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Résumé
On peut retracer la genèse de l’industrie de la musique à partir de l’invention des premiers
appareils à la fin du XIXe siècle notamment le phonographe de Thomas Edison et le
Gramophone de Berliner. Différents appareils concurrents ont cohabité mais le disque 78 tours
s’est imposé au début du XXe siècle. Le disque microsillon 33 tours (vinyles) est arrivé en
1948 puis la cassette et le CD dans les années 70 et 80. L’industrie s’est structurée au cours
du XXesiècle autour d’une succession de rachats et de fusions entre les labels pour aboutir à
un marché concentré autour de 5 majors dans les années 80. Le droit des auteurs et
compositeurs de musique lui nait d’un processus s’étendant du XVIIIe au XXe siècle. La
dématérialisation de la musique débute en 1995 avec l’apparition du format mp3 puis celle du
streaming au cours des années 2000. Cette dématérialisation a entrainé dans son sillage
l’apparition de pratiques illégales comme le partage en peer-2-peer via des services comme
Napster. L’industrie tente dès les années 2000 de contenir le phénomène du piratage en vain.
En 2004 Apple lance son offre légale de téléchargement : Itunes. Malgré les différentes
stratégie mises en place (actions légales, mise en place de verrous technologiques) la
tendance à la baisse du marché se confirme d’année en année. Depuis le milieu des années
2010 l’industrie se stabilise autour du streaming qui permet d’accéder à l’écoute de musique
via une plateforme distante.
Le streaming est aujourd’hui le mode de consommation le plus populaire et représente 47%
des revenus de la musique enregistrée en 2019 au niveau mondial.
Avec le streaming musical, la consommation évolue fondamentalement puisque l’on passe
d’un modèle de la possession à celui de l’accès. Les principales plateformes de streaming se
répartissent en 4 catégories : les pure players mondiaux, les GAFA, les plateformes locales et
les plateformes de niches. Avec le streaming, la croissance est de retour dans la majorité des
pays du monde et le marché digital se substitue aux supports physiques. Ce succès s’explique
par l’adéquation du modèle avec les attentes des consommateurs et une valeur ajoutée forte
des propositions de découverte de musique ainsi qu’un accès illimité. L’engouement du
streaming a permis de relayer le piratage à un enjeu secondaire dans les marchés les plus
mûrs. Le digital et le streaming ont atomisé le format album, Il est devenu possible de
décortiquer un disque et d’en retenir uniquement ce qu’on aime. Le format d’écoute en playlist
ainsi le modèle de rémunération influencent la production, avec des chansons plus courtes et
sorties plus fréquentes. Le digital et le streaming ont démocratisé la production et l’accès à la
distribution. L’auto-production est ainsi en plein essor les agrégateurs (des structures de
distribution indépendantes) proposant la mise en ligne des contenus sur les plateformes se
développant fortement et les majors ont toutes créé une structure de ce type pour profiter du
3
marché. Parallèlement, de nouvelles problématiques se sont développées comme le « Value
Gap » de Youtube. Le consensus sur les modèles de rémunération est régulièrement remis
en question.
Avec le passage d’un modèle de l’achat à celui de l’accès, le mode de rémunération du
streaming est perçu comme moins avantageux par certains artistes. Le streaming a rendu
possible différents types de fraude comme les fake streams ou les fake artists. Un autre
challenge à relever est celui de métadonnées. Elles sont « les boulons » du streaming et se
situent à la base des circuits de rémunération. Or elles sont dans un certain nombre de cas
manquantes à cause d’erreurs humaines, d’un défaut de centralisation dans une base
commune de référence, ou erronées. Ces erreurs de métadonnées bloquent la rémunération
des artistes. On parle de 2,5 milliards de dollars bloqués aujourd’hui.
Le digital a permis d’investir des marchés relativement inexploités par l’industrie de la musique
enregistrée. En effet, l’infrastructure nécessaire pour investir un nouveau territoire est bien
moindre en digital qu’en physique. Plus besoin de réseaux de points de ventes, de
commerciaux, usines de productions, chaîne logistique, entrepôts, gestion des retours, casse
des invendus. D’autre part, les réseaux capables de mettre en place une production physique
étaient très éparses, ou tout simplement indisponibles dans bon nombre de territoires.
« Nous allons générer des revenus là où il n'y en avait pas, ce qui ne peut être que positif. »
prédisait Axel Dauchez en 2012, alors PDG de Deezer.
Les marchés africains, asiatiques et indiens sont aujourd’hui les nouveaux terrains
d’expérimentation des majors et des DSP occidentales comme Spotify, Apple Music ou
Deezer. Ces marchés constituent des relais de croissance cependant leurs nombreuses
spécificités imposent la plus grande attention quant à la stratégie à y adopter. La mise en place
d’une approche localisée est la clé d’un lancement réussi, aussi bien pour un produit que pour
un artiste, dans ces territoires. Il faut également y envisager les stratégies sur le long terme.
L’Inde et l’Afrique malgré de très belles promesses devront encore mûrir avant de générer des
retours.
Un apport primordial des business-models digitaux est la mise à disposition de données plus
profondes sur la consommation de la musique dans son ensemble : performance des produits
et du marketing, connaissance produits et connaissance clients. Ces données sont disponibles
à travers différents canaux : plateformes de diffusion, réseaux sociaux, régies publicitaires,
partenaires tiers, tracking centré sur les sites, les applications et la publicité. La disponibilité
et l’exploitation des données est une évolution majeure dans la transformation digitale de
l’industrie de la musique permettant de modeler les stratégies et créer de la valeur.
De nouvelles tendances devraient modeler la croissance du secteur de la musique enregistrée
pour les années à venir.
4
Le développement d’un nouveau modèle de rémunération « User Centric » basé sur les
écoutes de chaque utilisateur individuellement est une piste de lutte contre la fraude et de
rééquilibrage de la rémunération entre les artistes.
Le développement de la blockchain et des smart contracts pourrait répondre aux enjeux de la
gestion des droits mais aussi à celui de la lutte contre la fraude. Enfin Il pourrait être une
solution ecommerce dans des pays faiblement bancarisés.
La convergence de la musique avec d’autres univers et formats devrait continuer de se
développer. La musique continuera de se marier aux réseaux sociaux avec le Social Music.
On devrait voir toujours plus de convergence avec la vidéo toujours sur les réseaux sociaux
mais aussi sur des plateformes de streaming musical comme c’est le cas en Asie. La
convergence avec le live, notamment grâce à la réalité virtuelle devrait également mûrir
La convergence avec l’univers du Gaming est une piste prometteuse. Selon une étude de
l’IFOP, en France 91% des 18-24 ans jouent aux jeux vidéo, cela renforce l’idée qu’il s’agit
d’un terrain de choix pour adresser une audience traditionnellement très engagée dans la
consommation de musique.
Une des tendances la plus médiatique de derniers mois dans le marché de la musique
enregistrée est certainement l’effervescence autour du podcast. Les investissements et les
initiatives se multiplient dans le domaine.
La musique est le moteur du développement de la commande vocale. Elle devrait devenir
une tendance lourde du marché de la musique. Ce nouveau mode de consommation est une
opportunité pour l’industrie de la musique avec de nouveaux défis notamment la gestion des
métadonnées afin d’optimiser la « découvrabilité » des contenus musicaux.
D’après une étude du cabinet McKinsey, 70% des entreprises devraient adopter l’utilisation de
l'intelligence artificielle d'ici 2030. L’industrie de la musique ne fait pas exception et on voit
déjà de nombreux projets. Cela va changer la manière de créer, de partager la musique.
Avec les évolutions des usages et de la technologie, les passerelles se multiplient entre ce
qu'est un artiste, un musicien, un acteur, un directeur artistique, un producteur, un danseur,
un réalisateur, un graphiste, la liste n’est pas exhaustive et le profil des « talents » est
aujourd’hui très diversifié. Les artistes combinent et maitrisent différentes disciplines pour la
création. Le cas de l’artiste français Riles en est l’exemple parfait. La définition de ce qu’est «
un musicien » est multiple et la convergence des univers est un mouvement de fond qui devrait
continuer à s’accentuer à l’avenir.
5
Remerciements
La réalisation de ce travail a été possible grâce au concours de plusieurs personnes que je
souhaite remercier chaleureusement :
J’adresse mes remerciements aux personnes qui ont alimenté et aiguillé ma réflexion.
Je remercie également Alexandre Stopnicki, Christophe Dané et Louis Duroulle ainsi que
tous mes camarades de promotion pour cette belle et année passée au MBA MCI.
Pour finir, je voudrais exprimer ma reconnaissance envers mes parents, ma compagne et
mes amis qui m’ont apporté leur soutien moral et intellectuel.
6
Thèse professionnelle / Sylvain JUPINET - MBA MCI
À l’heure du streaming, la musique enregistrée et le digital sont-ils enfin sur la même
longueur d’ondes ?
Table des matières
Résumé....................................................................................................................................2
Remerciements........................................................................................................................5
Introduction ............................................................................................................................10
I - Historique de l’industrie de la musique enregistrée ...........................................................13
1 Brève histoire de l’industrie de la musique (1857 - 1995) ...............................................13
1.1 Naissance du support phonographique ...............................................................13
1.2 Développement de l’industrie...............................................................................14
1.3 L’évolution des revenus de l’industrie du disque jusque dans les années 90......18
1.4 Chronologie des supports physiques...................................................................19
1.5 Naissance du droit d’auteur/compositeur.............................................................19
2 L’historique de la dématérialisation de la musique enregistrée (1995 – 2009) ...........21
2.1 Apparition du mp3................................................................................................21
2.2 Premiers peer to peer ..........................................................................................22
2.3 Modèles download ...............................................................................................22
2.4 La popularisation du streaming............................................................................23
3 Les conséquences immédiates de la dématérialisation..............................................26
3.1 Dévalorisation de la musique auprès des consommateurs..................................26
3.2 Baisse des revenus..............................................................................................27
3.3 Chute de la production.........................................................................................27
3.4 Conséquences économiques pour l’écosystème.................................................30
3.5 L’opposition frontale entre le monde de la musique et les nouvelles pratiques
digitales...........................................................................................................................31
II - Depuis le milieu des années 2010 l’industrie de la musique enregistrée se stabilise autour
du streaming ..........................................................................................................................33
1 Le streaming s’impose comme moyen de consommation de la musique...................33
1.1 Le streaming c’est quoi ? .....................................................................................33
7
1.2 Le streaming c’est qui ? .......................................................................................35
1.3 Les chiffres...........................................................................................................41
1.4 Les raisons du succès du modèle du streaming..................................................43
1.5 Le profil du consommateur streaming..................................................................47
2 L'impact du streaming sur la consommation de musique............................................49
2.1 Le digital grâce au streaming se substitue à l’industrie physique ........................49
2.2 Le développement du streaming a permis de relayer le piratage comme un enjeu
secondaire. .....................................................................................................................50
3 L'impact du streaming sur la production......................................................................52
3.1 La désacralisation de l’album...............................................................................52
3.2 L’autoproduction...................................................................................................53
3.3 Le raccourcissement des enregistrements ..........................................................56
4 - Les nouvelles problématiques soulevées par le streaming...........................................57
4.1 La consommation de musique via le streaming vidéo (Youtube) génère des
revenus insuffisants en raison du « Value Gap » ...........................................................57
4.2 Un changement du mode de rémunération mal accepté par certains artistes.....59
4.3 Le problème de la fraude et des “fake streams” ..................................................63
4.4 Les métadonnées.................................................................................................65
III – Le streaming et le digital ont brisé les frontières du marché de la musique ...................68
1 Le marché de la musique ne connait plus de frontières géographiques : l’opportunité
des marchés émergents.....................................................................................................68
1.1 L’Afrique...............................................................................................................69
1.2 Le Monde Arabe...................................................................................................78
1.3 L’Asie du Sud Est.................................................................................................81
1.4 La Chine...............................................................................................................85
1.5 L’Inde ...................................................................................................................88
1.6 l’Amérique Latine .................................................................................................92
2 Le streaming et le digital brisent les frontières avec le consommateur : l’opportunité de
la donnée............................................................................................................................93
2.1 Les types de données que l’on retrouve dans le secteur de la musique. ............93
8
2.2 Ce que le streaming change dans la collecte de la data : l’analyse de la
consommation.................................................................................................................94
2.4 Les outils proposés pour exploiter les data de la consommation.........................97
IV – Recommandations : les leviers de croissance offerts par le digital pour les années à venir.
.............................................................................................................................................106
1 Le modèle de rémunération User Centric .................................................................106
1.1 Une initiative portée par Deezer.........................................................................106
1.2 Le fonctionnement d’un modèle User Centric....................................................107
1.3 Une redistribution plus équilibrée des revenus entre les artistes.......................107
1.4 Le modèle User Centric est un outil de lutte contre la fraude ............................108
2 La Blockchain pour répondre aux enjeux de la gestion des droits mais pas seulement…
..................................................................................................................................109
2.1 La Blockchain et les smart contracts c’est quoi ? ..............................................109
2.2 Les cas d’usage de la Blockchain et les smarts contracts.................................110
2.3 Les projets concrets autour de la Blockchain.....................................................111
3 La convergence de la musique avec d’autres univers et formats .............................112
3.1 Le Social Music, toujours plus de convergence entre musique et réseaux sociaux
...........................................................................................................................112
3.2 La convergence avec la vidéo............................................................................118
3.4 La convergence avec le live...............................................................................120
3.5 La convergence avec le Gaming........................................................................122
4 L’ascension du podcast.............................................................................................126
4.1 Qu’est-ce qu’un podcast ....................................................................................126
4.1 La consommation des podcasts.........................................................................127
4.3 Les investissements dans les podcasts explosent.............................................128
4.4 Le podcast et les producteurs de contenus musicaux : monétisation ou promotion ?
...........................................................................................................................130
4.5 L’investissement des DSP dans le domaine du podcast : des logiques multiples...
...........................................................................................................................131
5 La musique est le moteur du développement de la commande vocale ....................133
9
5.1 La musique est l’usage plus commun de la commande vocale.........................133
5.2 Les principaux acteurs des smarts speakers et assistants vocaux....................134
5.3 Optimiser et enrichir les métadonnées...............................................................135
5.4 La création de Skills Alexa.................................................................................135
6 L’IA une nouvelle approche de la création et de la recommandation........................137
6.1 La musique générative.......................................................................................137
6.2 Écriture assistée par IA......................................................................................138
6.3 Les outils de découverte et de curation .............................................................139
Conclusion ...........................................................................................................................141
Annexes : .............................................................................................................................142
Les applications (quasi) gratuites applications pour développer un projet musical..........142
Bibliographie ........................................................................................................................143
10
Introduction
En 1999, j’assouvissais mon rêve d’enfant : sortir un disque avec
mes copains, cela fait 20 ans cette année (la pochette est sur la
droite, vous pouvez cliquer pour écouter ce disque confidentiel
exhumé et mis en ligne par un « fan » d’alors). A l’époque, lever
20.000 francs (grâce aux recettes d’un concert et quelques
subventions) était un petit défi en soi pour des ados de 16 ans
pour payer 7 jours de studio, une séance de mastering et le
pressage de 500 copies CD. Nous étions extrêmement fiers d’avoir produit cet objet. Ecouter
nos créations sur ce support, sans le souffle ou le bruit des enregistrements sur cassette, était
un plaisir, pouvoir passer d’une chanson à l’autre en pressant « skip » un accomplissement.
En 20 ans, le désamour du CD est passé par là. La dématérialisation de la musique avec le
piratage dans son sillage a fait vaciller l’industrie du disque qui a traversé un trou d’air de
plusieurs années. Néanmoins en 2018 le marché de la musique enregistrée français était en
croissance (faible certes) pour la quatrième année consécutive, tiré par le streaming musical
représentant pour la première fois 50% des ventes. Des artistes comme Jean Jacques
Goldman, dernier artiste réfractaire à l’exploitation de sa discographie en streaming, a fini par
accepter la mise en ligne de ses albums en août dernier. Le streaming est devenu le chef
d’orchestre du marché de la musique enregistrée.
Le marché de la musique peut regrouper plusieurs domaines d’activités différents qu’il
convient de distinguer. Au sens large, on peut y trouver la vente et la fabrication d’instruments
de musique, l’apprentissage et la pratique musicale et l’industrie de la musique. L’industrie de
la musique plus précisément se subdivise en trois grandes catégories : le marché du live (la
production de concerts et la billetterie), le marché de la musique enregistrée (les maisons de
disques) et l’édition musicale (la valorisation de l’œuvre). Il est parfois difficile d’établir une
délimitation nette entre ces trois activités très étroitement liées. Les éditeurs de musique, par
exemple, tirent la majeure partie de leurs revenus des représentations live et de la diffusion
d’enregistrements. De même, les tournées participent de manière très significative à la
promotion des enregistrements.
Le terme « digital » (provenant de l’anglais « digit » désignant les touches des numéros sur un
clavier) est synonyme de « numérique ». Il est difficile de trouver une définition éprouvée de
ce terme, cependant on peut dire que le digital désigne l’ensemble des activités se fondant sur
l’exploitation de flux d’informations codées en langage informatique transmis par différents
types de réseaux : internet, intranet, bluetooth, wifi. Ce terme implique souvent une dimension
11
technologique et innovante. La relation entre le digital et la musique remonte aux années 1970
et aux recherches qui mèneront à la création du CD. Une forme plus avancée de la
digitalisation de la musique étant sa dématérialisation, largement utilisée depuis la fin des
années 1990. Le stade ultime de cette dématérialisation est la consommation en « streaming
» (le terme anglais « stream » signifie flux en français) de la musique, avec cette technologie
on peut écouter une chanson sans en posséder une copie. On accède ainsi à la musique qui
est stockée sur un serveur à distance.
L’année 2019 marque le vingtième anniversaire de la sulfureuse plateforme de téléchargement
Napster. Cette dernière avait popularisé au tournant des années 2000 le piratage de la
musique et l’échange de fichiers audio .mp3. (format qui aura 25 ans en juillet 2020), au cœur
de la crise du disque. Le temps d’une génération s’est donc aujourd’hui écoulé depuis les
premiers signes de la crise et cette distance nous permet de considérer cette période avec
plus de perspectives aujourd’hui.
Me définissant moi-même comme passionné par la musique, j’ai eu l’occasion d’envisager
personnellement différents points de vue de l’écosystème de la musique enregistrée. Celui de
consommateur en premier en achetant mes premières cassettes puis des disques dans les
années 90, celui de consommateur moins loyal, en expérimentant le téléchargement illégal
dans les années 2000 par facilité ou par soif de découverte. J’ai pu expérimenter le point de
vue de l’industrie musicale en travaillant plusieurs années au sein de différentes maisons de
disques entre 2005 et 2018. Enfin dans une moindre mesure, celui de musicien en
assouvissant ma passion au travers de différents projets de groupes. La rencontre d’autres
musiciens avec des profils plus professionnalisés ou des membres de l’écosystème permet
d’entrepercevoir les problématiques d’un tel choix de carrière mais aussi leur vision plus
centrée sur la pratique et la création.
Cette année de formation m’a offert la liberté de prendre du recul sur un secteur pour lequel
j’avais déjà un certain degré de connaissance et une passion certaine. Pour autant je n’ai pas
toujours pu « explorer » et « digérer » l’ensemble de ses évolutions très rapides. J’ai voulu
profiter de ce travail de recherche pour replonger dans l’industrie musicale en tant
qu’apprenant, pour redécouvrir son cheminement jusqu’à l’ère digitale et investiguer la
manière dont les acteurs de la musique enregistrée se sont adaptés pour tirer parti de la
transformation digitale de leur environnement.
Alors, à l’heure du streaming, le digital et la musique sont-ils enfin sur la même longueur
d’onde ? C’est ce que semblerait suggérer les revenus du secteur avec un retour de la
croissance pour la quatrième année consécutive en 2019. Ce constat général cache-t-il une
12
réalité plus contrastée ? Quels sont les leviers de la musique enregistrée pour tirer parti de
l’environnement digital à l’avenir ?
La recherche s’est d’abord fondée sur l’étude de rapports statistiques sur la consommation et
son évolution. Ces rapports ont également permis d’investiguer la situation de différents
territoires. L’analyse et la recherche se sont également largement fondées sur la consultation
d’articles d’analystes spécialisés. Des études de cas par marché et par produit ont aussi été
réalisées. La consultation d’interview et de conférences données par des professionnels du
milieu (Midem, Mama Festival) ont été des sources d’information précieuses. Enfin des
discussions informelles régulières avec des professionnels ont permis d’alimenter la réflexion.
Les difficultés rencontrées se situent au niveau de l’analyse des chiffres qui malgré leur
abondance peuvent être fragmentés. L’environnement complexe de la propriété intellectuelle
est un défi pour retranscrire certains concepts. L’accès à l’information en matière de
rémunération et d’innovation est un sujet sensible chez les professionnels de la musique
enregistrée, s’ils se sont ouverts sans difficulté lors de conversations, ils n’ont pas souhaité
être cités ou retranscrits.
Afin de répondre à ces questions, nous reviendrons dans une première partie brièvement sur
l’histoire de l’industrie musicale et sa construction au travers de ses supports technologiques,
la structuration du marché et la naissance des droits de la propriété intellectuelle attachés à la
musique. Puis nous évoquerons ensuite la dématérialisation de la musique et son impact sur
le marché au cours des années 2000 notamment le développement du piratage afin de
comprendre l’origine des frictions entre l’écosystème digital naissant et celui de la musique.
Dans une seconde partie, nous verrons comment le marché de la musique enregistrée s’est
stabilisé autour du streaming. Nous étudierons l’incidence de ce nouveau modèle à la fois sur
la consommation et sur la production. Nous verrons enfin quelles nouvelles problématiques
sont soulevées par le streaming musical. Dans une troisième partie nous verrons comment le
digital et le streaming ont brisés les frontières géographiques du marché ainsi que celles de la
connaissance client grâce à la donnée. Enfin dans une dernière partie, nous recommanderons
les tendances de l’écosystème digital à suivre, et comment elles peuvent représenter des
leviers de croissance dans les années à venir.
13
I - Historique de l’industrie de la musique
enregistrée
1 Brève histoire de l’industrie de la musique (1857 - 1995)
On peut retracer la genèse de l’industrie de la musique d’une part à partir de l’invention des
premiers appareils capables d’enregistrer puis de restituer l’onde sonore, d’abord sous forme
graphique puis plus tard acoustiquement. Le second pilier de l’industrie concerne les supports
utilisés pour véhiculer le contenu enregistré et leur évolution. Enfin le dernier pilier de la genèse
du music business est la naissance des droits liés à la reproduction mécanique des
enregistrements et ceux liés à la reproduction des œuvres représentée.
1.1 Naissance du support phonographique
1857 : le phonotaugraphe
L‘inventeur français Édouard-Léon Scott de Martinville brevète le
phonotaugraphe. 20 ans avant le phonographe d’EDISON et 30
ans avant le gramophone de BERLINER. Cet appareil permet est
le à transcrire un son en une représentation graphique, et est à ce
titre le premier enregistreur sonore. Son intérêt reste limité
cependant puisqu’il permet uniquement de représenter le son sur
une feuille de papier sans pouvoir le reproduire acoustiquement.
Il aura néanmoins un impact important pour les travaux menant à
l’invention du gramophone de BERLINER1
.
1877 : le phonographe
Thomas EDISON, notamment célèbre aujourd’hui pour ses
nombreux brevets (10932
brevet), est l’inventeur du
phonographe en 1877. L’appareil permet d’enregistrer et
reproduire du son au moyen d’une aiguille servant à la fois à
graver le signal sur des cylindres métalliques (puis plus tard
en cire) à l’enregistrement puis de le lire et le restituer par un
1
https://gramophone.fr/histoire/le-phonautographe/
2
Greg Linder « Thomas Edison », Capstone, p. 5. url : https://bit.ly/2lYPoWO
Gravure représentant le
phonautographe de Scott de
Martinville Gravure anonyme
extraite du Grand Dictionnaire
universel du XIXe siècle, en 15
volumes (1868-1877) et 2 volumes
de suppléments (1878-1888) de
Pierre Larousse
Ponographe d’Edison, photo prise
au Vendsyssel historiske Museum
(Hjørring, Danemark) en 2004 par
Tomasz Sienicki.
14
processus mécanique inverse3
. Le phonographe a fini par s’effacer face au gramophone ayant
alors misé avec succès sur le disque.
1887 : Le gramophone
L’Allemand Emile Berliner travaillant alors aux Etats-Unis
pour l’entreprise Bell (investie notamment dans le
développement du téléphone) invente en 1887 le disque
horizontal et l’adapte au phonographe pour mettre au point
son gramophone. L‘utilisation du disque est la principale
évolution apportée par Berliner par rapport au phonographe
d’Edison. En 1893, il crée le procédé (galvanoplastie) grâce
auquel il est possible de répliquer les disques et donc les
enregistrements en série. Le disque et le cylindre deviennent deux supports concurrents sur
le marché encore naissant des enregistrements audio. Le disque et le gramophone finiront par
l’emporter mais les termes phonographe et phonogramme eux resteront.
1.2 Développement de l’industrie
Le phonographe était à l’origine destiné à la reproduction de la parole à des fins thérapeutiques
(rééducation des malentendants et des bègues), administratives, d’archivage patrimonial
(enregistrement de discours politiques) ou encore la production de livres audio pour les
malvoyants. La musique n’arrive qu’en fin de liste des applications envisagées4
. Ces
utilisations restent très spécialisées et ne constituent pas des opportunités suffisantes. Le
phonographe va se rapprocher du grand public et de l’univers des loisirs par l’intermédiaire de
machine payante (sorte de Juke box) permettant de jouer de la musique dans des espaces
publics (cafés concert, Music hall). On en trouve au Moulin Rouge dès 1893 notamment ou
dans les fêtes foraines où des appareils sont loués par la société des frères Pathé.
La naissance de débouchés commerciaux engendre la structuration du marché. En 1878,
Edison fonde sa compagnie Speaking Phonograph Company, Les cousins Alexander et
Chichester Bell avec Charles Summer Tainter créent de leur côté l'American Graphophone
Company qui sera acquise en 1893 par la Columbia Phonograph Company (dans laquelle elle
se fondra définitivement en 19065
. Edison, après avoir perfectionné le phonographe crée la
3
https://gramophone.fr/histoire/le-phonautographe/
4
Tournès, Ludovic. Du phonographe au MP3. Une histoire de la musique enregistrée XIXe-XXIe siècle. Autrement,
2008
5
https://www.collectionscanada.gc.ca/gramophone/028011-3009-f.html
Gramophone
15
North American Phonograph Company et lance le premier appareil à destination du grand
public. Emile Berliner crée la Berliner Gramophone Company en 1895 dont des filiales sont
ouvertes en Europe en 1898.
En France, en 1895, Lioret (horloger de profession) crée sa société afin de vendre son
Lioretograph, ses qualités d’horloger lui permettent de miniaturiser ses appareils afin d’intégrer
des enregistrements sonores à des poupées, automates ou même des objets publicitaires
(Kiosque pour les chocolats Meunier). En 1897, les frères Pathé (dont l’un a travaillé pour
Lioret) créent la Compagnie Générale des Cinématographes, Phonographes et Pellicules. A
partir de 1900, Pathé domine le marché français.
Le moulage fait son apparition au début du 20e
siècle et permet la production des cylindres en
série des cylindres. Auparavant, les artistes devaient jouer pour chaque cylindre produit. Les
disques étaient affranchis dès le départ de cette question grâce au procédé de reproduction
mis au point par Berliner.
Au début du XXème siècle, les deux supports cohabitent cependant, mais le disque 78 tours
supplante finalement le cylindre au cours des années 10, notamment grâce à sa facilité de
classement, sa qualité de restitution supérieure, sa meilleure résistance à l’usage et une
meilleure conservation.
La guerre va catalyser le développement de l’industrie du disque notamment par
l’intermédiaire de la propagande gourmande en supports musicaux. Celle-ci utilise les
chansons comme canal privilégié et les diffuse à la radio (nouveau media de masse). La guerre
rebat les cartes du marché avec une industrie américaine au plus haut, affranchie de la
production européenne qui sort elle-même affaiblie par la guerre (réquisition d’usines dans
l’économie de guerre, mobilisation des troupes). A la fin de la guerre l’industrie américaine est
multipliée par 4 (avec 2 millions de disques produits par an) si on la compare à son niveau de
1914. En 1920, 100 millions de disques sont vendus.
Dans les années 20, l’introduction de l’enregistrement électrique par l’intermédiaire du
microphone va stimuler le secteur qui va poursuivre son ascension (150 millions de disques
vendus aux USA en 1929, 30 millions en Allemagne et 10 millions en France) et s’étendre à
de nouveaux marchés importants, l’Argentine et le Brésil. PATHE ne profitera pas de cet
engouement, payant le prix de son choix du cylindre et son retard technologique sur
l’enregistrement électrique. Malgré des tentatives pour rattraper son retard, la société passera
sous le contrôle de Columbia en 1928.
16
La crise de 1929 va néanmoins mettre un coup d’arrêt au marché qui, en France comme aux
Etats-Unis, chute de 90% entre 1929 et le début des années 30. Cette trajectoire est suivie
par la plupart de territoires.
A la fin de la crise, le marché se stabilise autour de trois grandes maisons :
- EMI : Electrical Music Industries qui est la réunion de la branche européenne de
Columbia et Gramophone / His Master’s Voice en 1931
- RCA-Victor : RCA prend le contrôle de Victor en 1929
- CBS : Columbia Broadcasting System
L’après-guerre (2e
guerre mondiale)
On assiste à l’arrivée d’une évolution majeure pour le marché de la musique enregistrée :
l’arrivée du disque microsillon 33 tours (vinyles) en 1948 par CBS. Celui-ci possède trois
avantages fondamentaux pouvant expliquer son succès : il est moins cher à produire, le
matériau vinyle offre un confort d’écoute supérieure (moins de bruits de surface) et il permet
d’étendre la durée d’écoute de 4 à 20 minutes. De son côté RCA développe le format 45 tours
dont la qualité est meilleure mais ne procure pas de gain de durée. Les deux formats
cohabiteront finalement en se partageant les albums (33 tours) et les singles (45 tours). Ces
innovations technologiques combinées à la croissance démographique du Baby Boom, le
développement de la « civilisation des loisirs » décrite par le sociologue Joffre Dumazedier en
1962, l’avènement de la consommation et des media de masse (TV, Radio) ont permis à la
musique enregistrée de croître à une cadence de +10 à +20% par an6
dans les années 50 et
60. Ainsi entre 1946 et 1973, la production de vinyle est multipliée par 2,5 aux USA, triplée au
Royaume-Uni, quadruplée en Allemagne et quintuplée en France. En 1975, 1,5 milliard de
disques sont vendus, en 1978 ce chiffre passe à 2 milliards.
Dans le même temps, Philips développe sa cassette compacte, en 1963 celle-ci prendra son
envol avec la mise au point et la commercialisation du Walkman en 1979. La promesse de la
mobilité de la musique séduit déjà, et la cassette dépasse le vinyle en nombre de ventes et en
revenus aux Etats-Unis en 1984.
Les années 80 voient la naissance d’une nouvelle évolution majeure pour l’industrie de la
musique enregistrée avec le lancement du CD. Le CD est développé en coopération entre
Philips et Sony (jusqu’ici uniquement investi dans le développement d’appareils). Il fait entrer
la musique enregistrée dans l’ère du numérique. Le CD permet une réduction des bruits
parasites, l’adaptation du support musical aux nouvelles techniques d’enregistrement et offre
17
des fonctionnalités d’écoute plus confortables : saut rapide d’une chanson à l’autre, avance,
retour, lecture aléatoire, lecture en boucle, programmation. Ce nouveau format redynamise le
marché et les ventes repartent de nouveau à la hausse.
A la fin des années 80, cinq grands groupes détiennent les 75% du marché : Sony Music,
BMG (Berthelsman Music Group), EMI, Polygram et Warner Music. Au cours des années 90,
les ventes de CD ne font qu'augmenter années après années : − 3,2 milliards d'albums vendus
en 94 − 3,6 milliards en 1998. Le CD a propulsé les revenus de la musique enregistrée aux
Etats-Unis, les volumes de ventes tous formats confondus ont été multipliés par deux.
https://www.riaa.com/u-s-sales-database/
18
1.3 L’évolution des revenus de l’industrie du disque jusque dans les
années 90
Source : Snep
Curien, Nicolas. « V. Nouveaux modèles économiques », Nicolas Curien éd., L’industrie du disque. La
Découverte, 2006, pp. 73-91.
19
1.4 Chronologie des supports physiques
RIBAUD, Vincent, La restauration des archives sonores, Mémoire de fin d'études - Section
SON, ENS Louis Lumière, 2009, p. 17.
1.5 Naissance du droit d’auteur/compositeur
Sous l’ancien régime, la plupart des artistes tire leurs revenus du financement des mécènes.
qui leur permettent de vivre. L’idée de mettre en place un statut particulier pour les créateurs
arrivera avec la révolution. On envisage l’art comme un travail et non comme une activité
bénévole. En Angleterre, Le Copyright Act de 1710 ou « Statute of Anne », d’après le nom de
la reine de l’époque, consacre à l’auteur le droit exclusif de l’imprimer à nouveau pendant une
durée de 14 ans renouvelable7
. En France, c’est l’auteur Beaumarchais, connu pour ses
œuvres comme le Barbier de Séville et les Noces de Figaro, qui a été un des moteurs de la
reconnaissance et de la conquête du droit d’auteur. C’est suite à son conflit avec la Comédie
Française - à qui il reproche de représenter ses œuvres sans y avoir consenti et sans être
rémunéré en retour alors que les artistes (acteurs, décorateurs, costumières etc.) participant
à la production du spectacle eux l’étaient - qu’il convainc d’autres auteurs de ne plus livrer
leurs pièces à la troupe. Avec les auteur ralliés à sa cause, Beaumarchais de constitue en
1777 « le bureau de Législation Dramatique » qui se rebaptisera en 1829 Société des Auteurs
et Compositeurs Dramatiques (SACD). La Révolution Française et l’abolition de tous les
privilèges mettra en suspend la reconnaissance du droit d’auteur et il faudra attendre les lois
des 13 et 19 janvier 1791 pour que le droit évolue dans ce sens. Ces lois accordent aux auteurs
7
Christophe Geiger 1710-2010 : Quel bilan pour le droit d'auteur ? L'influence de la loi britannique de la Reine
Anne en France (article, Revue internationale de droit comparé Année 2011 p. 59
20
le contrôle exclusif sur la reproduction de leurs œuvres. C’est la première fois que l’Assemblée
Nationale reconnaît le droit de représentation ainsi que le droit d’auteur tant d’un point de vue :
• moral : paternité de l’œuvre et respect de son intégrité8
que
• patrimonial : monopole de l’exploitation de l’œuvre pour leur vie entière et pour leurs
héritiers 10 ans après leur mort9
. Cette durée est étendue en France à 50 ans en 186610
et 70 ans en 199711
.
Le décret du 19 Juillet 1793 définit le droit d’auteur en incluant dans son périmètre les auteurs
de musique alors qu’il ne s’adressait qu’aux auteurs dramatiques jusque-là.
En France, l’étape fondatrice pour le droit des auteurs et des créateurs de musique est
« l’affaire » du Café des Ambassadeurs. En 1847, L'auteur Ernest Bourget accompagné des
compositeurs Victor Parizot et Paul Henrion, refuse de payer l’addition au Café des
Ambassadeurs (un café-concert en vue de l’époque) auquel il reproche de représenter son
œuvre sans le rémunérer. Les tribunaux lui donnent raison et lui reconnaisse le droit invoqué
en vertu des textes révolutionnaires. Le syndicat provisoire des auteurs, compositeurs et
éditeurs de musique se constitue en 1850, puis l’année suivante l’organisation devient une
société civile composée de sociétaires : auteurs, compositeurs et éditeurs se partageant les
droits perçus de façon égalitaire, cette règle perdurant encore aujourd’hui. C’est la naissance
de la Sacem, première organisation de ce genre au monde. Des sociétés de collecte de droits
d’auteurs dédiées au monde de la musique se constituent ailleurs dans le monde. Ces
sociétés « sœurs » nouent des accords entre elles afin de collecter et de se redistribuer
mutuellement les droits des artistes et éditeurs par lesquels elles sont mandatées.
1882 : création de la SIAE (Società Italiana, degli Autori ed Editori) en Italie12
1890 : création de la SAE (Sociedad de Autores Españoles) qui se renommera la SGAE
(Sociedad General de Autores y Editores) en 193213
8
M. Michel Thiollière, rapport législatif : Projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société
de l'information, Partie IV. Les débats de la période révolutionnaire : droit d'auteur et domaine public. fait au
nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 12 avril 2006. https://www.senat.fr/rap/l05-308/l05-
3084.html
9
Jean Baptiste Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements et avis du Conseil
d’Etat, Volume 6. Editions Officielles du Louvre ; de l’imprimerie nationaleet du bulletin des lois. p. 35.
10
Loi du 14 Juillet 1866
11
Loi du 27 mars 1997 (transposition de la directive européenne du 29 octobre 1993)
12
https://www.siae.it/en/about-us/siae/siae-and-its-history
13
http://www.sgae.es/en-EN/SitePages/corp-historia.aspx
21
1913 : création de la Buma (Bureau voor Muziekauteursrecht) au Pay-Bas14
1914 : création de la PRS (Performing rights Society) au Royaume Uni15
1914 : création de l’ASCAP (American Society of Composers, Authors and Publishers) aux
Etats Unis16
1922 création de la Sabam (c'est la société belge des auteurs, compositeurs et éditeurs) en
Belgique.17
1923 : création de la SUISA en Suisse18
1925 : création de la SPA (Sociedade Portuguesa De Autores) au Portugal19
1933 : création de la GEMA (Gesellschaft für musikalische Aufführungs - und mechanische
Vervielfältigungsrechte) en Allemagne20
2 L’historique de la dématérialisation de la musique
enregistrée (1995 – 2009)
Après avoir retracé les origines et la construction de la musique, il est nécessaire de présenter
une brève rétrospective de la dématérialisation (et non la digitalisation puisque le CD était déjà
un format numérique) du marché de la musique enregistrée que nous situerons il y a 25 ans,
avec comme point de départ avec la naissance du format MP3.
2.1 Apparition du mp3
1995 : Apparition du MP3
Le MP3 est un format de compression avec perte ayant vu le jour en 1995. Il est le fruit d’un
projet soutenu par l’Union Européenne. Afin de mener cette initiative, des chercheurs ont été
réunis au sein du Motion Picture Expert Group (MPEG) par l’organisation internationale de
normalisation réalisant les normes ISO. Afin de réduire le volume des données nécessaires à
la restitution d’un son donné, ce format de codage audio va éliminer les fréquences non
audibles et non détectables par le système de perception de l’être humain. Ainsi le mp3 permet
de diviser par 10 le poids d’une chanson par rapport à son équivalent sur Compact Disc (CD).
Le format mp3 a connu un développement accéléré d’abord grâce la mise à disposition d’une
14
https://www.bumastemra.nl/en/faq/history/
15
https://www.prsformusic.com/about-us/history
16
https://www.britannica.com/topic/ASCAP
17
https://www.sabam.be/fr/la-sabam/qui-sommes-nous
18
https://www.suisa.ch/fr/suisa.html
19
https://www.spautores.pt/spa/quem-somos
20
https://en.wikipedia.org/wiki/GEMA_(German_organization)
22
version « hackée » (piratée) gratuite du logiciel d’encodage au format .mp3 “L3enc” développé
à l’origine par l’Institut Fraunhoffer (détenteurs des brevets majeurs du format jusqu’à ce que
ceux-ci expirent en 2017) puis par l’inclusion de ce format d’encodage dans les produits
Microsoft et Apple. Le MP3 permit alors le développement du partage des fichiers audio et la
création de “bibliothèques dédiées”. Il ne manquait plus qu’à les interconnecter, c’est là que
Napster entre en scène.
2.2 Premiers peer to peer
1999 : Napster - Naissance des premiers services de peer to peer dédié à la musique
Napster a été fondé par les jeunes étudiants américains Shawn Fanning et son ami Sean
Parker. En l’espace de 2 ans, la plateforme connaîtra une ascension fulgurante avec 80
millions d’utilisateurs enregistrés à son apogée. Si ce n’est pas la première plateforme
permettant l’échange de fichiers, elle est la première dédiée aux mp3 et elle se distingue par
la convivialité de son interface permettant la recherche et l’échange entre utilisateurs à grande
échelle. Napster s’appuie alors sur le “Audio Home Recording Act” de 1992 permettant aux
citoyens américains d’enregistrer et partager de la musique en l’absence d’exploitation
commerciale (loi sur le droit à la copie privée). Le succès est tel qu’il provoque l’ire de
mastodontes de l’industrie musicale tels que Metallica qui n’hésite pas à monter au créneau
aussi bien médiatiquement que sur le plan judiciaire réclamant 10 millions de dollars de
compensation à la plateforme. Napster fait également l’objet de poursuites de la part des
majors du disque et la RIAA (Recording Industry Association of America) et est finalement
condamné à fermer en Juillet 2001. Napster a néanmoins ouvert la porte aux poids lourds du
piratage tels que Kazaa, Edonkey (Emule en France), Bit Torrent, WinMX, Limewire, Soulseek
pour reprendre quelques noms exotiques des années 2000, et le marché de la musique
enregistrée est ébranlé durablement.
2.3 Modèle download
2001 : Lancement de l’ipod
Apple lance son Ipod le 23 Octobre 2001, Steve jobs justifie le positionnement sur le marché
par le fait que la musique est un élément de la vie de chacun, il s'agit donc d’un marché
adressable très large à fort potentiel. L’expertise d’Apple dans le design d’appareils
technologiques innovants et soignés, son savoir-faire en matière de logiciels afin
d’accompagner le produit et enfin l’absence de leadership sur le marché aussi bien du côté
des poids lourds (Sony) que du côté des acteurs en dévelopement (Creative) sont autant
23
d’atouts pour se positionner. Le lancement de l’ipod est accompagné de celui de la seconde
version d’Itunes. L’ipod est alors capable d’embarquer 1000 chansons sur son disque de 5Go
(giga octets) pouvant être rempli en dix minutes grâce à sa connectique Firewire. Le coût
d’emport d’une chanson (calculé par le rapport entre le prix moyen de l’appareil et sa capacité
de stockage est de l’ordre de 30 cents par morceau contre 5$ pour un baladeur CD, 5$ pour
un lecteur mp3 Flash et 1$ pour un lecteur CD mp3. On notera quand même qu’Apple et les
autres constructeurs ont développé et commercialisé des appareils avec une capacité
d’emport très élevée par rapport au standard de l’époque avant même l’existence d’un modèle
de distribution légale des contenus.
2003 : Itunes store et les solutions de téléchargement légal
Le développement exponentiel du mp3 et l’investissement des fabricants pour fournir des
appareils pour le lire sont autant de signes confirmant l’urgence pour l’industrie musicale de
réagir. Faute d’entente conjointe pour proposer un service commun, les 5 Majors de l’époque
partent en ordre dispersé avec Sony et Universal d’un côté et leur service “Pressplay” et de
l’autre AOL Time Warner, EMI et BMG avec leur service “MusicNet”. Les deux camps ne
trouveront pas d’accord sur l’exploitation mutuelle de leurs catalogues. Cette stratégie sera
évidemment un échec. Face à cette situation Steve Jobs décide de lancer Apple sur ce
marché, il trouvera un accord avec les cinq majors en 2002 et l’Itunes Store (Itunes Music
Store au départ) ouvre le 28 avril 2003 aux États-Unis puis le 15 juin 2004 en France, en
Allemagne et au Royaume-Uni. Suivront ensuite les autres pays européens, le Canada, le
Japon et l’Australie entre l’été 2004 et l’automne 2005. C’est alors la première solution de
téléchargement légale mise sur le marché. Lors de son lancement en 2003 Itunes a vendu
plus d’un million de chansons en cinq jours. Certes, loin de compenser les pertes des ventes
physiques (au lancement en 2003, un titre est vendu 99 cents et un album 9,99 $ - auxquels il
faut retrancher 30% de commission pour Apple), ces résultats encouragent malgré tout, les
professionnels du secteur à croire à une solution consistante à ce moment-là.
2.4 La popularisation du streaming
2005 : Lancement de Youtube
Le site Youtube est fondé en février 2005 par trois anciens de la société PayPal : Steve Chen,
Chad Hurley et Jawed Karim, il s’agit d’un hébergeur de video avec une dimension sociale
importante grâce à ses fonctions de partage et de commentaires.
Google acquiert Youtube au mois d’octobre 2006 au prix de 1,65 milliard de dollars. La version
mobile est lancée en 2007. En 2017 Le streaming video comptait pour plus de la moitié (55%)
du temps passé à écouter de la musique. En juin 2019, sur les dix videos ayant généré le plus
24
de vues depuis la création de la plateforme, neuf étaient des clips musicaux soit 90% des
vues. Cela donne une idée du poids écrasant de la musique dans l’audience de Youtube.
https://www.ifpi.org/downloads/MCIR_French.pdf
https://www.statista.com/statistics/249396/top-youtube-videos-views/
2006 - 2008 : Les premières plateformes de streaming musical Deezer, Spotify.
Au milieu des années 2000 une nouvelle génération de sites préfigure le passage d’une ère
de la possession à celle de l’accessibilité des œuvres musicales. RadioBlog, Blogmusik.net
(qui deviendra par la suite Deezer) offrent une alternative au modèle de téléchargement en
proposant d’écouter les œuvres sans pour autant les télécharger. BlogMusik est rapidement
fermé afin de pouvoir se mettre en conformité avec la loi, au travers d’un accord avec la
Sacem, avant de rouvrir sous le nom de Deezer en 2007. Spotify est lancé auprès du public
en 2008, suivront ensuite Qobuz, Tidal, Napster (passé sous le contrôle de Rapshody), Apple
Music en 2015, Amazon Music Unlimited en 2017 et Youtube lance Youtube Music, son
service de streaming musical par abonnement en 2018. Le marché mondial de la musique
enregistrée pesait 19,1 milliards de dollars en 2018 et le streaming en était la première source
de revenus 47%. Aux Etats-Unis, la part des revenus du streaming s’élevait à 75%, en France
elle s’établit à plus de 50%. (Bilan 2018 du marché de la musique enregistrée - SNEP)
Juin 2007 : Lancement de l'Iphone.
L'Iphone, lancé le 29 Juin 2007, combine un smartphone, un Ipod et l'accès direct à l'Itunes
Store. La réponse de la concurrence viendra plus d’un an plus tard avec le lancement du
premier téléphone Android (HTC Dream) le 22 Octobre 2008 aux Etats-Unis et le 12 mars
2009 en France.
25
26
3 Les conséquences immédiates de la
dématérialisation
3.1 Dévalorisation de la musique auprès des consommateurs
La disponibilité des catalogues gratuitement via le téléchargement illégal a amoindri la valeur
que les consommateurs apportaient à l’objet musical.
« Au cours de cette période 2003-2010, la filière musicale a connu une série
d’évènements majeurs concourant à une dévalorisation de son marché. Le
développement des usages sur Internet et plus précisément, l’intrusion du pair à pair dans
l’univers de l’’internet, a fragilisé les conditions mêmes d’exploitation du secteur de la
production phonographique.(…) Cette mutation vers un marché numérique a été très
déstabilisante pour la filière musicale (…) La crise qui s’en est suivie est devenue ‘quasi
identitaire au point de créer une grande "controverse" (…) Enfin, cette controverse a été à
l’origine du divorce patent de la filière avec des millions d’usagers de l’Internet qui se
sont accaparés gratuitement des catalogues, à l’appui de nouveaux services, au point
d’apparaitre comme les nouveaux prédateurs de l’univers musical. »
Nicolas, André. « L’évolution des marchés de la musique en France de 2003 à 2010 », Gilles
Pierret éd., Musique en bibliothèque. Éditions du Cercle de la Librairie, 2012, pp. 79-100
Entre 2003 et 2007, le prix moyen du disque a baissé de 16 % alors qu’à l’exception de la
presse, les prix de tous les autres biens culturels ont augmenté. Cette engrenage déflationniste
consécutif au piratage est le signe de la dévalorisation de l’objet musical au cours des années
2000. L’Économie de la production musicale 2009 - Rapport du SNEP
Evolution de l’indice des prix des biens culturels entre 1990 et 2007 (base 100 en 1990)
Source : Rapport L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP
27
Cette perte de valeur dans l’esprit du consommateur et le développement du piratage ont fait
chuter les volumes de ventes. Cet engrenage a conduit à une baisse du prix moyen des
supports musicaux faisant d’autant plus baisser les revenus de la filière.
3.2 Baisse des revenus
Entre 2002 et 2008 (date de lancement de Spotify et Deezer les deux pionniers du streaming
musical), le marché de la musique enregistrée a perdu la moitié de ses revenus (-53%). Si on
étudie l’évolution entre 2002 et 2015 (l’année la plus faible en termes de revenus depuis la
crise – à 543 million d’euros,
on tombe à -58% soit une division par 2,4.
Cette chute des revenus a eu une conséquence directe évidente sur la production.
3.3 Chute de la production
Avec la crise, la baisse des revenus et l’incertitude face à l’avenir, les maisons de disques ont
choisi de prendre moins de risques en se recentrant sur des projets à la rentabilité plus
prévisible. Cette morosité du marché et ce recentrage se sont matérialisés par une chute des
nouvelles signatures ainsi qu’une hausse du nombre des contrats rendus.
« Devant l'impossibilité de produire des artistes sur le long terme ou de prendre le risque d'en
signer de nouveaux, les maisons de disques ont dû limiter leur offre. Les majors ont ainsi dû
se restreindre et se concentrer sur des artistes vus comme des valeurs sûres et focaliser
28
ainsi leurs investissemens sur ces derniers qui sont bien plus rentables que de nouvelles
signatures. »21
Gilles Parienté, strategy manager chez EMI Music, déclarait en 2010 : « le fait que les
compagnies de musique coupent dans leur roster, oui, c’est une conséquence directe de la
crise, clairement. Alors tu peux dire qu’elles sont frileuses, qu’elles investissent moins, etc.,
mais si tu as des revenus moins importants, tu vas essayer d’avoir des artistes plus
marketables’ ou qui trouveront une audience plus large et tu vas prendre moins de risques,
c’est évident »
Source : Emilien MOYON - Le changement du business model de l’entreprise : Une
étude des majors de l’industrie phonographique (1998-2008) - Thèse pour l’obtention
du doctorat en Sciences de Gestion présentée et soutenue publiquement le 24 octobre
2011
Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP
21
Faculté des Sciences Economiques, Sociales et de Gestion - Institut Rémois de Gestion Maxime Varloteaux,
L'industrie musicale : crise ou révolution ? Impact des nouveaux modes de consommation de la musique. - Master
1 Management, Université de Reims Champagne Ardenne
29
Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP
Conséquence de la morosité du marché : en France, le volume d’albums produits et
commercialisés s’est effondré de 2002 à 2008, celui-ci a en effet été divisé par 2,5.
Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP
Sur une tendance encore plus exacerbée, la production de singles en France s’est quasiment
éteinte avec des volumes divisés par 5 de 2002 à 2003
30
Dans le sillage de la chute des revenus et de la production, l’écosystème global sera impacté.
3.4 Conséquences économiques pour l’écosystème
La musique intéresse de moins en moins les géants de la distribution et pour preuve :
• En 2009, La FNAC (75 magasins en France) annonçait un plan de développement de
ventes de produits dérivés, jeux vidéo d’occasion, photo, hi-fi. Les linéaires de ces
nouvelles activités fleurissent pendant que les linéaires de disques se réduisent.
• Par ailleurs, la FNAC et Virgin Mégastore se voient dans l’obligation de fermer des
magasins. Pour la FNAC, fermeture du magasin de la Bastille, suppression de 168
postes, pour Virgin Megastore, les 6 derniers magasins des Etats-Unis ont fermé au
cours de l’été 2009.
• Les grandes surfaces alimentaires, elles aussi, boudent les disques longtemps
considérés comme un produit d’appel.
• Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le chiffre d’affaires des maisons de disques réalisé
avec les grandes surfaces alimentaires a chuté de 70 % entre 2002 et 2008 passant
de 733 millions d’euros en 2002 à 218 millions d’euros en 2008 (à comparer à une
évolution globale de -60% du marché physique pour cette période).
• Ceci n’est pas sans conséquence pour les maisons de disques. Les effectifs ont été
réduits de moitié, ce qui a entrainé également des pertes d’emplois indirects (personnel
de studio, graphistes etc…)
31
L’ampleur de la crise est prise très au sérieux par l’industrie dès le tournant des années 2000
et celle-ci part à l’offensive.
3.5 L’opposition frontale entre le monde de la musique et les nouvelles
pratiques digitales
Face aux difficultés importantes qu’elle rencontre dans les années 2000,
l’industrie musicale adopte une stratégie frontale à l’égard de la piraterie
dans la droite ligne du « hometaping is killing music » prôné par la
campagne de l’industrie du disque britannique au début des années 80. La
riposte s’organise donc au travers d’actions en justice, de campagnes
menaçantes pour les utilisateurs de services de piratage et de mesures de protection pour ne
pas dire de verrouillage des supports musicaux.
• Les procès intentés aux services de dépôt de fichiers et aux services peer-to-
peer : dès 1999, les cinq majors de l’époque (EMI, Sony, BMG, Universal et Warner)
attaquent en justice Napster par l’intermédiaire de la RIAA et obtiennent sa fermeture
en Juillet 2001. De la même manière, le site mp3.com a été assigné par chacun des
majors, l’obligeant à payer entre 20 et 53 millions à chacun des plaignants afin de
régulariser l’utilisation de leurs catalogues. Du côté des artistes, des actions coercitives
ont également été entreprises, ainsi Metallica et Dr. Dre ont chacun poursuivi Napster.
• Les procès à l’encontre des particuliers : le second étage de cette riposte s’est
concrétisé par une campagne de procès intentés aux particuliers ayant recours au
téléchargement illégal. La RIAA assigne ainsi plus de 6000 personnes entre 2003 et
200422
. Certains de ces cas se soldent par des amendes record impossibles à régler
pour les condamnés, parfois plusieurs centaines de
milliers de dollars (675 000 cas Sony BMG Music
Entertainment vs. Tenenbaum). En France, des actions
en justice à l’encontre des particuliers sont également
entreprises, à l’image de celle intentée contre ’Anne-
Sophie Lainnemé, coupable d’avoir téléchargé
quelques 1647 titres illégalement. Cependant les
condamnations sont moindres, dans le cas d’Anne-
Sophie Lainnemé, on parle de 1200 euros d’amende
22
https://www.eff.org/fr/wp/riaa-v-people-five-years-later#footnote50_chxwwmu
32
(avec sursis) et 2225 euros de dommages et intérêts à la SCPP et à la SPPF ainsi que
la confiscation de son matériel23
.
• Les mesures techniques restrictives : Parallèlement à la stratégie de répression,
l’industrie a mis en place des verrous technologiques censés protéger les supports
contre les copies et les partages illégaux. Le système Opendisc par exemple devait
permettre de lire un CD sur un ordinateur personnel via un lecteur multimedia intégré.
Cependant ce dispositif pouvait rencontrer des problèmes de compatibilité avec
certains appareils et entraînait des difficultés d’utilisation, la rendant même parfois
impossible. Suivant une logique similaire, les fichiers vendus en téléchargement légal
étaient limités par leurs données DRM (Digital Rights Manahgement). Ainsi leur
utilisation était restreinte à certains appareils et le nombre de copies possibles était
également bridé. Ces systèmes ont rendu l’expérience musicale fastidieuse voire
agaçante dans certaines situations. Itunes a fini par abandonner les DRM au printemps
2009.
• Des campagnes menaçantes :
En France, Le SNEP a lancé en 2004 une campagne plutôt
agressive, présentant un doigt d’honneur ainsi que les
sanctions maximum associées à la violation de la propriété
intellectuelle. La Loi Hadopi, permettant également de
communiquer des adresses IP des internautes soupçonnés de
piratage, était un signal supplémentaire de menace à
l’encontre des internautes, avec sa riposte graduée et la
suppression de la connexion internet en cas de récidive.
Dans les années 2000, l’industrie musicale attaque donc sur tous les fronts. Sur le front
judiciaire, d’abord à l’encontre des sites internet permettant de partager la musique sans
contrepartie, puis de leurs utilisateurs en obtenant des condamnations « inassumables » pour
ces derniers ; sur le front technique, quitte à irriter les consommateurs en règle avec des
dispositifs contraignants, et enfin sur le front de la communication avec des campagnes parfois
provocantes. L’industrie musicale met également régulièrement en cause les fournisseurs
d’accès à internet, qu’elle accuse de développer des offres haut débits sur le dos des ayant-
droits, ces dernières permettant le téléchargement massif. On peut dire que ces différentes
actions ont achevé d’entériner le divorce entre l’industrie de la musique et le reste du monde
23
https://www.liberation.fr/medias/2006/11/30/anne-sophie-lainneme-condamnee-pour-telechargement-
illegal_5291
33
II - Depuis le milieu des années 2010 l’industrie
de la musique enregistrée se stabilise autour
du streaming
1 Le streaming s’impose comme moyen de
consommation de la musique
1.1 Le streaming c’est quoi ?
Tout d’abord il faut distinguer différents modèles streaming :
Le streaming interactif payant : Spotify Premium, Deezer Premium, Apple Music, Napster.
Le streaming interactif gratuit (ou freemium) Spotify, Deezer, YouTube.
Le streaming non-interactif : Web radios (Pandora, IHeartRadio).
Nous nous intéresserons ici au streaming interactif qui est le modèle le plus populaire
aujourd’hui.
34
Avec le streaming musical, le modèle de la consommation évolue fondamentalement puisque
l’on passe d’un modèle de la possession à celui de l’accès. En effet, avec les plateformes de
streaming, le consommateur ne détient plus une copie de l’enregistrement qu’il écoute, il y
accède via son abonnement (gratuit ou payant). La consommation de musique passe du retail
(la vente au détail) à l’univers du service. Avec ce type de service, un utilisateur peut écouter
de la musique à la demande parmi l’ensemble des titres disponibles dans la bibliothèque de
la plateforme. L’utilisateur a traditionnellement le choix entre un service freemium (gratuit)
financé par la publicité et un service premium payant avec un prix de l’ordre de 10 euros par
mois en Europe ; néanmoins le prix de l’abonnement est adapté selon les territoires : par
exemple en Inde où la compagnie suédoise s’est lancée en février 201924
, le même
abonnement premium ne coûte « que » 1,5 euros environ (119 roupies).
Comment cela fonctionne-t-il ?
Techniquement : les internautes écoutent la musique « à la demande » via un flux délivré par
la plateforme (Spotify, Deezer, Amazon Music Unlimited, Apple Music …) qu’ils utilisent. Ce
n’est plus le consommateur qui détient les copies ou les fichiers mais la plateforme qui stocke
et centralise les contenus qu’elle met à disposition de ses utilisateurs grâce à une connexion
internet. L’accès se fait par l’intermédiaire d’un site internet (Deezer par exemple), d’une
application dédiée (Spotify, Apple Music) ou d’une application mobile, ce qui est le cas d’usage
le plus fréquent aujourd’hui (en 2017, 6 utilisateurs sur 10 utilisaient exclusivement le mobile
pour visiter un service de streaming. Source : Médiamétrie25
)
Economiquement : pour pouvoir opérer légalement et utiliser les catalogues qu’il propose,
un service de streaming doit reverser pour chaque écoute une rémunération afin de payer les
différents droits (droits d’auteurs, droits voisins du producteur) qu’il exploite. La source de cette
rémunération provient de modèles d’abonnements proposés au choix :
• L’abonnement premium versé par l’utilisateur en échange d’un accès illimité au service
et sans publicité, ainsi que des fonctionnalités avancées comme l’écoute hors ligne.
• L’abonnement freemium, financé par la publicité à laquelle l’utilisateur est exposé par
intermittence durant son écoute. A noter que toutes les plateformes n’offrent pas de
plan freemium, comme Apple Music par exemple.
24
https://newsroom.spotify.com/2019-02-26/spotify-launches-in-india/
25
https://www.mediametrie.fr/fr/Streaming-musical-%3A-6%20visiteurs-sur-10-utilisent-exclusivement-leur-
mobile
35
Les recettes générées par les abonnements premium et la vente d’espace publicitaire sont
ensuite redistribuées aux ayants droits (producteurs, éditeurs, auteurs et compositeurs) en
fonction de leur poids dans le total des écoutes.
Infographie de la répartition des revenus du streaming (avant TVA) .Les pourcentages
annoncés sont simplifiés et arrondis. Ils se basent sur les informations du cabinet américain
Manatt, Phelps & Phillips26
et une infographie diffusée par l’Adami27
1.2 Le streaming c’est qui ?
Les plateformes des géants de l’internet :
La première catégorie regroupe les plateformes de streaming faisant partie d’un écosystème
de services et de produits plus larges. En l’espèce, cette catégorie est celle des GAFA puisqu’
on y retrouve Apple Music, Youtube (et Youtube Music) et Amazon Music Unlimited. Ces
services bénéficient de la capacité de financement de leur maison mère, de leur capital de
marque ainsi que des synergies procurées par leur écosystème : Apple Music pré-installé sur
l’iPhone, Amazon Music Prime (version limitée d’Amazon Music Unlimited) inclus dans les
abonnements Amazon Prime, la base de données et les enceintes Google Home pour Youtube
Music.
Apple Music : Apple Music est le service de streaming musical d’Apple lancé le 30 juin 2015.
Apple a préalablement acheté Beats Electronics en mai 2014 (pour 3 milliards de dollars) qui
26
https://www.manatt.com/Insights/News/2016/How-Does-Music-Streaming-Generate-Money
27
https://www.adami.fr/wp-content/uploads/2019/07/streaming-adami.pdf
36
venait de lancer Beats Music, son propre service de streaming. Le prix de l’abonnement est
de 9,99 €/mois en France. Le service est disponible dans 114 pays28
, propose 50 millions de
titres et également la possibilité d’importer sa bibliothèque. Apple Music n’offre pas de formule
gratuite. L’application est préinstallée sur les appareils Apple OSX et IOS. Apple Music
disposait de 60 millions d’abonnés en Juin 201929
Youtube Music : YouTube a lancé son service de streaming musical baptisé YouTube Music
en 2017. Youtube music est disponible via son application mobile, un lecteur web pour
desktop. Youtube propose à la fois les catalogues « conventionnels » que l’on retrouve sur
tous les services mais il les fusionne avec les remix et les live présents sur Youtube qu’on ne
trouve pas chez les concurrents. Le prix de l’abonnement est de 9,99 €/mois en France. Le
service est disponible dans 71 pays30
. Le nombre de titres au catalogue n’est pas
communiqué, en revanche étant donné la disponibilité des vidéos non officielles de la galaxie
Youtube, on peut facilement penser que le volume de titres disponibles surpasse celui de la
concurrence. Une version gratuite avec publicité et des fonctionnalités limitées est incluse
avec les enceintes Google Home via l’assistant vocal de Google. Google est en position de
challenger sur ce marché avec « seulement 15 millions d’abonnés. Google a annoncé le 27
septembre 2019 la pré-installation de l’application Youtube Music sur les appareils Android 9
et 10. Cette stratégie vise à rattraper son retard sur la concurrence.
Amazon Music Unlimited : Amazon Music Unlimited est la plateforme de streaming
d’Amazon lancée à l’automne 2016 aux Etats Unis puis au Royaume Uni et en Allemagne,
avant d’arriver en France en septembre 2017. Le prix de l’abonnement est de 9,99 €/mois en
France. Le service est disponible dans 51 pays31
et revendique un catalogue de 50 millions de
titres. Amazon propose également une formule limitée de son service appelée Amazon Prime
Music. Cet abonnement donne accès à 2 millions de titres, ce qui à l’usage est assez restrictif :
nouveautés indisponibles. Une version gratuite avec publicité et des fonctionnalités limitées
est incluse avec les enceintes Echo équipées de l’assistant vocal Alexa. Amazon détenait 32
millions d’abonnés (Amazon Music Unlimited et Prime Music) au printemps 2019 selon le
Financial Times32
. Il faut souligner que la croissance d’Amazon est très rapide sur le marché
du streaming avec +70% d’abonnés Amazon Music Unlimited entre 2018 et 2019.
28
https://support.apple.com/en-us/HT204956
29
https://www.numerama.com/tech/529295-60-millions-dabonnes-deal-avec-pnl-fin-ditunes-rencontre-avec-
eddy-cue-boss-dapple-music.html
30
https://support.google.com/youtubemusic/answer/6313540?co=GENIE.Platform%3DAndroid&hl=en
31
https://music.amazon.com/EU/help?nodeId=202204440
32
https://www.ft.com/content/60633178-a282-11e9-974c-ad1c6ab5efd1
37
Les Pure Player internationaux :
Spotify : Spotify est le leader mondial du streaming musical, pionnier en la matière fondé en
2006 par Daniel Ek (fondateur du jeu en ligne Stardoll), Sophie Champagnon (ancienne
dirigeante de la plateforme de partage µTorrent) et Martin Lorentzon (cofondateur de la régie
TradeDoubler) puis lancée officiellement en octobre 2008. Depuis, Spotify est entré en Bourse
le 3 avril 2018, possède 108 millions d’utilisateurs payants et 124 millions d’utilisateurs
freemium33
et une part de marché de 36% en termes de nombre d’abonnés en 2018.
L’abonnement mensuel est de 9,99 € pour un catalogue de 50 millions de titres. La grande
force de Spotify est sa proposition de playlists :
• Découvertes (Hits du moments, New Music Friday)
• Genres musicaux (Rap Caviar, Pvncliners, Dance Hits)
• Ambiances (jour de pluie, feeling’ Good, fin de journée etc…)
• Moments de vie (Motivation pour le sport, dinner entre amis, Nocturne etc…). On peut
dire que Spotify est vraiment la référence en matière de playlists. » En Boucle » et »
En Boucle : Flashback ». Ces playlists se basent sur l’historique et les habitudes
d’écoute de l’utilisateur afin de lui proposer des recommandations générées par des
algorithmes.
On peut dire que Spotify est vraiment la référence en matière de recommandations et de
playlists à la fois automatisées mais également concoctées par des équipes éditoriales
spécialisées.
Deezer : Deezer est l’autre pionnier du streaming musical, fondé en France en 2006 à travers
le projet blogmusik.com, le projet a rapidement pris de l’ampleur puis mis en standby le temps
de sceller un accord avec la Sacem et de pouvoir opérer dans les règles. Cette stratégie a
permis à Deezer de survivre là où d’autres pionniers comme Radioblog ou Grooveshark ont
fini par fermer sous la contrainte juridique. La stratégie de croissance de Deezer s’est
largement appuyée en France sur le couplage à une offre « Bundle » avec les forfaits internet
et mobiles Orange incluant un abonnement premium. Deezer communique sur Flow son
service de recommandations personnalisées basé sur les écoutes du profil et propose à l’instar
de Spotify toute une batterie de playlist mises à jour par des équipes éditoriales dédiées.
Deezer possède aujourd’hui 14 millions d’utilisateurs : 7 millions payants et 7 millions
33
https://www.billboard.com/articles/business/8525540/spotify-paid-users-q2-2019-earnings-label-licensing-
deals
38
freemium. Le service est déployé en septembre 2019 dans 187 pays34
. En France,
L’abonnement mensuel est de 9,99 € pour un catalogue de 56 millions de titres35
.
Napster : La version de Napster que nous connaissons aujourd’hui est la propriété de
Rhapsody suite à son acquisition en 2011. Entre temps, suite à ses déboires judiciaires aux
Etats Unis puis sa liquidation, la marque Naspter et son logo ont été acquis par Roxio qui s’en
est servi afin de rebaptiser son service Press play en 2003. Napster a ensuite été acquis par
le détaillant de matériel électronique américain Best Buy qui l’a finalement revendu à
Rhapsody. Napster est aujourd’hui un service de streaming interactif à la demande
comparable à Deezer et Spotify avec les fonctionnalités standards, de playlisting, d’écoute
hors ligne et des recommandation éditoriales. En France, le service est proposé à 9,95€/mois,
offre un catalogue de 60 millions de titres, un partenariat avec SFR propose le service à prix
réduit pour les nouveaux abonnés box ou mobile. Napster ne communique pas sur son nombre
d’abonnés mais un rapport de Midia Research évoquait le chiffre de 4.5 millions d’abonnés il
y a 2 ans et Digital Music News parle aujourd’hui de 5 millions d’abonnés36
. Napster est
disponible dans 34 pays37
Les acteurs locaux :
Dans chaque région du monde, des services spécialisés sur leurs marchés domestiques ont
émergé. Ces services bénéficient d’expertises culturelles et locales leur permettant d’offrir les
catalogues désirés par leur audience. Ils sont capables de proposer les nouveautés en
adéquation avec les tendances de leur marché avec beaucoup de justesse. La production
locale est en effet une composante cruciale pour le succès d’un service de streaming, le
rapport « Panorama de la consommation de musique dans le monde 2019 » de l’IFPI38
met
bien en évidence ce point avec son classement des styles musicaux les plus appréciés sur
différents marchés : La Kpop le Ktrot en Corée du sud, la Cpop en Chine, les musiques issues
de Bollywood en Inde. On retrouve donc ces acteurs locaux qui pour certains sont de vrais
mastodontes, dans chaque région du monde et notamment dans les marchés émergents :
• Afrique : Boomplay (acteur pan-africain plus que local même), Smubu, Spinlet,
Baziks., Udux pour citer les principaux.
• Maghreb / Moyen-Orient : Anghami
34
https://developers.deezer.com/guidelines/countries
35
https://www.deezer.com/fr/company
36
https://www.digitalmusicnews.com/2018/12/25/streaming-music-services-pay-2019/
37
https://support.tunecore.com/hc/fr-fr/articles/115006500587-Napster-Description-D%C3%A9lai-de-mise-en-
ligne-Territoires-Comment-ils-vendent-votre-musique-Taux-de-r%C3%A9mun%C3%A9ration
38
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-
monde-2019_HD.pdf
39
• Corée du Sud : Melon, Bugs, Vibe
• Asie du Sud-Est : Joox, KKBox
• Chine : les services de TME (Tencent Music Entertainment) : Kugou Music, QQ Music,
Kuwo music; Mais aussi NetEase Cloud Music du groupe NetEase.
• Inde : JioSaavn, Gaana, Hungama
Les acteurs de niche :
On retrouve enfin des acteurs de « niches » se positionnant sur des segments marketing
spécifiques comme :
Beatportlink : Au printemps 2019, Beatport la plateforme de téléchargement légale
spécialisée sur le segment des musiques électroniques particulièrement prisées des DJ,
notamment pour ses remixs exclusifs, a annoncé un nouveau service de streaming à la
demande permettant d’accéder à l’ensemble de sa bibliothèque. La plateforme va plus loin en
proposant en septembre une intégration à Rekordbox un logiciel populaire de DJing. Cette
intégration change la perspective du DJing en ne limitant plus la prestation du DJ au nombre
de titres qu’il possède mais à ceux qu’il connaît et auxquels il peut accéder. Le service propose
également un service hors ligne afin de ne pas dépendre de la connexion internet. Les
formules d’abonnement vont de 4,99$/mois à 59,99€/mois selon le niveau d’options choisies.
Le service est disponible dans 54 pays sur tous les continents
Qobuz : le français Qobuz qui a choisi de s’adresser aux audiophiles en proposant une
qualité d’écoute sans perte (au format .flac 16-BIT / 44.1 Khz) et une qualité très haute
définition (.flac 24-bit jusqu'à 192 Khz), permettant d’associer digital et Hifi Haut de gamme
pour les passionnés fortunés. Les prix des abonnements vont de 9,99€/mois pour
l’abonnement standard (qualité mp3 320 kbps), 19,99€/mois pour la qualité Hifi (.flac 16-BIT /
44.1 Khz) à 24,99€/mois pour la qualité Studio (.flac 24-bit jusqu'à 192 Khz). Le service
revendiquait 100.000 abonnés dans un article des Echos en Janvier 201939
. Qobuz est
disponible dans 11 pays d’Europe et aux Etats-Unis depuis Février 2019 où le Français aurait
conquis 25.000 abonnés en 6 mois.
Primephonic : initialement site de téléchargement de musique classique, Primephonic lance
son service de streaming en 2017. Son offre vise à réconcilier les fans de musique
classique avec le streaming, en effet l’exploitation des données et l’organisation de la
recherche centrée sur les standards de la pop (le titre et l’artiste principal « rois ») sont peu
39
https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/le-site-de-streaming-francais-qobuz-pret-a-ouvrir-son-capital-
370496
40
compatibles avec les critères de choix d’un enregistrement classique où sont valorisés à la
fois le compositeur, le chef d’orchestre, l’orchestre, les solistes et l’œuvre. D’autre part ces
données peuvent être traduites en différentes langues, aussi l’Orchestre Philharmonique de
Paris pourra être crédité de la sorte sur certains enregistrements puis Paris Philharmonic
Orchestra sur d’autres. Bref l’amateur de musique classique ne s’y retrouve pas et perd son
temps en recherche au lieu de profiter de la musique. Les recommandations sur le style
classique apparaissent également limitées sur les plateformes généralistes. Enfin les fans de
classique seraient plus sensibles à la qualité sonore, et dans cette optique Primephonic
propose une diffusion en qualité standard et en haute définition (24 bits). Les abonnements
sont de 7,99€/mois (qualité standard) et 14,99€/mois (haute définition). Le service est
accessible dans tous les pays à l’exception de la Chine, du Japon et de la Russie.
Audiomack : spécialisé sur le Rap et R&B, Audiomack a été lancé en 2012 afin de proposer
aux artistes de partager des mixtapes ou des titres. La plateforme est devenue de plus en plus
populaire dans le milieu du rap ainsi des artistes majeurs tels qu’Eminem, Chance The Rapper
ou Nicki Minaj y ont posté des titres en exclusivité. Audiomack est ainsi passé à la pointe de
la découverte et de gros noms du rap américain actuel sont passés par la plateforme avant
d’être signés : Migos, Fetty Wap, A Boogie wit da Hoodie, Chance the Rapper, Kevin Gates…40
L’audience d’Audiomack est plus jeune que la moyenne et à la pointe des tendances rap. Ce
profil intéresse beaucoup les maisons de disques et la plateforme vient de signer avec Warner
Music Group un accord de licence pour son catalogue ainsi qu’un partenariat sur de la création
de contenu. Audiomack propose une formule premium sans pub (4,99$/mois) et une formule
freemium.
Les hybrides :
A la fois réseaux sociaux et plateformes permettant l’écoute de musique, Soundcloud et
Youtube se distinguent par leur contenu UGC (User Generated Content) là où les autres sont
alimentés uniquement par des circuits contrôlés par des intermédiaires (agrégateurs, maisons
de disques).
40
https://www.digitalmusicnews.com/2019/09/27/audiomack-discovering-artists/
41
1.3 Les chiffres
Dans le monde41
En 2019, le marché de la musique enregistrée a progressé de 9,7% en chiffre d’affaires. C’est
la 4e
année de croissance consécutive pour le marché mondial de la musique. Cette
croissance est portée par le Streaming dont le chiffre d’affaires a progressé de +34% et
représente 47% des revenus. Parallèlement, les revenus physiques et downloads
(téléchargements) ont chuté respectivement de -10,1% et -21,2%. Cette croissance est
présente dans toutes les grandes régions du monde à l’exception de l’Europe où la progression
globale est quasiment nulle (+0,1%) Pour l’Afrique, il n’y a pas de données consolidées
comparables.
• Amérique Latine : croissance globale +16,8% / streaming +39,3% / physique -37,8%
/ téléchargements -45%
• Amérique du Nord : croissance globale +14% / streaming +39,8% / physique -22%
• Australie / Asie : croissance globale +11,7% / streaming payant +29,5% /
téléchargements -7,1%
• Europe : croissance globale +0,1% / streaming +29,2% / physique -19,4% /
téléchargements -6,7%. Cette engourdissement de la croissance en Europe cache des
situations différentes selon les pays avec des marchés relativement immobiles dans
les pays nordiques déjà très mûrs sur la transition vers le streaming, des marchés
progressant vite comme L’Autriche ou l’Irlande et des marchés importants en recul
comme l’Allemagne (4e
marché dans le monde) malgré une transition en cours vers le
streaming.
• Afrique : pas de données.
D’après le rapport « Panorama de la consommation de musique dans le monde 2019 » de
l’IFPI 89% des personnes sondées pour son étude dans le monde déclarent écouter de la
musique à la demande en streaming. En France le chiffre est de 85%. Au-delà d’être une
pratique globalement populaire, le streaming est devenu l’usage majoritaire dans beaucoup
de territoires.
41
https://www.ifpi.org/downloads/GMR2019.pdf
42
En France42
Un marché en croissance pour la 3e année consécutive
Le marché de la musique en France est en croissance pour la troisième année consécutive.
Une croissance certes timide à +1,8% mais bien présente, laissant présager une sortie durable
de la crise entamée dans les années 2000.
Le streaming source de revenus N°1.
Nouveauté cette année : le poids du chiffre d’affaires du numérique surpasse désormais celui
des produits physiques et réalise ainsi 57% des ventes. Le streaming est en 2018 la première
source de revenus en réalisant à lui seul 41% des revenus (seulement 8% en 2013), ce chiffre
atteint 63% pour le premier semestre 2019. Un autre signal très positif pour l’industrie : les
recettes issues des abonnements sont la source de recettes numéro 1 pour le marché de la
musique et progressent de 23% en 2018.
Voici quelques détails sur la physionomie de la consommation du streaming :
• La moitié (46%) des consommateurs utilise le streaming audio dont 5,5 millions
disposent d’un abonnement audio payant. Ces abonnements représentent 81% des
revenus du streaming en France.
• La progression du streaming est toujours soutenue avec + 26% d’écoute en 2018 par
rapport à 2017.
• Enfin 57,5 milliards de streams audio en 2018, soit + 35% par rapport à l’an dernier
42
Chiffres issus du Bilan 2018 du marché de la musique enregistrée du Snep paru le 14/03/2019 :
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/03/DP-Bilan-2018-final.pdf
43
Source SNEP
1.4 Les raisons du succès du modèle du streaming
Les services tels que Spotify, Deezer ou Apple Music offrent une expérience beaucoup plus
riche que le marché des années 2000. Dans une optique purement rationnelle : avec une
dépense de 120 € par an soit environ 10 ou 12 CD de l’époque, le consommateur peut accéder
à une bibliothèque de plusieurs dizaines de millions de titres et les écouter sans aucune
restriction hormis le temps dont il dispose et sa connexion au web.
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-monde-
2019_HD.pdf
44
https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans-
limites-n56801/
Mais cette explication n’est pas suffisante car un raisonnement basé sur la simple rationalité
économique ne permet pas d’écarter l’option de substitution 100% gratuite offerte par le
piratage, d’autant que cet arbitrage était largement pratiqué depuis les années 2000. Alors
quels facteurs permettent d’expliquer que le consommateur porte son choix sur un
abonnement à un service de streaming musical ? La batterie de services et de fonctionnalités
fournis (proposition de playlists, découvertes, informations sur l’artiste - biographie, liste
d’artistes similaires mais également la possibilité d’organiser et sauvegarder des playlists dans
sa bibliothèque et de les partager) par les services de streaming légal offre une expérience
largement enrichie. Tout cela accroît le niveau d’utilité que le consommateur retire du service
et le conduit à placer cette option devant le piratage.43
.
• Les plateformes de streaming offrent une mobilité totale et le smartphone seul permet
d’accéder au service sans avoir à l’alimenter via un disque dur, une clé USB ou tout
autre périphérique.
• La qualité du classement du catalogue Artistes, Albums, Titres, le gain de temps et le
confort d’utilisation que cet archivage procure en comparaison d’une bibliothèque
maintenue manuellement et stockée sur le disque dur ou la mémoire interne d’un
appareil personnel.
43
Dans l’optique de l’utilité ordinale de Pareto un consommateur hiérarchise les biens les uns par rapport aux
autre en fonction de l’utilité qu’il en retire
45
• Les services de streaming musical affranchissent leurs consommateurs des
problématiques liées à la capacité de stockage de leurs appareils. Néanmoins l’écoute
« hors-ligne » nécessitant de sauvegarder les fichiers en « local » (sur l’appareil), ce
problème peut ressurgir.
• L’interopérabilité entre les différents appareils est un vrai confort pour le
consommateur. Le principe du profil utilisateur permet en effet de passer d’un
périphérique (ordinateur, tablette ou smartphone) sans rupture dans l’utilisation.
• La possibilité de créer des playlists et de les sauvegarder, est un élément très
important ; depuis des années les utilisateurs ont voulu désosser le support sur lequel
la musique leur était livrée : on a pu le voir au travers des mixtapes artisanales
réalisées sur cassettes puis sur CD mais également au travers des compilations.
• Les services de streaming sont reliés aux principaux réseaux sociaux et permettent
ainsi aux utilisateurs de partager leurs coups de cœur musicaux, playlists. Des
fonctions sociales internes offrent aux utilisateurs la possibilité d’accéder aux playlist
créées par les autres ou de créer des playlists collaboratives.
L’économie de la production musicale 2019 – SNEP
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/GUIDE-ECO-Version-WEB.pdf
• Les plateformes proposent toute une batterie de recommandations à travers des
playlists thématiques (nouveautés, genres musicaux, « moods » - chill, dormir, se
concentrer etc.., activités - cuisine, sport, trajet du matin etc…) programmée par des
éditeurs spécialisés mais également des propositions personnalisées poussées par un
algorithme se nourrissant des habitudes de consommation de l’utilisateur.
46
• Des services annexes sont présents comme la possibilité d’être alerté sur les prochains
concerts d’un artiste et d’acheter des places via un partenaire (Ticketmaster par
exemple) ou encore d’acheter du merchandising.
L’économie de la production musicale 2018 - SNEP
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2018/07/06-2018-Economie-de-la-production-musicale1.pdf
JACKDAW RESEARCH MUSIC SURVEY REPORT Jan Dawson, October 2015
http://jackdawresearch.com/wp-content/uploads/2015/10/Jackdaw-Research-Music-Survey-Report.pdf
D’après les données des différentes enquêtes effectuées par les cabinets et organisations
spécialisées (SNEP, Jackdaw Research), on voit que les innovations proposées par les
plateformes de streaming musical, notamment la découverte, sont des moteurs pour l’adoption
des services. Même si elles arrivent en motivation secondaire derrière l’écoute illimitée et le
volume du catalogue, les fonctionnalités de découverte, d’interopérabilité, de création de
playlists ou de partage sont déterminantes pour le succès d’un service de streaming.
47
1.5 Le profil du consommateur streaming
Au niveau mondial, la plus grosse portion des streamers en 2017 étaient les 25 - 34 ans.
Music Industry Blog / Midia Research (2018). Part des consommateurs de streaming musical en 2017 par age.
Statista. https://www-statista-com.devinci.idm.oclc.org/statistics/806778/music-streamers-by-age-worldwide
En 2018, 30% des consommateurs de streaming musical avaient plus de 50 ans. Cet
usage n’est donc plus cantonné aux plus jeunes qui restent prédominants en terme de durée
d’écoute. Cette progression chez les seniors démontre la démocratisation voire
l’universalisation de ce mode de consommation, le streaming s’ancre comme un usage
dominant, incontournable et parti pour s’installer dans la durée.
48
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-monde-
2019_HD.pdf
Malgré l’utilisation très importante du smartphone, le lieu d’écoute le plus répandu en
France est le domicile. La voiture vient en seconde position. La durée d’écoute
hebdomadaire moyenne du streaming est d’environ 4 heures dans le monde et 2 heures et 48
minutes en France.
https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans-
limites-n56801/
49
Une enquête de Que Choisir en 2017 révèle un taux de satisfaction extrêmement élevé des
utilisateurs de streaming musical, on peut même parler de plébiscite avec 97% de répondants
satisfaits. Le service est particulièrement adapté aux attentes des consommateurs.
https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans-
limites-n5680
2 L'impact du streaming sur la consommation de
musique
2.1 Le digital grâce au streaming se substitue à l’industrie physique
En 2018 la consommation de
musique a basculé en France du
physique vers le digital avec pour
la première fois des revenus du
numérique surpassant ceux du
physique. Cette transition s’est
effectuée un peu plus rapidement
au niveau mondial dès 2017 avec
des revenus digitaux portés par la
croissance du streaming
représentant 54% des revenus au global. Des marchés plus précoces ont effectué cette
transition plus tôt, ainsi au Royaume-Uni le digital au global (streaming + téléchargement) a
50
pris le pas sur les revenus physiques dès 2013 et le streaming a franchi le cap de 50% (54%)
en 201844
. Les revenus globaux du digital aux USA ont atteint les 50% dès 201145
, ceux du
streaming seul ont passé la barre de 50% en 2014 pour atteindre 80% des revenus de la
musique enregistrée au pays de l’Oncle Sam désormais46
. Ce mouvement se généralise
même si certains marchés importants continuent de résister, comme le Japon extrêmement
attaché au CD. Sur d’autres comme en France, la dualité physique/digital continuera de
persister pour une durée difficile à prévoir (notamment grâce à un maillage de distribution
encore très bien implanté avec 4000 points de vente sur notre territoire). Il n’en reste pas moins
que la tendance générale du marché est là et qu’il ne s’agît que d’une question d’années avant
que la bascule se généralise.
2.2 Le développement du streaming a permis de relayer le piratage
comme un enjeu secondaire.
Selon un rapport du cabinet Ernst & Young citant une étude de l’IFOP datant de juin 2017, «
les nouveaux services légaux diffusant de la musique tels que Spotify ou Deezer ont très
fortement réduit la consommation illégale dans l’industrie musicale jusqu’à la rendre inférieure
à 10% de la consommation »47
en France. Une étude britannique réalisée par YouGov parue
en août 2018 arrive au même résultat, révélant qu'un britannique sur dix (soit 10%) télécharge
de la musique illégalement, contre 18% il y a cinq ans48
. On voit donc que l’essor des services
de streaming conjugué aux difficultés accrues d’accès aux sites illégaux : plateformes fermées
(comme Megaupload, Zone-téléchargement), la peur des risques liés aux virus informatiques
et les campagnes de sensibilisation comme Hadopi ont permis de juguler le piratage sur les
marchés occidentaux ».
Le Snep et l’IFPI sont moins optimistes et continuent d’alerter notamment sur la pratique du
Stream Ripping (piratage consistant à extraire le contenu mis à disposition par les plateformes
de streaming légal). Cependant depuis 3 ans on constate d’après le rapport « Panorama de la
consommation de musique dans le monde » que le recours aux pratiques illicites pour écouter
ou acquérir de la musique chute également au niveau mondial. On est ainsi passé de 40 % à
27% de la population ayant recours à ces pratiques. La position vigilante du SNEP et de l’IFPI
44
https://www.theguardian.com/business/2019/mar/21/streaming-accounts-for-more-than-half-uk-record-
label-income
45
https://www.statista.com/chart/2773/digital-music-in-the-united-states/
46
http://www.riaa.com/wp-content/uploads/2019/09/Mid-Year-2019-RIAA-Music-Revenues-Report.pdf
47
http://www.editionmultimedia.fr/wp-content/uploads/2018/07/Etude-EY-sur-le-piratage-en-France-
contenus-audiovisuels-28-06-18.pdf
48
https://yougov.co.uk/topics/arts/articles-reports/2018/08/02/number-britons-illegally-downloading-music-
falls
51
dans la mesure où en tant qu’organisations représentatives des intérêts de ses acteurs de
l’édition phonographique elles ne peuvent pas envoyer un signal de relâchement dans la lutte
contre le piratage tant celui-ci a mis la filière sous pression au cours des 15 premières années
du millénaire.
Part des consommateurs ayant utilisé des moyens illicites pour écouter ou acquérir de la musique en 2017, 2018
et 2019 dans le monde 49 50 51
Néanmoins la pratique du « stream ripping » ne saurait procurer un confort d’utilisation et une
expérience comparable à celle du streaming musical aujourd’hui. Cette pratique même si elle
est dommageable est plutôt à comparer au « home taping » (copie sur cassette) des années
80 et 90. Alors que la copie d’album sur CDR et le téléchargement illégal représentaient des
pures contrefaçons à l’époque où les usages et le marché étaient dominés par la vente de CD
et de téléchargements. Aujourd’hui le piratage dans les marchés les plus mûrs est devenu un
enjeu secondaire.
49
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2017/09/IFPI_Panorama-2017-de-la-consommation-de-
musique-dans-le-monde.pdf
50
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2018/10/10-2018-IFPI-VF-Consumer-Insight-Report.pdf
51
http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-
monde-2019_HD.pdf
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  • 1.
  • 2. 2 Résumé On peut retracer la genèse de l’industrie de la musique à partir de l’invention des premiers appareils à la fin du XIXe siècle notamment le phonographe de Thomas Edison et le Gramophone de Berliner. Différents appareils concurrents ont cohabité mais le disque 78 tours s’est imposé au début du XXe siècle. Le disque microsillon 33 tours (vinyles) est arrivé en 1948 puis la cassette et le CD dans les années 70 et 80. L’industrie s’est structurée au cours du XXesiècle autour d’une succession de rachats et de fusions entre les labels pour aboutir à un marché concentré autour de 5 majors dans les années 80. Le droit des auteurs et compositeurs de musique lui nait d’un processus s’étendant du XVIIIe au XXe siècle. La dématérialisation de la musique débute en 1995 avec l’apparition du format mp3 puis celle du streaming au cours des années 2000. Cette dématérialisation a entrainé dans son sillage l’apparition de pratiques illégales comme le partage en peer-2-peer via des services comme Napster. L’industrie tente dès les années 2000 de contenir le phénomène du piratage en vain. En 2004 Apple lance son offre légale de téléchargement : Itunes. Malgré les différentes stratégie mises en place (actions légales, mise en place de verrous technologiques) la tendance à la baisse du marché se confirme d’année en année. Depuis le milieu des années 2010 l’industrie se stabilise autour du streaming qui permet d’accéder à l’écoute de musique via une plateforme distante. Le streaming est aujourd’hui le mode de consommation le plus populaire et représente 47% des revenus de la musique enregistrée en 2019 au niveau mondial. Avec le streaming musical, la consommation évolue fondamentalement puisque l’on passe d’un modèle de la possession à celui de l’accès. Les principales plateformes de streaming se répartissent en 4 catégories : les pure players mondiaux, les GAFA, les plateformes locales et les plateformes de niches. Avec le streaming, la croissance est de retour dans la majorité des pays du monde et le marché digital se substitue aux supports physiques. Ce succès s’explique par l’adéquation du modèle avec les attentes des consommateurs et une valeur ajoutée forte des propositions de découverte de musique ainsi qu’un accès illimité. L’engouement du streaming a permis de relayer le piratage à un enjeu secondaire dans les marchés les plus mûrs. Le digital et le streaming ont atomisé le format album, Il est devenu possible de décortiquer un disque et d’en retenir uniquement ce qu’on aime. Le format d’écoute en playlist ainsi le modèle de rémunération influencent la production, avec des chansons plus courtes et sorties plus fréquentes. Le digital et le streaming ont démocratisé la production et l’accès à la distribution. L’auto-production est ainsi en plein essor les agrégateurs (des structures de distribution indépendantes) proposant la mise en ligne des contenus sur les plateformes se développant fortement et les majors ont toutes créé une structure de ce type pour profiter du
  • 3. 3 marché. Parallèlement, de nouvelles problématiques se sont développées comme le « Value Gap » de Youtube. Le consensus sur les modèles de rémunération est régulièrement remis en question. Avec le passage d’un modèle de l’achat à celui de l’accès, le mode de rémunération du streaming est perçu comme moins avantageux par certains artistes. Le streaming a rendu possible différents types de fraude comme les fake streams ou les fake artists. Un autre challenge à relever est celui de métadonnées. Elles sont « les boulons » du streaming et se situent à la base des circuits de rémunération. Or elles sont dans un certain nombre de cas manquantes à cause d’erreurs humaines, d’un défaut de centralisation dans une base commune de référence, ou erronées. Ces erreurs de métadonnées bloquent la rémunération des artistes. On parle de 2,5 milliards de dollars bloqués aujourd’hui. Le digital a permis d’investir des marchés relativement inexploités par l’industrie de la musique enregistrée. En effet, l’infrastructure nécessaire pour investir un nouveau territoire est bien moindre en digital qu’en physique. Plus besoin de réseaux de points de ventes, de commerciaux, usines de productions, chaîne logistique, entrepôts, gestion des retours, casse des invendus. D’autre part, les réseaux capables de mettre en place une production physique étaient très éparses, ou tout simplement indisponibles dans bon nombre de territoires. « Nous allons générer des revenus là où il n'y en avait pas, ce qui ne peut être que positif. » prédisait Axel Dauchez en 2012, alors PDG de Deezer. Les marchés africains, asiatiques et indiens sont aujourd’hui les nouveaux terrains d’expérimentation des majors et des DSP occidentales comme Spotify, Apple Music ou Deezer. Ces marchés constituent des relais de croissance cependant leurs nombreuses spécificités imposent la plus grande attention quant à la stratégie à y adopter. La mise en place d’une approche localisée est la clé d’un lancement réussi, aussi bien pour un produit que pour un artiste, dans ces territoires. Il faut également y envisager les stratégies sur le long terme. L’Inde et l’Afrique malgré de très belles promesses devront encore mûrir avant de générer des retours. Un apport primordial des business-models digitaux est la mise à disposition de données plus profondes sur la consommation de la musique dans son ensemble : performance des produits et du marketing, connaissance produits et connaissance clients. Ces données sont disponibles à travers différents canaux : plateformes de diffusion, réseaux sociaux, régies publicitaires, partenaires tiers, tracking centré sur les sites, les applications et la publicité. La disponibilité et l’exploitation des données est une évolution majeure dans la transformation digitale de l’industrie de la musique permettant de modeler les stratégies et créer de la valeur. De nouvelles tendances devraient modeler la croissance du secteur de la musique enregistrée pour les années à venir.
  • 4. 4 Le développement d’un nouveau modèle de rémunération « User Centric » basé sur les écoutes de chaque utilisateur individuellement est une piste de lutte contre la fraude et de rééquilibrage de la rémunération entre les artistes. Le développement de la blockchain et des smart contracts pourrait répondre aux enjeux de la gestion des droits mais aussi à celui de la lutte contre la fraude. Enfin Il pourrait être une solution ecommerce dans des pays faiblement bancarisés. La convergence de la musique avec d’autres univers et formats devrait continuer de se développer. La musique continuera de se marier aux réseaux sociaux avec le Social Music. On devrait voir toujours plus de convergence avec la vidéo toujours sur les réseaux sociaux mais aussi sur des plateformes de streaming musical comme c’est le cas en Asie. La convergence avec le live, notamment grâce à la réalité virtuelle devrait également mûrir La convergence avec l’univers du Gaming est une piste prometteuse. Selon une étude de l’IFOP, en France 91% des 18-24 ans jouent aux jeux vidéo, cela renforce l’idée qu’il s’agit d’un terrain de choix pour adresser une audience traditionnellement très engagée dans la consommation de musique. Une des tendances la plus médiatique de derniers mois dans le marché de la musique enregistrée est certainement l’effervescence autour du podcast. Les investissements et les initiatives se multiplient dans le domaine. La musique est le moteur du développement de la commande vocale. Elle devrait devenir une tendance lourde du marché de la musique. Ce nouveau mode de consommation est une opportunité pour l’industrie de la musique avec de nouveaux défis notamment la gestion des métadonnées afin d’optimiser la « découvrabilité » des contenus musicaux. D’après une étude du cabinet McKinsey, 70% des entreprises devraient adopter l’utilisation de l'intelligence artificielle d'ici 2030. L’industrie de la musique ne fait pas exception et on voit déjà de nombreux projets. Cela va changer la manière de créer, de partager la musique. Avec les évolutions des usages et de la technologie, les passerelles se multiplient entre ce qu'est un artiste, un musicien, un acteur, un directeur artistique, un producteur, un danseur, un réalisateur, un graphiste, la liste n’est pas exhaustive et le profil des « talents » est aujourd’hui très diversifié. Les artistes combinent et maitrisent différentes disciplines pour la création. Le cas de l’artiste français Riles en est l’exemple parfait. La définition de ce qu’est « un musicien » est multiple et la convergence des univers est un mouvement de fond qui devrait continuer à s’accentuer à l’avenir.
  • 5. 5 Remerciements La réalisation de ce travail a été possible grâce au concours de plusieurs personnes que je souhaite remercier chaleureusement : J’adresse mes remerciements aux personnes qui ont alimenté et aiguillé ma réflexion. Je remercie également Alexandre Stopnicki, Christophe Dané et Louis Duroulle ainsi que tous mes camarades de promotion pour cette belle et année passée au MBA MCI. Pour finir, je voudrais exprimer ma reconnaissance envers mes parents, ma compagne et mes amis qui m’ont apporté leur soutien moral et intellectuel.
  • 6. 6 Thèse professionnelle / Sylvain JUPINET - MBA MCI À l’heure du streaming, la musique enregistrée et le digital sont-ils enfin sur la même longueur d’ondes ? Table des matières Résumé....................................................................................................................................2 Remerciements........................................................................................................................5 Introduction ............................................................................................................................10 I - Historique de l’industrie de la musique enregistrée ...........................................................13 1 Brève histoire de l’industrie de la musique (1857 - 1995) ...............................................13 1.1 Naissance du support phonographique ...............................................................13 1.2 Développement de l’industrie...............................................................................14 1.3 L’évolution des revenus de l’industrie du disque jusque dans les années 90......18 1.4 Chronologie des supports physiques...................................................................19 1.5 Naissance du droit d’auteur/compositeur.............................................................19 2 L’historique de la dématérialisation de la musique enregistrée (1995 – 2009) ...........21 2.1 Apparition du mp3................................................................................................21 2.2 Premiers peer to peer ..........................................................................................22 2.3 Modèles download ...............................................................................................22 2.4 La popularisation du streaming............................................................................23 3 Les conséquences immédiates de la dématérialisation..............................................26 3.1 Dévalorisation de la musique auprès des consommateurs..................................26 3.2 Baisse des revenus..............................................................................................27 3.3 Chute de la production.........................................................................................27 3.4 Conséquences économiques pour l’écosystème.................................................30 3.5 L’opposition frontale entre le monde de la musique et les nouvelles pratiques digitales...........................................................................................................................31 II - Depuis le milieu des années 2010 l’industrie de la musique enregistrée se stabilise autour du streaming ..........................................................................................................................33 1 Le streaming s’impose comme moyen de consommation de la musique...................33 1.1 Le streaming c’est quoi ? .....................................................................................33
  • 7. 7 1.2 Le streaming c’est qui ? .......................................................................................35 1.3 Les chiffres...........................................................................................................41 1.4 Les raisons du succès du modèle du streaming..................................................43 1.5 Le profil du consommateur streaming..................................................................47 2 L'impact du streaming sur la consommation de musique............................................49 2.1 Le digital grâce au streaming se substitue à l’industrie physique ........................49 2.2 Le développement du streaming a permis de relayer le piratage comme un enjeu secondaire. .....................................................................................................................50 3 L'impact du streaming sur la production......................................................................52 3.1 La désacralisation de l’album...............................................................................52 3.2 L’autoproduction...................................................................................................53 3.3 Le raccourcissement des enregistrements ..........................................................56 4 - Les nouvelles problématiques soulevées par le streaming...........................................57 4.1 La consommation de musique via le streaming vidéo (Youtube) génère des revenus insuffisants en raison du « Value Gap » ...........................................................57 4.2 Un changement du mode de rémunération mal accepté par certains artistes.....59 4.3 Le problème de la fraude et des “fake streams” ..................................................63 4.4 Les métadonnées.................................................................................................65 III – Le streaming et le digital ont brisé les frontières du marché de la musique ...................68 1 Le marché de la musique ne connait plus de frontières géographiques : l’opportunité des marchés émergents.....................................................................................................68 1.1 L’Afrique...............................................................................................................69 1.2 Le Monde Arabe...................................................................................................78 1.3 L’Asie du Sud Est.................................................................................................81 1.4 La Chine...............................................................................................................85 1.5 L’Inde ...................................................................................................................88 1.6 l’Amérique Latine .................................................................................................92 2 Le streaming et le digital brisent les frontières avec le consommateur : l’opportunité de la donnée............................................................................................................................93 2.1 Les types de données que l’on retrouve dans le secteur de la musique. ............93
  • 8. 8 2.2 Ce que le streaming change dans la collecte de la data : l’analyse de la consommation.................................................................................................................94 2.4 Les outils proposés pour exploiter les data de la consommation.........................97 IV – Recommandations : les leviers de croissance offerts par le digital pour les années à venir. .............................................................................................................................................106 1 Le modèle de rémunération User Centric .................................................................106 1.1 Une initiative portée par Deezer.........................................................................106 1.2 Le fonctionnement d’un modèle User Centric....................................................107 1.3 Une redistribution plus équilibrée des revenus entre les artistes.......................107 1.4 Le modèle User Centric est un outil de lutte contre la fraude ............................108 2 La Blockchain pour répondre aux enjeux de la gestion des droits mais pas seulement… ..................................................................................................................................109 2.1 La Blockchain et les smart contracts c’est quoi ? ..............................................109 2.2 Les cas d’usage de la Blockchain et les smarts contracts.................................110 2.3 Les projets concrets autour de la Blockchain.....................................................111 3 La convergence de la musique avec d’autres univers et formats .............................112 3.1 Le Social Music, toujours plus de convergence entre musique et réseaux sociaux ...........................................................................................................................112 3.2 La convergence avec la vidéo............................................................................118 3.4 La convergence avec le live...............................................................................120 3.5 La convergence avec le Gaming........................................................................122 4 L’ascension du podcast.............................................................................................126 4.1 Qu’est-ce qu’un podcast ....................................................................................126 4.1 La consommation des podcasts.........................................................................127 4.3 Les investissements dans les podcasts explosent.............................................128 4.4 Le podcast et les producteurs de contenus musicaux : monétisation ou promotion ? ...........................................................................................................................130 4.5 L’investissement des DSP dans le domaine du podcast : des logiques multiples... ...........................................................................................................................131 5 La musique est le moteur du développement de la commande vocale ....................133
  • 9. 9 5.1 La musique est l’usage plus commun de la commande vocale.........................133 5.2 Les principaux acteurs des smarts speakers et assistants vocaux....................134 5.3 Optimiser et enrichir les métadonnées...............................................................135 5.4 La création de Skills Alexa.................................................................................135 6 L’IA une nouvelle approche de la création et de la recommandation........................137 6.1 La musique générative.......................................................................................137 6.2 Écriture assistée par IA......................................................................................138 6.3 Les outils de découverte et de curation .............................................................139 Conclusion ...........................................................................................................................141 Annexes : .............................................................................................................................142 Les applications (quasi) gratuites applications pour développer un projet musical..........142 Bibliographie ........................................................................................................................143
  • 10. 10 Introduction En 1999, j’assouvissais mon rêve d’enfant : sortir un disque avec mes copains, cela fait 20 ans cette année (la pochette est sur la droite, vous pouvez cliquer pour écouter ce disque confidentiel exhumé et mis en ligne par un « fan » d’alors). A l’époque, lever 20.000 francs (grâce aux recettes d’un concert et quelques subventions) était un petit défi en soi pour des ados de 16 ans pour payer 7 jours de studio, une séance de mastering et le pressage de 500 copies CD. Nous étions extrêmement fiers d’avoir produit cet objet. Ecouter nos créations sur ce support, sans le souffle ou le bruit des enregistrements sur cassette, était un plaisir, pouvoir passer d’une chanson à l’autre en pressant « skip » un accomplissement. En 20 ans, le désamour du CD est passé par là. La dématérialisation de la musique avec le piratage dans son sillage a fait vaciller l’industrie du disque qui a traversé un trou d’air de plusieurs années. Néanmoins en 2018 le marché de la musique enregistrée français était en croissance (faible certes) pour la quatrième année consécutive, tiré par le streaming musical représentant pour la première fois 50% des ventes. Des artistes comme Jean Jacques Goldman, dernier artiste réfractaire à l’exploitation de sa discographie en streaming, a fini par accepter la mise en ligne de ses albums en août dernier. Le streaming est devenu le chef d’orchestre du marché de la musique enregistrée. Le marché de la musique peut regrouper plusieurs domaines d’activités différents qu’il convient de distinguer. Au sens large, on peut y trouver la vente et la fabrication d’instruments de musique, l’apprentissage et la pratique musicale et l’industrie de la musique. L’industrie de la musique plus précisément se subdivise en trois grandes catégories : le marché du live (la production de concerts et la billetterie), le marché de la musique enregistrée (les maisons de disques) et l’édition musicale (la valorisation de l’œuvre). Il est parfois difficile d’établir une délimitation nette entre ces trois activités très étroitement liées. Les éditeurs de musique, par exemple, tirent la majeure partie de leurs revenus des représentations live et de la diffusion d’enregistrements. De même, les tournées participent de manière très significative à la promotion des enregistrements. Le terme « digital » (provenant de l’anglais « digit » désignant les touches des numéros sur un clavier) est synonyme de « numérique ». Il est difficile de trouver une définition éprouvée de ce terme, cependant on peut dire que le digital désigne l’ensemble des activités se fondant sur l’exploitation de flux d’informations codées en langage informatique transmis par différents types de réseaux : internet, intranet, bluetooth, wifi. Ce terme implique souvent une dimension
  • 11. 11 technologique et innovante. La relation entre le digital et la musique remonte aux années 1970 et aux recherches qui mèneront à la création du CD. Une forme plus avancée de la digitalisation de la musique étant sa dématérialisation, largement utilisée depuis la fin des années 1990. Le stade ultime de cette dématérialisation est la consommation en « streaming » (le terme anglais « stream » signifie flux en français) de la musique, avec cette technologie on peut écouter une chanson sans en posséder une copie. On accède ainsi à la musique qui est stockée sur un serveur à distance. L’année 2019 marque le vingtième anniversaire de la sulfureuse plateforme de téléchargement Napster. Cette dernière avait popularisé au tournant des années 2000 le piratage de la musique et l’échange de fichiers audio .mp3. (format qui aura 25 ans en juillet 2020), au cœur de la crise du disque. Le temps d’une génération s’est donc aujourd’hui écoulé depuis les premiers signes de la crise et cette distance nous permet de considérer cette période avec plus de perspectives aujourd’hui. Me définissant moi-même comme passionné par la musique, j’ai eu l’occasion d’envisager personnellement différents points de vue de l’écosystème de la musique enregistrée. Celui de consommateur en premier en achetant mes premières cassettes puis des disques dans les années 90, celui de consommateur moins loyal, en expérimentant le téléchargement illégal dans les années 2000 par facilité ou par soif de découverte. J’ai pu expérimenter le point de vue de l’industrie musicale en travaillant plusieurs années au sein de différentes maisons de disques entre 2005 et 2018. Enfin dans une moindre mesure, celui de musicien en assouvissant ma passion au travers de différents projets de groupes. La rencontre d’autres musiciens avec des profils plus professionnalisés ou des membres de l’écosystème permet d’entrepercevoir les problématiques d’un tel choix de carrière mais aussi leur vision plus centrée sur la pratique et la création. Cette année de formation m’a offert la liberté de prendre du recul sur un secteur pour lequel j’avais déjà un certain degré de connaissance et une passion certaine. Pour autant je n’ai pas toujours pu « explorer » et « digérer » l’ensemble de ses évolutions très rapides. J’ai voulu profiter de ce travail de recherche pour replonger dans l’industrie musicale en tant qu’apprenant, pour redécouvrir son cheminement jusqu’à l’ère digitale et investiguer la manière dont les acteurs de la musique enregistrée se sont adaptés pour tirer parti de la transformation digitale de leur environnement. Alors, à l’heure du streaming, le digital et la musique sont-ils enfin sur la même longueur d’onde ? C’est ce que semblerait suggérer les revenus du secteur avec un retour de la croissance pour la quatrième année consécutive en 2019. Ce constat général cache-t-il une
  • 12. 12 réalité plus contrastée ? Quels sont les leviers de la musique enregistrée pour tirer parti de l’environnement digital à l’avenir ? La recherche s’est d’abord fondée sur l’étude de rapports statistiques sur la consommation et son évolution. Ces rapports ont également permis d’investiguer la situation de différents territoires. L’analyse et la recherche se sont également largement fondées sur la consultation d’articles d’analystes spécialisés. Des études de cas par marché et par produit ont aussi été réalisées. La consultation d’interview et de conférences données par des professionnels du milieu (Midem, Mama Festival) ont été des sources d’information précieuses. Enfin des discussions informelles régulières avec des professionnels ont permis d’alimenter la réflexion. Les difficultés rencontrées se situent au niveau de l’analyse des chiffres qui malgré leur abondance peuvent être fragmentés. L’environnement complexe de la propriété intellectuelle est un défi pour retranscrire certains concepts. L’accès à l’information en matière de rémunération et d’innovation est un sujet sensible chez les professionnels de la musique enregistrée, s’ils se sont ouverts sans difficulté lors de conversations, ils n’ont pas souhaité être cités ou retranscrits. Afin de répondre à ces questions, nous reviendrons dans une première partie brièvement sur l’histoire de l’industrie musicale et sa construction au travers de ses supports technologiques, la structuration du marché et la naissance des droits de la propriété intellectuelle attachés à la musique. Puis nous évoquerons ensuite la dématérialisation de la musique et son impact sur le marché au cours des années 2000 notamment le développement du piratage afin de comprendre l’origine des frictions entre l’écosystème digital naissant et celui de la musique. Dans une seconde partie, nous verrons comment le marché de la musique enregistrée s’est stabilisé autour du streaming. Nous étudierons l’incidence de ce nouveau modèle à la fois sur la consommation et sur la production. Nous verrons enfin quelles nouvelles problématiques sont soulevées par le streaming musical. Dans une troisième partie nous verrons comment le digital et le streaming ont brisés les frontières géographiques du marché ainsi que celles de la connaissance client grâce à la donnée. Enfin dans une dernière partie, nous recommanderons les tendances de l’écosystème digital à suivre, et comment elles peuvent représenter des leviers de croissance dans les années à venir.
  • 13. 13 I - Historique de l’industrie de la musique enregistrée 1 Brève histoire de l’industrie de la musique (1857 - 1995) On peut retracer la genèse de l’industrie de la musique d’une part à partir de l’invention des premiers appareils capables d’enregistrer puis de restituer l’onde sonore, d’abord sous forme graphique puis plus tard acoustiquement. Le second pilier de l’industrie concerne les supports utilisés pour véhiculer le contenu enregistré et leur évolution. Enfin le dernier pilier de la genèse du music business est la naissance des droits liés à la reproduction mécanique des enregistrements et ceux liés à la reproduction des œuvres représentée. 1.1 Naissance du support phonographique 1857 : le phonotaugraphe L‘inventeur français Édouard-Léon Scott de Martinville brevète le phonotaugraphe. 20 ans avant le phonographe d’EDISON et 30 ans avant le gramophone de BERLINER. Cet appareil permet est le à transcrire un son en une représentation graphique, et est à ce titre le premier enregistreur sonore. Son intérêt reste limité cependant puisqu’il permet uniquement de représenter le son sur une feuille de papier sans pouvoir le reproduire acoustiquement. Il aura néanmoins un impact important pour les travaux menant à l’invention du gramophone de BERLINER1 . 1877 : le phonographe Thomas EDISON, notamment célèbre aujourd’hui pour ses nombreux brevets (10932 brevet), est l’inventeur du phonographe en 1877. L’appareil permet d’enregistrer et reproduire du son au moyen d’une aiguille servant à la fois à graver le signal sur des cylindres métalliques (puis plus tard en cire) à l’enregistrement puis de le lire et le restituer par un 1 https://gramophone.fr/histoire/le-phonautographe/ 2 Greg Linder « Thomas Edison », Capstone, p. 5. url : https://bit.ly/2lYPoWO Gravure représentant le phonautographe de Scott de Martinville Gravure anonyme extraite du Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, en 15 volumes (1868-1877) et 2 volumes de suppléments (1878-1888) de Pierre Larousse Ponographe d’Edison, photo prise au Vendsyssel historiske Museum (Hjørring, Danemark) en 2004 par Tomasz Sienicki.
  • 14. 14 processus mécanique inverse3 . Le phonographe a fini par s’effacer face au gramophone ayant alors misé avec succès sur le disque. 1887 : Le gramophone L’Allemand Emile Berliner travaillant alors aux Etats-Unis pour l’entreprise Bell (investie notamment dans le développement du téléphone) invente en 1887 le disque horizontal et l’adapte au phonographe pour mettre au point son gramophone. L‘utilisation du disque est la principale évolution apportée par Berliner par rapport au phonographe d’Edison. En 1893, il crée le procédé (galvanoplastie) grâce auquel il est possible de répliquer les disques et donc les enregistrements en série. Le disque et le cylindre deviennent deux supports concurrents sur le marché encore naissant des enregistrements audio. Le disque et le gramophone finiront par l’emporter mais les termes phonographe et phonogramme eux resteront. 1.2 Développement de l’industrie Le phonographe était à l’origine destiné à la reproduction de la parole à des fins thérapeutiques (rééducation des malentendants et des bègues), administratives, d’archivage patrimonial (enregistrement de discours politiques) ou encore la production de livres audio pour les malvoyants. La musique n’arrive qu’en fin de liste des applications envisagées4 . Ces utilisations restent très spécialisées et ne constituent pas des opportunités suffisantes. Le phonographe va se rapprocher du grand public et de l’univers des loisirs par l’intermédiaire de machine payante (sorte de Juke box) permettant de jouer de la musique dans des espaces publics (cafés concert, Music hall). On en trouve au Moulin Rouge dès 1893 notamment ou dans les fêtes foraines où des appareils sont loués par la société des frères Pathé. La naissance de débouchés commerciaux engendre la structuration du marché. En 1878, Edison fonde sa compagnie Speaking Phonograph Company, Les cousins Alexander et Chichester Bell avec Charles Summer Tainter créent de leur côté l'American Graphophone Company qui sera acquise en 1893 par la Columbia Phonograph Company (dans laquelle elle se fondra définitivement en 19065 . Edison, après avoir perfectionné le phonographe crée la 3 https://gramophone.fr/histoire/le-phonautographe/ 4 Tournès, Ludovic. Du phonographe au MP3. Une histoire de la musique enregistrée XIXe-XXIe siècle. Autrement, 2008 5 https://www.collectionscanada.gc.ca/gramophone/028011-3009-f.html Gramophone
  • 15. 15 North American Phonograph Company et lance le premier appareil à destination du grand public. Emile Berliner crée la Berliner Gramophone Company en 1895 dont des filiales sont ouvertes en Europe en 1898. En France, en 1895, Lioret (horloger de profession) crée sa société afin de vendre son Lioretograph, ses qualités d’horloger lui permettent de miniaturiser ses appareils afin d’intégrer des enregistrements sonores à des poupées, automates ou même des objets publicitaires (Kiosque pour les chocolats Meunier). En 1897, les frères Pathé (dont l’un a travaillé pour Lioret) créent la Compagnie Générale des Cinématographes, Phonographes et Pellicules. A partir de 1900, Pathé domine le marché français. Le moulage fait son apparition au début du 20e siècle et permet la production des cylindres en série des cylindres. Auparavant, les artistes devaient jouer pour chaque cylindre produit. Les disques étaient affranchis dès le départ de cette question grâce au procédé de reproduction mis au point par Berliner. Au début du XXème siècle, les deux supports cohabitent cependant, mais le disque 78 tours supplante finalement le cylindre au cours des années 10, notamment grâce à sa facilité de classement, sa qualité de restitution supérieure, sa meilleure résistance à l’usage et une meilleure conservation. La guerre va catalyser le développement de l’industrie du disque notamment par l’intermédiaire de la propagande gourmande en supports musicaux. Celle-ci utilise les chansons comme canal privilégié et les diffuse à la radio (nouveau media de masse). La guerre rebat les cartes du marché avec une industrie américaine au plus haut, affranchie de la production européenne qui sort elle-même affaiblie par la guerre (réquisition d’usines dans l’économie de guerre, mobilisation des troupes). A la fin de la guerre l’industrie américaine est multipliée par 4 (avec 2 millions de disques produits par an) si on la compare à son niveau de 1914. En 1920, 100 millions de disques sont vendus. Dans les années 20, l’introduction de l’enregistrement électrique par l’intermédiaire du microphone va stimuler le secteur qui va poursuivre son ascension (150 millions de disques vendus aux USA en 1929, 30 millions en Allemagne et 10 millions en France) et s’étendre à de nouveaux marchés importants, l’Argentine et le Brésil. PATHE ne profitera pas de cet engouement, payant le prix de son choix du cylindre et son retard technologique sur l’enregistrement électrique. Malgré des tentatives pour rattraper son retard, la société passera sous le contrôle de Columbia en 1928.
  • 16. 16 La crise de 1929 va néanmoins mettre un coup d’arrêt au marché qui, en France comme aux Etats-Unis, chute de 90% entre 1929 et le début des années 30. Cette trajectoire est suivie par la plupart de territoires. A la fin de la crise, le marché se stabilise autour de trois grandes maisons : - EMI : Electrical Music Industries qui est la réunion de la branche européenne de Columbia et Gramophone / His Master’s Voice en 1931 - RCA-Victor : RCA prend le contrôle de Victor en 1929 - CBS : Columbia Broadcasting System L’après-guerre (2e guerre mondiale) On assiste à l’arrivée d’une évolution majeure pour le marché de la musique enregistrée : l’arrivée du disque microsillon 33 tours (vinyles) en 1948 par CBS. Celui-ci possède trois avantages fondamentaux pouvant expliquer son succès : il est moins cher à produire, le matériau vinyle offre un confort d’écoute supérieure (moins de bruits de surface) et il permet d’étendre la durée d’écoute de 4 à 20 minutes. De son côté RCA développe le format 45 tours dont la qualité est meilleure mais ne procure pas de gain de durée. Les deux formats cohabiteront finalement en se partageant les albums (33 tours) et les singles (45 tours). Ces innovations technologiques combinées à la croissance démographique du Baby Boom, le développement de la « civilisation des loisirs » décrite par le sociologue Joffre Dumazedier en 1962, l’avènement de la consommation et des media de masse (TV, Radio) ont permis à la musique enregistrée de croître à une cadence de +10 à +20% par an6 dans les années 50 et 60. Ainsi entre 1946 et 1973, la production de vinyle est multipliée par 2,5 aux USA, triplée au Royaume-Uni, quadruplée en Allemagne et quintuplée en France. En 1975, 1,5 milliard de disques sont vendus, en 1978 ce chiffre passe à 2 milliards. Dans le même temps, Philips développe sa cassette compacte, en 1963 celle-ci prendra son envol avec la mise au point et la commercialisation du Walkman en 1979. La promesse de la mobilité de la musique séduit déjà, et la cassette dépasse le vinyle en nombre de ventes et en revenus aux Etats-Unis en 1984. Les années 80 voient la naissance d’une nouvelle évolution majeure pour l’industrie de la musique enregistrée avec le lancement du CD. Le CD est développé en coopération entre Philips et Sony (jusqu’ici uniquement investi dans le développement d’appareils). Il fait entrer la musique enregistrée dans l’ère du numérique. Le CD permet une réduction des bruits parasites, l’adaptation du support musical aux nouvelles techniques d’enregistrement et offre
  • 17. 17 des fonctionnalités d’écoute plus confortables : saut rapide d’une chanson à l’autre, avance, retour, lecture aléatoire, lecture en boucle, programmation. Ce nouveau format redynamise le marché et les ventes repartent de nouveau à la hausse. A la fin des années 80, cinq grands groupes détiennent les 75% du marché : Sony Music, BMG (Berthelsman Music Group), EMI, Polygram et Warner Music. Au cours des années 90, les ventes de CD ne font qu'augmenter années après années : − 3,2 milliards d'albums vendus en 94 − 3,6 milliards en 1998. Le CD a propulsé les revenus de la musique enregistrée aux Etats-Unis, les volumes de ventes tous formats confondus ont été multipliés par deux. https://www.riaa.com/u-s-sales-database/
  • 18. 18 1.3 L’évolution des revenus de l’industrie du disque jusque dans les années 90 Source : Snep Curien, Nicolas. « V. Nouveaux modèles économiques », Nicolas Curien éd., L’industrie du disque. La Découverte, 2006, pp. 73-91.
  • 19. 19 1.4 Chronologie des supports physiques RIBAUD, Vincent, La restauration des archives sonores, Mémoire de fin d'études - Section SON, ENS Louis Lumière, 2009, p. 17. 1.5 Naissance du droit d’auteur/compositeur Sous l’ancien régime, la plupart des artistes tire leurs revenus du financement des mécènes. qui leur permettent de vivre. L’idée de mettre en place un statut particulier pour les créateurs arrivera avec la révolution. On envisage l’art comme un travail et non comme une activité bénévole. En Angleterre, Le Copyright Act de 1710 ou « Statute of Anne », d’après le nom de la reine de l’époque, consacre à l’auteur le droit exclusif de l’imprimer à nouveau pendant une durée de 14 ans renouvelable7 . En France, c’est l’auteur Beaumarchais, connu pour ses œuvres comme le Barbier de Séville et les Noces de Figaro, qui a été un des moteurs de la reconnaissance et de la conquête du droit d’auteur. C’est suite à son conflit avec la Comédie Française - à qui il reproche de représenter ses œuvres sans y avoir consenti et sans être rémunéré en retour alors que les artistes (acteurs, décorateurs, costumières etc.) participant à la production du spectacle eux l’étaient - qu’il convainc d’autres auteurs de ne plus livrer leurs pièces à la troupe. Avec les auteur ralliés à sa cause, Beaumarchais de constitue en 1777 « le bureau de Législation Dramatique » qui se rebaptisera en 1829 Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD). La Révolution Française et l’abolition de tous les privilèges mettra en suspend la reconnaissance du droit d’auteur et il faudra attendre les lois des 13 et 19 janvier 1791 pour que le droit évolue dans ce sens. Ces lois accordent aux auteurs 7 Christophe Geiger 1710-2010 : Quel bilan pour le droit d'auteur ? L'influence de la loi britannique de la Reine Anne en France (article, Revue internationale de droit comparé Année 2011 p. 59
  • 20. 20 le contrôle exclusif sur la reproduction de leurs œuvres. C’est la première fois que l’Assemblée Nationale reconnaît le droit de représentation ainsi que le droit d’auteur tant d’un point de vue : • moral : paternité de l’œuvre et respect de son intégrité8 que • patrimonial : monopole de l’exploitation de l’œuvre pour leur vie entière et pour leurs héritiers 10 ans après leur mort9 . Cette durée est étendue en France à 50 ans en 186610 et 70 ans en 199711 . Le décret du 19 Juillet 1793 définit le droit d’auteur en incluant dans son périmètre les auteurs de musique alors qu’il ne s’adressait qu’aux auteurs dramatiques jusque-là. En France, l’étape fondatrice pour le droit des auteurs et des créateurs de musique est « l’affaire » du Café des Ambassadeurs. En 1847, L'auteur Ernest Bourget accompagné des compositeurs Victor Parizot et Paul Henrion, refuse de payer l’addition au Café des Ambassadeurs (un café-concert en vue de l’époque) auquel il reproche de représenter son œuvre sans le rémunérer. Les tribunaux lui donnent raison et lui reconnaisse le droit invoqué en vertu des textes révolutionnaires. Le syndicat provisoire des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique se constitue en 1850, puis l’année suivante l’organisation devient une société civile composée de sociétaires : auteurs, compositeurs et éditeurs se partageant les droits perçus de façon égalitaire, cette règle perdurant encore aujourd’hui. C’est la naissance de la Sacem, première organisation de ce genre au monde. Des sociétés de collecte de droits d’auteurs dédiées au monde de la musique se constituent ailleurs dans le monde. Ces sociétés « sœurs » nouent des accords entre elles afin de collecter et de se redistribuer mutuellement les droits des artistes et éditeurs par lesquels elles sont mandatées. 1882 : création de la SIAE (Società Italiana, degli Autori ed Editori) en Italie12 1890 : création de la SAE (Sociedad de Autores Españoles) qui se renommera la SGAE (Sociedad General de Autores y Editores) en 193213 8 M. Michel Thiollière, rapport législatif : Projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, Partie IV. Les débats de la période révolutionnaire : droit d'auteur et domaine public. fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 12 avril 2006. https://www.senat.fr/rap/l05-308/l05- 3084.html 9 Jean Baptiste Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements et avis du Conseil d’Etat, Volume 6. Editions Officielles du Louvre ; de l’imprimerie nationaleet du bulletin des lois. p. 35. 10 Loi du 14 Juillet 1866 11 Loi du 27 mars 1997 (transposition de la directive européenne du 29 octobre 1993) 12 https://www.siae.it/en/about-us/siae/siae-and-its-history 13 http://www.sgae.es/en-EN/SitePages/corp-historia.aspx
  • 21. 21 1913 : création de la Buma (Bureau voor Muziekauteursrecht) au Pay-Bas14 1914 : création de la PRS (Performing rights Society) au Royaume Uni15 1914 : création de l’ASCAP (American Society of Composers, Authors and Publishers) aux Etats Unis16 1922 création de la Sabam (c'est la société belge des auteurs, compositeurs et éditeurs) en Belgique.17 1923 : création de la SUISA en Suisse18 1925 : création de la SPA (Sociedade Portuguesa De Autores) au Portugal19 1933 : création de la GEMA (Gesellschaft für musikalische Aufführungs - und mechanische Vervielfältigungsrechte) en Allemagne20 2 L’historique de la dématérialisation de la musique enregistrée (1995 – 2009) Après avoir retracé les origines et la construction de la musique, il est nécessaire de présenter une brève rétrospective de la dématérialisation (et non la digitalisation puisque le CD était déjà un format numérique) du marché de la musique enregistrée que nous situerons il y a 25 ans, avec comme point de départ avec la naissance du format MP3. 2.1 Apparition du mp3 1995 : Apparition du MP3 Le MP3 est un format de compression avec perte ayant vu le jour en 1995. Il est le fruit d’un projet soutenu par l’Union Européenne. Afin de mener cette initiative, des chercheurs ont été réunis au sein du Motion Picture Expert Group (MPEG) par l’organisation internationale de normalisation réalisant les normes ISO. Afin de réduire le volume des données nécessaires à la restitution d’un son donné, ce format de codage audio va éliminer les fréquences non audibles et non détectables par le système de perception de l’être humain. Ainsi le mp3 permet de diviser par 10 le poids d’une chanson par rapport à son équivalent sur Compact Disc (CD). Le format mp3 a connu un développement accéléré d’abord grâce la mise à disposition d’une 14 https://www.bumastemra.nl/en/faq/history/ 15 https://www.prsformusic.com/about-us/history 16 https://www.britannica.com/topic/ASCAP 17 https://www.sabam.be/fr/la-sabam/qui-sommes-nous 18 https://www.suisa.ch/fr/suisa.html 19 https://www.spautores.pt/spa/quem-somos 20 https://en.wikipedia.org/wiki/GEMA_(German_organization)
  • 22. 22 version « hackée » (piratée) gratuite du logiciel d’encodage au format .mp3 “L3enc” développé à l’origine par l’Institut Fraunhoffer (détenteurs des brevets majeurs du format jusqu’à ce que ceux-ci expirent en 2017) puis par l’inclusion de ce format d’encodage dans les produits Microsoft et Apple. Le MP3 permit alors le développement du partage des fichiers audio et la création de “bibliothèques dédiées”. Il ne manquait plus qu’à les interconnecter, c’est là que Napster entre en scène. 2.2 Premiers peer to peer 1999 : Napster - Naissance des premiers services de peer to peer dédié à la musique Napster a été fondé par les jeunes étudiants américains Shawn Fanning et son ami Sean Parker. En l’espace de 2 ans, la plateforme connaîtra une ascension fulgurante avec 80 millions d’utilisateurs enregistrés à son apogée. Si ce n’est pas la première plateforme permettant l’échange de fichiers, elle est la première dédiée aux mp3 et elle se distingue par la convivialité de son interface permettant la recherche et l’échange entre utilisateurs à grande échelle. Napster s’appuie alors sur le “Audio Home Recording Act” de 1992 permettant aux citoyens américains d’enregistrer et partager de la musique en l’absence d’exploitation commerciale (loi sur le droit à la copie privée). Le succès est tel qu’il provoque l’ire de mastodontes de l’industrie musicale tels que Metallica qui n’hésite pas à monter au créneau aussi bien médiatiquement que sur le plan judiciaire réclamant 10 millions de dollars de compensation à la plateforme. Napster fait également l’objet de poursuites de la part des majors du disque et la RIAA (Recording Industry Association of America) et est finalement condamné à fermer en Juillet 2001. Napster a néanmoins ouvert la porte aux poids lourds du piratage tels que Kazaa, Edonkey (Emule en France), Bit Torrent, WinMX, Limewire, Soulseek pour reprendre quelques noms exotiques des années 2000, et le marché de la musique enregistrée est ébranlé durablement. 2.3 Modèle download 2001 : Lancement de l’ipod Apple lance son Ipod le 23 Octobre 2001, Steve jobs justifie le positionnement sur le marché par le fait que la musique est un élément de la vie de chacun, il s'agit donc d’un marché adressable très large à fort potentiel. L’expertise d’Apple dans le design d’appareils technologiques innovants et soignés, son savoir-faire en matière de logiciels afin d’accompagner le produit et enfin l’absence de leadership sur le marché aussi bien du côté des poids lourds (Sony) que du côté des acteurs en dévelopement (Creative) sont autant
  • 23. 23 d’atouts pour se positionner. Le lancement de l’ipod est accompagné de celui de la seconde version d’Itunes. L’ipod est alors capable d’embarquer 1000 chansons sur son disque de 5Go (giga octets) pouvant être rempli en dix minutes grâce à sa connectique Firewire. Le coût d’emport d’une chanson (calculé par le rapport entre le prix moyen de l’appareil et sa capacité de stockage est de l’ordre de 30 cents par morceau contre 5$ pour un baladeur CD, 5$ pour un lecteur mp3 Flash et 1$ pour un lecteur CD mp3. On notera quand même qu’Apple et les autres constructeurs ont développé et commercialisé des appareils avec une capacité d’emport très élevée par rapport au standard de l’époque avant même l’existence d’un modèle de distribution légale des contenus. 2003 : Itunes store et les solutions de téléchargement légal Le développement exponentiel du mp3 et l’investissement des fabricants pour fournir des appareils pour le lire sont autant de signes confirmant l’urgence pour l’industrie musicale de réagir. Faute d’entente conjointe pour proposer un service commun, les 5 Majors de l’époque partent en ordre dispersé avec Sony et Universal d’un côté et leur service “Pressplay” et de l’autre AOL Time Warner, EMI et BMG avec leur service “MusicNet”. Les deux camps ne trouveront pas d’accord sur l’exploitation mutuelle de leurs catalogues. Cette stratégie sera évidemment un échec. Face à cette situation Steve Jobs décide de lancer Apple sur ce marché, il trouvera un accord avec les cinq majors en 2002 et l’Itunes Store (Itunes Music Store au départ) ouvre le 28 avril 2003 aux États-Unis puis le 15 juin 2004 en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. Suivront ensuite les autres pays européens, le Canada, le Japon et l’Australie entre l’été 2004 et l’automne 2005. C’est alors la première solution de téléchargement légale mise sur le marché. Lors de son lancement en 2003 Itunes a vendu plus d’un million de chansons en cinq jours. Certes, loin de compenser les pertes des ventes physiques (au lancement en 2003, un titre est vendu 99 cents et un album 9,99 $ - auxquels il faut retrancher 30% de commission pour Apple), ces résultats encouragent malgré tout, les professionnels du secteur à croire à une solution consistante à ce moment-là. 2.4 La popularisation du streaming 2005 : Lancement de Youtube Le site Youtube est fondé en février 2005 par trois anciens de la société PayPal : Steve Chen, Chad Hurley et Jawed Karim, il s’agit d’un hébergeur de video avec une dimension sociale importante grâce à ses fonctions de partage et de commentaires. Google acquiert Youtube au mois d’octobre 2006 au prix de 1,65 milliard de dollars. La version mobile est lancée en 2007. En 2017 Le streaming video comptait pour plus de la moitié (55%) du temps passé à écouter de la musique. En juin 2019, sur les dix videos ayant généré le plus
  • 24. 24 de vues depuis la création de la plateforme, neuf étaient des clips musicaux soit 90% des vues. Cela donne une idée du poids écrasant de la musique dans l’audience de Youtube. https://www.ifpi.org/downloads/MCIR_French.pdf https://www.statista.com/statistics/249396/top-youtube-videos-views/ 2006 - 2008 : Les premières plateformes de streaming musical Deezer, Spotify. Au milieu des années 2000 une nouvelle génération de sites préfigure le passage d’une ère de la possession à celle de l’accessibilité des œuvres musicales. RadioBlog, Blogmusik.net (qui deviendra par la suite Deezer) offrent une alternative au modèle de téléchargement en proposant d’écouter les œuvres sans pour autant les télécharger. BlogMusik est rapidement fermé afin de pouvoir se mettre en conformité avec la loi, au travers d’un accord avec la Sacem, avant de rouvrir sous le nom de Deezer en 2007. Spotify est lancé auprès du public en 2008, suivront ensuite Qobuz, Tidal, Napster (passé sous le contrôle de Rapshody), Apple Music en 2015, Amazon Music Unlimited en 2017 et Youtube lance Youtube Music, son service de streaming musical par abonnement en 2018. Le marché mondial de la musique enregistrée pesait 19,1 milliards de dollars en 2018 et le streaming en était la première source de revenus 47%. Aux Etats-Unis, la part des revenus du streaming s’élevait à 75%, en France elle s’établit à plus de 50%. (Bilan 2018 du marché de la musique enregistrée - SNEP) Juin 2007 : Lancement de l'Iphone. L'Iphone, lancé le 29 Juin 2007, combine un smartphone, un Ipod et l'accès direct à l'Itunes Store. La réponse de la concurrence viendra plus d’un an plus tard avec le lancement du premier téléphone Android (HTC Dream) le 22 Octobre 2008 aux Etats-Unis et le 12 mars 2009 en France.
  • 25. 25
  • 26. 26 3 Les conséquences immédiates de la dématérialisation 3.1 Dévalorisation de la musique auprès des consommateurs La disponibilité des catalogues gratuitement via le téléchargement illégal a amoindri la valeur que les consommateurs apportaient à l’objet musical. « Au cours de cette période 2003-2010, la filière musicale a connu une série d’évènements majeurs concourant à une dévalorisation de son marché. Le développement des usages sur Internet et plus précisément, l’intrusion du pair à pair dans l’univers de l’’internet, a fragilisé les conditions mêmes d’exploitation du secteur de la production phonographique.(…) Cette mutation vers un marché numérique a été très déstabilisante pour la filière musicale (…) La crise qui s’en est suivie est devenue ‘quasi identitaire au point de créer une grande "controverse" (…) Enfin, cette controverse a été à l’origine du divorce patent de la filière avec des millions d’usagers de l’Internet qui se sont accaparés gratuitement des catalogues, à l’appui de nouveaux services, au point d’apparaitre comme les nouveaux prédateurs de l’univers musical. » Nicolas, André. « L’évolution des marchés de la musique en France de 2003 à 2010 », Gilles Pierret éd., Musique en bibliothèque. Éditions du Cercle de la Librairie, 2012, pp. 79-100 Entre 2003 et 2007, le prix moyen du disque a baissé de 16 % alors qu’à l’exception de la presse, les prix de tous les autres biens culturels ont augmenté. Cette engrenage déflationniste consécutif au piratage est le signe de la dévalorisation de l’objet musical au cours des années 2000. L’Économie de la production musicale 2009 - Rapport du SNEP Evolution de l’indice des prix des biens culturels entre 1990 et 2007 (base 100 en 1990) Source : Rapport L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP
  • 27. 27 Cette perte de valeur dans l’esprit du consommateur et le développement du piratage ont fait chuter les volumes de ventes. Cet engrenage a conduit à une baisse du prix moyen des supports musicaux faisant d’autant plus baisser les revenus de la filière. 3.2 Baisse des revenus Entre 2002 et 2008 (date de lancement de Spotify et Deezer les deux pionniers du streaming musical), le marché de la musique enregistrée a perdu la moitié de ses revenus (-53%). Si on étudie l’évolution entre 2002 et 2015 (l’année la plus faible en termes de revenus depuis la crise – à 543 million d’euros, on tombe à -58% soit une division par 2,4. Cette chute des revenus a eu une conséquence directe évidente sur la production. 3.3 Chute de la production Avec la crise, la baisse des revenus et l’incertitude face à l’avenir, les maisons de disques ont choisi de prendre moins de risques en se recentrant sur des projets à la rentabilité plus prévisible. Cette morosité du marché et ce recentrage se sont matérialisés par une chute des nouvelles signatures ainsi qu’une hausse du nombre des contrats rendus. « Devant l'impossibilité de produire des artistes sur le long terme ou de prendre le risque d'en signer de nouveaux, les maisons de disques ont dû limiter leur offre. Les majors ont ainsi dû se restreindre et se concentrer sur des artistes vus comme des valeurs sûres et focaliser
  • 28. 28 ainsi leurs investissemens sur ces derniers qui sont bien plus rentables que de nouvelles signatures. »21 Gilles Parienté, strategy manager chez EMI Music, déclarait en 2010 : « le fait que les compagnies de musique coupent dans leur roster, oui, c’est une conséquence directe de la crise, clairement. Alors tu peux dire qu’elles sont frileuses, qu’elles investissent moins, etc., mais si tu as des revenus moins importants, tu vas essayer d’avoir des artistes plus marketables’ ou qui trouveront une audience plus large et tu vas prendre moins de risques, c’est évident » Source : Emilien MOYON - Le changement du business model de l’entreprise : Une étude des majors de l’industrie phonographique (1998-2008) - Thèse pour l’obtention du doctorat en Sciences de Gestion présentée et soutenue publiquement le 24 octobre 2011 Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP 21 Faculté des Sciences Economiques, Sociales et de Gestion - Institut Rémois de Gestion Maxime Varloteaux, L'industrie musicale : crise ou révolution ? Impact des nouveaux modes de consommation de la musique. - Master 1 Management, Université de Reims Champagne Ardenne
  • 29. 29 Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP Conséquence de la morosité du marché : en France, le volume d’albums produits et commercialisés s’est effondré de 2002 à 2008, celui-ci a en effet été divisé par 2,5. Source : Rapport "L’Économie de la production musicale 2009" du SNEP Sur une tendance encore plus exacerbée, la production de singles en France s’est quasiment éteinte avec des volumes divisés par 5 de 2002 à 2003
  • 30. 30 Dans le sillage de la chute des revenus et de la production, l’écosystème global sera impacté. 3.4 Conséquences économiques pour l’écosystème La musique intéresse de moins en moins les géants de la distribution et pour preuve : • En 2009, La FNAC (75 magasins en France) annonçait un plan de développement de ventes de produits dérivés, jeux vidéo d’occasion, photo, hi-fi. Les linéaires de ces nouvelles activités fleurissent pendant que les linéaires de disques se réduisent. • Par ailleurs, la FNAC et Virgin Mégastore se voient dans l’obligation de fermer des magasins. Pour la FNAC, fermeture du magasin de la Bastille, suppression de 168 postes, pour Virgin Megastore, les 6 derniers magasins des Etats-Unis ont fermé au cours de l’été 2009. • Les grandes surfaces alimentaires, elles aussi, boudent les disques longtemps considérés comme un produit d’appel. • Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le chiffre d’affaires des maisons de disques réalisé avec les grandes surfaces alimentaires a chuté de 70 % entre 2002 et 2008 passant de 733 millions d’euros en 2002 à 218 millions d’euros en 2008 (à comparer à une évolution globale de -60% du marché physique pour cette période). • Ceci n’est pas sans conséquence pour les maisons de disques. Les effectifs ont été réduits de moitié, ce qui a entrainé également des pertes d’emplois indirects (personnel de studio, graphistes etc…)
  • 31. 31 L’ampleur de la crise est prise très au sérieux par l’industrie dès le tournant des années 2000 et celle-ci part à l’offensive. 3.5 L’opposition frontale entre le monde de la musique et les nouvelles pratiques digitales Face aux difficultés importantes qu’elle rencontre dans les années 2000, l’industrie musicale adopte une stratégie frontale à l’égard de la piraterie dans la droite ligne du « hometaping is killing music » prôné par la campagne de l’industrie du disque britannique au début des années 80. La riposte s’organise donc au travers d’actions en justice, de campagnes menaçantes pour les utilisateurs de services de piratage et de mesures de protection pour ne pas dire de verrouillage des supports musicaux. • Les procès intentés aux services de dépôt de fichiers et aux services peer-to- peer : dès 1999, les cinq majors de l’époque (EMI, Sony, BMG, Universal et Warner) attaquent en justice Napster par l’intermédiaire de la RIAA et obtiennent sa fermeture en Juillet 2001. De la même manière, le site mp3.com a été assigné par chacun des majors, l’obligeant à payer entre 20 et 53 millions à chacun des plaignants afin de régulariser l’utilisation de leurs catalogues. Du côté des artistes, des actions coercitives ont également été entreprises, ainsi Metallica et Dr. Dre ont chacun poursuivi Napster. • Les procès à l’encontre des particuliers : le second étage de cette riposte s’est concrétisé par une campagne de procès intentés aux particuliers ayant recours au téléchargement illégal. La RIAA assigne ainsi plus de 6000 personnes entre 2003 et 200422 . Certains de ces cas se soldent par des amendes record impossibles à régler pour les condamnés, parfois plusieurs centaines de milliers de dollars (675 000 cas Sony BMG Music Entertainment vs. Tenenbaum). En France, des actions en justice à l’encontre des particuliers sont également entreprises, à l’image de celle intentée contre ’Anne- Sophie Lainnemé, coupable d’avoir téléchargé quelques 1647 titres illégalement. Cependant les condamnations sont moindres, dans le cas d’Anne- Sophie Lainnemé, on parle de 1200 euros d’amende 22 https://www.eff.org/fr/wp/riaa-v-people-five-years-later#footnote50_chxwwmu
  • 32. 32 (avec sursis) et 2225 euros de dommages et intérêts à la SCPP et à la SPPF ainsi que la confiscation de son matériel23 . • Les mesures techniques restrictives : Parallèlement à la stratégie de répression, l’industrie a mis en place des verrous technologiques censés protéger les supports contre les copies et les partages illégaux. Le système Opendisc par exemple devait permettre de lire un CD sur un ordinateur personnel via un lecteur multimedia intégré. Cependant ce dispositif pouvait rencontrer des problèmes de compatibilité avec certains appareils et entraînait des difficultés d’utilisation, la rendant même parfois impossible. Suivant une logique similaire, les fichiers vendus en téléchargement légal étaient limités par leurs données DRM (Digital Rights Manahgement). Ainsi leur utilisation était restreinte à certains appareils et le nombre de copies possibles était également bridé. Ces systèmes ont rendu l’expérience musicale fastidieuse voire agaçante dans certaines situations. Itunes a fini par abandonner les DRM au printemps 2009. • Des campagnes menaçantes : En France, Le SNEP a lancé en 2004 une campagne plutôt agressive, présentant un doigt d’honneur ainsi que les sanctions maximum associées à la violation de la propriété intellectuelle. La Loi Hadopi, permettant également de communiquer des adresses IP des internautes soupçonnés de piratage, était un signal supplémentaire de menace à l’encontre des internautes, avec sa riposte graduée et la suppression de la connexion internet en cas de récidive. Dans les années 2000, l’industrie musicale attaque donc sur tous les fronts. Sur le front judiciaire, d’abord à l’encontre des sites internet permettant de partager la musique sans contrepartie, puis de leurs utilisateurs en obtenant des condamnations « inassumables » pour ces derniers ; sur le front technique, quitte à irriter les consommateurs en règle avec des dispositifs contraignants, et enfin sur le front de la communication avec des campagnes parfois provocantes. L’industrie musicale met également régulièrement en cause les fournisseurs d’accès à internet, qu’elle accuse de développer des offres haut débits sur le dos des ayant- droits, ces dernières permettant le téléchargement massif. On peut dire que ces différentes actions ont achevé d’entériner le divorce entre l’industrie de la musique et le reste du monde 23 https://www.liberation.fr/medias/2006/11/30/anne-sophie-lainneme-condamnee-pour-telechargement- illegal_5291
  • 33. 33 II - Depuis le milieu des années 2010 l’industrie de la musique enregistrée se stabilise autour du streaming 1 Le streaming s’impose comme moyen de consommation de la musique 1.1 Le streaming c’est quoi ? Tout d’abord il faut distinguer différents modèles streaming : Le streaming interactif payant : Spotify Premium, Deezer Premium, Apple Music, Napster. Le streaming interactif gratuit (ou freemium) Spotify, Deezer, YouTube. Le streaming non-interactif : Web radios (Pandora, IHeartRadio). Nous nous intéresserons ici au streaming interactif qui est le modèle le plus populaire aujourd’hui.
  • 34. 34 Avec le streaming musical, le modèle de la consommation évolue fondamentalement puisque l’on passe d’un modèle de la possession à celui de l’accès. En effet, avec les plateformes de streaming, le consommateur ne détient plus une copie de l’enregistrement qu’il écoute, il y accède via son abonnement (gratuit ou payant). La consommation de musique passe du retail (la vente au détail) à l’univers du service. Avec ce type de service, un utilisateur peut écouter de la musique à la demande parmi l’ensemble des titres disponibles dans la bibliothèque de la plateforme. L’utilisateur a traditionnellement le choix entre un service freemium (gratuit) financé par la publicité et un service premium payant avec un prix de l’ordre de 10 euros par mois en Europe ; néanmoins le prix de l’abonnement est adapté selon les territoires : par exemple en Inde où la compagnie suédoise s’est lancée en février 201924 , le même abonnement premium ne coûte « que » 1,5 euros environ (119 roupies). Comment cela fonctionne-t-il ? Techniquement : les internautes écoutent la musique « à la demande » via un flux délivré par la plateforme (Spotify, Deezer, Amazon Music Unlimited, Apple Music …) qu’ils utilisent. Ce n’est plus le consommateur qui détient les copies ou les fichiers mais la plateforme qui stocke et centralise les contenus qu’elle met à disposition de ses utilisateurs grâce à une connexion internet. L’accès se fait par l’intermédiaire d’un site internet (Deezer par exemple), d’une application dédiée (Spotify, Apple Music) ou d’une application mobile, ce qui est le cas d’usage le plus fréquent aujourd’hui (en 2017, 6 utilisateurs sur 10 utilisaient exclusivement le mobile pour visiter un service de streaming. Source : Médiamétrie25 ) Economiquement : pour pouvoir opérer légalement et utiliser les catalogues qu’il propose, un service de streaming doit reverser pour chaque écoute une rémunération afin de payer les différents droits (droits d’auteurs, droits voisins du producteur) qu’il exploite. La source de cette rémunération provient de modèles d’abonnements proposés au choix : • L’abonnement premium versé par l’utilisateur en échange d’un accès illimité au service et sans publicité, ainsi que des fonctionnalités avancées comme l’écoute hors ligne. • L’abonnement freemium, financé par la publicité à laquelle l’utilisateur est exposé par intermittence durant son écoute. A noter que toutes les plateformes n’offrent pas de plan freemium, comme Apple Music par exemple. 24 https://newsroom.spotify.com/2019-02-26/spotify-launches-in-india/ 25 https://www.mediametrie.fr/fr/Streaming-musical-%3A-6%20visiteurs-sur-10-utilisent-exclusivement-leur- mobile
  • 35. 35 Les recettes générées par les abonnements premium et la vente d’espace publicitaire sont ensuite redistribuées aux ayants droits (producteurs, éditeurs, auteurs et compositeurs) en fonction de leur poids dans le total des écoutes. Infographie de la répartition des revenus du streaming (avant TVA) .Les pourcentages annoncés sont simplifiés et arrondis. Ils se basent sur les informations du cabinet américain Manatt, Phelps & Phillips26 et une infographie diffusée par l’Adami27 1.2 Le streaming c’est qui ? Les plateformes des géants de l’internet : La première catégorie regroupe les plateformes de streaming faisant partie d’un écosystème de services et de produits plus larges. En l’espèce, cette catégorie est celle des GAFA puisqu’ on y retrouve Apple Music, Youtube (et Youtube Music) et Amazon Music Unlimited. Ces services bénéficient de la capacité de financement de leur maison mère, de leur capital de marque ainsi que des synergies procurées par leur écosystème : Apple Music pré-installé sur l’iPhone, Amazon Music Prime (version limitée d’Amazon Music Unlimited) inclus dans les abonnements Amazon Prime, la base de données et les enceintes Google Home pour Youtube Music. Apple Music : Apple Music est le service de streaming musical d’Apple lancé le 30 juin 2015. Apple a préalablement acheté Beats Electronics en mai 2014 (pour 3 milliards de dollars) qui 26 https://www.manatt.com/Insights/News/2016/How-Does-Music-Streaming-Generate-Money 27 https://www.adami.fr/wp-content/uploads/2019/07/streaming-adami.pdf
  • 36. 36 venait de lancer Beats Music, son propre service de streaming. Le prix de l’abonnement est de 9,99 €/mois en France. Le service est disponible dans 114 pays28 , propose 50 millions de titres et également la possibilité d’importer sa bibliothèque. Apple Music n’offre pas de formule gratuite. L’application est préinstallée sur les appareils Apple OSX et IOS. Apple Music disposait de 60 millions d’abonnés en Juin 201929 Youtube Music : YouTube a lancé son service de streaming musical baptisé YouTube Music en 2017. Youtube music est disponible via son application mobile, un lecteur web pour desktop. Youtube propose à la fois les catalogues « conventionnels » que l’on retrouve sur tous les services mais il les fusionne avec les remix et les live présents sur Youtube qu’on ne trouve pas chez les concurrents. Le prix de l’abonnement est de 9,99 €/mois en France. Le service est disponible dans 71 pays30 . Le nombre de titres au catalogue n’est pas communiqué, en revanche étant donné la disponibilité des vidéos non officielles de la galaxie Youtube, on peut facilement penser que le volume de titres disponibles surpasse celui de la concurrence. Une version gratuite avec publicité et des fonctionnalités limitées est incluse avec les enceintes Google Home via l’assistant vocal de Google. Google est en position de challenger sur ce marché avec « seulement 15 millions d’abonnés. Google a annoncé le 27 septembre 2019 la pré-installation de l’application Youtube Music sur les appareils Android 9 et 10. Cette stratégie vise à rattraper son retard sur la concurrence. Amazon Music Unlimited : Amazon Music Unlimited est la plateforme de streaming d’Amazon lancée à l’automne 2016 aux Etats Unis puis au Royaume Uni et en Allemagne, avant d’arriver en France en septembre 2017. Le prix de l’abonnement est de 9,99 €/mois en France. Le service est disponible dans 51 pays31 et revendique un catalogue de 50 millions de titres. Amazon propose également une formule limitée de son service appelée Amazon Prime Music. Cet abonnement donne accès à 2 millions de titres, ce qui à l’usage est assez restrictif : nouveautés indisponibles. Une version gratuite avec publicité et des fonctionnalités limitées est incluse avec les enceintes Echo équipées de l’assistant vocal Alexa. Amazon détenait 32 millions d’abonnés (Amazon Music Unlimited et Prime Music) au printemps 2019 selon le Financial Times32 . Il faut souligner que la croissance d’Amazon est très rapide sur le marché du streaming avec +70% d’abonnés Amazon Music Unlimited entre 2018 et 2019. 28 https://support.apple.com/en-us/HT204956 29 https://www.numerama.com/tech/529295-60-millions-dabonnes-deal-avec-pnl-fin-ditunes-rencontre-avec- eddy-cue-boss-dapple-music.html 30 https://support.google.com/youtubemusic/answer/6313540?co=GENIE.Platform%3DAndroid&hl=en 31 https://music.amazon.com/EU/help?nodeId=202204440 32 https://www.ft.com/content/60633178-a282-11e9-974c-ad1c6ab5efd1
  • 37. 37 Les Pure Player internationaux : Spotify : Spotify est le leader mondial du streaming musical, pionnier en la matière fondé en 2006 par Daniel Ek (fondateur du jeu en ligne Stardoll), Sophie Champagnon (ancienne dirigeante de la plateforme de partage µTorrent) et Martin Lorentzon (cofondateur de la régie TradeDoubler) puis lancée officiellement en octobre 2008. Depuis, Spotify est entré en Bourse le 3 avril 2018, possède 108 millions d’utilisateurs payants et 124 millions d’utilisateurs freemium33 et une part de marché de 36% en termes de nombre d’abonnés en 2018. L’abonnement mensuel est de 9,99 € pour un catalogue de 50 millions de titres. La grande force de Spotify est sa proposition de playlists : • Découvertes (Hits du moments, New Music Friday) • Genres musicaux (Rap Caviar, Pvncliners, Dance Hits) • Ambiances (jour de pluie, feeling’ Good, fin de journée etc…) • Moments de vie (Motivation pour le sport, dinner entre amis, Nocturne etc…). On peut dire que Spotify est vraiment la référence en matière de playlists. » En Boucle » et » En Boucle : Flashback ». Ces playlists se basent sur l’historique et les habitudes d’écoute de l’utilisateur afin de lui proposer des recommandations générées par des algorithmes. On peut dire que Spotify est vraiment la référence en matière de recommandations et de playlists à la fois automatisées mais également concoctées par des équipes éditoriales spécialisées. Deezer : Deezer est l’autre pionnier du streaming musical, fondé en France en 2006 à travers le projet blogmusik.com, le projet a rapidement pris de l’ampleur puis mis en standby le temps de sceller un accord avec la Sacem et de pouvoir opérer dans les règles. Cette stratégie a permis à Deezer de survivre là où d’autres pionniers comme Radioblog ou Grooveshark ont fini par fermer sous la contrainte juridique. La stratégie de croissance de Deezer s’est largement appuyée en France sur le couplage à une offre « Bundle » avec les forfaits internet et mobiles Orange incluant un abonnement premium. Deezer communique sur Flow son service de recommandations personnalisées basé sur les écoutes du profil et propose à l’instar de Spotify toute une batterie de playlist mises à jour par des équipes éditoriales dédiées. Deezer possède aujourd’hui 14 millions d’utilisateurs : 7 millions payants et 7 millions 33 https://www.billboard.com/articles/business/8525540/spotify-paid-users-q2-2019-earnings-label-licensing- deals
  • 38. 38 freemium. Le service est déployé en septembre 2019 dans 187 pays34 . En France, L’abonnement mensuel est de 9,99 € pour un catalogue de 56 millions de titres35 . Napster : La version de Napster que nous connaissons aujourd’hui est la propriété de Rhapsody suite à son acquisition en 2011. Entre temps, suite à ses déboires judiciaires aux Etats Unis puis sa liquidation, la marque Naspter et son logo ont été acquis par Roxio qui s’en est servi afin de rebaptiser son service Press play en 2003. Napster a ensuite été acquis par le détaillant de matériel électronique américain Best Buy qui l’a finalement revendu à Rhapsody. Napster est aujourd’hui un service de streaming interactif à la demande comparable à Deezer et Spotify avec les fonctionnalités standards, de playlisting, d’écoute hors ligne et des recommandation éditoriales. En France, le service est proposé à 9,95€/mois, offre un catalogue de 60 millions de titres, un partenariat avec SFR propose le service à prix réduit pour les nouveaux abonnés box ou mobile. Napster ne communique pas sur son nombre d’abonnés mais un rapport de Midia Research évoquait le chiffre de 4.5 millions d’abonnés il y a 2 ans et Digital Music News parle aujourd’hui de 5 millions d’abonnés36 . Napster est disponible dans 34 pays37 Les acteurs locaux : Dans chaque région du monde, des services spécialisés sur leurs marchés domestiques ont émergé. Ces services bénéficient d’expertises culturelles et locales leur permettant d’offrir les catalogues désirés par leur audience. Ils sont capables de proposer les nouveautés en adéquation avec les tendances de leur marché avec beaucoup de justesse. La production locale est en effet une composante cruciale pour le succès d’un service de streaming, le rapport « Panorama de la consommation de musique dans le monde 2019 » de l’IFPI38 met bien en évidence ce point avec son classement des styles musicaux les plus appréciés sur différents marchés : La Kpop le Ktrot en Corée du sud, la Cpop en Chine, les musiques issues de Bollywood en Inde. On retrouve donc ces acteurs locaux qui pour certains sont de vrais mastodontes, dans chaque région du monde et notamment dans les marchés émergents : • Afrique : Boomplay (acteur pan-africain plus que local même), Smubu, Spinlet, Baziks., Udux pour citer les principaux. • Maghreb / Moyen-Orient : Anghami 34 https://developers.deezer.com/guidelines/countries 35 https://www.deezer.com/fr/company 36 https://www.digitalmusicnews.com/2018/12/25/streaming-music-services-pay-2019/ 37 https://support.tunecore.com/hc/fr-fr/articles/115006500587-Napster-Description-D%C3%A9lai-de-mise-en- ligne-Territoires-Comment-ils-vendent-votre-musique-Taux-de-r%C3%A9mun%C3%A9ration 38 http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le- monde-2019_HD.pdf
  • 39. 39 • Corée du Sud : Melon, Bugs, Vibe • Asie du Sud-Est : Joox, KKBox • Chine : les services de TME (Tencent Music Entertainment) : Kugou Music, QQ Music, Kuwo music; Mais aussi NetEase Cloud Music du groupe NetEase. • Inde : JioSaavn, Gaana, Hungama Les acteurs de niche : On retrouve enfin des acteurs de « niches » se positionnant sur des segments marketing spécifiques comme : Beatportlink : Au printemps 2019, Beatport la plateforme de téléchargement légale spécialisée sur le segment des musiques électroniques particulièrement prisées des DJ, notamment pour ses remixs exclusifs, a annoncé un nouveau service de streaming à la demande permettant d’accéder à l’ensemble de sa bibliothèque. La plateforme va plus loin en proposant en septembre une intégration à Rekordbox un logiciel populaire de DJing. Cette intégration change la perspective du DJing en ne limitant plus la prestation du DJ au nombre de titres qu’il possède mais à ceux qu’il connaît et auxquels il peut accéder. Le service propose également un service hors ligne afin de ne pas dépendre de la connexion internet. Les formules d’abonnement vont de 4,99$/mois à 59,99€/mois selon le niveau d’options choisies. Le service est disponible dans 54 pays sur tous les continents Qobuz : le français Qobuz qui a choisi de s’adresser aux audiophiles en proposant une qualité d’écoute sans perte (au format .flac 16-BIT / 44.1 Khz) et une qualité très haute définition (.flac 24-bit jusqu'à 192 Khz), permettant d’associer digital et Hifi Haut de gamme pour les passionnés fortunés. Les prix des abonnements vont de 9,99€/mois pour l’abonnement standard (qualité mp3 320 kbps), 19,99€/mois pour la qualité Hifi (.flac 16-BIT / 44.1 Khz) à 24,99€/mois pour la qualité Studio (.flac 24-bit jusqu'à 192 Khz). Le service revendiquait 100.000 abonnés dans un article des Echos en Janvier 201939 . Qobuz est disponible dans 11 pays d’Europe et aux Etats-Unis depuis Février 2019 où le Français aurait conquis 25.000 abonnés en 6 mois. Primephonic : initialement site de téléchargement de musique classique, Primephonic lance son service de streaming en 2017. Son offre vise à réconcilier les fans de musique classique avec le streaming, en effet l’exploitation des données et l’organisation de la recherche centrée sur les standards de la pop (le titre et l’artiste principal « rois ») sont peu 39 https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/le-site-de-streaming-francais-qobuz-pret-a-ouvrir-son-capital- 370496
  • 40. 40 compatibles avec les critères de choix d’un enregistrement classique où sont valorisés à la fois le compositeur, le chef d’orchestre, l’orchestre, les solistes et l’œuvre. D’autre part ces données peuvent être traduites en différentes langues, aussi l’Orchestre Philharmonique de Paris pourra être crédité de la sorte sur certains enregistrements puis Paris Philharmonic Orchestra sur d’autres. Bref l’amateur de musique classique ne s’y retrouve pas et perd son temps en recherche au lieu de profiter de la musique. Les recommandations sur le style classique apparaissent également limitées sur les plateformes généralistes. Enfin les fans de classique seraient plus sensibles à la qualité sonore, et dans cette optique Primephonic propose une diffusion en qualité standard et en haute définition (24 bits). Les abonnements sont de 7,99€/mois (qualité standard) et 14,99€/mois (haute définition). Le service est accessible dans tous les pays à l’exception de la Chine, du Japon et de la Russie. Audiomack : spécialisé sur le Rap et R&B, Audiomack a été lancé en 2012 afin de proposer aux artistes de partager des mixtapes ou des titres. La plateforme est devenue de plus en plus populaire dans le milieu du rap ainsi des artistes majeurs tels qu’Eminem, Chance The Rapper ou Nicki Minaj y ont posté des titres en exclusivité. Audiomack est ainsi passé à la pointe de la découverte et de gros noms du rap américain actuel sont passés par la plateforme avant d’être signés : Migos, Fetty Wap, A Boogie wit da Hoodie, Chance the Rapper, Kevin Gates…40 L’audience d’Audiomack est plus jeune que la moyenne et à la pointe des tendances rap. Ce profil intéresse beaucoup les maisons de disques et la plateforme vient de signer avec Warner Music Group un accord de licence pour son catalogue ainsi qu’un partenariat sur de la création de contenu. Audiomack propose une formule premium sans pub (4,99$/mois) et une formule freemium. Les hybrides : A la fois réseaux sociaux et plateformes permettant l’écoute de musique, Soundcloud et Youtube se distinguent par leur contenu UGC (User Generated Content) là où les autres sont alimentés uniquement par des circuits contrôlés par des intermédiaires (agrégateurs, maisons de disques). 40 https://www.digitalmusicnews.com/2019/09/27/audiomack-discovering-artists/
  • 41. 41 1.3 Les chiffres Dans le monde41 En 2019, le marché de la musique enregistrée a progressé de 9,7% en chiffre d’affaires. C’est la 4e année de croissance consécutive pour le marché mondial de la musique. Cette croissance est portée par le Streaming dont le chiffre d’affaires a progressé de +34% et représente 47% des revenus. Parallèlement, les revenus physiques et downloads (téléchargements) ont chuté respectivement de -10,1% et -21,2%. Cette croissance est présente dans toutes les grandes régions du monde à l’exception de l’Europe où la progression globale est quasiment nulle (+0,1%) Pour l’Afrique, il n’y a pas de données consolidées comparables. • Amérique Latine : croissance globale +16,8% / streaming +39,3% / physique -37,8% / téléchargements -45% • Amérique du Nord : croissance globale +14% / streaming +39,8% / physique -22% • Australie / Asie : croissance globale +11,7% / streaming payant +29,5% / téléchargements -7,1% • Europe : croissance globale +0,1% / streaming +29,2% / physique -19,4% / téléchargements -6,7%. Cette engourdissement de la croissance en Europe cache des situations différentes selon les pays avec des marchés relativement immobiles dans les pays nordiques déjà très mûrs sur la transition vers le streaming, des marchés progressant vite comme L’Autriche ou l’Irlande et des marchés importants en recul comme l’Allemagne (4e marché dans le monde) malgré une transition en cours vers le streaming. • Afrique : pas de données. D’après le rapport « Panorama de la consommation de musique dans le monde 2019 » de l’IFPI 89% des personnes sondées pour son étude dans le monde déclarent écouter de la musique à la demande en streaming. En France le chiffre est de 85%. Au-delà d’être une pratique globalement populaire, le streaming est devenu l’usage majoritaire dans beaucoup de territoires. 41 https://www.ifpi.org/downloads/GMR2019.pdf
  • 42. 42 En France42 Un marché en croissance pour la 3e année consécutive Le marché de la musique en France est en croissance pour la troisième année consécutive. Une croissance certes timide à +1,8% mais bien présente, laissant présager une sortie durable de la crise entamée dans les années 2000. Le streaming source de revenus N°1. Nouveauté cette année : le poids du chiffre d’affaires du numérique surpasse désormais celui des produits physiques et réalise ainsi 57% des ventes. Le streaming est en 2018 la première source de revenus en réalisant à lui seul 41% des revenus (seulement 8% en 2013), ce chiffre atteint 63% pour le premier semestre 2019. Un autre signal très positif pour l’industrie : les recettes issues des abonnements sont la source de recettes numéro 1 pour le marché de la musique et progressent de 23% en 2018. Voici quelques détails sur la physionomie de la consommation du streaming : • La moitié (46%) des consommateurs utilise le streaming audio dont 5,5 millions disposent d’un abonnement audio payant. Ces abonnements représentent 81% des revenus du streaming en France. • La progression du streaming est toujours soutenue avec + 26% d’écoute en 2018 par rapport à 2017. • Enfin 57,5 milliards de streams audio en 2018, soit + 35% par rapport à l’an dernier 42 Chiffres issus du Bilan 2018 du marché de la musique enregistrée du Snep paru le 14/03/2019 : http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/03/DP-Bilan-2018-final.pdf
  • 43. 43 Source SNEP 1.4 Les raisons du succès du modèle du streaming Les services tels que Spotify, Deezer ou Apple Music offrent une expérience beaucoup plus riche que le marché des années 2000. Dans une optique purement rationnelle : avec une dépense de 120 € par an soit environ 10 ou 12 CD de l’époque, le consommateur peut accéder à une bibliothèque de plusieurs dizaines de millions de titres et les écouter sans aucune restriction hormis le temps dont il dispose et sa connexion au web. http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-monde- 2019_HD.pdf
  • 44. 44 https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans- limites-n56801/ Mais cette explication n’est pas suffisante car un raisonnement basé sur la simple rationalité économique ne permet pas d’écarter l’option de substitution 100% gratuite offerte par le piratage, d’autant que cet arbitrage était largement pratiqué depuis les années 2000. Alors quels facteurs permettent d’expliquer que le consommateur porte son choix sur un abonnement à un service de streaming musical ? La batterie de services et de fonctionnalités fournis (proposition de playlists, découvertes, informations sur l’artiste - biographie, liste d’artistes similaires mais également la possibilité d’organiser et sauvegarder des playlists dans sa bibliothèque et de les partager) par les services de streaming légal offre une expérience largement enrichie. Tout cela accroît le niveau d’utilité que le consommateur retire du service et le conduit à placer cette option devant le piratage.43 . • Les plateformes de streaming offrent une mobilité totale et le smartphone seul permet d’accéder au service sans avoir à l’alimenter via un disque dur, une clé USB ou tout autre périphérique. • La qualité du classement du catalogue Artistes, Albums, Titres, le gain de temps et le confort d’utilisation que cet archivage procure en comparaison d’une bibliothèque maintenue manuellement et stockée sur le disque dur ou la mémoire interne d’un appareil personnel. 43 Dans l’optique de l’utilité ordinale de Pareto un consommateur hiérarchise les biens les uns par rapport aux autre en fonction de l’utilité qu’il en retire
  • 45. 45 • Les services de streaming musical affranchissent leurs consommateurs des problématiques liées à la capacité de stockage de leurs appareils. Néanmoins l’écoute « hors-ligne » nécessitant de sauvegarder les fichiers en « local » (sur l’appareil), ce problème peut ressurgir. • L’interopérabilité entre les différents appareils est un vrai confort pour le consommateur. Le principe du profil utilisateur permet en effet de passer d’un périphérique (ordinateur, tablette ou smartphone) sans rupture dans l’utilisation. • La possibilité de créer des playlists et de les sauvegarder, est un élément très important ; depuis des années les utilisateurs ont voulu désosser le support sur lequel la musique leur était livrée : on a pu le voir au travers des mixtapes artisanales réalisées sur cassettes puis sur CD mais également au travers des compilations. • Les services de streaming sont reliés aux principaux réseaux sociaux et permettent ainsi aux utilisateurs de partager leurs coups de cœur musicaux, playlists. Des fonctions sociales internes offrent aux utilisateurs la possibilité d’accéder aux playlist créées par les autres ou de créer des playlists collaboratives. L’économie de la production musicale 2019 – SNEP http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/GUIDE-ECO-Version-WEB.pdf • Les plateformes proposent toute une batterie de recommandations à travers des playlists thématiques (nouveautés, genres musicaux, « moods » - chill, dormir, se concentrer etc.., activités - cuisine, sport, trajet du matin etc…) programmée par des éditeurs spécialisés mais également des propositions personnalisées poussées par un algorithme se nourrissant des habitudes de consommation de l’utilisateur.
  • 46. 46 • Des services annexes sont présents comme la possibilité d’être alerté sur les prochains concerts d’un artiste et d’acheter des places via un partenaire (Ticketmaster par exemple) ou encore d’acheter du merchandising. L’économie de la production musicale 2018 - SNEP http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2018/07/06-2018-Economie-de-la-production-musicale1.pdf JACKDAW RESEARCH MUSIC SURVEY REPORT Jan Dawson, October 2015 http://jackdawresearch.com/wp-content/uploads/2015/10/Jackdaw-Research-Music-Survey-Report.pdf D’après les données des différentes enquêtes effectuées par les cabinets et organisations spécialisées (SNEP, Jackdaw Research), on voit que les innovations proposées par les plateformes de streaming musical, notamment la découverte, sont des moteurs pour l’adoption des services. Même si elles arrivent en motivation secondaire derrière l’écoute illimitée et le volume du catalogue, les fonctionnalités de découverte, d’interopérabilité, de création de playlists ou de partage sont déterminantes pour le succès d’un service de streaming.
  • 47. 47 1.5 Le profil du consommateur streaming Au niveau mondial, la plus grosse portion des streamers en 2017 étaient les 25 - 34 ans. Music Industry Blog / Midia Research (2018). Part des consommateurs de streaming musical en 2017 par age. Statista. https://www-statista-com.devinci.idm.oclc.org/statistics/806778/music-streamers-by-age-worldwide En 2018, 30% des consommateurs de streaming musical avaient plus de 50 ans. Cet usage n’est donc plus cantonné aux plus jeunes qui restent prédominants en terme de durée d’écoute. Cette progression chez les seniors démontre la démocratisation voire l’universalisation de ce mode de consommation, le streaming s’ancre comme un usage dominant, incontournable et parti pour s’installer dans la durée.
  • 48. 48 http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le-monde- 2019_HD.pdf Malgré l’utilisation très importante du smartphone, le lieu d’écoute le plus répandu en France est le domicile. La voiture vient en seconde position. La durée d’écoute hebdomadaire moyenne du streaming est d’environ 4 heures dans le monde et 2 heures et 48 minutes en France. https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans- limites-n56801/
  • 49. 49 Une enquête de Que Choisir en 2017 révèle un taux de satisfaction extrêmement élevé des utilisateurs de streaming musical, on peut même parler de plébiscite avec 97% de répondants satisfaits. Le service est particulièrement adapté aux attentes des consommateurs. https://www.quechoisir.org/actualite-vous-et-le-streaming-musical-infographie-tous-accros-a-la-musique-sans- limites-n5680 2 L'impact du streaming sur la consommation de musique 2.1 Le digital grâce au streaming se substitue à l’industrie physique En 2018 la consommation de musique a basculé en France du physique vers le digital avec pour la première fois des revenus du numérique surpassant ceux du physique. Cette transition s’est effectuée un peu plus rapidement au niveau mondial dès 2017 avec des revenus digitaux portés par la croissance du streaming représentant 54% des revenus au global. Des marchés plus précoces ont effectué cette transition plus tôt, ainsi au Royaume-Uni le digital au global (streaming + téléchargement) a
  • 50. 50 pris le pas sur les revenus physiques dès 2013 et le streaming a franchi le cap de 50% (54%) en 201844 . Les revenus globaux du digital aux USA ont atteint les 50% dès 201145 , ceux du streaming seul ont passé la barre de 50% en 2014 pour atteindre 80% des revenus de la musique enregistrée au pays de l’Oncle Sam désormais46 . Ce mouvement se généralise même si certains marchés importants continuent de résister, comme le Japon extrêmement attaché au CD. Sur d’autres comme en France, la dualité physique/digital continuera de persister pour une durée difficile à prévoir (notamment grâce à un maillage de distribution encore très bien implanté avec 4000 points de vente sur notre territoire). Il n’en reste pas moins que la tendance générale du marché est là et qu’il ne s’agît que d’une question d’années avant que la bascule se généralise. 2.2 Le développement du streaming a permis de relayer le piratage comme un enjeu secondaire. Selon un rapport du cabinet Ernst & Young citant une étude de l’IFOP datant de juin 2017, « les nouveaux services légaux diffusant de la musique tels que Spotify ou Deezer ont très fortement réduit la consommation illégale dans l’industrie musicale jusqu’à la rendre inférieure à 10% de la consommation »47 en France. Une étude britannique réalisée par YouGov parue en août 2018 arrive au même résultat, révélant qu'un britannique sur dix (soit 10%) télécharge de la musique illégalement, contre 18% il y a cinq ans48 . On voit donc que l’essor des services de streaming conjugué aux difficultés accrues d’accès aux sites illégaux : plateformes fermées (comme Megaupload, Zone-téléchargement), la peur des risques liés aux virus informatiques et les campagnes de sensibilisation comme Hadopi ont permis de juguler le piratage sur les marchés occidentaux ». Le Snep et l’IFPI sont moins optimistes et continuent d’alerter notamment sur la pratique du Stream Ripping (piratage consistant à extraire le contenu mis à disposition par les plateformes de streaming légal). Cependant depuis 3 ans on constate d’après le rapport « Panorama de la consommation de musique dans le monde » que le recours aux pratiques illicites pour écouter ou acquérir de la musique chute également au niveau mondial. On est ainsi passé de 40 % à 27% de la population ayant recours à ces pratiques. La position vigilante du SNEP et de l’IFPI 44 https://www.theguardian.com/business/2019/mar/21/streaming-accounts-for-more-than-half-uk-record- label-income 45 https://www.statista.com/chart/2773/digital-music-in-the-united-states/ 46 http://www.riaa.com/wp-content/uploads/2019/09/Mid-Year-2019-RIAA-Music-Revenues-Report.pdf 47 http://www.editionmultimedia.fr/wp-content/uploads/2018/07/Etude-EY-sur-le-piratage-en-France- contenus-audiovisuels-28-06-18.pdf 48 https://yougov.co.uk/topics/arts/articles-reports/2018/08/02/number-britons-illegally-downloading-music- falls
  • 51. 51 dans la mesure où en tant qu’organisations représentatives des intérêts de ses acteurs de l’édition phonographique elles ne peuvent pas envoyer un signal de relâchement dans la lutte contre le piratage tant celui-ci a mis la filière sous pression au cours des 15 premières années du millénaire. Part des consommateurs ayant utilisé des moyens illicites pour écouter ou acquérir de la musique en 2017, 2018 et 2019 dans le monde 49 50 51 Néanmoins la pratique du « stream ripping » ne saurait procurer un confort d’utilisation et une expérience comparable à celle du streaming musical aujourd’hui. Cette pratique même si elle est dommageable est plutôt à comparer au « home taping » (copie sur cassette) des années 80 et 90. Alors que la copie d’album sur CDR et le téléchargement illégal représentaient des pures contrefaçons à l’époque où les usages et le marché étaient dominés par la vente de CD et de téléchargements. Aujourd’hui le piratage dans les marchés les plus mûrs est devenu un enjeu secondaire. 49 http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2017/09/IFPI_Panorama-2017-de-la-consommation-de- musique-dans-le-monde.pdf 50 http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2018/10/10-2018-IFPI-VF-Consumer-Insight-Report.pdf 51 http://www.snepmusique.com/wp-content/uploads/2019/09/IFPI_Panorama-conso-musique-dans-le- monde-2019_HD.pdf