1. 1
Contribution du MEDEF au rapport du Haut conseil du financement de la protection
sociale (HCFiPS) sur les relations des entreprises avec les organismes de protection sociale
Le MEDEF salue l’initiative du HCFiPS de se saisir d’un thème jusqu’ici peu traité, pourtant
au cœur d’enjeux essentiels en termes d’efficacité du recouvrement, de service rendu aux
entreprises et ce faisant d’acceptabilité des prélèvements sociaux.
Cette initiative participe d’une prise de conscience récente des pouvoirs publics1
autour de ces
enjeux que le MEDEF a largement initiée et soutenue. Mais, le niveau-record des prélèvements
sociaux, l’instabilité et la complexité des règles liées aux cotisations sociales et les chantiers
structurants engagés nourrissent des attentes fortes des entreprises en termes de simplification,
de sécurité juridique et d’accompagnement dans le champ de la protection sociale.
Dans ce contexte, nous saluons la qualité du travail conduit par le HCFiPS d’explication et
d’analyse d’éléments jusqu’à présent fragmentés tenant compte de l’environnement et des
contraintes de l’ensemble acteurs : organismes de protection sociale en tant que collecteurs et
des entreprises en tant financeurs.
Ce rapport met en exergue les pistes de progrès de court ou moyen terme autour de quatre
chapitres2
, pistes dont certaines dépassent largement le cadre d’un tel rapport. L’amélioration
des relations entre le monde de l’entreprise et les URSSAF, principal organisme du
recouvrement des cotisations sociales, doit rester un axe prioritaire d’actions.
Sur la base de ce rapport et d’autres contributions, le MEDEF attend une action forte des
pouvoirs publics avec à court terme pour objectifs :
- La reconnaissance d’un véritable « droit à l’erreur » URSSAF dans le cadre du projet
de loi simplification en cours d’élaboration ;
- Le passage d’une logique de contrôle-sanction à une logique d’accompagnement
notamment en URSSAF, qui supposera de mettre en place un axe préventif détaché du
risque de sanction ;
- L’association plus étroite des entreprises à la production de la norme sociale et à
l’évaluation de leur impact pour remédier à la complexité en amont des règles ;
- L’achèvement de la généralisation de la déclaration sociale nominative, sans que le
chantier ne soit pas perturbé par d’autres chantiers type prélèvement à la source.
Au-delà des sujets abordés dans ce rapport, il convient d’aller plus loin dans le chantier de
simplification et de normalisation des données sociales (règle one in one out, comité impact
entreprises…). Dans le champ de la protection sociale, l’effort de simplification et
d’harmonisation que nous soutenons ne doit pas conduire à une uniformisation des protections
des couvertures sociales et qui priverait les entreprises, les salariés et les travailleurs
indépendants de dispositifs différenciés et adaptés à leurs besoins.
Au-delà de cette appréciation générale, le rapport appelle les observations suivantes :
1
- Chantier DSN, comité de simplification, rapport des parlementaires Goua-Gérard d’avril 2015 et traduction
législative de certaines de ses propositions (introduction en LFSS pour 2016 d’une proportionnalité des sanctions,
renforcement du droit des cotisants par le décret du 8 juillet 2016 sur le droit des cotisants, réforme du rescrit par
l’ordonnance du 10 décembre 2015…).
2
- les nouvelles modalités de déclarations sociales, l’organisation du recouvrement et l’accompagnement des
entreprises, la détection et le traitement des entreprises en difficultés, le travail dissimulé et le détachement.
2. 2
Sur le chapitre I relatif aux nouvelles modalités de déclaration sociale :
Le MEDEF est à l’origine du projet de déclaration sociale nominative (DSN) qu’il a impulsé et
porte depuis son origine. Si la DSN offre de nombreuses potentialités, elle doit avant tout avoir
pour objectif la simplification administrative pour les entreprises et l’amélioration du service
rendu aux cotisants (réduction supplémentaire des données demandées aux entreprises,
anticipation des besoins des entreprises, détection des entreprises en difficulté, etc.). Ceci dit,
nous avons des réserves de principe et techniques, sur l’intégration de la déclaration relative à
la taxe sur les salaires qui, si elle devait être envisagée, devrait se faire avec une concertation
en amont avec les professions concernées.
S’agissant du TESE, il nous paraît important, dans un souci de simplification et de sécurisation
des entreprises recourant à cette solution déclarative simplifiée, de remédier à un certain nombre
de dysfonctionnements rencontrés par les organismes assureurs. Ces difficultés ne sauraient
être résorbées uniquement par l’instauration d’une base de données des contrats de toutes les
conventions collectives.
Concernant la réforme du prélèvement à la source, le MEDEF n’est pas favorable à la solution
proposée faisant des entreprises le tiers collecteur. Un tel système générerait d’importantes
difficultés et complexités pour les entreprises a priori non compensées par l’Etat (coûts
informatiques, risque de dégradation des relations sociales en entreprise, charge administrative
supplémentaire…). Nous proposons, en s’appuyant sur la DSN, une autre solution reposant sur
la généralisation de la mensualisation et rendant les prélèvements contemporains des revenus.
L’instauration d’une CSG progressive évoquée dépasse largement le cadre de ce rapport et les
enjeux techniques autour de la DSN. Une telle évolution aurait d’importants effets redistributifs
entre Français et réinterrogerait l’acceptabilité de notre système social par ceux qui ont les
capacités contributives les plus importantes. De notre point de vue, la redistribution doit être
assurée par les prestations et non par les prélèvements obligatoires. En tout état de cause, une
telle orientation lourde politiquement et socialement ne peut être mise en débat qu’à l’occasion
d’un rendez-vous démocratique.
Sur le chapitre II relatif à l’organisation du recouvrement et l’accompagnement des
entreprises :
Globalement, nous partageons les pistes d’évolution évoquées pour améliorer l’information et
l’accompagnement des entreprises et leur sécurisation juridique notamment en URSSAF
(amélioration de la diffusion de l’information auprès des cotisants, utilisation des potentialités
de la DSN, création d’un « BOFIP social »…). Comme le souligne le rapport, le changement
culturel suppose aussi de la part des URSSAF une séparation des missions de contrôle de celles
d’accompagnement. Des mesures complémentaires pourraient être prises comme la diffusion
des lettres collectives ACOSS concernant les cotisants, information du cotisant sur la décision
initiale de la CRA avant contrôle de légalité...
Il sera essentiel que le projet de loi simplification en cours d’élaboration pose les grands
principes permettant d’initier ce changement culturel : reconnaissance d’un droit à l’erreur
URSSAF avec remise automatique des majorations et des pénalités de retard en cas de première
irrégularité, visite-conseil (sans possibilité de redressement) pour les TPE-PME dans les deux
premières années d’existence… Le MEDEF sera très attentif au contenu de ce texte.
Le HCFiPS revient à nouveau à l’occasion de ce rapport sur sa proposition de transfert de la
collecte des cotisations Agirc-Arrco aux URSSAF. Il souligne d’ailleurs les difficultés liées à
3. 3
une telle proposition (individualisation des cotisations Agirc-Arrco incompatible avec la base
agrégée des URSSAF, reconversion des personnels au sein des IRC…). Nous regrettons que
cette proposition soit présentée comme un élément de simplification et d’efficience. A ce stade,
aucune évaluation ne permet de confirmer les bénéfices escomptés. Rappelons que les régimes
complémentaires ont engagé une baisse de leurs coûts de gestion avec pour objectif très proche
un alignement sur ceux du régime général et sont mobilisés pour moderniser la collecte des
cotisations sociales notamment à travers des outils dématérialisés (exemple : Cotizen, service
de paiement en ligne des cotisations). Dans l’immédiat, la priorité doit être la communication
à Agirc-Arrco des assiettes redressées en URSSAF.
S’agissant de la suppression du RSI et de l’adossement du régime spécifique de protection
sociale des travailleurs indépendants confirmés par le Premier Ministre, le MEDEF rappelle
l’importance de maintenir des taux de cotisations et des prestations spécifiques pour cette
population. En effet, nous sommes attachés à une protection sociale adaptée aux besoins et aux
risques pris par le chef d’entreprise. Concernant la réorganisation, le modèle de la délégation
de gestion à des organismes assureurs privés, qui a montré son efficacité, nous paraît devoir
être maintenu dans le nouveau schéma-cible. Par ailleurs, nous sommes favorables à ce que le
principe de l’auto-déclaration des cotisations soit étendu aux travailleurs indépendants sous
forme d’un droit d’option au choix du TI.
Sur le chapitre III relatif à la détection et le traitement des entreprises en difficulté :
La détection précoce et le traitement des entreprises en difficultés doit demeurer un axe majeur
de progrès de la prochaine COG de la branche recouvrement en partenariat avec les autres
acteurs. Certaines initiatives intéressantes doivent dépasser le cadre de l’expérimentation.
Le rapport souligne à juste titre que les majorations de retard appliquées par les URSSAF sont
élevées et peuvent dans certains cas représenter un risque financier difficile à assumer pour
l’entreprise. Rappelons que le taux de ces majorations s’élève à 0,4% du montant des cotisations
dues, par mois ou fraction de mois écoulé, soit 4,8% par an, un taux élevé par rapport à ceux
pratiqués sur le marché. Nous réitérons notre demande d’une adaptation du taux des majorations
complémentaires aux conditions actuelles du loyer de l’argent. Le rapport indique qu’il est
d’autant plus légitime de réinterroger ce taux élevé que ces majorations complémentaires
s’ajoutent aux majorations initiales de 5 %.
Sur le chapitre IV relatif à la lutte contre le travail dissimulé et les questions liées au
détachement des travailleurs :
La lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement est une des priorités du MEDEF,
condition d’une saine concurrence entre les entreprises. Dans le domaine social, cela vaut pour
la fraude aux cotisations comme pour la fraude aux prestations.
Compte tenu de la définition large du travail dissimulé et l’interprétation tout aussi large de la
pratique, le MEDEF plaide pour plus de hiérarchisation des sanctions URSSAF selon la gravité
de la fraude. Dans cet objectif, il nous paraît essentiel que la convention d’objectifs et de gestion
(COG) 2018-2021 entre l’Etat et l’ACOSS prévoie la mise en place d’une grille statistique
d’évaluation permettant d’identifier le niveau de gravité de l’irrégularité ou de la fraude : fraude
de faible intensité, situation usuelle de travail dissimulé ou, fraude majeure. Cette connaissance
doit permettre d’adapter et d’affiner le régime de sanctions URSSAF applicables, en
introduisant une proportionnalité des sanctions selon la gravité de la fraude constatée, comme
cela a été réalisée en matière de prévoyance et de négociation annuelle sur les salaires.
4. 4
Enfin, sur la lutte contre la fraude au détachement, le MEDEF est favorable à la proposition du
HCFiPS consistant à préciser les critères de « l’activité substantielle » dans le pays
d’établissement pour lutter contre les entreprises « boîtes aux lettres », plutôt que de fixer une
limite temporelle fixe, règle qui serait largement inopérante compte tenu de la durée moyenne
des détachements. En revanche, nous sommes réservés sur la proposition consistant à limiter le
bénéfice des dispositions actuelles de la directive relative au détachement aux seuls cas de
mobilités professionnelles intra-firmes : limiter le recours au détachement à l’intragroupe
priveraient les entreprises européennes des compétences dont elles ont besoin.
&&&&&&&&