1. SCÈNE 11 - JULIEN ET LES VALENOD
Valenod présenté au marquis
(Julien le regarde partir, puis s’apprête à quitter la terrasse
également, mais il rencontre les Valenods qui lui barrent
le chemin. Ils sont habillés en aristocrates kitsch.)
Julien Sorel (Côme) - Mr Valenod (Patrice Maktav) - Mme Valenod (Elsa Pérusin)
le Marquis de la Môle (Michel Lerousseau)
Julien et les Valenod
Valenod : Cher petit Julien ! Quel plaisir ! Quelle exquise
et délicieuse soirée n’est ce pas ? (Il pousse des petits rires
que sa femme reprend en essayant d’être distinguée et en regardant
autour d’elle si ça fait un bon effet) Regardez moi ça, comme ils nous
l’ont changé en quelques mois ! Un vrai dandy ! Quel plaisir ! Vous
êtes sans doute désireux d’avoir des nouvelles de Verrières…
Oh vous savez par chez nous rien ne change... Si ce
n’est l’embonpoint de Monsieur de Rênal... Celle
qui me fait du souci c’est Madame de Rênal. Vous
vous souvenez de Madame de Rênal n’est ce pas?
Bien sûr. Elle est tombée dans la plus profonde
mélancolie, il n’y a plus que Dieu qui
compte pour elle. Dieu par ci, Dieu
par là... Elle est d’une dévotion, qui
force l’admiration, tant que ça fait mal.
C’est à se demander si elle n’a pas com-
mis un crime, un péché ignoble qui l’aura
ainsi changée. Mais enfin vous devez savoir
cela mieux que moi, après tout c’est vous l’homme
de Dieu… Quel sacrifice ! Quel courage pour un
garçon tel que vous de supporter toute
cette sophistication. En province vous
n’étiez pas grand chose, mais ici, vous de-
vez vous sentir moins que rien…? Vous
êtes bien pâle… Ah c’est cet air de Paris !
Mais allons je vous embête ! Présentez
moi le Marquis voulez-vous, et je vous
laisse tranquille…
Julien : C’aurait été un plaisir exquis, je
suis malheureusement trop rien du tout
pour oser vous présenter qui que ce soit. Ex-
cusez-moi.
(Julien sort)
Valenod : Ce garçon est né dans la crotte, et croyez moi, il y retournera
! plus vite qu’il ne le croit… (à sa femme, content de lui) Voilà que je
fais des rimes ! Le marquis passe à proximité et Valenod l’aborde en
pompeuse révérence.
Valenod : Monsieur le Marquis, je suis l’administrateur du bien des
pauvres (il appuie sur le mot pour attendrir) de la petite ville de Ver-
rière.
Marquis : Ah Verrière ! Vous devez être un ami du
petit Sorel ?!
Valenod : Mais parfaitement ! Ah ce petit Sorel !
Il m’adore !
Madame Valenod : Il nous a-dore !
Valenod : Oserais-je vous faire part d’une préoc-
cupation tristement matérielle… En effet nous
manquons cruellement de moyens pour rénover
2. Chanson : Tout se perd
Mr et Mme Valenod
Madame :
ON EST D’ACCORD
JE DISAIS HIER ENCORE
PRÉCISÉMENT LA MÊME CHOSE QUE VOUS
Monsieur :
QUAND ON VIT
CE QUE L’ON VIT
À COUP SÛR IL EST TEMPS DE SÉVIR
Madame :
QUAND ON CROIT
TOUT CE QU’ON CROIT
IL N’EST NUL BESOIN DE RÉFLÉCHIR
Ensemble :
DIEU QUELLE MISÈRE
TOUT SE PERD
NOS ANCIENS REPÈRES
TOURNENT SI MAL
MAIS QU’A T’ON FAIT
DU RESPECTS
ET DE LA MORALE
UN VIDE ABYSSAL
SALE
Monsieur :
SI ON SE VENGE
DE CEUX QUI NOUS DÉRANGENT
C’EST PAR SENS DU DEVOIR AVANT TOUT
Madame :
VOUS ALLEZ RIRE
J’ALLAIS JUSTEMENT DIRE
QU’IL N’ Y A POINT D’AIGREUR LA DESSOUS
Livret : Alexandre Bonstein
Mise en scène : François Chouquet/Laurent Seroussi
Auteurs chansons : Zazie/Vincent Baguian
Musiques : William Rousseau/SorelLivret de l’Opéra Rock Le Rouge et le Noir - Au Palace dès le 29 septembre 2016
Monsieur :
ON SE DEMANDE
DÉSORMAIS QUI COMMANDE
EST CE QUE PAR HASARD CE MONDE EST FOU
Madame :
ON EST D’ACCORD
J’EN PARLAIS HIER ENCORE
ET C’EST BON D’ÊTRE D’ACCORD SUR TOUT
Monsieur :
QUAND ON VOIT
CE QUE L’ON VOIT
ON SE DIT QU’IL NE FAUT PAS MOLLIR
Madame :
QUAND ON SAIT
TOUT CE QU’ON SAIT
ON SE DIT QU’IL FAUDRAIT RÉAGIR
Monsieur :
ON S’INTERROGE
SUR CES GENS QUI DÉROGENT
CETTE JEUNESSE QUI SE FICHE DE NOUS
notre orphelinat, et je me vois contraint de faire appel à votre généro-
sité pour que nos enfants puissent enfin…
Marquis (l’interrompant) : Voyez directement cela avec mon secré-
taire et comptable Monsieur Sorel, moi je suis fâché avec les chiffres (il
rit et s’esquisse poliment)
Les Valenods rient en réaction au rire du marquis et restent plantés là.
3. Monsieur :
QUAND ON PENSE
CE QUE L’ON PENSE
C’EST NOTRE VÉRITÉ QU’ON EXPRIME
Madame :
ON RESSENT
CE QU’ON RESSENT
CE N’EST PAS MÉCHANT C’EST LÉGITIME
Ensemble :
DIEU QUELLE MISÈRE
TOUT SE PERD
NOS ANCIENS REPÈRES
TOURNENT SI MAL
MAIS QU’A T’ON FAIT
DU RESPECTS
ET DE LA MORALE
UN VIDE ABYSSAL
SALE
Monsieur :
AH ! AH ! AH ! AH !
VOYEZ VOUS DES RAISONS DE SOURIRE
Madame :
AH ! AH ! AH ! AH !
J’ALLAIS PRÉCISÉMENT VOUS LE DIRE
Ensemble :
QUAND ON VOIT
CE QUE L’ON VOIT
ON SE DIT QU’IL NE FAUT PAS MOLLIR
QUAND ON CROIT
TOUT CE QU’ON CROIT
ON N’A PLUS BESOIN DE RÉFLÉCHIR
DIEU QUELLE MISÈRE
TOUT SE PERD
NOS ANCIENS REPÈRES
TOURNENT SI MAL
DIEU QUELLE HORREUR
TOUT SE MEURT
SANS NOS VIEILLES VALEURS
DIEU QUELLE MISÈRE
TOUT SE PERD
NOS ANCIENNES PRIÈRES
SONT MISES À MAL
MAIS QU’A T’ON FAIT
DU RESPECT
ET DE LA MORALE
UN VIDE ABYSSAL
SALE