Revue "What's Up Doc" n°25 - Mars Avril 2016
LE TRAVAIL D’ÉQUIPE FAIT PARTIE DE L’EXERCICE MÉDICAL. PAS TOUJOURS ÉVIDENT POURTANT DE COMPOSER AVEC TOUT LE MONDE.
Mésentente, dissensions ou simple manque de dialogue, en cabinet comme à l’hôpital, nous sommes régulièrement confrontés à des situations professionnelles sources de discorde. Et ce n’est pas sans conséquences… Aujourd’hui, selon une étude de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), on estime qu’en France, plus de la moitié des événements indésirables graves (EIG) pourraient être évités et seraient dus à un manque de communication au sein des équipes. Un problème qui nous concerne donc… tous !
LA FORMATION INITIALE, CE CHEMINEMENT SOLITAIRE
Première année et goulet d’étranglement du numerus clausus, externat et stress des classements ECN, internat et course aux stages… les études médicales ne manquent pas de situations d’affrontement. Difficile ensuite de demander aux médecins de travailler main dans la main. Un problème que pointait la HAS (Haute Autorité de santé) dans son rapport de 2012 en alignant des chiffres culpabilisants : 20 % des erreurs faites par un être humain ne sont jamais corrigées. Alors, oui, c’est un fait, les praticiens ne sont pas les meilleurs pour jouer collectif et rien, a priori, n’est prévu pour aider le système à changer. Frédéric Colomb, chef de l’équipe urologie de l’hôpital de Grasse, témoigne : « Je souhaitais faire prendre conscience à toute la chaîne que la qualité de nos prises en charge était dépendante de chacun. J’ai donc proposé à mon directeur général d’organiser une journée de team-building pour favoriser les connexions et améliorer les liens entre nous. » La réponse a été sans appel : « Pour quoi faire ? ». L’exemple de Frédéric n’est malheureusement pas unique et tout à fait éloquent.
...
reseauprosante.fr
1. What’s Up Doc? 25 mars-avril 201640
LE TRAVAIL D’ÉQUIPE FAIT PARTIE DE L’EXERCICE MÉDICAL. PAS TOUJOURS
ÉVIDENT POURTANT DE COMPOSER AVEC TOUT LE MONDE.
Mésentente, dissensions ou simple manque
de dialogue, en cabinet comme à l’hôpital, nous
sommes régulièrement confrontés à des situations
professionnelles sources de discorde. Et ce n’est pas
sans conséquences… Aujourd’hui, selon une étude
de la DREES (Direction de la recherche, des études,
de l’évaluation et des statistiques), on estime qu’en
France, plus de la moitié des événements
indésirables graves (EIG) pourraient être évités et
seraient dus à un manque de communication au sein
des équipes. Un problème qui nous concerne donc…
tous!
LA FORMATION INITIALE,
CE CHEMINEMENT SOLITAIRE
Première année et goulet d’étranglement du
numerus clausus, externat et stress des classements
ECN, internat et course aux stages… les études
médicales ne manquent pas de situations
d’affrontement. Difficile ensuite de demander aux
médecins de travailler main dans la main. Un
problème que pointait la HAS (Haute Autorité de
santé) dans son rapport de 2012 en alignant des
chiffres culpabilisants : 20 % des erreurs faites par
un être humain ne sont jamais corrigées. Alors, oui,
c’est un fait, les praticiens ne sont pas les meilleurs
pour jouer collectif et rien, a priori, n’est prévu pour
aider le système à changer. Frédéric Colomb, chef de
l’équipe urologie de l’hôpital de Grasse, témoigne :
« Je souhaitais faire prendre conscience à toute
la chaîne que la qualité de nos prises en charge
était dépendante de chacun. J’ai donc proposé
à mon directeur général d’organiser une journée
de team-building pour favoriser les connexions
et améliorer les liens entre nous. » La réponse
a été sans appel : « Pour quoi faire? ». L’exemple
de Frédéric n’est malheureusement pas unique
et tout à fait éloquent.
JOHANA HALLMANN
Savoir jouer
collectif
ÿ Si, en aÿronautique, on ÿtait restÿau mÿme
niveau de team-training que dans les hÿpitaux
actuellement, les compagnies aÿriennes
dÿploreraient entre 1 et 1,5 accident
par semaine ÿ.
Article proposé en partenariat avec le programme Branchet on the road www.branchetontheroad.fr
TEAM-
BUILDING
2. mars-avril 2016 What’s Up Doc? 25 41
LE GROUPE, ENTITÿÿPART ENTIÿRE
La formule « Ne néglige pas ton collègue » est en
substance ce qu’encourage la HAS via son programme
PACTE. Elle incite en effet les établissements à former
leurs équipes au « travailler ensemble ». Une philosophie
de pensée en rupture. Il faut espérer que les esprits,
mêmes les moins préparés, entendent ce discours
pour permettre à la profession de sortir de son modèle
« artisan d’exception », elle qui navigue à contre-courant,
à l’ère de la qualité et de l’évaluation des pratiques.
« Les médecins et soignants sont exactement dans la
même situation que les pilotes il y a 40 ans. Ils ne se parlent
pas. Si, en aéronautique, on était resté au même niveau de
team-training que dans les hôpitaux actuellement, les
compagnies aériennes déploreraient entre 1 et 1,5 accident
par semaine ». Le discours est cassant mais il est clair et
sans ambiguïté. C’est Pierre-Antoine Watrelot, pilote et
formateur au sein du cabinet Branchet, assureur spécialisé
dans la responsabilité civile professionnelle des praticiens
de plateaux techniques lourds, qui affirme son point de vue.
Ce cabinet un peu avant-gardiste sollicite ce pilote pour
proposer en effet une formation de Medical Team Training
d’un genre plutôt révolutionnaire, qui s’attache à réaliser
une sorte de team-building autour de l’activité opératoire.
Ce concept récent de formation médicale est calqué
justement sur la formation aéronautique. Analyse de
situations, discussions et amélioration du travail en groupe
associant tous les soignants d’un bloc, sont partagés dans
une ambiance de travail proche des circonstances réelles.
Pour permettre d’ailleurs d’en faciliter la pratique, le centre
de formation et de simulation ambulant, l’Asspro Truck,
sillonne les cliniques et les hôpitaux de France à la
rencontre des équipes. On aurait tort de s’en priver.
EN 2014 LA JOINT COMMISSION,
ONG AMÉRICAINE, A ESTIMÉ
QUE LE FACTEUR HUMAIN ÉTAIT
RESPONSABLE DE 72 %
DES 764 EIG QU’ELLE
A ANALYSÉS,
ET QUE LA COMMUNICATION
ENTRE LES ÉQUIPES ÉTAIT
EN CAUSE DANS 89 %
DES CAS.
EN FRANCE, LA HAS,
LORS DE SA CONFÉRENCE
DE PRESSE DE MAI 2015
SUR LA SÉCURITÉ DU
PATIENT, ESTIMAIT QUE
LE TRAVAIL D’ÉQUIPE ÉTAIT
À 27 % (SOIT LA PART LA PLUS ÉLEVÉE)
RESPONSABLE DE CES EIG AU
SEIN DES ÉTABLISSEMENTS
HOSPITALIERS PRIVÉS ET
PUBLICS.
72%
89%
27%
LE ROLE DU
FACTEUR HUMAIN,
PAS ANODIN