obama aux USA, financée par le grand public à hauteur de 150 millions de dollars. Le don moyen était de 80 dollars par personne et le paiement s’est fait principalement par le biais du site de campagne du démocrate. L’idée était d’impliquer les citoyens dans cette campagne présidentielle. De faire en sorte que la victoire de leur candidat soit également la leur en les impliquant financièrement. 
Le crowdfunding permet de créer un lien direct entre le financement accordé et le projet financé. 
C’est aux Etats-Unis que l’on a vu apparaitre les premières plateformes, au début des années 2000 avec des sites comme ArtistShare en 2003, Indiegogo en 2008 ou encore Kickstarter, la plus connue, en avril 2009. De- puis les années 2010 on a vu apparaitre des plateformes dites de crowdequity. C’est-à-dire de financement par prise de participation au capital de sociétés. Le phénomène n’est donc pas nouveau mais a pris une toute autre ampleur ces dernières années grâce au développement d’Internet et des réseaux sociaux. 
Jusqu’à présent, les acteurs traditionnels du financement d’entreprise évoluaient dans l’écosystème sans entrer en concurrence car ils n’ont pas les mêmes capacités d’investissement : sociétés de capital-risque, fonds d’investissement, entités publiques et business angels. Or nous allons voir qu’avec l’arrivée du crowdequity, c’est un concurrent direct des réseaux de business angels qui prend place et qui impose un changement de règle. C’est pour cette raison que ce mémoire ne traitera pas uniquement du crowdequity en tant que phénomène mais bien du crowdequity en tant que nouvel acteur dans un écosystème déjà en place, qui présente déjà des
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règles du jeu et des concurrents. C’est l’interaction avec les business angels notamment qui nous permettra de donner un éclairage, que nous espérons original, au sujet. 
Design de la recherche 2. 
Au cours de ce présent mémoire nous nous concentrerons sur cette branche de crowdfunding qu’est le crowdequity, bien que nous verrons qu’il en existe d’autres formes et qu’elles sont éclairantes pour com- prendre le phénomène dans sa globalité. 
Nous nous limiterons également au territoire français. Des benchmarks avec des pays anglo-saxons et euro- péens viendront cependant enrichir notre réflexion. 
Cette recherche n’a pas pour ambition de donner un avis arrêté sur le phénomène du crowdequity mais bien de développer des pistes de réflexion et de soulever un certain nombre de problématiques qui vont de pair avec l’explosion de ce phénomène. Le recul manque pour prétendre savoir comment va évoluer le crowdfun- ding en général. Ainsi nous ne donnerons que des pistes concernant les concernant les conditions sous les- quelles nous pouvons faire confiance au financement participatif. 
Afin de construire cette réflexion nous avons confrontés des articles de recherches et des articles d’actualité. Les changements règlementaires ayant eu lieu lors de l’année 2014 ont conduit à l’écriture de centaines d’articles de presse sur le sujet, plus ou moins documentés. Il a été parfois compliqué de faire la part des choses alors que nous étions plongés dans l’actualité, toujours en mouvement. Ainsi au cours de nos lectures liminaires nous avons isolés des hypothèses qui seront nos fils conducteurs pour cette recherche. 
Hypothèses de recherche 
Nous avons établi quatre hypothèses de recherche : 
1. Il y a une méconnaissance des citoyens vis-à-vis des acteurs du financement et entre ces acteurs eux- mêmes. 
2. Les acteurs traditionnels du financement, tels que les réseaux de business angels, se méfient de l’explosion du phénomène de crowdfunding et craignent un effet de mode.
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3. Ce n’est pas la « foule » qui finance mais bien une multitude d’individus indépendants. Si cette foule n’est en réalité qu’un agrégat d’individus aptes à investir leur propre patrimoine alors la définition de « crowdequity » doit être revue pour se rapprocher de la réalité. 
4. Il y a une complémentarité dans l’expertise et l’accompagnement de la startup entre business angels et crowdfunding, sous certaines conditions. 
La notion de confiance 3. 
Ce qui est formidable dans le crowdfunding, en général – dans le crowdequity en particulier- c’est que tout le système repose sur la notion de confiance. Aussi incroyable que cela puisse paraître, quasiment aucun garde- fou n’existe. En financement participatif « traditionnel » - je donne et je reçois éventuellement une récompense pour mon geste – quasiment rien n’oblige le porteur du projet à tenir sa parole et à remplir les engagements pris, en envoyant les récompenses promises. En equity il est certes possible de faire pression sur l’entrepreneur car l’internaute-investisseur est présent au capital de la société mais il possède un poids tout à fait relatif dans les prises de décisions importantes. 
Andrew Maxwell a montré qu’un cercle vertueux fondé sur la confiance et la fiabilité peut et doit se mettre en place entre investisseurs et entrepreneurs pour que leur relation soit saine. Selon son modèle, c’est la confiance qui implique la fiabilité. Le biais psychologique qui veut que l’on souhaite « bien faire » lorsque l’on nous fait confiance conduit à l’instauration d’un système vertueux et viable. Chacun y trouve son compte. La confiance est alors efficiente pour les deux parties. 
Figure 1 : Cercle vertueux de confiance et de fiabilité entre investisseurs et entrepreneurs. 
Source : Andrew Maxwell, Business Angel Decision Making, Canada, 2011
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Pour le moment, la confiance règne. Pour l’instant il n’y a pas de grain de sable dans la machine qui se met en place. Mais pour combien de temps ? Bien sur la confiance est au coeur de beaucoup de choses : la finance, la politique, l’économie…Mais nous avons vu que c’est un concept fragile à la base d’un équilibre pré- caire. La bulle Internet de 2000 et la crise des subprimes en sont des témoins plus que fiables. 
Les plateformes ne peuvent assurer à 100% de trouver toutes les tentatives de fraudes. Beaucoup de critiques ont d’ailleurs émergées de la campagne Healbe GoBe,1 un appareil portable qui prétendait mesurer automati- quement apport calorique, niveau d'hydratation, et autre niveau de stress de ses usagers. Les spécialistes sont sceptiques quant au projet, mais cela ne l'aura pas empêché de récolter près d'un million de dollars de fonds en crowdfunding. Sans compter avec le fait que la société derrière le projet, prétendument basée à San Francisco, se trouve exploitée depuis Moscou.2 
La plateforme américaine Kickstarter a une position claire sur ce point, ses conditions d'usage stipulant que « la société ne peut garantir l'authenticité de toutes les données ou informations que les utilisateurs fournissent eux- mêmes ou via leurs campagnes et projets », ni même l'identité des usagers avec lesquels on serait amené à interagir sur le site. 3 
Julien Helmlinger, journaliste chez ActuaLitté dénonce d’ailleurs un « revirement sur la plateforme Indiegogo, qui considère la notion de « confiance » comme l'un des trois piliers fondamentaux de l'amélioration de l'expé- rience de ses usagers. Une intention louable, mais encore faut-il être en mesure de pouvoir justifier cette con- fiance. Tandis que le site promettait jusqu'à lors de déceler tous les cas de fraude parmi les projets qu'il hé- berge, celui-ci a changé la clause au cours d'une nuit [du 3 avril 2014]. »4 
La phrase a donc simplement été modifiée, passant de « All campaigns and contributions go through a fraud review, which allows us to catch any and all cases of fraud » à « Campaigns and contributions that have been flagged by our fraud detection system go through a thorough review ». Une modification qui peut paraître anodine mais qui, en réalité, change tout pour les centaines de personnes ayant investi dans des projets fraudu- leux comme Healbe.5 
1 James Robinson, « Refund demands flood in as Healbe’s Indiegogo scampaign enters final days », pando.com [en ligne], 7 avril 2014. 
2 Ibid 
3 Julien Helmlinger, « La notion de confiance, pilier bancal du financement participative », actualitte.com [en ligne], 7 avril 2014. 
4 Ibid. 
5 http://www.goodmorningcrowdfunding.com/indiegogo-se-defile-face-aux-fraudeurs/Indiegogo se défile face aux frau- deurs
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On peut en conclure que « si les plateformes de crowdfunding servent d'intermédiaire visant à mettre en rela- tion des fondateurs de projets et leurs financeurs potentiels, mais qu'au final elles déclinent toute responsabilité juridique, le plus grand risque de la pratique résiderait donc dans le faux sentiment de sécurité qu'elles inspi- rent. »6 
Dans le cas du crowdequity, l’encadrement juridique est en train de se mettre en place suite à une volonté affi- ché du gouvernement de s’emparer du phénomène. La question se pose alors : peut-on faire confiance au crowdequity ? Si oui, à quelles conditions ? Si non, que pouvons-nous prédire de l’évolution du crowdfunding ? 
Nous analyserons dans un premier temps le contexte dans lequel le crowdfunding – et le crowdequity - est arrivé en France. Dans un climat économique et entrepreuneurial qui semble morose, le crowdfunding se posi- tionne comme le nouveau « graal » du financement, chamboulant les positions bien établies des acteurs tradi- tionnels du financement d’entreprise. 
Puis nous verrons que la France et les acteurs de cet écosystème “startups” oscillent entre suscpition et espérance envers ce phénomène. Entre refonte de la règlementation bancaire pour favoriser le crowdequity et méfiance de certains acteurs, tels que les business angels, le crowdequity ne fait pas tout à fait l’unanimité car il soulève quantité de questions. 
Les conditions de succès du crowdequity et d’une collaboration entre plateformes de financement participatif et business angels existent. Restent à savoir si elles seront appliquées, et comment elles le seront. Cette projection fera l’objet d’une dernière partie, récapitulant nos préconisations. 
6 Ibid.
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PARTIE 1. REDONNER CONFIANCE AUX ENTREPRENEURS ET AUX INVESTISSEURS
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Chapitre 1 – Constat 
Une volonté d’entreprendre largement limitée 1. 
Au deuxième trimestre 2013, les startups françaises ont levé 487 millions d’euros selon le baromètre du capital risque7 français du cabinet EY (anciennement Ernst&Young)8. La France représente à elle seule 16% du montant levé par les entreprises européennes. Elle se positionne sur la troisième marche du podium des pays de l’Union Européenne qui ont le plus investis dans leurs entreprises au cours de cette période.9 
Cependant, « en France, et en général en Europe, on observe un retard dans les financements véritablement ciblés sur l’investissement d’amorçage et le monitoring des entreprises innovantes. Dans le cas français, la struc- ture d’investissement directe et indirecte (via des fonds) est très déséquilibrée : le faible nombre d’investisseurs directs au stade très précoce réduit le vivier de projets à fort potentiel, la rentabilité et les chances de valorisa- tion ultérieure de ces entreprises. Les fonds spécialisés de capital-risque ne se substituent pas à ce maillon manquant et desservent très peu les phases préliminaires. »10 
Or l’innovation est primordiale pour rendre un pays compétitif. « Pour des économies matures, qui ont épuisé le moteur du rattrapage, la créativité dans le domaine des produits et services est un élément décisif de la compé- titivité. Un tel objectif suppose que l’innovation soit en partie animée par de nouvelles entreprises entrantes. Et, « nombre d’analystes s’accordent pour reconnaître que la structure de la grande entreprise n’est pas toujours la plus favorable à l’innovation de rupture (Christensen, 1997 ; Baumol, 2001).»11 
Une multitude d’acteurs - des réseaux d’investisseurs comme les business angels, des plateformes de crow- dfunding, des entités étatiques comme la BPI France ou des fonds de capital-risque composent la chaîne du financement. Et pourtant les entreprises innovantes peinent à se financer. Il y aurait près de mille deux-cents aides12 à la création innovante en France. Ce sont des subventions, des aides régionales, des prêts d’honneur, 
7 Le baromètre du capital risque France recense les opérations de financement en fonds propres des entreprises en phase de création ou en phase dite d’amorçage. 
8 Aude Fredouelle, JDN.fr [en ligne]. 
9 Après l’Allemagne et le Royaume-Uni. 
10 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 
11 Ibid. 
12 La Rédaction, « [Métro Startup] Les aides à la création sur un plan de métro ! », frenchweb.fr [en ligne], le 27 février 2012
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des aides de pépinières ou d’incubateurs. Et pourtant, des entrepreneurs se voient encore bloquées dans leur développement, notamment car les investisseurs ont du mal à faire confiance dans cette phase dite d’« early- stage ». 
« Les contraintes financières des entreprises innovantes en phase de création sont d’une intensité particulière compte tenu de l’asymétrie d’information entre l’investisseur et l’entrepreneur. L’accès restreint aux finance- ments externes provient en premier lieu de la difficulté à évaluer le marché futur des entreprises innovantes, l’entrepreneur disposant d’une meilleure vision prospective de son entreprise qu’un bailleur de fonds extérieur. La proportion élevée d’actifs intangibles mis en jeu dans le processus d’innovation aggrave cette asymétrie d’information. Cette difficulté entraîne des coûts importants d’assurance ou de contractualisation. En second lieu, le caractère différé du retour sur investissement, d’autant plus marqué que l’apport de fonds se produit à un stade précoce du projet, crée une restriction. Celle-ci est enfin accentuée par la faiblesse des collatéraux pour le financeur, notamment en cas de projets à forte teneur immatérielle, ce qui exclut largement le recours à la dette bancaire ».13 
Les flux trésoriers et financiers sont au coeur du développement et de la vie de la startup. Dans cette phase, ses besoins de financement varient de quelques milliers d’euros à plusieurs centaines de milliers d’euros. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette première phase de financement, sollicitant moins d’un million et demi d’euros environ, est la plus difficile à dépasser. En effet, la commercialisation n’est pas encore débutée ou vient à peine de démarrer. Le chiffre d’affaire n’est pas révélateur de la potentialité de l’entreprise. Si elle repose sur une innovation de rupture, on ne peut savoir comment le marché va l’accueillir. La difficulté pour trouver des financements afin de continuer l’aventure est immense : prêter à ces jeunes pousses est souvent trop risqué pour des établissements bancaires traditionnels, le capital-risque ne s’intéresse qu’aux entreprises déjà lancées et prometteuses, le financement interne reste une option mais les moyens viennent souvent à manquer. 
C’est sur cette question que s’interroge Frédérique Savignac dans son article « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes »14. Elle y explique que le fort potentiel de croissance de ces entreprises inno- vantes ne compense pas le risque élevé qu’elles représentent. Là se trouve le défi majeur des startups, « leur statut d’entreprise en création, associé au caractère innovant de leur projet, renforce les traditionnels problèmes d’asymétrie d’information avec les apporteurs de financement externes (Hall [2002], Belin et al.[2003])15. En 
13 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 
14 Savignac Frédérique, « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes » Financement interne, prêt bancaire, ou capital-risque ?, Revue économique, 2007/4 Vol. 58, p. 863-889. 
15 Les références citées par l’auteur dans le texte sont : 
BELIN J., CARO J.-Y, GUILLE M et LUBOCHINSKY C. [2003], « Innovation technologique et systèmes financiers », rapport pour la Fondation Banque de France.
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particulier, les bailleurs de fonds ne possèdent pas ou peu de bilans passés qui les informent sur la performance de l’entreprise. En outre, le contenu innovant du projet nécessite une expertise technique afin d’évaluer le risque de l’investissement. Enfin, l’importance relative des actifs immatériels ne permet pas toujours aux banques de disposer de garanties nécessaires à l’attribution d’un prêt (Jacquin [2003]).» 
C’est pourquoi, explique-t-elle, la phase de création de l’entreprise et celle qui approche de la pénétration du marché est la plus difficile à financer via du prêt bancaire. On parle de la phase « d’amorçage ». Durant celle-ci, les entreprises ne peuvent techniquement pas fournir des garanties suffisantes et leur chiffre d’affaire, s’il y en a déjà un, n’est pas encore significatif. Les jeunes pousses se tournent alors vers des investisseurs externes qui sont pour la plupart des sociétés de capital-risque. 
Le risque pour l’entrepreneur de se tourner vers ce type d’acteurs est de voir les règles de gouvernance de sa société complètement chamboulées. La société de capital-risque cherche en effet une rentabilité maximale pour ses investissements afin de compenser la prise de risque inhérente aux montants investis et à la faible maturité de la société ciblée. « L’attribution de droits de contrôle permet à la société de capital-risque d’intervenir dans la gestion de l’entreprise et ainsi de favoriser le remplacement du fondateur de l’entreprise si ses performances sont jugées insuffisantes »16 
Le startuper se retrouve alors face à un dilemme : ne pas trouver les fonds suffisants pour le développement de sa structure ou bien risquer d’en perdre la gouvernance. L’aventure entrepreneuriale est déjà périlleuse avant même d’aborder la question de la recherche de financements. Nous allons voir qu’elle devient une mission quasi impossible quand on rajoute ce facteur. 
HALL B. [2002], « Agency problems and the theory of the firms, Journal of Political Economy, 88, p. 298-307. 
16 Savignac Frédérique, « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes : Financement interne, prêt bancaire, ou capital-risque ? », Revue économique, 2007/4 Vol. 58, p. 866
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La problématique de l’equity gap 2. 
Des business angels au venture capital en passant par les aides étatiques, l’offre de financement semble très vaste. Cependant, on observe, notamment en France, un equity gap important. 
Figure 2 : sources de financement en fonction du cycle de vie des entreprises 
« En France, les business angels consentent des investissements qui vont habituellement de 5 000 à 500 000 euros (Ernst & Young, 2007). Près de 70 % des investissements demeurent inférieurs à 50 000 euros, alors que les montants requis pour créer une société innovante se situent en moyenne autour de 300 000 euros. Afin de se rapprocher de ces besoins de financement, l’investissement en pool (co-investissement) est désormais souvent pratiqué par les business angels mais il demeure éloigné de l’investissement moyen consenti en Europe (deux fois plus). […] De surcroît, le seuil à partir duquel interviennent les capitaux-risqueurs est de plus en plus élevé (1,5 à 2 millions d’euros) en Europe. Cette tendance accroît l’écart entre les premiers investissements ac- cessibles et le seuil en dessous duquel les capitaux-risqueurs n’investissent plus (equity gap). Cela rend plus complexe la recherche de capitaux pour la plupart des créateurs d’entreprise et met en évidence le rôle primor- dial que jouent les business angels. En France, la distribution des financements au stade de démarrage fait ap-
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paraître une plage particulièrement faible de financement pour les tranches de capitaux comprises entre 80 000 et 1 million d’euros. »17 
Ainsi, en Europe, et plus particulièrement en France, cet equity gap n’est pas comblé, ni par les business angels, ni par les sociétés de capital-risque. Ceci conduit à réduire « le vivier de projets à fort potentiel, la rentabilité et les chances de valorisation ultérieure de ces entreprises. »18 
Dans ce contexte, le crowdfunding, et plus particulièrement l’equity-based crowdfunding – la prise de participa- tion au capital d’entreprises par une « foule » d’internautes-investisseurs- est un phénomène qui explose. Il représente une nouvelle possibilité de trouver des financements ainsi qu’un moyen pour le citoyen de se réap- proprier son patrimoine et de se réconcilier avec l’économie locale. 
Le crowdfunding, le nouveau Graal du financement ? 3. 
Sébastien B., contributeur au site www.goodmorningcrowdfunding.com, propose une analyse de l’essor du crowdfunding qui nous semble réellement pertinente. 
Dans son article intitulé « Comment le crowdfunding va sauver l’économie française » il livre une vision dénuée de tout idéalisme : 
« Depuis les années 2005, les entrepreneurs et les politiques cherchent désespérément un nouveau souffle at- tendu qui résorbera la dette de la France, avec nos atouts et la recette qu’on ne demande qu’à appliquer : in- novation, dépôt de brevets, recherche et développement, création d’emploi, notamment au sein des PME, puis ré-industrialisation dans les grandes entreprises, et export de notre réussite à l’international. Pour passer de la théorie à la pratique, dans un monde bancaire et bientôt un monde tout-court « sans cash » hormis quelques pays qui ne connaissent pas la crise dans le monde, et qu’on compte sur le bout des doigts, d’où viendra l’argent nécessaire et la dynamique ? » 
« Il fallait l’inventer : le Graal dans cette équation complexe est le financement par la foule, le crowdfunding. 
17 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 
18 Ibid.
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En effet, le Crowdfunding palie à tous les inconvénients des financements « classiques » des banques et des investisseurs institutionnels en phase initiale d’amorçage ou de développement post recherche et développe- ment : 
• Manque de cash généralisé des banques et de l’état en soutien aux PME 
• Lenteur des banques sur le financement d’un projet 
• Prise de risque très réduite des banques dans les PME innovantes, sur des sujets difficiles, sans pouvoir mesurer l’appétence des futurs clients 
• Peu de cash chez les investisseurs français (« Venture Capitalists ») en phase post R&D, relativement à d’autres pays comme les USA. Les « VC » français sont « pauvres » comparés aux VC Américains ou Anglais. Alors que les français sont économes et épargnent. 
• Manque de « nez » des investisseurs. Combien d’investisseurs institutionnels se sont « trompés », n’ont pas compris un nouveau modèle, n’ont pas cru à une innovation ? L’intelligence collective a et aura toujours raison. Cent mille contributeurs volontaires auront raison contre un board de 5 investisseurs qui n’auront pas voté à l’unanimité sur un GO un lundi matin. Cent mille contributeurs, qui deviendront des clients de cette nou- velle startup, en parleront à des amis. 
• Inefficacité et inexistence des études de marché sur les inventions du futur : comment demander en effet, par exemple avant la création de Twitter, combien de personnes utiliseraient Internet pour s’envoyer des SMS et échanger des brèves de quelques mots dans le monde entier ? Avec quelle croissance ? Avec quel taux de pénétration ? Comment estimer, avant la création de Paypal, combien de personnes vont utiliser leur E-mail comme un numéro de compte bancaire et « recevoir de l’argent sur leur Email » ? » 19 
Le crowdfunding répondrait alors à toutes ces problématiques. Il redonne confiance en l’avenir aux entrepre- neurs, en leur offrant une nouvelle source de financement et un moyen de tester leurs idées et leurs produits auprès d’une communauté virtuelle. Il rassure les investisseurs en leur permettant de s’emparer de leur épargne pour financer des projets qui comptent pour eux. Le tout en tout anonymat, derrière leur écran d’ordinateur. 
19 Sebastien B. « Comment le crowdfunding va sauver l’Économie Française », goodmorningcrowdfunding.com [en ligne], 18 Avril 2014.
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Chapitre 2. Un manque dans la chaîne de financement des entreprises. 
Nous allons tenter de dresser une cartographie des acteurs du financement ainsi qu’une représentation du chemin que le créateur d’entreprise doit parcourir avant de « décoller ». Nous allons analyser dans quelles mesures le constat que nous venons de dresser peut être vérifié. Comment les acteurs du financement cohabi- tent-ils ? Pourquoi cet environnement est-il si peu lisible ? 
« Plus une entreprise est jeune, plus elle risque de mettre la clé sous la porte. Principale cause de défaillance? Le manque de financement. Pourtant, comme le démontre notre panorama, les solutions ne manquent pas. Et, bien utilisées, elles multiplient les chances de succès: " 86 % des entreprises aidées par Initiative France existent encore au bout de trois ans, contre 66 % pour celles qui ne sont pas soutenues ", estime ainsi Louis Schweitzer, le président de ce réseau de financement des créateurs et repreneurs. D'où l'importance que les entrepreneurs accordent à cette course au cash. »20 
Afin de se rendre compte du parcours du combattant que représente la création d’entreprise pour le futur chef d’entreprise, Antoine Vialle et Sophie Perot ont recensé toutes les sources de financement qui permettent de faire croître les jeunes pousses. Ils les ont matérialisés sur un plan de dix lignes de métro21 correspondant à différents types de financement : levée de fonds, incubateurs, prêts bancaires, fiscalité etc…22 
20 Adrien Guilleminot « Huit pistes pour le financement de sa création d'entreprise », Lentrepise.lexpress.fr [en ligne], 14 mai 2014. 
21 Voir ANNEXE 1. 
22 La Rédaction, « [Métro Startup] Les aides à la création sur un plan de métro ! », frenchweb.fr [en ligne], le 27 février 2012.
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Figure 3 : Détail du plan METRO STARTUP – Ligne de levée de fonds.
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22 
Cet agrandissement ne correspond qu’à un quart du plan total figurant en annexe. Pourtant nous voyons déjà la multitude d’offres et d’acteurs du financement. Nous allons donc nous concentrer sur trois entités bien an- crées dans l’écosystème qui interagissent entre elles : l’Etat, les fonds de capital-risque et les business angels. Nous laissons de côté le crowdfunding qui fera l’objet d’un chapitre à part. Le but est ici de dresser un pano- rama de l’environnement dans lequel les business angels s’inscrivent et dans lequel le financement participatif est né. 
Nous avons donc tenté de faire figurer sur la même page les différentes sources de financement, les sources de conseils et de support au développement, le niveau de maturité de l’entreprise et les montants levés. 
En s’appuyant sur le document intitulé « Guide des missions de l’expert-comptable en financement », produit par l’ordre des Expert-comptables23, nous avons élaboré la cartographie des acteurs du financement suivante : 
23 Guide des missions de l'Expert-Comptable en financement de l'entreprise, Ordre des Expert-comptables, octobre 2010.
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Figure 4 : cartographie des acteurs du financement en fonction du stade de développement de l’entreprise. 
Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity » -Sciences Po Aix-en-Provence.
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« Le capital de départ provient généralement des propres fonds de l’entrepreneur ou de son cercle familial, d’un prêt bancaire, ou de l’octroi d’aides publiques à la R&D. Le capital d’amorçage provient le plus souvent des business angels qui interviennent très en amont du processus de financement, permettant notamment aux créateurs de faire la preuve du concept technologique ou commercial. Il s’agit de personnes physiques qui investissent directement une part de leur patrimoine dans des entreprises innovantes, à travers plusieurs instru- ments de dette ou de fonds propres. Après une forte sélection des entreprises en phase de créa- tion/démarrage, leur intervention est souvent suivie d’un accompagnement où ils mettent à disposition leur expérience, leurs compétences stratégiques et leurs réseaux relationnels. De par leur double apport en compé- tence et en capital, leur plus faible aversion au risque et leur réactivité, ils sont des acteurs importants du finan- cement initial des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance. 
Le capital-risque prend des participations souvent minoritaires au capital d’entreprises déjà juridiquement cons- tituées et disposant d’un fort potentiel de croissance et de rentabilité, pour une durée généralement limitée à celle prévue pour la réussite du projet (trois à sept ans)(9). Ces investisseurs s’exposent aux risques de l’entreprise sans garanties, mais ils mutualisent ces risques au sein d’un fonds. Certains États compensent une part significative des pertes potentielles sous forme de déduction des pertes. Par la suite, les entreprises peu- vent faire appel à du capital-développement si besoin, en vue d’accélérer plus avant leur croissance interne ou externe. Une fois mature, l’acquisition, la transmission ou la cession de l’entreprise s’effectue via le capital- transmission ou leveraged buy-out (LBO), ou du capital-retournement en cas de difficulté. »24 
Nous allons approfondir le rôle de chacun des acteurs en partant des acteurs aux capacités d’investissement les plus importantes jusqu’aux « nouveaux » acteurs, finançant des montants plus modestes. Nous laissons sciem- ment de côté les Fonds divers et variés (fonds stratégiques d’investissement, fonds commun de placement à risque, etc.) qui sont des outils de financement complexes et hors du champ d’intervention des business angels ou du crowdequity. Nous nous appuierons sur l’article de Martin Kessler, « Comment financer l’innovation ? »25 tout au long de ce chapitre. L’auteur y rappelle notamment que le financement de l’innovation soulève les même problématiques que les autres types d’investissement « mais en étant à la fois accentuées et cumulées [Hall,2005]. En effet, l’activité de recherche et développement est plus incertaine. […]. L’information y est plus asymétrique […]. »26 
24 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 
25 Kessler Martin, « Comment financer l'innovation ? », Regards croisés sur l'économie, 2008/1 n° 3, p. 173-176. 
26 Op.cit., p.174
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25 
Il évoque les différents moyens pour un entrepreneur de lancer son projet. La solution de l’autofinancement est selon lui préférée par les entreprises innovantes. Les chiffres rapportés sont les suivants : « 30% des chefs d’entreprises innovantes déclarent ne pas pouvoir mener à bien leurs projets par manque d’accès à des capi- taux, et il apparait que 73,8% des dépenses de R&D réalisées par les entreprises de plus de 20 salariés sont autofinancées. »27. Ce qui pose évidemment le problème des structures de moins de vingt salariés qui sont en phase de lancement – et n’ont pas les fonds propres nécessaires pour s’autofinancer. 
Les acteurs traditionnels 1. 
a. L’Etat et les régions : entre soutien et complexité. 
Réservées aux demandeurs d'emploi, destinées à financer la recherche, nationale ou régionale... Il existe 6 000 types d'aides aux entreprises. Le tout est de dénicher celle qui correspond à son projet28 et de consacrer suffi- samment de temps à la constitution des dossiers de demande de subventions. 
Martin Kessler s’interroge alors sur la place de l’intervention publique. Celle-ci doit pouvoir contrer des « vides » dans la courbe de financement. En répartissant ses aides selon des critères objectifs, l’Etat doit pouvoir, en théo- rie, favoriser également toute les entreprises innovantes, petites ou grandes. 
Ceci pose deux problèmes. 
Le premier est que les entreprises innovantes ne sont pas sur un pied d’égalité en ce qui concerne la recherche de subventions. Nous l’avons vu, démarcher les acteurs du financement, explorer toutes les aides possibles et constituer des dossiers est extrêmement chronophage. Or dans les premiers mois de l’entreprise, le proverbe « le temps est de l’argent » prend tout son sens. Le temps consacré à la recherche de fonds est autant d’énergie qui n’est pas passée à développer l’innovation et la commercialisation des produits de l’entreprise. 
Le second est que « rien ne dit que l’Etat sera plus à même que les investisseurs de distinguer les bons projets des mauvais, ou ceux qui seraient financés autrement de ceux qui nécessitent réellement des fonds publics ».29 De plus, il est très difficile d’évaluer les effets que peuvent avoir ces aides. Elles peuvent tout aussi bien se tra- 
27 Ibid. 
28 Adrien Guilleminot , op.cit. 
29 Op.cit. p.176.
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duire par une « substitution totale »30 - un euro public conduit au retrait d’un euro privé – ou par des « effets d’entraînement » - un euro public conduit à l’ajout de n euros privés. 
L’auteur conclue sur ce type de soutien aux entreprises en nuançant son propos : « le financement public est nécessaire, mais il convient d’être attentif aux détails institutionnels et règlementaires régissant l’attribution des aides ».31 
L’Etat est ainsi impliqué dans la chaîne de financement des entreprises de son territoire mais navigue parfois à vue. La Banque Publique d’Investissement (BPI) en est l’exemple. C’est une sorte de « boîte à outils » qui permet à la fois de financer un actif immatériel, regarnir sa trésorerie, financer ses exportations ou même augmenter son capital... Son rôle majeur est celui de garant d’emprunts bancaires (à hauteur de 4,6 milliards d'euros en 2013), mais « l'organisme de financement public s'est vraiment déployé tous azimuts, du plus court terme aux prises de participation longue durée, des TPE aux mastodontes.»32 
b. Les sociétés de capital-risque : un fort potentiel d’investissement qui peut chambouler la gouver- nance de la startup. 
Lorsque que Martin Kessler s’attarde sur le capital-risque il parle d’une « intermédiation expérimentée »33. 
Pour rappel, les fonds de capital-risque – ou sociétés de capital-risque – financent des jeunes entreprises inno- vantes, les fameuses startups, qui n’ont pas encore accès aux marchés financiers et qui sont difficilement éli- gibles pour s’endetter auprès d’établissements bancaires traditionnels. 
Les venture capital se sont développées aux Etats-Unis durant l’année 1946. La plupart sont spécialisés en capi- tal-amorçage mais certaines se concentrent sur le capital retournement en s’intéressant uniquement aux entre- prises en difficulté. « La crise les a rendus sélectifs. Et prudents. " Les fonds d'investissement sont plus longs à se décider, et mettent davantage de garde-fous ", constate Guillaume-Olivier Doré, créateur d'Agregator Capital. Conséquence : plus personne n'investit seul, et la clé du succès est de savoir quand faire " rentrer " les plus gros investisseurs qui pourront prendre le relais à l'avenir. »34 
Leurs investissements sont considérés comme risqués mais le risque est maîtrisé. En effet, « les capital-risqueurs s’appuient sur leur expérience du secteur, leur implication dans le développement de l’entreprise (en particulier 
30 Ibid 
31 Ibid. 
32 Adrien Guilleminot op.cit. 
33 Kessler Martin, op.cit. p.175 
34 Adrien Guilleminot, op.cit.
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au niveau du Conseil d’administration, dont les droits de surveillance sont renforcés), sur des contrats financiers complexes, et surtout sur la facilité d’introduction des titres sur les marchés « publics ». Cette facilité permet aux investisseurs de vendre leurs parts de la firme sur le marché boursier pour réinvestir dans de nouvelles startups, ce cycle étant le principal moteur de l’innovation. »35 
Les Business angels ou les investisseurs-accompagnateurs. 2. 
a. La volonté de combler un manque dans la courbe du financement 
L’angelat n’est pas un phénomène nouveau. A l’instar des mécènes qui agissent dans la sphère culturelle, les business angels opèrent dans le monde économique. Ce sont des investisseurs personnes physiques qui inves- tissent leur propre patrimoine dans une entreprise innovante à fort potentiel. Ils sont généralement regroupés dans des réseaux afin de mutualiser leur expertise, leur réseau relationnel et leurs capacités de financement, bien que certains restent en dehors de ces « clubs ». La reconnaissance du rôle économique de ces réseaux et leur émergence date de 1958. En effet, le Small Business Investment Act est alors signé aux Etats-Unis et re- groupe des mesures fiscales attrayantes. Le législateur américain souhaitait inciter ces investisseurs à combler « l’equity gap », ce fossé entre la love money – somme d’argent que l’entreprise peut trouver auprès de ses amis, sa famille, etc – et les fonds dont elle a besoin pour se lancer ou se développer. 
Une étude commanditée par le Department of Commerce en 1986-88 et couvrant par sondage 240 000 entre- prises et près de 35 000 investisseurs, est probablement l’étude quantitative la plus solide statistiquement sur les Angels. Elle fait apparaître que dès 1988, il y avait 500 000 angels aux États-Unis, déversant environ 60 milliards de dollars annuellement sur les créations et démarrages d’entreprise, environ dix fois plus que le capital-risque de l’époque.36Ils sont donc loin d’être de nouveaux acteurs dans le paysage du financement. 
b. Historique et évolution des réseaux en France 
Si au Royaume-Unis on compte environ 40 000 business angels, aux Etats-Unis ils sont plus de 400 000 business angels recensés en tant qu’investisseurs qualifiés aujourd’hui. En France on estime leur nombre à 8 000 per- sonnes37. Au 31 décembre 2012, 4100 d’entre eux faisaient parties des 82 réseaux associatifs fédérés au sein de 
35 Op.cit. p.175. 
36 Robert J.Gaston et Sharon Bell, « The informal supply of capital » Applied Economic Group. 
37 Franceangels.org [En ligne]
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28 
France Angels, fédération des réseaux de business angels en France.38 Quatre ans après sa fondation, en 2005, 
seuls 38 réseaux étaient fédérés et 1 600 business angels en faisaient partie39. 
Concernant le nombre de dossiers financés, le nombre a augmenté exponentiellement : 160 en 2005, pour un 
montant global investi de 16 millions d’euros contre 327 en 2011, pour un montant global investi de 44,5 mil-lions 
d’euros. 
Le nombre de business angels, les montants investis et la force de financement des réseaux ont augmenté de 
façon conséquente, profitant notamment d’incitations fiscales et d’une situation économique clémente. Depuis 
2008, les indicateurs sont cependant redevenus pessimistes. BFM Business s’est associé avec France Angels pour 
produire un « baromètre des business angels » traduisant les grandes tendances des réseaux. 
Figure 5 : Evaluation de la situation des business angels au 2eme semestre 2013 
Source : Baromètre des business angels – BFM Business 2014 
Il s’avère que les business angels sont plus frileux dans leurs investissements, à la fois en termes de montants et 
de fréquence. Le nombre de membres augmente mais les montants de prise de participation stagnent. Cela 
signifie que l’intérêt de ces investisseurs pour l’accompagnement des jeunes entreprises reste inchangé. Ils con-tinuent 
de jouer un rôle de conseil mais limitent leur rôle économique. 
c. Qui sont-ils ? 
Jean Redis et Gilles Certhoux40, professeurs, signent un article41 synthétique dans lequel ils résument ce que sont 
fondamentalement les business angels. 
38 Franceangels.org [En ligne] 
39 Franceangels.org [En ligne]
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29 
« Dotés d'une expérience d'entrepreneurs ou de cadres dirigeants, les Business angels sont des investisseurs actifs prêts à s'impliquer auprès de l'entrepreneur. Ils investissent souvent sur un « coup de coeur », motivés par une volonté d'aider de jeunes entrepreneurs à réussir ou de participer à des aventures entrepreneuriales. Les Business angels se voient eux-mêmes davantage comme des co-entrepreneurs que comme que des investis- seurs.[…] Les business angels ont un degré d'aversion au risque plus faible que d'autres catégories d'investis- seurs : une majorité de leurs investissements s'effectue durant la phase d'amorçage des projets, qui est la plus risquée (75% de ces investissements ont constitué le premier apport en capital de ces entreprises, souvent pour financer les frais préalables à la mise sur le marché de leur premier produit ou service). Ils font preuve d'une capacité de décision rapide car ils investissent leur propre argent. Une relation directe va s'établir tout au long du processus d'investissement (depuis la présélection du dossier jusqu'à la sortie), de nature à créer un fort « intuitu personae » et donc un fort sentiment de confiance entre les Business angels et l'entrepreneur. » 
Dans leur recherche, les professeurs Redis et Certhoux citent les professeurs C. Munck et C. Saublens qui ont établis quels sont les quatre apports des business angels aux entreprises dans lesquelles ils prennent des parti- cipations. Ils les classent ainsi 42: 
- une aide pour surmonter leurs difficultés de financement : ils représentent souvent la première source de financement extérieur de l'entreprise, 
- une implication aux côtés de l'entrepreneur en le conseillant/coachant dans ses choix stratégiques et dans ses décisions de management, de gestion, de marketing et de développement commercial, 
- un apport de « capital social » permettant à l'entrepreneur d'avoir accès à leurs réseaux de contacts, 
- une capacité à faire obtenir aux entrepreneurs des financements complémentaires auprès des ICR in- vestisseurs en capital-risque et des banquiers car ils représentent une forme de « caution » : leur pré- sence au capital de l'entreprise rassure les autres financeurs sur le potentiel de développement de l'en- treprise. 
En un mot, le business angel est un « actionnaire-accompagnateur »43. Ce qui conduit Patrick Valéau à dire que les « Business angels ont un positionnement que l’on peut qualifier d’équitable, dans la mesure où il se situe 
40 Gilles Certhoux est Professeur à Audencia Nantes Ecole de Management, Membre fondateur de Ouest Angels. 
Jean Redis est Professeur associé à ESIEE Paris, Université Paris Est, Chaire transversale de recherche en Entrepreneuriat & Innovation CCIR, IRGO – Equipe Entrepreneuriat & Stratégie 
41 Gilles Certhoux et Jean Redis, « Business angels et acteurs du financement participatif : partenaires ou concurrents ? », 26 novembre 2013. 
42 Ibid. 
43 Gilles Certhoux et Emmanuel Zenou, « Gouvernance et dynamique de l'actionnariat en situation entrepreneuriale : le cas des business angels »
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entre un extrême affectif (celui des investisseurs parents ou amis) et un autre, beaucoup plus détaché et calcula- teur (celui des sociétés de capital-risque) ». 44 
En résumé, l’on peut affirmer que l’intervention des business angels constitue un soutien décisif pour le proces- sus de création de certaines entreprises, comme le montre le schéma suivant, issu d’un rapport d’Ernst&Young daté de 2007.45 
Figure 6 : Influence de l’action des business angels pour les bénéficiaires 
Source : Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNGS BAS 2007. 
d. La difficulté de se positionner face aux autres acteurs 
Pourtant les business angels eux-mêmes peinent à se positionner dans la chaîne du financement. La question du rôle économique de ces derniers est fondamentale. En effet, ces investisseurs-accompagnateurs sont venus combler un manque dans la courbe de financement de l’entreprise à fort potentiel. C’est donc un rôle primor- dial qui leur a été attribué mais il l’a été par défaut. Ils prennent des risques plus importants que des capital- risqueurs qui, eux, ont des fonds conséquents et vont pouvoir accuser le coup s’ils doivent faire face à la faillite de l’une de leurs participations. De plus, ils sont plus téméraires que les amis ou les familles des entrepreneurs puisqu’ils ne les connaissent pas personnellement et doivent appréhender une forte asymétrie de l’information. 
44 « Implication organisationnelle, anxiété et états affectifs au travail », Dans Revue internationale de psychologie sociale 2011/1 (Tome 24) Revue de l'Entrepreneuriat 2006/1 - Vol. 5 pages 13 à 29 
45 Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche – Evaluation de l’action des Buisiness Angels – ERNST&YOUNGS BAS 2007.
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Ils font donc partie intégrante de la chaîne de financement mais ils sont tour à tour décris comme amateurs puis comme professionnels, comme une alternative aux fonds de capital-risque puis comme acteurs traditionnels du financement. 
En se fédérant au niveau national, les quatre-vingt-deux réseaux gagnent en visibilité et en professionnalisme. Cependant la problématique reste entière : qui sont-ils ? Quel est leur positionnement stratégique ? 
C’est une définition toute relative qui peut répondre à cette interrogation. Ils viennent compléter l’offre des autres acteurs. Ils se définissent de façon négative (au sens premier du terme). Ils sont ce que les autres ne sont pas, dans un jeu de perception mouvant. Or le jeu du financement a été chamboulé dernièrement avec l’explosion du crowdfunding. Nous allons revenir plus en détail sur ce phénomène mais il convient de l’évoquer dès à présent pour comprendre le positionnement des business angels aujourd’hui. 
Le financement participatif est un mode de financement coopératif existant depuis toujours. Au même titre que les business angels seraient les nouveaux mécènes, le crowdfunding est une version 2.0 d’un phénomène an- cien. Nombre de projets ont été financés par ce biais, des représentations théâtrales à la construction de la statue de la liberté en 1885!46 Benjamin Wattine, fondateur de SoWeFund n’hésite d’ailleurs pas à le rappeler : « Ce qu’on oublie c’est que les business angels faisaient du crowdfunding bien avant que ce ne soit un effet de mode. Le mécénat, l’appel à la contribution de la foule pour financer du théâtre de rue, etc., tout cela existe depuis toujours. Ce qui change ici c’est l’internet et le nouveau 2.0. Ca a tout chamboulé. »47 
Comme nous l’avons déjà évoqué il existe plusieurs types de crowdfunding que nous aurons l’occasion de sur- voler et qui n’entrent pas en concurrence avec l’offre des business angels. Cependant, si nous nous concentrons sur le crowdequity, il y a une confrontation bien réelle. Ce « nouvel » acteur intervient sur des montants de financement à peu près équivalents – entre cent mille euros et un million d’euros- et dans des secteurs aussi divers que ce que font les business angels : écologie, sciences, technologies, services. Mais étant arrivé plus récemment dans l’écosystème, le crowdfunding a conduit les business angels à passer d’amateurs à profession- nels, par simple glissement sémantique. Selon Benjamin Wattine, « cela entraine d’ailleurs une sacrée opposi- tion entre acteurs traditionnels et nouveaux. L’un des côtés positifs de l’essor du crowdfunding auquel on ne s’attendait pas est la perception des business angels comme des acteurs traditionnels. Quand bien même ils ont longtemps été jugés comme les « petits nouveaux ». Le crowdfunding permet de professionnaliser les busi- ness angels en un sens. »48 
46 « The Statue of Liberty and America's crowdfunding pioneer, », www.bbc.com [en ligne] 24 April 2013 
47 Entretien Benjamin Wattine. Voir annexe. 
48 Entretien Benjamin Wattine. Voir annexe.
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La question du positionnement des business angels par rapport au financement participatif soulève d’ailleurs le débat au sein des réseaux. 
Les sept réseaux de business angels de la région PACA ont pour coutume de se réunir bi-annuellement pour partager deal flow (flux de projets), informations et idées. Lors de la session de janvier 2014, la question s’est posée de savoir quelle était la position des réseaux vis-à-vis du phénomène du financement participatif. Il en est ressorti que si France Angels souhaitait temporiser le débat le temps que soit précisé le projet de loi, le crow- dfunding était en tout état de cause un phénomène qu’il ne fallait pas ignorer. 
Certains réseaux considèrent qu’il faut le prendre en compte pour mieux le combattre en conservant une posi- tion claire et ferme. Les business angels ne devraient rien à voir à faire avec des plateformes de financement, qui ne sont ni plus ni moins que des startups dont on attend encore validation du business model. 
D’autres, moins tranchés, y voient un nouveau mode de financement parmi d’autres, qui a pour avantage de fédérer une communauté d’early adopters pour artistes ou créateurs de leur « petite entreprise » en mal de quelques milliers d’euros pour se lancer. Selon eux, le crowdfunding se limite aux dons et aux récompenses, éventuellement aux prêts, mais ne souffre pas la comparaison avec ce que font des business angels, « des vrais ». 
Les derniers, enfin, pensent que les plateformes peuvent apporter des compléments de financement pour des tours de tables qu’eux-mêmes organisent. Deux des sept réseaux ont d’ores et déjà signés des partenariats avec des plateformes de crowdequity, voire même déjà co-investis avec.49 
En conclusion de ce chapitre, nous pouvons dire qu’il y a une réelle zone grise dans le financement des jeunes entreprises qui se situe entre la phase de lancement et le stade des premiers succès. Les capitaux- risqueurs et les entités étatiques, malgré des forces de frappes conséquentes financièrement, ne parviennent pas à couvrir toute la chaîne de financement, en partie parce qu’ils ne le souhaitent pas. Face à l’importance de l’asymétrie d’information qui existe lors de l’early-stage d’une entreprise les capitaux-risqueurs ne prennent des risques que s’ils sentent poindre un potentiel énorme. Les entités publiques quant à elles, doivent encadrer strictement l’attribution des aides afin de limiter les pertes. Les business angels sont venus combler ce manque dans la chaine depuis la fin du siècle dernier. Ces investisseurs, personnes physiques, ont décidé de faire bouger les choses pour répondre aux vrais besoins des entrepreneurs. Perçus comme des amateurs et les « petits nou- veaux » ils ont mis du temps à prouver leur légitimité. Désormais, c’est le crowdfunding, et plus spécifiquement le crowdequity qui prend le relais dans ce rôle d’outsider. 
49 « Statement on Business angels and Equity Crowdfunding » BAE s, 29 Juillet 2013.
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Le crowdfunding arrive dans un contexte entrepreneurial relativement difficile. C’est un phénomène économique plein de promesses qui annonce une révolution dans le financement, un phénomène social qui assure que les internautes sont des business angels en puissance et qui devient, petit à petit, un phénomène politique dont s’empare la presse et le gouvernement qui le portent à bout de bras, tel un étendard moderne derrière lequel on se rassemble, derrière lequel on reprend confiance.
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Chapitre 3. L’explosion du crowdfunding : évolution ou révolution ? 
« Tout ce qui est nouveau dans l'univers de la finance brille comme l'or. L'or qui chatoie, les financements qui sourient, l'argent qui n'est pas qu'avidité voilà ce qu'épargnants comme emprunteurs, particuliers comme en- treprises, chacun attend et que les banques ne parviennent pas à fournir. Il y a un vide. Il se comble. L'économie est comme la nature. Le crowdfunding est une des réponses à ces manques. 50 – Pascal Ordonneau 
typologie du crowdfunding 1. 
Le financement participatif offre un large panel de possibilités pour financer des projets. Nous les confondons souvent car toutes ces options sont regroupées sous le terme générique de « crowdfunding » mais il convient de bien les distinguer pour mieux les comprendre51. 
Figure 7 : Les principales formes de financement en fonction de la complexité des process. 
Source : Hermer et al. (2011a). 
On classifie traditionnellement le crowdfunding en quatre grandes catégories : 
o donation (don simple): l’internaute donne gracieusement une somme d’argent pour soutenir un projet. On retrouve cette pratique principalement dans le domaine culturel ou humanitaire. 
50 Pascal Ordonneau, « Crowdfunding: Finance émotionnelle ou rationnelle? », lesechos.fr [en ligne] le 29 mai 2014. 
51 Joachim Hemer « A Snapshot on Crowdfunding » Working Papers Firms and Region No. R2/2011.
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o reward-based (don contre récompense): l’internaute soutient un projet et reçoit une contrepartie. Il peut, par exemple, acheter par avance l’album d’un chanteur pour lui permettre d’en financer l’enregistrement. Le système de récompense n’est pas figé et dépend du projet et de celui qui en est à l’origine. Un lien de confiance s’établit entre l’internaute et son « poulain » puisque rien ne contraint ce- lui qui lève des fonds à tenir sa parole et à récompenser effectivement ses donateurs. 
o Lending (prêt): il existe deux types de prêts : le prêt entre particuliers et le prêt aux entreprises. Les prêts peuvent être fait gratuitement ou rapporter des intérêts, toujours inférieurs aux taux pratiqués par les établissements bancaires. 
o Equity based (par souscription d’actions) : les internautes investissent une somme d’argent au capital des entreprises en espérant recevoir des dividendes et/ou être associés à la plus-value faite lors de la revente de l’entreprise. Ce modèle est plus complexe que les trois autres. En effet il a des implications juridiques et financières beaucoup plus lourdes. D’autre part, les retours potentiels sur investissement se font sur du long-terme. Nous l’avons déjà précisé en introduction, c’est cette branche du crowdfun- ding à laquelle nous nous intéresserons tout au long de cette recherche. 
Caractéristiques du crowdfunding 2. 
Le crowdequity ne fait l’objet de recherches que depuis récemment, étant donné qu’il ne représentait qu’une petite part du marché. Nous allons donc nous inspirer de recherches ayant été menées sur le non- equity crowdfunding (reward based et donation) afin de comprendre les caractéristiques principales du phéno- mène. Nous allons faire un état des lieux de ce que nous savons déjà sur le crowdfunding, grâce aux recherches antérieures, avant d’aller plus loin dans la réflexion sur le crowdequity.52 
1. L’investissement n’est pas déterminé géographiquement. Quand Sellaband, une plateforme de partage de musique fondée en 2006 à Amsterdam a ouvert son capital, 86% des fonds prove- naient d’investisseurs basés à plus de 96 kilomètres du siège social. La distance moyenne entre les créateurs et les investisseurs était même de 4 800 kilomètres (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). 
2. Investir est hautement biaisé : sur la même plateforme, alors que 61% des créateurs n’ont pas ré- ussi à lever de l’argent, 0,7% d’entre eux comptabilisent plus de 73% des fonds levés entre 2006 et 
52 Ajay Agrawal, Christian Catalini, & Avi Goldfarb, « Some Simple Economics of Crowdfunding », University of Toronto, Rotman School of Management , June 1, 2013.
Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 
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2009. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). Par exemple sur Kickstarter : 1% des projets repré- sentent 36% des fonds levés et 10% représente 63%. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2013). 
3. La propension à investir dans un projet augmente avec l’accumulation de capital. Sur Sellaband, sur une semaine donnée, les investisseurs étaient deux fois plus enclins à investir dans des projets ayant atteint 80% de leur objectif de levée de fonds, par rapport aux projets ayant atteint 20%. L’accélération est particulièrement forte à la fin de la campagne de levée de fonds. Dans le même temps, les projets qui lèvent rapidement des fonds au départ observent un ralentissement au mi- lieu du processus par un effet d’attentisme de la part des internautes-investisseurs. C'est-à-dire qu’il y a une réduction de la propension à investir de la part de nouveaux investisseurs qui ont l’impression que l’objectif de levée de fonds va être atteint de toute façon. (Kuppuswamy and Bayus, 2013). 
4. L’investissement financier de la part des amis et de la famille joue un rôle clé durant les débuts de la campagne. Les amis et la famille investissent de façon disproportionnée dans les premières phases de la campagne et envoient de fait un signal positif aux futurs investisseurs qui ont plus confiance dans le projet (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). 
5. Les investisseurs et les créateurs sont par nature trop optimistes à propos des résultats. Sur Sella- band, après que les premiers artistes financés échouèrent à envoyer les récompenses promises aux investisseurs, ceux-ci révisèrent leur attentes à la baisse. 
De même, Kickstarter a dû durcir ses règles de fonctionnement suite à de nombreux retards dans la livraison de produits préachetés ou des récompenses promises par les créateurs. Dans les catégories technologie et design, la plateforme estime que plus de 50% des produits sont livrés en retard (Mollick, 2013). 
6. Le crowdfunding en capital peut se substituer aux sources traditionnelles de financement telles que les prêts, l’appel au capital familial ou à la love money. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2013).
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Le marché du crowdfunding 3. 
« Seul 20 % des français connaissent le crowdfunding aujourd’hui. On estime l’épargne des français à 100 mil- liards. Imaginez ce qu’il reste à faire. » - Leguideducrowdfunding.com 
a. Marché mondial 
Le marché mondial du crowdfunding est en plein essor. Les prévisions de Forbes concernant ce marché sont très optimistes : le crowdfunding représenterait un potentiel de 1000 milliards de dollars en 202053. 
Figure 8 : Evolution du marché du crowdfunding depuis 2011. 
Source : Smartangels.com 
D’après un rapport Massolution, ce dispositif a dégagé 2,7 milliards de dollars (2,06 milliards d’euros) cette année, soit une hausse de 81 % par rapport à 2011, au bénéfice de 1,1 million de projets financés en 2012 (+81% par rapport à 2011). Ces informations ont été collectées sur les 308 plateformes de financement partici- patif présentes dans le monde. 
Toujours suivant l’institut Massolution, les Etats-Unis sont géographiquement les leaders dans le financement participatif avec plus de 59% des sommes levées au niveau mondial, alors que l’Europe représente 35%. Les taux de progression sont également largement en faveur des Etats-Unis qui ont connu une croissance de 105% alors que l’Europe progressait « seulement » de 65% Dans les différentes formes que prend le financement participatif, le don est la plus importante avec 1,4 milliards de dollars suivi par le prêt qui représente 1,2 mil- 
53 «What's In Store For Crowdfunding And Angel Investors », forbes.com [en ligne], 31 décembre 2012.
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liards, concentrés dans les pays anglo-saxons (Etats-Unis et Royaume-Uni). Le financement en equity ne repré- sente quant à lui que 116 millions de dollars54. 
Par ailleurs, le nombre estimé de sites dédiés au financement participatif était de 283 en 2010, 434 en 2011 et 536 en 2012. En 2012 toujours, la répartition des financements en fonction du type des projets s’est fait de la façon suivante : 
Figure 9 : répartition du marché du crowdfunding par type de projet. 
Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity » -Sciences Po Aix-en-Provence. 
Nous l’avons vu, le marché du crowdfunding peut être segmenté par catégories (reward-based, don, equity- based, lending). On peut en déduire le schéma suivant : 
Figure 10 : Evolution des fonds collectés en fonction du type de financement participatif 
Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014 
54 « Les chiffres du crowdfunding », leguideducrowdfunding.com [en ligne]
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i. Le segment « donation » représente 37% du marché pour un volume de 980 millions USD. Soit +45% par rapport à 2011. 
ii. Le segment « Lending » représente 44% du marché pour un volume de 1,2 milliards USD. Soit +111% par rapport à 2011. 
iii. Le segment « Rewards » est la branche qui présente la plus forte croissance. Il représente 14% du mar- ché pour un volume de 383 millions USD. Soit +527% par rapport à 2011. 
iv. Le segment « Equity » représente quant à lui seulement 4,3% du marché pour un volume de 115 mil- liards USD. Soit +30% par rapport à 2011. Il est le seul segment comparable avec l’action des business angels, à la fois dans les montants levés et dans l’implication financière des internautes. Nous voyons ici qu’il s’agit d’une portion minime du marché du crowdfunding et il faut en relativiser la croissance, de 30%/an par rapport aux autres segments, notamment « Rewards » et « Lending » qui présentent res- pectivement une croissance de 527% et de 111% par rapport à l’année 2011. 
b. Marché français 
Le marché français du crowdfunding est en plein essor. Nous allons analyser rapidement les évolutions du marché, toutes catégories de financement participatif confondues puis nous nous concentrerons sur les plateformes spéciali- sées dans le crowdequity. 
En 2012, 25 millions d’euros ont été investis sur les plate- formes françaises, selon le baromètre de l’association Financement Participatif France réalisé auprès de 20 plate- formes en activité55. 
En 2013, le montant était de 65 millions soit une augmen- tation de 160%56 par rapport à l’année précédente. Mais 
55 Premier baromètre du crowdfunding en France – fonds collectés par les plateformes de crowdfunding. financeparticipa- tive.org [en ligne], octobre 2010. 
56 Aude Fredouelle, « 2013 Année de l'explosion du crowdfunding en France », JDN.fr [en ligne], Janvier 2014. 
Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity» -Sciences Po Aix-en-Provence. 
Figure 11 : montants investis en France dans le crowdequity depuis 2012. (En Mds d’€]
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selon l’étude Forbes57, le crowdfunding pourrait peser jusqu’à 6 milliards de dollars en 2020 en France. 
Nicolas Guillaume, fondateur de FriendsClear, premier service de prêt participatif en France, propose une typo- logie du crowdfunding selon deux types d’implication de l’utilisateur58 : 
- Implication projet : l’internaute choisit un projet pour ses caractéristiques intrinsèques. Il n’y a aucune considération financière qui entre en ligne de compte. Il va d’abord s’intéresser au type de projet, à la personne qui le porte, à la localisation géographique, etc. 
- Implication financière : « L'utilisateur a la possibilité d'exercer son choix afin de se constituer un porte- feuille de projets (d'actifs) ayant les caractéristiques financières (risque, rendement) recherchées. Il peut exercer ses facultés pour identifier et exploiter les critères qui lui permettront de sélectionner les actifs aux meilleures performances. »59 
Dans la catégorie des plateformes de financement offrant une « implication projet » forte, les principales plate- formes françaises sont60 : 
i. Ulule et ses 7,5 millions d’euros investis en 2013 auprès de 148000 contributeurs, au profit de 2 138 projets (soit 62% des projets présentés sur la plateforme). 
ii. Kisskissbankbank, qui a permis de récolter 8 millions d’euros, contre 3 millions entre 2010 et 2012. Le site annonce une communauté de 214 000 Kissbankers dans 174 pays et plus de 5500 projets financés. 
iii. Babyloan finance uniquement des projets portés par des micro-entrepreneurs dans les pays en déve- loppement. 2,224 millions de prêts ont aidés 16 000 entrepreneurs en 2013. 
iv. Prêt d’union est quant à lui leader français du crédit rémunéré entre particuliers. 11 millions d’euros en 2012 ont été prêtés, 43 millions en 2013 et 100 millions d’euros sont budgétés pour 201461. 
v. La dernière-née des plateformes de prêts solidaires entre particuliers est Hellomerci, lancée par les créateurs de Kisskissbankbank en avril 2013. 36 projets ont été financés sur 1434 projets déposés en ligne. 
Après avoir eu une vision globale du marché du crowdfunding en France, laissons de côté le crowdfunding « par récompense », « par donation » et par « prêt » afin de nous concentrer sur le crowdfunding « par acquisi- tion d’actions » - ou crowdequity. 
57 « 2013: What's In Store For Crowdfunding And Angel Investors », Forbes.com [en ligne], 31 décembre 2012. 
58 Nicolas Guillaume, « Typologie du financement participatif », nicolasguillaume.typepad.fr [en ligne], 01 août 2011 
59 Ibid. 
60 Aude Fredouelle, « 2013 Année de l'explosion du crowdfunding en France », JDN.fr [en ligne], Janvier 2014. 
61 Les crédits oscillent entre 3 000 euros, montant minimum, et 30 000 euros, montant maximum. Côté prêteurs, le plus petit montant prêté en 2013 s'élève à 1 000 euros. Le plus gros montant... à deux millions d'euros
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Intéressons-nous donc plus précisément à la catégorie des plateformes offrant une « implication financière » forte à leurs internautes. Elles proposent uniquement aux internautes-investisseurs de prendre des parts ou des actions au capital d’entreprises à fort potentiel de croissance. 
 Smart Angels a permis à douze entreprises de lever 3,9 millions d’euros en 2013. Elle fonctionne comme un intermédiaire financier : elle propose des dossiers d’investissements et fait le suivi de la le- vée de fonds, dont le montant est compris en moyenne entre 300 k€ et 500k€ euros. Entre cinq et qua- rante investisseurs se sont réunis pour financer ces projets. 
 Anaxago permet aux internautes de devenir actionnaires d’une startup à partir de 1000 euros. 11 en- treprises ont été aidées en 2013 grâce aux 2,4 millions d’euros levés auprès de 321 investisseurs. 
 Wiseed propose un ticket d’entrée plus faible puisqu’il est de 100 euros. Sur mille dossiers déposés en ligne, 14 dossiers ont été proposé au financement et 11 ont finalisé leur tour de table, soit un montant cumulé de 3,6 millions d’euros en 2013 grâce à 21 000 investisseurs. 
 Particeep est l’une des dernières plateformes de crowdequity lancée. Le ticket minimum est de 1 000 euros. Trois entreprises ont bouclé leur tour de table entre juin et décembre 2013, soit 340 000 euros. 
 Sowefund, la dernière des plateformes de crowdfunding par actions en est actuellement à la version bêta de son site. 
Pour clore ce chapitre, résumons-le : le crowdfunding en tant qu’adage « les petites rivières font les grands fleuves » existe depuis toujours mais son acception moderne s’est développée depuis une dizaine d’années avec l’explosion des NTIC. Le phénomène intéresse de plus en plus car il représente un potentiel de transaction conséquent – un milliard de dollars. Cependant la branche qui nous intéresse, le crowdequity, présente une croissance plus timide. Il faut donc relativiser, pour le moment, l’impact que le crowdequity peut avoir sur les autres acteurs de l’écosystème. 
Concernant cette première partie nous pouvons déjà tirer les conclusions de notre première hypo- thèse : 
Il y a une méconnaissance des citoyens vis-à-vis des acteurs du financement et entre ces acteurs eux-mêmes. 
Le crowdfunding est un phénomène qui peut rapidement devenir fourre-tout si on ne s’arrête pas un instant sur sa typologie. Au vu des articles de presse dont nous nous sommes inspirés dans cette première partie, il y a souvent des confusions que nous avons voulu éclaircir. Ces confusions impliquent que le phénomène n’est pas entièrement compris et comporte des zones d’ombre qui empêchent d’avoir un avis neutre sur le sujet. Entre confiance sans borne et méfiance irrationnelle il faut ouvrir une nouvelle voie.
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PARTIE 2. LE CROWDEQUITY : ENTRE ESPÉRANCE ET SUSPICION
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Chapitre 4. Crowdequity et angélat en France : entre confiance et défiance mutuelle. 
Après avoir participé à une table-ronde62 faisant intervenir business angels et avocat du droit des af- faires, il nous semble que ce qui agite l’écosystème du financement n’est pas tant le phénomène du crowdequi- ty lui-même, plein de promesses mais bien son application concrète par les plateformes. 
Nous n’aurons de cesse de le répéter, ces sites de mise en relation entre porteur de projet et internaute- investisseur sont avant tout des sociétés commerciales qui ont pour vocation de dégager du profit. Rien de mal à cela, au contraire.il s’agit simplement de ramener ce phénomène dans le monde réel, bien loin du feu média- tique qui éblouit, voire aveugle. 
Pour les réseaux de business angels les plus ouverts au concept de crowdequity, le propos n’est pas de re- mettre en cause les fondements même de l’économie collaborative et dématérialisée mais bien de choisir les plateformes qui respectent une certaine éthique et leur travail63. 
Dans ce chapitre nous nous intéresserons aux principales plateformes de crowdequity en France. Nous verrons à la fois quels sont les business models qu’elles adoptent et comment s’organise leur processus de levée de fonds. Puis nous nous intéresserons au positionnement des business angels vis-à-vis d’elles ainsi que les parte- nariats envisagés (ou non). Cet état des lieux nous permettra de mieux comprendre l’écosystème du crowdequi- ty français, les critiques qu’il soulève et les craintes qu’il génère, notamment pour les business angels. 
Comprendre le fonctionnement des plateformes de crowdequity : différents business 1. models. 
a. Fonctionnement du processus de levée de fonds 
Globalement, le processus de levée de fonds est identique pour toutes les plateformes de crowdequity. 
Nous pouvons le schématiser comme suit (modèle de Wiseed): 
62 Conférence « Crowdfunding : enjeux et opportunités », CEEI Aix-en-Provence, le 17 juin 2014. 
63 Michel Vacher, Président d’Alumni Business angels. Allocution lors de la conférence « Crowdfunding : enjeux et opportu- nités », CEEI Aix-en-Provence, le 17 juin 2014.
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Figure 12 : Processus de levée de fonds sur la plateforme Wiseed. 
Source : www.wiseed.fr 
1. processus de sélection 
N’importe quel porteur de projet ayant une société déjà constituée a la possibilité de déposer son projet une plateforme. La sélection se fait sur les documents fournis, en mêlant des critères objectifs de rentabilité finan- cière et de probabilité de réussite, mais également sur l’attractivité du projet. 
Un aspect très intéressant du crowdfunding est le fait que la sélection des projets qui seront proposés à l’investissement se faire par scoring, c’est-à-dire par la notation que réalisent des internautes-investisseurs qui sont enregistrés sur la plateforme. 
Certains réseaux de business angels, tels qu’Alumni Business angels à Aix-en-Provence, pratique ce mode de sélection en interne mais uniquement pour réaliser une pré-selection des dossiers qui pourront faire l’objet d’une présentation en plénière (réunion mensuelle d’examen de projets). A l’échelle d’une plateforme et de centaines d’internautes-investisseurs, cela permet une sélection relativement fine des projets qui « valent le coup ».
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2. processus de souscription 
La souscription se fait durant un temps variable qui est généralement compris entre un et trois mois. Une « jauge » permet de matérialiser l’avancement d’une levée de fonds. Les plateformes transfèrent les fonds sur un compte de réserve tout au long de la durée de la souscription. Le principe généralement appliqué est celui du « tout ou rien ». Si le porteur de projet arrive à lever la totalité des fonds recherchés alors il peut encaisser la somme. A l’inverse, si la levée échoue, les internautes-investisseurs récupèrent leur mise. 
3. processus de closing 
Le processus de closing est identique pour les business angels et les plateformes. En effet, il répond à des impé- ratifs juridiques. 
La signature du pacte d’associé permet de préciser les règles de gouvernance de la startup, la valorisation à laquelle elle est évaluée, les liens qui lient les actionnaires avec la startup, etc. 
4. processus de gestion post-closing 
Le « suivi » de la participation est un concept très vague et dépend de l’implication des actionnaires dans la stratégie de la startup. 
Dans le cas des business angels, le suivi se fait de manière assidue. Nous seulement, ils sont des interlocuteurs de premier plan pour des chefs d’entreprise parfois dépassés par les évènements. Ils sont aussi à même d’organiser des levées de fonds complémentaires au fil des ans, soit pour donner un coup de pouce à une entreprise en mal de trésorerie, soit pour encourager une réussite qui dépasse les attentes. 
La sortie d’une société se fait entre cinq et sept ans mais peut être beaucoup plus longue. Elle se fait soit par vente de la startup, soit par son entrée en bourse, soit par le rachat des parts des actionnaires par la startup, soit par « le bas de bilan », c’est-à-dire par faillite. En France, il n’y a eu, pour le moment, qu’une sortie réussie en crowdequity : Antabio chez Wiseed.
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Figure 13 : Processus de levée de fonds du projet Antabio chez Wiseed. 
Source : www.wiseed.fr 
C’est la campagne « idéale » : deux mois de campagne, 300k€ levés, 207 internautes-investisseurs pour un retour sur investissement de 44%., C’est aussi la seule sortie réalisée après une campagne de crowdfunding, ce qui limite fortement les conclusions que l’on peut tirer. 
b. Business models français 
Les business angels sont bien conscients que l’issue de leurs investissements est très incertaine car elle dépend du chef d’entreprise, de sa stratégie, de son marché, etc. Autant de données exogènes qu’ils ne maitrisent pas et qui évoluent rapidement. 
Les plateformes ne peuvent prétendre avoir trouvé le modèle éliminant tous ces facteurs d’incertitudes. Ainsi elles ont développé des business models divers et variés afin de tenter de trouver le plus viable, comme le montre le tableau ci-dessous.
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Figure 14 : benchmarking des plateformes françaises de crowdequity. 
Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014
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Laurent Javaudin, business angels, dans un travail réalisé pour France Angels, classe les principales plateformes selon deux modèles d’affaires. 
Figure 15 : Deux modèles de plateformes de crowdequity 
Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014 
Le modèle « Historique » est le premier à avoir été développé. Il crée un système de financement paral- lèle et alternatif aux acteurs traditionnels du financement, type business angels. Les internautes-investisseurs investissent directement dans des startups sélectionnées par les plateformes qui jouent les intermédiaires. La sélection des projets se fait grâce à la notation faite par les internautes. La due diligence est menée par les fon- dateurs des plateformes et leurs équipes. Ce ne sont pour la plupart pas des professionnels de l’investissement mais bien des chefs d’entreprises. Cela ne remet pas en question leurs compétences en matière de création d’entreprise mais peut soulever quelques interrogations concernant leur capacité à juger de la pertinence d’un projet et de son porteur. 
Le modèle « Triangulation » prend en considération les autres acteurs du financement et s’appuient sur eux notamment pour la due diligence. Sowefund, par exemple, une des dernières plateformes misent sur le marché, ne propose que des projets déjà investis par des réseaux de business angels à ses internautes-investisseurs. Cela permet théoriquement d’assurer une qualité de projets supérieure. Cependant, nous y reviendrons, cela pose un certain nombre de problèmes aux business angels qui voient leur responsabilité engagée en ce qui concerne la sélection des projets. 
Il nous semble à titre personnel, que ce modèle est le plus fiable. A moins que le modèle « Historique » ne se professionnalise et ne s’enrichisse d’un processus de due diligence solide.
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Les Business angels font-ils confiance au crowdfunding ? 2. 
Malgré ces quelques interrogations que nous venons de soulever, les acteurs du crowdfunding restent sus- ceptibles de jouer, à côté des Business angels, un rôle significatif dans le financement de l'amorçage. On pour- rait imaginer des formes d'association entre des Business angels et des plateformes d'equity crowdfunding afin de boucler des tours de table importants que les Business angels ne pourraient réaliser seuls. Une condition nécessaire à la bonne marche de cette collaboration serait de mettre en place un co-accompagnement des projets financés à la fois par les Business angels et par le crowdfunding depuis la sélection des dossiers jusqu'à la sortie.64 
a. pourquoi la question se pose-t-elle ? 
Laurent Javaudin, de nouveau, liste les raisons pour lesquelles des partenariats seraient les bienvenus. 65 
i. Côté business angels 
Dimension stratégique 
- drainer de l’épargne nationale vers des pro- jets locaux 
- faire du co-investissement et augmenter ainsi le nombre de dossiers investis 
- créer des vocations, développer un réservoir de futurs business angels et démocratiser l’equity en mode « freemium ». 
- tester les opportunités de marché d’un pro- jet. Ceci principalement pour les projets en BtoB. Cette difficulté rencontrée par les busi- ness angels a été mis en exergue par Ernst&Young dans le cadre d’un rapport pour le Ministère de l’Enseignement Supé- 
rieur et de la Recherche66, dont est extrait le graphique ci-contre. 
64 Joachim Hemer, « A Snapshot on Crowdfunding. » Working Papers Firms and Region No. R2/2011 P.28 
65 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 
66 Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche – Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNG 2007. 
Source : Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNG 2007. 
Figure 16 : principales contraintes exprimés pars les BAs dans le cadre de leur activité.
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Dimension financière : 
- boucler des tours de table lors de levées de fonds en amorçage 
- permettre de financer des sociétés en phase de croissance nécessitant des fonds plus conséquents 
- amplifier l’effet de levier que les business angels sont capables de générer 
- nouvelle exit strategy partielle ? (« mini IPO ») 
ii. Côté plateformes 
- assurer la due diligence des projets 
- assurer le suivi des participations 
- donner un caractère professionnel à leur action 
- intégrer des tours de tables plus importants que ce qu’elles ne pourraient faire seules 
b. points sensibles 
La réflexion de France Angels sur la question du crowdfunding est très intéressante. Certes on peut lui repro- cher d’être orientée vers la préservation des intérêts des business angels. Mais cela est compréhensible et son approche a le mérite d’être claire.67 
Laurent Javaudin envisage quatre points « sensibles » qui viennent apaiser l’engouement qui peut exister autour de partenariats éventuels. 
i. Deux ADN très différents 
La crainte des business angels vis-à-vis le phénomène du crowdfunding provient entre autre d’une différence profonde de valeurs et d’objectifs. Les réseaux de business angels n’ont pas pour but de faire du profit mais de mutualiser des compétences et d’aider à la sélection des projets. Les business angels personnes privées, eux, cherchent à obtenir un retour sur investissement mais savent que ce ne sera pas toujours le cas. Les plate- formes, quant à elle, cherchent à optimiser leur rentabilité, ce qui est tout à fait louable en tant qu’entreprises commerciales. 
67 Ibid.
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Figure 17 : ADN des Business Angels et du Financement participatif. 
Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 
Le schéma ci-dessus reprend les éléments qui composent intrinsèquement ce que sont les business angels et les plateformes de financement participatif. 
L’apport que nous pourrions faire à ce modèle est le suivant : nous sommes convaincus que les créateurs de plateformes ont sincèrement envie de participer à la construction d’une économie collaborative et humaine. Certes l’activité de leurs plateformes est principalement commerciale mais leur volonté est bien de s’inscrire dans l’ère du temps et de faire émerger de beaux projets. 
En cela les créateurs de plateformes, les internautes-investisseurs et les business angels sont très proches. Et c’est d’ailleurs pour cela que la question des partenariats se pose à ce jour. 
La vraie différence réside dans l’accompagnement des chefs d’entreprise. Les plateformes sélectionnent des projets, les business angels les accompagnent. C’est un aspect des réseaux de business angels qui est souvent oublié et pourtant central dans leur fonctionnement. Après la sélection du dossier, des business angels « par- rains » ou « instructeurs », selon la terminologie des réseaux, rencontrent le porteur de projet, instruisent le dossier, font en sorte de comprendre le projet et éventuellement d’aider le chef d’entreprise à le re-calibrer pour qu’il soit le plus viable possible.
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Cet accompagnement est entièrement bénévole, permet de créer du lien avec le chef d’entreprise mais surtout permet d’avoir une connaissance approfondie du dossier. 
ii. Enjeu de confidentialité et de protection industrielle 
A partir de l’instant où un chef d’entreprise décide de mettre son projet en ligne et de le rendre publique, la question de la propriété industrielle et intellectuelle se pose automatiquement. En effet, le dépôt de brevet pour une technologie implique que cette technologie doit être nouvelle et novatrice. Or une technologie n’est plus nouvelle si elle est diffusée sur Internet pendant plusieurs semaines. 
Pour une startup BtoC, « la campagne de crowdfunding a des externalités positives non négligeables : étude de marché et campagne de communication »68 sont assurées. 
Cependant, pour une startup BtoB, il faut se garder de réveiller la concurrence des grands groupes, et des plus petits, qui ont suffisamment de fonds pour s’emparer de son projet. 
iii. Vers la formation d’une pyramide de Ponzi ? 
Une des craintes de la fédération France Angels est le risque de formation d’un système de Ponzi69. 
« En toute rigueur, le montant prélevé par la plateforme lors de la levée de fond devrait être provisionné et consommé par tranches sur cinq ou six ans pour assurer un accompagnement de qualité de la startup. 
En fait, il est probable que les fonds prélevés sur les deals les plus récents viennent financer l’accompagnement des opérations plus anciennes, ce qui induit un risque classique de type « démographique », de nature à re- mettre en question la continuité de l’accompagnement en cas de contraction forte du dealflow futur. »70 
iv. Risque de biais type « US sub-primes » 
Un dernier point soulevé par Laurent Javaudin est le risque de biais « psychologique ». « A court-terme, plus la plateforme fournit des deals à ses inscrits, plus elle perçoit de commissions sur les levées de fond effectuées. 
68 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 
69 L’argent des derniers entrants rémunérant les souscripteurs plus anciens, pour maintenir l’illusion de rendements miri- fiques. 
70 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014
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  • 2. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 2 UNIVERSITÉ PAUL CÉZANNE – AIX-MARSEILLE II INSTITUT D’ÉTUDES POLITIQUES d’AIX MÉMOIRE en vue de l’obtention du Master MIS parcours MGE Sciences Po Aix en Provence Peut-on faire confiance au crowdequity ? Par Elodie MANTHÉ Soutenu le 3 septembre 2014
  • 3. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 3 Les opinions émises dans ce document n'engagent que son auteur. L'Institut d'Etudes Politiques d'Aix-en- Provence ne saurait en aucun cas être tenu responsable du contenu du présent document Nous attestons que dans ce texte toute affirmation qui n'est pas le fruit de notre réflexion personnelle est attri- buée à sa source et que tout passage recopié d'une autre source est en outre placé entre guillemets, et cité en référence. Elodie Manthé, Aix-en-Provence le 30 juillet 2014.
  • 4. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 4 Résumé Le crowdfunding, ou financement par la foule, s’est développé aux Etats-Unis au début des années 2000 notamment grâce à des plateformes de financement d’artistes (comme MyMajorCompagny). Le crow- dequity est le dernier développement en date de cette tendance. Cette forme de financement participatif per- met d’investir dans des entreprises (PME et startups), et en échange, d’obtenir des actions de celles- ci. L’equity crowdfunding permet aux investisseurs particuliers et professionnels de devenir actionnaires de startup et PME en croissance. En France et en Europe, le crowdequity est aujourd’hui au coeur d’une réflexion réglementaire, économique, politique et sociétale sur laquelle nous souhaitons nous pencher ici. A l’heure où la France se met au rythme du crowdfunding, en voulant devenir la « Startup République » et en démontant le monopole bancaire, il est temps de s’arrêter un instant sur ce phénomène. Le crowdequity se positionne comme un concurrent direct des acteurs traditionnels du financement que sont notamment les busi- ness angels. Ce nouvel acteur chamboule le paysage du financement en France pourtant nous le connaissons très mal. Il convient alors de se poser la question : peut-on faire confiance au crowdequity ? Mots-clés Crowdfunding ; crowdequity ; financement participatif ; business angels ; finance entrepreneuriale ; confiance ; « internaute-investisseur » ; NTIC ; investissement ; equity-based crowdfunding ; equity gap ; règlementation ; levée de fonds.
  • 5. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 5 Remerciements Je souhaiterais remercier Michel Vacher, président du réseau Alumni Business Angels qui a toujours montré un intérêt sincère à l’avancée de mon travail. Je le remercie par ailleurs pour la confiance qu’il a su me porter et pour m’avoir toujours considérée comme son égale. Merci aux membres du réseau Alumni pour leur accueil, leur gentillesse et leur bienveillance. Je tente l’exercice périlleux de les citer car j’en oublie forcément : Julia Santi, Tünde Amphoux, Philippe Domini, Jean-François Lucas, Marie-Christine Pessiot, Denis Garnier, Pascale Bruyat, Régine Lorenzi, Didier Avé, Olivier Plotton, Renaud Vincent… Merci à Benjamin Bréhin et Arnaud Longueville de France Angels pour leur accueil toujours chaleureux et leur disponibilité. A Jean-Patrice Anciaux pour m’avoir orientée dans mes recherches. Merci au Professeur Jean Redis et à Benjamin Wattine pour s’être prêtés au jeu de l’interview. Merci à mon tuteur, Florian Paris, pour les encouragements et les petits articles glanés au gré de ses lectures venus enrichir mon travail. Merci à mes camarades et amis de ce master MGE 2014 qui ont toujours eu le mot pour rire ou pour motiver, en cette dernière année dans les murs de Sciences po, riche en émotions et en défis : Nicolas de Chalonge, Léo Carpentier, Robin Legrand, Victor Estrade mais surtout Coline Piveteau. Enfin merci à vous, lecteurs, en espérant que ce travail viendra enrichir votre propre réflexion sur le sujet.
  • 6. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 6 Sommaire Avant-propos .................................................................................................................................................................................... 7 Introduction ........................................................................................................................................................................................ 8 PARTIE 1. REDONNER CONFIANCE AUX ENTREPRENEURS ET AUX INVESTISSEURS ................................................... 13 Chapitre 1 – Constat ..................................................................................................................................................................... 14 Chapitre 2. Un manque dans la chaîne de financement des entreprises. ..................................................................... 20 Chapitre 3. L’explosion du crowdfunding : évolution ou révolution ? ........................................................................... 34 PARTIE 2. LE CROWDEQUITY : ENTRE ESPÉRANCE ET SUSPICION .................................................................................... 42 Chapitre 4. Crowdequity et angélat en France : entre confiance et défiance mutuelle. ......................................... 43 Chapitre 5. L’espoir de faire de la France la Startup République. ................................................................................... 56 Chapitre 6. Donner sa confiance à une foule d’investisseurs ou à une foule sentimentale ? ................................. 64 PARTIE 3. PRÉCONISATIONS ET LEÇONS MUTUELLES. .......................................................................................................... 80 Chapitre 7. Challenges .................................................................................................................................................................. 81 Chapitre 8. Préconisations. .......................................................................................................................................................... 88
  • 7. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 7 Avant-propos Ce présent mémoire s’adresse à un public large, d’initiés ou d’amateurs. Ainsi le vocabulaire employé sera tech- nique mais toutes les expressions, abréviations et sigles seront explicités et annotés. Lors de la rédaction de ce document il est apparu qu’il était extrêmement difficile d’avoir du recul sur le phé- nomène du crowdfunding, d’autant plus en France où il fait ne fait l’objet d’une couverture médiatique que depuis quelques mois. Ce sujet est hautement d’actualité et rend ardue l’analyse. Bien que celle proposée ici soit la plus neutre possible, le lecteur doit garder en tête que l’éclairage de ce sujet dépend, en partie, des convictions de chacun. L’objet de ce mémoire est bien de donner une vision d’ensemble du contexte dans lequel le phénomène du financement participatif s’épanouie et de la façon dont les acteurs du financement interagissent entre eux.
  • 8. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 8 Introduction Rappels 1. La plateforme de financement participatif Ulule propose une définition simple de ce qu’est le crowdfunding (ou financement participatif) : « il désigne l’application d’une méthode de financement d’un projet par la mise en commun d’une multitude d’apports individuels. » Avec la généralisation et la démocratisation des NTIC il y a eu un engouement considérable autour de ce mode de financement. Les particuliers, depuis leur ordinateur, sont désormais impliqués pleinement dans la microéconomie. Ils ont accès à des blogs, des sites web, des fo- rums sur lesquels des entrepreneurs partagent leurs ambitions et leurs projets. Ce mode de financement per- met de faire interagir un nombre suffisamment grand d’investisseurs pour minimiser le risque au maximum. Le modèle permet de s’affranchir en partie des procédures de demandes subventions et de financements exté- rieurs. Un des plus célèbres exemples de crowdfunding est la dernière campagne de Barak Obama aux USA, financée par le grand public à hauteur de 150 millions de dollars. Le don moyen était de 80 dollars par personne et le paiement s’est fait principalement par le biais du site de campagne du démocrate. L’idée était d’impliquer les citoyens dans cette campagne présidentielle. De faire en sorte que la victoire de leur candidat soit également la leur en les impliquant financièrement. Le crowdfunding permet de créer un lien direct entre le financement accordé et le projet financé. C’est aux Etats-Unis que l’on a vu apparaitre les premières plateformes, au début des années 2000 avec des sites comme ArtistShare en 2003, Indiegogo en 2008 ou encore Kickstarter, la plus connue, en avril 2009. De- puis les années 2010 on a vu apparaitre des plateformes dites de crowdequity. C’est-à-dire de financement par prise de participation au capital de sociétés. Le phénomène n’est donc pas nouveau mais a pris une toute autre ampleur ces dernières années grâce au développement d’Internet et des réseaux sociaux. Jusqu’à présent, les acteurs traditionnels du financement d’entreprise évoluaient dans l’écosystème sans entrer en concurrence car ils n’ont pas les mêmes capacités d’investissement : sociétés de capital-risque, fonds d’investissement, entités publiques et business angels. Or nous allons voir qu’avec l’arrivée du crowdequity, c’est un concurrent direct des réseaux de business angels qui prend place et qui impose un changement de règle. C’est pour cette raison que ce mémoire ne traitera pas uniquement du crowdequity en tant que phénomène mais bien du crowdequity en tant que nouvel acteur dans un écosystème déjà en place, qui présente déjà des
  • 9. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 9 règles du jeu et des concurrents. C’est l’interaction avec les business angels notamment qui nous permettra de donner un éclairage, que nous espérons original, au sujet. Design de la recherche 2. Au cours de ce présent mémoire nous nous concentrerons sur cette branche de crowdfunding qu’est le crowdequity, bien que nous verrons qu’il en existe d’autres formes et qu’elles sont éclairantes pour com- prendre le phénomène dans sa globalité. Nous nous limiterons également au territoire français. Des benchmarks avec des pays anglo-saxons et euro- péens viendront cependant enrichir notre réflexion. Cette recherche n’a pas pour ambition de donner un avis arrêté sur le phénomène du crowdequity mais bien de développer des pistes de réflexion et de soulever un certain nombre de problématiques qui vont de pair avec l’explosion de ce phénomène. Le recul manque pour prétendre savoir comment va évoluer le crowdfun- ding en général. Ainsi nous ne donnerons que des pistes concernant les concernant les conditions sous les- quelles nous pouvons faire confiance au financement participatif. Afin de construire cette réflexion nous avons confrontés des articles de recherches et des articles d’actualité. Les changements règlementaires ayant eu lieu lors de l’année 2014 ont conduit à l’écriture de centaines d’articles de presse sur le sujet, plus ou moins documentés. Il a été parfois compliqué de faire la part des choses alors que nous étions plongés dans l’actualité, toujours en mouvement. Ainsi au cours de nos lectures liminaires nous avons isolés des hypothèses qui seront nos fils conducteurs pour cette recherche. Hypothèses de recherche Nous avons établi quatre hypothèses de recherche : 1. Il y a une méconnaissance des citoyens vis-à-vis des acteurs du financement et entre ces acteurs eux- mêmes. 2. Les acteurs traditionnels du financement, tels que les réseaux de business angels, se méfient de l’explosion du phénomène de crowdfunding et craignent un effet de mode.
  • 10. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 10 3. Ce n’est pas la « foule » qui finance mais bien une multitude d’individus indépendants. Si cette foule n’est en réalité qu’un agrégat d’individus aptes à investir leur propre patrimoine alors la définition de « crowdequity » doit être revue pour se rapprocher de la réalité. 4. Il y a une complémentarité dans l’expertise et l’accompagnement de la startup entre business angels et crowdfunding, sous certaines conditions. La notion de confiance 3. Ce qui est formidable dans le crowdfunding, en général – dans le crowdequity en particulier- c’est que tout le système repose sur la notion de confiance. Aussi incroyable que cela puisse paraître, quasiment aucun garde- fou n’existe. En financement participatif « traditionnel » - je donne et je reçois éventuellement une récompense pour mon geste – quasiment rien n’oblige le porteur du projet à tenir sa parole et à remplir les engagements pris, en envoyant les récompenses promises. En equity il est certes possible de faire pression sur l’entrepreneur car l’internaute-investisseur est présent au capital de la société mais il possède un poids tout à fait relatif dans les prises de décisions importantes. Andrew Maxwell a montré qu’un cercle vertueux fondé sur la confiance et la fiabilité peut et doit se mettre en place entre investisseurs et entrepreneurs pour que leur relation soit saine. Selon son modèle, c’est la confiance qui implique la fiabilité. Le biais psychologique qui veut que l’on souhaite « bien faire » lorsque l’on nous fait confiance conduit à l’instauration d’un système vertueux et viable. Chacun y trouve son compte. La confiance est alors efficiente pour les deux parties. Figure 1 : Cercle vertueux de confiance et de fiabilité entre investisseurs et entrepreneurs. Source : Andrew Maxwell, Business Angel Decision Making, Canada, 2011
  • 11. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 11 Pour le moment, la confiance règne. Pour l’instant il n’y a pas de grain de sable dans la machine qui se met en place. Mais pour combien de temps ? Bien sur la confiance est au coeur de beaucoup de choses : la finance, la politique, l’économie…Mais nous avons vu que c’est un concept fragile à la base d’un équilibre pré- caire. La bulle Internet de 2000 et la crise des subprimes en sont des témoins plus que fiables. Les plateformes ne peuvent assurer à 100% de trouver toutes les tentatives de fraudes. Beaucoup de critiques ont d’ailleurs émergées de la campagne Healbe GoBe,1 un appareil portable qui prétendait mesurer automati- quement apport calorique, niveau d'hydratation, et autre niveau de stress de ses usagers. Les spécialistes sont sceptiques quant au projet, mais cela ne l'aura pas empêché de récolter près d'un million de dollars de fonds en crowdfunding. Sans compter avec le fait que la société derrière le projet, prétendument basée à San Francisco, se trouve exploitée depuis Moscou.2 La plateforme américaine Kickstarter a une position claire sur ce point, ses conditions d'usage stipulant que « la société ne peut garantir l'authenticité de toutes les données ou informations que les utilisateurs fournissent eux- mêmes ou via leurs campagnes et projets », ni même l'identité des usagers avec lesquels on serait amené à interagir sur le site. 3 Julien Helmlinger, journaliste chez ActuaLitté dénonce d’ailleurs un « revirement sur la plateforme Indiegogo, qui considère la notion de « confiance » comme l'un des trois piliers fondamentaux de l'amélioration de l'expé- rience de ses usagers. Une intention louable, mais encore faut-il être en mesure de pouvoir justifier cette con- fiance. Tandis que le site promettait jusqu'à lors de déceler tous les cas de fraude parmi les projets qu'il hé- berge, celui-ci a changé la clause au cours d'une nuit [du 3 avril 2014]. »4 La phrase a donc simplement été modifiée, passant de « All campaigns and contributions go through a fraud review, which allows us to catch any and all cases of fraud » à « Campaigns and contributions that have been flagged by our fraud detection system go through a thorough review ». Une modification qui peut paraître anodine mais qui, en réalité, change tout pour les centaines de personnes ayant investi dans des projets fraudu- leux comme Healbe.5 1 James Robinson, « Refund demands flood in as Healbe’s Indiegogo scampaign enters final days », pando.com [en ligne], 7 avril 2014. 2 Ibid 3 Julien Helmlinger, « La notion de confiance, pilier bancal du financement participative », actualitte.com [en ligne], 7 avril 2014. 4 Ibid. 5 http://www.goodmorningcrowdfunding.com/indiegogo-se-defile-face-aux-fraudeurs/Indiegogo se défile face aux frau- deurs
  • 12. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 12 On peut en conclure que « si les plateformes de crowdfunding servent d'intermédiaire visant à mettre en rela- tion des fondateurs de projets et leurs financeurs potentiels, mais qu'au final elles déclinent toute responsabilité juridique, le plus grand risque de la pratique résiderait donc dans le faux sentiment de sécurité qu'elles inspi- rent. »6 Dans le cas du crowdequity, l’encadrement juridique est en train de se mettre en place suite à une volonté affi- ché du gouvernement de s’emparer du phénomène. La question se pose alors : peut-on faire confiance au crowdequity ? Si oui, à quelles conditions ? Si non, que pouvons-nous prédire de l’évolution du crowdfunding ? Nous analyserons dans un premier temps le contexte dans lequel le crowdfunding – et le crowdequity - est arrivé en France. Dans un climat économique et entrepreuneurial qui semble morose, le crowdfunding se posi- tionne comme le nouveau « graal » du financement, chamboulant les positions bien établies des acteurs tradi- tionnels du financement d’entreprise. Puis nous verrons que la France et les acteurs de cet écosystème “startups” oscillent entre suscpition et espérance envers ce phénomène. Entre refonte de la règlementation bancaire pour favoriser le crowdequity et méfiance de certains acteurs, tels que les business angels, le crowdequity ne fait pas tout à fait l’unanimité car il soulève quantité de questions. Les conditions de succès du crowdequity et d’une collaboration entre plateformes de financement participatif et business angels existent. Restent à savoir si elles seront appliquées, et comment elles le seront. Cette projection fera l’objet d’une dernière partie, récapitulant nos préconisations. 6 Ibid.
  • 13. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 13 PARTIE 1. REDONNER CONFIANCE AUX ENTREPRENEURS ET AUX INVESTISSEURS
  • 14. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 14 Chapitre 1 – Constat Une volonté d’entreprendre largement limitée 1. Au deuxième trimestre 2013, les startups françaises ont levé 487 millions d’euros selon le baromètre du capital risque7 français du cabinet EY (anciennement Ernst&Young)8. La France représente à elle seule 16% du montant levé par les entreprises européennes. Elle se positionne sur la troisième marche du podium des pays de l’Union Européenne qui ont le plus investis dans leurs entreprises au cours de cette période.9 Cependant, « en France, et en général en Europe, on observe un retard dans les financements véritablement ciblés sur l’investissement d’amorçage et le monitoring des entreprises innovantes. Dans le cas français, la struc- ture d’investissement directe et indirecte (via des fonds) est très déséquilibrée : le faible nombre d’investisseurs directs au stade très précoce réduit le vivier de projets à fort potentiel, la rentabilité et les chances de valorisa- tion ultérieure de ces entreprises. Les fonds spécialisés de capital-risque ne se substituent pas à ce maillon manquant et desservent très peu les phases préliminaires. »10 Or l’innovation est primordiale pour rendre un pays compétitif. « Pour des économies matures, qui ont épuisé le moteur du rattrapage, la créativité dans le domaine des produits et services est un élément décisif de la compé- titivité. Un tel objectif suppose que l’innovation soit en partie animée par de nouvelles entreprises entrantes. Et, « nombre d’analystes s’accordent pour reconnaître que la structure de la grande entreprise n’est pas toujours la plus favorable à l’innovation de rupture (Christensen, 1997 ; Baumol, 2001).»11 Une multitude d’acteurs - des réseaux d’investisseurs comme les business angels, des plateformes de crow- dfunding, des entités étatiques comme la BPI France ou des fonds de capital-risque composent la chaîne du financement. Et pourtant les entreprises innovantes peinent à se financer. Il y aurait près de mille deux-cents aides12 à la création innovante en France. Ce sont des subventions, des aides régionales, des prêts d’honneur, 7 Le baromètre du capital risque France recense les opérations de financement en fonds propres des entreprises en phase de création ou en phase dite d’amorçage. 8 Aude Fredouelle, JDN.fr [en ligne]. 9 Après l’Allemagne et le Royaume-Uni. 10 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 11 Ibid. 12 La Rédaction, « [Métro Startup] Les aides à la création sur un plan de métro ! », frenchweb.fr [en ligne], le 27 février 2012
  • 15. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 15 des aides de pépinières ou d’incubateurs. Et pourtant, des entrepreneurs se voient encore bloquées dans leur développement, notamment car les investisseurs ont du mal à faire confiance dans cette phase dite d’« early- stage ». « Les contraintes financières des entreprises innovantes en phase de création sont d’une intensité particulière compte tenu de l’asymétrie d’information entre l’investisseur et l’entrepreneur. L’accès restreint aux finance- ments externes provient en premier lieu de la difficulté à évaluer le marché futur des entreprises innovantes, l’entrepreneur disposant d’une meilleure vision prospective de son entreprise qu’un bailleur de fonds extérieur. La proportion élevée d’actifs intangibles mis en jeu dans le processus d’innovation aggrave cette asymétrie d’information. Cette difficulté entraîne des coûts importants d’assurance ou de contractualisation. En second lieu, le caractère différé du retour sur investissement, d’autant plus marqué que l’apport de fonds se produit à un stade précoce du projet, crée une restriction. Celle-ci est enfin accentuée par la faiblesse des collatéraux pour le financeur, notamment en cas de projets à forte teneur immatérielle, ce qui exclut largement le recours à la dette bancaire ».13 Les flux trésoriers et financiers sont au coeur du développement et de la vie de la startup. Dans cette phase, ses besoins de financement varient de quelques milliers d’euros à plusieurs centaines de milliers d’euros. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette première phase de financement, sollicitant moins d’un million et demi d’euros environ, est la plus difficile à dépasser. En effet, la commercialisation n’est pas encore débutée ou vient à peine de démarrer. Le chiffre d’affaire n’est pas révélateur de la potentialité de l’entreprise. Si elle repose sur une innovation de rupture, on ne peut savoir comment le marché va l’accueillir. La difficulté pour trouver des financements afin de continuer l’aventure est immense : prêter à ces jeunes pousses est souvent trop risqué pour des établissements bancaires traditionnels, le capital-risque ne s’intéresse qu’aux entreprises déjà lancées et prometteuses, le financement interne reste une option mais les moyens viennent souvent à manquer. C’est sur cette question que s’interroge Frédérique Savignac dans son article « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes »14. Elle y explique que le fort potentiel de croissance de ces entreprises inno- vantes ne compense pas le risque élevé qu’elles représentent. Là se trouve le défi majeur des startups, « leur statut d’entreprise en création, associé au caractère innovant de leur projet, renforce les traditionnels problèmes d’asymétrie d’information avec les apporteurs de financement externes (Hall [2002], Belin et al.[2003])15. En 13 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 14 Savignac Frédérique, « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes » Financement interne, prêt bancaire, ou capital-risque ?, Revue économique, 2007/4 Vol. 58, p. 863-889. 15 Les références citées par l’auteur dans le texte sont : BELIN J., CARO J.-Y, GUILLE M et LUBOCHINSKY C. [2003], « Innovation technologique et systèmes financiers », rapport pour la Fondation Banque de France.
  • 16. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 16 particulier, les bailleurs de fonds ne possèdent pas ou peu de bilans passés qui les informent sur la performance de l’entreprise. En outre, le contenu innovant du projet nécessite une expertise technique afin d’évaluer le risque de l’investissement. Enfin, l’importance relative des actifs immatériels ne permet pas toujours aux banques de disposer de garanties nécessaires à l’attribution d’un prêt (Jacquin [2003]).» C’est pourquoi, explique-t-elle, la phase de création de l’entreprise et celle qui approche de la pénétration du marché est la plus difficile à financer via du prêt bancaire. On parle de la phase « d’amorçage ». Durant celle-ci, les entreprises ne peuvent techniquement pas fournir des garanties suffisantes et leur chiffre d’affaire, s’il y en a déjà un, n’est pas encore significatif. Les jeunes pousses se tournent alors vers des investisseurs externes qui sont pour la plupart des sociétés de capital-risque. Le risque pour l’entrepreneur de se tourner vers ce type d’acteurs est de voir les règles de gouvernance de sa société complètement chamboulées. La société de capital-risque cherche en effet une rentabilité maximale pour ses investissements afin de compenser la prise de risque inhérente aux montants investis et à la faible maturité de la société ciblée. « L’attribution de droits de contrôle permet à la société de capital-risque d’intervenir dans la gestion de l’entreprise et ainsi de favoriser le remplacement du fondateur de l’entreprise si ses performances sont jugées insuffisantes »16 Le startuper se retrouve alors face à un dilemme : ne pas trouver les fonds suffisants pour le développement de sa structure ou bien risquer d’en perdre la gouvernance. L’aventure entrepreneuriale est déjà périlleuse avant même d’aborder la question de la recherche de financements. Nous allons voir qu’elle devient une mission quasi impossible quand on rajoute ce facteur. HALL B. [2002], « Agency problems and the theory of the firms, Journal of Political Economy, 88, p. 298-307. 16 Savignac Frédérique, « Quel mode de financement pour les jeunes entreprises innovantes : Financement interne, prêt bancaire, ou capital-risque ? », Revue économique, 2007/4 Vol. 58, p. 866
  • 17. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 17 La problématique de l’equity gap 2. Des business angels au venture capital en passant par les aides étatiques, l’offre de financement semble très vaste. Cependant, on observe, notamment en France, un equity gap important. Figure 2 : sources de financement en fonction du cycle de vie des entreprises « En France, les business angels consentent des investissements qui vont habituellement de 5 000 à 500 000 euros (Ernst & Young, 2007). Près de 70 % des investissements demeurent inférieurs à 50 000 euros, alors que les montants requis pour créer une société innovante se situent en moyenne autour de 300 000 euros. Afin de se rapprocher de ces besoins de financement, l’investissement en pool (co-investissement) est désormais souvent pratiqué par les business angels mais il demeure éloigné de l’investissement moyen consenti en Europe (deux fois plus). […] De surcroît, le seuil à partir duquel interviennent les capitaux-risqueurs est de plus en plus élevé (1,5 à 2 millions d’euros) en Europe. Cette tendance accroît l’écart entre les premiers investissements ac- cessibles et le seuil en dessous duquel les capitaux-risqueurs n’investissent plus (equity gap). Cela rend plus complexe la recherche de capitaux pour la plupart des créateurs d’entreprise et met en évidence le rôle primor- dial que jouent les business angels. En France, la distribution des financements au stade de démarrage fait ap-
  • 18. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 18 paraître une plage particulièrement faible de financement pour les tranches de capitaux comprises entre 80 000 et 1 million d’euros. »17 Ainsi, en Europe, et plus particulièrement en France, cet equity gap n’est pas comblé, ni par les business angels, ni par les sociétés de capital-risque. Ceci conduit à réduire « le vivier de projets à fort potentiel, la rentabilité et les chances de valorisation ultérieure de ces entreprises. »18 Dans ce contexte, le crowdfunding, et plus particulièrement l’equity-based crowdfunding – la prise de participa- tion au capital d’entreprises par une « foule » d’internautes-investisseurs- est un phénomène qui explose. Il représente une nouvelle possibilité de trouver des financements ainsi qu’un moyen pour le citoyen de se réap- proprier son patrimoine et de se réconcilier avec l’économie locale. Le crowdfunding, le nouveau Graal du financement ? 3. Sébastien B., contributeur au site www.goodmorningcrowdfunding.com, propose une analyse de l’essor du crowdfunding qui nous semble réellement pertinente. Dans son article intitulé « Comment le crowdfunding va sauver l’économie française » il livre une vision dénuée de tout idéalisme : « Depuis les années 2005, les entrepreneurs et les politiques cherchent désespérément un nouveau souffle at- tendu qui résorbera la dette de la France, avec nos atouts et la recette qu’on ne demande qu’à appliquer : in- novation, dépôt de brevets, recherche et développement, création d’emploi, notamment au sein des PME, puis ré-industrialisation dans les grandes entreprises, et export de notre réussite à l’international. Pour passer de la théorie à la pratique, dans un monde bancaire et bientôt un monde tout-court « sans cash » hormis quelques pays qui ne connaissent pas la crise dans le monde, et qu’on compte sur le bout des doigts, d’où viendra l’argent nécessaire et la dynamique ? » « Il fallait l’inventer : le Graal dans cette équation complexe est le financement par la foule, le crowdfunding. 17 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 18 Ibid.
  • 19. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 19 En effet, le Crowdfunding palie à tous les inconvénients des financements « classiques » des banques et des investisseurs institutionnels en phase initiale d’amorçage ou de développement post recherche et développe- ment : • Manque de cash généralisé des banques et de l’état en soutien aux PME • Lenteur des banques sur le financement d’un projet • Prise de risque très réduite des banques dans les PME innovantes, sur des sujets difficiles, sans pouvoir mesurer l’appétence des futurs clients • Peu de cash chez les investisseurs français (« Venture Capitalists ») en phase post R&D, relativement à d’autres pays comme les USA. Les « VC » français sont « pauvres » comparés aux VC Américains ou Anglais. Alors que les français sont économes et épargnent. • Manque de « nez » des investisseurs. Combien d’investisseurs institutionnels se sont « trompés », n’ont pas compris un nouveau modèle, n’ont pas cru à une innovation ? L’intelligence collective a et aura toujours raison. Cent mille contributeurs volontaires auront raison contre un board de 5 investisseurs qui n’auront pas voté à l’unanimité sur un GO un lundi matin. Cent mille contributeurs, qui deviendront des clients de cette nou- velle startup, en parleront à des amis. • Inefficacité et inexistence des études de marché sur les inventions du futur : comment demander en effet, par exemple avant la création de Twitter, combien de personnes utiliseraient Internet pour s’envoyer des SMS et échanger des brèves de quelques mots dans le monde entier ? Avec quelle croissance ? Avec quel taux de pénétration ? Comment estimer, avant la création de Paypal, combien de personnes vont utiliser leur E-mail comme un numéro de compte bancaire et « recevoir de l’argent sur leur Email » ? » 19 Le crowdfunding répondrait alors à toutes ces problématiques. Il redonne confiance en l’avenir aux entrepre- neurs, en leur offrant une nouvelle source de financement et un moyen de tester leurs idées et leurs produits auprès d’une communauté virtuelle. Il rassure les investisseurs en leur permettant de s’emparer de leur épargne pour financer des projets qui comptent pour eux. Le tout en tout anonymat, derrière leur écran d’ordinateur. 19 Sebastien B. « Comment le crowdfunding va sauver l’Économie Française », goodmorningcrowdfunding.com [en ligne], 18 Avril 2014.
  • 20. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 20 Chapitre 2. Un manque dans la chaîne de financement des entreprises. Nous allons tenter de dresser une cartographie des acteurs du financement ainsi qu’une représentation du chemin que le créateur d’entreprise doit parcourir avant de « décoller ». Nous allons analyser dans quelles mesures le constat que nous venons de dresser peut être vérifié. Comment les acteurs du financement cohabi- tent-ils ? Pourquoi cet environnement est-il si peu lisible ? « Plus une entreprise est jeune, plus elle risque de mettre la clé sous la porte. Principale cause de défaillance? Le manque de financement. Pourtant, comme le démontre notre panorama, les solutions ne manquent pas. Et, bien utilisées, elles multiplient les chances de succès: " 86 % des entreprises aidées par Initiative France existent encore au bout de trois ans, contre 66 % pour celles qui ne sont pas soutenues ", estime ainsi Louis Schweitzer, le président de ce réseau de financement des créateurs et repreneurs. D'où l'importance que les entrepreneurs accordent à cette course au cash. »20 Afin de se rendre compte du parcours du combattant que représente la création d’entreprise pour le futur chef d’entreprise, Antoine Vialle et Sophie Perot ont recensé toutes les sources de financement qui permettent de faire croître les jeunes pousses. Ils les ont matérialisés sur un plan de dix lignes de métro21 correspondant à différents types de financement : levée de fonds, incubateurs, prêts bancaires, fiscalité etc…22 20 Adrien Guilleminot « Huit pistes pour le financement de sa création d'entreprise », Lentrepise.lexpress.fr [en ligne], 14 mai 2014. 21 Voir ANNEXE 1. 22 La Rédaction, « [Métro Startup] Les aides à la création sur un plan de métro ! », frenchweb.fr [en ligne], le 27 février 2012.
  • 21. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 21 Figure 3 : Détail du plan METRO STARTUP – Ligne de levée de fonds.
  • 22. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 22 Cet agrandissement ne correspond qu’à un quart du plan total figurant en annexe. Pourtant nous voyons déjà la multitude d’offres et d’acteurs du financement. Nous allons donc nous concentrer sur trois entités bien an- crées dans l’écosystème qui interagissent entre elles : l’Etat, les fonds de capital-risque et les business angels. Nous laissons de côté le crowdfunding qui fera l’objet d’un chapitre à part. Le but est ici de dresser un pano- rama de l’environnement dans lequel les business angels s’inscrivent et dans lequel le financement participatif est né. Nous avons donc tenté de faire figurer sur la même page les différentes sources de financement, les sources de conseils et de support au développement, le niveau de maturité de l’entreprise et les montants levés. En s’appuyant sur le document intitulé « Guide des missions de l’expert-comptable en financement », produit par l’ordre des Expert-comptables23, nous avons élaboré la cartographie des acteurs du financement suivante : 23 Guide des missions de l'Expert-Comptable en financement de l'entreprise, Ordre des Expert-comptables, octobre 2010.
  • 23. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 23 Figure 4 : cartographie des acteurs du financement en fonction du stade de développement de l’entreprise. Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity » -Sciences Po Aix-en-Provence.
  • 24. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 24 « Le capital de départ provient généralement des propres fonds de l’entrepreneur ou de son cercle familial, d’un prêt bancaire, ou de l’octroi d’aides publiques à la R&D. Le capital d’amorçage provient le plus souvent des business angels qui interviennent très en amont du processus de financement, permettant notamment aux créateurs de faire la preuve du concept technologique ou commercial. Il s’agit de personnes physiques qui investissent directement une part de leur patrimoine dans des entreprises innovantes, à travers plusieurs instru- ments de dette ou de fonds propres. Après une forte sélection des entreprises en phase de créa- tion/démarrage, leur intervention est souvent suivie d’un accompagnement où ils mettent à disposition leur expérience, leurs compétences stratégiques et leurs réseaux relationnels. De par leur double apport en compé- tence et en capital, leur plus faible aversion au risque et leur réactivité, ils sont des acteurs importants du finan- cement initial des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance. Le capital-risque prend des participations souvent minoritaires au capital d’entreprises déjà juridiquement cons- tituées et disposant d’un fort potentiel de croissance et de rentabilité, pour une durée généralement limitée à celle prévue pour la réussite du projet (trois à sept ans)(9). Ces investisseurs s’exposent aux risques de l’entreprise sans garanties, mais ils mutualisent ces risques au sein d’un fonds. Certains États compensent une part significative des pertes potentielles sous forme de déduction des pertes. Par la suite, les entreprises peu- vent faire appel à du capital-développement si besoin, en vue d’accélérer plus avant leur croissance interne ou externe. Une fois mature, l’acquisition, la transmission ou la cession de l’entreprise s’effectue via le capital- transmission ou leveraged buy-out (LBO), ou du capital-retournement en cas de difficulté. »24 Nous allons approfondir le rôle de chacun des acteurs en partant des acteurs aux capacités d’investissement les plus importantes jusqu’aux « nouveaux » acteurs, finançant des montants plus modestes. Nous laissons sciem- ment de côté les Fonds divers et variés (fonds stratégiques d’investissement, fonds commun de placement à risque, etc.) qui sont des outils de financement complexes et hors du champ d’intervention des business angels ou du crowdequity. Nous nous appuierons sur l’article de Martin Kessler, « Comment financer l’innovation ? »25 tout au long de ce chapitre. L’auteur y rappelle notamment que le financement de l’innovation soulève les même problématiques que les autres types d’investissement « mais en étant à la fois accentuées et cumulées [Hall,2005]. En effet, l’activité de recherche et développement est plus incertaine. […]. L’information y est plus asymétrique […]. »26 24 « Business angels et capital-risque en France : les enjeux fiscaux », La Note d’analyse n°237, Centre d’Analyse Stratégique, septembre 2011. 25 Kessler Martin, « Comment financer l'innovation ? », Regards croisés sur l'économie, 2008/1 n° 3, p. 173-176. 26 Op.cit., p.174
  • 25. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 25 Il évoque les différents moyens pour un entrepreneur de lancer son projet. La solution de l’autofinancement est selon lui préférée par les entreprises innovantes. Les chiffres rapportés sont les suivants : « 30% des chefs d’entreprises innovantes déclarent ne pas pouvoir mener à bien leurs projets par manque d’accès à des capi- taux, et il apparait que 73,8% des dépenses de R&D réalisées par les entreprises de plus de 20 salariés sont autofinancées. »27. Ce qui pose évidemment le problème des structures de moins de vingt salariés qui sont en phase de lancement – et n’ont pas les fonds propres nécessaires pour s’autofinancer. Les acteurs traditionnels 1. a. L’Etat et les régions : entre soutien et complexité. Réservées aux demandeurs d'emploi, destinées à financer la recherche, nationale ou régionale... Il existe 6 000 types d'aides aux entreprises. Le tout est de dénicher celle qui correspond à son projet28 et de consacrer suffi- samment de temps à la constitution des dossiers de demande de subventions. Martin Kessler s’interroge alors sur la place de l’intervention publique. Celle-ci doit pouvoir contrer des « vides » dans la courbe de financement. En répartissant ses aides selon des critères objectifs, l’Etat doit pouvoir, en théo- rie, favoriser également toute les entreprises innovantes, petites ou grandes. Ceci pose deux problèmes. Le premier est que les entreprises innovantes ne sont pas sur un pied d’égalité en ce qui concerne la recherche de subventions. Nous l’avons vu, démarcher les acteurs du financement, explorer toutes les aides possibles et constituer des dossiers est extrêmement chronophage. Or dans les premiers mois de l’entreprise, le proverbe « le temps est de l’argent » prend tout son sens. Le temps consacré à la recherche de fonds est autant d’énergie qui n’est pas passée à développer l’innovation et la commercialisation des produits de l’entreprise. Le second est que « rien ne dit que l’Etat sera plus à même que les investisseurs de distinguer les bons projets des mauvais, ou ceux qui seraient financés autrement de ceux qui nécessitent réellement des fonds publics ».29 De plus, il est très difficile d’évaluer les effets que peuvent avoir ces aides. Elles peuvent tout aussi bien se tra- 27 Ibid. 28 Adrien Guilleminot , op.cit. 29 Op.cit. p.176.
  • 26. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 26 duire par une « substitution totale »30 - un euro public conduit au retrait d’un euro privé – ou par des « effets d’entraînement » - un euro public conduit à l’ajout de n euros privés. L’auteur conclue sur ce type de soutien aux entreprises en nuançant son propos : « le financement public est nécessaire, mais il convient d’être attentif aux détails institutionnels et règlementaires régissant l’attribution des aides ».31 L’Etat est ainsi impliqué dans la chaîne de financement des entreprises de son territoire mais navigue parfois à vue. La Banque Publique d’Investissement (BPI) en est l’exemple. C’est une sorte de « boîte à outils » qui permet à la fois de financer un actif immatériel, regarnir sa trésorerie, financer ses exportations ou même augmenter son capital... Son rôle majeur est celui de garant d’emprunts bancaires (à hauteur de 4,6 milliards d'euros en 2013), mais « l'organisme de financement public s'est vraiment déployé tous azimuts, du plus court terme aux prises de participation longue durée, des TPE aux mastodontes.»32 b. Les sociétés de capital-risque : un fort potentiel d’investissement qui peut chambouler la gouver- nance de la startup. Lorsque que Martin Kessler s’attarde sur le capital-risque il parle d’une « intermédiation expérimentée »33. Pour rappel, les fonds de capital-risque – ou sociétés de capital-risque – financent des jeunes entreprises inno- vantes, les fameuses startups, qui n’ont pas encore accès aux marchés financiers et qui sont difficilement éli- gibles pour s’endetter auprès d’établissements bancaires traditionnels. Les venture capital se sont développées aux Etats-Unis durant l’année 1946. La plupart sont spécialisés en capi- tal-amorçage mais certaines se concentrent sur le capital retournement en s’intéressant uniquement aux entre- prises en difficulté. « La crise les a rendus sélectifs. Et prudents. " Les fonds d'investissement sont plus longs à se décider, et mettent davantage de garde-fous ", constate Guillaume-Olivier Doré, créateur d'Agregator Capital. Conséquence : plus personne n'investit seul, et la clé du succès est de savoir quand faire " rentrer " les plus gros investisseurs qui pourront prendre le relais à l'avenir. »34 Leurs investissements sont considérés comme risqués mais le risque est maîtrisé. En effet, « les capital-risqueurs s’appuient sur leur expérience du secteur, leur implication dans le développement de l’entreprise (en particulier 30 Ibid 31 Ibid. 32 Adrien Guilleminot op.cit. 33 Kessler Martin, op.cit. p.175 34 Adrien Guilleminot, op.cit.
  • 27. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 27 au niveau du Conseil d’administration, dont les droits de surveillance sont renforcés), sur des contrats financiers complexes, et surtout sur la facilité d’introduction des titres sur les marchés « publics ». Cette facilité permet aux investisseurs de vendre leurs parts de la firme sur le marché boursier pour réinvestir dans de nouvelles startups, ce cycle étant le principal moteur de l’innovation. »35 Les Business angels ou les investisseurs-accompagnateurs. 2. a. La volonté de combler un manque dans la courbe du financement L’angelat n’est pas un phénomène nouveau. A l’instar des mécènes qui agissent dans la sphère culturelle, les business angels opèrent dans le monde économique. Ce sont des investisseurs personnes physiques qui inves- tissent leur propre patrimoine dans une entreprise innovante à fort potentiel. Ils sont généralement regroupés dans des réseaux afin de mutualiser leur expertise, leur réseau relationnel et leurs capacités de financement, bien que certains restent en dehors de ces « clubs ». La reconnaissance du rôle économique de ces réseaux et leur émergence date de 1958. En effet, le Small Business Investment Act est alors signé aux Etats-Unis et re- groupe des mesures fiscales attrayantes. Le législateur américain souhaitait inciter ces investisseurs à combler « l’equity gap », ce fossé entre la love money – somme d’argent que l’entreprise peut trouver auprès de ses amis, sa famille, etc – et les fonds dont elle a besoin pour se lancer ou se développer. Une étude commanditée par le Department of Commerce en 1986-88 et couvrant par sondage 240 000 entre- prises et près de 35 000 investisseurs, est probablement l’étude quantitative la plus solide statistiquement sur les Angels. Elle fait apparaître que dès 1988, il y avait 500 000 angels aux États-Unis, déversant environ 60 milliards de dollars annuellement sur les créations et démarrages d’entreprise, environ dix fois plus que le capital-risque de l’époque.36Ils sont donc loin d’être de nouveaux acteurs dans le paysage du financement. b. Historique et évolution des réseaux en France Si au Royaume-Unis on compte environ 40 000 business angels, aux Etats-Unis ils sont plus de 400 000 business angels recensés en tant qu’investisseurs qualifiés aujourd’hui. En France on estime leur nombre à 8 000 per- sonnes37. Au 31 décembre 2012, 4100 d’entre eux faisaient parties des 82 réseaux associatifs fédérés au sein de 35 Op.cit. p.175. 36 Robert J.Gaston et Sharon Bell, « The informal supply of capital » Applied Economic Group. 37 Franceangels.org [En ligne]
  • 28. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 28 France Angels, fédération des réseaux de business angels en France.38 Quatre ans après sa fondation, en 2005, seuls 38 réseaux étaient fédérés et 1 600 business angels en faisaient partie39. Concernant le nombre de dossiers financés, le nombre a augmenté exponentiellement : 160 en 2005, pour un montant global investi de 16 millions d’euros contre 327 en 2011, pour un montant global investi de 44,5 mil-lions d’euros. Le nombre de business angels, les montants investis et la force de financement des réseaux ont augmenté de façon conséquente, profitant notamment d’incitations fiscales et d’une situation économique clémente. Depuis 2008, les indicateurs sont cependant redevenus pessimistes. BFM Business s’est associé avec France Angels pour produire un « baromètre des business angels » traduisant les grandes tendances des réseaux. Figure 5 : Evaluation de la situation des business angels au 2eme semestre 2013 Source : Baromètre des business angels – BFM Business 2014 Il s’avère que les business angels sont plus frileux dans leurs investissements, à la fois en termes de montants et de fréquence. Le nombre de membres augmente mais les montants de prise de participation stagnent. Cela signifie que l’intérêt de ces investisseurs pour l’accompagnement des jeunes entreprises reste inchangé. Ils con-tinuent de jouer un rôle de conseil mais limitent leur rôle économique. c. Qui sont-ils ? Jean Redis et Gilles Certhoux40, professeurs, signent un article41 synthétique dans lequel ils résument ce que sont fondamentalement les business angels. 38 Franceangels.org [En ligne] 39 Franceangels.org [En ligne]
  • 29. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 29 « Dotés d'une expérience d'entrepreneurs ou de cadres dirigeants, les Business angels sont des investisseurs actifs prêts à s'impliquer auprès de l'entrepreneur. Ils investissent souvent sur un « coup de coeur », motivés par une volonté d'aider de jeunes entrepreneurs à réussir ou de participer à des aventures entrepreneuriales. Les Business angels se voient eux-mêmes davantage comme des co-entrepreneurs que comme que des investis- seurs.[…] Les business angels ont un degré d'aversion au risque plus faible que d'autres catégories d'investis- seurs : une majorité de leurs investissements s'effectue durant la phase d'amorçage des projets, qui est la plus risquée (75% de ces investissements ont constitué le premier apport en capital de ces entreprises, souvent pour financer les frais préalables à la mise sur le marché de leur premier produit ou service). Ils font preuve d'une capacité de décision rapide car ils investissent leur propre argent. Une relation directe va s'établir tout au long du processus d'investissement (depuis la présélection du dossier jusqu'à la sortie), de nature à créer un fort « intuitu personae » et donc un fort sentiment de confiance entre les Business angels et l'entrepreneur. » Dans leur recherche, les professeurs Redis et Certhoux citent les professeurs C. Munck et C. Saublens qui ont établis quels sont les quatre apports des business angels aux entreprises dans lesquelles ils prennent des parti- cipations. Ils les classent ainsi 42: - une aide pour surmonter leurs difficultés de financement : ils représentent souvent la première source de financement extérieur de l'entreprise, - une implication aux côtés de l'entrepreneur en le conseillant/coachant dans ses choix stratégiques et dans ses décisions de management, de gestion, de marketing et de développement commercial, - un apport de « capital social » permettant à l'entrepreneur d'avoir accès à leurs réseaux de contacts, - une capacité à faire obtenir aux entrepreneurs des financements complémentaires auprès des ICR in- vestisseurs en capital-risque et des banquiers car ils représentent une forme de « caution » : leur pré- sence au capital de l'entreprise rassure les autres financeurs sur le potentiel de développement de l'en- treprise. En un mot, le business angel est un « actionnaire-accompagnateur »43. Ce qui conduit Patrick Valéau à dire que les « Business angels ont un positionnement que l’on peut qualifier d’équitable, dans la mesure où il se situe 40 Gilles Certhoux est Professeur à Audencia Nantes Ecole de Management, Membre fondateur de Ouest Angels. Jean Redis est Professeur associé à ESIEE Paris, Université Paris Est, Chaire transversale de recherche en Entrepreneuriat & Innovation CCIR, IRGO – Equipe Entrepreneuriat & Stratégie 41 Gilles Certhoux et Jean Redis, « Business angels et acteurs du financement participatif : partenaires ou concurrents ? », 26 novembre 2013. 42 Ibid. 43 Gilles Certhoux et Emmanuel Zenou, « Gouvernance et dynamique de l'actionnariat en situation entrepreneuriale : le cas des business angels »
  • 30. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 30 entre un extrême affectif (celui des investisseurs parents ou amis) et un autre, beaucoup plus détaché et calcula- teur (celui des sociétés de capital-risque) ». 44 En résumé, l’on peut affirmer que l’intervention des business angels constitue un soutien décisif pour le proces- sus de création de certaines entreprises, comme le montre le schéma suivant, issu d’un rapport d’Ernst&Young daté de 2007.45 Figure 6 : Influence de l’action des business angels pour les bénéficiaires Source : Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNGS BAS 2007. d. La difficulté de se positionner face aux autres acteurs Pourtant les business angels eux-mêmes peinent à se positionner dans la chaîne du financement. La question du rôle économique de ces derniers est fondamentale. En effet, ces investisseurs-accompagnateurs sont venus combler un manque dans la courbe de financement de l’entreprise à fort potentiel. C’est donc un rôle primor- dial qui leur a été attribué mais il l’a été par défaut. Ils prennent des risques plus importants que des capital- risqueurs qui, eux, ont des fonds conséquents et vont pouvoir accuser le coup s’ils doivent faire face à la faillite de l’une de leurs participations. De plus, ils sont plus téméraires que les amis ou les familles des entrepreneurs puisqu’ils ne les connaissent pas personnellement et doivent appréhender une forte asymétrie de l’information. 44 « Implication organisationnelle, anxiété et états affectifs au travail », Dans Revue internationale de psychologie sociale 2011/1 (Tome 24) Revue de l'Entrepreneuriat 2006/1 - Vol. 5 pages 13 à 29 45 Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche – Evaluation de l’action des Buisiness Angels – ERNST&YOUNGS BAS 2007.
  • 31. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 31 Ils font donc partie intégrante de la chaîne de financement mais ils sont tour à tour décris comme amateurs puis comme professionnels, comme une alternative aux fonds de capital-risque puis comme acteurs traditionnels du financement. En se fédérant au niveau national, les quatre-vingt-deux réseaux gagnent en visibilité et en professionnalisme. Cependant la problématique reste entière : qui sont-ils ? Quel est leur positionnement stratégique ? C’est une définition toute relative qui peut répondre à cette interrogation. Ils viennent compléter l’offre des autres acteurs. Ils se définissent de façon négative (au sens premier du terme). Ils sont ce que les autres ne sont pas, dans un jeu de perception mouvant. Or le jeu du financement a été chamboulé dernièrement avec l’explosion du crowdfunding. Nous allons revenir plus en détail sur ce phénomène mais il convient de l’évoquer dès à présent pour comprendre le positionnement des business angels aujourd’hui. Le financement participatif est un mode de financement coopératif existant depuis toujours. Au même titre que les business angels seraient les nouveaux mécènes, le crowdfunding est une version 2.0 d’un phénomène an- cien. Nombre de projets ont été financés par ce biais, des représentations théâtrales à la construction de la statue de la liberté en 1885!46 Benjamin Wattine, fondateur de SoWeFund n’hésite d’ailleurs pas à le rappeler : « Ce qu’on oublie c’est que les business angels faisaient du crowdfunding bien avant que ce ne soit un effet de mode. Le mécénat, l’appel à la contribution de la foule pour financer du théâtre de rue, etc., tout cela existe depuis toujours. Ce qui change ici c’est l’internet et le nouveau 2.0. Ca a tout chamboulé. »47 Comme nous l’avons déjà évoqué il existe plusieurs types de crowdfunding que nous aurons l’occasion de sur- voler et qui n’entrent pas en concurrence avec l’offre des business angels. Cependant, si nous nous concentrons sur le crowdequity, il y a une confrontation bien réelle. Ce « nouvel » acteur intervient sur des montants de financement à peu près équivalents – entre cent mille euros et un million d’euros- et dans des secteurs aussi divers que ce que font les business angels : écologie, sciences, technologies, services. Mais étant arrivé plus récemment dans l’écosystème, le crowdfunding a conduit les business angels à passer d’amateurs à profession- nels, par simple glissement sémantique. Selon Benjamin Wattine, « cela entraine d’ailleurs une sacrée opposi- tion entre acteurs traditionnels et nouveaux. L’un des côtés positifs de l’essor du crowdfunding auquel on ne s’attendait pas est la perception des business angels comme des acteurs traditionnels. Quand bien même ils ont longtemps été jugés comme les « petits nouveaux ». Le crowdfunding permet de professionnaliser les busi- ness angels en un sens. »48 46 « The Statue of Liberty and America's crowdfunding pioneer, », www.bbc.com [en ligne] 24 April 2013 47 Entretien Benjamin Wattine. Voir annexe. 48 Entretien Benjamin Wattine. Voir annexe.
  • 32. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 32 La question du positionnement des business angels par rapport au financement participatif soulève d’ailleurs le débat au sein des réseaux. Les sept réseaux de business angels de la région PACA ont pour coutume de se réunir bi-annuellement pour partager deal flow (flux de projets), informations et idées. Lors de la session de janvier 2014, la question s’est posée de savoir quelle était la position des réseaux vis-à-vis du phénomène du financement participatif. Il en est ressorti que si France Angels souhaitait temporiser le débat le temps que soit précisé le projet de loi, le crow- dfunding était en tout état de cause un phénomène qu’il ne fallait pas ignorer. Certains réseaux considèrent qu’il faut le prendre en compte pour mieux le combattre en conservant une posi- tion claire et ferme. Les business angels ne devraient rien à voir à faire avec des plateformes de financement, qui ne sont ni plus ni moins que des startups dont on attend encore validation du business model. D’autres, moins tranchés, y voient un nouveau mode de financement parmi d’autres, qui a pour avantage de fédérer une communauté d’early adopters pour artistes ou créateurs de leur « petite entreprise » en mal de quelques milliers d’euros pour se lancer. Selon eux, le crowdfunding se limite aux dons et aux récompenses, éventuellement aux prêts, mais ne souffre pas la comparaison avec ce que font des business angels, « des vrais ». Les derniers, enfin, pensent que les plateformes peuvent apporter des compléments de financement pour des tours de tables qu’eux-mêmes organisent. Deux des sept réseaux ont d’ores et déjà signés des partenariats avec des plateformes de crowdequity, voire même déjà co-investis avec.49 En conclusion de ce chapitre, nous pouvons dire qu’il y a une réelle zone grise dans le financement des jeunes entreprises qui se situe entre la phase de lancement et le stade des premiers succès. Les capitaux- risqueurs et les entités étatiques, malgré des forces de frappes conséquentes financièrement, ne parviennent pas à couvrir toute la chaîne de financement, en partie parce qu’ils ne le souhaitent pas. Face à l’importance de l’asymétrie d’information qui existe lors de l’early-stage d’une entreprise les capitaux-risqueurs ne prennent des risques que s’ils sentent poindre un potentiel énorme. Les entités publiques quant à elles, doivent encadrer strictement l’attribution des aides afin de limiter les pertes. Les business angels sont venus combler ce manque dans la chaine depuis la fin du siècle dernier. Ces investisseurs, personnes physiques, ont décidé de faire bouger les choses pour répondre aux vrais besoins des entrepreneurs. Perçus comme des amateurs et les « petits nou- veaux » ils ont mis du temps à prouver leur légitimité. Désormais, c’est le crowdfunding, et plus spécifiquement le crowdequity qui prend le relais dans ce rôle d’outsider. 49 « Statement on Business angels and Equity Crowdfunding » BAE s, 29 Juillet 2013.
  • 33. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 33 Le crowdfunding arrive dans un contexte entrepreneurial relativement difficile. C’est un phénomène économique plein de promesses qui annonce une révolution dans le financement, un phénomène social qui assure que les internautes sont des business angels en puissance et qui devient, petit à petit, un phénomène politique dont s’empare la presse et le gouvernement qui le portent à bout de bras, tel un étendard moderne derrière lequel on se rassemble, derrière lequel on reprend confiance.
  • 34. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 34 Chapitre 3. L’explosion du crowdfunding : évolution ou révolution ? « Tout ce qui est nouveau dans l'univers de la finance brille comme l'or. L'or qui chatoie, les financements qui sourient, l'argent qui n'est pas qu'avidité voilà ce qu'épargnants comme emprunteurs, particuliers comme en- treprises, chacun attend et que les banques ne parviennent pas à fournir. Il y a un vide. Il se comble. L'économie est comme la nature. Le crowdfunding est une des réponses à ces manques. 50 – Pascal Ordonneau typologie du crowdfunding 1. Le financement participatif offre un large panel de possibilités pour financer des projets. Nous les confondons souvent car toutes ces options sont regroupées sous le terme générique de « crowdfunding » mais il convient de bien les distinguer pour mieux les comprendre51. Figure 7 : Les principales formes de financement en fonction de la complexité des process. Source : Hermer et al. (2011a). On classifie traditionnellement le crowdfunding en quatre grandes catégories : o donation (don simple): l’internaute donne gracieusement une somme d’argent pour soutenir un projet. On retrouve cette pratique principalement dans le domaine culturel ou humanitaire. 50 Pascal Ordonneau, « Crowdfunding: Finance émotionnelle ou rationnelle? », lesechos.fr [en ligne] le 29 mai 2014. 51 Joachim Hemer « A Snapshot on Crowdfunding » Working Papers Firms and Region No. R2/2011.
  • 35. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 35 o reward-based (don contre récompense): l’internaute soutient un projet et reçoit une contrepartie. Il peut, par exemple, acheter par avance l’album d’un chanteur pour lui permettre d’en financer l’enregistrement. Le système de récompense n’est pas figé et dépend du projet et de celui qui en est à l’origine. Un lien de confiance s’établit entre l’internaute et son « poulain » puisque rien ne contraint ce- lui qui lève des fonds à tenir sa parole et à récompenser effectivement ses donateurs. o Lending (prêt): il existe deux types de prêts : le prêt entre particuliers et le prêt aux entreprises. Les prêts peuvent être fait gratuitement ou rapporter des intérêts, toujours inférieurs aux taux pratiqués par les établissements bancaires. o Equity based (par souscription d’actions) : les internautes investissent une somme d’argent au capital des entreprises en espérant recevoir des dividendes et/ou être associés à la plus-value faite lors de la revente de l’entreprise. Ce modèle est plus complexe que les trois autres. En effet il a des implications juridiques et financières beaucoup plus lourdes. D’autre part, les retours potentiels sur investissement se font sur du long-terme. Nous l’avons déjà précisé en introduction, c’est cette branche du crowdfun- ding à laquelle nous nous intéresserons tout au long de cette recherche. Caractéristiques du crowdfunding 2. Le crowdequity ne fait l’objet de recherches que depuis récemment, étant donné qu’il ne représentait qu’une petite part du marché. Nous allons donc nous inspirer de recherches ayant été menées sur le non- equity crowdfunding (reward based et donation) afin de comprendre les caractéristiques principales du phéno- mène. Nous allons faire un état des lieux de ce que nous savons déjà sur le crowdfunding, grâce aux recherches antérieures, avant d’aller plus loin dans la réflexion sur le crowdequity.52 1. L’investissement n’est pas déterminé géographiquement. Quand Sellaband, une plateforme de partage de musique fondée en 2006 à Amsterdam a ouvert son capital, 86% des fonds prove- naient d’investisseurs basés à plus de 96 kilomètres du siège social. La distance moyenne entre les créateurs et les investisseurs était même de 4 800 kilomètres (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). 2. Investir est hautement biaisé : sur la même plateforme, alors que 61% des créateurs n’ont pas ré- ussi à lever de l’argent, 0,7% d’entre eux comptabilisent plus de 73% des fonds levés entre 2006 et 52 Ajay Agrawal, Christian Catalini, & Avi Goldfarb, « Some Simple Economics of Crowdfunding », University of Toronto, Rotman School of Management , June 1, 2013.
  • 36. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 36 2009. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). Par exemple sur Kickstarter : 1% des projets repré- sentent 36% des fonds levés et 10% représente 63%. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2013). 3. La propension à investir dans un projet augmente avec l’accumulation de capital. Sur Sellaband, sur une semaine donnée, les investisseurs étaient deux fois plus enclins à investir dans des projets ayant atteint 80% de leur objectif de levée de fonds, par rapport aux projets ayant atteint 20%. L’accélération est particulièrement forte à la fin de la campagne de levée de fonds. Dans le même temps, les projets qui lèvent rapidement des fonds au départ observent un ralentissement au mi- lieu du processus par un effet d’attentisme de la part des internautes-investisseurs. C'est-à-dire qu’il y a une réduction de la propension à investir de la part de nouveaux investisseurs qui ont l’impression que l’objectif de levée de fonds va être atteint de toute façon. (Kuppuswamy and Bayus, 2013). 4. L’investissement financier de la part des amis et de la famille joue un rôle clé durant les débuts de la campagne. Les amis et la famille investissent de façon disproportionnée dans les premières phases de la campagne et envoient de fait un signal positif aux futurs investisseurs qui ont plus confiance dans le projet (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2011). 5. Les investisseurs et les créateurs sont par nature trop optimistes à propos des résultats. Sur Sella- band, après que les premiers artistes financés échouèrent à envoyer les récompenses promises aux investisseurs, ceux-ci révisèrent leur attentes à la baisse. De même, Kickstarter a dû durcir ses règles de fonctionnement suite à de nombreux retards dans la livraison de produits préachetés ou des récompenses promises par les créateurs. Dans les catégories technologie et design, la plateforme estime que plus de 50% des produits sont livrés en retard (Mollick, 2013). 6. Le crowdfunding en capital peut se substituer aux sources traditionnelles de financement telles que les prêts, l’appel au capital familial ou à la love money. (Agrawal, Catalini, and Goldfarb, 2013).
  • 37. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 37 Le marché du crowdfunding 3. « Seul 20 % des français connaissent le crowdfunding aujourd’hui. On estime l’épargne des français à 100 mil- liards. Imaginez ce qu’il reste à faire. » - Leguideducrowdfunding.com a. Marché mondial Le marché mondial du crowdfunding est en plein essor. Les prévisions de Forbes concernant ce marché sont très optimistes : le crowdfunding représenterait un potentiel de 1000 milliards de dollars en 202053. Figure 8 : Evolution du marché du crowdfunding depuis 2011. Source : Smartangels.com D’après un rapport Massolution, ce dispositif a dégagé 2,7 milliards de dollars (2,06 milliards d’euros) cette année, soit une hausse de 81 % par rapport à 2011, au bénéfice de 1,1 million de projets financés en 2012 (+81% par rapport à 2011). Ces informations ont été collectées sur les 308 plateformes de financement partici- patif présentes dans le monde. Toujours suivant l’institut Massolution, les Etats-Unis sont géographiquement les leaders dans le financement participatif avec plus de 59% des sommes levées au niveau mondial, alors que l’Europe représente 35%. Les taux de progression sont également largement en faveur des Etats-Unis qui ont connu une croissance de 105% alors que l’Europe progressait « seulement » de 65% Dans les différentes formes que prend le financement participatif, le don est la plus importante avec 1,4 milliards de dollars suivi par le prêt qui représente 1,2 mil- 53 «What's In Store For Crowdfunding And Angel Investors », forbes.com [en ligne], 31 décembre 2012.
  • 38. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 38 liards, concentrés dans les pays anglo-saxons (Etats-Unis et Royaume-Uni). Le financement en equity ne repré- sente quant à lui que 116 millions de dollars54. Par ailleurs, le nombre estimé de sites dédiés au financement participatif était de 283 en 2010, 434 en 2011 et 536 en 2012. En 2012 toujours, la répartition des financements en fonction du type des projets s’est fait de la façon suivante : Figure 9 : répartition du marché du crowdfunding par type de projet. Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity » -Sciences Po Aix-en-Provence. Nous l’avons vu, le marché du crowdfunding peut être segmenté par catégories (reward-based, don, equity- based, lending). On peut en déduire le schéma suivant : Figure 10 : Evolution des fonds collectés en fonction du type de financement participatif Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014 54 « Les chiffres du crowdfunding », leguideducrowdfunding.com [en ligne]
  • 39. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 39 i. Le segment « donation » représente 37% du marché pour un volume de 980 millions USD. Soit +45% par rapport à 2011. ii. Le segment « Lending » représente 44% du marché pour un volume de 1,2 milliards USD. Soit +111% par rapport à 2011. iii. Le segment « Rewards » est la branche qui présente la plus forte croissance. Il représente 14% du mar- ché pour un volume de 383 millions USD. Soit +527% par rapport à 2011. iv. Le segment « Equity » représente quant à lui seulement 4,3% du marché pour un volume de 115 mil- liards USD. Soit +30% par rapport à 2011. Il est le seul segment comparable avec l’action des business angels, à la fois dans les montants levés et dans l’implication financière des internautes. Nous voyons ici qu’il s’agit d’une portion minime du marché du crowdfunding et il faut en relativiser la croissance, de 30%/an par rapport aux autres segments, notamment « Rewards » et « Lending » qui présentent res- pectivement une croissance de 527% et de 111% par rapport à l’année 2011. b. Marché français Le marché français du crowdfunding est en plein essor. Nous allons analyser rapidement les évolutions du marché, toutes catégories de financement participatif confondues puis nous nous concentrerons sur les plateformes spéciali- sées dans le crowdequity. En 2012, 25 millions d’euros ont été investis sur les plate- formes françaises, selon le baromètre de l’association Financement Participatif France réalisé auprès de 20 plate- formes en activité55. En 2013, le montant était de 65 millions soit une augmen- tation de 160%56 par rapport à l’année précédente. Mais 55 Premier baromètre du crowdfunding en France – fonds collectés par les plateformes de crowdfunding. financeparticipa- tive.org [en ligne], octobre 2010. 56 Aude Fredouelle, « 2013 Année de l'explosion du crowdfunding en France », JDN.fr [en ligne], Janvier 2014. Source : E.Manthé. (2014). Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity» -Sciences Po Aix-en-Provence. Figure 11 : montants investis en France dans le crowdequity depuis 2012. (En Mds d’€]
  • 40. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 40 selon l’étude Forbes57, le crowdfunding pourrait peser jusqu’à 6 milliards de dollars en 2020 en France. Nicolas Guillaume, fondateur de FriendsClear, premier service de prêt participatif en France, propose une typo- logie du crowdfunding selon deux types d’implication de l’utilisateur58 : - Implication projet : l’internaute choisit un projet pour ses caractéristiques intrinsèques. Il n’y a aucune considération financière qui entre en ligne de compte. Il va d’abord s’intéresser au type de projet, à la personne qui le porte, à la localisation géographique, etc. - Implication financière : « L'utilisateur a la possibilité d'exercer son choix afin de se constituer un porte- feuille de projets (d'actifs) ayant les caractéristiques financières (risque, rendement) recherchées. Il peut exercer ses facultés pour identifier et exploiter les critères qui lui permettront de sélectionner les actifs aux meilleures performances. »59 Dans la catégorie des plateformes de financement offrant une « implication projet » forte, les principales plate- formes françaises sont60 : i. Ulule et ses 7,5 millions d’euros investis en 2013 auprès de 148000 contributeurs, au profit de 2 138 projets (soit 62% des projets présentés sur la plateforme). ii. Kisskissbankbank, qui a permis de récolter 8 millions d’euros, contre 3 millions entre 2010 et 2012. Le site annonce une communauté de 214 000 Kissbankers dans 174 pays et plus de 5500 projets financés. iii. Babyloan finance uniquement des projets portés par des micro-entrepreneurs dans les pays en déve- loppement. 2,224 millions de prêts ont aidés 16 000 entrepreneurs en 2013. iv. Prêt d’union est quant à lui leader français du crédit rémunéré entre particuliers. 11 millions d’euros en 2012 ont été prêtés, 43 millions en 2013 et 100 millions d’euros sont budgétés pour 201461. v. La dernière-née des plateformes de prêts solidaires entre particuliers est Hellomerci, lancée par les créateurs de Kisskissbankbank en avril 2013. 36 projets ont été financés sur 1434 projets déposés en ligne. Après avoir eu une vision globale du marché du crowdfunding en France, laissons de côté le crowdfunding « par récompense », « par donation » et par « prêt » afin de nous concentrer sur le crowdfunding « par acquisi- tion d’actions » - ou crowdequity. 57 « 2013: What's In Store For Crowdfunding And Angel Investors », Forbes.com [en ligne], 31 décembre 2012. 58 Nicolas Guillaume, « Typologie du financement participatif », nicolasguillaume.typepad.fr [en ligne], 01 août 2011 59 Ibid. 60 Aude Fredouelle, « 2013 Année de l'explosion du crowdfunding en France », JDN.fr [en ligne], Janvier 2014. 61 Les crédits oscillent entre 3 000 euros, montant minimum, et 30 000 euros, montant maximum. Côté prêteurs, le plus petit montant prêté en 2013 s'élève à 1 000 euros. Le plus gros montant... à deux millions d'euros
  • 41. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 41 Intéressons-nous donc plus précisément à la catégorie des plateformes offrant une « implication financière » forte à leurs internautes. Elles proposent uniquement aux internautes-investisseurs de prendre des parts ou des actions au capital d’entreprises à fort potentiel de croissance.  Smart Angels a permis à douze entreprises de lever 3,9 millions d’euros en 2013. Elle fonctionne comme un intermédiaire financier : elle propose des dossiers d’investissements et fait le suivi de la le- vée de fonds, dont le montant est compris en moyenne entre 300 k€ et 500k€ euros. Entre cinq et qua- rante investisseurs se sont réunis pour financer ces projets.  Anaxago permet aux internautes de devenir actionnaires d’une startup à partir de 1000 euros. 11 en- treprises ont été aidées en 2013 grâce aux 2,4 millions d’euros levés auprès de 321 investisseurs.  Wiseed propose un ticket d’entrée plus faible puisqu’il est de 100 euros. Sur mille dossiers déposés en ligne, 14 dossiers ont été proposé au financement et 11 ont finalisé leur tour de table, soit un montant cumulé de 3,6 millions d’euros en 2013 grâce à 21 000 investisseurs.  Particeep est l’une des dernières plateformes de crowdequity lancée. Le ticket minimum est de 1 000 euros. Trois entreprises ont bouclé leur tour de table entre juin et décembre 2013, soit 340 000 euros.  Sowefund, la dernière des plateformes de crowdfunding par actions en est actuellement à la version bêta de son site. Pour clore ce chapitre, résumons-le : le crowdfunding en tant qu’adage « les petites rivières font les grands fleuves » existe depuis toujours mais son acception moderne s’est développée depuis une dizaine d’années avec l’explosion des NTIC. Le phénomène intéresse de plus en plus car il représente un potentiel de transaction conséquent – un milliard de dollars. Cependant la branche qui nous intéresse, le crowdequity, présente une croissance plus timide. Il faut donc relativiser, pour le moment, l’impact que le crowdequity peut avoir sur les autres acteurs de l’écosystème. Concernant cette première partie nous pouvons déjà tirer les conclusions de notre première hypo- thèse : Il y a une méconnaissance des citoyens vis-à-vis des acteurs du financement et entre ces acteurs eux-mêmes. Le crowdfunding est un phénomène qui peut rapidement devenir fourre-tout si on ne s’arrête pas un instant sur sa typologie. Au vu des articles de presse dont nous nous sommes inspirés dans cette première partie, il y a souvent des confusions que nous avons voulu éclaircir. Ces confusions impliquent que le phénomène n’est pas entièrement compris et comporte des zones d’ombre qui empêchent d’avoir un avis neutre sur le sujet. Entre confiance sans borne et méfiance irrationnelle il faut ouvrir une nouvelle voie.
  • 42. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 42 PARTIE 2. LE CROWDEQUITY : ENTRE ESPÉRANCE ET SUSPICION
  • 43. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 43 Chapitre 4. Crowdequity et angélat en France : entre confiance et défiance mutuelle. Après avoir participé à une table-ronde62 faisant intervenir business angels et avocat du droit des af- faires, il nous semble que ce qui agite l’écosystème du financement n’est pas tant le phénomène du crowdequi- ty lui-même, plein de promesses mais bien son application concrète par les plateformes. Nous n’aurons de cesse de le répéter, ces sites de mise en relation entre porteur de projet et internaute- investisseur sont avant tout des sociétés commerciales qui ont pour vocation de dégager du profit. Rien de mal à cela, au contraire.il s’agit simplement de ramener ce phénomène dans le monde réel, bien loin du feu média- tique qui éblouit, voire aveugle. Pour les réseaux de business angels les plus ouverts au concept de crowdequity, le propos n’est pas de re- mettre en cause les fondements même de l’économie collaborative et dématérialisée mais bien de choisir les plateformes qui respectent une certaine éthique et leur travail63. Dans ce chapitre nous nous intéresserons aux principales plateformes de crowdequity en France. Nous verrons à la fois quels sont les business models qu’elles adoptent et comment s’organise leur processus de levée de fonds. Puis nous nous intéresserons au positionnement des business angels vis-à-vis d’elles ainsi que les parte- nariats envisagés (ou non). Cet état des lieux nous permettra de mieux comprendre l’écosystème du crowdequi- ty français, les critiques qu’il soulève et les craintes qu’il génère, notamment pour les business angels. Comprendre le fonctionnement des plateformes de crowdequity : différents business 1. models. a. Fonctionnement du processus de levée de fonds Globalement, le processus de levée de fonds est identique pour toutes les plateformes de crowdequity. Nous pouvons le schématiser comme suit (modèle de Wiseed): 62 Conférence « Crowdfunding : enjeux et opportunités », CEEI Aix-en-Provence, le 17 juin 2014. 63 Michel Vacher, Président d’Alumni Business angels. Allocution lors de la conférence « Crowdfunding : enjeux et opportu- nités », CEEI Aix-en-Provence, le 17 juin 2014.
  • 44. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 44 Figure 12 : Processus de levée de fonds sur la plateforme Wiseed. Source : www.wiseed.fr 1. processus de sélection N’importe quel porteur de projet ayant une société déjà constituée a la possibilité de déposer son projet une plateforme. La sélection se fait sur les documents fournis, en mêlant des critères objectifs de rentabilité finan- cière et de probabilité de réussite, mais également sur l’attractivité du projet. Un aspect très intéressant du crowdfunding est le fait que la sélection des projets qui seront proposés à l’investissement se faire par scoring, c’est-à-dire par la notation que réalisent des internautes-investisseurs qui sont enregistrés sur la plateforme. Certains réseaux de business angels, tels qu’Alumni Business angels à Aix-en-Provence, pratique ce mode de sélection en interne mais uniquement pour réaliser une pré-selection des dossiers qui pourront faire l’objet d’une présentation en plénière (réunion mensuelle d’examen de projets). A l’échelle d’une plateforme et de centaines d’internautes-investisseurs, cela permet une sélection relativement fine des projets qui « valent le coup ».
  • 45. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 45 2. processus de souscription La souscription se fait durant un temps variable qui est généralement compris entre un et trois mois. Une « jauge » permet de matérialiser l’avancement d’une levée de fonds. Les plateformes transfèrent les fonds sur un compte de réserve tout au long de la durée de la souscription. Le principe généralement appliqué est celui du « tout ou rien ». Si le porteur de projet arrive à lever la totalité des fonds recherchés alors il peut encaisser la somme. A l’inverse, si la levée échoue, les internautes-investisseurs récupèrent leur mise. 3. processus de closing Le processus de closing est identique pour les business angels et les plateformes. En effet, il répond à des impé- ratifs juridiques. La signature du pacte d’associé permet de préciser les règles de gouvernance de la startup, la valorisation à laquelle elle est évaluée, les liens qui lient les actionnaires avec la startup, etc. 4. processus de gestion post-closing Le « suivi » de la participation est un concept très vague et dépend de l’implication des actionnaires dans la stratégie de la startup. Dans le cas des business angels, le suivi se fait de manière assidue. Nous seulement, ils sont des interlocuteurs de premier plan pour des chefs d’entreprise parfois dépassés par les évènements. Ils sont aussi à même d’organiser des levées de fonds complémentaires au fil des ans, soit pour donner un coup de pouce à une entreprise en mal de trésorerie, soit pour encourager une réussite qui dépasse les attentes. La sortie d’une société se fait entre cinq et sept ans mais peut être beaucoup plus longue. Elle se fait soit par vente de la startup, soit par son entrée en bourse, soit par le rachat des parts des actionnaires par la startup, soit par « le bas de bilan », c’est-à-dire par faillite. En France, il n’y a eu, pour le moment, qu’une sortie réussie en crowdequity : Antabio chez Wiseed.
  • 46. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 46 Figure 13 : Processus de levée de fonds du projet Antabio chez Wiseed. Source : www.wiseed.fr C’est la campagne « idéale » : deux mois de campagne, 300k€ levés, 207 internautes-investisseurs pour un retour sur investissement de 44%., C’est aussi la seule sortie réalisée après une campagne de crowdfunding, ce qui limite fortement les conclusions que l’on peut tirer. b. Business models français Les business angels sont bien conscients que l’issue de leurs investissements est très incertaine car elle dépend du chef d’entreprise, de sa stratégie, de son marché, etc. Autant de données exogènes qu’ils ne maitrisent pas et qui évoluent rapidement. Les plateformes ne peuvent prétendre avoir trouvé le modèle éliminant tous ces facteurs d’incertitudes. Ainsi elles ont développé des business models divers et variés afin de tenter de trouver le plus viable, comme le montre le tableau ci-dessous.
  • 47. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 47 Figure 14 : benchmarking des plateformes françaises de crowdequity. Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014
  • 48. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 48 Laurent Javaudin, business angels, dans un travail réalisé pour France Angels, classe les principales plateformes selon deux modèles d’affaires. Figure 15 : Deux modèles de plateformes de crowdequity Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding, Laurent Javaudin – Mai 2014 Le modèle « Historique » est le premier à avoir été développé. Il crée un système de financement paral- lèle et alternatif aux acteurs traditionnels du financement, type business angels. Les internautes-investisseurs investissent directement dans des startups sélectionnées par les plateformes qui jouent les intermédiaires. La sélection des projets se fait grâce à la notation faite par les internautes. La due diligence est menée par les fon- dateurs des plateformes et leurs équipes. Ce ne sont pour la plupart pas des professionnels de l’investissement mais bien des chefs d’entreprises. Cela ne remet pas en question leurs compétences en matière de création d’entreprise mais peut soulever quelques interrogations concernant leur capacité à juger de la pertinence d’un projet et de son porteur. Le modèle « Triangulation » prend en considération les autres acteurs du financement et s’appuient sur eux notamment pour la due diligence. Sowefund, par exemple, une des dernières plateformes misent sur le marché, ne propose que des projets déjà investis par des réseaux de business angels à ses internautes-investisseurs. Cela permet théoriquement d’assurer une qualité de projets supérieure. Cependant, nous y reviendrons, cela pose un certain nombre de problèmes aux business angels qui voient leur responsabilité engagée en ce qui concerne la sélection des projets. Il nous semble à titre personnel, que ce modèle est le plus fiable. A moins que le modèle « Historique » ne se professionnalise et ne s’enrichisse d’un processus de due diligence solide.
  • 49. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 49 Les Business angels font-ils confiance au crowdfunding ? 2. Malgré ces quelques interrogations que nous venons de soulever, les acteurs du crowdfunding restent sus- ceptibles de jouer, à côté des Business angels, un rôle significatif dans le financement de l'amorçage. On pour- rait imaginer des formes d'association entre des Business angels et des plateformes d'equity crowdfunding afin de boucler des tours de table importants que les Business angels ne pourraient réaliser seuls. Une condition nécessaire à la bonne marche de cette collaboration serait de mettre en place un co-accompagnement des projets financés à la fois par les Business angels et par le crowdfunding depuis la sélection des dossiers jusqu'à la sortie.64 a. pourquoi la question se pose-t-elle ? Laurent Javaudin, de nouveau, liste les raisons pour lesquelles des partenariats seraient les bienvenus. 65 i. Côté business angels Dimension stratégique - drainer de l’épargne nationale vers des pro- jets locaux - faire du co-investissement et augmenter ainsi le nombre de dossiers investis - créer des vocations, développer un réservoir de futurs business angels et démocratiser l’equity en mode « freemium ». - tester les opportunités de marché d’un pro- jet. Ceci principalement pour les projets en BtoB. Cette difficulté rencontrée par les busi- ness angels a été mis en exergue par Ernst&Young dans le cadre d’un rapport pour le Ministère de l’Enseignement Supé- rieur et de la Recherche66, dont est extrait le graphique ci-contre. 64 Joachim Hemer, « A Snapshot on Crowdfunding. » Working Papers Firms and Region No. R2/2011 P.28 65 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 66 Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche – Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNG 2007. Source : Evaluation de l’action des Business Angels – ERNST&YOUNG 2007. Figure 16 : principales contraintes exprimés pars les BAs dans le cadre de leur activité.
  • 50. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 50 Dimension financière : - boucler des tours de table lors de levées de fonds en amorçage - permettre de financer des sociétés en phase de croissance nécessitant des fonds plus conséquents - amplifier l’effet de levier que les business angels sont capables de générer - nouvelle exit strategy partielle ? (« mini IPO ») ii. Côté plateformes - assurer la due diligence des projets - assurer le suivi des participations - donner un caractère professionnel à leur action - intégrer des tours de tables plus importants que ce qu’elles ne pourraient faire seules b. points sensibles La réflexion de France Angels sur la question du crowdfunding est très intéressante. Certes on peut lui repro- cher d’être orientée vers la préservation des intérêts des business angels. Mais cela est compréhensible et son approche a le mérite d’être claire.67 Laurent Javaudin envisage quatre points « sensibles » qui viennent apaiser l’engouement qui peut exister autour de partenariats éventuels. i. Deux ADN très différents La crainte des business angels vis-à-vis le phénomène du crowdfunding provient entre autre d’une différence profonde de valeurs et d’objectifs. Les réseaux de business angels n’ont pas pour but de faire du profit mais de mutualiser des compétences et d’aider à la sélection des projets. Les business angels personnes privées, eux, cherchent à obtenir un retour sur investissement mais savent que ce ne sera pas toujours le cas. Les plate- formes, quant à elle, cherchent à optimiser leur rentabilité, ce qui est tout à fait louable en tant qu’entreprises commerciales. 67 Ibid.
  • 51. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 51 Figure 17 : ADN des Business Angels et du Financement participatif. Source : PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 Le schéma ci-dessus reprend les éléments qui composent intrinsèquement ce que sont les business angels et les plateformes de financement participatif. L’apport que nous pourrions faire à ce modèle est le suivant : nous sommes convaincus que les créateurs de plateformes ont sincèrement envie de participer à la construction d’une économie collaborative et humaine. Certes l’activité de leurs plateformes est principalement commerciale mais leur volonté est bien de s’inscrire dans l’ère du temps et de faire émerger de beaux projets. En cela les créateurs de plateformes, les internautes-investisseurs et les business angels sont très proches. Et c’est d’ailleurs pour cela que la question des partenariats se pose à ce jour. La vraie différence réside dans l’accompagnement des chefs d’entreprise. Les plateformes sélectionnent des projets, les business angels les accompagnent. C’est un aspect des réseaux de business angels qui est souvent oublié et pourtant central dans leur fonctionnement. Après la sélection du dossier, des business angels « par- rains » ou « instructeurs », selon la terminologie des réseaux, rencontrent le porteur de projet, instruisent le dossier, font en sorte de comprendre le projet et éventuellement d’aider le chef d’entreprise à le re-calibrer pour qu’il soit le plus viable possible.
  • 52. Mémoire « Peut-on faire confiance au crowdequity ? » - Sciences Po Aix-en-Provence 2014 Par Elodie Manthé 52 Cet accompagnement est entièrement bénévole, permet de créer du lien avec le chef d’entreprise mais surtout permet d’avoir une connaissance approfondie du dossier. ii. Enjeu de confidentialité et de protection industrielle A partir de l’instant où un chef d’entreprise décide de mettre son projet en ligne et de le rendre publique, la question de la propriété industrielle et intellectuelle se pose automatiquement. En effet, le dépôt de brevet pour une technologie implique que cette technologie doit être nouvelle et novatrice. Or une technologie n’est plus nouvelle si elle est diffusée sur Internet pendant plusieurs semaines. Pour une startup BtoC, « la campagne de crowdfunding a des externalités positives non négligeables : étude de marché et campagne de communication »68 sont assurées. Cependant, pour une startup BtoB, il faut se garder de réveiller la concurrence des grands groupes, et des plus petits, qui ont suffisamment de fonds pour s’emparer de son projet. iii. Vers la formation d’une pyramide de Ponzi ? Une des craintes de la fédération France Angels est le risque de formation d’un système de Ponzi69. « En toute rigueur, le montant prélevé par la plateforme lors de la levée de fond devrait être provisionné et consommé par tranches sur cinq ou six ans pour assurer un accompagnement de qualité de la startup. En fait, il est probable que les fonds prélevés sur les deals les plus récents viennent financer l’accompagnement des opérations plus anciennes, ce qui induit un risque classique de type « démographique », de nature à re- mettre en question la continuité de l’accompagnement en cas de contraction forte du dealflow futur. »70 iv. Risque de biais type « US sub-primes » Un dernier point soulevé par Laurent Javaudin est le risque de biais « psychologique ». « A court-terme, plus la plateforme fournit des deals à ses inscrits, plus elle perçoit de commissions sur les levées de fond effectuées. 68 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014 69 L’argent des derniers entrants rémunérant les souscripteurs plus anciens, pour maintenir l’illusion de rendements miri- fiques. 70 PANORAMA - Business angels – Crowdfunding Laurent Javaudin – Mai 2014