SlideShare une entreprise Scribd logo
1  sur  23
Télécharger pour lire hors ligne
Année universitaire 2020-2021
Promo*: ¨ L1 (Parcours): …………………………. ¨ L2 ¨ L3 ¨ M1 ¨ M2
Semestre* : ¨ 1 ¨ 2 ¨ 3 ¨ 4 ¨ 5 ¨ 6 / Session* : ¨ 1 ¨ 2
N° Nom (par ordre alpha.) Prénom
1 Beaumont Héloïse
2 Berthon Lisa
3 Parriaud Noémie
4
5
TD : Psychologie du développement
Enseignant, tuteur : Amanda Comoretto
Jour et horaire du TD : Mardi 15h30-17h30
Titre du dossier :
La parentification
Note oral / 20 Coef =
Note de l’écrit / 20 Coef =
Note finale / 20
PARTIE RESERVEE A L’ENSEIGNANT
REMARQUES / COMMENTAIRES :
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………
BEAUMONT Héloïse
BERTHON Lisa
PARRIAUD Noémie
La parentification
Université Catholique de Lyon
L2 Psychologie Semestre 3 Session 1
Année universitaire 2020-2021
TD Psychologie du Développement
Résumé
Le terme de parentification a été introduit en 1965 par Boszormenyi-Nagy dans le
champ des thérapies familiales et désigne une attribution d’un rôle parental à un ou plusieurs
enfants dans un système familial (Simon, Sterlin et Wynne). C’est un processus
intergénérationnel se produisant dans des familles monoparentales, particulièrement le cas
d’enfants divorcés ou ceux dont un parent est décédé. L’enfant parentifié aura plusieurs rôles
dans la famille comme le rôle de soignant pour son parent. Tout cela entrainera de nombreuses
conséquences notamment lorsque bébé, il ne pourra développer une relation d’attachement avec
sa mère ou bien lorsque adolescent, il doutera sans cesse de lui-même, ne se sentira pas légitime.
Enfin, lorsqu’il sera adulte, il pourra être dans une relation de co-dépendance ou bien de
transfert avec son conjoint. Afin d’éviter de reproduire ce processus sur les générations futures,
la thérapie est un excellent moyen de reconnaitre ce processus et donc de ne pas le transmettre
aux générations futures.
Mots clés :
« Processus de parentification », « Théorie de l’attachement », « Relation de dépendance/co-
dépendance », « Conflit de loyauté-déloyauté », « Résilience »
Table des matières
Introduction.....................................................................................................................1
1. Le concept de parentification ...............................................................................2
1.1. Définition ..................................................................................................................... 2
1.2. Explications de la parentification ............................................................................ 3
2. Les conséquences de la parentification .............................................................6
2.1. Le bébé et l’enfant...................................................................................................... 6
2.2. L’adolescence........................................................................................................... 10
3. Reconstruction et protection de la parentification..........................................13
3.1. La thérapie comme protection des générations futures.................................... 13
3.2. Comment protéger l’enfant de la parentification................................................. 15
Conclusion ....................................................................................................................15
Bibliographie.................................................................................................................17
1
Introduction
De nos jours, l’enfant est devenu un sujet préoccupant et récurrent, on lui associe toute
sorte de qualificatifs : enfant roi, enfant martyre, enfant tyran, enfant cadeau, enfant hyper-
mature. Parfois, on aborde aussi le sujet du parent, lorsqu’on parle des parents immatures, des
parents copains, des parents victimes, des parents autoritaires. Cependant, on n’aborde peu le
sujet sur les processus relationnels entre les enfants et les parents. De plus en plus d’enfants
ressentent une souffrance psychologique, une surcharge émotionnelle, en partie due aux parents
qui transmettent à leur enfant, leurs angoisses et de nombreuses responsabilités en leur prêtant
des comportements adultes et des attitudes qu’ils ne peuvent encore avoir. L'enfant ne va cesser
de vouloir être perfectionniste, exigeant envers lui-même, ne tolérant pas la moindre erreur. Les
plus touchés sont les enfants qui vivent dans les familles recomposées, qui sont sujets à
l’évolution et aux transformations des familles : famille monoparentale, famille homoparentale,
famille polygamique. À travers ces diversifications, nous souhaitions mettre en avant un
phénomène interfamilial fréquent : la parentification. La notion de parentification a été
introduite dans le champ des thérapies familiales par Boszormenyi-Nagy (1965) dès le début
des années soixante, et représente d’après Legoff cela désigne « un processus interne à la vie
familiale qui amène un enfant ou un adolescent à prendre des responsabilités plus importantes
que le voudraient son âge ». L'enfant devenant le parent de son parent. Il nous a donc semblé
pertinent d'étudier le processus de parentification en parallèle des conséquences que ce dernier
engendre sur le développement de l’enfant, se répercutant également sur son adolescence mais
aussi sur sa vie adulte. Ainsi, dans une première partie, nous aborderons le concept de
parentification, dans une seconde partie les conséquences sur le développement de l’enfant et
enfin la protection de la parentification.
2
1. Le concept de parentification
1.1. Définition
Tout d’abord, beaucoup d’auteurs ont décrit ce phénomène dans le cas de familles
monoparentales, particulièrement le cas d’enfants divorcés ou ceux dont un parent est décédé.
En effet, nous avons pu faire le lien avec un exposé présenté par nos camarades qui mettaient
en avant les difficultés que pouvait rencontrer un enfant ayant grandi dans une famille
monoparentale ou celles dont le parent était décédé.
La parentification trouve aussi son origine dans plusieurs générations notamment celle des
grands parents et dont les conséquences peuvent toucher les générations à venir. De plus, la
parentification ne s’arrête pas à un enfant hypermature ou encore à l’immaturité des parents, ni
même à la relation « mère-enfant ». En effet, on la retrouve sous différentes formes en fonction
de la configuration spécifique du contexte familial et donc des relations intergénérationnelles.
Cyrulnik1
qualifie la parentification ou adultisme de « mécanisme de défense » et de « stratégie
relationnelle coûteuse ». Cela consiste, pour l’enfant, à « apprendre le déplaisir de vivre par
responsabilité précoce ». Être adultisé consiste à prendre en charge de façon précoce son ou ses
parent(s), à se sentir responsable de leur survie et/ou de leur bonheur. D’après Legoff (1999)
« la parentification de l’enfant peut se définir comme le processus interne à la vie familiale qui
amène un enfant ou un adolescent à prendre des responsabilités plus importantes que le
voudraient son âge et sa maturation dans un contexte socioculturel et historique précis et qui le
conduit à devenir un parent pour ses parents. C’est un processus impliquant toujours plusieurs
générations qui plonge ses racines dans les générations des grands parents et dont les
conséquences peuvent toucher les générations à venir. ». De plus, Jurkovik (1997) relève des
types de parentification que l’on peut nommer comme positifs, dans le sens où ils peuvent être
bénéfiques pour l’enfant. En effet, si elle est de courte durée et qu’elle est reconnue par les
parents, la parentification n’aura rien de désavantageux pour l’enfant. Il y a par exemple, la
parentification adaptative, où l’enfant n’est pas emprisonné, est soutenu et traité par sa famille.
Ou bien la non-parentification, où l’enfant a un taux modéré de soin dans la famille, ses efforts
sont reconnus, il n’y a pas d’injustices. Dans ce cas-là, elle devient fonctionnelle et permet à
1
http://sylviebergeron.fr/2018/08/28/la-parentification-une-strategie-de-survie/
3
l’enfant de s’identifier à une image du bon parent qu’il pourrait devenir par la suite. Cela est en
opposition à une parentification dite destructive, qui devient pathologique.
De même, on rencontre deux caractéristiques de la parentification : une parentification
émotionnelle lorsqu’il s’agit de s’occuper des soins affectifs de certains membres de la famille,
ou alors une parentification instrumentale, quand il s’agit de prendre en charge l’entretien du
logement ou des tâches administratives.
1.2. Explications de la parentification
L’enfant va très vite sortir de l’insouciance de l’enfance, acquérir des responsabilités et
s’assumer au-delà de son âge. Il ne se construira pas sur un modèle fiable et pourra se sentir
coupable ou même responsable des malheurs de ses parents. A cause de cela, il va perdre son
imaginaire et l’accès au jeu. Il va avoir du mal à trouver sa place, à s’accorder du temps, des
moments de plaisir, à ne plus penser et laisser place à son imaginaire.
L’enfant parentifié peut remplir plusieurs rôles. Par exemple le rôle de soignant, lorsque le
parent manifeste des attitudes infantiles. Il peut alors être un garant de la relation de couple, ou
encore responsable de la santé mentale ou physique de ses parents. Également, il peut être un
bouc-émissaire ou au contraire le « bon enfant » face à ses frères et sœurs, lorsqu’il s’agit d’une
parentification adaptive. De même, dans le système familial, l’enfant peut également avoir la
fonction de médiateur ou même d’intermédiaire. Comme le précise Alan Carr (2000), l’enfant
parental est « un enfant qui, en fonction d’une coalition intergénérationnelle avec un parent, est
utilisé de manière inappropriée à avoir une autorité parentale envers les autres enfants de la
famille ».
On rencontre plusieurs théories sur la parentification. D’abord celle de Minuchin qui utilise le
terme « d’enfant parental » en 1967, qui signifie que l’enfant passe de l’enfance à la parentalité.
Également Boszormenyi-Nagy et Sparks (1973) désignent la parentification comme une
« distorsion subjective des relations ». Ainsi, l’enfant devient un parent pour son parent. Dans
la littérature, on utilise plusieurs termes comme inversion des rôles, donneur de soins, enfant
parentifié.
Ce processus est influencé par certain facteurs comme les facteurs culturels ou bien les
facteurs de genre. D’abord, la parentification peut être engendrée par des normes culturelles ou
historiques. En effet, la tradition en Europe du Nord fait que l’enfant a souvent un rôle de
« servant » car les parents requièrent une aide constante et un comportement « d’adulte ». Avant
le 20ème
siècle, on ne considérait pas l’enfance comme un âge différent de l’adulte mais en
4
réalité comme « un adulte miniature ». En d’autres termes, lorsque l’enfance n’était pas
distincte comme un âge à part entière de l’adulte, on commettait certains abus sur l’enfant,
comme de l’exploitation de la part des parents pour satisfaire leurs propres besoins. De nos
jours, après avoir compris que l’enfance constituait une période d’insouciance et de non-
responsabilités, dans les sociétés modernes occidentales, on empêche les enfants de prendre
part au maintien des soins familiaux. Néanmoins, l’adulte et particulièrement le parent, ont
toujours tendance à impliquer leurs enfants dans la vie familiale, de façon inadaptée, en raison
de leur volonté d’avoir « un retour » de leur part, en ce qui concerne leur bonheur, l’aide, et le
dévouement.
De même, on peut aussi penser aux facteurs de genres. Il s’avère que de nombreux pères soient
absents ou n’aient pas d’autres choix que d’endosser des rôles plus « féminins ». Cela peut
conduire l’enfant à être parentifié car les pères laissent des carences concernant les
responsabilités familiales. D’après Legoff (1999), il n’est pas forcément nécessaire de
« réinjecter du père ». Plus précisément, la présence du père ainsi que de son autorité, est une
vision assez patriarcale de la famille. Lorsque les deux parents sont présents, il y a le risque
pour l’enfant de savoir recevoir et donner à l’un comme à l’autre, sans créer de conflit de loyauté
avec l’un des deux parents. D’autres auteurs (Gilligan, 1982, cité dans Barnett et Parker, 1998,
Jurdovik, 1997) déterminent que les femmes seraient influencées par la société, à donner
nettement plus d’importance aux relations familiales que les hommes. De ce fait, la
parentification aurait plus d’influence sur le développement de l’identité féminine que
masculine. La parentification se traduirait donc différemment chez les femmes que chez les
hommes. De plus, la société dite « postmoderne » accentuerait le processus du fait de l’égalité
homme/femme au sein des relations. En effet, les femmes se voient attribuer des tâches
« masculines » contrairement aux hommes qui eux, ne se contentent que des leurs.
Enfin, les facteurs tels que le divorce, le stress, le travail contraignant, poussent les parents à
vouloir du soutien de leurs progénitures et à vouloir combler leurs propres besoins en les
parentifiant. En ce qui concerne l’abus sexuel ou encore l’inceste, ce sont eux aussi des facteurs
importants dans la parentification. Ils chamboulent, voire même anéantissent l’ajustement
psychologique de l’enfant. Ces enfants ayant dû satisfaire tous les besoins, même sexuels de
leur parent, se verront faire de même avec leurs propres enfants. Il s’agit ici d’une transmission
générationnelle. D’après Burkett (1991), des mères ayant subi ce genre de traumatisme sont
plus autocentrées sur elle-même que sur les besoins de leur enfant. Elles se désinvestissent
5
complètement du rôle de mère ou alors au contraire, elles surinvestissent leur enfant, en faisant
d’eux leur raison de vivre. L’enfant devient donc pour elles un soutien émotionnel.
La parentification dans les ambiances incestueuses, qui elles sont déjà troublantes pour
l’enfant, apparait comme un moyen de compenser les manques du couple conjugal. Il est connu
que les parents souffrant d’alcoolisme ou de toxicomanie favorisent la parentification. Ce type
de parent est dans l’incapacité totale, qu’elle soit temporaire ou durable, à apporter des soins
émotionnels ou physiques à leur enfant. Bien que dans certaines familles où l’un des deux
parents reste sobre, celui-ci se préoccuperait trop de la souffrance de l’autre ou de la sienne
pour prendre soin de son enfant en lui apportant de la sérénité ou de la stabilité. Dans ces cas-
là, deux directions se présentent à l’enfant. Soit il devient le sauveur, soit le rebelle. Enfin, il y
a aussi le facteur du couple parental séparé, dans lequel l’enfant se retrouve avec des
responsabilités parentales bien plus importante que les enfants de famille non-divorcée. Dans
les familles monoparentales, l’isolement social peut indiquer la présence d’une parentification
pathologique. Bien sûr, la séparation des conjoints n’est pas forcément synonyme d’inversion
des rôles, néanmoins dans ce genre de situation, l’enfant endosse de nombreux rôles qui ne
devraient pas être les siens comme l’intermédiaire entre les deux parents, le messager, le
confident, l’allier contre l’autre parent et bien d’autres. Dans ces moments, l’enfant, par peur
de perdre un autre parent ou d’être abandonné, se laisse aller à jouer ces rôles, au détriment de
sa vie et sa santé.
6
2. Les conséquences de la parentification
Tout d’abord, il n’y a pas de moment précis où plutôt d’âge précis durant lequel l’enfant
sera parentifié mais il y a des facteurs à prendre en compte. En effet, un parent veuf, seul,
malade, handicapé sera plus amené de demander à son enfant de l’aider dans certaines tâches.
Les rôles se répartiront alors entre les frères et sœurs de façon naturelle. Or, l’enfant unique
pourra ressentir trop de responsabilités, il pourra ne pas se sentir capable, à la hauteur de
subvenir aux besoins de son parent. Par la suite, cela nous amènera à nous pencher sur la
parentification lorsque le parent est alcoolique, lorsqu’il se montre détaché à son enfant, sans
créer un vrai lien avec lui. Ici, la parentification sera vécue de manière différente par l’enfant
et pourra avoir des répercussions sur son développement.
2.1. Le bébé et l’enfant
Comme nous l’avons évoqué précédemment, si la parentification n’est pas reconnue par
le parent, elle pourra causer des carences dans le développement de l’enfant et ce, même dès sa
naissance. En effet, si dès la naissance, la mère n’endosse pas son rôle, ne porte pas d’attention
à son bébé, il le ressentira car son cerveau est déjà actif. Ensuite, le bébé privilégiera la voix, le
regard, s’intéressera à la direction du regard d’autrui, au visage. Petit à petit, il considère l’autre,
c’est-à-dire que bien avant de pouvoir s’exprimer, il porte déjà beaucoup d’attention au monde
qui l’entoure, il est sans cesse en recherche d’interaction et de contact. C’est grâce à ces
interactions que le bébé développera son « vrai self », sa mère étant suffisamment bonne pour
répondre à ses besoins. Lors de la parentification dite destructive, la mère n’est pas en mesure
de répondre à ses attentes, ce sera la conséquence du « faux self » du bébé. La mère n’est pas
suffisamment bonne et le bébé sera contraint à ses réactions. Selon Winnicott2
, « il ne suffit pas
d’être une bonne mère mais d’être avant tout une mère ordinaire, normalement dévouée ». En
d’autres termes, la mère doit faire au mieux pour son bébé, sans essayer d’être parfaite. En effet,
il est important pour l’enfant de disposer d’un environnement confiant, fiable et empathique
afin d’avoir un développement harmonieux, marqué par la reconnaissance des parents. Tout
cela contribue dans l’attachement de l’enfant car si les carences maternelles ne sont pas
résolues, il ne pourra s’attacher à une figure d’attachement et sera donc évitant. Selon Bowlby
(1958), la base de l’attachement chez un bébé est un ensemble de comportements constitués de
« réponses instinctives », soit sucer, attraper et suivre, qui sont des comportements de proximité,
2
Winnicott D.W. La mère suffisamment bonne. 2006. Editions Payot et Rivages, Paris.
7
mais il y a aussi des comportements de signalisations comme pleurer et sourire. L’attachement
vient donc de la capacité de l’adulte à comprendre ces signaux, les intégrer et les traduire à
l’enfant. Pour cela, l’adulte doit se montrer disponible afin de générer ce processus. Si ce
processus est en place, alors, le seul fait de savoir que l’adulte est disponible tant physiquement
qu’émotionnellement, aura un impact presque aussi bénéfique qu’une réelle action du parent,
dit « caregiver », c’est-à-dire le donneur de soin. Le but de ce rapport relationnel est de
permettre à l’enfant de se sentir en sécurité ainsi que protéger et par conséquent, d’avoir plus
confiance pour appréhender au mieux la découverte du monde qui l’entoure. C’est pourquoi,
les enfants s’attachent aux personnes qu’ils côtoient le plus et qui s’occupent d’eux en leur
procurant des soins et une attention particulière. Cependant, il est possible et commun que les
enfants développent des figures d'attachement dites secondaires. C'est-à-dire un attachement
envers des personnes qui s'occupent de lui lorsque sa figure d'attachement de référence n'est
pas libre, comme les grands-parents. Néanmoins, l'enfant peut développer un lien d'attachement
même avec quelqu'un de peu disponible, mais cela engendrera un sentiment d'insécurité. Mary
Ainsworth a développé cette idée d’attachement sécure ou insécure en se basant sur les travaux
de Bowlby. Elle a d’abord mis en évidence trois schèmes d’attachement d’après une étude,
ayant pour nom « situation étrange ». Elle a évalué le comportement de l’enfant face à des
situations de séparations puis de retrouvailles, en les mettant en situation de stress permettant
de voir leur comportement et le type d’attachement. Pour commencer, il y a l’attachement
sécure, c’est-à-dire que le caregiver est pour l’enfant une figure sécurisante et apaisante, il ne
veut pas être séparé de cette figure d’attachement, il recherche sa proximité et lorsqu’elle est
là, il n’a pas de mal à découvrir ce qui l’entoure. Cela signifie que la figure d’attachement a un
bon comportement vis-à-vis de l’enfant, il est disponible et répond correctement aux besoins de
ce dernier. Ensuite, il y a l’attachement insécure évitant ou anxieux qui correspond à un enfant
qui a peu de démonstration d’affection envers son caregiver. Il n’émet pas de résistance ou de
réactions particulières lorsque ce dernier part et n’en émet pas non plus lorsqu’il revient. Puis,
il y a l’attachement insécure ambivalent ou résistant. L’enfant ici, recherche la proximité avant
la séparation. Il veut que son caregiver lui soit disponible, mais se montre retissant à tout contact
ou signe d’affection et de gentillesse. Le caregiver a donc vis-à-vis de l’enfant des réponses
incohérentes face à ses besoins et demandes, tantôt appropriées, tantôt négligentes. Pour finir,
il y a l’attachement désorganisé ou désorienté qui sera découvert plus tard par Mary Main, dans
lequel l’enfant n’a pas de stratégie cohérente face aux situations stressantes, mais des
comportements absurdes, contradictoires et désorientés. Cela signifie que la figure
d’attachement peut être elle-même désorientée faisant passer des messages et avoir des actions
8
contradictoires, faire preuve de maltraitance, d’une présence trop forte ou au contraire trop
faible.
Dans le cadre d’une parentification où le parent ne se montre pas assez disponible,
l’enfant aura donc tendance à présenter un attachement insécure. Malgré ce manque, l’enfant a
besoin d’interaction et si le parent lui apporte cela, bien qu’il puisse être maltraitant, alors il
deviendra quand même la figure d’attachement de référence. Le type d’attachement peut
évoluer et devenir sécure si le comportement du ou des caregiver(s) évolue vers un
comportement plus disponible et à l’écoute des nécessités de l’enfant. Une autre façon
d’acquérir un attachement sain et sécure est, si l’enfant parvient à rediriger ses figures
d’attachements primaires vers d’autres personnes que ses parents. Cependant, il est très
compliqué pour lui de changer des préférences comme celle-ci. De plus, les victimes de
parentification sont souvent confrontées à un certain isolement notamment dû aux
responsabilités qu’elles ont. C’est alors d’autant plus complexe pour elles de réorienter leurs
besoins affectifs vers une tierce personne. C’est pourquoi, l’enfant sera alors en recherche
d’affection, il sera très demandeur et guettera les attentes du parent en voulant se sentir
indispensable auprès de lui. Il va être prêt à fournir beaucoup d’efforts pour maintenir cette
confiance relationnelle. Cela va lui permettre d’être réconforté et de satisfaire ses besoins
d’affection. Winnicott décrit cela avec « le stade de sollicitude » qui désigne une action vers
l’autre : celle de donner et de prendre soin de l’autre, celle de reconnaitre l’autre. L’enfant va
alors endosser trop de responsabilités, il voudra faire plaisir à son parent, sans forcément
attendre quelque chose en retour, car il considèrera que c’est normal de l’aider. Or, l’enfant se
sentira sans cesse coupable de mal faire, de ne pas être à la hauteur et manquera grandement de
confiance et d’estime de lui. Dans ce cas, il y a une inversion des rôles car c’est l’enfant qui
prend la place du parent. L’enfant dépendra de son parent défaillant qui propose une image
dévalorisante et honteuse. Sans figure d’attachement, cela aura des conséquences sur la manière
de l’enfant de se comporter avec les autres. Il développera ainsi une « méfiance relationnelle »,
il aura du mal à créer de nouvelles relations, notamment à l’école.
Après avoir énoncé l’importance de l’attachement chez l’enfant, on retrouve également,
en lien avec ce dernier, la notion de conflit de loyauté. D’après Anna Freud dans son livre Le
normal et le pathologique chez l'enfant (1968), lorsque l’enfant commence une thérapie, il est
plausible qu’un conflit de loyauté s’installe pour l’enfant, entre ses parents et la thérapeute. En
effet, l’enfant estime s’attacher au thérapeute du fait qu’il réussit là où ses parents ont échoué.
Cela le rend déloyal à ses parents. Ici, les parents ont pour rôle d’aider l’enfant à surmonter ses
9
résistances et abandonner sa période de transfert négatif, tout en continuant la thérapie.
Cependant, si les parents manquent cette tâche, qu’ils se rangent du côté des résistances de
l’enfant, le thérapeute se retrouve sans recours. En période de transfert positif, le conflit de
loyauté naît chez l’enfant vis-à-vis d’eux, à propos de l’analyste et s’aggrave. Dans ce cas, avec
la mauvaise volonté des parents, l’enfant devient plus loyal au thérapeute qu’à ses parents, ce
qui renforce la parentification et peut pousser l’enfant à arrêter sa thérapie.
Toujours dans la notion de conflit de loyauté et déloyauté, il ne faut pas non plus négliger la
place de la famille dans le développement de l’enfant. En effet, comme Winnicott le souligne
dans l’article « L'enfant dans le groupe familial » (1966), il explique que « la famille représente
l'environnement permettant à l'enfant de croître, d'évoluer et finalement de s'en séparer pour
devenir un individu capable de dire « Je ». ». La famille constitue alors un environnement où
l’enfant peut exprimer sa loyauté et sa déloyauté. En effet, il peut aller vers son père en
s’éloignant de sa mère, puis revenir vers cette dernière sans perdre la confiance et l’amour qu’il
lui porte. Ce réseau est tout aussi important que le jeu dans le développement de
l’enfant. « Dans les jeux, les enfants d'une même famille introduisent toutes les tensions liées à
ce type d'expérimentation de la loyauté, y compris les tensions et les jalousies perçues par eux
chez les adultes de leur entourage ». (Winnicott, 1966). Cette expérimentation des loyautés au
sein de la famille, facilite la maturation de l’enfant. Elle s’effectue par la séparation et la mise
à distance.
De plus, le conflit de loyauté peut s’articuler avec la loyauté clivée. Ce sont les enfants bloqués
par les demandes contradictoires et inconciliables des parents ou bien des grands-parents qui
développent cette loyauté clivée. Plus précisément, c’est lorsque l’enfant va vers l’un des
parents, l’autre lui reproche d’être déloyale et inversement. Dans cette situation, l’enfant pourra
être un confident pour l’un des parents envers l’autre parent, tout comme il pourra être un
médiateur entre ses parents pour calmer la colère qui les animent, allant même jusqu’à s’accuser
lui-même pour apaiser les tensions et les réconcilier. On rencontre cette situation particulière
dans de nombreux contextes. Premièrement, des parents séparés qui utilisent l’enfant en tant
qu’intermédiaire. C’est en parti lors des conflits pour la garde ou les visites des enfants que les
loyautés sont utilisées sous forme de clivage. Dans ces moments, l’enfant ressent une culpabilité
énorme de devoir laisser un des parents. De même que l’accablement de l’autre parent accentue
cette culpabilité du fait que l’enfant ne peut plus « donner » au parent qui est justement perçu
comme étant en difficulté et ayant besoin de lui. Puis, deuxièmement, des parents qui n’ont pas
réglés leurs conflits par une séparation et qui continuent d’entretenir des relations tendues ainsi
10
qu’un contexte familial haineux et décousu. Les enfants sont si souvent accusés d’être
responsables de cette situation lorsqu’ils se comportent mal. Malgré les efforts des enfants pour
arranger cela, les relations ne seront pas plus rassurantes.
Ainsi, contrairement aux conflits de loyauté qui sont quasiment inéluctables mais qui
peuvent être bénéfiques en termes de maturation et de développement de la confiance, le clivage
de loyauté, lui, bouleverse la confiance de l’enfant. L’enfant ne peut donc pas être loyal à un
parent sans être déloyal à l’autre. Par ailleurs, l’enfant prête énormément d’attention aux
tensions entre ses parents et tente laborieusement de devenir conciliateur afin d’apaiser les
conflits qu’ils entretiennent. Par ce rôle, l’enfant est donc investi comme un enfant parentifié.
2.2. L’adolescence
Au moment de l’adolescence, période caractérisée par l’achèvement de la
construction de la personnalité, l’enfant voudra s’affirmer et s’opposer. Il ressentira le besoin
de prendre son envol et ainsi de s’éloigner de cette fonction parentale. Il voudra vivre
pleinement son adolescence avec l’indépendance qu’elle procure. Cependant, les craintes de
perte et d’abandon vont être réactivées, et l’enfant va se retrouver coincé dans une « loyauté à
ne pas grandir ». En effet, il sera encore contraint par des obligations de son parent, et oscillera
entre le désir d’être libre et le devoir d’être disponible pour son parent. Or, le processus de
parentification n’ayant encore pas été reconnu, l’adolescent pourra être confronté à des peurs,
des angoisses, des doutes, pouvant entrainer une dépression ou un suicide dans certains cas.
C’est ce que nous allons développer plus en détail.
Comme évoqué précédemment, les enfants parentifiés ont du mal à créer de nouvelles amitiés,
de nouveaux liens sociaux. Une des causes principales est que l’enfant parentifié est souvent
perçu comme trop mûr et sérieux par les autres enfants de son âge. L’enfant ne verra pas l’amitié
en termes de réciprocité mais plutôt en termes d’exclusivité. Il cherchera à se rendre
indispensable avec son ami, comme il s’est rendu indispensable pour son parent plus jeune. De
même, l’enfant cherchera à s’identifier à des personnes plus grandes que lui, car elles lui
apporteront de la confiance, de la sécurité, de la disponibilité. Ou bien dans le cas contraire, il
fera en sorte que des personnes plus jeunes que lui s’identifient à lui. Dans ce cas, il incarnera
le rôle de protecteur, il voudra toujours rassurer, réconforter, aider ses amis. De plus, l’enfant
pourra être dépendant des autres et nous verrons par la suite que cela peut également se produire
lorsqu’il sera adulte. En effet, la dépendance affective provient régulièrement d’une carence
affective durant l’enfance qui entraîne une mauvaise estime de soi. Ce manque de confiance est
11
la source de la recherche d’amour et d’affection que vont avoir les dépendants affectifs à l’égard
des autres des autres. En effet, ils veulent constamment plaire, qu’on leur montre qu’on les
aime, leur permettant ainsi de se sentir valoriser à travers l’autre. En cherchant à tout prix cela,
ils ont tendance à éviter les conflits, à prendre tous les torts sur eux ou même à ne pas se
préoccuper de leurs propres besoins et envies. S’ils agissent ainsi, c’est parce qu’ils ont peur de
ce que peut entraîner un conflit, à savoir une distance pouvant générer une solitude. Mais ces
derniers ont souvent une peur de la solitude voire même un sentiment d’abandon. Cette
obsession est due à la peur d’être seul car l’enfant a tendance à être heureux qu’à travers une
tierce personne. Cette dépendance est pathologique lorsque les demandes affectives sont
excessives et que cela créer une souffrance, car l’autre ne peut pas combler ce besoin d’amour
et d’attention disproportionné. Lors d’une psychopathologie comme celle-ci, le patient aura
énormément de mal à se détacher même quand la relation lui sera toxique ou que la relation
aura pris fin depuis un certain temps. La co-dépendance est une caractéristique récurrente dans
la dépendance affective pathologique, puisqu’elle consiste à apporter son aide et son soutien à
une personne mal ou instable psychologiquement, dans le but d’avoir de l’attention et de
l’affection de cette dernière. Ce processus est souvent inconscient. Comme dit précédemment,
la dépendance affective vient fréquemment d’un attachement non sécure engendré par le
comportement des parents. Différents profils de parents amènent à cela, dont plusieurs que l’on
peut lier aux parents responsables de la parentification de leurs enfants. Parmi eux, on retrouve
le parent inattentif qui ne fait pas attention aux besoins de l’enfant. Cela conduira l’enfant à se
sentir illégitime à recevoir de l’amour et des signes d’affection, l’empêchant ainsi de cultiver
son narcissisme. Le parent non-affectueux créera les mêmes conséquences. Le parent, qui est
lui-même dépendant affectif, tournera ses besoins sur son enfant qui prendra en charge cette
carence parentale et qui le reproduira par la suite.
Une autre conséquence de la parentification que l’on retrouve pendant l’enfance mais
aussi pendant l’adolescence, est le syndrome de l'imposteur. En effet, bon nombre d’enfants
peuvent être touchés par cela. Ce syndrome consiste pour l’enfant parentifié, à avoir un manque
de confiance en lui, se traduisant par une forte dépréciation, l'impression de tromper ceux qui
l’estime. De plus, l’enfant a du mal à accepter les compliments puisque la personne est
perpétuellement en train d'attribuer son mérite à des éléments périphériques, c'est-à-dire aux
autres, à la chance, à un malentendu. L’enfant ne se sent donc pas légitime à avoir telles ou
telles réussites. C'est pourquoi, il sera dans le déni de ses qualités, de ses talents et valeurs,
puisqu'elles n'ont jamais été mises en avant. Tout cela peut conduire aussi à de l’insécurité.
12
C’est aussi une façon de penser qui peut se montrer déstabilisante puisque ces personnes auront
tendance à appliquer une stratégie de défense. On parle soit « d’overdoing » qui consiste à
travailler beaucoup plus que nécessaire afin de justifier leur réussite par le temps de travail,
mais pas par leurs qualités. Ou bien on parle également de « l’underdoing » qui à l’inverse, est
le fait de procrastiner et de trouver des excuses avant même un éventuel échec. Ce syndrome
est donc une grande source d’angoisse pouvant même atteindre la dépression ou le burnout. Il
est également appelé syndrome de l’autodidacte.
De plus, nous pouvons faire le rapprochement avec un thème abordé lors de nos exposés
oraux, c’est l’hypersensibilité. Il s’agit d’un trait de caractère développé en particulier durant
l’éducation de l’enfant. Cette conséquence peut être due à quelque chose qui s’est passé dans
l’enfance remontant jusqu’à la période intra-utérine. L’enfant était une éponge émotionnelle.
En effet, chez l’enfant parentifié, cette hypersensibilité peut apparaitre notamment lors d’une
expérience mal vécue dans son enfance comme le divorce ou n’importe quelle autre cause de
la parentification. De ce fait, on remarque par la suite des comportements particuliers chez
l’enfant qui témoignent de l’hypersensibilité, comme le fait de vouloir plaire a tout pris à ses
parents en dépit de ses propres désirs, en recherche de reconnaissance et d’un bon jugement. La
peur de l’abandon étant tellement présente que l’enfant serait prêt à supporter n’importe quelle
injustice de la part des parents. Dans ces cas, l’enfant préfère passer plus de temps avec son ou
ses parents qu’avec des enfants de son âge. De même, l’enfant est très attentif à l’anxiété des
parents.
13
3. Reconstruction et protection de la parentification
Dans cette partie nous allons voir la nécessité de se reconstruire à l’aide d’une thérapie
pour ensuite protéger les générations futures de ce processus intergénérationnel. Cependant,
avant de commencer une stratégie thérapeutique la parentification doit être reconnu.
3.1. La thérapie comme protection des générations futures.
Ayant été parentifié l’adulte, cherchera à se reconstruire afin de ne plus rester avec ses
douleurs du passé. Par exemple, inconsciemment, l’adulte qui a eu une mère dépressive
associera dépression et féminité. Déborah Luepnitz (1988)3
emploie le terme de « répétition »
qui se base sur des expériences vécues pendant l’enfance et qui amènent à des conséquences
négatives, ayant un impact dans la vie familiale. De plus l’adulte devra suivre une thérapie.
Celle-ci lui permettra de mettre des mots sur ce qu’il a vécu afin de panser ses maux. En effet,
la stratégie thérapeutique permet de reconnaitre le processus de parentification et donc de ne
pas le reproduire ces cycles de répétitions sur les générations suivantes. D’après Legoff (1999),
cette stratégie s’appuie principalement sur la reconnaissance du processus. La thérapie se fait
généralement avec les membres de la famille, elle se construit à l’aide d’un dialogue entre le
thérapeute et la famille. Ensuite, c’est la reconnaissance de l’investissement de l’enfant de la
part des parents qui permet d’ouvrir la voie à un travail thérapeutique. Avec cela les parents
participent au processus de construction de la confiance et de la liberté par le souci d’équité du
« donner et recevoir » mais également de la reconnaissance de chacun. Néanmoins pour que
cette reconnaissance soit favorable, il est nécessaire que la compréhension ne soit pas
qu’intellectuel, il faut que chacun décide d’entreprendre un nouvel engagement éthique dans la
relation à l’autre (parents et enfants). Le thérapeute doit étudier la façon dont les parents ont
eux-mêmes été parentifié dans leur famille d’origine, les conséquences passées et présentes qui
en découlent, c’est-à-dire la demande de réparation adressée à l’enfant ou encore l’épuisement
parental… l’intérêt de tenter de mettre en lien la reconnaissance de la parentification de l’enfant
et l’expérience de la parentification est d’amoindrir la culpabilité et se réengager sur le fil des
loyautés sans mettre en opposition les générations. En fait, cette thérapie donne à la famille un
rééquilibrage des relations intrafamiliales. Elle aide les enfants à retrouver une place et à
3
Luepnitz D-A. (1988). The Family Interpreted. New York: Basic-Books.
14
accepter cette nouvelle place dans leur famille, en gardant toujours à l’esprit son expérience
d’enfant parentifié. Bien que le thérapeute ait une idée précise du type de parentification, il n’y
a pas d’ordre chronologique précis du déroulement de la thérapie, les modalités d’ouverture de
la famille ne peuvent pas être appliqués automatiquement. Dans cette situation le thérapeute
prône la spontanéité, tout en prenant en compte les difficultés de chacun à abandonner son rôle
actuel dans la famille.
Concernant la vie de couple, l’adulte va se comporter avec son conjoint comme un enfant avec
l’inquiétude d’être laissé, abandonné. Cette attitude est basée sur une peur de l'abandon qui
entraîne une relation autoritaire et fusionnelle, où l'autre est accusé de ne pas donner. (Oison et
Gariti, 1993). Comme à l’adolescence, l’adulte peut entretenir une relation de codépendance
car il se sentira toujours redevable face à son conjoint, par peur d’être laissé. De plus, le fait
d’avoir trop donné dans l’enfance, peut-être une conséquence d’un vide chez l’adulte. En effet,
celui-ci aura l’impression de manquer de ressources au moment de « donner ». Il sera désinvesti
affectivement, il ne s’impliquera pas dans sa relation. Ses besoins d’affection et de
reconnaissance n’étant pas accompli pendant l’enfance, l’adulte va les rechercher dans son
conjoint. On parle alors de relation de transfert dans le sens où l’adulte projette sur son conjoint
l’image d’autorité et d’amour qu’il n’a pas connu avec ses parents puisque c’est lui, depuis son
enfance, qui était parent.
A propos de l’éducation de ses enfants, l’adulte étant encore empreint de ce qu’il a vécu dans
son enfance, pourra transmettre, répéter ce schème, plus communément désigné sous le nom de
« script familial » selon Byng-Hall (1986). Ou bien l’adulte pourra le modifier, le compenser
en étant disponible, en développant une relation basée sur l’affection, l’amour et la sécurité
avec ses enfants. Il développe ainsi une « contre-identité » c’est-à-dire qu’il se détache du
modèle parental.
L’adulte sera donc amené à accepter ce qu’il s’est passé afin de ne pas rester bloqué sur ses
événements passés. Il développera ainsi des réponses adaptées face à l’adversité de ses
expériences, de son vécu afin de se construire. On peut se référer au célèbre psychiatre Viktor
Frankl qui met en avant la résilience comme « la nécessité de pouvoir nous transformer lorsque
nous ne pouvons pas changer les circonstances qui nous entourent »4
. Ses propos s’appliquent
4
Ambrieres, M. (2020, 30 juin). Viktor Frankl et ses enseignements sur la résilience, toujours si nécessaires.
https://nospensees.fr/viktor-frankl-et-ses-enseignements-sur-la-resilience-toujours-si-necessaires/
15
à notre cas, puisqu’il est favorable pour l’adulte d’apprendre à vivre malgré ce qu’il a vécu dans
son enfance. En effet, les traumas ordinaires dans la petite enfance sont pires que les grands
drames car ils sont quotidiens tels que le vide affectif, l’intrusion et l’imprévisible. C’est
pourquoi, comme le souligne Boris Cyrulnik, le terme de résilience est un « concept
polysémique »5
. Plus précisément, il peut s’appliquer tant aux individus qui vivent dans des
conditions familiales et sociables défavorables, mais qui arrivent tout de même à se développer
sans dommages psychiques et tant à des sujets confrontés à des événements traumatiques et qui
se reconstruisent après. Ainsi, l’adulte, afin d’atteindre un équilibre, commencera un processus
de résilience. Ce processus dépend de l’interaction de différentes conditions internes et externes
au sujet et qui sont donc variables suivant ses évolutions personnelles et les évolutions du
contexte environnemental dans lequel il vit. Enfin, la résilience n’est jamais acquise totalement
mais des personnes montrent tout de même une adaptation résiliente tout au long de leur vie.
3.2. Comment protéger l’enfant de la parentification
Il nous a semblé pertinent et essentiel d’évoquer les raisons qui protégeraient l’enfant de la
parentification afin que celle-ci ne se produise. Tout d’abord, nous pouvons dire que la place
du couple parental et conjugal joue un rôle prépondérant pour l’éducation, le développement de
l’enfant et constitue ainsi un point de repère pour l’enfant. En effet, un couple dynamique où
chacun constitue une ressource pour l’autre constitue une réelle source pour l’autre et pour
l’enfant. Ensuite, l’enfant doit aussi connaitre un contact fusionnel, apaisant, au détriment de
l’abandon et de la dépendance. L’adulte doit privilégier cette qualité du contact, tout en
reconnaissant les besoins de son enfant. Pour terminer, si l’enfant a la chance de s’épanouir, de
grandir au sein d’une fratrie, cela permettra de distribuer les rôles entre chacun et ainsi d’avoir
un équilibre dans la famille. Sinon, l’enfant pourra se sentir surinvesti par l’adulte.
Conclusion
Nous avons pu voir que le concept de parentification était un processus
intergénérationnel. La parentification existe sous différentes formes en fonction des relations et
du contexte familial. Elle n’a pas que des effets délétères sur le développement de l’enfant car
elle peut être fonctionnelle et ainsi permettre à l’enfant d’avoir un bon exemple de son parent
5
Anaut, M. (2015). La résilience : évolution des conceptions théoriques et des applications cliniques. Recherche
en soins infirmiers, 121(2), 28-39. https://doi.org/10.3917/rsi.121.0028
16
et d’être responsable. Cependant, elle peut être destructive et devenir par la suite pathologique.
Elle commence dès le plus jeune âge chez l’enfant, avant que même ce que dernier ait la
maturité nécessaire et la capacité à réaliser ce que l’on lui demande. Il endosse des
responsabilités qui ne sont pas appropriés durant son enfance. L’enfant parentifié rencontrera
des troubles de l’attachement, un conflit de loyauté ou encore un manque de confiance en lui.
Au moment de l’adolescence, de nouvelles conséquences apparaissent et il pourra être
confronté au syndrome de l’imposteur ou encore à l’hypersensibilité. Une fois adulte, si cela
n’est pas le cas, il pourra se tourner vers la thérapie pour reconnaitre la parentification. C’est
une étape clé dans la vie d’un sujet, lui permettant de se construire et d’appréhender le processus
de résilience, afin d’atteindre un équilibre dans sa vie. Enfin, il est le rôle de tout adulte de
protéger son enfant d’une possible parentification ou bien d’une surcharge émotionnelle par la
mise en place de différents facteurs le protégeant.
On pourrait élargir notre sujet en se penchant plus précisément sur le genre de l’enfant
et son âge afin de voir si cela aurait un impact sur la parentification.
17
Bibliographie
Anaut, M. (2015). La résilience : évolution des conceptions théoriques et des applications
cliniques. Recherche en soins infirmiers, 121(2), 28-39. https://doi.org/10.3917/rsi.121.0028
Bergeron, S. B. (2018, 28 août). La parentification : une stratégie de survie. Les Constellations
Familiales. http://sylviebergeron.fr/2018/08/28/la-parentification-une-strategie-de-survie/
Boyer-Panos, F. (2008). Attachement maternel et qualité des interactions mère-bébé. Le
Journal des psychologues, 261(8), 29-33. https://doi.org/10.3917/jdp.261.0029
Byng-Hall, J. (2007). Soulager le fardeau des enfants parentifiés dans les familles présentant
des modes d'attachement insécurisés [1]. Devenir, vol. 19(3), 201-
222. https://doi.org/10.3917/dev.073.0201
Courtinat, E. C. (2011). La préoccupation maternelle primaire. La préoccupation maternelle
primaire, 2-15. https://doi.org/10.3917/fp.022.0039
Dépendance affective et manque de confiance en soi. (2017, 27 avril).
https://www.passeportsante.net/fr/psychologie/Fiche.aspx?doc=dependance-affective
Dépendance affective : comment la reconnaître et la soigner ? (2020, 8 octobre). Psychiatre
Paris TCC, TIP, EMDR. https://e-psychiatrie.fr/situations-ou-appeler-a-laide/dependance-
affective/
Futura, D. S. E. (2015). Syndrome de l’imposteur. Futura. https://www.futura-
sciences.com/sante/definitions/travail-syndrome-imposteur-15636/
Georgieff, N. (2013). Dynamique du développement de l'enfant. Dans : Colette Bauby éd., Les
enjeux du développement de l’enfant et de l’adolescent : Apports pour la PMI (pp. 27-36).
Haxhe, S. (2008). La parentification : étude d'un processus [1]. Thérapie Familiale, vol. 29(1),
175-178. https://doi.org/10.3917/tf.081.0175
18
Heck, L. & Janne, P. (2011). Vous avez dit « parentification » ? Revue du concept et
réactualisation selon les derniers résultats empiriques. Thérapie Familiale, vol. 32(2), 253-
274. https://doi.org/10.3917/tf.112.0253
Hypersensibilité émotionnelle et hyperémotivité : la découvrir et la soigner. (2020, 8 octobre).
Psychiatre Paris TCC, TIP, EMDR. https://e-psychiatrie.fr/situations-ou-appeler-a-
laide/hypersensibilite-hyperemotivite/
Le Goff, L. J. (2000). L’ENFANT, PARENT DE SES PARENTS : Parentification et thérapie
familiale (Thérapies familiales aujourd’hui) (French Edition) (0 éd.). Editions L’Harmattan.
Le Goff, J. (2005). Thérapeutique de la parentification : une vue d'ensemble. Thérapie
Familiale, vol. 26(3), 285-298. https://doi.org/10.3917/tf.053.0259
Savannah taillard. (2019). La parentification, une stratégie adaptative (Mémoire de maîtrise En
Sciences de Psychologie) https://serval.unil.ch/resource/serval:BIB_S_27835.P001/REF.pdf
Psychologue Paris. (2020, 8 juin). La co-dépendance : s' ; en affranchir - Psychologue.
https://www.psychologueparis-7.fr/co-dependance/
Syndrome de l’imposteur. (2016, 19 décembre). https://www.passeportsante.net/.
https://www.passeportsante.net/fr/psychologie/Fiche.aspx?doc=syndrome-imposteur
Tereno, S., Soares, I., Martins, E., Sampaio, D. & Carlson, E. (2007). La théorie de
l'attachement : son importance dans un contexte pédiatrique. Devenir, vol. 19(2), 151-
188. https://doi.org/10.3917/dev.072.0151
Théorie de l'attachement. (2020, décembre 12). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page
consultée le 12 décembre 12, 2020 à partir de
http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Th%C3%A9orie_de_l%27attachement&oldid=1775
59308.

Contenu connexe

Tendances

Ram гэж юу вэ
Ram гэж юу вэRam гэж юу вэ
Ram гэж юу вэKisoGaki
 
Quelles solutions face au stress ?
Quelles solutions face au stress ?Quelles solutions face au stress ?
Quelles solutions face au stress ?Camille Vauclin
 
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. Berne
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. BerneNos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. Berne
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. BerneISlean consulting
 
Comment mieux gérer son stress ?
Comment mieux gérer son stress ?Comment mieux gérer son stress ?
Comment mieux gérer son stress ?CEEI NCA
 
Les quatre grands principes du management
Les quatre grands principes du managementLes quatre grands principes du management
Les quatre grands principes du managementEurécia
 
Support Formation vidéo : Comment contrôler son stress ?
Support Formation vidéo :  Comment contrôler son stress ?Support Formation vidéo :  Comment contrôler son stress ?
Support Formation vidéo : Comment contrôler son stress ?SmartnSkilled
 
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 10402134334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213nhisd0d
 

Tendances (7)

Ram гэж юу вэ
Ram гэж юу вэRam гэж юу вэ
Ram гэж юу вэ
 
Quelles solutions face au stress ?
Quelles solutions face au stress ?Quelles solutions face au stress ?
Quelles solutions face au stress ?
 
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. Berne
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. BerneNos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. Berne
Nos lectures #1 : "Que dites-vous après avoir dit bonjour? Dr. Berne
 
Comment mieux gérer son stress ?
Comment mieux gérer son stress ?Comment mieux gérer son stress ?
Comment mieux gérer son stress ?
 
Les quatre grands principes du management
Les quatre grands principes du managementLes quatre grands principes du management
Les quatre grands principes du management
 
Support Formation vidéo : Comment contrôler son stress ?
Support Formation vidéo :  Comment contrôler son stress ?Support Formation vidéo :  Comment contrôler son stress ?
Support Formation vidéo : Comment contrôler son stress ?
 
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 10402134334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213
4334 2第一類投保單位經辦人作業手冊 1040213
 

Similaire à La parentification

Ta lattachement un_lien_vital_web
Ta lattachement un_lien_vital_webTa lattachement un_lien_vital_web
Ta lattachement un_lien_vital_webelanoita
 
la paternité et ses troubles
la paternité et ses troublesla paternité et ses troubles
la paternité et ses troubleselanoita
 
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...Elsa von Licy
 
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...Salah eddine TADLAOUI
 
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier complet
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier completLa résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier complet
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier completCafé Sciences
 
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++Jerome Messinguiral
 
parentalite
parentaliteparentalite
parentaliteelanoita
 
L adolescence saber_hamrouni
L adolescence saber_hamrouniL adolescence saber_hamrouni
L adolescence saber_hamrounichahrazad douache
 
handicap et maltraitance
handicap et maltraitancehandicap et maltraitance
handicap et maltraitanceelanoita
 
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013Mailat
 
Un systeme vraiment_educatif
Un systeme vraiment_educatifUn systeme vraiment_educatif
Un systeme vraiment_educatifElsa von Licy
 
petit livre sur le deni grossesse
petit livre sur le deni grossessepetit livre sur le deni grossesse
petit livre sur le deni grossesseelanoita
 
Socialisation.pptx
Socialisation.pptxSocialisation.pptx
Socialisation.pptxssuserd58d17
 
observation bb_watillon_mai2010
observation bb_watillon_mai2010 observation bb_watillon_mai2010
observation bb_watillon_mai2010 elanoita
 
Enquête phobie scolaire
Enquête phobie scolaireEnquête phobie scolaire
Enquête phobie scolairePaul Spurgeon
 
fichier_produit_cours de psychologie .pdf
fichier_produit_cours de psychologie .pdffichier_produit_cours de psychologie .pdf
fichier_produit_cours de psychologie .pdfDaliaLinaMadi
 
Pétition garde alternée (1)
Pétition garde alternée (1)Pétition garde alternée (1)
Pétition garde alternée (1)David Familial
 

Similaire à La parentification (20)

Ta lattachement un_lien_vital_web
Ta lattachement un_lien_vital_webTa lattachement un_lien_vital_web
Ta lattachement un_lien_vital_web
 
la paternité et ses troubles
la paternité et ses troublesla paternité et ses troubles
la paternité et ses troubles
 
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...
Rhei 3186-12-la-construction-d-une-identite-professionnelle-l-exemple-de-la-p...
 
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...
1033Pop_infantile_au_Maroc_caracter_socio-demogr_etprotection_de_l_enfance_Ch...
 
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier complet
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier completLa résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier complet
La résilience - Café Sciences 28 mai 2018, dossier complet
 
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++
Pere Satisfaction Memoire Psycho Dir Castealain Meunier +++
 
parentalite
parentaliteparentalite
parentalite
 
L adolescence saber_hamrouni
L adolescence saber_hamrouniL adolescence saber_hamrouni
L adolescence saber_hamrouni
 
handicap et maltraitance
handicap et maltraitancehandicap et maltraitance
handicap et maltraitance
 
Lien Pere Enfan Le Camus 2002
Lien Pere Enfan Le Camus 2002Lien Pere Enfan Le Camus 2002
Lien Pere Enfan Le Camus 2002
 
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013
Reproduction transgenerationnelle referentiel artefa 2013
 
Un systeme vraiment_educatif
Un systeme vraiment_educatifUn systeme vraiment_educatif
Un systeme vraiment_educatif
 
petit livre sur le deni grossesse
petit livre sur le deni grossessepetit livre sur le deni grossesse
petit livre sur le deni grossesse
 
Socialisation.pptx
Socialisation.pptxSocialisation.pptx
Socialisation.pptx
 
Approche communicative
Approche communicative Approche communicative
Approche communicative
 
observation bb_watillon_mai2010
observation bb_watillon_mai2010 observation bb_watillon_mai2010
observation bb_watillon_mai2010
 
Enquête phobie scolaire
Enquête phobie scolaireEnquête phobie scolaire
Enquête phobie scolaire
 
fichier_produit_cours de psychologie .pdf
fichier_produit_cours de psychologie .pdffichier_produit_cours de psychologie .pdf
fichier_produit_cours de psychologie .pdf
 
Code de conduite
Code de conduiteCode de conduite
Code de conduite
 
Pétition garde alternée (1)
Pétition garde alternée (1)Pétition garde alternée (1)
Pétition garde alternée (1)
 

La parentification

  • 1. Année universitaire 2020-2021 Promo*: ¨ L1 (Parcours): …………………………. ¨ L2 ¨ L3 ¨ M1 ¨ M2 Semestre* : ¨ 1 ¨ 2 ¨ 3 ¨ 4 ¨ 5 ¨ 6 / Session* : ¨ 1 ¨ 2 N° Nom (par ordre alpha.) Prénom 1 Beaumont Héloïse 2 Berthon Lisa 3 Parriaud Noémie 4 5 TD : Psychologie du développement Enseignant, tuteur : Amanda Comoretto Jour et horaire du TD : Mardi 15h30-17h30 Titre du dossier : La parentification Note oral / 20 Coef = Note de l’écrit / 20 Coef = Note finale / 20 PARTIE RESERVEE A L’ENSEIGNANT REMARQUES / COMMENTAIRES : …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………
  • 2.
  • 3. BEAUMONT Héloïse BERTHON Lisa PARRIAUD Noémie La parentification Université Catholique de Lyon L2 Psychologie Semestre 3 Session 1 Année universitaire 2020-2021 TD Psychologie du Développement
  • 4. Résumé Le terme de parentification a été introduit en 1965 par Boszormenyi-Nagy dans le champ des thérapies familiales et désigne une attribution d’un rôle parental à un ou plusieurs enfants dans un système familial (Simon, Sterlin et Wynne). C’est un processus intergénérationnel se produisant dans des familles monoparentales, particulièrement le cas d’enfants divorcés ou ceux dont un parent est décédé. L’enfant parentifié aura plusieurs rôles dans la famille comme le rôle de soignant pour son parent. Tout cela entrainera de nombreuses conséquences notamment lorsque bébé, il ne pourra développer une relation d’attachement avec sa mère ou bien lorsque adolescent, il doutera sans cesse de lui-même, ne se sentira pas légitime. Enfin, lorsqu’il sera adulte, il pourra être dans une relation de co-dépendance ou bien de transfert avec son conjoint. Afin d’éviter de reproduire ce processus sur les générations futures, la thérapie est un excellent moyen de reconnaitre ce processus et donc de ne pas le transmettre aux générations futures. Mots clés : « Processus de parentification », « Théorie de l’attachement », « Relation de dépendance/co- dépendance », « Conflit de loyauté-déloyauté », « Résilience »
  • 5. Table des matières Introduction.....................................................................................................................1 1. Le concept de parentification ...............................................................................2 1.1. Définition ..................................................................................................................... 2 1.2. Explications de la parentification ............................................................................ 3 2. Les conséquences de la parentification .............................................................6 2.1. Le bébé et l’enfant...................................................................................................... 6 2.2. L’adolescence........................................................................................................... 10 3. Reconstruction et protection de la parentification..........................................13 3.1. La thérapie comme protection des générations futures.................................... 13 3.2. Comment protéger l’enfant de la parentification................................................. 15 Conclusion ....................................................................................................................15 Bibliographie.................................................................................................................17
  • 6. 1 Introduction De nos jours, l’enfant est devenu un sujet préoccupant et récurrent, on lui associe toute sorte de qualificatifs : enfant roi, enfant martyre, enfant tyran, enfant cadeau, enfant hyper- mature. Parfois, on aborde aussi le sujet du parent, lorsqu’on parle des parents immatures, des parents copains, des parents victimes, des parents autoritaires. Cependant, on n’aborde peu le sujet sur les processus relationnels entre les enfants et les parents. De plus en plus d’enfants ressentent une souffrance psychologique, une surcharge émotionnelle, en partie due aux parents qui transmettent à leur enfant, leurs angoisses et de nombreuses responsabilités en leur prêtant des comportements adultes et des attitudes qu’ils ne peuvent encore avoir. L'enfant ne va cesser de vouloir être perfectionniste, exigeant envers lui-même, ne tolérant pas la moindre erreur. Les plus touchés sont les enfants qui vivent dans les familles recomposées, qui sont sujets à l’évolution et aux transformations des familles : famille monoparentale, famille homoparentale, famille polygamique. À travers ces diversifications, nous souhaitions mettre en avant un phénomène interfamilial fréquent : la parentification. La notion de parentification a été introduite dans le champ des thérapies familiales par Boszormenyi-Nagy (1965) dès le début des années soixante, et représente d’après Legoff cela désigne « un processus interne à la vie familiale qui amène un enfant ou un adolescent à prendre des responsabilités plus importantes que le voudraient son âge ». L'enfant devenant le parent de son parent. Il nous a donc semblé pertinent d'étudier le processus de parentification en parallèle des conséquences que ce dernier engendre sur le développement de l’enfant, se répercutant également sur son adolescence mais aussi sur sa vie adulte. Ainsi, dans une première partie, nous aborderons le concept de parentification, dans une seconde partie les conséquences sur le développement de l’enfant et enfin la protection de la parentification.
  • 7. 2 1. Le concept de parentification 1.1. Définition Tout d’abord, beaucoup d’auteurs ont décrit ce phénomène dans le cas de familles monoparentales, particulièrement le cas d’enfants divorcés ou ceux dont un parent est décédé. En effet, nous avons pu faire le lien avec un exposé présenté par nos camarades qui mettaient en avant les difficultés que pouvait rencontrer un enfant ayant grandi dans une famille monoparentale ou celles dont le parent était décédé. La parentification trouve aussi son origine dans plusieurs générations notamment celle des grands parents et dont les conséquences peuvent toucher les générations à venir. De plus, la parentification ne s’arrête pas à un enfant hypermature ou encore à l’immaturité des parents, ni même à la relation « mère-enfant ». En effet, on la retrouve sous différentes formes en fonction de la configuration spécifique du contexte familial et donc des relations intergénérationnelles. Cyrulnik1 qualifie la parentification ou adultisme de « mécanisme de défense » et de « stratégie relationnelle coûteuse ». Cela consiste, pour l’enfant, à « apprendre le déplaisir de vivre par responsabilité précoce ». Être adultisé consiste à prendre en charge de façon précoce son ou ses parent(s), à se sentir responsable de leur survie et/ou de leur bonheur. D’après Legoff (1999) « la parentification de l’enfant peut se définir comme le processus interne à la vie familiale qui amène un enfant ou un adolescent à prendre des responsabilités plus importantes que le voudraient son âge et sa maturation dans un contexte socioculturel et historique précis et qui le conduit à devenir un parent pour ses parents. C’est un processus impliquant toujours plusieurs générations qui plonge ses racines dans les générations des grands parents et dont les conséquences peuvent toucher les générations à venir. ». De plus, Jurkovik (1997) relève des types de parentification que l’on peut nommer comme positifs, dans le sens où ils peuvent être bénéfiques pour l’enfant. En effet, si elle est de courte durée et qu’elle est reconnue par les parents, la parentification n’aura rien de désavantageux pour l’enfant. Il y a par exemple, la parentification adaptative, où l’enfant n’est pas emprisonné, est soutenu et traité par sa famille. Ou bien la non-parentification, où l’enfant a un taux modéré de soin dans la famille, ses efforts sont reconnus, il n’y a pas d’injustices. Dans ce cas-là, elle devient fonctionnelle et permet à 1 http://sylviebergeron.fr/2018/08/28/la-parentification-une-strategie-de-survie/
  • 8. 3 l’enfant de s’identifier à une image du bon parent qu’il pourrait devenir par la suite. Cela est en opposition à une parentification dite destructive, qui devient pathologique. De même, on rencontre deux caractéristiques de la parentification : une parentification émotionnelle lorsqu’il s’agit de s’occuper des soins affectifs de certains membres de la famille, ou alors une parentification instrumentale, quand il s’agit de prendre en charge l’entretien du logement ou des tâches administratives. 1.2. Explications de la parentification L’enfant va très vite sortir de l’insouciance de l’enfance, acquérir des responsabilités et s’assumer au-delà de son âge. Il ne se construira pas sur un modèle fiable et pourra se sentir coupable ou même responsable des malheurs de ses parents. A cause de cela, il va perdre son imaginaire et l’accès au jeu. Il va avoir du mal à trouver sa place, à s’accorder du temps, des moments de plaisir, à ne plus penser et laisser place à son imaginaire. L’enfant parentifié peut remplir plusieurs rôles. Par exemple le rôle de soignant, lorsque le parent manifeste des attitudes infantiles. Il peut alors être un garant de la relation de couple, ou encore responsable de la santé mentale ou physique de ses parents. Également, il peut être un bouc-émissaire ou au contraire le « bon enfant » face à ses frères et sœurs, lorsqu’il s’agit d’une parentification adaptive. De même, dans le système familial, l’enfant peut également avoir la fonction de médiateur ou même d’intermédiaire. Comme le précise Alan Carr (2000), l’enfant parental est « un enfant qui, en fonction d’une coalition intergénérationnelle avec un parent, est utilisé de manière inappropriée à avoir une autorité parentale envers les autres enfants de la famille ». On rencontre plusieurs théories sur la parentification. D’abord celle de Minuchin qui utilise le terme « d’enfant parental » en 1967, qui signifie que l’enfant passe de l’enfance à la parentalité. Également Boszormenyi-Nagy et Sparks (1973) désignent la parentification comme une « distorsion subjective des relations ». Ainsi, l’enfant devient un parent pour son parent. Dans la littérature, on utilise plusieurs termes comme inversion des rôles, donneur de soins, enfant parentifié. Ce processus est influencé par certain facteurs comme les facteurs culturels ou bien les facteurs de genre. D’abord, la parentification peut être engendrée par des normes culturelles ou historiques. En effet, la tradition en Europe du Nord fait que l’enfant a souvent un rôle de « servant » car les parents requièrent une aide constante et un comportement « d’adulte ». Avant le 20ème siècle, on ne considérait pas l’enfance comme un âge différent de l’adulte mais en
  • 9. 4 réalité comme « un adulte miniature ». En d’autres termes, lorsque l’enfance n’était pas distincte comme un âge à part entière de l’adulte, on commettait certains abus sur l’enfant, comme de l’exploitation de la part des parents pour satisfaire leurs propres besoins. De nos jours, après avoir compris que l’enfance constituait une période d’insouciance et de non- responsabilités, dans les sociétés modernes occidentales, on empêche les enfants de prendre part au maintien des soins familiaux. Néanmoins, l’adulte et particulièrement le parent, ont toujours tendance à impliquer leurs enfants dans la vie familiale, de façon inadaptée, en raison de leur volonté d’avoir « un retour » de leur part, en ce qui concerne leur bonheur, l’aide, et le dévouement. De même, on peut aussi penser aux facteurs de genres. Il s’avère que de nombreux pères soient absents ou n’aient pas d’autres choix que d’endosser des rôles plus « féminins ». Cela peut conduire l’enfant à être parentifié car les pères laissent des carences concernant les responsabilités familiales. D’après Legoff (1999), il n’est pas forcément nécessaire de « réinjecter du père ». Plus précisément, la présence du père ainsi que de son autorité, est une vision assez patriarcale de la famille. Lorsque les deux parents sont présents, il y a le risque pour l’enfant de savoir recevoir et donner à l’un comme à l’autre, sans créer de conflit de loyauté avec l’un des deux parents. D’autres auteurs (Gilligan, 1982, cité dans Barnett et Parker, 1998, Jurdovik, 1997) déterminent que les femmes seraient influencées par la société, à donner nettement plus d’importance aux relations familiales que les hommes. De ce fait, la parentification aurait plus d’influence sur le développement de l’identité féminine que masculine. La parentification se traduirait donc différemment chez les femmes que chez les hommes. De plus, la société dite « postmoderne » accentuerait le processus du fait de l’égalité homme/femme au sein des relations. En effet, les femmes se voient attribuer des tâches « masculines » contrairement aux hommes qui eux, ne se contentent que des leurs. Enfin, les facteurs tels que le divorce, le stress, le travail contraignant, poussent les parents à vouloir du soutien de leurs progénitures et à vouloir combler leurs propres besoins en les parentifiant. En ce qui concerne l’abus sexuel ou encore l’inceste, ce sont eux aussi des facteurs importants dans la parentification. Ils chamboulent, voire même anéantissent l’ajustement psychologique de l’enfant. Ces enfants ayant dû satisfaire tous les besoins, même sexuels de leur parent, se verront faire de même avec leurs propres enfants. Il s’agit ici d’une transmission générationnelle. D’après Burkett (1991), des mères ayant subi ce genre de traumatisme sont plus autocentrées sur elle-même que sur les besoins de leur enfant. Elles se désinvestissent
  • 10. 5 complètement du rôle de mère ou alors au contraire, elles surinvestissent leur enfant, en faisant d’eux leur raison de vivre. L’enfant devient donc pour elles un soutien émotionnel. La parentification dans les ambiances incestueuses, qui elles sont déjà troublantes pour l’enfant, apparait comme un moyen de compenser les manques du couple conjugal. Il est connu que les parents souffrant d’alcoolisme ou de toxicomanie favorisent la parentification. Ce type de parent est dans l’incapacité totale, qu’elle soit temporaire ou durable, à apporter des soins émotionnels ou physiques à leur enfant. Bien que dans certaines familles où l’un des deux parents reste sobre, celui-ci se préoccuperait trop de la souffrance de l’autre ou de la sienne pour prendre soin de son enfant en lui apportant de la sérénité ou de la stabilité. Dans ces cas- là, deux directions se présentent à l’enfant. Soit il devient le sauveur, soit le rebelle. Enfin, il y a aussi le facteur du couple parental séparé, dans lequel l’enfant se retrouve avec des responsabilités parentales bien plus importante que les enfants de famille non-divorcée. Dans les familles monoparentales, l’isolement social peut indiquer la présence d’une parentification pathologique. Bien sûr, la séparation des conjoints n’est pas forcément synonyme d’inversion des rôles, néanmoins dans ce genre de situation, l’enfant endosse de nombreux rôles qui ne devraient pas être les siens comme l’intermédiaire entre les deux parents, le messager, le confident, l’allier contre l’autre parent et bien d’autres. Dans ces moments, l’enfant, par peur de perdre un autre parent ou d’être abandonné, se laisse aller à jouer ces rôles, au détriment de sa vie et sa santé.
  • 11. 6 2. Les conséquences de la parentification Tout d’abord, il n’y a pas de moment précis où plutôt d’âge précis durant lequel l’enfant sera parentifié mais il y a des facteurs à prendre en compte. En effet, un parent veuf, seul, malade, handicapé sera plus amené de demander à son enfant de l’aider dans certaines tâches. Les rôles se répartiront alors entre les frères et sœurs de façon naturelle. Or, l’enfant unique pourra ressentir trop de responsabilités, il pourra ne pas se sentir capable, à la hauteur de subvenir aux besoins de son parent. Par la suite, cela nous amènera à nous pencher sur la parentification lorsque le parent est alcoolique, lorsqu’il se montre détaché à son enfant, sans créer un vrai lien avec lui. Ici, la parentification sera vécue de manière différente par l’enfant et pourra avoir des répercussions sur son développement. 2.1. Le bébé et l’enfant Comme nous l’avons évoqué précédemment, si la parentification n’est pas reconnue par le parent, elle pourra causer des carences dans le développement de l’enfant et ce, même dès sa naissance. En effet, si dès la naissance, la mère n’endosse pas son rôle, ne porte pas d’attention à son bébé, il le ressentira car son cerveau est déjà actif. Ensuite, le bébé privilégiera la voix, le regard, s’intéressera à la direction du regard d’autrui, au visage. Petit à petit, il considère l’autre, c’est-à-dire que bien avant de pouvoir s’exprimer, il porte déjà beaucoup d’attention au monde qui l’entoure, il est sans cesse en recherche d’interaction et de contact. C’est grâce à ces interactions que le bébé développera son « vrai self », sa mère étant suffisamment bonne pour répondre à ses besoins. Lors de la parentification dite destructive, la mère n’est pas en mesure de répondre à ses attentes, ce sera la conséquence du « faux self » du bébé. La mère n’est pas suffisamment bonne et le bébé sera contraint à ses réactions. Selon Winnicott2 , « il ne suffit pas d’être une bonne mère mais d’être avant tout une mère ordinaire, normalement dévouée ». En d’autres termes, la mère doit faire au mieux pour son bébé, sans essayer d’être parfaite. En effet, il est important pour l’enfant de disposer d’un environnement confiant, fiable et empathique afin d’avoir un développement harmonieux, marqué par la reconnaissance des parents. Tout cela contribue dans l’attachement de l’enfant car si les carences maternelles ne sont pas résolues, il ne pourra s’attacher à une figure d’attachement et sera donc évitant. Selon Bowlby (1958), la base de l’attachement chez un bébé est un ensemble de comportements constitués de « réponses instinctives », soit sucer, attraper et suivre, qui sont des comportements de proximité, 2 Winnicott D.W. La mère suffisamment bonne. 2006. Editions Payot et Rivages, Paris.
  • 12. 7 mais il y a aussi des comportements de signalisations comme pleurer et sourire. L’attachement vient donc de la capacité de l’adulte à comprendre ces signaux, les intégrer et les traduire à l’enfant. Pour cela, l’adulte doit se montrer disponible afin de générer ce processus. Si ce processus est en place, alors, le seul fait de savoir que l’adulte est disponible tant physiquement qu’émotionnellement, aura un impact presque aussi bénéfique qu’une réelle action du parent, dit « caregiver », c’est-à-dire le donneur de soin. Le but de ce rapport relationnel est de permettre à l’enfant de se sentir en sécurité ainsi que protéger et par conséquent, d’avoir plus confiance pour appréhender au mieux la découverte du monde qui l’entoure. C’est pourquoi, les enfants s’attachent aux personnes qu’ils côtoient le plus et qui s’occupent d’eux en leur procurant des soins et une attention particulière. Cependant, il est possible et commun que les enfants développent des figures d'attachement dites secondaires. C'est-à-dire un attachement envers des personnes qui s'occupent de lui lorsque sa figure d'attachement de référence n'est pas libre, comme les grands-parents. Néanmoins, l'enfant peut développer un lien d'attachement même avec quelqu'un de peu disponible, mais cela engendrera un sentiment d'insécurité. Mary Ainsworth a développé cette idée d’attachement sécure ou insécure en se basant sur les travaux de Bowlby. Elle a d’abord mis en évidence trois schèmes d’attachement d’après une étude, ayant pour nom « situation étrange ». Elle a évalué le comportement de l’enfant face à des situations de séparations puis de retrouvailles, en les mettant en situation de stress permettant de voir leur comportement et le type d’attachement. Pour commencer, il y a l’attachement sécure, c’est-à-dire que le caregiver est pour l’enfant une figure sécurisante et apaisante, il ne veut pas être séparé de cette figure d’attachement, il recherche sa proximité et lorsqu’elle est là, il n’a pas de mal à découvrir ce qui l’entoure. Cela signifie que la figure d’attachement a un bon comportement vis-à-vis de l’enfant, il est disponible et répond correctement aux besoins de ce dernier. Ensuite, il y a l’attachement insécure évitant ou anxieux qui correspond à un enfant qui a peu de démonstration d’affection envers son caregiver. Il n’émet pas de résistance ou de réactions particulières lorsque ce dernier part et n’en émet pas non plus lorsqu’il revient. Puis, il y a l’attachement insécure ambivalent ou résistant. L’enfant ici, recherche la proximité avant la séparation. Il veut que son caregiver lui soit disponible, mais se montre retissant à tout contact ou signe d’affection et de gentillesse. Le caregiver a donc vis-à-vis de l’enfant des réponses incohérentes face à ses besoins et demandes, tantôt appropriées, tantôt négligentes. Pour finir, il y a l’attachement désorganisé ou désorienté qui sera découvert plus tard par Mary Main, dans lequel l’enfant n’a pas de stratégie cohérente face aux situations stressantes, mais des comportements absurdes, contradictoires et désorientés. Cela signifie que la figure d’attachement peut être elle-même désorientée faisant passer des messages et avoir des actions
  • 13. 8 contradictoires, faire preuve de maltraitance, d’une présence trop forte ou au contraire trop faible. Dans le cadre d’une parentification où le parent ne se montre pas assez disponible, l’enfant aura donc tendance à présenter un attachement insécure. Malgré ce manque, l’enfant a besoin d’interaction et si le parent lui apporte cela, bien qu’il puisse être maltraitant, alors il deviendra quand même la figure d’attachement de référence. Le type d’attachement peut évoluer et devenir sécure si le comportement du ou des caregiver(s) évolue vers un comportement plus disponible et à l’écoute des nécessités de l’enfant. Une autre façon d’acquérir un attachement sain et sécure est, si l’enfant parvient à rediriger ses figures d’attachements primaires vers d’autres personnes que ses parents. Cependant, il est très compliqué pour lui de changer des préférences comme celle-ci. De plus, les victimes de parentification sont souvent confrontées à un certain isolement notamment dû aux responsabilités qu’elles ont. C’est alors d’autant plus complexe pour elles de réorienter leurs besoins affectifs vers une tierce personne. C’est pourquoi, l’enfant sera alors en recherche d’affection, il sera très demandeur et guettera les attentes du parent en voulant se sentir indispensable auprès de lui. Il va être prêt à fournir beaucoup d’efforts pour maintenir cette confiance relationnelle. Cela va lui permettre d’être réconforté et de satisfaire ses besoins d’affection. Winnicott décrit cela avec « le stade de sollicitude » qui désigne une action vers l’autre : celle de donner et de prendre soin de l’autre, celle de reconnaitre l’autre. L’enfant va alors endosser trop de responsabilités, il voudra faire plaisir à son parent, sans forcément attendre quelque chose en retour, car il considèrera que c’est normal de l’aider. Or, l’enfant se sentira sans cesse coupable de mal faire, de ne pas être à la hauteur et manquera grandement de confiance et d’estime de lui. Dans ce cas, il y a une inversion des rôles car c’est l’enfant qui prend la place du parent. L’enfant dépendra de son parent défaillant qui propose une image dévalorisante et honteuse. Sans figure d’attachement, cela aura des conséquences sur la manière de l’enfant de se comporter avec les autres. Il développera ainsi une « méfiance relationnelle », il aura du mal à créer de nouvelles relations, notamment à l’école. Après avoir énoncé l’importance de l’attachement chez l’enfant, on retrouve également, en lien avec ce dernier, la notion de conflit de loyauté. D’après Anna Freud dans son livre Le normal et le pathologique chez l'enfant (1968), lorsque l’enfant commence une thérapie, il est plausible qu’un conflit de loyauté s’installe pour l’enfant, entre ses parents et la thérapeute. En effet, l’enfant estime s’attacher au thérapeute du fait qu’il réussit là où ses parents ont échoué. Cela le rend déloyal à ses parents. Ici, les parents ont pour rôle d’aider l’enfant à surmonter ses
  • 14. 9 résistances et abandonner sa période de transfert négatif, tout en continuant la thérapie. Cependant, si les parents manquent cette tâche, qu’ils se rangent du côté des résistances de l’enfant, le thérapeute se retrouve sans recours. En période de transfert positif, le conflit de loyauté naît chez l’enfant vis-à-vis d’eux, à propos de l’analyste et s’aggrave. Dans ce cas, avec la mauvaise volonté des parents, l’enfant devient plus loyal au thérapeute qu’à ses parents, ce qui renforce la parentification et peut pousser l’enfant à arrêter sa thérapie. Toujours dans la notion de conflit de loyauté et déloyauté, il ne faut pas non plus négliger la place de la famille dans le développement de l’enfant. En effet, comme Winnicott le souligne dans l’article « L'enfant dans le groupe familial » (1966), il explique que « la famille représente l'environnement permettant à l'enfant de croître, d'évoluer et finalement de s'en séparer pour devenir un individu capable de dire « Je ». ». La famille constitue alors un environnement où l’enfant peut exprimer sa loyauté et sa déloyauté. En effet, il peut aller vers son père en s’éloignant de sa mère, puis revenir vers cette dernière sans perdre la confiance et l’amour qu’il lui porte. Ce réseau est tout aussi important que le jeu dans le développement de l’enfant. « Dans les jeux, les enfants d'une même famille introduisent toutes les tensions liées à ce type d'expérimentation de la loyauté, y compris les tensions et les jalousies perçues par eux chez les adultes de leur entourage ». (Winnicott, 1966). Cette expérimentation des loyautés au sein de la famille, facilite la maturation de l’enfant. Elle s’effectue par la séparation et la mise à distance. De plus, le conflit de loyauté peut s’articuler avec la loyauté clivée. Ce sont les enfants bloqués par les demandes contradictoires et inconciliables des parents ou bien des grands-parents qui développent cette loyauté clivée. Plus précisément, c’est lorsque l’enfant va vers l’un des parents, l’autre lui reproche d’être déloyale et inversement. Dans cette situation, l’enfant pourra être un confident pour l’un des parents envers l’autre parent, tout comme il pourra être un médiateur entre ses parents pour calmer la colère qui les animent, allant même jusqu’à s’accuser lui-même pour apaiser les tensions et les réconcilier. On rencontre cette situation particulière dans de nombreux contextes. Premièrement, des parents séparés qui utilisent l’enfant en tant qu’intermédiaire. C’est en parti lors des conflits pour la garde ou les visites des enfants que les loyautés sont utilisées sous forme de clivage. Dans ces moments, l’enfant ressent une culpabilité énorme de devoir laisser un des parents. De même que l’accablement de l’autre parent accentue cette culpabilité du fait que l’enfant ne peut plus « donner » au parent qui est justement perçu comme étant en difficulté et ayant besoin de lui. Puis, deuxièmement, des parents qui n’ont pas réglés leurs conflits par une séparation et qui continuent d’entretenir des relations tendues ainsi
  • 15. 10 qu’un contexte familial haineux et décousu. Les enfants sont si souvent accusés d’être responsables de cette situation lorsqu’ils se comportent mal. Malgré les efforts des enfants pour arranger cela, les relations ne seront pas plus rassurantes. Ainsi, contrairement aux conflits de loyauté qui sont quasiment inéluctables mais qui peuvent être bénéfiques en termes de maturation et de développement de la confiance, le clivage de loyauté, lui, bouleverse la confiance de l’enfant. L’enfant ne peut donc pas être loyal à un parent sans être déloyal à l’autre. Par ailleurs, l’enfant prête énormément d’attention aux tensions entre ses parents et tente laborieusement de devenir conciliateur afin d’apaiser les conflits qu’ils entretiennent. Par ce rôle, l’enfant est donc investi comme un enfant parentifié. 2.2. L’adolescence Au moment de l’adolescence, période caractérisée par l’achèvement de la construction de la personnalité, l’enfant voudra s’affirmer et s’opposer. Il ressentira le besoin de prendre son envol et ainsi de s’éloigner de cette fonction parentale. Il voudra vivre pleinement son adolescence avec l’indépendance qu’elle procure. Cependant, les craintes de perte et d’abandon vont être réactivées, et l’enfant va se retrouver coincé dans une « loyauté à ne pas grandir ». En effet, il sera encore contraint par des obligations de son parent, et oscillera entre le désir d’être libre et le devoir d’être disponible pour son parent. Or, le processus de parentification n’ayant encore pas été reconnu, l’adolescent pourra être confronté à des peurs, des angoisses, des doutes, pouvant entrainer une dépression ou un suicide dans certains cas. C’est ce que nous allons développer plus en détail. Comme évoqué précédemment, les enfants parentifiés ont du mal à créer de nouvelles amitiés, de nouveaux liens sociaux. Une des causes principales est que l’enfant parentifié est souvent perçu comme trop mûr et sérieux par les autres enfants de son âge. L’enfant ne verra pas l’amitié en termes de réciprocité mais plutôt en termes d’exclusivité. Il cherchera à se rendre indispensable avec son ami, comme il s’est rendu indispensable pour son parent plus jeune. De même, l’enfant cherchera à s’identifier à des personnes plus grandes que lui, car elles lui apporteront de la confiance, de la sécurité, de la disponibilité. Ou bien dans le cas contraire, il fera en sorte que des personnes plus jeunes que lui s’identifient à lui. Dans ce cas, il incarnera le rôle de protecteur, il voudra toujours rassurer, réconforter, aider ses amis. De plus, l’enfant pourra être dépendant des autres et nous verrons par la suite que cela peut également se produire lorsqu’il sera adulte. En effet, la dépendance affective provient régulièrement d’une carence affective durant l’enfance qui entraîne une mauvaise estime de soi. Ce manque de confiance est
  • 16. 11 la source de la recherche d’amour et d’affection que vont avoir les dépendants affectifs à l’égard des autres des autres. En effet, ils veulent constamment plaire, qu’on leur montre qu’on les aime, leur permettant ainsi de se sentir valoriser à travers l’autre. En cherchant à tout prix cela, ils ont tendance à éviter les conflits, à prendre tous les torts sur eux ou même à ne pas se préoccuper de leurs propres besoins et envies. S’ils agissent ainsi, c’est parce qu’ils ont peur de ce que peut entraîner un conflit, à savoir une distance pouvant générer une solitude. Mais ces derniers ont souvent une peur de la solitude voire même un sentiment d’abandon. Cette obsession est due à la peur d’être seul car l’enfant a tendance à être heureux qu’à travers une tierce personne. Cette dépendance est pathologique lorsque les demandes affectives sont excessives et que cela créer une souffrance, car l’autre ne peut pas combler ce besoin d’amour et d’attention disproportionné. Lors d’une psychopathologie comme celle-ci, le patient aura énormément de mal à se détacher même quand la relation lui sera toxique ou que la relation aura pris fin depuis un certain temps. La co-dépendance est une caractéristique récurrente dans la dépendance affective pathologique, puisqu’elle consiste à apporter son aide et son soutien à une personne mal ou instable psychologiquement, dans le but d’avoir de l’attention et de l’affection de cette dernière. Ce processus est souvent inconscient. Comme dit précédemment, la dépendance affective vient fréquemment d’un attachement non sécure engendré par le comportement des parents. Différents profils de parents amènent à cela, dont plusieurs que l’on peut lier aux parents responsables de la parentification de leurs enfants. Parmi eux, on retrouve le parent inattentif qui ne fait pas attention aux besoins de l’enfant. Cela conduira l’enfant à se sentir illégitime à recevoir de l’amour et des signes d’affection, l’empêchant ainsi de cultiver son narcissisme. Le parent non-affectueux créera les mêmes conséquences. Le parent, qui est lui-même dépendant affectif, tournera ses besoins sur son enfant qui prendra en charge cette carence parentale et qui le reproduira par la suite. Une autre conséquence de la parentification que l’on retrouve pendant l’enfance mais aussi pendant l’adolescence, est le syndrome de l'imposteur. En effet, bon nombre d’enfants peuvent être touchés par cela. Ce syndrome consiste pour l’enfant parentifié, à avoir un manque de confiance en lui, se traduisant par une forte dépréciation, l'impression de tromper ceux qui l’estime. De plus, l’enfant a du mal à accepter les compliments puisque la personne est perpétuellement en train d'attribuer son mérite à des éléments périphériques, c'est-à-dire aux autres, à la chance, à un malentendu. L’enfant ne se sent donc pas légitime à avoir telles ou telles réussites. C'est pourquoi, il sera dans le déni de ses qualités, de ses talents et valeurs, puisqu'elles n'ont jamais été mises en avant. Tout cela peut conduire aussi à de l’insécurité.
  • 17. 12 C’est aussi une façon de penser qui peut se montrer déstabilisante puisque ces personnes auront tendance à appliquer une stratégie de défense. On parle soit « d’overdoing » qui consiste à travailler beaucoup plus que nécessaire afin de justifier leur réussite par le temps de travail, mais pas par leurs qualités. Ou bien on parle également de « l’underdoing » qui à l’inverse, est le fait de procrastiner et de trouver des excuses avant même un éventuel échec. Ce syndrome est donc une grande source d’angoisse pouvant même atteindre la dépression ou le burnout. Il est également appelé syndrome de l’autodidacte. De plus, nous pouvons faire le rapprochement avec un thème abordé lors de nos exposés oraux, c’est l’hypersensibilité. Il s’agit d’un trait de caractère développé en particulier durant l’éducation de l’enfant. Cette conséquence peut être due à quelque chose qui s’est passé dans l’enfance remontant jusqu’à la période intra-utérine. L’enfant était une éponge émotionnelle. En effet, chez l’enfant parentifié, cette hypersensibilité peut apparaitre notamment lors d’une expérience mal vécue dans son enfance comme le divorce ou n’importe quelle autre cause de la parentification. De ce fait, on remarque par la suite des comportements particuliers chez l’enfant qui témoignent de l’hypersensibilité, comme le fait de vouloir plaire a tout pris à ses parents en dépit de ses propres désirs, en recherche de reconnaissance et d’un bon jugement. La peur de l’abandon étant tellement présente que l’enfant serait prêt à supporter n’importe quelle injustice de la part des parents. Dans ces cas, l’enfant préfère passer plus de temps avec son ou ses parents qu’avec des enfants de son âge. De même, l’enfant est très attentif à l’anxiété des parents.
  • 18. 13 3. Reconstruction et protection de la parentification Dans cette partie nous allons voir la nécessité de se reconstruire à l’aide d’une thérapie pour ensuite protéger les générations futures de ce processus intergénérationnel. Cependant, avant de commencer une stratégie thérapeutique la parentification doit être reconnu. 3.1. La thérapie comme protection des générations futures. Ayant été parentifié l’adulte, cherchera à se reconstruire afin de ne plus rester avec ses douleurs du passé. Par exemple, inconsciemment, l’adulte qui a eu une mère dépressive associera dépression et féminité. Déborah Luepnitz (1988)3 emploie le terme de « répétition » qui se base sur des expériences vécues pendant l’enfance et qui amènent à des conséquences négatives, ayant un impact dans la vie familiale. De plus l’adulte devra suivre une thérapie. Celle-ci lui permettra de mettre des mots sur ce qu’il a vécu afin de panser ses maux. En effet, la stratégie thérapeutique permet de reconnaitre le processus de parentification et donc de ne pas le reproduire ces cycles de répétitions sur les générations suivantes. D’après Legoff (1999), cette stratégie s’appuie principalement sur la reconnaissance du processus. La thérapie se fait généralement avec les membres de la famille, elle se construit à l’aide d’un dialogue entre le thérapeute et la famille. Ensuite, c’est la reconnaissance de l’investissement de l’enfant de la part des parents qui permet d’ouvrir la voie à un travail thérapeutique. Avec cela les parents participent au processus de construction de la confiance et de la liberté par le souci d’équité du « donner et recevoir » mais également de la reconnaissance de chacun. Néanmoins pour que cette reconnaissance soit favorable, il est nécessaire que la compréhension ne soit pas qu’intellectuel, il faut que chacun décide d’entreprendre un nouvel engagement éthique dans la relation à l’autre (parents et enfants). Le thérapeute doit étudier la façon dont les parents ont eux-mêmes été parentifié dans leur famille d’origine, les conséquences passées et présentes qui en découlent, c’est-à-dire la demande de réparation adressée à l’enfant ou encore l’épuisement parental… l’intérêt de tenter de mettre en lien la reconnaissance de la parentification de l’enfant et l’expérience de la parentification est d’amoindrir la culpabilité et se réengager sur le fil des loyautés sans mettre en opposition les générations. En fait, cette thérapie donne à la famille un rééquilibrage des relations intrafamiliales. Elle aide les enfants à retrouver une place et à 3 Luepnitz D-A. (1988). The Family Interpreted. New York: Basic-Books.
  • 19. 14 accepter cette nouvelle place dans leur famille, en gardant toujours à l’esprit son expérience d’enfant parentifié. Bien que le thérapeute ait une idée précise du type de parentification, il n’y a pas d’ordre chronologique précis du déroulement de la thérapie, les modalités d’ouverture de la famille ne peuvent pas être appliqués automatiquement. Dans cette situation le thérapeute prône la spontanéité, tout en prenant en compte les difficultés de chacun à abandonner son rôle actuel dans la famille. Concernant la vie de couple, l’adulte va se comporter avec son conjoint comme un enfant avec l’inquiétude d’être laissé, abandonné. Cette attitude est basée sur une peur de l'abandon qui entraîne une relation autoritaire et fusionnelle, où l'autre est accusé de ne pas donner. (Oison et Gariti, 1993). Comme à l’adolescence, l’adulte peut entretenir une relation de codépendance car il se sentira toujours redevable face à son conjoint, par peur d’être laissé. De plus, le fait d’avoir trop donné dans l’enfance, peut-être une conséquence d’un vide chez l’adulte. En effet, celui-ci aura l’impression de manquer de ressources au moment de « donner ». Il sera désinvesti affectivement, il ne s’impliquera pas dans sa relation. Ses besoins d’affection et de reconnaissance n’étant pas accompli pendant l’enfance, l’adulte va les rechercher dans son conjoint. On parle alors de relation de transfert dans le sens où l’adulte projette sur son conjoint l’image d’autorité et d’amour qu’il n’a pas connu avec ses parents puisque c’est lui, depuis son enfance, qui était parent. A propos de l’éducation de ses enfants, l’adulte étant encore empreint de ce qu’il a vécu dans son enfance, pourra transmettre, répéter ce schème, plus communément désigné sous le nom de « script familial » selon Byng-Hall (1986). Ou bien l’adulte pourra le modifier, le compenser en étant disponible, en développant une relation basée sur l’affection, l’amour et la sécurité avec ses enfants. Il développe ainsi une « contre-identité » c’est-à-dire qu’il se détache du modèle parental. L’adulte sera donc amené à accepter ce qu’il s’est passé afin de ne pas rester bloqué sur ses événements passés. Il développera ainsi des réponses adaptées face à l’adversité de ses expériences, de son vécu afin de se construire. On peut se référer au célèbre psychiatre Viktor Frankl qui met en avant la résilience comme « la nécessité de pouvoir nous transformer lorsque nous ne pouvons pas changer les circonstances qui nous entourent »4 . Ses propos s’appliquent 4 Ambrieres, M. (2020, 30 juin). Viktor Frankl et ses enseignements sur la résilience, toujours si nécessaires. https://nospensees.fr/viktor-frankl-et-ses-enseignements-sur-la-resilience-toujours-si-necessaires/
  • 20. 15 à notre cas, puisqu’il est favorable pour l’adulte d’apprendre à vivre malgré ce qu’il a vécu dans son enfance. En effet, les traumas ordinaires dans la petite enfance sont pires que les grands drames car ils sont quotidiens tels que le vide affectif, l’intrusion et l’imprévisible. C’est pourquoi, comme le souligne Boris Cyrulnik, le terme de résilience est un « concept polysémique »5 . Plus précisément, il peut s’appliquer tant aux individus qui vivent dans des conditions familiales et sociables défavorables, mais qui arrivent tout de même à se développer sans dommages psychiques et tant à des sujets confrontés à des événements traumatiques et qui se reconstruisent après. Ainsi, l’adulte, afin d’atteindre un équilibre, commencera un processus de résilience. Ce processus dépend de l’interaction de différentes conditions internes et externes au sujet et qui sont donc variables suivant ses évolutions personnelles et les évolutions du contexte environnemental dans lequel il vit. Enfin, la résilience n’est jamais acquise totalement mais des personnes montrent tout de même une adaptation résiliente tout au long de leur vie. 3.2. Comment protéger l’enfant de la parentification Il nous a semblé pertinent et essentiel d’évoquer les raisons qui protégeraient l’enfant de la parentification afin que celle-ci ne se produise. Tout d’abord, nous pouvons dire que la place du couple parental et conjugal joue un rôle prépondérant pour l’éducation, le développement de l’enfant et constitue ainsi un point de repère pour l’enfant. En effet, un couple dynamique où chacun constitue une ressource pour l’autre constitue une réelle source pour l’autre et pour l’enfant. Ensuite, l’enfant doit aussi connaitre un contact fusionnel, apaisant, au détriment de l’abandon et de la dépendance. L’adulte doit privilégier cette qualité du contact, tout en reconnaissant les besoins de son enfant. Pour terminer, si l’enfant a la chance de s’épanouir, de grandir au sein d’une fratrie, cela permettra de distribuer les rôles entre chacun et ainsi d’avoir un équilibre dans la famille. Sinon, l’enfant pourra se sentir surinvesti par l’adulte. Conclusion Nous avons pu voir que le concept de parentification était un processus intergénérationnel. La parentification existe sous différentes formes en fonction des relations et du contexte familial. Elle n’a pas que des effets délétères sur le développement de l’enfant car elle peut être fonctionnelle et ainsi permettre à l’enfant d’avoir un bon exemple de son parent 5 Anaut, M. (2015). La résilience : évolution des conceptions théoriques et des applications cliniques. Recherche en soins infirmiers, 121(2), 28-39. https://doi.org/10.3917/rsi.121.0028
  • 21. 16 et d’être responsable. Cependant, elle peut être destructive et devenir par la suite pathologique. Elle commence dès le plus jeune âge chez l’enfant, avant que même ce que dernier ait la maturité nécessaire et la capacité à réaliser ce que l’on lui demande. Il endosse des responsabilités qui ne sont pas appropriés durant son enfance. L’enfant parentifié rencontrera des troubles de l’attachement, un conflit de loyauté ou encore un manque de confiance en lui. Au moment de l’adolescence, de nouvelles conséquences apparaissent et il pourra être confronté au syndrome de l’imposteur ou encore à l’hypersensibilité. Une fois adulte, si cela n’est pas le cas, il pourra se tourner vers la thérapie pour reconnaitre la parentification. C’est une étape clé dans la vie d’un sujet, lui permettant de se construire et d’appréhender le processus de résilience, afin d’atteindre un équilibre dans sa vie. Enfin, il est le rôle de tout adulte de protéger son enfant d’une possible parentification ou bien d’une surcharge émotionnelle par la mise en place de différents facteurs le protégeant. On pourrait élargir notre sujet en se penchant plus précisément sur le genre de l’enfant et son âge afin de voir si cela aurait un impact sur la parentification.
  • 22. 17 Bibliographie Anaut, M. (2015). La résilience : évolution des conceptions théoriques et des applications cliniques. Recherche en soins infirmiers, 121(2), 28-39. https://doi.org/10.3917/rsi.121.0028 Bergeron, S. B. (2018, 28 août). La parentification : une stratégie de survie. Les Constellations Familiales. http://sylviebergeron.fr/2018/08/28/la-parentification-une-strategie-de-survie/ Boyer-Panos, F. (2008). Attachement maternel et qualité des interactions mère-bébé. Le Journal des psychologues, 261(8), 29-33. https://doi.org/10.3917/jdp.261.0029 Byng-Hall, J. (2007). Soulager le fardeau des enfants parentifiés dans les familles présentant des modes d'attachement insécurisés [1]. Devenir, vol. 19(3), 201- 222. https://doi.org/10.3917/dev.073.0201 Courtinat, E. C. (2011). La préoccupation maternelle primaire. La préoccupation maternelle primaire, 2-15. https://doi.org/10.3917/fp.022.0039 Dépendance affective et manque de confiance en soi. (2017, 27 avril). https://www.passeportsante.net/fr/psychologie/Fiche.aspx?doc=dependance-affective Dépendance affective : comment la reconnaître et la soigner ? (2020, 8 octobre). Psychiatre Paris TCC, TIP, EMDR. https://e-psychiatrie.fr/situations-ou-appeler-a-laide/dependance- affective/ Futura, D. S. E. (2015). Syndrome de l’imposteur. Futura. https://www.futura- sciences.com/sante/definitions/travail-syndrome-imposteur-15636/ Georgieff, N. (2013). Dynamique du développement de l'enfant. Dans : Colette Bauby éd., Les enjeux du développement de l’enfant et de l’adolescent : Apports pour la PMI (pp. 27-36). Haxhe, S. (2008). La parentification : étude d'un processus [1]. Thérapie Familiale, vol. 29(1), 175-178. https://doi.org/10.3917/tf.081.0175
  • 23. 18 Heck, L. & Janne, P. (2011). Vous avez dit « parentification » ? Revue du concept et réactualisation selon les derniers résultats empiriques. Thérapie Familiale, vol. 32(2), 253- 274. https://doi.org/10.3917/tf.112.0253 Hypersensibilité émotionnelle et hyperémotivité : la découvrir et la soigner. (2020, 8 octobre). Psychiatre Paris TCC, TIP, EMDR. https://e-psychiatrie.fr/situations-ou-appeler-a- laide/hypersensibilite-hyperemotivite/ Le Goff, L. J. (2000). L’ENFANT, PARENT DE SES PARENTS : Parentification et thérapie familiale (Thérapies familiales aujourd’hui) (French Edition) (0 éd.). Editions L’Harmattan. Le Goff, J. (2005). Thérapeutique de la parentification : une vue d'ensemble. Thérapie Familiale, vol. 26(3), 285-298. https://doi.org/10.3917/tf.053.0259 Savannah taillard. (2019). La parentification, une stratégie adaptative (Mémoire de maîtrise En Sciences de Psychologie) https://serval.unil.ch/resource/serval:BIB_S_27835.P001/REF.pdf Psychologue Paris. (2020, 8 juin). La co-dépendance : s' ; en affranchir - Psychologue. https://www.psychologueparis-7.fr/co-dependance/ Syndrome de l’imposteur. (2016, 19 décembre). https://www.passeportsante.net/. https://www.passeportsante.net/fr/psychologie/Fiche.aspx?doc=syndrome-imposteur Tereno, S., Soares, I., Martins, E., Sampaio, D. & Carlson, E. (2007). La théorie de l'attachement : son importance dans un contexte pédiatrique. Devenir, vol. 19(2), 151- 188. https://doi.org/10.3917/dev.072.0151 Théorie de l'attachement. (2020, décembre 12). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 12 décembre 12, 2020 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Th%C3%A9orie_de_l%27attachement&oldid=1775 59308.