Suite aux decisions de la direction de Caterpillar de fermer le site de Goselies, Ecolo réagit et propose de passer de la parole aux actes afin de mieux protéger, de mieux réguler et de redéployer.
2. Introduction : #DesParolesAuxActes
Paul Magnette: "Nous reprendrons le contrôle du site de Caterpillar. C'est une promesse"
Charles Michel: «Avec Caterpillar, on touche aux limites du système»
Benoit Lutgen : « J’appelle à cette unité (ndlr : du monde politique) depuis des mois. Faut-
il chaque fois attendre un drame pour s’unir ? »
Olivier Maingain : « Il est temps que l’Europe cesse d’être la proie complaisante des
stratégies économiques décidées sur d’autres continent ».
Raoul Hedebouw : « Le problème n’est pas le coût du travail mais le coût du capital »
Face à la décision des responsables de Caterpillar, tous les partis politiques ont dit et
répété leur écœurement. Si on ne peut que se féliciter d'un tel unanimisme politique,
l’indignation ne suffira pas. Il est temps maintenant de passer de la parole aux actes et de
réformer un système dont même le Premier Ministre affirme qu'il a atteint ses limites.
Dès l'annonce du drame, le 2 septembre, députés, conseillers et juristes d'ECOLO ont
travaillé d'arrache-pied afin de produire une série de textes de loi (18 au total !) visant les
différents niveaux de pouvoir (Europe, Fédéral, Régions). L'objectif de ces textes : mieux
protéger les travailleurs, réguler davantage les multinationales et redéployer notre
économie. Il s'agit là d'un travail titanesque réalisé un peu plus de deux semaines. Ces
textes de loi sont prêts aujourd’hui à être débattus, parce qu'il est temps de passer
#DesParolesAuxActes.
1. Le septembre noir de l'emploi
Plus de 4.000 emplois directs sont menacés par des restructurations révélées depuis
début septembre en Belgique. La fermeture de Caterpillar à Gosselies entraînera à elle
seule la perte de 2.200 emplois directs et plusieurs milliers d'autres indirectement,
principalement chez les sous-traitants. Une véritable douche froide pour la région de
Charleroi qui ne sera malheureusement que le début d'un très mauvais feuilleton :
Axa : 650 emplois en deux ans.
P&V : 300 emplois d'ici 2020.
L'imprimerie de Printing Partners à Grand-Bigard : 158 emplois à l'horizon 2021.
Jacobs Douwe Egberts à Grimbergen : 274 emplois .
3. MS Mode : 220 emplois
La multinationale américaine Halliburton à Drogenbos : 50 emplois.
Le métallurgiste Dana à Bruges : 40 emplois.
Eurostation (filiale de la SNCB) : 40 emplois
CP Bourg à Ottignies : 88 emplois.
Au total, 4.020 travailleurs sont directement touchés par ces différentes annonces
intervenues au cours des deux premières semaines du mois de septembre1
.
2. Au coeur de notre vision du développement économique :
protéger, réguler et redéployer
L'exemple de Caterpillar a relancé le débat autour des multinationales, dont on semble
découvrir la vraie nature à chaque nouvel épisode douloureux. Mais faut-il en vouloir aux
multinationales de chercher le profit maximum dans un système économique qui érige les
bénéfices à court terme au rang d'objectif suprême ? Ou la responsabilité est en réalité
ailleurs ?
La Commission Européenne exige que l'Irlande réclame auprès d'Apple 13 milliards
d'euros pour des avantages fiscaux que l’État a octroyé trop facilement au géant
électronique. Une aubaine non ? 13 milliards d'euros... Quel gouvernement ne rêverait pas
de disposer de cette somme pour mener des politiques nouvelles ? Investir dans son
enseignement, dans son système de protection sociale, financer la transition énergétique
de son pays,… ? Et pourtant l'Islande a décidé de faire appel de la décision de la
Commission Européenne. Le motif ? Le pays a peur de faire fuir les multinationales.
La prise de pouvoir par les grands groupes industriels et financiers est devenu la règle en
Europe comme ailleurs. C'est la raison pour laquelle les citoyens se mobilisent aujourd'hui
si fortement contre le TTIP et le CETA.
Pour ECOLO, des drames comme Caterpillar pourraient être évités si les
multinationales étaient mieux encadrées, si nos travailleurs étaient mieux protégés
et si les pouvoirs publics décidaient de plus et mieux aider nos PME et
indépendants, notamment en réformant l'impôt des sociétés.
Ecolo souligne depuis longtemps l’importance des petites et moyennes entreprises pour
enraciner les activités économiques dans le nos territoires : plus souples et moins
délocalisables, elles représentent près de 70 % de l'emploi privé et sont fréquemment à la
pointe de l’innovation. A ce titre, elles constituent un des moteurs principaux de la
régénération du tissu économique, permettant la création d’emplois localisés et la
concrétisation d’un projet de développement régional. Dans cet esprit, il faut noter que les
services et les produits qu’elles mettent sur le marché comportent le plus souvent une très
1 A noter qu'il ne s'agit que d'intentions de licenciements, le nombre effectif de personnes perdant leur
emploi n'étant pas encore défini (source : Belga du 15 septembre 2016).
4. forte valeur ajoutée au travail.
Le soutien d’Ecolo pour les PME se justifie aussi parce qu’une PME, c’est avant tout un
projet humain, porté par un entrepreneur avec un ancrage géographique, culturel et social.
Dans ce sens, elles contribuent également au maintien de la mixité urbaine et de la
diversité des activités en milieu rural. Les PME sont relativement protégées de la course
effrénée vers le « court-termisme », si destructrice d’emplois localisés chez nous.
Certaines PME sont bien sûr cotées en bourse, et parmi elles, certaines peuvent être
gérées par des actionnaires majoritaires étrangers et/ou spéculateurs. La majorité des
PME belges restent cependant gérées par des entrepreneurs et investisseurs qui
connaissent leur environnement social, économique et culturel et qui s’inscrivent ou qui
pourraient s’inscrire dès lors dans une dynamique de projet de développement avec
l’ensemble des forces vives de leur région. C’est ce dont notre pays a besoin. Ceci n’est
évidemment pas incompatible avec la nécessité qu’il y a de soutenir, le cas échéant, le
développement et la croissance de ces PME vers des tailles de moyennes et grandes
entreprises engageant un plus grand nombre de travailleurs, mais le foisonnement de
PME et TPE continuera de constituer le vivier de talents permettant de réorienter la
transition énergétique, la relocalisation et l'innovation.
3. Nos propositions : Protéger et Réguler / Orienter et redéployer
Protéger et réguler
1) La Loi Renault Caterpillar complétant la Loi Renault pour y inclure les
travailleurs sous-traitants
La présente proposition de loi complète la loi « Renault » à plusieurs niveaux. Tout
d’abord, elle définit l'entreprise sous-traitante comme étant celle disposant d'un chiffre
d'affaire annuel de plus de 500.000 euros dont 30 % au moins dépendant de l'entreprise
qui souhaite licencier. Ensuite, elle oblige l'entreprise à assumer ses responsabilités en
matière d'information préalable auprès des sous-traitants qui constituent son écosystème
et dont la survie peut être menacée par les décisions qu’elle prend et sur lesquelles ils
n’ont aucune prise.
2) Récupérer les aides publiques y compris européennes en cas de licenciement
économiquement non-justifié
Cette proposition instaure l'obligation de remboursement des aides publiques perçues au
cours des cinq derniers exercices comptables en cas de licenciement collectif, de
fermeture ou de délocalisation d’entreprises. En effet, les aides publiques au sens large
(subsides, Fonds structurels, intérêts notionnels, réductions de cotisation ou chômage
économique) sont souvent trop peu conditionnées au maintien et à la création d’emploi, ce
qui conduit à des effets d’aubaine choquants. L’objectif de cette proposition est
d’encourager les entreprises concernées à privilégier la poursuite et le développement des
activités à moyen terme, plutôt que la réalisation de bénéfices à court terme.
Le règlement européen prévoit déjà la récupération des fonds structurels européens
5. octroyés à une entreprise qui ne maintiendrait pas l'investissement productif bénéficiaire
de l'aide. La présente proposition de décret vise donc également à organiser la
récupération du cofinancement wallon versé à une entreprise. De plus, elle vise également
à établir un rapport relatif aux comportements de ces entreprises qu’elle transmettra à la
Commission européenne ainsi qu’à ses homologues dans les autres régions et États
membres.
3) Suspendre les aides publiques aux entreprises qui accordent des dividendes
excessifs
La présente proposition de loi vise à définir un mécanisme dissuasif contre la distribution
de dividendes excessifs et à pour objectif d’inciter les entreprises à mieux rémunérer leur
personnel, à augmenter leurs investissements dans la formation de leur personnel et dans
l’innovation de manière générale. Une exception est prévue pour les jeunes entreprises
innovantes (<4ans) et pour les PME de moins de 20 travailleurs si ceux-ci marquent leur
accord avec la direction.
Concrètement, il est prévu que les bénéfices à distribuer de l’entreprise ou, le cas
échéant, le dividende par action de la société mère, ne peuvent augmenter plus
rapidement que le chiffre d’affaires ou les frais de personnel majorés du coût net pour
l’entreprise des initiatives en matière de formation professionnelle à charge de
l’employeur. En cas de non-respect de ces conditions, l’entreprise n’est plus éligible
pendant trois années aux aides publiques diverses (réduction structurelles de cotisations
sociales patronales, intérêts notionnels, etc.).
4) Encadrer les prix de transfert afin d'empêcher les montages fiscaux abusifs
Les entreprises multinationales peuvent, par un jeu de facturation entre entités situées
dans différents pays, éluder une part importante de l’impôt dû en Belgique, sans que cela
favorise l’activité économique. Ils proposent donc de remédier à ce problème par une
adaptation des règles fiscales afin d’améliorer la perception de l’impôt des sociétés, en
corrigeant une imperfection des règles fiscales actuelles, relativement aux prix de
transferts pratiqués entre entreprises d’un même groupe. Cette correction permettra de
lutter contre des abus, dont certains ont été récemment constatés, notamment dans le
cadre du dossier Caterpillar.
5) Instaurer des droits de douanes sociaux et environnementaux aux frontières
européennes
Notre Proposition de résolution demande l’instauration au niveau européen de droits
sociaux et environnementaux dans le Code des douanes communautaire. Concrètement,
les normes sociales fondamentales (telles que la liberté syndicale, la reconnaissance
effective du droit de négociation collective, l’interdiction du travail forcé ou des enfants,
l’égalité salariale homme-femme, etc.) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et
les normes environnementales découlant des différentes Conférences et protocoles
internationaux doivent constituer autant de références utiles pour réguler les échanges
commerciaux avec les pays hors Europe et autant d’incitants pour ceux-ci à améliorer le
bien-être de leur population.
6. 6) Instaurer une cellule d’anticipation et de prévention des restructurations en
Wallonie et d’un droit d’alerte pour les travailleurs
Le texte prévoit de créer une cellule de prévention et d’anticipation des restructurations. Il
s'agit d'agir de façon préventive en identifiant les risques au sein des entreprises
wallonnes ou bruxelloises, afin de prendre les initiatives utiles en amont, avant qu'une telle
évolution devienne inéluctable, du point de vue de l'actionnariat ou de la direction de
l'entreprise. Il s'agit, d'autre part, d'anticiper et, lorsqu'une restructuration potentielle est
identifiée, d'examiner les scénarii envisageables et de prendre les mesures
d'accompagnement le plus rapidement possible (reclassement, formation, création
d'entreprises).
Orienter et redéployer
7) Réformer l’Impôt des sociétés afin de favoriser la création d'emploi et les PME
Ecolo propose de recycler les moyens actuellement affectés aux exonérations fiscales
coûteuses inefficaces (et qui bénéficient de manière disproportionnée aux grandes
entreprises) sous forme de baisse de l’impôt des sociétés et de soutien aux
investissements réellement productifs. La proposition vise à une suppression progressive
sur 5 ans des avantages fiscaux à l’impôt des sociétés à moins d’une justification
économique, sociale ou environnementale suffisamment étayée et éprouvée. Seraient
donc supprimées les exonérations fiscales qui ne sont pas liées ou conditionnées à la
création d’emploi, à l'innovation ou aux investissements présentant une plus-value pour la
société. Ainsi par exemple, les intérêts notionnels seraient entièrement supprimés et les
règles d’exonérations pour les revenus directement taxés seraient durcies.
8) Soutien fiscal aux entreprises en faveur des investissements durables
La présente proposition de loi vise à encourager les capacités d’investissement des PME
dans des projets d’économie circulaire, de développement durable ou d’amélioration de la
qualité de l’environnement. Pour ces PME, elle exonère les bénéfices à concurrence de 20
% de la valeur d’un nouvel investissement. Sont exclus les investissements acquis ou
constitués en vue de céder à un tiers les immobilisations amortissables en moins de trois
périodes imposables, les investissements en terrains ainsi que les voitures, voitures
mixtes et minibus.
9) Orienter les fonds de pension
La proposition de loi vise à définir l’investissement socialement responsable, à mettre en
place une procédure permettant sa reconnaissance légale et à orienter les
investissements dans les fonds de pension des deuxième et troisième piliers, ainsi que les
placements réalisés en actifs du Fonds de vieillissement, vers des choix respectant des
critères d’exigences en matière de stabilité des placements effectués, de participation
active et effective à la gestion des entreprises dans lesquelles ces fonds sont investis,
mais également d’éthique et de développement durable. Le contrôle du respect de ces
conditions est assuré par l’Autorité de contrôle des services financiers (FSMA), en
interaction avec un Conseil de l’Investissement Social Responsable, mis en place au sein
du Conseil Fédéral du Développement Durable.
7.
8. 10) Renforcer et orienter le Plan d’investissement européen vers la transition
énergétique, la relocalisation de l’économie et l’innovation sociale
Ce plan vise à donner une dimension socialement plus juste et écologiquement plus
responsable au plan d’investissement proposé par Jean-Claude Juncker. Ce paquet de
750 milliards d’€ sur deux ans proviendrait pour 1/3 du secteur public et 2/3 du secteur
privé. Il s’agirait d’argent frais et non recyclé qui proviendrait de crédits d’impôts différés et
de la mise en place d’un fonds d’épargne énergétique.
La mise en place d’une Union énergétique verte (efficacité énergétique, énergies
renouvelables), la relocalisation de l’économie et l’innovation sociale et verte sont nos
priorités. Ce plan d’investissement s’adresserait en priorité aux européens en situation de
pauvreté énergétique, aux PME et aux services publics.
11) Résolution en faveur d’un plan d’investissement au niveau belge
Alors que les investissements publics représentaient 5 % du PIB en 1970, ils tournent
aujourd’hui autour de 2,5 %. Plus inquiétant encore, sur les 20 dernières années, la
Belgique a perdu un quart de ses actifs fixes publics. Nous demandons la mise en place
d’un accord de coopération entre régions afin de garantir un seuil minimum
d’investissement annuel de la part des différents pouvoirs publics afin d’impacter
positivement le potentiel économique à long terme.
12) Redynamisation économique territoriale
La proposition vise à organiser une procédure de redynamisation économique d’un
territoire lorsque celui ci voit son taux de chômage augmenter suite à une restructuration
importante, associant en particulier la Chambre subrégionale Emploi Formation et la
structure chargée de l'animation économique sur le même territoire. Il est prévu qu’une
analyse de la situation et un recensement des opportunités d’emploi soit rapidement
publié par la Chambre régionale. Ensuite, sur base de ce rapport, la structure chargée de
l'animation économique sur ce territoire proposera un projet de plan stratégique de
redynamisation territoriale.