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Samu : avant Naomi, d'autres cas
tragiques
12h54, le 09 mai 2018, modifié à 14h33, le 09 mai 2018
Photo d'illustration : Le Samu a fait l'objet de plusieurs plaintes ces derniers années après des
décès de patients.@ PIERRE ANDRIEU / AFP
La mort tragique de Naomi, une jeune femme de 22 ans dont l'appel au Samu du Bas-
Rhin n'a pas été pris au sérieux, rappelle d'autres drames, qui ont fait l'objet de
poursuites judiciaires ailleurs en France.
Négligence, manque de discernement, absence d'empathie… Le comportement des opérateurs
téléphoniques du 15 suscite un tollé après la mort de Naomi Musenga, dont l'appel au Samu
du Bas-Rhin n'a pas été pris au sérieux. Une enquête administrative et une enquête de
2. l'inspection générale des affaires sociales ont été diligentées pour établir les responsabilités,
mais il ressort de l'enregistrement de l'échange entre l'opératrice et la jeune femme de 22 ans,
le 29 décembre dernier, la brutalité de la première, et la détresse de la seconde.
"Nous sommes fort heureusement dans un épisode rarissime", a déclaré le directeur général
des hôpitaux universitaires de Strasbourg. Mais plusieurs professionnelsmettent en avant le
manque de moyens accordés à l'hôpital public et aux urgences comme facteur du problème.
40,8 degrés de fièvre, mais pas de secours. Le cas de Naomi Musenga, bien que rare, n'est
pourtant pas isolé. Il rappelle notamment celui très récent de Lissana. Cette petite fille de trois
ans est morte d'une grippe à Aix-les-Bains dans la nuit du 29 au 30 janvier derniers. Dans
cette affaire, la responsabilité du médecin régulateur du Samu est pointée du doigt. La veille
du drame, Lissana est diagnostiquée d'une grippe par un généraliste. Le lendemain, elle se
trouve dans un état semi-comateux, et sa fièvre monte à 40,8 degrés. Tard dans la nuit, sa
mère compose le 15, mais le professionnel de santé réfute le caractère urgent de la situation.
L'appel dure huit minutes. Désemparés, les parents décident de conduire la fillette aux
urgences, où elle succombe une heure plus tard. La famille de Lissana a depuis porté plainte
contre le Samu, qu'elle accuse d'un grave manque de réactivité. Le dossier est en cours
d'instruction.
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Après la mort de Naomi : qui est au bout du fil quand on appelle le Samu ?
Un manque d'explications claires. Autre drame, cette fois en Normandie. En mai 2015, les
parents d'Ayana, un nourrisson de cinq mois, appellent le Samu d'Alençon. La fillette "avait
42,5 degrés de fièvre", "les yeux ouverts mais ne bougeait plus", affirmait alors la mère de
famille au micro d'Europe 1. Au téléphone, l'opérateur lui suggère de lui administrer du
paracétamol et un bain tiède. Il demande également si le bébé a des convulsions, mais sans lui
expliquer que celles-ci peuvent ne pas être accompagnées de spasmes visibles. La mère
répond par la négative, et les urgentistes refusent de se déplacer. Les parents, qui n'ont pas le
permis de conduire, doivent attendre l'aide d'un voisin le lendemain matin pour conduire
Ayana à l'hôpital, où elle est placée dans le coma, avant de décéder quelques semaines plus
tard.
La plainte pénale des parents a été classée sans suite par le parquet. L'Agence Régionale de
Santé de Normandie avait de son côté porter plainte devant l'Ordre des médecins. En
3. septembre 2016, l'urgentiste a été sanctionné par une interdiction d'exercer d'un an, dont six
mois avec sursis par la chambre de discipline du conseil régional des médecins de Basse-
Normandie.
Une amputation et une incitation à l'auto-prise en charge. D'autres manquements ou
erreurs d'appréciation ont pu avoir des conséquences dramatiques sur la vie de certains
patients. Thomas Veyret, 21 ans, a dû être amputé de la jambe droite en février 2017 à la suite
d'une simple chute de trampoline. Ce jour-là, au téléphone, le médecin régulateur du Samu
l'invite à rétablir lui-même sa luxation du genou. Face à la difficile réalisation de cette
opération par le jeune homme, le régulateur s'impatiente : "Va doucement, mais j'attends
depuis un moment, là…". "Comment imaginer que l'on impose à une victime choquée de faire
elle-même, avec une seule main, l'autre tenant le téléphone, ce geste réservé à un
professionnel ? Cela a contribué à la perte de sensibilité de sa jambe", avait alors accusé Me
Edouard Bourgin, l'avocat de la famille, qui a porté plainte au pénal. L'instruction est en
cours.
Une embolie pulmonaire prise pour une crise d'angoisse. Ces drames aboutissent parfois à
des condamnations. En 2016, une ancienne permanencière du Samu-centre 15 d'Angers a été
condamnée à un an de prison avec sursis, sans inscription au casier judiciaire. Sept ans
auparavant, le 9 avril 2009, elle avait refusé d'envoyer des secours au domicile d'une jeune
femme de 27 ans, qui venait d'accoucher un mois plus tôt, et qui faisait un malaise.
L'opératrice soutenait qu'il ne s'agissait que d'une crise d'angoisse. Elle est morte quelques
heures plus tard d'une embolie pulmonaire.
Naomi : un traitement "pas conforme aux bonnes pratiques"
Le responsable des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) a ouvert une enquête le 2
mai, après la révélation de l'affaire, et se donne trois semaines pour faire toute la lumière sur
les causes de la mort de Naomi et les responsabilités potentielles du Samu. "La première
analyse plaide pour une procédure de traitement d'appels qui n'est pas conforme aux bonnes
pratiques, ce qui a conduit à l'ouverture d'une enquête administrative", a indiqué à l'AFP
Christophe Gautier, directeur général des HUS.
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Par Anaïs Huet