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N°26 2017 www.enjeuxafricains.com / Zone euro : 3,50 € / Zone franc : 2 000 FCFA
©D.R.
Spécial RDC
“ Il faut sauver le
Franc congolais ”
Sénégal
Le Premier ministre
Mahammad Dionne
à l’heure du bilan
Développement
Carlos Lopes : Il faut
des plans conçus
par les Africains
Air Côte d’Ivoire
Entrevoit-elle le bout du tunnel ?
Matières premières
L’Afrique en perte de vitesse
Deogratias Mutombo Mwana Nyembo,
gouverneur de la Banque centrale
du Congo (BCC)
3Enjeuxafricains N°26
Editorial
François Katendi,
directeur de la publication
Le transfert de Neymar
ou la diplomatie du carnet
de chèques
Le football occupe certes une place importante dans la vie des hommes, mais avec
le transfert du joueur brésilien Neymar de Barcelone vers Paris, on entre dans
une autre dimension. Le club catalan va empocher quelque 220 millions d’euros
pour céder une de ses stars planétaires aux Qataris qui contrôlent le Paris Saint-
Germain (PSG). C’est le contrat du siècle battant le record enregistré pas plus tard
que l’an dernier avec le transfert de Paul Pogba (pour 120 millions d’euros) de la
Juventus de Turin vers Manchester United. On grimpe à des niveaux stratosphé-
riques jamais atteints dans l’histoire du ballon rond.
Et ce n’est pas fini. Selon les estimations, le footballeur à la coiffure extravagante
pourrait gagner chaque année environ 30 millions d’euros. Un tel niveau de rému-
nération représente une fortune que très peu de gens peuvent raisonnablement
espérer amasser au cours de toute leur existence. Cela dépasse l’entendement. Les
amateurs du ballon rond ont déjà forgé leurs arguments : son talent le mérite bien,
sa carrière au plus haut niveau est limitée dans le temps (généralement quinze
ans) et sa notoriété fera gagner de l’argent à son nouveau club grâce à la vente
des maillots et aux produits dérivés estampillés Neymar. Tous ces arguments sont
recevables mais ils ne répondent pas aux interrogations légitimes que peuvent
avoir ceux qui sont choqués par les sommes colossales en jeu. Après Paul Pogba,
Neymar et peut-être Kylian Mbappé, n’entre-t-on pas dans une bulle spécula-
tive qui finira par exploser un jour au visage du monde du football ? Avec des
conséquences dramatiques pour les footballeurs en herbe, dans les centres de
formation ?
Heureusement que cette transaction a eu lieu au cœur de l’été. Mais on n’y échap-
pera pas à la prochaine rentrée scolaire dans les cours d’école. Imaginez les dis-
cussions entre les élèves en culotte courte. Qui pourrait réussir à leur expliquer
que c’est en allant à l’école qu’on finit par bien gagner sa vie ? Ils n’auront qu’une
envie : vivre comme Neymar et gagner autant que lui. Il devient déjà un modèle
pour tous les enfants qui n’aiment pas l’école. Pourquoi se donner tout ce mal si
l’on peut gagner beaucoup d’argent en courant derrière un ballon – avec un talent
inné quand même ?
Les attentes placées par les autorités, les supporters et les dirigeants parisiens – en
quête d’une Ligue des champions – dans ce joueur hors pair sont certainement à
la hauteur des émoluments proposés. La perle brésilienne a vraiment intérêt à se
montrer à la hauteur de leurs attentes.
Reste que le prix payé pour s’attirer les services de Neymar est surélevé. On est
dans la démesure. On peut être à juste titre scandalisé par une telle transaction et
ce que cela représente en réalité. C’est là qu’interviennent les géopolitologues. En
signant un chèque de 220 millions d’euros au profit du FC Barcelone, le Qatar qui
possède le PSG poursuit un autre objectif : capitaliser sur le nom du footballeur
brésilien et gagner la bataille de l’opinion dans le conflit qui l’oppose à ses voisins
rangés derrière la puissante Arabie saoudite. Le sport qui vient à la rescousse du
politique, il fallait y penser !
Congo Airways dessert la ville de Lubumbashi 9 fois par semaine,
Goma 6 fois avec trois vols directs
et Kisangani 4 fois avec trois vols directs.
La compagnie reste à l’écoute et au service de sa clientèle.
Enjeuxafricains N°26
Sommaire
Bimestriel international
Le magazine économique de l’Afrique
www.enjeuxafricains.com
Courriel :
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Edité par Emergent Sprl
Kinshasa - RDC
Courriel :
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DIRECTEUR DE LA PUBLICATION :
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REDACTEUR EN CHEF :
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RÉDACTION :
Jean-Mathis Foko, Chrizostome Lisasi,
Marie Labrune, Serge Noël,
Anne Lauris, Brakissa Komara,
Yves Laurent Goma, Farida Ayari,
Jean-Claude Abalo, Bienvenu Bakwala,
Tiego Tiemtore, Alexis Kalambry,
Sady Ndiaye, Jean-Vincent Tchienehom,
Louis-Philippe Mbadinga,
Daniel Bekoutou, Wendy Bashi
Diangadianga Ngongo Mukoma,
Senior Mfumu, Paul Matendo,
Courriel :
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Chroniqueurs :
Elikia M’bokolo, Guy Rossatanga-Rignault
Hakim Ben hammouda et Claude Sumata
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Aymé Katendi et Athis-Photo
MAQUETTE
(conception et exécution) :
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CHARGÉE DE MISSION :
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MARKETING ET COMMUNICATION :
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Emergent sprl - Kinshasa
Tél. : +243 998 20 11 66
Courriel :
enjeuxafricains@yahoo.fr
Imprimé en Europe
Sommaire
4 5
Laser
	 6	 Tulinabo Salama Mushingi
Politique
	 8	Chronique par Elikia M’Bokolo :
L’argent ? Oui, mais comment ?	
	 9	Burundi : Les relations
entre Bujumbura
et l’Union européenne
se dégradent de plus en plus
Economie
  	38	Chronique par
Hakim Ben Hammouda :
Une hirondelle
annonce-t-elle le printemps ?
	 40 	Matières premières : Interview
de Brigitte Bocoum,
Spécialiste en développement
et planification stratégique
des ressources naturelles
	 44 	Rapport Cyclope 2017 : L’Afrique
en perte de vitesse
dans un monde d’incertitudes
	 45 	Le cuivre zambien
poussé par un vent d’optimisme
	 46 	Perspectives économiques/BAD :
Le temps de l’industrialisation
et des entrepreneurs
	 48 	Afreximbank s’inquiète
des mesures protectionnistes
	 50 	Gabon : Le FMI
et la Banque mondiale
à la rescousse
	 52 	Sénégal : Un bilan économique
encourageant
	 54 	Interview de Carlos Lopes :
« Industrialiser l’Afrique
pour améliorer la production agricole
et ajouter de la valeur »
	 56 	Atlas : Énergie en Afrique
	 60 	Air Côte d’Ivoire
entrevoit-elle le bout du tunnel ?
Hommage à Jean-Karim Fall page 66
En couverture RDC
	 12	L’allocution de Deogratias
Mutombo Mwana Nyembo,
gouverneur de la BCC
devant les opérateurs miniers
	 15	Pour une politique économique
tournée vers la production
intérieure
	 18	Mobilisation des ressources :
le temps de l’action
	 20	La stratégie du bâton
	 24	Rappel des dispositions légales
et réglementaires
	 25	Nouveau régime des sanctions
	 28	Entretien avec
José Sele Yalaghuli,
le directeur général des impôts
en RDC
	 30	Etat de l’application de l’Ohada :
Un bilan globalement positif
	 33	Congo Airways met le cap
sur l’international
	 34	Entretien avec Eric Mboma,
Dg de l’Arca
	 36	La diaspora
à l’agenda gouvernemental
Pierre Nkurunziza page 9
Société
	 62	Maroc : L’homme qui combat
les bactéries multi résistantes
	 64	Portofolio : Les obsèques
de Madame Berthe Nyota Musoga
	 66	 Média : Hommage à Jean-Karim Fall
Deogratias Mutombo Mwana
Nyembo page 12
Brigitte Bocoum page 40
Carlos Lopes page 54
Atlas : Énergie en Afrique page 56
José Sele Yalaghuli,
le directeur général des impôts
en RDC page 28
7Enjeuxafricains N°266
Laser
Il avait été nommé par Barack Obama, mais
son successeur, Donald Trump avait mis
du temps avant de le confirmer à ce poste.
Chose faite depuis le 17 mai dernier avec
l’approbation du sénat américain. Tulinabo
Mushingi est le nouvel ambassadeur des
Etats-Unis au Sénégal, avec compétences
en Guinée-Bissau.
A 61 ans, ce diplomate Tulinabo Salama
Mushingi reste dans la zone d’Afrique de
l’ouest puisqu’il était en poste au Burkina
de 2013 à 2016. Alors que la lutte contre le
terrorisme dans la bande sahélo-saharienne
est un axe majeur de la politique améri-
caine, l’expérience de Tulinabo Mushingi
ne sera pas de trop pour contrer l’expansion
des groupes terroristes qui sévissent sur le
continent africain.
Originaire de la République démocratique
du Congo (RDC), le nouveau représentant
de Donal Trump auprès de son homologue
Macky Sall est titulaire d’un doctorat en re-
lations internationales obtenu à la George-
town University et d’un Master de Howard
University. Il a successivement occupé les
postes de directeur des Services généraux
à l’ambassade des USA à Maputo (Mozam-
bique) de 1994 à 1996, directeur adminis-
tratif au consulat des Etats-Unis à Casa-
blanca (Maroc) de 1997 à 1998, directeur
d’affectation et de mission au bureau des
Ressources humaines à la Maison-Blanche
(1999 à 2001), attaché au Secrétariat exécu-
tif et chargé d’accompagner les Secrétaires
adjoints Armitage et Zoellick à l’étranger
(2003 à 2004). En 2004, il est nommé pre-
mier Conseiller à l’Ambassade des Etats-
Unis d’Amérique en Ethiopie (de 2004 à
2006), puis conseiller de l’Ambassade des
Etats-Unis d’Amérique en Tanzanie (2006 à
2009) avant d’être affecté comme secrétaire
exécutif adjoint et directeur exécutif du
Secrétariat exécutif d’Etat de 2011 à 2013.
De 2013 à 2016, il était en poste comme
ambassadeur au Burkina, un séjour au Pays
des hommes intègres qui restera sans doute
gravé dans sa mémoire de diplomate.
Arrivé à Ouagadougou en 2013 en pleine
polémique sur la révision de la Constitution
qui aurait permis à l’ex-président Blaise
Compaorédepouvoirsereprésenteràlapré-
sidentielle de 2015, il avait pris le temps de
visiter les 13 régions du pays pour disait-il,
« être au contact des populations et dé-
couvrir le pays profond ». On l’a ainsi vu
prendre le thé avec des jeunes, esquisser
des pas de danse traditionnelle, et même
s’essayer à la préparation du « tô », le plat
national burkinabè.
Accessible, humaniste, ce père d’une fille
préférait le contact direct avec les popu-
lations aux discutions feutrées des salons.
Les Burkinabè gardent de lui l’image d’un
diplomate courtois mais ferme sur ses po-
sitions, et qui n’hésite pas à dire tout haut
ce que les autres chuchotent.Alors Premier
ministre, Yacouba Isaac Zida a été bien ins-
piré en le surnommant en décembre 2015
« Sid Pawalmdé », qui signifie littérale-
ment en langue Mooré, « la vérité ne se
chuchote pas ».
Contre tous les usages diplomatiques, il
avait ouvertement pris position contre
la révision de la constitution et certains
croient savoir qu’il a joué un rôle dans la
chute de Blaise Compaoré, puis l’échec du
coup d’Etat du général Gilbert Diendéré, en
septembre 2015, Tulinabo Mushingi, fait
partie de ceux qui ont constamment soutenu
la période de transition après le départ de
Blaise Compaoré et favorisé l’organisation
des élections qui ont débouché sur la vic-
toire du président Roch Kaboré.
Quelques jours avant ses adieux au « Pays
des hommes intègres », il avait été élevé au
rang d’Officier de l’Ordre national par l’ex-
Premier ministre, Isaac Zida, aujourd’hui
exilé au Canada.
Au Sénégal et en Guinée-Bissau, son défi
sera de renforcer les relations entre les trois
pays au moment où les déclarations du pré-
sident Donald Trump contre les musulmans
ne sont pas des plus apaisantes.
J.V.
Après le Burkina,
Tulinabo Salama Mushingi pose
ses valises au Sénégal
Nommé ambassadeur des Etats-Unis au Sénégal par Barack Obama, Tuli-
nabo Mushingi a été confirmé à son poste par le nouveau président Donald
Trump, ce qui n’était pas gagné d’avance. La juridiction de ce diplomate
d’origine RD-congolaise couvre également la Guinée-Bissau. Sa mission :
renforcer les relations entre les Etats-Unis et ces deux pays où la grande
majorité de la population est musulmane
©D.R.
8 9Enjeuxafricains N°26
Politique Burundi
Alors que l’UE accuse toujours les autorités
burundaises, militaires/policières et civiles,
de graves violations des droits de l’Homme,
Bujumbura ne cesse de s’en défendre en se
drapant dans sa souveraineté. « Nous pen-
sons que l’Union européenne devrait cesser
de s’ingérer dans les affaires internes d’un
Etat souverain comme le Burundi », a dé-
claré à la presse Alain Nyamitwe, ministre
des relations extérieures et de la coopération
internationale.
En mars 2016, l’Union européenne a coupé
son aide directe au gouvernement burundais
alors qu’elle représentait 20% du budget de
l’Etat. « Nous préférons vivre dans la mi-
sère mais en gardant notre dignité », déclare
encore le ministre burundais des relations
extérieures, comme pour paraphraser Sékou
Touré.
La pomme de discorde entre ces deux par-
ties reste la dégradation continuelle de la
situation des droits de l’homme au Burundi.
« Les droits de l’homme sont-ils respectés,
le Burundi laisse-t-il le champ libre aux en-
quêteurs de l’ONU d’entrer sur le territoire
burundais? » s’est récemment interrogé
l’ambassadeur Wolfram Vetter, délégué de
l’Union européenne au Burundi. Bujum-
bura a refusé l’accès sur le territoire à trois
enquêteurs onusiens chargés d’analyser
la situation des droits de l’homme dans le
pays.
Entre les deux parties, la tension était par-
ticulièrement vive au début de cette année,
sur fond de discorde autour du paiement des
soldes des militaires burundais engagés au
sein de la Force de l’Union africaine pour le
maintien de la paix en Somalie (Amisom).
Fin 2016, l’UE qui est le principal bailleur
de l’Amisom a, dans le sillage des sanctions
contre Bujumbura, refusé de faire transiter
les soldes des militaires burundais par la
banque centrale (BRB). Cela a agacé les au-
torités burundaises qui prélevaient 20% des
sommes envoyées et qui misaient sur le dif-
férentiel de change en ces temps de vache
maigre pour renflouer les caisses. Dans son
message de vœux à la nation, le président
burundais, Pierre Nkurunziza, menaçait
déjà de retirer ses soldats de la Somalie.
« Nous retirerons nos soldats s’ils ne sont
pas payés d’ici la fin du mois », avait-il indi-
qué.
Entre les deux parties, le climat s’est enve-
nimé au début juin. S’appuyant sur des
documents qui ont récemment fuité dans la
presse sur le financement de défenseurs de
droits humains, Bujumbura s’en est encore
violemment pris à l’UE, l’accusant d’avoir
participé et même « financé une déstabili-
sation du pays ». Les autorités burundaises
ont en effet débusqué des contrats passés
entre l’Union européenne et une ONG
internationale en 2014 par le biais d’un
journal en ligne proche du pouvoir. Selon
ces documents, l’organisation européenne
avait financé, à l’époque, l’exfiltration du
Burundi de plusieurs défenseurs des droits
de l’homme ou de leurs familles.
Pour exprimer son ras-le-bol, Bujumbura
s’est fendu d’un communiqué au vitriol, le
5 juin. « Dans ces documents en circulation,
il est rapporté que l’Union Européenne a
procédé à des financements à l’endroit de
personnes physiques ou morales impliquées
dans la déstabilisation de la République
du Burundi, et actuellement sous mandat
d’arrêt international émis par la justice
burundaise », a ainsi indiqué dans un com-
muniqué, le porte-parole du gouvernement
burundais, Philippe Nzobonariba.
« Ces révélations viennent s’ajouter à
d’autres éléments qui ont poussé le gouver-
nement burundais à dénoncer une probable
main étrangère dans les actes de sabotage
de son programme de promotion de la paix
et la démocratie, particulièrement le pro-
cessus conduisant aux élections de 2015 »,
a-t-il encore ajouté.
Le lendemain, l’UE a également réagi à ces
accusations par un communiqué officiel,
récusant les accusations contre elle. « Ces
accusations se basent sur une interprétation
volontairement erronée d’un programme
de soutien aux défenseurs des droits de
l’homme. La politique extérieure de l’UE
est fondée sur la promotion des droits de
l’homme à travers le monde, et la protection
de leurs défenseurs », s’est-elle défendue.
Peu avant ce regain de tension, le parlement
burundais venait de saisir l’Assemblée
parlementaire paritaire UE-ACP (Afrique
Caraïbe Pacifique) pour lui demander de
jouer les intermédiaires et de plaider pour
que l’UE lève les sanctions infligées au
Burundi. « Le parlement demande à l’UE
et aux Etats membres de tenir compte de
toutes les performances réalisées par le
gouvernement du Burundi dans l’améliora-
tion de la situation des droits de l’Homme
depuis le 26 avril 2015, pour lever les sanc-
tions prises contre le Burundi », déclarait le
parlement burundais dans un mémorandum.
Le Burundi et l’UE sont liés par un Accord
de partenariat UE-ACP, appelé « Accord
de Cotonou » signé le 23 juin 2000 pour
une durée de 20 ans. Le point central de
cet accord est l’Article 96, lequel stipule
que l’UE peut suspendre l’aide immédiate-
ment, en cas de violation grave des droits
de l’Homme, des principes démocratiques
et de l’état de droit.
Jean Bosco Nzosaba
Les relations entre Bujumbura
et l’Union européenne se dégradent de plus en plus
Après plus de deux ans de crise politique et sécuritaire, les relations entre l’UE et le Burundi vont de mal en
pis. Bujumbura multiplie ses accusations contre l’UE, laquelle a déjà suspendu son aide directe depuis mars
2016 et multiplie les tours de vice.
©D.R.
Alain Nyamitwe, ministre des Relations extérieures
et de la coopération internationale
Politique Chronique
L’argent ? Oui, mais comment ?
Par Elikia M’Bokolo
Presque tout le monde court après l’argent. L’Etat, les entreprises ou les
personnes physiques en veulent toujours plus. Mais nul besoin d’exercer le
pouvoir politique pour l’avoir. L’argent propre se gagne toujours par le travail.
Argent par ci, argent par là. Décidément,
on ne parle que de ça. De l’argent !
Tout le monde en veut. Et ce n’est pas par
hasard. Mais, il n’y en pas pour tout le
monde. Qu’est-ce qu’on fait alors ?
Jamais sans doute, de mémoire de vivant,
on n’aura autant parlé d’argent qu’au-
jourd’hui. Mais, attention ! Du nord au
sud, de l’est à l’ouest, ce n’est pas du
même argent qu’il s’agit.
Voici d’abord l’argent de ceux qui, appa-
remment, en ont à suffisance, voire beau-
coup trop, si l’on en croit les gens qui
ne les aiment pas ou les jalousent, car
l’argent des uns fait toujours des jaloux
chez les autres. C’est l’argent des Etats et
d’une poignée de richissimes, tous situés
en dehors de l’Afrique ! Et, nous autres
Africains, nous nous demandons com-
ment ils ont fait pour avoir accumulé et
toujours à disposition autant d’argent.
Les puissances occidentales ? Bah ! Il n’y
a aucun mystère ! Ils nous ont pillés depuis
si longtemps et continuent allègrement de
nous piller ! Qui ignore l’histoire de la
« traite », de l’esclavage, de la colonisa-
tion, du néocolonialisme… ? Soit, mais
il n’y a pas que les pays occidentaux qui
aient à ce point accumulé et qui disposent
d’autant d’argent ! Comment ont-ils fait
les autres, les pays qu’on dit « émergents »,
pour avoir amassé et pour contrôler autant
d’argent en aussi peu de temps, quelques
dizaines d’années à peine ? A l’exception
de la Russie, tous se situent en dehors de
l’Europe !
Mais, attention, la soif de l’argent n’est
pas aussi brûlante dans les pays du vieux
continent que dans les pays « émergents »
et chez nous ! Là-bas, ils sont parvenus à
inventer des mécanismes pour que tout le
monde ait un peu d’argent. Ça n’a pas été
facile, bien sûr, mais ils y sont parvenus
par des mécanismes complexes de redis-
tribution de la richesse nationale.
Chez nous, en Afrique, tout ne fait que
commencer. Ce n’est pas en un demi-
siècle qu’on voit s’installer durablement
des dynasties de financiers et d’industriels
capables de mettre en œuvre des innova-
tions et des inventions qui génèrent dura-
blement beaucoup d’argent ! On rétorque-
ra avec raison que les Africains sont des
humains comme les autres, qu’ils n’ont
pas toujours été pauvres ou dénués du
fameux « esprit d’entreprise » !
Voyez Kankou Moussa, le fameux sou-
verain de l’empire du Mali au début du
XIVème siècle et considéré, jusqu’au-
jourd’hui,comme«l’hommeleplusriche»
de l’histoire de l’humanité ! En réalité,
l’or qu’il a distribué pendant son fastueux
pèlerinage vers les lieux saints de l’islam
n’était pas sa propriété personnelle, mais
appartenait au trésor de l’empire du Mali.
Il existe d’autres exemples plus probants.
Au XIXème siècle, pendant que s’instal-
lait en Occident le capitalisme industriel
et financier, l’Afrique a eu son lot de véri-
tables entrepreneurs, malheureusement
tombés dans l’oubli aujourd’hui. Regar-
dez, au Nigéria, l’histoire édifiante de
« Jaja » (1821-1891), victime d’un rapt
dans son enfance, vendu et revendu
comme esclave, et qui finit par devenir
un modèle d’entrepreneur, faisant pro-
duire de l’huile de palme dans ses planta-
tions, traitant directement avec de grands
industriels et financiers britanniques et
dirigeant le petit Etat marchand d’Opobo
dans le delta du Niger. Une belle aventure,
édifiante et instructive, brisée violemment
par les colonialistes anglais. Des gens
comme « Jaja », les différentes régions
africaines en ont connues tout au long du
XIXème siècle, une fois fermé l’épisode
meurtrier de la déportation des Africains
mis en esclavage et avant l’intrusion colo-
niale.
Ayant perdu et oublié ces modèles, nous
n’avons plus de références qui nous soient
propres en Afrique.
L’argent ? Tout le monde en veut, bien
sûr, mais comment faire pour l’avoir ? Le
chemin le plus court serait-il le meilleur ?
Assurément non ! Beaucoup de gens, trop
de gens semblent croire ou sont persua-
dés qu’il faut exercer le pouvoir politique
pour l’avoir. La belle illusion que celle-là !
L’argent de l’Etat, c’est l’argent de tous
les citoyens, la propriété d’autrui, donc
intouchable ! Où a-t-on vu, dans les Etats
modernes, qu’ils soient démocratiques ou
dictatoriaux, des détenteurs du pouvoir
amasser à leur seul profit des fortunes
durables et productives ? Où est passée
la fortune de Mobutu Sese Seko, celle
de Mouammar Kaddafi, des Bourguiba et
autres Sani Abacha ?
L’argent propre, l’argent vrai, qui est ex-
clusivement à soi, se gagne par le travail
et, si l’on en veut beaucoup, par l’inno-
vation, l’invention, la créativité dans les
domaines les plus divers des technologies
modernes, des entreprises industrielles et
agricoles, de la banque et des finances,
voire des arts… Heureusement, les
exemples commencent à fleurir en Afrique
dans ces différents domaines. Souhaitons
qu’ils prospèrent et se multiplient.
Il faut également, pour assurer la stabilité
de nos sociétés, que chacun ait sa part de
la richesse nationale ! Foin des fameuses
« traditions » africaines d’accueil et de
partage si on les cantonne dans le seul
champ des discours et des incantations.
Apprenons plutôt à donner des formes
concrètes et stimulantes à la nécessaire
solidarité collective.
©D.R.
11Enjeuxafricains N°26 11
Dossier spécial
Comment la Banque centrale du Congo
s’emploie-t-elle à enrayer la chute de la valeur
du franc congolais face au dollar ?
RDC
1010
“ Le temps de l’action a sonné ”
12 13Enjeuxafricains N°26
©D.R.
Spécial RDC
Deogratias Mutombo Mwana Nyembo,
gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC)
« … Le pays continue
de subir la pénurie des devises et voit sa situation
économique s’aggraver et se dégrader »
Chute des recettes minières rapa-
triées, forte inflation sur les prix
des biens et services, dépréciation
continue du franc congolais par
rapport au dollar, etc., la situation
économique et financière de la RD
Congo n’est pas du tout rassurante.
C’est du moins le tableau sombre
peint par le gouverneur de la Banque
centrale du Congo, le 17 juillet der-
nier, à l’occasion de la vulgarisation
des nouvelles dispositions de la rè-
glementation de change en matière
de rapatriement des devises par les
opérateurs du secteur minier.
Voici in extenso, le discours qu’il a
prononcé et qui présente un intérêt
certain pour la compréhension des
enjeux économiques de ce pays
continental fragilisé par de longues
années d’instabilité politique.
L’économie congolaise se porte très mal
et l’élément déclencheur de cette crise que
nous ressentons depuis le second semestre
2015 est la chute du cours des matières
premières que le pays exporte. Bien évi-
demment, les causes structurelles de cette
situation sont connues. Je ne compte pas
m’étendre là-dessus.
Cette chute des cours qui a ramené celui
du cuivre jusqu’à 4 300 dollars par tonne et
celui du cobalt à moins de 23 000 par tonne
a conduit à la baisse des rapatriements des
recettes d’exportation, induisant une dimi-
nution de l’offre de devises dans une éco-
nomie qui repose essentiellement sur l’acti-
vité minière. Il s’en est suivi d’importants
déséquilibres économiques et financiers qui
se traduisent par la dégradation de l’activité
économique dans son ensemble, plus parti-
culièrement la dépréciation de la monnaie
nationale et la hausse du taux d’inflation.
Cette situation qui angoisse toute la popula-
tion préoccupe au plus haut point les auto-
rités.
A ce jour, la situation macroéconomique in-
térieure est caractérisée par une amplification
de ces déséquilibres tandis que les tensions
sur les marchés des biens et services et de
change s’exacerbent sans arrêt.
Il est observé une accélération de l’inflation
et de la dépréciation du taux de change. Sur
le marché des biens et services, les prix à la
consommation ont enregistré une hausse de
38,4 % en rythme annuel à la fin des six pre-
miers mois de l’année. Pour le seul mois de
juin, il a été noté une augmentation des prix
de l’ordre de 7,4 % contre un taux d’infla-
tion moyen mensuel de 2,52 % entre février
et mai 2017.
Sur le marché de change, les cours indicatif
et parallèle du franc congolais se sont respec-
tivement dépréciés de 27,0 % et 30,0 %.
Aujourd’hui, le taux de change indicatif
s’est établi à 1 549,00 francs congolais
(CDF) pour un dollar et le taux parallèle à
1 650,00 francs congolais pour un dollar
contre 1 215,59 francs congolais pour un
dollar et 1 269,13 francs congolais pour
un dollar à fin décembre 2016. Il convient,
cependant, de souligner que le rythme de
dépréciation s’est accéléré depuis le mois
de juin 2017, comparé aux deux mois pré-
cédents.
Le niveau du taux de change du franc
congolais, qui augmentait en moyenne de
10 CDF par semaine au mois de mai dernier,
a commencé, au cours du mois de juin et
à mi-parcours du mois de juillet, à enregis-
trer des accroissements moyens quotidiens
d’environ 20 CDF.
Nous avons commencé l’année 2017 avec
un cours de plus ou moins 5 500 dollars
la tonne pour le cuivre et 50 000 la tonne
pour le cobalt. A fin juin, le cuivre est vendu
en moyenne à 5 600 dollars la tonne et le
Cobalt à 60 000 la tonne. Et pourtant, la
situation économique du pays ne cesse de
se détériorer comme je viens de le décrire.
Alors que nous nous attendions à une nette
amélioration des rapatriements des recettes
issues des exportations du cuivre et du co-
balt avec un impact positif sur le marché de
change, le pays continue de subir la pénurie
des devises et voit sa situation économique
s’aggraver et se dégrader.
Une question se pose d’emblée sur le
contraste entre la mauvaise situation décrite
ci-haut et les chiffres sur les exportations
minières au premier semestre de cette an-
née indiquant des recettes réalisées par les
entreprises de ce secteur de l’ordre de 3,8
milliards dollars (USD 3 843 442 256),
devant induire des rapatriements à hauteur
d’environ 1,5 milliards dollars ( 1 537 376
902,40 USD).
L’on peut légitimement se demander où
sont passées ces devises ? En effet, les der-
nières statistiques y relatives ont enregistré
des flux de rapatriements de devises de loin
inférieurs aux chiffres indiqués ci-haut.
Selon les informations analytiques en notre
possession, l’on devrait s’attendre à une
nette amélioration des flux de rapatriements
à partir de juin dernier, mais il n’en est rien.
Les rapports des investigations menées
par les services de la Banque centrale in-
diquent que plusieurs entreprises minières
ont développé des pratiques conduisant
au non-respect des dispositions légales et
réglementaires en matière de rapatriement
des recettes d’exportation et de communi-
cation d’informations sur les mouvements
des comptes principaux à l’étranger. Ces
pratiques ont pour conséquence d’institu-
tionnaliser la fuite des capitaux alors qu’ils
sont utiles au financement de l’économie
nationale et, en ce temps précis, devraient
apporter une contribution non-négligeable à
la stabilisation du cadre macro-économique.
La situation macroéconomique et finan-
cière actuelle est préoccupante et requiert la
conjugaison des efforts de tous et la prise
de mesures idoines pour restaurer les condi-
tions du retour à la stabilité et à la relance
de l’activité.
C’est dans cette optique la Banque centrale
du Congo, avec l’appui du gouvernement,
a décidé de renforcer les dispositions régle-
mentaires afférentes au rapatriement des
revenus des exportations minières et aux
mouvements des comptes principaux à
l’étranger.
Concernant donc la réforme réalisée, je
voudrais, d’emblée, porter à votre connais-
sance qu’elle a consisté:
• au renforcement de la réglementation et
du contrôle sur les comptes principaux des
exportateurs miniers à l’étranger afin de
s’assurer de la qualité et de la fiabilité des
informations fournies par les opérateurs
miniers, du rapatriement effectif de 40 %
©D.R.
Spécial RDC
14 15Enjeuxafricains N°2614
imposés par le code minier et de la confor-
mité à la réglementation des utilisations
des 60 % restants ;
• au durcissement des mesures discipli-
naires à l’encontre des opérateurs auteurs
de manquements au code minier et à la ré-
glementation du change ainsi que de leurs
complices.
En ce qui concerne particulièrement du
suivi des dispositions règlementaires conte-
nues dans la règlementation du change en
vigueur, laquelle avait fait l’objet d’une
grande vulgarisation en son temps, je vou-
drais rappeler que le mécanisme ad hoc pré-
voit trois niveaux.
Le premier se rapporte au contrôle sur
pièces qui exploite les rapports mensuels
sur les comptes principaux à l’étranger
communiqués par les Miniers. Ce contrôle
s’effectue par les services en charge du sui-
vi des opérations financières et de celui des
opérations commerciales qui relèvent les
manquements et adressent régulièrement
des correspondances aux miniers concer-
nés en vue, soit d’une correction, soit d’une
notification de sanctions appliquées.
Le deuxième niveau porte sur le suivi en
temps réel des données déclarées par les
banques commerciales dans le système ISYS
DDR, en rapport avec les rapatriements.
Le dernier niveau, lequel est sous la respon-
sabilité de la direction des opérations ban-
caires et des marchés de la Banque centrale,
concerne le contrôle sur place. Il s’agit d’un
déploiement d’équipes d’experts auprès des
opérateurs miniers, en vue de la confronta-
tion des informations transmises à la BCC
et celles contenues effectivement dans leurs
états financiers
Sans vouloir entrer dans les détails de nou-
velles dispositions que le directeur général en
charge de la politique monétaire et des opé-
rations bancaires de la Banque centrale se
fera le devoir de vous présenter, je voudrais
relever que les motivations principales de la
réforme sont d’encourager les opérateurs mi-
niers et les banques commerciales à respecter
scrupuleusement l’ensemble des dispositions
légales et réglementaires pour lutter contre la
fraude et la fuite des capitaux.
Les résultats attendus sont une augmenta-
tion du niveau de rapatriement des recettes
d’exportation et de l’offre des devises et,
en filigrane, la stabilisation du marché des
changes.
J’en appelle au devoir républicain de tous
les acteurs opérant dans le secteur et des
banques commerciales et les invite à dé-
ployer tous leurs efforts pour une mise en
œuvre efficace des dispositions légales et
réglementaires relatives au secteur minier.
Toute action et comportement tendant à vio-
ler les dispositions en vigueur seront dure-
ment sanctionnées.
Pour le reste, laissez-moi exprimer toute ma
gratitude à l’égard de tous ceux qui se sont
investis dans la préparation de cette matinée
de vulgarisation et souligner qu’avec le rapa-
triement régulier des 40% des recettes d’ex-
portations, il est possible d’amener la RDC à
stabiliser et à relancer son économie.
Deogratias Mutombo Mwana Nyembo
Gouverneur de la Banque centrale
de la République démocratique du Congo
©D.R.
Durement frappée par la chute du cours
des matières premières dont elle tire une
grande partie de ses recettes financières, la
République démocratique du Congo (RDC)
tente de réagir en mettant en œuvre des
réformes pour faire face à la situation éco-
nomique qui ne cesse de se dégrader depuis
deux ans. Une nouvelle politique se met en
place, consistant essentiellement à diver-
sifier l’économie, à augmenter la produc-
tion nationale et à mobiliser les ressources
internes. Selon le gouverneur de la Banque
centrale du Congo, Deogratias Mutombo
Mwana Nyembo, qui s’exprimait mi-juillet
à l’occasion de la sixième réunion du comi-
té de politique monétaire de l’année 2017,
la morosité économique du pays s’explique
par « les faiblesses structurelles de notre
modèle économique, de nos systèmes de
production. On a un modèle économique
qui ne nous facilite pas la maitrise de notre
économie. Aujourd’hui, il faut savoir qu’au-
tant on ne peut pas baser une économie sur
une production intérieure orientée sur une
demande extérieure qu’on ne maitrise pas,
autant, on ne peut pas non plus laisser éter-
nellement sa demande intérieure exploitée
par d’autres pays, pour stimuler leur capa-
cité de production et vous fournir des pro-
duits ». Comme la plupart des pays en déve-
loppement, l’économie de la RDC est plus
ou moins extravertie, plus tournée vers l’ex-
térieur avec une croissance stimulée par les
industries extractives et non par la demande
intérieure. « Nous sommes un pays qui pro-
duit ce qu’il ne consomme pas, qui importe
alors qu’il peut produire en grande quantité
et exporte à l’état brut, sans toutefois avoir
la maitrise des prix ou même de ce marché-
là », a ajouté le gouverneur, convaincu, que
la RDC « doit stimuler la production inté-
rieure, les capacités productrices, donner
du travail et tirer le gain de productivité de
Pour une politique économique
tournée vers la production intérieure
La vulnérabilité de l’économie congolaise tient principalement à l’extraversion économique et à sa forte dépen-
dance aux exportations d’un nombre limité de produits de base. La réplique devra donc s’organiser en termes de
reformes structurelles vigoureuses en vue de la transformation progressive de l’économie via une diversification
des sources de croissance et d’emplois.
©D.R.
L’arrivée du gouverneur de la BCC Deogratias Mutombo à Lubumbashi, avec à sa droite le Dg Jean-Louis Kayembe
©D.R.
Le gouverneur de la BCC accompagnant une mission gouvernementale en province
Spécial RDC
16 17Enjeuxafricains N°2616 17
l’économie pour une croissance potentielle
forte. On ne peut pas prétendre bien gérer
une économie alors qu’on ne maitrise pas
sa demande intérieure ni sa production inté-
rieure ».
Les conséquences pour des pays comme
la RDC dont les piliers de la croissance
reposent essentiellement sur quelques ma-
tières premières - cuivre, cobalt, etc., c’est
qu’une chute du prix de ces produits sur le
marché international l’expose à des diffi-
cultés financières et la rend très vulnérable
d’autant qu’elle a peu d’influence sur la réa-
lité de ce marché. Une baisse de la demande
extérieure se traduit, selon l’ampleur et la
durée, par une « baisse des recettes d’expor-
tation, la baisse des recettes publiques et la
pénurie des devises ». Le déséquilibre de la
balance des paiements courants et de la ba-
lance commerciale devient inévitable avec
comme conséquence la dépréciation de la
monnaie, d’autant que la baisse des activités
minières et extractives a un impact immé-
diat sur les autres secteurs qui leur sont liés
directement ou indirectement.
Pour le gouverneur, la baisse des recettes
oblige son institution à injecter de la liqui-
dité, ce qui provoque une dépréciation de
la monnaie nationale et une inflation sur
les prix des produits de grande consomma-
tion. Pis, l’Etat se prive ainsi de moyens
d’investir dans les secteurs vitaux pour
parer au plus pressé, c’est-à-dire, assurer
les dépenses courantes. Il a ainsi révélé que
durant les premiers mois de l’année 2017,
« c’était une moyenne de 63 milliards de
francs congolais mais au mois de mars, ça
explosé à plus de 100 milliards. Les deux
premiers mois, les dépenses étaient d’une
moyenne de 277 mais ce mois de mars au-
delà de 320 milliards ! ».
Que faire face à une telle situation ?
« Les moyens, la production et le climat
des affaires », répond Deogratias Mutombo
Mwana Nyembo. « On commence par le
moyen fiscal. Avec toute cette fuite qui dé-
règle notre économie, il faut arrêter avec le
caractère prohibitif de notre fiscalité. C’est
la première solution. On a la fiscalité la
plus élevée mais on lève le moins possible
cette fiscalité. Une pression fiscale qui est
inférieure à 12% alors que la moyenne en
Afrique subsaharienne, c’est 20% », ex-
plique-t-il. Il insiste sur la lutte contre la
fraude et la contrebande, « en sensibilisant
les opérateurs économiques, nos agents qui
travaillent aux postes frontières » et qui
se comportent comme des commerçants.
Autrement dit, ceux-là même qui sont com-
mis à la lutte contre la fraude en sont les
véritables acteurs ! Il urge de redynamiser
les structures chargées des recouvrements,
notamment les trois régies financières que
sont la DGI, la DGDA et la DGRAD en
renforçant les capacités des agents qui y
travaillent.
La Banque centrale du Congo a toujours
soutenu que la politique monétaire ne peut
à elle seule tout faire. Il est indispensable
que ses actions soient relayées par des
mesures aussi bien budgétaires que struc-
turelles pour consolider la stabilité macro-
économique.
Le chef de l’Etat, Joseph Kabila Kabange
a mis le doigt sur les causes de la situa-
tion où les indicateurs sont au rouge, lors
son adresse à la nation devant les deux
chambres du parlement réunies en congrès
« Les fondamentaux de notre tissu écono-
mique reposent essentiellement sur le sec-
teur tertiaire, et marqué d’une part, par
l’exportation des matières premières, vers
les pays industrialisés, source de princi-
pales recettes budgétaires, mais dont la
fixation des cours échappe au contrôle du
pays » avait-il déclaré.
A la recherche de solution, le président
avait dépêché en début d’année une im-
portante mission conduite par le ministre
des Finances, Henry Yav Mulang et le gou-
verneur de la Banque Centrale du Congo,
Deogratias Mutombo Mwana Nyembo,
dans le corridor-Est du pays. Cette mission
devait faire des consultations avec les opé-
rateurs économiques et la société civile sur
la dynamisation de la production intérieure,
l’objectif final étant d’affranchir l’économie
nationale de l’emprise de la conjoncture
internationale, de l’économie de rente et des
pressions des devises étrangères.
Les membres de la mission se sont rendus
dans les grandes villes des provinces du
Nord-Kivu, Sud-Kivu et de l’Ituri ; ils sont
allés à Goma, Bukavu, Uvira, Bunia, Aru,
Mahagi, Béni, Butembo et avec les autori-
tés provinciales, les représentants des entre-
prises sectorielles, ils ont mené des consul-
tations avec tous les acteurs économiques
afin de s’imprégner des réalités locales et
prendre des mesures appropriées. Sur place,
ils ont constaté le foisonnement des ONG et
autres activités de service sans impact socio-
économique avéré sur la création des ri-
chesses, la perversion quasi généralisée des
opérateurs économiques qui ne réfléchissent
qu’en termes de commerce et non de pro-
duction de la richesse sur le plan intérieur.
Cette mission tombait donc à point pour
interpeler les acteurs en vue de stimuler
la production. Ainsi, un cadre de soutien à
la production intérieure a été élaboré dont
les termes de référence s’articulent autour
des principaux axes, à savoir les secteurs
prioritaires d’investissement, l’accompa-
gnement technique des PME, le finance-
ment des PME et l’intégration des PME
dans le cadre opérationnel des chaines de
valeur
La réplique du gouvernement s’organise
donc par des réformes tendant vers la trans-
formation progressive de l’économie et une
diversification des sources de croissance et
d’emplois, avec un focus sur l’accompagne-
ment des Petites et moyennes entreprises et
des Petites et moyennes industries dans le
cadre d’un partenariat républicain.
« Les contraintes sont nombreuses mais il
est indispensable pour le pays de se re-
dresser. La résilience du cadre macroéco-
nomique, la solidité de la monnaie natio-
nale et l’atteinte de l’émergence du pays
sont à ce prix », conclut le gouverneur.
J.V.
©D.R.
Le gouverneur de la BCC avec la délégation gouvernementale
©D.R.
Le gouverneur attentif aux informations fournies par un responsable local
©D.R.
Une vue d’un entrepôt visité par le gouverneur de la BCC
©D.R.
Une vue d’un poste frontalier
©D.R.
©D.R.
Une vue de la délégation gouvernementale en salle de réunion
Seule la production peut durablement tirer l’économie vers le haut
18 19Enjeuxafricains N°26
Le gouverneur de la BCC, Deogratias Mu-
tombo Mwana Nyembo, ne cesse d’en faire
le plaidoyer notamment à l’issue de la si-
xième réunion ordinaire du comité de poli-
tique portant sur l’examen des développe-
ments récents de la conjoncture extérieure
et intérieure, avec un focus sur l’évolution
du marché des changes afin de décider de
la conduite de la politique monétaire et de
change appropriée à cette situation.
« On a beaucoup épilogué sur les causes
et les facteurs à la base de la dégradation
qu’on connait ; je pense que le temps n’est
plus à ce débat, il faut plutôt parler des ré-
formes pertinentes à mettre en œuvre pour
arrêter cette dégradation, ou du moins, ré-
duire progressivement la volatilité. Il faut
accélérer l’exécution de ces actions car
tout retard va amplifier la situation diffi-
cile qu’on connait depuis longtemps et qui
risque encore de compliquer davantage cet
effort d’ajustement. Plus concrètement, il
faut aujourd’hui des réformes budgétaires
pour améliorer la mobilisation des res-
sources financières et des réformes struc-
turelles pour accroitre l’offre des devises
et la production intérieure des biens de
consommation courante ».
Propos du gouverneur de la Banque centrale
du Congo, Deogratias Mutombo Mwana
Nyembo, manifestement décidé à prendre le
taureau par les cornes face à une situation
économique délétère. Les causes du ma-
rasme économique du pays étant connues,
il invite le gouvernement et l’ensemble des
pouvoirs publics à une mobilisation tous
azimuts pour mettre en œuvre des réformes
indispensables au redressement national.
Pour lui, il faut d’urgence résorber le défi-
cit budgétaire, puis réorganiser le système
fiscal et accentuer la lutte contre la fraude
et l’évasion fiscale pour améliorer la mobi-
lisation des recettes. Le gouvernement doit
en outre œuvrer à l’élargissement de l’as-
siette fiscale en multipliant des stratégies de
mobilisation des recettes, notamment des
prospections d’indentifications de niches et
d’autres secteurs encore non fiscalisées ou
fiscalisées de façon non optimale. Ce n’est
pas tout. L’exécutif congolais est invité à
finaliser la réforme sur l’émission des titres
du trésor et à lancer très rapidement à très
court terme les premières opérations pour
assurer un financement non monétaire et
non inflationniste du déficit public. Sans
oublier bien entendu, l’appel au finan-
cement extérieur comme par exemple
l’émission des eurobonds avec l’aide des
institutions financières internationales,
la sollicitation de crédits renouvelables
auprès des banques de développement
régionales, africaines même asiatiques,
sachant que le pays doit massivement sou-
tenir le secteur privé national. « Le ratio
très faible endettement – PIB que nous
avons est un facteur qui réduit le risque,
et donc favorable à la levée de fonds »,
explique le gouverneur.
L’autre action à mener sans délai pour
faire face à la situation porte sur le rapa-
triement des recettes d’exportation des
entreprises titulaires de droit minier. Sur ce
point, l’exécutif congolais est sur la même
longueur d’onde avec la Banque centrale.
« Il est inacceptable que jusqu’à ce jour, au
regard du nombre de licences d’exportation
des produits miniers délivrées, en l’occur-
rence, le cuivre et le cobalt, et de la valeur
de ces licences depuis le début de l’année,
puis l’évolution favorable du cours du
cuivre qui est d’une moyenne aujourd’hui
de 5 600 dollars la tonne, du cobalt qui est
à 60 000 dollars à fin juin contre moins de
23 000 dollars en 2015, que le rapatrie-
ment des devises demeure toujours faible »,
dénonce le gouverneur, visiblement scanda-
lisé. Il y a comme une volonté des acteurs
miniers de contourner la réglementation en
vigueur et de se soustraire aux obligations lé-
gales en ce qui concerne le rapatriement des
devises. Une mauvaise foi contre laquelle,
le gouvernement compte sévir dans les se-
maines à venir, notamment en durcissant le
régime des sanctions pour non-respect de la
réglementation en matière de rapatriement
des recettes d’exportation. « Plus concrète-
ment, nous allons renforcer le contrôle et la
réglementation sur les comptes principaux
à l’étranger des entreprises minières afin
de nous assurer du rapatriement effectif de
40% et des utilisations des 60 % qui restent
à l’étranger », a prévenu le gouverneur.
La colère du gouverneur est bien justifiée, sa-
chant qu’actuellement, 1 000 tonnes de cobalt
dépassent la valeur d’un million de tonnes de
cuivre. Or, officiellement, le pays produit un
million de tonnes de cuivre, mais l’impression
qui se dégage est qu’il y a un manque de trans-
parence dans la présentation des chiffres sur
les productions à l’exportation. Les contrôles
doivent être plus rigoureux, notamment aux
postes frontaliers, dans le Lualaba et le Haut-
Katanga où il est plus facile de frauder sur le
cobalt que sur le cuivre. Les ministères les
plus concernés dans la lutte contre la fraude,
en l’occurrence, celui des Mines et des Fi-
nances, doivent redoubler d’effort pour amé-
liorer l’offre des devises dans l’économie du
pays. Il y va de la stabilité économique et de la
paix sociale de la RDC.
J.V.
Mobilisation des ressources : le temps de l’action
Le temps est celui des actions pour arrêter cette dégradation économique et passer à l’exécution des mesures
envisagées pour contrer cette morosité économique et financière. Pour cela, Il faut mener des réformes budgé-
taires visant à améliorer la mobilisation des ressources financières, et des reformes structurelles pour accroitre
l’offre des devises dans le pays.
Spécial RDC
©D.R.
©D.R.
Le gouverneur de la Banque centrale du Congo, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, tape du poing sur la table
Spécial RDC
La stratégie du bâton
La Banque centrale du Congo a modifié en les durcissant les dispositions légales et réglementaires en matière
de rapatriement des devises par les compagnies minières. Son objectif : lutter contre la fraude et la fuite des
capitaux, pour conforter notamment l’offre des devises sur le marché des changes et financer l’économie.
L’heure est grave. Tout le monde est sur le
pont à la Banque centrale du Congo (BCC).
Faute de réserves suffisantes en devises fortes
dans les caisses de l’institution financière, la
monnaie nationale s’est mise à perdre de la
valeur par rapport au dollar. L’expression «
vivre au taux du jour » est de nouveau sur
toutes les lèvres. Pointés du doigt, les opé-
rateurs miniers basés pour la plupart dans
l’ex-province du Katanga ont été invités, le
20 juillet, à Lubumbashi à une journée de
sensibilisation sur les nouvelles dispositions
de la réglementation de change.
Face à la pénurie de billets verts, le gouver-
neur de la Banque centrale du Congo, Deo-
gratias Mutombo Mwana Nyembo, a tapé
du poing sur la table. D’après lui, la chute
des cours des matières premières n’explique
pas, à elle seule, la crise actuelle. Celle-ci est
aussi due au non rapatriement par les compa-
gnies minières de la fraction légale et régle-
mentaire de leurs recettes d’exportation. Le
code minier impose en effet aux entreprises
opérant dans le secteur minier de rapatrier
vers les banques basées en RDC 40% du
produit tiré de leurs ventes à l’étranger. Or
les statistiques épluchées par les experts de
la BCC ont révélé un comportement répré-
hensible des opérateurs miniers. Plusieurs
d’entre eux ont en effet « développé des pra-
tiques conduisant au non-respect des dispo-
sitions légales et réglementaires en matière
de rapatriement des recettes d’exportation
et de communication d’informations sur
les mouvements des comptes principaux à
l’étranger ». En clair, il y a fraude et fuite des
capitaux. Il fallait donc sévir.Avec l’appui du
gouvernement, la BCC a donc dévoilé des
mesures visant un renforcement « des dispo-
sitions réglementaires afférentes au rapatrie-
ment des revenus des exportations minières
et aux mouvements des comptes principaux à
l’étranger ». Les sanctions pour les contreve-
nants ont également été durcies.
D’où la matinée organisée au Pullman,
dans la capitale cuprifère, pour vulgariser
le nouveau dispositif cambiaire et l’arsenal
de sanctions concoctés par le gouverneur
de la BCC et son équipe. Sans entrer dans
les détails, Deogratias Mutombo Mwana
Nyembo a rappelé les grandes lignes de la
réforme. Il en attend des résultats probants :
« une augmentation du niveau de rapatrie-
ment des recettes d’exportation et de l’offre
des devises et, en filigrane, la stabilisation
du marché des changes ». Il en appelle par
conséquent au devoir républicain de tous
les acteurs opérant dans le secteur minier et
des banques commerciales, pour une mise
en œuvre efficace des dispositions légales
et réglementaires annoncées. Mais gare à la
sanction pour tous ceux qui se hasarderont
à violer les dispositions en vigueur. La note
risque d’être salée. Le gouverneur de la BCC
se veut toutefois optimiste : « avec le rapa-
triement régulier des 40% des recettes d’ex-
portations, il est possible d’amener la RDC à
stabiliser et à relancer son économie. ».
Pour détailler l’éventail de sanctions appli-
cables par la BCC, Deogratias Mutombo
Mwana Nyembo a passé le relais au direc-
teur général chargé de la politique moné-
taire et des opérations bancaires, Jean-Louis
Kayembe wa Kayembe. Comme à son
habitude, ce dernier s’est voulu pédagogue,
illustrant ses propos à l’aide des diapositives
explicites.
D’emblée, le Dg Kayembe, comme on
l’appelle communément, a rappelé la
conjoncture économique actuelle mar-
quée notamment par un phénomène de
« déficits jumeaux » : celui de la balance des
paiements et celui des finances publiques.
Résultat des courses : un ralentissement de
la croissance économique, une dépréciation
de la monnaie nationale et une accélération
de l’inflation. Certes, la riposte du gouverne-
ment et celle de la Banque centrale du Congo
n’ont pas tardé. Des mesures de stabilisa-
tion et de relance économiques sont en train
d’être mises en œuvre. Mais seuls des efforts
de long terme pour réformer l’économie
nationale peuvent avoir des effets notables et
durables. Pour ce faire, il faut notamment di-
versifier la production par l’industrialisation,
réduire la dépendance extérieure du pays,
relancer le secteur agricole et améliorer les
infrastructures de base.
Après ce rappel, Jean-Louis Kayembe a en-
suite appuyé là où ça fait mal en dressant un
tableau des dispositions de la réglementation
de change en matière de rapatriement des
devises. Les contrôles vont être renforcés.
Quant au nouveau régime des sanctions à
l’encontre des entreprises minières, il alour-
dit fortement les pénalités financières pour
les manquements qui seront constatés par les
fins limiers de la Banque centrale du Congo.
Les contrevenants seront donc frappés au
portefeuille.
20 21Enjeuxafricains N°26
Déficit de la balance des paiements
Déficit de la balance des paiements
Evolution des réserves internationales (en millions de USD)
Marché du change : Besoins des banques en devises
Spécial RDC
22 23Enjeuxafricains N°26
Déficit des finances publiques
Evolution du solde du Trésor (en milliards de CDF) Juin 2016 VS juin 2017 (en milliards de CDF)
Conséquences
Ralentissement de la croissance économique
Dépréciation de la monnaie nationale
Les conséquences globales
Accélération de l’inflation
Niveau de rapatriement des recettes d’exportation
SITUATION DES EXPORTATIONS DECLAREES ET DES RECETTES RAPATRIEES
Spécial RDC
24 25Enjeuxafricains N°26
Rappel des dispositions légales et réglementaires
Réglementation de Change
Suivant l’article 266 du Code minier, le Titulaire des
droits miniers :
• est autorisé à exporter et à commercialiser librement
la totalité de sa production sur les marchés interna-
tionaux de son choix ;
• a l’obligation de souscrire, pour toutes ses opérations
d’exportation, un document de change conformé-
ment aux dispositions réglementaires en la matière.
D’après l’article 267 du Code minier, le Titulaire des
droits miniers :
• a l’obligation d’ouvrir un compte en devises appelé
« Compte Principal » auprès d’une banque étrangère
de réputation internationale qui aura des relations
d’affaires avec un correspondant pour la gestion des
fonds qu’il est autorisé à tenir en dehors du Territoire
National ;
• a l’obligation d’ouvrir et de détenir un compte ou un
groupe de comptes en devises étrangères auprès des
banques commerciales agréées, dont le siège social est
en République Démocratique du Congo;
• a l’obligation de communiquer à la Banque Centrale du
Congo et dans les moindres détails, toutes les coordon-
nées du compte principal.
Suivant l’article 266 du Code minier, le Titulaire qui
exporte les produits marchands des mines est :
• autorisé à garder et à gérer dans son compte princi-
pal et ses comptes de service de la dette étrangère les
recettes de ses ventes à l’exportation à concurrence de
60% ;
• tenu de rapatrier obligatoirement dans son compte
national principal tenu en République Démocratique du
Congo, 40% des recettes d’exportations dans les quinze
jours à dater de l’encaissement au Compte Principal à
l’étranger.
Code minier
L’article 73 de la Réglementation du Change dispose
pour le Titulaire des droits miniers qu’il :
• est autorisé à exporter sa production sur le marché
de son choix conformément à la législation minière ;
• est autorisé à souscrire, sur base des prévisions, les
Déclarations modèle « EB ».
• est autorisé à détenir, auprès d’une banque de répu-
tation internationale, un compte dénommé « compte
principal » pour la gestion des fonds qu’il est autorisé
à garder en dehors du territoire national ;
• est autorisé à détenir un ou plusieurs comptes en
monnaies étrangères auprès du système bancaire
national ;
• a l’obligation de communiquer à la Banque Centrale
les coordonnées des comptes ouverts
D’après les articles 76 et 77 de la Réglementation
du Change,
• Les recettes d’exportation des produits miniers (100
%) doivent être reçues dans le compte principal à
l’étranger dans les 45 jours à dater de l’embarque-
ment ;
• La quotité de 40 % des recettes d’exportation à
rapatrier obligatoirement doit être encaissée dans
un compte ouvert auprès de la Banque intervenante
dans les 15 jours à dater de l’encaissement des
fonds dans le compte principal à l’étranger.
Nouveau régime des sanctions
Communication tardive à la Banque Centrale des
coordonnées bancaires du compte principal ouvert à
l’étranger :
Défaut de communication à la Banque Centrale des
coordonnées bancaires du compte principal ouvert à
l’étranger :
Transmission tardive du rapport mensuel sur les
mouvements des fonds versés dans le compte
principal en devises à l’étranger, ainsi que les réfé-
rences des dossiers d’exportation sur les recettes
versées dans ce compte :
Défaut de transmission du rapport mensuel sur
les mouvements des fonds versés dans le compte
principal en devises à l’étranger, ainsi que les réfé-
rences des dossiers d’exportation sur les recettes
versées dans ce compte :
Transmission des données erronées dans le rap-
port mensuel sur les mouvements des fonds versés
dans le compte principal en devises à l’étranger :
Mauvaise transcription des données dans le rap-
port mensuel sur les mouvements des fonds versés
dans le compte principal en devises à l’étranger :  
Réalisation d’une exportation des produits mi-
niers par le titulaire de droits miniers indexé par
la Banque Centrale pour non communication des
coordonnées bancaires du compte principal à
l’étranger :
Manquements Tarifs et conditions
ANCIEN TARIF : CDF 500.000 et obligation de les commu-
niquer endéans 5 jours ouvrés ;
NOUVEAU TARIF : CDF 5 000 000,00 ;
ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de les com-
muniquer endéans 5 jours ouvrés ;
NOUVEAU TARIF
• CDF 50.000.000 et obligation de les communiquer en-
déans 5 jours ouvrés ;
• En cas de résistance après les 5 jours : CDF
100.000.000 ;
• En cas d’obstination : CDF 200.000.000-mise à l’index
de l’opérateur économique
ANCIEN TARIF : CDF 500.000 par jour de retard et obli-
gation de régulariser dans un délai de 7 jours ouvrés
NOUVEAU TARIF : CDF 1.000.000 par jour de retard
et obligation de régulariser dans un délai de 7 jours
ouvrés ;
ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de régu-
lariser dans un délai de 7 jours ouvrés;
NOUVEAU TARIF : CDF 50.000.000 et obligation de
régulariser dans un délai de 7 jours ouvrés
ANCIEN TARIF : CDF 800.000 par donnée transmise +
obligation de les corriger ;
NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 par donnée transmise
+ obligation de les corriger dans un délai de 7 jours
ouvrés à dater de la réception de la lettre de la BCC ;
ANCIEN TARIF : CDF 100.000 par donnée ;
NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 par donnée + obliga-
tion de les corriger dans un délai de 7 jours ouvrés à
dater de la réception de la lettre de la BCC ;
ANCIEN TARIF : 2 % de la valeur exportée et obligation
de communiquer lesdites coordonnées ;
NOUVEAU TARIF :
• 20 % de la valeur exportée et poursuites judiciaires ;
• Tout complice à cette opération frauduleuse est pas-
sible d’une pénalité de 40 % de la valeur exportée
frauduleusement ;
27Enjeuxafricains N°2626
Spécial RDC
Nouveau régime des sanctions
Manquements Tarifs et conditions
ANCIEN TARIF : 0,5 % du montant par jour de retard et
obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés ;
NOUVEAU TARIF : 1 % du montant par jour de retard sible
d’une pénalité de 40 % de la valeur exportée frauduleu-
sement ;
ANCIEN TARIF : 2 % du montant non rapatrié et obligation
de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés;
NOUVEAU TARIF : Rapatriement de la quotité de 40 %
des recettes d’exportation par toute société n’ayant pas le
droit reconnu aux titulaires des droits miniers : 10 % du
montant global de l’exportation et obligation de rapa-
trier le montant gardé à l’étranger dans un délai de 10
jours ouvrés ; 
ANCIEN TARIF : 1 % du montant non rapatrié et obligation
de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés
NOUVEAU TARIF :
• 5 % du montant non rapatrié et obligation de rapatrier
dans un délai de 10 jours ouvrés ;
• En cas de récidive pour défaut de rapatriement : 10 %
du montant non rapatrié et obligation de rapatrier dans
un délai de 10 jours ouvrés ;
• En cas d’obstination dans le défaut de rapatriement
20 % du montant non rapatrié et mise à l’index de l’opé-
rateur économique ;
ANCIEN TARIF : 1% du montant transféré et obligation de
rappeler le montant transféré dans un délai de 10 jours
ouvrés
NOUVEAU TARIF : 10 % du montant transféré et obliga-
tion de rappeler le montant transféré dans un délai de 10
jours ouvrés ; 
ANCIEN TARIF :
• 0,5 % pour non déclaration du montant ;
• 0,3 % pour défaut de prélèvement de la RSC ;
• 0,2 % de la RSC à prélever sur le montant assujetti ;
NOUVEAU TARIF :
• 1,5 % pour non déclaration du montant ;
• 1 % pour défaut de paiement de la RSC ;
• 0,5 % de la RSC sur le montant assujetti ;
Rapatriement tardif des recettes d’exportation :
Rapatriement de la quotité de 40 % des recettes
d’exportation par toute société n’ayant pas le droit
reconnu aux titulaires des droits miniers :
Défaut de rapatriement des recettes d’exportations
(Défaut de rapatriement de la quotité légale par les
opérateurs détenteurs des titres miniers) :  
Utilisation de la quotité légale rapatriée pour couvrir
les dépenses des financements des importations ou
tout autre paiement international  ;
Défaut de paiement de la RSC sur les opérations assu-
jetties effectuées sur les comptes tenus à l’étranger
du titulaire des droits miniers :
Nouveau régime des sanctions
Transmission tardive de l’ordre de paiement de la RSC
sur les opérations assujetties :
Défaut de transmission de l’ordre de paiement de la
RSC sur les opérations assujetties : CDF 250.000 ;
Refus par le titulaire des droits miniers d’accuser ré-
ception de la correspondance de la Banque Centrale
annonçant la mission de vérification sur les comptes
à l’étranger : CDF 10.000.000 et obligation d’accuser
réception dans un délai de 5 jours ouvrés
Défaut de transmission à la Banque Centrale de la
copie légalisée de la lettre adressée à son banquier
étranger, autorisant la vérification des opérations
effectuées sur son compte principal :
Refus de recevoir la mission de la Banque Centrale
dans les 2 jours ouvrés à dater de la présentation de
l’ordre de mission auprès de la société (Refus d’accu-
sé réception de l’OM de la BCC) :
Frais de contrôle pour une mission de suivi des dispo-
sitions règlementaires du change :
Refus de signer le p.-v. de mission :
Manquements Tarifs et conditions
ANCIEN TARIF : CDF 100.000 ;
NOUVEAU TARIF : CDF 1.000.000
ANCIEN TARIF : CDF 250.000 ;
NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000
ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 ;
NOUVEAU TARIF : CDF 100.000.000
ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de régula-
riser dans un délai de 10 jours ouvrés ;
NOUVEAU TARIF :
• CDF 250.000.000 et obligation de régulariser dans un
délai de 10 jours ouvrés ;
• En cas de récidive, CDF 500.000.000 du et obligation de
régulariser dans un délai de 10 jours ouvrés ;
• En cas d’obstination dans le refus après la pénalité ins-
crite au point : 20 % des recettes rapatriées mensuel-
lement et mise à l’index de l’opérateur économique ;
ANCIEN TARIF : CDF 25.000.000 ;
NOUVEAU TARIF : CDF 250.000.000
ANCIEN TARIF : CDF 2.500.000 ;
NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 ;
CDF 50.000.000 + établissement d’un P.-V. de carence et
application des conclusions de la mission
28 29Enjeuxafricains N°26
En couverture RDC
« La particularité dans la détermination des
prévisions des recettes fiscales consignées
dans la loi de finances 2017 est qu’elles
n’ont pas été évaluées suivant les éléments
de cadrage macroéconomiques qu’arrête
le ministère du Plan. Le gouvernement a
exprimé des objectifs optimistes et volon-
taristes en cadrant lesdites prévisions sur la
pression fiscale de 13% du PIB de l’année,
qu’on retrouve dans les pays limitrophes
bien que l’activité économique ne soit pas
structurée de la même manière. Des recettes
additionnelles ont été ajoutées à ces prévi-
sions au niveau des travaux en commission
à l’Assemblée nationale. Aussi, pour 2017,
les recettes à mobiliser par la DGI sont de
2 707,2 milliards de francs congolais, soit
une augmentation de 1 000 milliards de
francs congolais par rapport à la loi de fi-
nances rectificative de 2016. »
Les grands défis de la DGI en 2017
« L’élargissement et la maîtrise de l’assiette
fiscale (base imposable et répertoires des
assujettis) sont des défis prioritaires pour la
DGI, dans toutes les natures d’impôt (IPR,
IER, TVA, IBP de tous types d’entreprises
spécifiquement celles de petite taille opé-
rant dans le secteur informel). Un autre défi
est l’appel au personnel des services opéra-
tionnels à plus d’ardeur et d’implication au
travail sous l’accompagnement des services
dédiés au pilotage des activités de l’impôt
(gestion, contrôle, recouvrement et conten-
tieux). Enfin, la haute direction a réfléchi sur
des stratégies innovantes communiquées au
ministère pour leur prise en charge par le
gouvernement de la République. »
L’impact de la dépréciation du franc congolais
« La dépréciation du franc congolais obser-
vée depuis quelque temps a entraîné l’em-
ballement des prix des biens et services
sur les marchés, avec son corolaire qui est
la baisse du pouvoir d’achat rétrécissant le
volume de consommation. D’où un impact
négatif certain sur le niveau de collecte de
la TVA qui ne peut s’améliorer dans un tel
contexte. Il en est de même de l’IPR (im-
pôt professionnel sur les rémunérations).
Les revenus salariaux des fonctionnaires,
agents publics et autres employés de divers
secteurs de la vie économique ne sont pas
indexés. Faute de leur réajustement, l’impôt
retenu sur ces rémunérations reste à son
niveau habituel en francs congolais, mais
perd en valeur constante. L’administration
se propose d’initier des enquêtes fiscales
auprès de certaines entreprises de quelques
secteurs ciblés à charge desquelles pèse la
présomption de minoration d’assiette impo-
sable. »
Etat de collecte de la TVA
« Lorsqu’on interroge les statistiques des
recettes, on constate que, d’une tendance
haussière des recettes TVA au cours des
premières années de son instauration, on
est passé à une baisse significative desdites
recettes. A titre d’exemple, en comparant
le comportement des recettes TVA des pre-
miers semestres 2016 et 2017, on constate
une baisse en termes constants d’environ
28,6%. Cette contreperformance est due en
grande partie à la baisse d’activité écono-
mique, à la baisse de consommation, même
si on peut noter également les problèmes
liés à l’incivisme des assujettis. Devant
cette situation, l’administration ne peut
que prendre des mesures qui vont dans le
sens de l’élargissement et de sa maîtrise du
répertoire des assujettis et du renforcement
du contrôle fiscal dans toutes ses formes
notamment les régularisations en cas de dé-
faillance ou de minoration des bases impo-
sables, d’une part, et de l’intensification des
contrôles ponctuels auprès des assujettis,
d’autre part. »
Améliorer les relations entre les contribuables
et la DGI
« Depuis le début du mandat de l’équipe
dirigeante actuelle, le DG s’est, plus d’une
fois, exprimé pour un partenariat franc et
responsable avec le monde des affaires. Cela
se traduit notamment par une amélioration
de la qualité de service au contribuable : une
seule échéance de paiement dans le mois, la
mise en œuvre de la télé-déclaration et du
télépaiement, apurement des paiements à
temps réel. Un tel partenariat consiste égale-
ment à susciter en contrepartie le consente-
ment à l’impôt à travers l’accomplissement
volontaire des obligations déclaratives et de
paiement à travers des déclarations sincères
et exactes. »
Pour une motivation accrue du personnel de
la DGI
« La haute direction s’implique pour ratio-
naliser les conditions de travail avec des
infrastructures modernes en vue de renfor-
cer l’image de l’administration. Le siège
de la direction de la Province fiscale du
Katanga a été inauguré en mars dernier ;
la semaine du 24 juillet, les nouveaux bâti-
ments devant abriter le Centre des impôts
de Kisangani et le Centre d’impôts syn-
thétiques de Bunia ont aussi été inaugurés.
Des efforts sont entrepris avec la délégation
syndicale pour améliorer la motivation de
l’agent des impôts. Enfin, les outils pour la
mise en œuvre des règles d’éthique et de
déontologie professionnelle sont en phase
de validation pour un meilleur encadrement
et un contrôle interne efficient du personnel
de la DGI. »
Propos recueillis par FK
Le bilan fiscal de l’année 2016
« La mobilisation des recettes fiscales en
2016 a fait face, d’une part, à un contexte
économique confronté à la baisse des cours
des principales matières premières du pays
(à savoir : le cuivre, le cobalt, etc.) et, d’autre
part, à un contexte politique difficile. De la
loi de finances n° 15/021 du 31 décembre
2015 pour l’exercice 2016 qui assignait les
prévisions des recettes budgétaires volonta-
ristes de 2 296 milliards de francs congolais
(CDF) à la DGI, le gouvernement est passé
à un Collectif budgétaire voté en juin 2016
qui ramène les recettes fiscales de l’exercice
à 1 737 milliards de francs congolais. Par
rapport à ces prévisions, la Direction géné-
rale des impôts (DGI) a réalisé des recettes
comptabilisées, encore provisoires, de 1 677
milliards de francs congolais, soit un taux
d’exécution de 96,53%. Ce qui, comme per-
formance, devrait être apprécié à sa juste
dimension. »
L’impact de la baisse en 2016 des cours du
pétrole et des produits miniers
« Comparées aux réalisations de l’année
2015, les recettes de ces deux secteurs ont
subi un coup à la baisse. Les raisons sont
évidentes : d’une part, le cours du cuivre est
passé de 7 000 dollars la tonne en 2014 à
5 000 dollars la tonne en 2015, et d’autre
part pour le baril du pétrole brut, la
moyenne sur laquelle sont calculées les
avances mensuelles versées au Trésor, est
passée du prix de 48 dollars en 2015 à 40 en
2016, sans compter les récupérations sur le
trop perçu de 2015. Chez les miniers, les re-
cettes en 2016 ont connu un gap de 34,32%
par rapport à 2015 (464,891 milliards de
francs congolais contre 707,835 milliards).
Dans le secteur des pétroliers producteurs,
la baisse est plus accentuée, près de 55%.
Les réalisations passent de 78,417 milliards
de francs congolais en 2015 à 35,539 mil-
liards en 2016 pour une production expor-
tée restée relativement stable (plus ou moins
8 millions de baril). Toutefois, il y a lieu de
signaler qu’au regard des prévisions bud-
gétaires pour l’année 2016 des recettes du
secteur minier (fixées à 350,759 milliards
de francs congolais), la DGI a mobilisé
464,891 milliards de francs congolais, soit
un taux de réalisation de 132%. En ce qui
concerne le présent exercice budgétaire,
les recettes du secteur minier, tous impôts
confondus, s’élèvent à 227,848 milliards de
francs congolais à fin mai 2017 tandis que le
secteur pétrolier atteint, de son côté, 28,605
milliards de francs congolais à fin avril. »
Les objectifs assignés à la DGI dans la loi de
finances 2017
Entretien
José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC
« la DGI veut un partenariat franc et responsable avec
le monde des affaires »
Nommé l’an dernier à la tête de la
direction générale des impôts (DGI),
José Sele Yalaghuli tente de mobi-
liser, dans une conjoncture écono-
mique peu favorable, ses agents
pour atteindre les objectifs fixés par
le gouvernement.
©DGI
José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC
©DGI
Le directeur général des impôts anime une réunion avec ses deux adjoints, Ngoy Yav Nzam et Lilie Muvova Bondo
31Enjeuxafricains N°2630
L’objectif de l’Etat congolais était de
suivre l’exemple de seize autres pays afri-
cains (dont quatorze pays francophones)
partageant notamment la même source
juridique dite « romano-germanique »
et qui, depuis les années 1990, avaient
décidé de moderniser et de sécuriser, de
manière harmonisée et même unifiée, leur
cadre juridique, afin de mieux attirer les
investisseurs et de faciliter la création
d’entreprises, par la même occasion de
contribuer à leur développement socio-
économique.
Le choix de l’adhésion à l’Ohada a ainsi
permis à la RDC d’éviter un long, com-
plexe et coûteux processus de modernisa-
tion, texte par texte, des lois et règlements
obsolètes (datant souvent de l’époque
coloniale ou post-indépendance), qui ré-
gissaient le droit des affaires congolais1
.
Ce choix aura aussi marqué l’intégration
de la RDC dans une des organisations
régionales africaines qui s’est révélée
parmi les plus efficaces à ce jour. Des
dizaines d’études, de rapports, d’analyses
économiques, de thèses, de conférences,
etc., ont ainsi démontré, ces dernières
années, l’effet globalement positif de
l’application du droit Ohada sur l’attracti-
vité économique et la croissance des pays
membres, donc sur leur développement
économique et social2
. Au regard des in-
dicateurs sur le climat des affaires qu’uti-
lise la Société financière internationale
(SFI, une branche de la Banque mondiale)
pour dresser son rapport annuel « Doing
Business », la RDC est d’ailleurs passée,
dans l’édition 2016, de la 172ème place
à la 89ème place, puis à la 43ème place
dans l’édition 2017. Cette notable amélio-
ration, certes sujette à certaines réserves
légitimes, est en partie due aux atouts que
le droit Ohada a apporté à la RDC.
Pour autant, l’on aurait tort de penser que
le droit Ohada est un droit adapté surtout
aux grandes entreprises ou un droit qui,
parce que très inspiré du droit français,
serait inadapté aux « réalités » locales
africaines. D’une part, il a fait ses preuves
depuis plus de vingt ans dans seize autres
pays africains, où plus grand monde ne
conteste, sauf à la marge, l’intérêt du
droit Ohada. D’autre part, ce droit uni-
fié permet, non seulement aux grandes
sociétés, mais aussi à tout entrepreneur
ou commerçant, quels que soient son ni-
veau social, sa nationalité ou son genre,
d’accéder à des outils juridiques et comp-
tables modernes et communs au sein des
dix-sept pays membres de l’Ohada. Il per-
met aussi à tout créancier, quel que soit
le montant de sa créance, de recourir à
des procédures relativement simples pour
recouvrer sa créance. Il permet aussi, par
exemple, aux justiciables de savoir que,
en dernier ressort, sa cause pourrait être
entendue par une instance de cassation
supranationale impartiale et spécialisée.
« Quand un juge sait que l’interprétation
qu’il a à faire d’un texte pourra faire l’ob-
jet d’un contrôle d’une autre juridiction
qui est supranationale, il aura tendance
à mieux appliquer le droit qu’à faire ce
que bon lui semble », indiquait le Pro-
fesseur Grégoire Bakandeja (lors d’une
conférence-débat au Barreau de Matadi
en 2014).
Le Bilan
Entrons un peu plus en profondeur dans le
bilan de l’application du droit Ohada en
RDC depuis près de cinq ans.
L’un des domaines qui a le plus fait couler
d’encre en RDC, depuis 2012, est celui des
procédures de recouvrement des créances.
De nombreuses formations ont été don-
nées sur ce thème aux juristes, magistrats,
greffiers, entreprises, notamment sous
l’impulsion de la Commission nationale
Ohada de la RDC, présidée par le Pro-
fesseur Roger Masamba3
. De nombreuses
procédures sont initiées chaque jour en
cette matière. Force est cependant de
constater qu’il existe encore de sérieuses
lacunes dans la connaissance et la mise en
œuvre pratique de ces procédures, tant au
sein des entreprises (privées et publiques)
qu’au sein des cours et tribunaux, quand
ce n’est pas simplement de la résistance à
la correcte application de règles pourtant
claires et incontestables pour la plupart.
Par ailleurs, certaines difficultés, tantôt
d’interprétation, tantôt d’adaptation aux
règles de procédure civile, existent bel et
bien, et les organes de l’Ohada devraient
justement bientôt amender l’Acte Uni-
forme concerné pour corriger, adapter et
préciser certaines dispositions actuelles.
De plus, le fait qu’en RDC, les règles rela-
tives aux notaires, aux huissiers de justice
ou encore à la procédure de référé, tels
que fixées par le droit Ohada, ne soient
pas encore harmonisées avec l’Ohada, est
source de problèmes pour les praticiens.
Dans le domaine du droit des sûretés (ou
garanties du crédit), le droit Ohada a clai-
rement apporté des outils efficaces pour
mieux sécuriser le crédit aux entreprises
et le financement de projets en RDC. L’on
regrettera cependant qu’en pratique, pour
diverses raisons plus ou moins légitimes
au regard du contexte congolais, les prê-
teurs de deniers privilégient très large-
ment le recours à l’hypothèque immobi-
lière (sorte de « reine des sûretés »), ce
qui restreint finalement souvent l’accès
au crédit aux propriétaires fonciers, et
amène parfois les autres à devoir recou-
rir à des tiers amenant un bien immobilier
en garantie (moyennant, généralement,
une copieuse « commission » sur le cré-
dit obtenu). Il apparaît aussi que, hormis
les hypothèques, les autres types de sûre-
tés constituées sont rarement enregistrées
au Registre du Commerce et du Crédit
Mobilier (RCCM), en contrariété avec les
règles légales, au détriment de l’efficacité
de la sûreté, puisqu’elle ne pourra alors
pas être opposable aux tiers, et qu’un dé-
biteur pourra facilement consentir fraudu-
leusement plusieurs sûretés sur un même
bien.
Le droit commercial et des sociétés com-
merciales issu de l’Ohada est globalement
considéré, par une majorité de juristes et
d’opérateurs économiques, comme ayant
apporté un cadre plus moderne, plus com-
plet, et plus sécurisant en RDC. pour les
commerçants et les entreprises. Associé
notamment à la mise en place, en 2013,
du Guichet unique de création d’entre-
prise, il est devenu assez simple, rapide et
peu onéreux de créer une société en RDC.
(quelques jours et quelques centaines de
dollars américains), surtout comparati-
vement au formalisme long, complexe
et coûteux qui avait cours avant 2012.
Ce sera bientôt encore plus vrai lorsque
le RCCM sera doté des derniers outils
d’informatisation prévus par l’Ohada,
comme le RCCM du Togo il y a quelques
semaines4
.
Avec l’Ohada, les droits des associés/
actionnaires minoritaires de sociétés sont
consacrés et protégés, quoiqu’encore peu
connus et utilisés, hormis dans les plus
grandes sociétés. La possibilité de créer
des sociétés unipersonnelles est largement
appréciée. Les règles de comptabilité et
de gouvernance des sociétés sont venues
dresser des garde-fous nécessaires face
aux abus de pouvoir et abus de gestion
des dirigeants d’entreprises. Toutefois,
là aussi, leur respect réel est à géométrie
variable, en fonction de la taille des en-
treprises et de la structure de leur action-
nariat. Il n’est ainsi pas rare de constater
l’absence de registres de sociétés, la tenue
fictive des assemblées générales, l’élabo-
ration de plusieurs états financiers pour
un même exercice social (pour l’admi-
nistration fiscale, pour la banque, pour
les associés), l’absence de nomination de
commissaires aux comptes, ou encore la
conclusion de conventions réglementées
voire interdites.
L’on déplore par ailleurs une méconnais-
sance persistante, à moins qu’il s’agisse
d’un scepticisme réel, pour des structures
comme la société par actions simplifiée
(SAS) - pourtant moins contraignante
que la société à responsabilité limitée
(SARL) ou la société anonyme (SA) -,le
groupement d’intérêt économique (GIE),
ou encore la société coopérative. Les
pactes d’actionnaires ou la création de
diverses catégories d’actions et de valeurs
mobilières sont peu courants. Il est égale-
ment dommage que les textes encadrant
le statut fiscal et social de l’entreprenant
n’aient pas encore été fixés en RDC, mal-
gré l’intérêt que pourrait représenter, dans
ce pays, cette nouvelle catégorie d’entre-
Etat de l’application de l’Ohada en République démocratique du Congo
Un bilan globalement positif
Par Romain Battajon (*)
La République démocratique du Congo (RDC) a adhéré à l’Ohada (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du
droit des affaires) le 11 juillet 2012, après trois années de discussions. Deux mois plus tard, le Traité de l’Ohada,
les actes uniformes et les règlements d’application sont entrés en vigueur. Où en est-on aujourd’hui ?
©D.R.
En couverture RDC
32 33Enjeuxafricains N°26
preneur introduite par l’Ohada en 2010-
2011.
Une des autres innovations de l’Ohada
qui aurait pu profiter au financement de
l’économie de la RDC est l’appel public
à l’épargne accessible à certaines sociétés
anonymes, alors que c’était expressément
interdit par les lois congolaises antérieures5
.
Mais puisque la RDC. n’a pas mis en place
de marchés financiers et n’est pas membre
de l’une des bourses de valeurs mobilières
existantes, les entreprises congolaises ne
peuvent toujours pas bénéficier des atouts
de ces instruments pour pouvoir lever des
capitaux et financer leurs projets grâce aux
émissions d’actions et d’obligations au pro-
fit d’investisseurs, locaux ou internationaux.
Nous devons aussi relever que peu d’entre-
prises recourent, par méconnaissance et
pour échapper aux conséquences « réputa-
tionnelles » qu’elles ont encore, aux pro-
cédures collectives d’apurement du passif
(conciliation, redressement, liquidation). Si
bien que beaucoup de sociétés tombent puis
restent pendant des mois voire des années
en état de cessation des paiements, ou bien
se mettent « en sommeil » (ce qui, en droit,
n’a aucune valeur), creusant ainsi leur pas-
sif et plaçant leurs dirigeants et actionnaires
dans l’illégalité, alors qu’elles auraient pu
trouver dans l’une des procédures collec-
tives désormais existantes des solutions à
leur crise.
En réalité, parmi les considérations et
constats synthétisés ici, les défaillances
d’application et d’efficacité du droit Ohada
en RDC ne nous paraissent pas tant liées à la
qualité des outils juridiques de l’Ohada, qui
demeurent certes perfectibles, qu’à l’utilisa-
tion (ou non-utilisation) qui en est faite par
certains, dans les entreprises, les institutions
administrations et les instances judiciaires.
Malgré les défaillances et les mauvaises
pratiques évoquées, le bilan (ainsi que les
perspectives) de l’Ohada en RDC est, ob-
jectivement, plus positif que négatif. Et il
faut rappeler que cinq ans d’application de
l’Ohada, c’est encore très court pour que
ces nouveaux instruments soient maîtrisés
par tous et utilisés à bon escient. Le travail
de la CNO-RDC, de nombreux barreaux
congolais, et de bien d’autres institutions
(congolaises et non congolaises), à compter
par les organes de l’Ohada, sera, à coup sûr,
de plus en plus fructueux sur le long terme.
Et gageons que, dans quelques années, la
question ne fera plus débat.
Mais l’Ohada n’est pas non plus, comme
certains ont pu le penser naïvement, une
espèce de remède miracle qui permettrait,
par sa seule introduction dans un corps
social et juridique congolais habitué à des
décennies de lois civiles et commerciales
en partie archaïques, de résoudre toutes les
difficultés économiques ou de rendre le cli-
mat des affaires paradisiaque. Il ne pourra
engendrer ses meilleurs effets qu’accom-
pagné, notamment, de la simplification des
règles administratives et fiscales (domaines
qui ne relèvent pas de l’Ohada), de la mo-
dernisation du droit des obligations et du
droit des biens, de l’adoption de procédures
judiciaires adéquates, ou encore, bien sûr,
de la poursuite du renforcement des capaci-
tés techniques et de bonne gouvernance des
institutions administratives et judiciaires.
(*), Avocat aux barreaux de Paris et de Kinshasa/Ma-
tete, Professeur invité à l’Université Libre de Kinshasa,
Président du think tank Africa Business  Legal Exper-
tise/Club 54
1
Joseph Kamga et Marlize Elodie NgnidjioTsapi, « L’in-
sertion du droit de l’Ohada en RD Congo : les roses et
les épines », Revue de l’ERSUMA - Droit des affaires
- Pratique Professionnelle, N° 2 - Mars 2013, Etudes.
2
Par exemple : « Droit et attractivité économique. Le cas
de l’OHADA », A.E.D.J., IRJS Editions, 2013
3
« Mise en œuvre de l’OHADA en RDC – Bilan et pers-
pectives », CNO-RDC, mars 2015
4
Voir : http://www.ohada.com/actualite/3486/togo-ame-
lioration-du-climat-des-affaires-dans-l-espace-ohada.
html
5
Joseph Kamga et Marlize Elodie NgnidjioTsapi, précité
©D.R.
Conférence Ohada à l’Université de Kalemie (Tanganyika), le 29 juin 2017
En couverture RDC
Transport aérien
Congo Airways met le cap sur l’international
Après s’être attaqué aux charges d’exploitation, le directeur général de la compagnie aérienne congolaise, Désiré
Balazire, veut renforcer sa flotte afin d’élargir son rayon d’action.
Invité en juin dernier au Salon aéronautique
du Bourget, près de Paris, le directeur général
de Congo Airways n’a pas perdu son temps.
Il y a multiplié les rendez-vous profession-
nels. Bien évidemment, il a pu rencontrer les
constructeurs dont les avions constituent la
flotte de la compagnie, à savoir : Airbus et
le canadien Bombardier. En effet, la flotte de
CongoAirways est composée de cinq aéronefs
dont deux A320 et deux Bombardier Q400.
Les dirigeants de Congo Airways ont égale-
ment été aperçus dans le chalet du construc-
teur brésilien Embraer, mais surtout dans celui
de Boeing dont un des appareils a intégré la
flotte du transporteur congolais. Il s’agit d’un
B737-800, qui a été pris en location auprès
d’Ethiopian Airlines. La flotte de Congo
Airways devrait être renforcée dans les pro-
chaines années afin de proposer des vols long-
courriers mais aussi d’ajouter des dessertes
sous-régionales comme Douala, Bujumbura,
Nairobi, Dar-es Salam, etc. Pour ces vols
sous-régionaux, la compagnie devrait opter
pour desA320 etA321 ou pour des B737-800.
« C’est la nature du financement qui nous
permettra de prendre une décision », insiste
Désiré Balazire. Il n’exclut pas de lever des
fonds sur les marchés financiers.
Comme il faut des moteurs pour faire voler un
avion, le Dg de Congo Airways a également
mis à profit son séjour parisien pour prendre
langue avec les principaux motoristes présents
au Bourget. Il s’agit notamment de General
Electric (GE), de CFM, etc. D’autres entre-
tiens étaient également prévus à l’agenda du
patron de CongoAirways. Ce dernier a pu ain-
si discuter avec plusieurs loueurs importants
d’avions. L’avantage d’un salon professionnel
comme celui du Bourget est qu’il réunit en
un seul lieu tous les corps de métier et toutes
les activités directement liés à l’aviation. Dé-
siré Balazire a profité de cette occasion pour
poursuivre les discussions entamées, il y a
quelques mois à Kinshasa, en vue du renou-
vellement de la police d’assurance des avions
de la compagnie. Une délégation du courtier
Arthur J. Gallagher  Co., l’un des plus im-
portants au monde, s’était déjà rendue en mars
dernier à Kinshasa. Le Bourget a donc servi de
cadre aux deux parties pour faire avancer ce
dossier important. Le Dg de Congo Airways
a pu également s’entretenir avec les dirigeants
d’Air France Industries sur certains problèmes
concernant le partenariat entre les deux enti-
tés. Des agents de la compagnie congolaise
ont achevé récemment leur formation à Kin-
shasa sous l’encadrement des experts envoyés
par cette filiale du groupe Air France.
En prévision de l’accroissement de sa flotte,
CongoAirways cherche à recruter des pilotes.
« Nous allons viser des pilotes congolais
bien formés », précise le Dg. Et d’ajouter que
l’objectif de la compagnie est d’avoir à moyen
terme ses propres pilotes. Désiré Balazire
vise notamment des jeunes pilotes possédant
une centaine d’heures de vol. Il n’exclut pas
d’accorder des bourses aux élèves pilotes pour
parfaire leur formation à l’étranger. Une poli-
tique qui n’existe plus dans le pays depuis la
fin des années fastes de la défunte compagnie
aérienne nationale, Air Zaïre (ex-Air Congo).
Dans son livre “ Entre ciel et terre ”, le com-
mandant (à la retraite) Simon Diasolua Zitu,
rappelle que le commandant Ilunga Mikanda
et lui sont devenus, le 1er février 1966, les
deux premiers pilotes civils de l’histoire de
la RD Congo, grâce à une bourse offerte à
l’époque par Air Congo.
Pour éviter à la compagnie des erreurs de
jeunesse, son directeur général a ramené les
effectifs à 331 agents contre 426 à son arrivée.
« Nous avons procédé à un ajustement des
effectifs par rapport à la taille de la société »,
explique-t-il. Il n’y a pas que la masse salariale
qui a connu un coup de rabot. D’autres éco-
nomies ont été aussi réalisées : par exemple
30% sur le coût du catering (la restauration à
bord des passagers). La compagnie envisage
de lancer son propre service commissariat.
Elle a entrepris par ailleurs de réduire le poids
des prestataires extérieurs. Elle a acheté par
exemple du matériel pour assurer elle-même
le service lié au handling (terme désignant
la manutention). « Les grandes économies
ont été réalisées au niveau des opérations.
On achète mieux aujourd’hui », se réjouit le
Dg. Dès son arrivée, il a passé au crible tous
les contrats de la compagnie avec ses four-
nisseurs. Certains ont été purement résiliés.
« Petit à petit , on cherche à fonctionner autre-
ment », confie-t-il.
Autre objectif : accroître les recettes de la
compagnie. Celle-ci desservait jusqu’à fin
juin douze aéroports nationaux. Le plan de
développement prévoit l’ouverture de nou-
velles lignes : Bukavu en juillet puis Moanda
avant la fin de l’année. Congo Airways devait
également desservir dès juillet la ville de
Johannesburg, sa première destination hors
des frontières nationales.
F.K.
©D.R.
©D.R.
Le Dg Désiré Balazire
Le B737-800 loué auprès d’Ethiopian Airlines
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  • 1. N°26 2017 www.enjeuxafricains.com / Zone euro : 3,50 € / Zone franc : 2 000 FCFA ©D.R. Spécial RDC “ Il faut sauver le Franc congolais ” Sénégal Le Premier ministre Mahammad Dionne à l’heure du bilan Développement Carlos Lopes : Il faut des plans conçus par les Africains Air Côte d’Ivoire Entrevoit-elle le bout du tunnel ? Matières premières L’Afrique en perte de vitesse Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC)
  • 2. 3Enjeuxafricains N°26 Editorial François Katendi, directeur de la publication Le transfert de Neymar ou la diplomatie du carnet de chèques Le football occupe certes une place importante dans la vie des hommes, mais avec le transfert du joueur brésilien Neymar de Barcelone vers Paris, on entre dans une autre dimension. Le club catalan va empocher quelque 220 millions d’euros pour céder une de ses stars planétaires aux Qataris qui contrôlent le Paris Saint- Germain (PSG). C’est le contrat du siècle battant le record enregistré pas plus tard que l’an dernier avec le transfert de Paul Pogba (pour 120 millions d’euros) de la Juventus de Turin vers Manchester United. On grimpe à des niveaux stratosphé- riques jamais atteints dans l’histoire du ballon rond. Et ce n’est pas fini. Selon les estimations, le footballeur à la coiffure extravagante pourrait gagner chaque année environ 30 millions d’euros. Un tel niveau de rému- nération représente une fortune que très peu de gens peuvent raisonnablement espérer amasser au cours de toute leur existence. Cela dépasse l’entendement. Les amateurs du ballon rond ont déjà forgé leurs arguments : son talent le mérite bien, sa carrière au plus haut niveau est limitée dans le temps (généralement quinze ans) et sa notoriété fera gagner de l’argent à son nouveau club grâce à la vente des maillots et aux produits dérivés estampillés Neymar. Tous ces arguments sont recevables mais ils ne répondent pas aux interrogations légitimes que peuvent avoir ceux qui sont choqués par les sommes colossales en jeu. Après Paul Pogba, Neymar et peut-être Kylian Mbappé, n’entre-t-on pas dans une bulle spécula- tive qui finira par exploser un jour au visage du monde du football ? Avec des conséquences dramatiques pour les footballeurs en herbe, dans les centres de formation ? Heureusement que cette transaction a eu lieu au cœur de l’été. Mais on n’y échap- pera pas à la prochaine rentrée scolaire dans les cours d’école. Imaginez les dis- cussions entre les élèves en culotte courte. Qui pourrait réussir à leur expliquer que c’est en allant à l’école qu’on finit par bien gagner sa vie ? Ils n’auront qu’une envie : vivre comme Neymar et gagner autant que lui. Il devient déjà un modèle pour tous les enfants qui n’aiment pas l’école. Pourquoi se donner tout ce mal si l’on peut gagner beaucoup d’argent en courant derrière un ballon – avec un talent inné quand même ? Les attentes placées par les autorités, les supporters et les dirigeants parisiens – en quête d’une Ligue des champions – dans ce joueur hors pair sont certainement à la hauteur des émoluments proposés. La perle brésilienne a vraiment intérêt à se montrer à la hauteur de leurs attentes. Reste que le prix payé pour s’attirer les services de Neymar est surélevé. On est dans la démesure. On peut être à juste titre scandalisé par une telle transaction et ce que cela représente en réalité. C’est là qu’interviennent les géopolitologues. En signant un chèque de 220 millions d’euros au profit du FC Barcelone, le Qatar qui possède le PSG poursuit un autre objectif : capitaliser sur le nom du footballeur brésilien et gagner la bataille de l’opinion dans le conflit qui l’oppose à ses voisins rangés derrière la puissante Arabie saoudite. Le sport qui vient à la rescousse du politique, il fallait y penser ! Congo Airways dessert la ville de Lubumbashi 9 fois par semaine, Goma 6 fois avec trois vols directs et Kisangani 4 fois avec trois vols directs. La compagnie reste à l’écoute et au service de sa clientèle.
  • 3. Enjeuxafricains N°26 Sommaire Bimestriel international Le magazine économique de l’Afrique www.enjeuxafricains.com Courriel : contact@enjeuxafricains.com Edité par Emergent Sprl Kinshasa - RDC Courriel : enjeuxafricains@yahoo.fr DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : François Katendi                 REDACTEUR EN CHEF : Joachim Vokouma RÉDACTION : Jean-Mathis Foko, Chrizostome Lisasi, Marie Labrune, Serge Noël, Anne Lauris, Brakissa Komara, Yves Laurent Goma, Farida Ayari, Jean-Claude Abalo, Bienvenu Bakwala, Tiego Tiemtore, Alexis Kalambry, Sady Ndiaye, Jean-Vincent Tchienehom, Louis-Philippe Mbadinga, Daniel Bekoutou, Wendy Bashi Diangadianga Ngongo Mukoma, Senior Mfumu, Paul Matendo, Courriel : redaction@enjeuxafricains.com Chroniqueurs : Elikia M’bokolo, Guy Rossatanga-Rignault Hakim Ben hammouda et Claude Sumata Secrétaire de rédaction : Aina Andrison Photographes : Harouna Traoré, Ons Abid, Thino Kiviti, Aymé Katendi et Athis-Photo MAQUETTE (conception et exécution) : Dominique Bruneton CHARGÉE DE MISSION : Miya Katendi MARKETING ET COMMUNICATION : Sonia Housez CONTACT PUBLICITÉ : enjeuxafricains@yahoo.fr Béatrice Lumbu Emergent sprl - Kinshasa Tél. : +243 998 20 11 66 Courriel : enjeuxafricains@yahoo.fr Imprimé en Europe Sommaire 4 5 Laser 6 Tulinabo Salama Mushingi Politique 8 Chronique par Elikia M’Bokolo : L’argent ? Oui, mais comment ? 9 Burundi : Les relations entre Bujumbura et l’Union européenne se dégradent de plus en plus Economie   38 Chronique par Hakim Ben Hammouda : Une hirondelle annonce-t-elle le printemps ? 40 Matières premières : Interview de Brigitte Bocoum, Spécialiste en développement et planification stratégique des ressources naturelles 44 Rapport Cyclope 2017 : L’Afrique en perte de vitesse dans un monde d’incertitudes 45 Le cuivre zambien poussé par un vent d’optimisme 46 Perspectives économiques/BAD : Le temps de l’industrialisation et des entrepreneurs 48 Afreximbank s’inquiète des mesures protectionnistes 50 Gabon : Le FMI et la Banque mondiale à la rescousse 52 Sénégal : Un bilan économique encourageant 54 Interview de Carlos Lopes : « Industrialiser l’Afrique pour améliorer la production agricole et ajouter de la valeur » 56 Atlas : Énergie en Afrique 60 Air Côte d’Ivoire entrevoit-elle le bout du tunnel ? Hommage à Jean-Karim Fall page 66 En couverture RDC 12 L’allocution de Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, gouverneur de la BCC devant les opérateurs miniers 15 Pour une politique économique tournée vers la production intérieure 18 Mobilisation des ressources : le temps de l’action 20 La stratégie du bâton 24 Rappel des dispositions légales et réglementaires 25 Nouveau régime des sanctions 28 Entretien avec José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC 30 Etat de l’application de l’Ohada : Un bilan globalement positif 33 Congo Airways met le cap sur l’international 34 Entretien avec Eric Mboma, Dg de l’Arca 36 La diaspora à l’agenda gouvernemental Pierre Nkurunziza page 9 Société 62 Maroc : L’homme qui combat les bactéries multi résistantes 64 Portofolio : Les obsèques de Madame Berthe Nyota Musoga 66 Média : Hommage à Jean-Karim Fall Deogratias Mutombo Mwana Nyembo page 12 Brigitte Bocoum page 40 Carlos Lopes page 54 Atlas : Énergie en Afrique page 56 José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC page 28
  • 4. 7Enjeuxafricains N°266 Laser Il avait été nommé par Barack Obama, mais son successeur, Donald Trump avait mis du temps avant de le confirmer à ce poste. Chose faite depuis le 17 mai dernier avec l’approbation du sénat américain. Tulinabo Mushingi est le nouvel ambassadeur des Etats-Unis au Sénégal, avec compétences en Guinée-Bissau. A 61 ans, ce diplomate Tulinabo Salama Mushingi reste dans la zone d’Afrique de l’ouest puisqu’il était en poste au Burkina de 2013 à 2016. Alors que la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne est un axe majeur de la politique améri- caine, l’expérience de Tulinabo Mushingi ne sera pas de trop pour contrer l’expansion des groupes terroristes qui sévissent sur le continent africain. Originaire de la République démocratique du Congo (RDC), le nouveau représentant de Donal Trump auprès de son homologue Macky Sall est titulaire d’un doctorat en re- lations internationales obtenu à la George- town University et d’un Master de Howard University. Il a successivement occupé les postes de directeur des Services généraux à l’ambassade des USA à Maputo (Mozam- bique) de 1994 à 1996, directeur adminis- tratif au consulat des Etats-Unis à Casa- blanca (Maroc) de 1997 à 1998, directeur d’affectation et de mission au bureau des Ressources humaines à la Maison-Blanche (1999 à 2001), attaché au Secrétariat exécu- tif et chargé d’accompagner les Secrétaires adjoints Armitage et Zoellick à l’étranger (2003 à 2004). En 2004, il est nommé pre- mier Conseiller à l’Ambassade des Etats- Unis d’Amérique en Ethiopie (de 2004 à 2006), puis conseiller de l’Ambassade des Etats-Unis d’Amérique en Tanzanie (2006 à 2009) avant d’être affecté comme secrétaire exécutif adjoint et directeur exécutif du Secrétariat exécutif d’Etat de 2011 à 2013. De 2013 à 2016, il était en poste comme ambassadeur au Burkina, un séjour au Pays des hommes intègres qui restera sans doute gravé dans sa mémoire de diplomate. Arrivé à Ouagadougou en 2013 en pleine polémique sur la révision de la Constitution qui aurait permis à l’ex-président Blaise Compaorédepouvoirsereprésenteràlapré- sidentielle de 2015, il avait pris le temps de visiter les 13 régions du pays pour disait-il, « être au contact des populations et dé- couvrir le pays profond ». On l’a ainsi vu prendre le thé avec des jeunes, esquisser des pas de danse traditionnelle, et même s’essayer à la préparation du « tô », le plat national burkinabè. Accessible, humaniste, ce père d’une fille préférait le contact direct avec les popu- lations aux discutions feutrées des salons. Les Burkinabè gardent de lui l’image d’un diplomate courtois mais ferme sur ses po- sitions, et qui n’hésite pas à dire tout haut ce que les autres chuchotent.Alors Premier ministre, Yacouba Isaac Zida a été bien ins- piré en le surnommant en décembre 2015 « Sid Pawalmdé », qui signifie littérale- ment en langue Mooré, « la vérité ne se chuchote pas ». Contre tous les usages diplomatiques, il avait ouvertement pris position contre la révision de la constitution et certains croient savoir qu’il a joué un rôle dans la chute de Blaise Compaoré, puis l’échec du coup d’Etat du général Gilbert Diendéré, en septembre 2015, Tulinabo Mushingi, fait partie de ceux qui ont constamment soutenu la période de transition après le départ de Blaise Compaoré et favorisé l’organisation des élections qui ont débouché sur la vic- toire du président Roch Kaboré. Quelques jours avant ses adieux au « Pays des hommes intègres », il avait été élevé au rang d’Officier de l’Ordre national par l’ex- Premier ministre, Isaac Zida, aujourd’hui exilé au Canada. Au Sénégal et en Guinée-Bissau, son défi sera de renforcer les relations entre les trois pays au moment où les déclarations du pré- sident Donald Trump contre les musulmans ne sont pas des plus apaisantes. J.V. Après le Burkina, Tulinabo Salama Mushingi pose ses valises au Sénégal Nommé ambassadeur des Etats-Unis au Sénégal par Barack Obama, Tuli- nabo Mushingi a été confirmé à son poste par le nouveau président Donald Trump, ce qui n’était pas gagné d’avance. La juridiction de ce diplomate d’origine RD-congolaise couvre également la Guinée-Bissau. Sa mission : renforcer les relations entre les Etats-Unis et ces deux pays où la grande majorité de la population est musulmane ©D.R.
  • 5. 8 9Enjeuxafricains N°26 Politique Burundi Alors que l’UE accuse toujours les autorités burundaises, militaires/policières et civiles, de graves violations des droits de l’Homme, Bujumbura ne cesse de s’en défendre en se drapant dans sa souveraineté. « Nous pen- sons que l’Union européenne devrait cesser de s’ingérer dans les affaires internes d’un Etat souverain comme le Burundi », a dé- claré à la presse Alain Nyamitwe, ministre des relations extérieures et de la coopération internationale. En mars 2016, l’Union européenne a coupé son aide directe au gouvernement burundais alors qu’elle représentait 20% du budget de l’Etat. « Nous préférons vivre dans la mi- sère mais en gardant notre dignité », déclare encore le ministre burundais des relations extérieures, comme pour paraphraser Sékou Touré. La pomme de discorde entre ces deux par- ties reste la dégradation continuelle de la situation des droits de l’homme au Burundi. « Les droits de l’homme sont-ils respectés, le Burundi laisse-t-il le champ libre aux en- quêteurs de l’ONU d’entrer sur le territoire burundais? » s’est récemment interrogé l’ambassadeur Wolfram Vetter, délégué de l’Union européenne au Burundi. Bujum- bura a refusé l’accès sur le territoire à trois enquêteurs onusiens chargés d’analyser la situation des droits de l’homme dans le pays. Entre les deux parties, la tension était par- ticulièrement vive au début de cette année, sur fond de discorde autour du paiement des soldes des militaires burundais engagés au sein de la Force de l’Union africaine pour le maintien de la paix en Somalie (Amisom). Fin 2016, l’UE qui est le principal bailleur de l’Amisom a, dans le sillage des sanctions contre Bujumbura, refusé de faire transiter les soldes des militaires burundais par la banque centrale (BRB). Cela a agacé les au- torités burundaises qui prélevaient 20% des sommes envoyées et qui misaient sur le dif- férentiel de change en ces temps de vache maigre pour renflouer les caisses. Dans son message de vœux à la nation, le président burundais, Pierre Nkurunziza, menaçait déjà de retirer ses soldats de la Somalie. « Nous retirerons nos soldats s’ils ne sont pas payés d’ici la fin du mois », avait-il indi- qué. Entre les deux parties, le climat s’est enve- nimé au début juin. S’appuyant sur des documents qui ont récemment fuité dans la presse sur le financement de défenseurs de droits humains, Bujumbura s’en est encore violemment pris à l’UE, l’accusant d’avoir participé et même « financé une déstabili- sation du pays ». Les autorités burundaises ont en effet débusqué des contrats passés entre l’Union européenne et une ONG internationale en 2014 par le biais d’un journal en ligne proche du pouvoir. Selon ces documents, l’organisation européenne avait financé, à l’époque, l’exfiltration du Burundi de plusieurs défenseurs des droits de l’homme ou de leurs familles. Pour exprimer son ras-le-bol, Bujumbura s’est fendu d’un communiqué au vitriol, le 5 juin. « Dans ces documents en circulation, il est rapporté que l’Union Européenne a procédé à des financements à l’endroit de personnes physiques ou morales impliquées dans la déstabilisation de la République du Burundi, et actuellement sous mandat d’arrêt international émis par la justice burundaise », a ainsi indiqué dans un com- muniqué, le porte-parole du gouvernement burundais, Philippe Nzobonariba. « Ces révélations viennent s’ajouter à d’autres éléments qui ont poussé le gouver- nement burundais à dénoncer une probable main étrangère dans les actes de sabotage de son programme de promotion de la paix et la démocratie, particulièrement le pro- cessus conduisant aux élections de 2015 », a-t-il encore ajouté. Le lendemain, l’UE a également réagi à ces accusations par un communiqué officiel, récusant les accusations contre elle. « Ces accusations se basent sur une interprétation volontairement erronée d’un programme de soutien aux défenseurs des droits de l’homme. La politique extérieure de l’UE est fondée sur la promotion des droits de l’homme à travers le monde, et la protection de leurs défenseurs », s’est-elle défendue. Peu avant ce regain de tension, le parlement burundais venait de saisir l’Assemblée parlementaire paritaire UE-ACP (Afrique Caraïbe Pacifique) pour lui demander de jouer les intermédiaires et de plaider pour que l’UE lève les sanctions infligées au Burundi. « Le parlement demande à l’UE et aux Etats membres de tenir compte de toutes les performances réalisées par le gouvernement du Burundi dans l’améliora- tion de la situation des droits de l’Homme depuis le 26 avril 2015, pour lever les sanc- tions prises contre le Burundi », déclarait le parlement burundais dans un mémorandum. Le Burundi et l’UE sont liés par un Accord de partenariat UE-ACP, appelé « Accord de Cotonou » signé le 23 juin 2000 pour une durée de 20 ans. Le point central de cet accord est l’Article 96, lequel stipule que l’UE peut suspendre l’aide immédiate- ment, en cas de violation grave des droits de l’Homme, des principes démocratiques et de l’état de droit. Jean Bosco Nzosaba Les relations entre Bujumbura et l’Union européenne se dégradent de plus en plus Après plus de deux ans de crise politique et sécuritaire, les relations entre l’UE et le Burundi vont de mal en pis. Bujumbura multiplie ses accusations contre l’UE, laquelle a déjà suspendu son aide directe depuis mars 2016 et multiplie les tours de vice. ©D.R. Alain Nyamitwe, ministre des Relations extérieures et de la coopération internationale Politique Chronique L’argent ? Oui, mais comment ? Par Elikia M’Bokolo Presque tout le monde court après l’argent. L’Etat, les entreprises ou les personnes physiques en veulent toujours plus. Mais nul besoin d’exercer le pouvoir politique pour l’avoir. L’argent propre se gagne toujours par le travail. Argent par ci, argent par là. Décidément, on ne parle que de ça. De l’argent ! Tout le monde en veut. Et ce n’est pas par hasard. Mais, il n’y en pas pour tout le monde. Qu’est-ce qu’on fait alors ? Jamais sans doute, de mémoire de vivant, on n’aura autant parlé d’argent qu’au- jourd’hui. Mais, attention ! Du nord au sud, de l’est à l’ouest, ce n’est pas du même argent qu’il s’agit. Voici d’abord l’argent de ceux qui, appa- remment, en ont à suffisance, voire beau- coup trop, si l’on en croit les gens qui ne les aiment pas ou les jalousent, car l’argent des uns fait toujours des jaloux chez les autres. C’est l’argent des Etats et d’une poignée de richissimes, tous situés en dehors de l’Afrique ! Et, nous autres Africains, nous nous demandons com- ment ils ont fait pour avoir accumulé et toujours à disposition autant d’argent. Les puissances occidentales ? Bah ! Il n’y a aucun mystère ! Ils nous ont pillés depuis si longtemps et continuent allègrement de nous piller ! Qui ignore l’histoire de la « traite », de l’esclavage, de la colonisa- tion, du néocolonialisme… ? Soit, mais il n’y a pas que les pays occidentaux qui aient à ce point accumulé et qui disposent d’autant d’argent ! Comment ont-ils fait les autres, les pays qu’on dit « émergents », pour avoir amassé et pour contrôler autant d’argent en aussi peu de temps, quelques dizaines d’années à peine ? A l’exception de la Russie, tous se situent en dehors de l’Europe ! Mais, attention, la soif de l’argent n’est pas aussi brûlante dans les pays du vieux continent que dans les pays « émergents » et chez nous ! Là-bas, ils sont parvenus à inventer des mécanismes pour que tout le monde ait un peu d’argent. Ça n’a pas été facile, bien sûr, mais ils y sont parvenus par des mécanismes complexes de redis- tribution de la richesse nationale. Chez nous, en Afrique, tout ne fait que commencer. Ce n’est pas en un demi- siècle qu’on voit s’installer durablement des dynasties de financiers et d’industriels capables de mettre en œuvre des innova- tions et des inventions qui génèrent dura- blement beaucoup d’argent ! On rétorque- ra avec raison que les Africains sont des humains comme les autres, qu’ils n’ont pas toujours été pauvres ou dénués du fameux « esprit d’entreprise » ! Voyez Kankou Moussa, le fameux sou- verain de l’empire du Mali au début du XIVème siècle et considéré, jusqu’au- jourd’hui,comme«l’hommeleplusriche» de l’histoire de l’humanité ! En réalité, l’or qu’il a distribué pendant son fastueux pèlerinage vers les lieux saints de l’islam n’était pas sa propriété personnelle, mais appartenait au trésor de l’empire du Mali. Il existe d’autres exemples plus probants. Au XIXème siècle, pendant que s’instal- lait en Occident le capitalisme industriel et financier, l’Afrique a eu son lot de véri- tables entrepreneurs, malheureusement tombés dans l’oubli aujourd’hui. Regar- dez, au Nigéria, l’histoire édifiante de « Jaja » (1821-1891), victime d’un rapt dans son enfance, vendu et revendu comme esclave, et qui finit par devenir un modèle d’entrepreneur, faisant pro- duire de l’huile de palme dans ses planta- tions, traitant directement avec de grands industriels et financiers britanniques et dirigeant le petit Etat marchand d’Opobo dans le delta du Niger. Une belle aventure, édifiante et instructive, brisée violemment par les colonialistes anglais. Des gens comme « Jaja », les différentes régions africaines en ont connues tout au long du XIXème siècle, une fois fermé l’épisode meurtrier de la déportation des Africains mis en esclavage et avant l’intrusion colo- niale. Ayant perdu et oublié ces modèles, nous n’avons plus de références qui nous soient propres en Afrique. L’argent ? Tout le monde en veut, bien sûr, mais comment faire pour l’avoir ? Le chemin le plus court serait-il le meilleur ? Assurément non ! Beaucoup de gens, trop de gens semblent croire ou sont persua- dés qu’il faut exercer le pouvoir politique pour l’avoir. La belle illusion que celle-là ! L’argent de l’Etat, c’est l’argent de tous les citoyens, la propriété d’autrui, donc intouchable ! Où a-t-on vu, dans les Etats modernes, qu’ils soient démocratiques ou dictatoriaux, des détenteurs du pouvoir amasser à leur seul profit des fortunes durables et productives ? Où est passée la fortune de Mobutu Sese Seko, celle de Mouammar Kaddafi, des Bourguiba et autres Sani Abacha ? L’argent propre, l’argent vrai, qui est ex- clusivement à soi, se gagne par le travail et, si l’on en veut beaucoup, par l’inno- vation, l’invention, la créativité dans les domaines les plus divers des technologies modernes, des entreprises industrielles et agricoles, de la banque et des finances, voire des arts… Heureusement, les exemples commencent à fleurir en Afrique dans ces différents domaines. Souhaitons qu’ils prospèrent et se multiplient. Il faut également, pour assurer la stabilité de nos sociétés, que chacun ait sa part de la richesse nationale ! Foin des fameuses « traditions » africaines d’accueil et de partage si on les cantonne dans le seul champ des discours et des incantations. Apprenons plutôt à donner des formes concrètes et stimulantes à la nécessaire solidarité collective. ©D.R.
  • 6. 11Enjeuxafricains N°26 11 Dossier spécial Comment la Banque centrale du Congo s’emploie-t-elle à enrayer la chute de la valeur du franc congolais face au dollar ? RDC 1010 “ Le temps de l’action a sonné ”
  • 7. 12 13Enjeuxafricains N°26 ©D.R. Spécial RDC Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC) « … Le pays continue de subir la pénurie des devises et voit sa situation économique s’aggraver et se dégrader » Chute des recettes minières rapa- triées, forte inflation sur les prix des biens et services, dépréciation continue du franc congolais par rapport au dollar, etc., la situation économique et financière de la RD Congo n’est pas du tout rassurante. C’est du moins le tableau sombre peint par le gouverneur de la Banque centrale du Congo, le 17 juillet der- nier, à l’occasion de la vulgarisation des nouvelles dispositions de la rè- glementation de change en matière de rapatriement des devises par les opérateurs du secteur minier. Voici in extenso, le discours qu’il a prononcé et qui présente un intérêt certain pour la compréhension des enjeux économiques de ce pays continental fragilisé par de longues années d’instabilité politique. L’économie congolaise se porte très mal et l’élément déclencheur de cette crise que nous ressentons depuis le second semestre 2015 est la chute du cours des matières premières que le pays exporte. Bien évi- demment, les causes structurelles de cette situation sont connues. Je ne compte pas m’étendre là-dessus. Cette chute des cours qui a ramené celui du cuivre jusqu’à 4 300 dollars par tonne et celui du cobalt à moins de 23 000 par tonne a conduit à la baisse des rapatriements des recettes d’exportation, induisant une dimi- nution de l’offre de devises dans une éco- nomie qui repose essentiellement sur l’acti- vité minière. Il s’en est suivi d’importants déséquilibres économiques et financiers qui se traduisent par la dégradation de l’activité économique dans son ensemble, plus parti- culièrement la dépréciation de la monnaie nationale et la hausse du taux d’inflation. Cette situation qui angoisse toute la popula- tion préoccupe au plus haut point les auto- rités. A ce jour, la situation macroéconomique in- térieure est caractérisée par une amplification de ces déséquilibres tandis que les tensions sur les marchés des biens et services et de change s’exacerbent sans arrêt. Il est observé une accélération de l’inflation et de la dépréciation du taux de change. Sur le marché des biens et services, les prix à la consommation ont enregistré une hausse de 38,4 % en rythme annuel à la fin des six pre- miers mois de l’année. Pour le seul mois de juin, il a été noté une augmentation des prix de l’ordre de 7,4 % contre un taux d’infla- tion moyen mensuel de 2,52 % entre février et mai 2017. Sur le marché de change, les cours indicatif et parallèle du franc congolais se sont respec- tivement dépréciés de 27,0 % et 30,0 %. Aujourd’hui, le taux de change indicatif s’est établi à 1 549,00 francs congolais (CDF) pour un dollar et le taux parallèle à 1 650,00 francs congolais pour un dollar contre 1 215,59 francs congolais pour un dollar et 1 269,13 francs congolais pour un dollar à fin décembre 2016. Il convient, cependant, de souligner que le rythme de dépréciation s’est accéléré depuis le mois de juin 2017, comparé aux deux mois pré- cédents. Le niveau du taux de change du franc congolais, qui augmentait en moyenne de 10 CDF par semaine au mois de mai dernier, a commencé, au cours du mois de juin et à mi-parcours du mois de juillet, à enregis- trer des accroissements moyens quotidiens d’environ 20 CDF. Nous avons commencé l’année 2017 avec un cours de plus ou moins 5 500 dollars la tonne pour le cuivre et 50 000 la tonne pour le cobalt. A fin juin, le cuivre est vendu en moyenne à 5 600 dollars la tonne et le Cobalt à 60 000 la tonne. Et pourtant, la situation économique du pays ne cesse de se détériorer comme je viens de le décrire. Alors que nous nous attendions à une nette amélioration des rapatriements des recettes issues des exportations du cuivre et du co- balt avec un impact positif sur le marché de change, le pays continue de subir la pénurie des devises et voit sa situation économique s’aggraver et se dégrader. Une question se pose d’emblée sur le contraste entre la mauvaise situation décrite ci-haut et les chiffres sur les exportations minières au premier semestre de cette an- née indiquant des recettes réalisées par les entreprises de ce secteur de l’ordre de 3,8 milliards dollars (USD 3 843 442 256), devant induire des rapatriements à hauteur d’environ 1,5 milliards dollars ( 1 537 376 902,40 USD). L’on peut légitimement se demander où sont passées ces devises ? En effet, les der- nières statistiques y relatives ont enregistré des flux de rapatriements de devises de loin inférieurs aux chiffres indiqués ci-haut. Selon les informations analytiques en notre possession, l’on devrait s’attendre à une nette amélioration des flux de rapatriements à partir de juin dernier, mais il n’en est rien. Les rapports des investigations menées par les services de la Banque centrale in- diquent que plusieurs entreprises minières ont développé des pratiques conduisant au non-respect des dispositions légales et réglementaires en matière de rapatriement des recettes d’exportation et de communi- cation d’informations sur les mouvements des comptes principaux à l’étranger. Ces pratiques ont pour conséquence d’institu- tionnaliser la fuite des capitaux alors qu’ils sont utiles au financement de l’économie nationale et, en ce temps précis, devraient apporter une contribution non-négligeable à la stabilisation du cadre macro-économique. La situation macroéconomique et finan- cière actuelle est préoccupante et requiert la conjugaison des efforts de tous et la prise de mesures idoines pour restaurer les condi- tions du retour à la stabilité et à la relance de l’activité. C’est dans cette optique la Banque centrale du Congo, avec l’appui du gouvernement, a décidé de renforcer les dispositions régle- mentaires afférentes au rapatriement des revenus des exportations minières et aux mouvements des comptes principaux à l’étranger. Concernant donc la réforme réalisée, je voudrais, d’emblée, porter à votre connais- sance qu’elle a consisté: • au renforcement de la réglementation et du contrôle sur les comptes principaux des exportateurs miniers à l’étranger afin de s’assurer de la qualité et de la fiabilité des informations fournies par les opérateurs miniers, du rapatriement effectif de 40 % ©D.R.
  • 8. Spécial RDC 14 15Enjeuxafricains N°2614 imposés par le code minier et de la confor- mité à la réglementation des utilisations des 60 % restants ; • au durcissement des mesures discipli- naires à l’encontre des opérateurs auteurs de manquements au code minier et à la ré- glementation du change ainsi que de leurs complices. En ce qui concerne particulièrement du suivi des dispositions règlementaires conte- nues dans la règlementation du change en vigueur, laquelle avait fait l’objet d’une grande vulgarisation en son temps, je vou- drais rappeler que le mécanisme ad hoc pré- voit trois niveaux. Le premier se rapporte au contrôle sur pièces qui exploite les rapports mensuels sur les comptes principaux à l’étranger communiqués par les Miniers. Ce contrôle s’effectue par les services en charge du sui- vi des opérations financières et de celui des opérations commerciales qui relèvent les manquements et adressent régulièrement des correspondances aux miniers concer- nés en vue, soit d’une correction, soit d’une notification de sanctions appliquées. Le deuxième niveau porte sur le suivi en temps réel des données déclarées par les banques commerciales dans le système ISYS DDR, en rapport avec les rapatriements. Le dernier niveau, lequel est sous la respon- sabilité de la direction des opérations ban- caires et des marchés de la Banque centrale, concerne le contrôle sur place. Il s’agit d’un déploiement d’équipes d’experts auprès des opérateurs miniers, en vue de la confronta- tion des informations transmises à la BCC et celles contenues effectivement dans leurs états financiers Sans vouloir entrer dans les détails de nou- velles dispositions que le directeur général en charge de la politique monétaire et des opé- rations bancaires de la Banque centrale se fera le devoir de vous présenter, je voudrais relever que les motivations principales de la réforme sont d’encourager les opérateurs mi- niers et les banques commerciales à respecter scrupuleusement l’ensemble des dispositions légales et réglementaires pour lutter contre la fraude et la fuite des capitaux. Les résultats attendus sont une augmenta- tion du niveau de rapatriement des recettes d’exportation et de l’offre des devises et, en filigrane, la stabilisation du marché des changes. J’en appelle au devoir républicain de tous les acteurs opérant dans le secteur et des banques commerciales et les invite à dé- ployer tous leurs efforts pour une mise en œuvre efficace des dispositions légales et réglementaires relatives au secteur minier. Toute action et comportement tendant à vio- ler les dispositions en vigueur seront dure- ment sanctionnées. Pour le reste, laissez-moi exprimer toute ma gratitude à l’égard de tous ceux qui se sont investis dans la préparation de cette matinée de vulgarisation et souligner qu’avec le rapa- triement régulier des 40% des recettes d’ex- portations, il est possible d’amener la RDC à stabiliser et à relancer son économie. Deogratias Mutombo Mwana Nyembo Gouverneur de la Banque centrale de la République démocratique du Congo ©D.R. Durement frappée par la chute du cours des matières premières dont elle tire une grande partie de ses recettes financières, la République démocratique du Congo (RDC) tente de réagir en mettant en œuvre des réformes pour faire face à la situation éco- nomique qui ne cesse de se dégrader depuis deux ans. Une nouvelle politique se met en place, consistant essentiellement à diver- sifier l’économie, à augmenter la produc- tion nationale et à mobiliser les ressources internes. Selon le gouverneur de la Banque centrale du Congo, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, qui s’exprimait mi-juillet à l’occasion de la sixième réunion du comi- té de politique monétaire de l’année 2017, la morosité économique du pays s’explique par « les faiblesses structurelles de notre modèle économique, de nos systèmes de production. On a un modèle économique qui ne nous facilite pas la maitrise de notre économie. Aujourd’hui, il faut savoir qu’au- tant on ne peut pas baser une économie sur une production intérieure orientée sur une demande extérieure qu’on ne maitrise pas, autant, on ne peut pas non plus laisser éter- nellement sa demande intérieure exploitée par d’autres pays, pour stimuler leur capa- cité de production et vous fournir des pro- duits ». Comme la plupart des pays en déve- loppement, l’économie de la RDC est plus ou moins extravertie, plus tournée vers l’ex- térieur avec une croissance stimulée par les industries extractives et non par la demande intérieure. « Nous sommes un pays qui pro- duit ce qu’il ne consomme pas, qui importe alors qu’il peut produire en grande quantité et exporte à l’état brut, sans toutefois avoir la maitrise des prix ou même de ce marché- là », a ajouté le gouverneur, convaincu, que la RDC « doit stimuler la production inté- rieure, les capacités productrices, donner du travail et tirer le gain de productivité de Pour une politique économique tournée vers la production intérieure La vulnérabilité de l’économie congolaise tient principalement à l’extraversion économique et à sa forte dépen- dance aux exportations d’un nombre limité de produits de base. La réplique devra donc s’organiser en termes de reformes structurelles vigoureuses en vue de la transformation progressive de l’économie via une diversification des sources de croissance et d’emplois. ©D.R. L’arrivée du gouverneur de la BCC Deogratias Mutombo à Lubumbashi, avec à sa droite le Dg Jean-Louis Kayembe ©D.R. Le gouverneur de la BCC accompagnant une mission gouvernementale en province
  • 9. Spécial RDC 16 17Enjeuxafricains N°2616 17 l’économie pour une croissance potentielle forte. On ne peut pas prétendre bien gérer une économie alors qu’on ne maitrise pas sa demande intérieure ni sa production inté- rieure ». Les conséquences pour des pays comme la RDC dont les piliers de la croissance reposent essentiellement sur quelques ma- tières premières - cuivre, cobalt, etc., c’est qu’une chute du prix de ces produits sur le marché international l’expose à des diffi- cultés financières et la rend très vulnérable d’autant qu’elle a peu d’influence sur la réa- lité de ce marché. Une baisse de la demande extérieure se traduit, selon l’ampleur et la durée, par une « baisse des recettes d’expor- tation, la baisse des recettes publiques et la pénurie des devises ». Le déséquilibre de la balance des paiements courants et de la ba- lance commerciale devient inévitable avec comme conséquence la dépréciation de la monnaie, d’autant que la baisse des activités minières et extractives a un impact immé- diat sur les autres secteurs qui leur sont liés directement ou indirectement. Pour le gouverneur, la baisse des recettes oblige son institution à injecter de la liqui- dité, ce qui provoque une dépréciation de la monnaie nationale et une inflation sur les prix des produits de grande consomma- tion. Pis, l’Etat se prive ainsi de moyens d’investir dans les secteurs vitaux pour parer au plus pressé, c’est-à-dire, assurer les dépenses courantes. Il a ainsi révélé que durant les premiers mois de l’année 2017, « c’était une moyenne de 63 milliards de francs congolais mais au mois de mars, ça explosé à plus de 100 milliards. Les deux premiers mois, les dépenses étaient d’une moyenne de 277 mais ce mois de mars au- delà de 320 milliards ! ». Que faire face à une telle situation ? « Les moyens, la production et le climat des affaires », répond Deogratias Mutombo Mwana Nyembo. « On commence par le moyen fiscal. Avec toute cette fuite qui dé- règle notre économie, il faut arrêter avec le caractère prohibitif de notre fiscalité. C’est la première solution. On a la fiscalité la plus élevée mais on lève le moins possible cette fiscalité. Une pression fiscale qui est inférieure à 12% alors que la moyenne en Afrique subsaharienne, c’est 20% », ex- plique-t-il. Il insiste sur la lutte contre la fraude et la contrebande, « en sensibilisant les opérateurs économiques, nos agents qui travaillent aux postes frontières » et qui se comportent comme des commerçants. Autrement dit, ceux-là même qui sont com- mis à la lutte contre la fraude en sont les véritables acteurs ! Il urge de redynamiser les structures chargées des recouvrements, notamment les trois régies financières que sont la DGI, la DGDA et la DGRAD en renforçant les capacités des agents qui y travaillent. La Banque centrale du Congo a toujours soutenu que la politique monétaire ne peut à elle seule tout faire. Il est indispensable que ses actions soient relayées par des mesures aussi bien budgétaires que struc- turelles pour consolider la stabilité macro- économique. Le chef de l’Etat, Joseph Kabila Kabange a mis le doigt sur les causes de la situa- tion où les indicateurs sont au rouge, lors son adresse à la nation devant les deux chambres du parlement réunies en congrès « Les fondamentaux de notre tissu écono- mique reposent essentiellement sur le sec- teur tertiaire, et marqué d’une part, par l’exportation des matières premières, vers les pays industrialisés, source de princi- pales recettes budgétaires, mais dont la fixation des cours échappe au contrôle du pays » avait-il déclaré. A la recherche de solution, le président avait dépêché en début d’année une im- portante mission conduite par le ministre des Finances, Henry Yav Mulang et le gou- verneur de la Banque Centrale du Congo, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, dans le corridor-Est du pays. Cette mission devait faire des consultations avec les opé- rateurs économiques et la société civile sur la dynamisation de la production intérieure, l’objectif final étant d’affranchir l’économie nationale de l’emprise de la conjoncture internationale, de l’économie de rente et des pressions des devises étrangères. Les membres de la mission se sont rendus dans les grandes villes des provinces du Nord-Kivu, Sud-Kivu et de l’Ituri ; ils sont allés à Goma, Bukavu, Uvira, Bunia, Aru, Mahagi, Béni, Butembo et avec les autori- tés provinciales, les représentants des entre- prises sectorielles, ils ont mené des consul- tations avec tous les acteurs économiques afin de s’imprégner des réalités locales et prendre des mesures appropriées. Sur place, ils ont constaté le foisonnement des ONG et autres activités de service sans impact socio- économique avéré sur la création des ri- chesses, la perversion quasi généralisée des opérateurs économiques qui ne réfléchissent qu’en termes de commerce et non de pro- duction de la richesse sur le plan intérieur. Cette mission tombait donc à point pour interpeler les acteurs en vue de stimuler la production. Ainsi, un cadre de soutien à la production intérieure a été élaboré dont les termes de référence s’articulent autour des principaux axes, à savoir les secteurs prioritaires d’investissement, l’accompa- gnement technique des PME, le finance- ment des PME et l’intégration des PME dans le cadre opérationnel des chaines de valeur La réplique du gouvernement s’organise donc par des réformes tendant vers la trans- formation progressive de l’économie et une diversification des sources de croissance et d’emplois, avec un focus sur l’accompagne- ment des Petites et moyennes entreprises et des Petites et moyennes industries dans le cadre d’un partenariat républicain. « Les contraintes sont nombreuses mais il est indispensable pour le pays de se re- dresser. La résilience du cadre macroéco- nomique, la solidité de la monnaie natio- nale et l’atteinte de l’émergence du pays sont à ce prix », conclut le gouverneur. J.V. ©D.R. Le gouverneur de la BCC avec la délégation gouvernementale ©D.R. Le gouverneur attentif aux informations fournies par un responsable local ©D.R. Une vue d’un entrepôt visité par le gouverneur de la BCC ©D.R. Une vue d’un poste frontalier ©D.R. ©D.R. Une vue de la délégation gouvernementale en salle de réunion Seule la production peut durablement tirer l’économie vers le haut
  • 10. 18 19Enjeuxafricains N°26 Le gouverneur de la BCC, Deogratias Mu- tombo Mwana Nyembo, ne cesse d’en faire le plaidoyer notamment à l’issue de la si- xième réunion ordinaire du comité de poli- tique portant sur l’examen des développe- ments récents de la conjoncture extérieure et intérieure, avec un focus sur l’évolution du marché des changes afin de décider de la conduite de la politique monétaire et de change appropriée à cette situation. « On a beaucoup épilogué sur les causes et les facteurs à la base de la dégradation qu’on connait ; je pense que le temps n’est plus à ce débat, il faut plutôt parler des ré- formes pertinentes à mettre en œuvre pour arrêter cette dégradation, ou du moins, ré- duire progressivement la volatilité. Il faut accélérer l’exécution de ces actions car tout retard va amplifier la situation diffi- cile qu’on connait depuis longtemps et qui risque encore de compliquer davantage cet effort d’ajustement. Plus concrètement, il faut aujourd’hui des réformes budgétaires pour améliorer la mobilisation des res- sources financières et des réformes struc- turelles pour accroitre l’offre des devises et la production intérieure des biens de consommation courante ». Propos du gouverneur de la Banque centrale du Congo, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, manifestement décidé à prendre le taureau par les cornes face à une situation économique délétère. Les causes du ma- rasme économique du pays étant connues, il invite le gouvernement et l’ensemble des pouvoirs publics à une mobilisation tous azimuts pour mettre en œuvre des réformes indispensables au redressement national. Pour lui, il faut d’urgence résorber le défi- cit budgétaire, puis réorganiser le système fiscal et accentuer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale pour améliorer la mobi- lisation des recettes. Le gouvernement doit en outre œuvrer à l’élargissement de l’as- siette fiscale en multipliant des stratégies de mobilisation des recettes, notamment des prospections d’indentifications de niches et d’autres secteurs encore non fiscalisées ou fiscalisées de façon non optimale. Ce n’est pas tout. L’exécutif congolais est invité à finaliser la réforme sur l’émission des titres du trésor et à lancer très rapidement à très court terme les premières opérations pour assurer un financement non monétaire et non inflationniste du déficit public. Sans oublier bien entendu, l’appel au finan- cement extérieur comme par exemple l’émission des eurobonds avec l’aide des institutions financières internationales, la sollicitation de crédits renouvelables auprès des banques de développement régionales, africaines même asiatiques, sachant que le pays doit massivement sou- tenir le secteur privé national. « Le ratio très faible endettement – PIB que nous avons est un facteur qui réduit le risque, et donc favorable à la levée de fonds », explique le gouverneur. L’autre action à mener sans délai pour faire face à la situation porte sur le rapa- triement des recettes d’exportation des entreprises titulaires de droit minier. Sur ce point, l’exécutif congolais est sur la même longueur d’onde avec la Banque centrale. « Il est inacceptable que jusqu’à ce jour, au regard du nombre de licences d’exportation des produits miniers délivrées, en l’occur- rence, le cuivre et le cobalt, et de la valeur de ces licences depuis le début de l’année, puis l’évolution favorable du cours du cuivre qui est d’une moyenne aujourd’hui de 5 600 dollars la tonne, du cobalt qui est à 60 000 dollars à fin juin contre moins de 23 000 dollars en 2015, que le rapatrie- ment des devises demeure toujours faible », dénonce le gouverneur, visiblement scanda- lisé. Il y a comme une volonté des acteurs miniers de contourner la réglementation en vigueur et de se soustraire aux obligations lé- gales en ce qui concerne le rapatriement des devises. Une mauvaise foi contre laquelle, le gouvernement compte sévir dans les se- maines à venir, notamment en durcissant le régime des sanctions pour non-respect de la réglementation en matière de rapatriement des recettes d’exportation. « Plus concrète- ment, nous allons renforcer le contrôle et la réglementation sur les comptes principaux à l’étranger des entreprises minières afin de nous assurer du rapatriement effectif de 40% et des utilisations des 60 % qui restent à l’étranger », a prévenu le gouverneur. La colère du gouverneur est bien justifiée, sa- chant qu’actuellement, 1 000 tonnes de cobalt dépassent la valeur d’un million de tonnes de cuivre. Or, officiellement, le pays produit un million de tonnes de cuivre, mais l’impression qui se dégage est qu’il y a un manque de trans- parence dans la présentation des chiffres sur les productions à l’exportation. Les contrôles doivent être plus rigoureux, notamment aux postes frontaliers, dans le Lualaba et le Haut- Katanga où il est plus facile de frauder sur le cobalt que sur le cuivre. Les ministères les plus concernés dans la lutte contre la fraude, en l’occurrence, celui des Mines et des Fi- nances, doivent redoubler d’effort pour amé- liorer l’offre des devises dans l’économie du pays. Il y va de la stabilité économique et de la paix sociale de la RDC. J.V. Mobilisation des ressources : le temps de l’action Le temps est celui des actions pour arrêter cette dégradation économique et passer à l’exécution des mesures envisagées pour contrer cette morosité économique et financière. Pour cela, Il faut mener des réformes budgé- taires visant à améliorer la mobilisation des ressources financières, et des reformes structurelles pour accroitre l’offre des devises dans le pays. Spécial RDC ©D.R. ©D.R. Le gouverneur de la Banque centrale du Congo, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, tape du poing sur la table
  • 11. Spécial RDC La stratégie du bâton La Banque centrale du Congo a modifié en les durcissant les dispositions légales et réglementaires en matière de rapatriement des devises par les compagnies minières. Son objectif : lutter contre la fraude et la fuite des capitaux, pour conforter notamment l’offre des devises sur le marché des changes et financer l’économie. L’heure est grave. Tout le monde est sur le pont à la Banque centrale du Congo (BCC). Faute de réserves suffisantes en devises fortes dans les caisses de l’institution financière, la monnaie nationale s’est mise à perdre de la valeur par rapport au dollar. L’expression « vivre au taux du jour » est de nouveau sur toutes les lèvres. Pointés du doigt, les opé- rateurs miniers basés pour la plupart dans l’ex-province du Katanga ont été invités, le 20 juillet, à Lubumbashi à une journée de sensibilisation sur les nouvelles dispositions de la réglementation de change. Face à la pénurie de billets verts, le gouver- neur de la Banque centrale du Congo, Deo- gratias Mutombo Mwana Nyembo, a tapé du poing sur la table. D’après lui, la chute des cours des matières premières n’explique pas, à elle seule, la crise actuelle. Celle-ci est aussi due au non rapatriement par les compa- gnies minières de la fraction légale et régle- mentaire de leurs recettes d’exportation. Le code minier impose en effet aux entreprises opérant dans le secteur minier de rapatrier vers les banques basées en RDC 40% du produit tiré de leurs ventes à l’étranger. Or les statistiques épluchées par les experts de la BCC ont révélé un comportement répré- hensible des opérateurs miniers. Plusieurs d’entre eux ont en effet « développé des pra- tiques conduisant au non-respect des dispo- sitions légales et réglementaires en matière de rapatriement des recettes d’exportation et de communication d’informations sur les mouvements des comptes principaux à l’étranger ». En clair, il y a fraude et fuite des capitaux. Il fallait donc sévir.Avec l’appui du gouvernement, la BCC a donc dévoilé des mesures visant un renforcement « des dispo- sitions réglementaires afférentes au rapatrie- ment des revenus des exportations minières et aux mouvements des comptes principaux à l’étranger ». Les sanctions pour les contreve- nants ont également été durcies. D’où la matinée organisée au Pullman, dans la capitale cuprifère, pour vulgariser le nouveau dispositif cambiaire et l’arsenal de sanctions concoctés par le gouverneur de la BCC et son équipe. Sans entrer dans les détails, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo a rappelé les grandes lignes de la réforme. Il en attend des résultats probants : « une augmentation du niveau de rapatrie- ment des recettes d’exportation et de l’offre des devises et, en filigrane, la stabilisation du marché des changes ». Il en appelle par conséquent au devoir républicain de tous les acteurs opérant dans le secteur minier et des banques commerciales, pour une mise en œuvre efficace des dispositions légales et réglementaires annoncées. Mais gare à la sanction pour tous ceux qui se hasarderont à violer les dispositions en vigueur. La note risque d’être salée. Le gouverneur de la BCC se veut toutefois optimiste : « avec le rapa- triement régulier des 40% des recettes d’ex- portations, il est possible d’amener la RDC à stabiliser et à relancer son économie. ». Pour détailler l’éventail de sanctions appli- cables par la BCC, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo a passé le relais au direc- teur général chargé de la politique moné- taire et des opérations bancaires, Jean-Louis Kayembe wa Kayembe. Comme à son habitude, ce dernier s’est voulu pédagogue, illustrant ses propos à l’aide des diapositives explicites. D’emblée, le Dg Kayembe, comme on l’appelle communément, a rappelé la conjoncture économique actuelle mar- quée notamment par un phénomène de « déficits jumeaux » : celui de la balance des paiements et celui des finances publiques. Résultat des courses : un ralentissement de la croissance économique, une dépréciation de la monnaie nationale et une accélération de l’inflation. Certes, la riposte du gouverne- ment et celle de la Banque centrale du Congo n’ont pas tardé. Des mesures de stabilisa- tion et de relance économiques sont en train d’être mises en œuvre. Mais seuls des efforts de long terme pour réformer l’économie nationale peuvent avoir des effets notables et durables. Pour ce faire, il faut notamment di- versifier la production par l’industrialisation, réduire la dépendance extérieure du pays, relancer le secteur agricole et améliorer les infrastructures de base. Après ce rappel, Jean-Louis Kayembe a en- suite appuyé là où ça fait mal en dressant un tableau des dispositions de la réglementation de change en matière de rapatriement des devises. Les contrôles vont être renforcés. Quant au nouveau régime des sanctions à l’encontre des entreprises minières, il alour- dit fortement les pénalités financières pour les manquements qui seront constatés par les fins limiers de la Banque centrale du Congo. Les contrevenants seront donc frappés au portefeuille. 20 21Enjeuxafricains N°26 Déficit de la balance des paiements Déficit de la balance des paiements Evolution des réserves internationales (en millions de USD) Marché du change : Besoins des banques en devises
  • 12. Spécial RDC 22 23Enjeuxafricains N°26 Déficit des finances publiques Evolution du solde du Trésor (en milliards de CDF) Juin 2016 VS juin 2017 (en milliards de CDF) Conséquences Ralentissement de la croissance économique Dépréciation de la monnaie nationale Les conséquences globales Accélération de l’inflation Niveau de rapatriement des recettes d’exportation SITUATION DES EXPORTATIONS DECLAREES ET DES RECETTES RAPATRIEES
  • 13. Spécial RDC 24 25Enjeuxafricains N°26 Rappel des dispositions légales et réglementaires Réglementation de Change Suivant l’article 266 du Code minier, le Titulaire des droits miniers : • est autorisé à exporter et à commercialiser librement la totalité de sa production sur les marchés interna- tionaux de son choix ; • a l’obligation de souscrire, pour toutes ses opérations d’exportation, un document de change conformé- ment aux dispositions réglementaires en la matière. D’après l’article 267 du Code minier, le Titulaire des droits miniers : • a l’obligation d’ouvrir un compte en devises appelé « Compte Principal » auprès d’une banque étrangère de réputation internationale qui aura des relations d’affaires avec un correspondant pour la gestion des fonds qu’il est autorisé à tenir en dehors du Territoire National ; • a l’obligation d’ouvrir et de détenir un compte ou un groupe de comptes en devises étrangères auprès des banques commerciales agréées, dont le siège social est en République Démocratique du Congo; • a l’obligation de communiquer à la Banque Centrale du Congo et dans les moindres détails, toutes les coordon- nées du compte principal. Suivant l’article 266 du Code minier, le Titulaire qui exporte les produits marchands des mines est : • autorisé à garder et à gérer dans son compte princi- pal et ses comptes de service de la dette étrangère les recettes de ses ventes à l’exportation à concurrence de 60% ; • tenu de rapatrier obligatoirement dans son compte national principal tenu en République Démocratique du Congo, 40% des recettes d’exportations dans les quinze jours à dater de l’encaissement au Compte Principal à l’étranger. Code minier L’article 73 de la Réglementation du Change dispose pour le Titulaire des droits miniers qu’il : • est autorisé à exporter sa production sur le marché de son choix conformément à la législation minière ; • est autorisé à souscrire, sur base des prévisions, les Déclarations modèle « EB ». • est autorisé à détenir, auprès d’une banque de répu- tation internationale, un compte dénommé « compte principal » pour la gestion des fonds qu’il est autorisé à garder en dehors du territoire national ; • est autorisé à détenir un ou plusieurs comptes en monnaies étrangères auprès du système bancaire national ; • a l’obligation de communiquer à la Banque Centrale les coordonnées des comptes ouverts D’après les articles 76 et 77 de la Réglementation du Change, • Les recettes d’exportation des produits miniers (100 %) doivent être reçues dans le compte principal à l’étranger dans les 45 jours à dater de l’embarque- ment ; • La quotité de 40 % des recettes d’exportation à rapatrier obligatoirement doit être encaissée dans un compte ouvert auprès de la Banque intervenante dans les 15 jours à dater de l’encaissement des fonds dans le compte principal à l’étranger. Nouveau régime des sanctions Communication tardive à la Banque Centrale des coordonnées bancaires du compte principal ouvert à l’étranger : Défaut de communication à la Banque Centrale des coordonnées bancaires du compte principal ouvert à l’étranger : Transmission tardive du rapport mensuel sur les mouvements des fonds versés dans le compte principal en devises à l’étranger, ainsi que les réfé- rences des dossiers d’exportation sur les recettes versées dans ce compte : Défaut de transmission du rapport mensuel sur les mouvements des fonds versés dans le compte principal en devises à l’étranger, ainsi que les réfé- rences des dossiers d’exportation sur les recettes versées dans ce compte : Transmission des données erronées dans le rap- port mensuel sur les mouvements des fonds versés dans le compte principal en devises à l’étranger : Mauvaise transcription des données dans le rap- port mensuel sur les mouvements des fonds versés dans le compte principal en devises à l’étranger :   Réalisation d’une exportation des produits mi- niers par le titulaire de droits miniers indexé par la Banque Centrale pour non communication des coordonnées bancaires du compte principal à l’étranger : Manquements Tarifs et conditions ANCIEN TARIF : CDF 500.000 et obligation de les commu- niquer endéans 5 jours ouvrés ; NOUVEAU TARIF : CDF 5 000 000,00 ; ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de les com- muniquer endéans 5 jours ouvrés ; NOUVEAU TARIF • CDF 50.000.000 et obligation de les communiquer en- déans 5 jours ouvrés ; • En cas de résistance après les 5 jours : CDF 100.000.000 ; • En cas d’obstination : CDF 200.000.000-mise à l’index de l’opérateur économique ANCIEN TARIF : CDF 500.000 par jour de retard et obli- gation de régulariser dans un délai de 7 jours ouvrés NOUVEAU TARIF : CDF 1.000.000 par jour de retard et obligation de régulariser dans un délai de 7 jours ouvrés ; ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de régu- lariser dans un délai de 7 jours ouvrés; NOUVEAU TARIF : CDF 50.000.000 et obligation de régulariser dans un délai de 7 jours ouvrés ANCIEN TARIF : CDF 800.000 par donnée transmise + obligation de les corriger ; NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 par donnée transmise + obligation de les corriger dans un délai de 7 jours ouvrés à dater de la réception de la lettre de la BCC ; ANCIEN TARIF : CDF 100.000 par donnée ; NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 par donnée + obliga- tion de les corriger dans un délai de 7 jours ouvrés à dater de la réception de la lettre de la BCC ; ANCIEN TARIF : 2 % de la valeur exportée et obligation de communiquer lesdites coordonnées ; NOUVEAU TARIF : • 20 % de la valeur exportée et poursuites judiciaires ; • Tout complice à cette opération frauduleuse est pas- sible d’une pénalité de 40 % de la valeur exportée frauduleusement ;
  • 14. 27Enjeuxafricains N°2626 Spécial RDC Nouveau régime des sanctions Manquements Tarifs et conditions ANCIEN TARIF : 0,5 % du montant par jour de retard et obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés ; NOUVEAU TARIF : 1 % du montant par jour de retard sible d’une pénalité de 40 % de la valeur exportée frauduleu- sement ; ANCIEN TARIF : 2 % du montant non rapatrié et obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés; NOUVEAU TARIF : Rapatriement de la quotité de 40 % des recettes d’exportation par toute société n’ayant pas le droit reconnu aux titulaires des droits miniers : 10 % du montant global de l’exportation et obligation de rapa- trier le montant gardé à l’étranger dans un délai de 10 jours ouvrés ;  ANCIEN TARIF : 1 % du montant non rapatrié et obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés NOUVEAU TARIF : • 5 % du montant non rapatrié et obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés ; • En cas de récidive pour défaut de rapatriement : 10 % du montant non rapatrié et obligation de rapatrier dans un délai de 10 jours ouvrés ; • En cas d’obstination dans le défaut de rapatriement 20 % du montant non rapatrié et mise à l’index de l’opé- rateur économique ; ANCIEN TARIF : 1% du montant transféré et obligation de rappeler le montant transféré dans un délai de 10 jours ouvrés NOUVEAU TARIF : 10 % du montant transféré et obliga- tion de rappeler le montant transféré dans un délai de 10 jours ouvrés ;  ANCIEN TARIF : • 0,5 % pour non déclaration du montant ; • 0,3 % pour défaut de prélèvement de la RSC ; • 0,2 % de la RSC à prélever sur le montant assujetti ; NOUVEAU TARIF : • 1,5 % pour non déclaration du montant ; • 1 % pour défaut de paiement de la RSC ; • 0,5 % de la RSC sur le montant assujetti ; Rapatriement tardif des recettes d’exportation : Rapatriement de la quotité de 40 % des recettes d’exportation par toute société n’ayant pas le droit reconnu aux titulaires des droits miniers : Défaut de rapatriement des recettes d’exportations (Défaut de rapatriement de la quotité légale par les opérateurs détenteurs des titres miniers) :   Utilisation de la quotité légale rapatriée pour couvrir les dépenses des financements des importations ou tout autre paiement international  ; Défaut de paiement de la RSC sur les opérations assu- jetties effectuées sur les comptes tenus à l’étranger du titulaire des droits miniers : Nouveau régime des sanctions Transmission tardive de l’ordre de paiement de la RSC sur les opérations assujetties : Défaut de transmission de l’ordre de paiement de la RSC sur les opérations assujetties : CDF 250.000 ; Refus par le titulaire des droits miniers d’accuser ré- ception de la correspondance de la Banque Centrale annonçant la mission de vérification sur les comptes à l’étranger : CDF 10.000.000 et obligation d’accuser réception dans un délai de 5 jours ouvrés Défaut de transmission à la Banque Centrale de la copie légalisée de la lettre adressée à son banquier étranger, autorisant la vérification des opérations effectuées sur son compte principal : Refus de recevoir la mission de la Banque Centrale dans les 2 jours ouvrés à dater de la présentation de l’ordre de mission auprès de la société (Refus d’accu- sé réception de l’OM de la BCC) : Frais de contrôle pour une mission de suivi des dispo- sitions règlementaires du change : Refus de signer le p.-v. de mission : Manquements Tarifs et conditions ANCIEN TARIF : CDF 100.000 ; NOUVEAU TARIF : CDF 1.000.000 ANCIEN TARIF : CDF 250.000 ; NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 ; NOUVEAU TARIF : CDF 100.000.000 ANCIEN TARIF : CDF 10.000.000 et obligation de régula- riser dans un délai de 10 jours ouvrés ; NOUVEAU TARIF : • CDF 250.000.000 et obligation de régulariser dans un délai de 10 jours ouvrés ; • En cas de récidive, CDF 500.000.000 du et obligation de régulariser dans un délai de 10 jours ouvrés ; • En cas d’obstination dans le refus après la pénalité ins- crite au point : 20 % des recettes rapatriées mensuel- lement et mise à l’index de l’opérateur économique ; ANCIEN TARIF : CDF 25.000.000 ; NOUVEAU TARIF : CDF 250.000.000 ANCIEN TARIF : CDF 2.500.000 ; NOUVEAU TARIF : CDF 2.500.000 ; CDF 50.000.000 + établissement d’un P.-V. de carence et application des conclusions de la mission
  • 15. 28 29Enjeuxafricains N°26 En couverture RDC « La particularité dans la détermination des prévisions des recettes fiscales consignées dans la loi de finances 2017 est qu’elles n’ont pas été évaluées suivant les éléments de cadrage macroéconomiques qu’arrête le ministère du Plan. Le gouvernement a exprimé des objectifs optimistes et volon- taristes en cadrant lesdites prévisions sur la pression fiscale de 13% du PIB de l’année, qu’on retrouve dans les pays limitrophes bien que l’activité économique ne soit pas structurée de la même manière. Des recettes additionnelles ont été ajoutées à ces prévi- sions au niveau des travaux en commission à l’Assemblée nationale. Aussi, pour 2017, les recettes à mobiliser par la DGI sont de 2 707,2 milliards de francs congolais, soit une augmentation de 1 000 milliards de francs congolais par rapport à la loi de fi- nances rectificative de 2016. » Les grands défis de la DGI en 2017 « L’élargissement et la maîtrise de l’assiette fiscale (base imposable et répertoires des assujettis) sont des défis prioritaires pour la DGI, dans toutes les natures d’impôt (IPR, IER, TVA, IBP de tous types d’entreprises spécifiquement celles de petite taille opé- rant dans le secteur informel). Un autre défi est l’appel au personnel des services opéra- tionnels à plus d’ardeur et d’implication au travail sous l’accompagnement des services dédiés au pilotage des activités de l’impôt (gestion, contrôle, recouvrement et conten- tieux). Enfin, la haute direction a réfléchi sur des stratégies innovantes communiquées au ministère pour leur prise en charge par le gouvernement de la République. » L’impact de la dépréciation du franc congolais « La dépréciation du franc congolais obser- vée depuis quelque temps a entraîné l’em- ballement des prix des biens et services sur les marchés, avec son corolaire qui est la baisse du pouvoir d’achat rétrécissant le volume de consommation. D’où un impact négatif certain sur le niveau de collecte de la TVA qui ne peut s’améliorer dans un tel contexte. Il en est de même de l’IPR (im- pôt professionnel sur les rémunérations). Les revenus salariaux des fonctionnaires, agents publics et autres employés de divers secteurs de la vie économique ne sont pas indexés. Faute de leur réajustement, l’impôt retenu sur ces rémunérations reste à son niveau habituel en francs congolais, mais perd en valeur constante. L’administration se propose d’initier des enquêtes fiscales auprès de certaines entreprises de quelques secteurs ciblés à charge desquelles pèse la présomption de minoration d’assiette impo- sable. » Etat de collecte de la TVA « Lorsqu’on interroge les statistiques des recettes, on constate que, d’une tendance haussière des recettes TVA au cours des premières années de son instauration, on est passé à une baisse significative desdites recettes. A titre d’exemple, en comparant le comportement des recettes TVA des pre- miers semestres 2016 et 2017, on constate une baisse en termes constants d’environ 28,6%. Cette contreperformance est due en grande partie à la baisse d’activité écono- mique, à la baisse de consommation, même si on peut noter également les problèmes liés à l’incivisme des assujettis. Devant cette situation, l’administration ne peut que prendre des mesures qui vont dans le sens de l’élargissement et de sa maîtrise du répertoire des assujettis et du renforcement du contrôle fiscal dans toutes ses formes notamment les régularisations en cas de dé- faillance ou de minoration des bases impo- sables, d’une part, et de l’intensification des contrôles ponctuels auprès des assujettis, d’autre part. » Améliorer les relations entre les contribuables et la DGI « Depuis le début du mandat de l’équipe dirigeante actuelle, le DG s’est, plus d’une fois, exprimé pour un partenariat franc et responsable avec le monde des affaires. Cela se traduit notamment par une amélioration de la qualité de service au contribuable : une seule échéance de paiement dans le mois, la mise en œuvre de la télé-déclaration et du télépaiement, apurement des paiements à temps réel. Un tel partenariat consiste égale- ment à susciter en contrepartie le consente- ment à l’impôt à travers l’accomplissement volontaire des obligations déclaratives et de paiement à travers des déclarations sincères et exactes. » Pour une motivation accrue du personnel de la DGI « La haute direction s’implique pour ratio- naliser les conditions de travail avec des infrastructures modernes en vue de renfor- cer l’image de l’administration. Le siège de la direction de la Province fiscale du Katanga a été inauguré en mars dernier ; la semaine du 24 juillet, les nouveaux bâti- ments devant abriter le Centre des impôts de Kisangani et le Centre d’impôts syn- thétiques de Bunia ont aussi été inaugurés. Des efforts sont entrepris avec la délégation syndicale pour améliorer la motivation de l’agent des impôts. Enfin, les outils pour la mise en œuvre des règles d’éthique et de déontologie professionnelle sont en phase de validation pour un meilleur encadrement et un contrôle interne efficient du personnel de la DGI. » Propos recueillis par FK Le bilan fiscal de l’année 2016 « La mobilisation des recettes fiscales en 2016 a fait face, d’une part, à un contexte économique confronté à la baisse des cours des principales matières premières du pays (à savoir : le cuivre, le cobalt, etc.) et, d’autre part, à un contexte politique difficile. De la loi de finances n° 15/021 du 31 décembre 2015 pour l’exercice 2016 qui assignait les prévisions des recettes budgétaires volonta- ristes de 2 296 milliards de francs congolais (CDF) à la DGI, le gouvernement est passé à un Collectif budgétaire voté en juin 2016 qui ramène les recettes fiscales de l’exercice à 1 737 milliards de francs congolais. Par rapport à ces prévisions, la Direction géné- rale des impôts (DGI) a réalisé des recettes comptabilisées, encore provisoires, de 1 677 milliards de francs congolais, soit un taux d’exécution de 96,53%. Ce qui, comme per- formance, devrait être apprécié à sa juste dimension. » L’impact de la baisse en 2016 des cours du pétrole et des produits miniers « Comparées aux réalisations de l’année 2015, les recettes de ces deux secteurs ont subi un coup à la baisse. Les raisons sont évidentes : d’une part, le cours du cuivre est passé de 7 000 dollars la tonne en 2014 à 5 000 dollars la tonne en 2015, et d’autre part pour le baril du pétrole brut, la moyenne sur laquelle sont calculées les avances mensuelles versées au Trésor, est passée du prix de 48 dollars en 2015 à 40 en 2016, sans compter les récupérations sur le trop perçu de 2015. Chez les miniers, les re- cettes en 2016 ont connu un gap de 34,32% par rapport à 2015 (464,891 milliards de francs congolais contre 707,835 milliards). Dans le secteur des pétroliers producteurs, la baisse est plus accentuée, près de 55%. Les réalisations passent de 78,417 milliards de francs congolais en 2015 à 35,539 mil- liards en 2016 pour une production expor- tée restée relativement stable (plus ou moins 8 millions de baril). Toutefois, il y a lieu de signaler qu’au regard des prévisions bud- gétaires pour l’année 2016 des recettes du secteur minier (fixées à 350,759 milliards de francs congolais), la DGI a mobilisé 464,891 milliards de francs congolais, soit un taux de réalisation de 132%. En ce qui concerne le présent exercice budgétaire, les recettes du secteur minier, tous impôts confondus, s’élèvent à 227,848 milliards de francs congolais à fin mai 2017 tandis que le secteur pétrolier atteint, de son côté, 28,605 milliards de francs congolais à fin avril. » Les objectifs assignés à la DGI dans la loi de finances 2017 Entretien José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC « la DGI veut un partenariat franc et responsable avec le monde des affaires » Nommé l’an dernier à la tête de la direction générale des impôts (DGI), José Sele Yalaghuli tente de mobi- liser, dans une conjoncture écono- mique peu favorable, ses agents pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement. ©DGI José Sele Yalaghuli, le directeur général des impôts en RDC ©DGI Le directeur général des impôts anime une réunion avec ses deux adjoints, Ngoy Yav Nzam et Lilie Muvova Bondo
  • 16. 31Enjeuxafricains N°2630 L’objectif de l’Etat congolais était de suivre l’exemple de seize autres pays afri- cains (dont quatorze pays francophones) partageant notamment la même source juridique dite « romano-germanique » et qui, depuis les années 1990, avaient décidé de moderniser et de sécuriser, de manière harmonisée et même unifiée, leur cadre juridique, afin de mieux attirer les investisseurs et de faciliter la création d’entreprises, par la même occasion de contribuer à leur développement socio- économique. Le choix de l’adhésion à l’Ohada a ainsi permis à la RDC d’éviter un long, com- plexe et coûteux processus de modernisa- tion, texte par texte, des lois et règlements obsolètes (datant souvent de l’époque coloniale ou post-indépendance), qui ré- gissaient le droit des affaires congolais1 . Ce choix aura aussi marqué l’intégration de la RDC dans une des organisations régionales africaines qui s’est révélée parmi les plus efficaces à ce jour. Des dizaines d’études, de rapports, d’analyses économiques, de thèses, de conférences, etc., ont ainsi démontré, ces dernières années, l’effet globalement positif de l’application du droit Ohada sur l’attracti- vité économique et la croissance des pays membres, donc sur leur développement économique et social2 . Au regard des in- dicateurs sur le climat des affaires qu’uti- lise la Société financière internationale (SFI, une branche de la Banque mondiale) pour dresser son rapport annuel « Doing Business », la RDC est d’ailleurs passée, dans l’édition 2016, de la 172ème place à la 89ème place, puis à la 43ème place dans l’édition 2017. Cette notable amélio- ration, certes sujette à certaines réserves légitimes, est en partie due aux atouts que le droit Ohada a apporté à la RDC. Pour autant, l’on aurait tort de penser que le droit Ohada est un droit adapté surtout aux grandes entreprises ou un droit qui, parce que très inspiré du droit français, serait inadapté aux « réalités » locales africaines. D’une part, il a fait ses preuves depuis plus de vingt ans dans seize autres pays africains, où plus grand monde ne conteste, sauf à la marge, l’intérêt du droit Ohada. D’autre part, ce droit uni- fié permet, non seulement aux grandes sociétés, mais aussi à tout entrepreneur ou commerçant, quels que soient son ni- veau social, sa nationalité ou son genre, d’accéder à des outils juridiques et comp- tables modernes et communs au sein des dix-sept pays membres de l’Ohada. Il per- met aussi à tout créancier, quel que soit le montant de sa créance, de recourir à des procédures relativement simples pour recouvrer sa créance. Il permet aussi, par exemple, aux justiciables de savoir que, en dernier ressort, sa cause pourrait être entendue par une instance de cassation supranationale impartiale et spécialisée. « Quand un juge sait que l’interprétation qu’il a à faire d’un texte pourra faire l’ob- jet d’un contrôle d’une autre juridiction qui est supranationale, il aura tendance à mieux appliquer le droit qu’à faire ce que bon lui semble », indiquait le Pro- fesseur Grégoire Bakandeja (lors d’une conférence-débat au Barreau de Matadi en 2014). Le Bilan Entrons un peu plus en profondeur dans le bilan de l’application du droit Ohada en RDC depuis près de cinq ans. L’un des domaines qui a le plus fait couler d’encre en RDC, depuis 2012, est celui des procédures de recouvrement des créances. De nombreuses formations ont été don- nées sur ce thème aux juristes, magistrats, greffiers, entreprises, notamment sous l’impulsion de la Commission nationale Ohada de la RDC, présidée par le Pro- fesseur Roger Masamba3 . De nombreuses procédures sont initiées chaque jour en cette matière. Force est cependant de constater qu’il existe encore de sérieuses lacunes dans la connaissance et la mise en œuvre pratique de ces procédures, tant au sein des entreprises (privées et publiques) qu’au sein des cours et tribunaux, quand ce n’est pas simplement de la résistance à la correcte application de règles pourtant claires et incontestables pour la plupart. Par ailleurs, certaines difficultés, tantôt d’interprétation, tantôt d’adaptation aux règles de procédure civile, existent bel et bien, et les organes de l’Ohada devraient justement bientôt amender l’Acte Uni- forme concerné pour corriger, adapter et préciser certaines dispositions actuelles. De plus, le fait qu’en RDC, les règles rela- tives aux notaires, aux huissiers de justice ou encore à la procédure de référé, tels que fixées par le droit Ohada, ne soient pas encore harmonisées avec l’Ohada, est source de problèmes pour les praticiens. Dans le domaine du droit des sûretés (ou garanties du crédit), le droit Ohada a clai- rement apporté des outils efficaces pour mieux sécuriser le crédit aux entreprises et le financement de projets en RDC. L’on regrettera cependant qu’en pratique, pour diverses raisons plus ou moins légitimes au regard du contexte congolais, les prê- teurs de deniers privilégient très large- ment le recours à l’hypothèque immobi- lière (sorte de « reine des sûretés »), ce qui restreint finalement souvent l’accès au crédit aux propriétaires fonciers, et amène parfois les autres à devoir recou- rir à des tiers amenant un bien immobilier en garantie (moyennant, généralement, une copieuse « commission » sur le cré- dit obtenu). Il apparaît aussi que, hormis les hypothèques, les autres types de sûre- tés constituées sont rarement enregistrées au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM), en contrariété avec les règles légales, au détriment de l’efficacité de la sûreté, puisqu’elle ne pourra alors pas être opposable aux tiers, et qu’un dé- biteur pourra facilement consentir fraudu- leusement plusieurs sûretés sur un même bien. Le droit commercial et des sociétés com- merciales issu de l’Ohada est globalement considéré, par une majorité de juristes et d’opérateurs économiques, comme ayant apporté un cadre plus moderne, plus com- plet, et plus sécurisant en RDC. pour les commerçants et les entreprises. Associé notamment à la mise en place, en 2013, du Guichet unique de création d’entre- prise, il est devenu assez simple, rapide et peu onéreux de créer une société en RDC. (quelques jours et quelques centaines de dollars américains), surtout comparati- vement au formalisme long, complexe et coûteux qui avait cours avant 2012. Ce sera bientôt encore plus vrai lorsque le RCCM sera doté des derniers outils d’informatisation prévus par l’Ohada, comme le RCCM du Togo il y a quelques semaines4 . Avec l’Ohada, les droits des associés/ actionnaires minoritaires de sociétés sont consacrés et protégés, quoiqu’encore peu connus et utilisés, hormis dans les plus grandes sociétés. La possibilité de créer des sociétés unipersonnelles est largement appréciée. Les règles de comptabilité et de gouvernance des sociétés sont venues dresser des garde-fous nécessaires face aux abus de pouvoir et abus de gestion des dirigeants d’entreprises. Toutefois, là aussi, leur respect réel est à géométrie variable, en fonction de la taille des en- treprises et de la structure de leur action- nariat. Il n’est ainsi pas rare de constater l’absence de registres de sociétés, la tenue fictive des assemblées générales, l’élabo- ration de plusieurs états financiers pour un même exercice social (pour l’admi- nistration fiscale, pour la banque, pour les associés), l’absence de nomination de commissaires aux comptes, ou encore la conclusion de conventions réglementées voire interdites. L’on déplore par ailleurs une méconnais- sance persistante, à moins qu’il s’agisse d’un scepticisme réel, pour des structures comme la société par actions simplifiée (SAS) - pourtant moins contraignante que la société à responsabilité limitée (SARL) ou la société anonyme (SA) -,le groupement d’intérêt économique (GIE), ou encore la société coopérative. Les pactes d’actionnaires ou la création de diverses catégories d’actions et de valeurs mobilières sont peu courants. Il est égale- ment dommage que les textes encadrant le statut fiscal et social de l’entreprenant n’aient pas encore été fixés en RDC, mal- gré l’intérêt que pourrait représenter, dans ce pays, cette nouvelle catégorie d’entre- Etat de l’application de l’Ohada en République démocratique du Congo Un bilan globalement positif Par Romain Battajon (*) La République démocratique du Congo (RDC) a adhéré à l’Ohada (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires) le 11 juillet 2012, après trois années de discussions. Deux mois plus tard, le Traité de l’Ohada, les actes uniformes et les règlements d’application sont entrés en vigueur. Où en est-on aujourd’hui ? ©D.R. En couverture RDC
  • 17. 32 33Enjeuxafricains N°26 preneur introduite par l’Ohada en 2010- 2011. Une des autres innovations de l’Ohada qui aurait pu profiter au financement de l’économie de la RDC est l’appel public à l’épargne accessible à certaines sociétés anonymes, alors que c’était expressément interdit par les lois congolaises antérieures5 . Mais puisque la RDC. n’a pas mis en place de marchés financiers et n’est pas membre de l’une des bourses de valeurs mobilières existantes, les entreprises congolaises ne peuvent toujours pas bénéficier des atouts de ces instruments pour pouvoir lever des capitaux et financer leurs projets grâce aux émissions d’actions et d’obligations au pro- fit d’investisseurs, locaux ou internationaux. Nous devons aussi relever que peu d’entre- prises recourent, par méconnaissance et pour échapper aux conséquences « réputa- tionnelles » qu’elles ont encore, aux pro- cédures collectives d’apurement du passif (conciliation, redressement, liquidation). Si bien que beaucoup de sociétés tombent puis restent pendant des mois voire des années en état de cessation des paiements, ou bien se mettent « en sommeil » (ce qui, en droit, n’a aucune valeur), creusant ainsi leur pas- sif et plaçant leurs dirigeants et actionnaires dans l’illégalité, alors qu’elles auraient pu trouver dans l’une des procédures collec- tives désormais existantes des solutions à leur crise. En réalité, parmi les considérations et constats synthétisés ici, les défaillances d’application et d’efficacité du droit Ohada en RDC ne nous paraissent pas tant liées à la qualité des outils juridiques de l’Ohada, qui demeurent certes perfectibles, qu’à l’utilisa- tion (ou non-utilisation) qui en est faite par certains, dans les entreprises, les institutions administrations et les instances judiciaires. Malgré les défaillances et les mauvaises pratiques évoquées, le bilan (ainsi que les perspectives) de l’Ohada en RDC est, ob- jectivement, plus positif que négatif. Et il faut rappeler que cinq ans d’application de l’Ohada, c’est encore très court pour que ces nouveaux instruments soient maîtrisés par tous et utilisés à bon escient. Le travail de la CNO-RDC, de nombreux barreaux congolais, et de bien d’autres institutions (congolaises et non congolaises), à compter par les organes de l’Ohada, sera, à coup sûr, de plus en plus fructueux sur le long terme. Et gageons que, dans quelques années, la question ne fera plus débat. Mais l’Ohada n’est pas non plus, comme certains ont pu le penser naïvement, une espèce de remède miracle qui permettrait, par sa seule introduction dans un corps social et juridique congolais habitué à des décennies de lois civiles et commerciales en partie archaïques, de résoudre toutes les difficultés économiques ou de rendre le cli- mat des affaires paradisiaque. Il ne pourra engendrer ses meilleurs effets qu’accom- pagné, notamment, de la simplification des règles administratives et fiscales (domaines qui ne relèvent pas de l’Ohada), de la mo- dernisation du droit des obligations et du droit des biens, de l’adoption de procédures judiciaires adéquates, ou encore, bien sûr, de la poursuite du renforcement des capaci- tés techniques et de bonne gouvernance des institutions administratives et judiciaires. (*), Avocat aux barreaux de Paris et de Kinshasa/Ma- tete, Professeur invité à l’Université Libre de Kinshasa, Président du think tank Africa Business Legal Exper- tise/Club 54 1 Joseph Kamga et Marlize Elodie NgnidjioTsapi, « L’in- sertion du droit de l’Ohada en RD Congo : les roses et les épines », Revue de l’ERSUMA - Droit des affaires - Pratique Professionnelle, N° 2 - Mars 2013, Etudes. 2 Par exemple : « Droit et attractivité économique. Le cas de l’OHADA », A.E.D.J., IRJS Editions, 2013 3 « Mise en œuvre de l’OHADA en RDC – Bilan et pers- pectives », CNO-RDC, mars 2015 4 Voir : http://www.ohada.com/actualite/3486/togo-ame- lioration-du-climat-des-affaires-dans-l-espace-ohada. html 5 Joseph Kamga et Marlize Elodie NgnidjioTsapi, précité ©D.R. Conférence Ohada à l’Université de Kalemie (Tanganyika), le 29 juin 2017 En couverture RDC Transport aérien Congo Airways met le cap sur l’international Après s’être attaqué aux charges d’exploitation, le directeur général de la compagnie aérienne congolaise, Désiré Balazire, veut renforcer sa flotte afin d’élargir son rayon d’action. Invité en juin dernier au Salon aéronautique du Bourget, près de Paris, le directeur général de Congo Airways n’a pas perdu son temps. Il y a multiplié les rendez-vous profession- nels. Bien évidemment, il a pu rencontrer les constructeurs dont les avions constituent la flotte de la compagnie, à savoir : Airbus et le canadien Bombardier. En effet, la flotte de CongoAirways est composée de cinq aéronefs dont deux A320 et deux Bombardier Q400. Les dirigeants de Congo Airways ont égale- ment été aperçus dans le chalet du construc- teur brésilien Embraer, mais surtout dans celui de Boeing dont un des appareils a intégré la flotte du transporteur congolais. Il s’agit d’un B737-800, qui a été pris en location auprès d’Ethiopian Airlines. La flotte de Congo Airways devrait être renforcée dans les pro- chaines années afin de proposer des vols long- courriers mais aussi d’ajouter des dessertes sous-régionales comme Douala, Bujumbura, Nairobi, Dar-es Salam, etc. Pour ces vols sous-régionaux, la compagnie devrait opter pour desA320 etA321 ou pour des B737-800. « C’est la nature du financement qui nous permettra de prendre une décision », insiste Désiré Balazire. Il n’exclut pas de lever des fonds sur les marchés financiers. Comme il faut des moteurs pour faire voler un avion, le Dg de Congo Airways a également mis à profit son séjour parisien pour prendre langue avec les principaux motoristes présents au Bourget. Il s’agit notamment de General Electric (GE), de CFM, etc. D’autres entre- tiens étaient également prévus à l’agenda du patron de CongoAirways. Ce dernier a pu ain- si discuter avec plusieurs loueurs importants d’avions. L’avantage d’un salon professionnel comme celui du Bourget est qu’il réunit en un seul lieu tous les corps de métier et toutes les activités directement liés à l’aviation. Dé- siré Balazire a profité de cette occasion pour poursuivre les discussions entamées, il y a quelques mois à Kinshasa, en vue du renou- vellement de la police d’assurance des avions de la compagnie. Une délégation du courtier Arthur J. Gallagher Co., l’un des plus im- portants au monde, s’était déjà rendue en mars dernier à Kinshasa. Le Bourget a donc servi de cadre aux deux parties pour faire avancer ce dossier important. Le Dg de Congo Airways a pu également s’entretenir avec les dirigeants d’Air France Industries sur certains problèmes concernant le partenariat entre les deux enti- tés. Des agents de la compagnie congolaise ont achevé récemment leur formation à Kin- shasa sous l’encadrement des experts envoyés par cette filiale du groupe Air France. En prévision de l’accroissement de sa flotte, CongoAirways cherche à recruter des pilotes. « Nous allons viser des pilotes congolais bien formés », précise le Dg. Et d’ajouter que l’objectif de la compagnie est d’avoir à moyen terme ses propres pilotes. Désiré Balazire vise notamment des jeunes pilotes possédant une centaine d’heures de vol. Il n’exclut pas d’accorder des bourses aux élèves pilotes pour parfaire leur formation à l’étranger. Une poli- tique qui n’existe plus dans le pays depuis la fin des années fastes de la défunte compagnie aérienne nationale, Air Zaïre (ex-Air Congo). Dans son livre “ Entre ciel et terre ”, le com- mandant (à la retraite) Simon Diasolua Zitu, rappelle que le commandant Ilunga Mikanda et lui sont devenus, le 1er février 1966, les deux premiers pilotes civils de l’histoire de la RD Congo, grâce à une bourse offerte à l’époque par Air Congo. Pour éviter à la compagnie des erreurs de jeunesse, son directeur général a ramené les effectifs à 331 agents contre 426 à son arrivée. « Nous avons procédé à un ajustement des effectifs par rapport à la taille de la société », explique-t-il. Il n’y a pas que la masse salariale qui a connu un coup de rabot. D’autres éco- nomies ont été aussi réalisées : par exemple 30% sur le coût du catering (la restauration à bord des passagers). La compagnie envisage de lancer son propre service commissariat. Elle a entrepris par ailleurs de réduire le poids des prestataires extérieurs. Elle a acheté par exemple du matériel pour assurer elle-même le service lié au handling (terme désignant la manutention). « Les grandes économies ont été réalisées au niveau des opérations. On achète mieux aujourd’hui », se réjouit le Dg. Dès son arrivée, il a passé au crible tous les contrats de la compagnie avec ses four- nisseurs. Certains ont été purement résiliés. « Petit à petit , on cherche à fonctionner autre- ment », confie-t-il. Autre objectif : accroître les recettes de la compagnie. Celle-ci desservait jusqu’à fin juin douze aéroports nationaux. Le plan de développement prévoit l’ouverture de nou- velles lignes : Bukavu en juillet puis Moanda avant la fin de l’année. Congo Airways devait également desservir dès juillet la ville de Johannesburg, sa première destination hors des frontières nationales. F.K. ©D.R. ©D.R. Le Dg Désiré Balazire Le B737-800 loué auprès d’Ethiopian Airlines