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CULTURE
SPORT
» suite page 3
« Soleil d'Été »,
atteint la perfection
PAR ÉLISÉE DÉCEMBRE
Le sélectionneur
Marc Collat
de retour en Haïti !
par Gérald Bordes
L'OEA accorde une
bonne note au CEP
HAÏTI / LÉGISLATIVES
La participation n'était
pas au rendez-vouspar Evens REGIS
MARDI 11 AOÛT 2015 NUMÉRO 58
WWW.LENATIONAL.HT
QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI
ACTUALITÉ
HAÏTI / LÉGISLATIVES
Des membres de la mission d’observation de l’OEA en conférence de presse, le 10 août 2015. / Photo : J. J. Augustin
Comme prévu dans le calendrier électoral, le premier tour des législatives a été réalisé le
dimanche 9 août 2015. Mauvaise planification du Conseil électoral provisoire (CEP), violence,
et irrégularités enregistrées dans plusieurs centres de vote ont ralenti les opérations et influé
sur la participation des potentiels électeurs.
E
n termes de participation des
électeurs, certains observateurs
ont confié que ce n’était pas
la grande foule. Le nombre
de votants serait très loin, disent-
ils, des 40 % prévus par le Conseil
électoral provisoire (CEP). Alors que
quatre heures de l’après-midi a été
l’heure prévue pour la fermeture des
opérationsdevote,desurnesobservées
après trois heures dans l’après-midi,
dans plusieurs bureaux de vote, dans
des centres situés à plusieurs endroits
dans la capitale, Port-au-Prince, étaient
presque vides. Le vote a débuté dans
la plupart de ces centres de vote
avec deux ou trois heures de retard.
Une cinquantaine de centres de
vote sur un total de 1 508 pour tout
le territoire national, ont également
été vandalisés durant cette journée
électorale.
Déjà des doutes
sur la légitimé des
futurs élus
par Stephen Ralph Henri
2. 2 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
TRIBUNE
L
e besoin d’occupation naît
de la conviction qu’Haïti est
un pays occidental, qu’il doit
s’intégrer à l’Occident et que,
bon gré mal gré, tôt ou tard, il finira
par le faire. Bien entendu, l’obstacle
majeur à cette intégration ne saurait
être le pays lui-même, mais bien ceux
qui l’habitent : les Haïtiens ! Lorsque
mes interlocuteurs tentent de me
placer devant cette disjonction, ce
besoin renouvelé de vivre libre ou de
mourir, je leur chante ma chanson
favorite : Se gran chimen mwen te
ye, tout moun pase y ap ri mwen. Se
gran chimen mwen te ye, lapli tonbe,
mwen pa mouye !
La perspective de
l’occupation
Vu de cet angle, l’occupation de
1915 s’entend comme la première
occupation du pays, surtout
lorsque l’on cible les occupations
qui se succèdent après le coup
d’État du général Cédras en
septembre 1990, et que l’on veut
y mettre fin sans rien modifier à
la structure de base de la société
haïtienne. Pour bien saisir le
débarquement de 1915, je suggère
d’observer cette structure et de se
rendre compte qu’il s’agit plutôt de
la troisième occupation du pays.
La première date du 12 octobre
1492, avec le débarquement de
Christophe Colomb. La deuxième,
initiée par les Français au milieu
du XVIIe siècle, s’officialise avec
le Traité de Ryswick en 1697.
Les trois occupations partagent
un dénominateur commun : elles
n’ont aucune justification que les
Haïtiens pourraient comprendre.
Car elles sont toutes trois
immorales : elles résultent des
abus des plus forts et du droit de
conquête. J’ai émis l’idée que, sur
un tel socle, il est matériellement
impossible de construire un État
de droit, c’est-à-dire un État où la
loi est une transcription des droits
des Haïtiens (Casimir, 2009 : 66).
Partant, il nous revient d’analyser
le rôle et les limitations de ceux
qui, sans s’en rendre compte
peut-être, ne peuvent même
pas concevoir le pays sans une
présence coloniale d’appui.
Se mettre au service de la
colonisation, c’est s’efforcer de
vivre dans le sens que désirent
les colons et sous leur dictée. C’est
endosser ce qu’ils ont voulu et
veulent faire de nous. Les Haïtiens
n’ont pas imaginé l’encomienda
et le repartimiento. Ils n’ont pas
inventé l’esclavage, la traite des
Noirs et la plantation de denrées
d’exportation. Ils n’ont pas produit
délibérément le dénuement des
travailleurs, ni la sous-traitance ni
les factories. Ils ne sont pour rien
dans les punitions barbares, les
tortures, les mutilations de ceux
qui tentaient de se soustraire au
travail forcé. Ils n’ont pas pris
les mesures nécessaires pour
s’assurer que l’esclave ne puisse
rien avoir qui n’appartienne à son
maître (Code Noir, art. 28), et ils
ne sauraient plaider coupables
du dénuement et de la misère
des cultivateurs de la fin du
XVIIIe siècle, de la multiplication
des déserteurs, des vagabonds,
des sans-aveux au XIXe et de
l’entêtement des Cacos de Salnave
à Benoît Batraville.
L’idée que les occupants –
espagnols, français ou étatsuniens
– se forment de notre personne
appartient évidemment à leurs
traditions. Dès le début des
Temps Modernes, ils conçoivent
et institutionnalisent le racisme
comme axe des relations
humaines. Nous nous connaissions
comme des Tainos, et nous
voilà devenus des Indiens. Nous
étions Aradas, Ashantis, Wolofs,
Mandingues, Kongos et autres, et
nous voilà transformés en Noirs.
Nous voilà dépouillés de tout ce
que nous sommes, pour mieux
nous conformer au regard des
occupants.
Ce regard des conquérants fait
partie de leur histoire et non de
la nôtre. S’en revêtir, c’est adopter
comme nôtre cette histoire à eux.
C’est accepter que nos pères et
mères étaient des sauvages et le
sont encore, aujourd’hui, sous
nos yeux. C’est cracher sur leur
désespoir, leurs souffrances et
leurs victoires qui expliquent
notre existence et donne lieu
à cette conversation. C’est
vénérer un futur et un bonheur
éternel que, depuis 1492, la
chrétienté offre à ses Indiens, à
ses engagés, à ses Noirs, à ses
cultivateurs… dans l’autre monde.
C’est admettre le bien-fondé du
génocide, de l’esclavage, de
l’extermination des Cacos durant
l’Occupation américaine, de la
déportation et du massacre des
viejos à Cuba, et des braceros
en République dominicaine, des
campagnes antisuperstitieuses
de l’Église catholique, le bien-
fondé du régime des Duvalier et
des occupations des XXe et XXIe
siècles, dans l’espoir qu’un jour,
dans quelques siècles à venir
peut-être, la modernité frappera
à nos portes.
Si l’histoire des conquérants se
matérialise en Haïti grâce au
travail dans les encomiendas
et les repartimientos, dans les
plantations de denrées et dans les
factories, c’est qu’il leur a fallu
convertir les Haïtiens (Taïnos,
Aradas, Wolofs ou autres) en
Indiens et en Noirs. Le Taïno
ne naît pas indien, l’Arada ne
naît pas noir. Indiens et Noirs
sont des œuvres de l’Occident
capitaliste où que se pose
son regard de conquérant. La
couronne espagnole extermine les
Indiens, et les quelques Taïnos qui
survivent et les marrons de l’île
se fusionnent. Les Français n’ont
pas raison des nouveaux Haïtiens.
Madiou l’observe dès l’introduction
de sa monumentale histoire
d’Haïti : « (…) l’Africain, quoique
esclave, cessa-t-il entièrement
d’être libre ? » (Madiou 1848, I
: v). L’occupation de l’île ou de
la République d’Haïti n’est pas
l’occupation des Haïtiens, de leur
pensée ni de leur mode de vie.
Les serviteurs de
l’Occupation
Entre 1673 et 1766, les captifs de
la Jamaïque la saccagent durant
huit soulèvements majeurs. Au
cours de la décennie de 1730,
les marrons de cette île voisine
acculent le gouvernement
britannique à signer des traités
de paix reconnaissant leur
autonomie et les frontières de
leurs sociétés villageoises (Dubois
& Garrigus, 2006:17). Par contre,
Saint-Domingue, « la perle des
Antilles », n’enregistre, avant
la dernière décennie du XVIIIe
siècle, que l’aventure mal connue
de Makandal, le Bossale exécuté
en 1758.
Aussi, les planteurs français se
vantent-ils de gérer la plus large
population d’esclaves dans la
plus paisible des colonies de la
Caraïbe. Cette autosatisfaction
en dit long sur l’efficacité de la
milice coloniale, aidée dès 1730
de la maréchaussée. La force de
police, recrutée parmi les libres de
couleur, répond de l’ordre colonial.
Dans une très large mesure, la
fameuse « perle des Antilles »
est son œuvre. Julien Raimond,
coauteur de la Constitution de
1801 de Toussaint, le clame à
tout bout de champ. Il affirme
que les gens de couleur ont su
seuls contenir les esclaves (1791:
ii) dont la cause est séparée de la
leur comme la lumière l’est des
ténèbres (1791: 2).
En 1789, alors que la France
érige un monument au peuple
souverain, que tout le monde
connaît comme la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen,
la presque totalité des personnes
qui peuplent la colonie de Saint-
Domingue est délibérément
éliminée des décisions politiques
par ceux qui se feront appeler les
héros de l’Indépendance. Durant
deux cents ans, leurs successeurs
font de leur mieux pour bâillonner
ce peuple souverain.
*Jean Casimir est docteur en sociologie
de l’Université nationale autonome de
Mexico, secrétaire général du Centre
latino - américain de recherches en
Sciences sociales (Brésil - Unesco).
Auteur de plusieurs ouvrages, il a
été secrétaire des Nations unies à
New York et, de 1975 à 1988, il a fait
partie de la Commission économique
pour l’Amérique latine et la Caraïbe.
En 1990, il fut secrétaire général du
Conseil électoral provisoire en Haïti,
puis ambassadeur d’Haïti à Washington
et représentant permanent auprès de
l’Organisation des États américains
(OEA).
1915 et le besoin d'occupationPar Jean Casimir (Première partie)
3. MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 3
ACTUALITÉ
Ramener le souverain !
Haïtivaseretrouverbientôt,certainement,avecunnouveauparlement.
Ilétaitnécessairederenouvelernotrepersonnelpolitique.
Maisentreuneréalitéetuneautrequ’onfabrique,ilyatoutunabîme.
Etc’estdanscegouffrequ’ilfautéviterdetomber.
Laprécaritédanslaquellevitlapopulationengénéraletcequinousrestedeclasses
moyennesrendpossiblesdesacrobatieshallucinantes.
Cequiesttoujourschoquant,c’estdevoirlenombred’intelligenceshaïtiennesqui
fontdesgénuflexionsdevantl’étrangeretquipartentdupostulatquec’estl’étranger
quiplanifieetquidécidedetout.
Commes’ilyavaittoujourscheznousdescolonsetdescommandeurs.
Des commandeurs qu’on retrouve et qu’on achète trop souvent dans une classe
quiauraitdûêtrelemoteurduchangementenHaïti,carc’estellequiadevraies
attachesaveccetteterrequenousontléguéenosancêtres.
L’étonnant dans ce qu’on est en train de vivre, c’est avec quelle facilité on recom-
menceunjeudéjàconnuavecunscénariodéjàétabliquinousdonneratoujours
cetteinstabilitéquiempêchera–est-celebutrecherché?–laremiseàflotdela
barquenationale.
Ons’attendaitauxdéclarationsdelacommunautéinternationale.Elleasonagenda
dont les résultats au cours de ces dernières décennies ne sont nullement à son
avantage.Maismalheureusement,riennesedégageencoredenotresociétépour
quel’étrangerseretrouvefaceàdesinterlocuteursdécidésàchangerladonnedans
l’intérêtdelanationhaïtienne.
Ilfaudraencoreetencoretravailleràunsursautdenotrecorpssocialdanstoutes
sescomposantespourqu’enrestantdanslecadredémocratique,quelesexperts
enchaostententdedévoyer,noustrouvionslaforceetl’énergienécessairesafinde
construiredesalternativespourcontrertoutprojetantinational.Danscenouveau
paradigme, nous serons seuls, livrés à nous-mêmes. Mais si nous voulons être
conséquents avec ce qui nous reste de mémoire, avec ce qui nous reste de fierté,
nousn’avonspaslechoix.
Laquestionquelesvraispolitiquesdevraientseposer, c’estcommentramenerle
souverain, le peuple, dans le jeu politique, alors que dans une proportion dom-
mageablepourlefonctionnementd’unevraiedémocratie,ilnes’estpasprésenté
auxurnes.Sicettequestionn’estpastraitée,oncourtlerisquedel’installationd’une
dictaturedéguisée.
Toutseraentreprispourtordrelaréalité.Maislaréalitéresteracequ’elleest.
Gary VICTOR
Édito
La participation
n'était pas au
rendez-vouspar Evens REGIS
HAÏTI/LÉGISLATIVES
Ce qui est de nature à réduire un
peu plus le taux de participation vu
que les élections ont été annulées
dans ces entités saccagées.
Vers les dix heures, dans la
matinée du dimanche, à l’École
normale de Martissant, dans un
bureau de vote choisi au hasard,
les MBV ont enregistré, sur une
liste de 470 potentiels votants,
seulement 36 votes, y inclus les
mandataires des partis, bien que
les opérations aient débuté depuis
6 h a. m.
Ce fut le même constat pour le
centre de vote placé au stade
national Sylvio Cator, après midi,
dans un bureau choisi également
au hasard, le nombre de votants
était évalué à 13, toujours sur
un total de 470, dans ce centre
logeant 26 bureaux de vote.
Le déplacement des centres de
vote a été l’élément annoncé
par les citoyens rencontrés,
qui justifierait cette faible
participation.
C’était le cas au centre de vote
du Lycée national Toussaint
Louverture, transféré à la rue des
Casernes au collège Elie Dubois.
Les électeurs n’ont pas pu trouver
leurs noms sur la liste électorale
provisoire (LEP). Très en colère,
ils sont partis sans voter.
Au Lycée Daniel Fignolé, vers les
onze heures, le processus était
déjà interrompu. Les électeurs
arrivés après n’ont pas eu la
chance d’accomplir ce devoir
qu’ils étaient venus accomplir.
C’était le même cas de figure
aux lycées Anténor Firmin, Jean
Jacques Dessalines, du Cent-
Cinquantenaire, de Carrefour-
Feuille, Horacius Laventure,
Pétion-Ville, ainsi que dans les
centres logés à l’École méthodiste
de Frères, à l’école des Frères de
l’instruction chrétienne de Pétion-
Ville.
La recette était tout aussi famélique
au building du tour 2004, et
dans plusieurs écoles nationales,
comme celles de la République
du Pérou, du Guatemala, et du
Paraguay.
À petit-Goave, Arcahaie,
Dondon, Saint-Marc, Grande-
Saline, Limonade, Cap-Haïtien,
Sainte-Suzanne, etc., plusieurs
centres de vote ont connu, eux
aussi, des moments difficiles,
ce qui expliquerait, selon les
observateurs électoraux tant
nationaux qu’internationaux
interrogés, qu’une quantité
importante de l’électorat n’a pas
choisi de prendre la route des
urnes durant ce premier tour des
législatives.
Des membres d’un bureau de vote attendant des électeurs. / Photo : J. J. Augustin
» suite de la première page
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LES ÉDITIONS DES ANTILLES S.A
4 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
ACTUALITÉ
L
’OEA croit que les scrutins
ont été une réussite sur tout
le territoire de la République.
Près de 33 % des représentants
des partis politiques et 24 % des
observateurs nationaux constitués
de femmes y ont pris part, si l’on
en croit les propos du chef de cette
mission, José Enrique Castillo
Barrantes. Aussi a-t-il souligné que le
Conseil électoral provisoire (CEP) a
consenti d’énormes efforts en matière
d’éducation électorale.
Le numéro un de cette mission
a en outre salué l’affichage
des listes électorales dans les
différents centres de vote, lors de
ces législatives. Selon lui, cette
pratique contribue à assurer une
plus grande transparence dans
le cadre de ces élections. Il a
toutefois fait remarquer que cela
pouvait se réaliser de manière
anticipée au scrutin en vue de
permettre aux citoyens de mieux
identifier leurs bureaux de vote.
José Enrique Castillo a toutefois
dit regretter les actes de violence
enregistrés à plusieurs endroits
durant ce scrutin. Il a indiqué que
le processus a accusé un certain
retard dans certaines zones
géographiques du pays.
Ce qui est contraire au décret
électoral. Il a en outre affirmé
que, dans l’ensemble, le processus
électoral a pu se tenir et arriver à
terme dans la grande majorité des
centres de vote.
Quant aux bureaux de vote qui ont
été fermés prématurément, José
Enrique Castillo Barrantes informe
qu’il ne revient pas à la mission de
l’OEA de résoudre ce problème. Il
incombe à l’institution électorale
de décider.
Élections : Taux de
participation en dessous des
attentes ?
Interrogé à ce sujet, le chef de
la Mission a indiqué qu’il ne
dispose pas de chiffres en ce qui
concerne le taux d’abstention. Il
rappelle que le CEP n’en a pas
communiqué non plus, lors de sa
conférence de presse, le dimanche
9 août, au terme du scrutin. Selon
ce qu’a indiqué M. Castillo, il est
en train de recueillir les éléments
d’information y relatifs.
Pour l’instant, dit-il, il n’est pas
en mesure d’avancer de chiffres
relatifs à la participation des
électeurs. Toutefois, il a tenu
à préciser que les premières
données témoignent d’une faible
participation.
D’autre part, il a indiqué qu’il
faut se rappeler qu’en Haïti le
vote n’est pas obligatoire. Ce volet
revêt une grande importance dans
le cadre de la démotivation des
citoyens. Le vote, souligne-t-il, est
perçu comme un droit, mais non
comme une obligation. Et c’est
dans ce contexte qu’il convient de
placer quels que soient les chiffres
que l’on pourrait avancer dans les
prochains jours.
Se gardant de se prononcer sur
l’implication des organismes
internationaux, notamment de
l’OEA, dans les résultats des
élections en Haïti, le chef de la
mission hémisphérique a indiqué
que le rôle de l’Organisation
consiste à observer, constater et
à faire des recommandations au
gouvernement et au CEP.
Mais il affirme être en dehors des
activités électorales. « Chaque
élection est un défi pour le pays.
Nous espérons que le peuple
haïtien parviendra à le relever au
fur et à mesure en améliorant les
mécanismes qui s’y rapportent.
Monsieur Castillo a, par ailleurs,
annoncé le déploiement d’une
nouvelle mission de l’OEA au mois
d’octobre prochain. Il informe
qu’à la fin processus électoral,
la Mission soumettra un rapport
contenant des informations
et des recommandations au
Conseil permanent de l’OEA en
vue d’appuyer le système national
haïtien.
Quid de la mission de l’OEA ?
Le chef de la Mission a, par
ailleurs, expliqué que la MOE
s’est penchée, depuis son arrivée
dans le pays, sur les questions
liées au registre électoral et sur
la diffusion de l’information
nécessaire aux citoyens dans le
cadre de ce vote. La MOE, dit-il,
prend note des efforts du CEP en
matière d’éducation électorale.
Il informe que ces efforts méritent
d’être renforcés afin d’encourager
la participation des électeurs à la
présidentielle, aux municipales
et locales. Il a aussi préconisé la
mise en place d’une campagne
d’éducation civique en vue de
sensibiliser la population.
Nos observateurs, poursuit M.
Castillo, ont été témoins d’une
certaine confusion relative
à la procédure de vote, tout
particulièrement dans le cas de
ces législatives. Ce problème
aurait pu être évité par l’affichage
d’instructions visibles dans
tous les BV. Les élections
présidentielles, municipales et
locales, souligne-t-il, représentent
de grands enjeux.
Ainsi, elles seront encore plus
complexes. Pour ce faire, il sera
fondamental pour l’institution
électorale d’arriver à une meilleure
coordination du processus. À
cet effet, la présence d’un plus
grand nombre de superviseurs
et d’agents d’information du
CEP dans les centres de vote est
nécessaire.
Depuis les élections de 2010,
les missions d’observation des
élections en Haïti, telles l’Onu et
l’OEA, ne sont pas en odeur de
sainteté. De nombreuses dérives
leur sont reprochées compte
tenu de leur implication dans les
résultats de ces scrutins.
L'OEA accorde
une bonne note
au CEPpar Reynold Aris
HAÏTI/LÉGISLATIVES
Alors que les élections législatives du 9 août 2015 sont l’objet des critiques des
partis politiques, les organismes internationaux, eux, parlent de réussite. C’est le cas
de l’Organisation des États américains (OEA) qui en a profité, lundi, pour annoncer
une nouvelle mission d’observation en Haïti pour le premier tour de la présidentielle
prévu le 25 octobre prochain.
» suite de la première page
5. «
Les élections ont été très
mal organisées », affirme, le
directeur exécutif du Réseau
national de défense des droits
humains (RNDDH), Pierre Espérance,
qui a été sur le terrain pour observer
le déroulement du processus. Le
cadre installé dans les centres de vote
n’était pas approprié pour faciliter la
tâche aux électrices et électeurs. Des
bureaux de vote sont placés sous le
soleil dans la cour de certains centres
de vote, les isoloirs sont placés dans
certains cas à environ 60 centimètres
du sol, et dans d’autres cas n’offrent
aucune discrétion.
Une autre difficulté est
l’aménagement des bureaux
dans de petites salles coincées,
sans oublier les divers actes de
violence ayant au moins débouché
sur un mort. Il est visible que
« le traitement infligé aux
membres de la population (les
votants) est inacceptable (…) »,
et dans ce contexte « le CEP et le
gouvernement ont démontré qu’ils
n’étaient pas capables d’organiser
les élections ».
Le Réseau ne partage pas non plus
l’idée d’une satisfaction globale
que s’attribuent les autorités.
« Non ! » répond Pierre Espérance,
sur la question, dans une entrevue
accordée au National.
La Commission épiscopale
nationale, justice et paix
(CE-Jilap) a été aussi sur le
terrain. La direction nationale de
la Commission partage les idées
du RNDDH.
Jocelyne Colas, directrice
nationale de la CE-Jilap, essaie de
trouver un sens à l’expression de
satisfaction du gouvernement et
du Conseil électoral provisoire. «
Si le CEP avait pris le 9 août pour
un test, alors c’est un test réussi
; car il (le CEP) a bouclé la journée
de vote. » Les observateurs de
la CE-Jilap ont vu une journée
de vote se dérouler dans « une
atmosphère de doute et de peur ».
Une irrégularité en a appelle une
autre dans cette journée ; les
électeurs ne trouvent pas leurs
noms sur les listes électorales
partielles (LEP), les mandataires,
voire des membres d’organisations
d’observation néophytes, sont
auteurs de désordre, de troubles
et aucune structure n’a été mise
en place pour aider celles et ceux
qui ont des handicaps à voter.
Par ailleurs, le décret sur
certains points n’est pas
respecté. La CE-Jilap souligne
que « la campagne a continué
dans certains centres de vote,
menée par des mandataires de
partis politiques». Une attitude
en violation de l’article 122 du
décret électoral, qui interdit toute
activité politique ou électorale
à la date de la fermeture de la
campagne.
Parler de la participation
citoyenne à une élection renvoie
souvent à l’image d’une file de
votants, une photo absente de la
journée électorale du 9 août, où
les membres de bureaux de vote
ont tué le temps en dialoguant
pour attendre l’arrivée au compte-
gouttes des électeurs. Cette
faible participation laisse croire
à Jocelyne Colas qu’« un grand
danger » guette la vie politique.
« C’est la légitimité des nouveaux
parlementaires qui sortiront de
ces élections (…) qui est en jeu.
Encore une fois, le pays aura
des élus issus d’élections avec
une faible participation de la
population », craint Jocelyne
Colas.
Une explication à cette faible
participation ne paraît pas
facile, pour la Plateforme des
organisations de défense des
droits humains (POHDH), qui
a vingt années de pratique
d’observation électorale. Cet
état spectateur de la population
est « lié à une très mauvaise
communication des organisateurs,
surtout en rapport à la circulation
(d’automobiles) », les restrictions
de circulation du Conseil ont été
mal comprises aussi, « l’État n’a
pas planifié la journée pour qu’elle
puisse réussir », croit Antonal
Mortimé, secrétaire exécutif
de la POHDH. Il est tout aussi
difficile au secrétariat exécutif de
la Plateforme de qualifier les dix
heures de vote. « C’est une journée
qui pose beaucoup de difficultés à
être qualifiée. »
Antonal Mortimé juge également
que celles et ceux qui seront élus
pourraient souffrir d’un manque
de légitimité. Pour pallier le
problème, la Plateforme appelle
à la reprise des élections dans les
circonscriptions électorales où les
élections ont été interrompues
ou tout simplement n’ont pas eu
lieu. Il souhaite l’application de
cette même disposition dans les
endroits où les candidats n’ont pas
eu un fort pourcentage de vote.
Le secrétaire exécutif de la Plate-
forme invite les partis indistincte-
ment à lancer un appel au calme
à leurs partisans pour éviter
tout dérapage avant et après la
publication des résultats des
scrutins législatifs du 9 août.
La POHDH exhorte le
gouvernement à assister les
victimes des actes de violence des
opérations de vote.
La POHDH salue toutefois les
efforts des agents de la Police
nationale qui ont été présents dans
les centres de vote. Mais ils ont été
trop laxistes et complaisants face
aux violences, déplore la direction
exécutive de la POHDH.
MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 5
ACTUALITÉ
Déjà des doutes sur la légitimé
des futurs éluspar Stephen Ralph Henri
HAÏTI/ÉLECTIONSLÉGISLATIVES
Des organisations de la société civile ne cachent pas leur déception suite au déroulement de la journée de vote
du 9 août 2015, devant permettre l’élection de 119 députés et de 20 sénateurs, pour constituer la 50e
législature
haïtienne. Pour ces institutions qui ont observé les activités de vote, les problèmes d’organisation liées à ces
élections ont ouvert la voie à une grave crise de légitimé pour les prochains élus. Elles appellent à la reprise des
élections dans les circonscriptions électorales où le scrutin a été troublé par des actes de violence.
Pierre Espérance, directeur exécutif du RNDDH. / Photo : Ruben Chéry
6. 6 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
ACTUALITÉ
La légitimité du CEP en questionpar Jean Michel Cadet
L
’organisation des élections,
dans un système démocratique
représentatif, concerne
au premier chef les partis
politiques qui aspirent à prendre les
rênes du pouvoir. Pourtant au cours
de cet exercice qui a lieu ce dimanche,
les partis politiques qui y ont pris
part rejettent ce scrutin émaillé pour
certains d’entre eux d’irrégularités et
de fraudes massives caractérisées.
Tour à tour, les représentants de
ces partis politiques dénoncent le
processus. Le pouvoir en place est
accusé de favoriser les partis qui
lui sont proches alors que ceux-ci
rejettentcesaccusationsestimantêtre
victimes des partis de l’opposition.
Plusieurs partis de l’opposition
tels que la Fusion des sociaux-
démocrates, Fanmi lavalas,
Renmen Ayiti, décident de faire
une coalition en vue de sauver
le processus électoral. Au cours
d’une conférence de presse
conjointe donnée le lundi 10
août, ils dénoncent le processus
électoral entaché, disent-ils, de
violences et de fraudes massives
qui proviendraient des partis
proches de l’équipe Tèt kale.
Pour ces partis, le CEP ne serait
plus l’organe légitime habilité
à décider seul de l’issue de ces
scrutins. Ils proposent, dans
une note collective, la formation
d’une commission mixte qui
serait composée des membres du
CEP, des partis politiques et de
la société civile afin d’évaluer les
dégâts.
L’Organisation du peuple en
lutte (OPL) qui s’est longtemps
réclamée de l’opposition
modérée s’est détachée du lot.
Son coordonnateur, Sauveur
Pierre Etienne, dit prendre acte
des nombreux cas de violences
et de fraudes massives qui ont
caractérisé la journée électorale.
Soulignant au passage que les
partisans des partis proches du
pouvoir comme « PHTK » (Pati
ayisyen tèt kale), Bouclier et «
Renmen Ayiti » autant que ceux
de l’opposition dite radicale,
qu’il s’est gardé de citer, auraient
tous pris part aux actes de
violences. En conséquence, l’OPL
demande au CEP d’appliquer le
décret électoral, notamment en
son article 116 qui prévoit des
poursuites judiciaires contre tous
candidats et leurs partisans qui
auraient fait usage de la violence
durant le processus.
Le destin du processus et du pays
en général dépend du CEP, déclare
Sauveur Pierre Etienne d’un ton
convaincu. En appliquant le
décret électoral, selon lui, l’organe
habilité à organiser les élections
projetterait une image positive
aux yeux de l’opinion publique.
Dans le cas contraire, il se fera
complice de ce qu’il qualifie de
tsunami politique que pourrait
connaître le pays.
Accusé par ces partis de
l’opposition, le PHTK (Parti haïtien
Tèt kale) dit rejeter ces allégations
assimilées, selon son directoire, au
cours d’une conférence de presse,
à une campagne de dénigrement
des mauvais perdants. Répondant
aux partis contestataires des
scrutins du 9 août, le parti au
pouvoir estime que les élections
en Haïti ont toujours fait l’objet
de contestations. Rien donc de
nouveau sous le soleil.
S’il est vrai que les partis de
l’opposition décrédibilisent le CEP,
le PHTK estime que le premier
tour des scrutins s’est réalisé
dans des conditions acceptables.
Aussi s’en remet-il aux résultats
que cette instance est habilitée à
donner.
Cette position du parti au pouvoir
est de nature à conforter le CEP,
pourtant décrié par l’opposition,
qui s’est pourtant décerné
un satisfecit pour le « bon
déroulement » du premier tour des
législatives. Toutefois la majorité
des partis politiques engagés dans
le processus électoral remet en
cause l’autorité du CEP. Une autre
entité serait cessionnaire pour
décider de l’issue de cette journée
électorale perçue par Fanmi
lavalas comme le prolongement
des élections du 28 novembre
2010.
Le premier tour des législatives,
tenu le 9 août 2015, est la
première réalisation en matière
électorale de l’équipe au pouvoir
depuis son intronisation le 14 mai
2011. Décriés dans cette première
manche, le CEP et le pouvoir sont
attendus au tournant. Le second
tour des législatives est prévu au
25 octobre, date du premier tour
de la présidentielle.
ÉLECTIONS/LÉGISLATIVES
Le premier tour des législatives a, certes, eu lieu le dimanche 9 août. Une crise postélectorale se profile déjà à
l’horizon. Alors que les autorités haïtiennes se disent satisfaites, les partis politiques dénoncent cette journée
électorale. Remettant en cause la légitimité du Conseil électoral provisoire, ils recommandent la formation d’une
commission mixte apte à déterminer l’issu de ces scrutins.
Maryse Narcisse (Fanmi Lavalas) Jean Henry Céant (Renmen Ayiti) Edmonde Supplice Beauzile (Fusion) Photo : J. J. Augustin
8. 8 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
MONDE
L'agence de protection de l'environnement
pollue une rivière par accident
Sources : AFP
E
lle a déversé plus de 10 mil-
lions de litres de liquides
pollués dans une rivière du
Colorado.
Des employés de l’agence
américaine de protection de
l’environnement (EPA) ont déver-
sé par accident plus de 11 mil-
lions de litres de déchets liquides
d’une ancienne mine d’or dans
une rivière du Colorado (ouest),
la faisant virer à l’orange.
L’incident s’est produit le 5 août,
lorsque des employés de l’EPA,
qui essayaient de drainer et trait-
er l’eau de la mine abandonnée
ont provoqué l’accident et jeté le
mélange toxique, qui contient en
particulier des métaux lourds et
de l’arsenic, dans un affluent de
la rivière Animas.
L’EPA a triplé sa première estima-
tion du volume de liquides pollués
déversés, de 1 million de gallons
(environ 3,8 millions de litres)
initialement à 3 millions. La pol-
lution est rendue très visible par
sa teinte orange et s’étend sur plus
de 160 kilomètres, jusque dans
l’Etat voisin du Nouveau Mexique.
Les autorités ont offert aux river-
ains des kits pour tester la qualité
de l’eau de leurs puits. La rivière
Animas a été interdite à toute
embarcation par précaution et la
ville de Durango, qui compte envi-
ron 17 500 habitants, ainsi que le
comté alentour ont déclaré l’état
d’urgence, selon un communiqué
commun. «Nous agissons ainsi en
raison de la gravité de cet inci-
dent et pour marquer l’inquiétude
des autorités et élus locaux par
rapport à la mobilisation de tous
les moyens au niveau de l’Etat
et au niveau fédéral sont mis en
œuvre non seulement pour gérer
activement ce tragique incident
mais également pour aider notre
communauté à s’en remettre»,
a souligné Joe Kerby, un des
responsables du comté de La
Plata, principalement affecté par
la catastrophe.
L
a Commission européenne a
approuvé lundi le déblocage
d’une aide de 2,4 milliards
d’euros sur six ans pour per-
mettre aux pays européens de faire
face à l’arrivée croissante de migrants
sur leur territoire.
L’Italie recevra le soutien le plus
important avec près de 560 mil-
lions d’euros tandis que la Grèce
bénéficiera d’une aide de 473 mil-
lions d’euros.
L’Union européenne avait aupara-
vant déjà approuvé des aides aux
autorités françaises et britan-
niques, qui tentent de trouver une
solution à la crise provoquée par
les migrants installés à Calais et
qui cherchent de passer en Grande-
Bretagne. Une dizaine d’entre eux
ont trouvé la mort depuis le début
du mois de juin.
La Grande-Bretagne a déjà reçu
27 millions d’euros de finance-
ments communautaires d’urgence,
sollicités en mars, et la France en
recevra 20 millions dans le courant
du mois, ont précisé les services de
la Commission.
« Nous sommes désormais en
mesure de verser les fonds destinés
au programme national français et
le Royaume-Uni a d’ores et déjà reçu
le premier versement du finance-
ment qui lui revient », a précisé lors
d’une conférence de presse Natasha
Bertaud, une des porte-parole de la
Commission européenne.
« Ces deux programmes, entre
autres choses, concerneront la situ-
ation à Calais », a-t-elle ajouté.
Vendredi, le Haut-Commissariat
des Nations unies pour les Réfugiés
(HCR) a réclamé une « réponse
exceptionnelle d’urgence » à la
crise des migrants dans le secteur
de Calais.
« Le HCR réitère un appel lancé
depuis l’été 2014 pour une
réponse globale - en premier lieu
de la part des autorités françaises
- face à la dégradation des condi-
tions d’accueil des réfugiés et des
migrants à Calais », a déclaré la
porte-parole du HCR, Melissa Flem-
ing, lors d’un point de presse.
D’après l’agence onusienne,
quelque 3 000 réfugiés et migrants
se trouvent actuellement à Calais
et dans le Pas-de-Calais, soit qua-
siment le même nombre qu’en
novembre dernier. Cette situation,
souligne le HCR, n’est « ni nouvelle,
ni ingérable ».
Au cours du week-end, en marge
d’un déplacement à Singapour, le
ministre britannique des Affaires
étrangères, Philip Hammond, a
affirmé que le mode de vie et les
structures sociales de l’Union euro-
péenne seraient menacés par un
afflux massif de migrants venant
d’Afrique.
« La situation n’est pas tenable
parce que l’Europe ne peut pas
se prémunir et protéger son mode
de vie et ses structures sociales si
elle doit absorber des millions de
migrants venus d’Afrique », a-t-il
dit.
Face à la crise des migrants,
l'UE débloque 2,4 milliardsSources : Reuters
Syriens originaires de Kobani débarquant d’un navire des garde-côtes italiens dans le port de Kos, en Grèce. La Commission
européenne a approuvé lundi le déblocage d’une aide de 2,4 milliards d’euros sur six ans pour aider les pays européens à faire face à
l’arrivée croissante de migrants sur leur territoire. / Photo : prise le 10 août 2015 / REUTERS / Yannis Behrakis
Photo fournie par le comté de La Plata de la rivière Animas, le 10 août 2015.
9. MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 9
MONDE
Redémarrage prévu mardi d'un premier
réacteur après 2 ans sans énergie nucléaire
Sources : AFP
U
n premier réacteur doit être
remis en service mardi au
Japon, deux ans après la
fermeture de toutes les cen-
trales nucléaires du pays à la suite de
l’accident de Fukushima.
« Nous relancerons le réacteur
Sendai 1 (à quelque 1 000 km au
sud-ouest de Tokyo) le 11 août et
il devrait commencer à générer
de l’électricité le 14 », a annoncé
lundi la compagnie exploitante,
Kyushu Electric Power dans un
communiqué. Elle prévoit une
exploitation normale « à compter
de début septembre ».
Le redémarrage est prévu à
10H30 locales (01H30 GMT) et
le cœur devrait entrer en réaction
en chaîne à compter de 23H00
(14H00 GMT), selon une porte-
parole. L’opération se fera sous la
supervision de l’autorité de régu-
lation nucléaire.
« La première priorité est la sécu-
rité », a déclaré le porte-parole
du gouvernement, Yoshihide Suga
lundi.
Le réacteur en question, initiale-
ment entré en service en juillet
1984, avait été éteint le 10 mai
2011 pour son 21e cycle de main-
tenance régulière, respectant alors
le calendrier habituel qui prévoit
3 à 4 mois d’arrêt de routine après
12 à 13 mois de fonctionnement.
Toutefois, il n’a pas pu être réac-
tivé depuis à cause de la déci-
sion des autorités d’instaurer des
normes de sûreté plus sévères à
l’aune du désastre de Fukushima
dont l’ampleur a dépassé toutes
les dispositions techniques de
sûreté.
Alors qu’auparavant une telle
catastrophe - avec rupture totale
de l’alimentation des systèmes de
refroidissement et fusion simul-
tanée de plusieurs cœurs - était
considérée comme impensable,
aujourd’hui c’est une possibilité
envisagée.
Plusieurs jours d’exercices ont
eu lieu récemment sur le site de
Sendai sur la base d’un scénario
similaire à celui de Fukushima où
plus de 150 000 habitants de la
région avaient dû partir précipi-
tamment.
Progressivement les 48 réacteurs
de l’archipel (sans compter les six
condamnés de la centrale Fuku-
shima Daiichi) ont été stoppés.
Une population
majoritairement contre
L’unité voisine, Sendai 2, est
presque au même stade que
Sendai 1 et trois autres (Takaha-
ma 3 et 4 à l’ouest, et Ikata 3 au
sud) ont reçu un premier feu vert
technique de l’autorité nucléaire
mais ont encore plusieurs étapes
à franchir avant une éventuelle
remise en exploitation.
Les deux derniers, Ohi 1 et 2
(ouest), avaient été arrêtés en sep-
tembre 2013 et le Japon, dont un
peu plus d’un quart de l’électricité
était d’origine nucléaire avant
2011, est ainsi totalement privé
d’énergie atomique depuis près
de deux ans.
Il compense avec des centrales
thermiques tournant à pleine
puissance ou remises spéciale-
ment en marche.
Aucune coupure n’a eu lieu depuis
l’arrêt total des réacteurs et
aucune restriction imposée.
Même si l’électricité suffit, le gou-
vernement du conservateur Shinzo
Abe plaide que les réacteurs
nucléaires sont indispensables en
raison du surcoût économique de
l’achat des hydrocarbures néces-
saires au fonctionnement des cen-
trales thermiques.
Il argue aussi que les entreprises
se restreignent et que cela ralentit
le potentiel de croissance du pays.
Enfin, le gouvernement insiste sur
le fait que l’emploi extensif des
centrales thermiques empêche le
pays d’afficher d’ambitieux objec-
tifs en matière de rejets de CO2 et
autres gaz à effet de serre.
Face à cela, la population est per-
plexe: selon une étude conduite
samedi et dimanche par le quo-
tidien Mainichi Shimbun auprès
de 1 000 personnes, 57 % sont
contre la relance de Sendai et 30
% la soutiennent.
Les organisations écologistes sont-
elles hostiles à tout redémarrage
pour des raisons de sûreté (risques
sismiques et volcaniques selon
elles sous-évalués) et d’impact
environnemental.
« Le gouvernement japonais reste
attaché à une économie basée
sur l’énergie nucléaire et fossile,
mais la réalité est que le Japon a
le potentiel de générer 56 % de
son électricité à partir de sources
renouvelables d’ici 2030, ce qui
permettrait de réduire les émis-
sions de carbone », insiste Ai
Kashiwagi de Greenpeace.
Une manifestation avait lieu dès
lundi devant le siège de Kyushu
Electric, le Premier ministre au
moment de l’accident de Fuku-
shima, Naoto Kan, jugeant «
qu’accepter un redémarrage dans
les conditions actuelles est une
faute », selon les images diffusées
par les médias locaux.
Manifestation anti-nucléaire, le 9 août 2015 devant la compagnie, Kyushu Electric Power,
qui va faire redémarrer le réacteur Sendai 1, à quelque 1.000 km au sud-ouest de Tokyo.
/ Photo : AFP/JIJI PRESS/AFP
JAPON
Les Etats-Unis « profondément inquiets » des
arrestations de dissidents à Cuba
Sources : AFP
L
es Etats-Unis ont condamné
lundi les arrestations la veille à
Cuba de quelque 90 opposants
qui avaient manifesté avec
des masques à l’effigie du président
Barack Obama, à quelques jours de
la visite historique à La Havane du
secrétaire d’Etat John Kerry.
« Nous sommes profondé-
ment inquiets de l’arrestation
d’activistes pacifiques », a dénon-
cé John Kirby, porte-parole du
département d’Etat.
« Les Etats-Unis continueront de
défendre les droits de rassemble-
ment et d’association pacifiques
ainsi que la liberté d’expression », a insisté M. Kirby, sans toutefois remettre en cause la visite prévue
le 14 août de son ministre John
Kerry pour officiellement rouvrir
l’ambassade des Etats-Unis à La
Havane.
Environ 90 opposants cubains ont
été brièvement arrêtés dimanche
pour avoir manifesté avec des
masques à l’effigie du président
Obama, pour protester contre la
réouverture de la chancellerie
américaine sur l’île communiste.
Les deux pays ont renoué leurs
relations diplomatiques le 20
juillet dernier, après 54 ans
d’interruption, et selon les termes
d’un rapprochement historique
amorcé depuis décembre dernier
entre Washington et La Havane.
Des centres de vote sous des tentes à Bulding 2004
10. C
’est un événement plané-
taire. Le Fonds monétaire
international (FMI), organ-
isme basé à Washington né
des accords de Bretton Woods en
1944, qui a largement contribué à
bâtir le système financier actuel, tire
la sonnette d’alarme. Généralement
rassurante, l’institution sort de ses
habitudes pour mettre le doigt sur
ce qui « accentue les tensions » dans
l’économie mondiale.
Bien sûr, le discours tenu par le FMI
reste sobre et évite soigneusement
les formules catégoriques et trop
explicites. Néanmoins, après avoir
déjà consacré son avant-dernier
rapport régulier – biannuel ou
trimestriel – sur la stabilité
financière aux « risques » encourus
par les acteurs publics et privés de
la finance internationale, l’édition
d’avril 2015 du document franchit
une marche supplémentaire
La prochaine crise est inévitable.
Pour le prouver, nous nous
intéresserons de près aux signaux
négatifs dont le FMI fait état,
reposant comme à l’accoutumée
sur une étude empirique des
conjonctures. Dans un second
temps, nous lierons à ces facteurs
circonstanciels un examen
structurel du système financier
contemporain. Ce dernier, par
une analyse plus profonde, sera
révélé pour ce qu’il est – un géant
aux pieds d’argile, sans cesse
grandissant pour nourrir en
milliards la caste des ultra-riches.
Le printemps des crises
Le FMI fait état d’une conjoncture
qui, mois après mois, « intensifie les
risques » de survenue d’une nouvelle
crise financière. Certains éléments,
salués en France par les dirigeants poli-
tiques et les économistes de cabinet
comme très favorables pour l’économie
nationale, sont profondément déstabil-
isateurs pour le système international.
Autrement dit, les causes d’une crois-
sance française « élevée », à 0,6% au
premier trimestre selon les estimations
bienveillantes de l’Insee, mettent en
danger des acteurs économiques de
premier rang – donc l’équilibre finan-
cier planétaire.
Taux d’intérêt records en
France et en Allemagne
Le 1er juin 2015, les taux d’intérêt
auquel la France emprunte sur les
marchés ont atteint un nouveau
record. A dix ans, les obligations ont
atteint le seuil de 0,8080% ; pour les
maturités les plus courtes, les taux sont
même négatifs depuis des mois, et ont
même franchi, ce jour, la barre du -1%
pour les échéances de trois ans. Une
bonne nouvelle, à priori : enfin, l’Etat
semble sortir des milliards d’euros
d’intérêts réglés chaque année à ses
créanciers. Sur LE BILAN, nous avons
d’ailleurs insisté sur l’arnaque géante
que représente la dette publique pour
les travailleurs français. Mais du point
de vue de l’équilibre des marchés, c’est
une toute autre histoire.
En réalité, la ruée vers les dettes alle-
mandes et françaises met à mal la
rentabilité du secteur de l’assurance.
L’outre-Rhin emprunte également
à des taux très bas, pour une raison
simple : comme les obligations fran-
çaises, les allemandes représentent le
risque le plus faible du marché. Les
compagnies d’assurance misent des
quantités astronomiques de capitaux,
souvent dans des placements périlleux.
La probabilité de voir s’effondrer ces
investissements, lucratifs mais dan-
gereux, oblige les entreprises à placer
certains œufs dans des paniers plus
sûrs.
Les emprunts des Etats ont toujours
représenté une solidité, une garantie
de remboursement quoiqu’il advienne.
Mais dans la zone euro, certains pays
ont inspiré davantage de craintes que
de confiance : la Grèce, l’Italie, le Por-
tugal ont subi, ces dernières années,
des phénomènes de désinvestissement
massif en raison des inquiétudes de
restructuration de leurs dettes pub-
liques ; et par le jeu du marché, leurs
taux se sont alors relevé subitement,
entraînant parfois de graves con-
séquences.
A contrario, face à l’instabilité des
Etats du sud, les premières puissanc-
es de l’Union européenne ont incarné
dans l’esprit des financiers une cer-
taine intangibilité. Les dettes fran-
çaises et allemandes, malgré la santé
relativement mauvaise de l’économie
hexagonale, sont devenues les valeurs-
refuge par excellence. Mais y investir
a représenté un coût toujours plus
important : désormais, ce sont les cré-
anciers qui payent ces gros Etats pour
pouvoir placer leurs capitaux entre
leurs mains, d’où les taux négatifs. La
loi du marché, théâtre d’un rapport
de force permanent entre l’offre et la
demande donne parfois des situations
comme celles-ci ; et plus les investis-
seurs sont nombreux à acquérir des
obligations françaises et allemandes,
plus les taux d’intérêt continueront à
baisser.
L’observateur non-averti pourrait
croire que chacun trouve son compte
dans ce mécanisme. Il sous-estimerait
lourdement les pratiques hasardeuses,
voire fâcheuses, des compagnies
concernées. Axa, Predica, et Allianz
vendent des contrats d’assurance en
garantissant des taux de rémunération
supérieurs ; elles promettent un
rendement élevé aux particuliers, qui
contractent des assurances-vie, des
retraites par capitalisation ou placent
leur épargne sur des investissements
présentés comme profitables. Mais les
difficultés du marché à restaurer la
confiance, et les taux toujours plus bas
des placements obligataires, creusent
toujours plus l’écart avec les revenus
prédits, dont les assurances jurent
de se faire les garantes. En bout de
course, les compagnies se rapprochent
toujours plus du précipice, et leur
chute pourrait être extrêmement
sévère.
Au printemps déjà, le FMI mettait
sérieusement en garde contre le
phénomène de tension qui s’opère
sur ce marché. Dans son rapport
sur la stabilité économique mon-
diale, publié en avril, l’institution
souligne que « la persistance des
faibles taux d’intérêt mettra à
rude épreuve un grand nombre
d’établissements financiers ».
Après avoir atteint, peu après la
publication du rapport, le record
absolu de 0,3%, puis être revenus
à plus de 1% début mai, les inté-
rêts des obligations sur dix ans
replongent à nouveau.
Or, le Fonds allait encore plus loin
: « les tests de résistance réali-
sés par l’Autorité européenne des
assurances et des pensions pro-
fessionnelles font apparaître que
24% des assureurs risquent de ne
pas pouvoir tenir leurs exigences
de solvabilité, dans un scénario
de persistance de faibles taux
d’intérêt ».
Autrement dit, dans ce « scénario
» qui est de loin le plus probable
de tous, un quart des compag-
nies se retrouveraient, ni plus ni
moins, en incapacité de régler
les prestations à leurs assurés
– qu’il s’agisse de complémen-
taires retraites ou de tout autre
contrat. L’ensemble du secteur de
l’assurance, qui détient les capi-
talisations les plus élevées de la
planète, se retrouverait bientôt
plongé dans une crise aux con-
séquences faramineuses, et dont
personne ne sait aujourd’hui s’il
sera possible d’en sortir.
Le pétrole et la guerre
Outre la crise des assurances,
qui menace de frapper de plein
fouet la zone euro, la situation
internationale n’est pas au beau
fixe. Un autre facteur, présenté
en France comme bénéfique pour
notre économie, est au cœur
des préoccupations : la chute
drastique du prix du pétrole.
Le baril de Brent, après avoir
atteint son plus haut historique
à près de 140 dollars en juin
2008, avait largement pâti de la
crise financière en tombant sous
la barre des 40 dollars six mois
plus tard. Mais son cours s’était
immédiatement repris, revenant
à 70 dollars en mai 2009, et
oscillant autour des 100 dollars
pendant près de cinq ans.
Voici exactement un an, le baril
était à plus de 110 dollars : il
entama, alors, sa baisse la plus
longue jamais observée. Jusqu’en
janvier 2015, pas un jour n’est
passé sans que le prix du pétrole
finisse par baisser ; après une
timide reprise en mars, son
cours stagne depuis deux mois
et les observateurs craignent une
nouvelle chute, vers les abysses
cette fois. Au passage, si le Brent
est le plus représentatif avec
près de deux-tiers des échanges
mondiaux, il est important de
souligner que le baril de pétrole
américain suit exactement la
même courbe, avec la même
baisse historique durant six mois.
*Benoit Delrue est journaliste au
quotidien français LE BILAN
**La suite dans la plus prochaine
édition du National.
TAUX DE RÉFÉRENCE (BRH)
>Taux moyen d’achat
52.0462 GDES
>Taux moyen de vente
53.1795 GDES
COURS DE
LA GOURDE
7 AOÛT 2015
10 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
ÉCONOMIE
Selon le FMI, la plus grosse
bulle financière de l'Histoire va
bientôt exploserPar Benoit Delrue* | 1 de 5
Dans son dernier rapport sur la stabilité financière, le Fonds monétaire international
sonne l’alarme. Son propos, sur la retenue comme d’ordinaire, n’est pas très
explicite. L’auteur ajoute une analyse structurelle du système financier aux aspects
conjoncturels relevés par le FMI,.
11. L
’Association pour la protection
des mangroves mène ce plan
dans la partie sud du départe-
ment d’Usulután, dans l’est,
dans une région appelée Bajo Lempa,
depuis 14 ans. Au total 86 commu-
nautés de fermiers et de pêcheurs sur
la baie de Jiquilisco sont impliquées
dans le projet.
La région de Bajo Lempa abrite
un peu moins de 148.000
personnes, selon le ministère de
l’Environnement et des Ressources
naturelles. « Nous avons travaillé
avec différents acteurs, des
groupes locaux, des jeunes et
des com0ités de protection de
l’environnement, et des gardes
de parc pour faire décoller cette
plateforme de développement
économique local », a déclaré à
Tierramérica, Carmen Argueta, la
présidente de l’Association pour la
protection des mangroves.
La croissance économique avec
un accent social, l’éducation
et la sécurité sont les trois
principaux points focaux pour
le gouvernement de gauche du
président salvadorien, Sánchez
Cerén, en fonction depuis juin.
Et c’est précisément sur ces trois
éléments que les communautés
de Bajo Lempa se concentrent
dans leur plan de développement
durable.
« Notre projet est en ligne
avec le plan quinquennal du
gouvernement, et nous voulons
qu’il sache que cela a marché pour
nous - les gens peuvent voir les
résultats », a déclaré Argueta. Elle
a ajouté qu’ils espéraient obtenir
le financement du gouvernement
pour certains projets.
Le respect et l’entretien des
ressources naturelles sont
essentiels pour mettre en œuvre
ce modèle de développement, a
ajouté cette fermière, qui est une
organisatrice communautaire
rurale depuis des décennies. La
zone de 635 km carrés autour de
la baie est l’un des principaux
écosystèmes du Salvador, qui
abrite la majorité des espèces
d’oiseaux marins et côtiers dans
le pays et les aires de nidification
de quatre des sept espèces de
tortues de mer, y compris la
tortue imbriquée (Eretmochelys
imbricata) qui risque sérieusement
l’extinction.
La zone, parsemée de mangroves,
a été ajouté à la liste de Ramsar
des zones humides d’importance
internationale en 2005. L’Etat
salvadorien l’a également classée
comme une zone naturelle
protégée et une réserve de la
biosphère. Elle est l’une des
régions du pays les plus exposées
aux inondations pendant la saison
des pluies - de mai à octobre - ce
qui signifie que les cultures et
les infrastructures locales sont
périodiquement détruites, et que
des vies humaines sont même
perdues.
Pour soutenir le développement
économique, certaines commu-
nautés locales ont opté pour la
diversification de la production
agricole, laissant derrière la
monoculture. Certaines familles
produisent des ananas et des
mangues, non seulement pour
leur propre consommation, mais
aussi pour faire entrer un revenu
en espèces, quoique modeste.
Au même moment, conscien-
tes de la nécessité de protéger
l’environnement, les communau-
tés locales ont mené des projets
d’engrais organiques, dans le
but d’éliminer progressivement
la dépendance aux engrais chi-
miques. Le Centre de production
de Romero, dans le village de
Zamorán, dans la municipalité de
Jiquilisco, produit l’engrais orga-
nique Bokashi en utilisant des
coquilles d’œufs, des cendres et
autres matériaux pour fournir une
alternative saine bon marché aux
engrais chimiques.
En outre, la banque de semences
Xinachtli conserve les semences
de céréales de base, des légumes,
des espèces forestières et
médicinales depuis 2007. Il y a
aussi une école d’agriculture qui
fait la promotion de techniques
agricoles respectueuses de
l’environnement. Xinachtli est
un mot de la langue Nauhatl qui
signifie semences.
L’une des entreprises les plus
rentables pour les petits fermiers
regroupés en six coopératives
agricoles est la production de
semences de maïs certifiées,
que le gouvernement acquiert
chaque année depuis 2011
pour les distribuer aux 400 000
fermiers, dans le cadre du Plan de
l’agriculture familiale.
Les communautés rurales pauvres
sont donc impliquées dans le
secteur des semences, qui était
un monopole du secteur privé
pendant des années. Environ 15
000 petits fermiers travaillent
actuellement dans cette région.
« Pour la première fois, nous les
paysans, qui sommes des gens
pauvres, produisons des semences
améliorées; ce commerce était
seulement pour les sociétés riches
», a indiqué à Tierramérica, Héctor
Antonio Mijango, un membre
d’une coopérative à Jiquilisco,
tout en tirant du sol des jeunes
plants de maïs, afin de permettre
aux plus grands de se développer.
Le taux de pauvreté au Salvador, un
pays de 6,2 millions d’habitants,
est de 34,5 pour cent, et de 43,3
pour cent dans les zones rurales,
selon l’Enquête 2013 à buts
multiples sur les ménages menée
par le bureau des statistiques
générales et de recensement. « Le
commerce des semences est une
source importante d’emplois et de
revenus pour les familles locales
», a dit à Tierramérica, Manuel
Antonio Durán, le président de la
coopérative Nancuchiname. Cette
coopérative, qui dispose de 8,3
km carrés de terre, a produit 460
000 kg de semences améliorées
au cours de saison des récoltes
2013-2014.
L’aquaculture, notamment
l’élevage de crevettes, est un
autre commerce important dans la
région de Bajo Lempa. « L’objectif
est de passer de l’élevage arti-
sanal de crevettes à la production
semi-intensive, tout en respectant
l’environnement », a déclaré à
Tierramérica, le maire de Jiquilis-
co, David Barahona. Il est l’une
des autorités locales les plus
impliquées dans le plan de dével-
oppement durable dans la région.
Depuis des semaines, le Salvador
souffre d’une grave sécheresse, et
selon les estimations officielles,
environ 400 000 tonnes de maïs
ont été perdues jusqu’à présent.
Mais la production de semences
certifiées dans la région de Bajo
Lempa n’a pas subi l’impact, grâce
à des systèmes d’irrigation.
Les organisateurs communau-
taires ont également conclu
des accords avec des établisse-
ments d’enseignement tels que
l’Université nationale du Salvador,
et ont obtenu des bourses d’études
pour les jeunes de la région. Cer-
tains jeunes ont terminé leurs
études supérieures et sont reve-
nus dans la région de Bajo Lempa
pour travailler.
« Ce sont des jeunes qui n’ont pas
participé à la vague de violences
qui gagnent le pays, parce que nous
avons beaucoup travaillé sur la
prévention, avec des programmes
de sport, par exemple », a expliqué
Argueta. L’idée est d’étendre les
efforts déployés à Bajo Lempa,
qui couvraient initialement six
municipalités de la région, à
toute la région et de mettre en
pratique le Bassin hydrographique
du fleuve Lempa, impliquant 14
municipalités.
En août, la ministre de
l’Environnement, Lina Pohl, a
visité plusieurs communautés à
Bajo Lempa pour voir de première
main ce que ces communautés
et les organisations font dans la
région. « Nous ne pouvons pas
avancer des idées si nous ne savons
pas d’abord ce qui a été fait dans
notre pays, ce que les populations
locales font, comment elles
s’organisent pour présenter leurs
propositions et programmes », a
déclaré la ministre à Tierramérica.
Le niveau d’organisation dans la
région « est impressionnant » « et
constitue un modèle qui pourrait
être reproduit dans d’autres
parties du pays », a-t-elle ajouté.
Des fermiers misent sur le développement durable
Par Edgardo Ayala
SALVADOR
MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 11
ÉCONOMIE
Les fermiers de l’une des zones côtières les plus fragiles du Salvador mettent en œuvre un modèle de croissance
économique durable qui respecte l’environnement et offre aux gens l’éducation et la sécurité comme des clés
pour donner à cette région humide un coup de pouce.
12. L'économie positive réinvente le capitalisme
à long terme
Sources : Consoglobe
C
’est cette volonté de synthèse
et d’approche globale sortie
des contraintes du seul court
terme, qui a donné naissance
à la notion d’économie positive. Un
peu lâche, cette concept a toutefois
la qualité de nous donner un prisme
de lecture auquel on peut rattacher
à peu près toutes les initiatives qui
bouillonnent un peu partout dans le
monde.
Qu’est-ce qu’une économie
positive ?
Une économie « positive » est une
économie dont l’ensemble du fonc-
tionnement contribue à préserver les
intérêts de l’environnement et des
générations futures.
Tout, ses institutions, son système
éducatif, ses structures économiques
dominantes,… sa culture ont le souci
de ne pas obérer le futur des généra-
tions qui vont nous succéder.
Pour quantifier cette économie posi-
tive, le Mouvement pour une écono-
mie positive, lancé par Jacques Attali
a élaboré un indice qui mélange 29
indicateurs pour déterminer le degré
de « positivité » d’un pays et de son
économie. En somme l’économie posi-
tive tente une synthèse de toutes ces
approches que nous avons mention-
nées (RSE, développement durable,
Jugaad, économie bleue, l’économie
circulaire, l’économie de la fonction-
nalité, inclusive business, …)
Trois indicateurs particuliers ont été
créés spécifiquement pour cette indice
de l’économie positive :
1 – la mesure le niveau de reproduction
des inégalités par le système éducatif,
2 – la représentativité du Parlement
(diversité des âges des parlemen-
taires,…),
3 – le degré de tolérance aux autres
(acceptabilité des pratiques sexuelles
ou religieuses différentes des pratiques
dominantes, acceptabilité des per-
sonnes d’origines différentes).
Ces trois critères sont peu présents
dans les autres visions, plus
économiques, de cette nouvelle socié-
té. L’économie positive accorde ainsi
une grande importance au facteur
éducatif et humain. Et une de ses
contributions majeures, en tout cas
un de ses objectifs centraux, est de
développer l’emploi en développant
l’employabilité des gens. Ce sont les
systèmes éducatifs et de formation per-
manente qui sont les rouages essenti-
els de cette approche.
Cette approche, fort logiquement, tient
compte de l’allongement de la durée de
vie et propose aux seniors de continuer
à travailler après 50 ans après s’être
formés tout le long de leur carrière.
Comment est construit
l’indice de positivité ?
En France, on a forcément en
tête l’absurdité d’un système
d’obsolescence programmée des «
seniors » qui ne sont plus employables
à partir de 50 voir 45 ans avec, en par-
allèle, 80 % des chômeurs qui ont un
niveau de revenu inférieur à 1,5 smic
avant de perdre leur emploi.
« L’économie positive considère le
monde comme une entité vivante, qu’il
convient de protéger et de valoriser
et dont l’humanité n’est qu’une des
dimensions ».
Invité à parler de l’éthique dans le
monde de l’entreprise en sept. 2014
lors du LH Forum*, Claude Bébéar,
Président de l’Institut Montaigne, un
ancien grand patron, considère que
« l’éthique de l’entreprise ne doit pas
rester un concept mais constituer un
réel engagement ».
Face à la mondialisation et à la néces-
sité d’être performant, compétitivité et
recherche du profit sont des facteurs
jugés souvent trop essentiels par les
entreprises, « l’enjeu est aujourd’hui
de travailler en intégrer un sens moral
à toutes activités, pour le bien général,
aussi bien pour celui de l’entreprise
que pour l’ensemble de ses fidèles col-
laborateurs ».
La croissance positive
moteur de la transition
économique ?
Les entreprises elles-mêmes, y
compris les plus « capitalistes » ou
dans des secteurs très traditionnels
(agroalimentaire, chimie, pétrole, …)
se mettent à changer dans ce sens.
Comme le souligne le Manifeste pour
une société positive,[3] « Les entre-
prises sont les moteurs essentiels de
la croissance positive», souligne et
nombre d’entre elles «ont déjà fait
profondément évoluer leurs pratiques
au cours des trente dernières années.»
Et comme on l’a vu, un consensus s’est
formé sur le périmètre de la Respon-
sabilité sociale des entreprises (RSE) :
désormais on s’accorde à penser que la
RSE englobe les questions d’éthique,
de souci du long terme et pas seule-
ment une dimension économique.
Il faut dire que le public est en attente
d’une implication accrue des entre-
prises, notamment sur le terrain de
la solidarité et de l’insertion comme
le montre une étude OpnionWay
d’octobre 2014 [5]. On y voit que l’idée
d’associer les affaires, le profit et la
responsabilité sociale paraissent non
seulement naturels aux Français mais
est une réelle attente. Dans un con-
texte de chômage, la responsabilité de
l’entreprise est également d’agir pour
l’insertion des citoyens dans le marché
du travail. Et la majorité des consom-
mateurs (81 %) pensent que ce rôle
n’est pas assez assumé actuellement :
• 80 % des Français attendent d’une
entreprise rentable qu’elle ait aussi
une mission sociale, notamment
d’insertion.
• Attendez-vous d’une entreprise
rentable qu’elle ait aussi une mission
sociale, notamment d’insertion ? Oui
à 80 %, non : 19 %
• 81 % pensent que l’entreprise ne joue
pas suffisamment ce rôle aujourd’hui
(vs. 18 %).
• 74 % pensent qu’une entreprise
peut avoir pour coeur d’activité un
but social.
L’engagement pro-RSE s’est accru
avec la mondialisation économique,
les inquiétudes sur le réchauffement
climatique et la raréfaction des res-
sources naturelles. Au-delà de la RSE
l’économie du partage ajoute une nou-
velle dimension aux plus classiques
ESS et entrepreneuriat social.
L’entrepreneuriat social
Les premières formes d’entrepreneuriat
social ont d’abord concerné des activi-
tés à utilité environnementale forte.
Un exemple pris au Kenya : en 2007,
l’entreprise Ecotact a été fondée en
2007 pour s’attaquer aux problèmes
sanitaires et environnementaux des
quartiers pauvres du Kenya. Afin afin
de réduire les déserts sanitaires du
pays, Ecotact commercialise des «
Ikotoilets ».
Puis, ce sont les activités strictement
sociales qui ont été mises en avant
par l’entrepreneuriat social : depuis
2003, l’entreprise américaine Better
World Books lutte pour lutter contre
l’illettrisme dans le monde.en récu-
pérant et redistribuant des livres
d’occasion.
Valoriser l’altruisme et le
partage
L’essor actuel de l’économie du don
avec les gratuivores, les sites de don
entre particuliers comme consoRecup,
et l’importance accordée aux nouveaux
services collaboratifs mobilisent la
bonne volonté et l’altruisme des citoy-
ens. C’est surtout l’altruisme intergé-
nérationnel qui est pris en compte
: celle des générations actuelles qui
prennent en compte la préservation
des intérêts des générations futures. Il
s’agit bien d’intégrer dans nos prises de
décision économiques au quotidien un
critère important, celui du long terme
et de la préservation des ressources.
La consommation collabora-
tive explose du coté du consom-
mateur ; l’économie circulaire et
l’écoconception, s’installent du côté
des entreprises. L’économie positive,
elle veut prendre en compte l’altruisme
qui n’est pas pris en compte dans la
comptabilité économique classique.
Dans la doxa économique classique,
on postule plutôt que l’action indivi-
duelle est égoïste et que la somme de
ces actions individuelles peut créer le
bien collectif. Cette « fable des abeilles
» n’est pas conforme au postulat de
l’économie positive qui, a contrario,
estime que c’est au niveau individuel
que le bien se crée également, que ce
bien est une valeur en soit. A l’instar
du Bouthan qui veut remplacer l’indice
du PIB par l’indice du Bonheur Brut,
l’économie positive.
L’économie positive considère comme
un gain l’acte de prêter, de donner ou
de partager un bien, et pas seulement
le fait de l’acheter ou le vendre. De fait,
les appels à la prise en compte, au côté
du PIB, d’autres indicateurs de qualité
de vie et de développement durable
se multiplient comme celui de Jean
Pisany-Ferry, commissaire général à la
stratégie et à la prospective de France
Stratégie ou de certains députés.
Les entreprises aussi
Ce mouvement donne naissance à de
nouveaux modèles plus sobres et qui
vont globalement tous dans le même
sens, c’est a dire vers une sociétés
où la sobriété heureuse des consom-
mateurs fait écho à l’économie cir-
culaire pratiquée par les entreprises.
Les entreprises ont mis en place des
équipes consacrées à la mesure et à la
prise en compte de leur RSE. Même
l’épargnant, en mettant ses billes dans
l’investissement socialement respon-
sable (ISR), participe à l’émergence de
l’économie positive en tenant compte
de ces paramètres éthiques ou envi-
ronnementaux. Les fonds spécialisés
ou avec des compartiments éthiques
se développent régulièrement.
Selon Jean-Philippe Desmartin,
responsable de la recherche ESG (3)
du courtier Oddo S. : « En quinze ans,
la part de l’investissement responsable
(ISR et intégration des critères ESG
est passée de 0,1 % à 10 % des capi-
taux investis en Europe, et je pense
qu’on arrivera à 30 % d’ici à 2025 ou
à 2030 ».
Le monde financier s’est progres-
sivement doté d’indices permettant
de signaler les véhicules vertueux
disponibles pour l’épargnant, à coté
du label ISR, d’autres plus financiers
cohabitent.
Une nouvelle pratique (une mode ?) a
vu le jour dans le champ des médias
pour s’adapter à l’approche éco posi-
tive : « l’impact journalisme » qui a
pour objectif de traiter les problèmes
de société à travers les solutions et ini-
tiatives qui y répondent… c’est ce que
consoGlobe fait comme M. Jourdain
fait sa prose, sans le savoir mais en le
faisant depuis 2005.
L’économie positive a une dimension
politique ambitieuse. Comme l’écrit
le rapport Attali, « L’économie positive
vise donc à réconcilier la démocratie,
le marché et le long terme ; à rendre
compatibles l’urgence du court terme
et l’importance du long terme. »
Loin d’une vision résignée, face au
déclin, l’économie positive montre que
partout dans le monde des graines de
changement poussent…. pour le bien
de la société et des hommes.
Autant d’initiatives positives que nous
nous efforçons de relayer ici….. la voix
d’un monde nouveau.
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58 MARDI 11 AOÛT 2015
ÉCONOMIE
13. MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 13
SOCIÉTÉ
La cordonnerie : un métier
difficile en 2015
Par Stéphanie Balmir
P
ierre (nom d’emprunt) est
cordonnier depuis déjà
quarante ans. Ce métier, c’est
son voisin qui le lui a appris. À
l époque, le commerce était florissant.
Le voisin en question confectionnait
des chaussures pour les revendre à un
magasin. « Tout le monde se chaussait
chez les cordonniers. J’étais oisif, ce
voisin m’a appris ce métier », raconte-
t-il en mettant de la colle sur un
morceau de cuir destiné à fabriquer
des bottes.
Quand ce magasin a fermé ses
portes, Pierre s’est retrouvé seul.
Pour continuer à vivre, il a dû s’en
remettre à un autre cordonnier.
« Dans ce métier, il est difficile
d’évoluer seul. Les moyens
manquent et les commandes
ne sont pas fréquentes ». À son
avis, collaborer avec un autre
cordonnier facilite la tâche. Même
s’il est contraint de partager avec
lui les bénéfices. « Bien que nous
ayons chacun nos clients, nous
partageons nos bénéfices certaines
fois. »
Pour ces deux cordonniers, les
matières premières constituent
leurs principales difficultés
du fait que leurs prix ne font
qu’augmenter. Ce qui, d’ailleurs,
entraîne la hausse des prix des
chaussures qu’ils confectionnent
et le manque d’engouement
des clients à les acheter. « Nous
vendons nos chaussures en tenant
compte de nos dépenses. Les prix
augmentent considérablement
aujourd’hui comparativement
aux années antérieures. Et cette
augmentation est due aux matières
premières devenues très chères
de jour en jour. Tous les prix ont
augmenté. Que ce soit celui du
cuir, de la colle, des clous ou des
semelles », a expliqué l’un d’entre
eux.
Ce qui dérange surtout Pierre, c’est
la disparition des cordonniers
dignes de ce nom. La majorité des
hommes qui se disent cordonniers
de nos jours n’ont pas appris ce
métier. « Pour devenir cordonnier,
c’est tout un apprentissage.
Beaucoup de gens se disent
cordonniers mais ignorent les
notions de base », déplore-t-il avec
une pointe de colère qu’il a du mal
à contenir.
Par contre, il avoue à contrecœur
qu’il n’y a pas de cordonnier qui
pourrait apprendre aux intéressés
les techniques qu’il faut. « S’il y a
quatre-vingts cordonniers dans le
pays, on ne peut espérer davantage
car plusieurs d’entre eux se sont
rendus à l’extérieur. »
Pour le collaborateur de Pierre,
lui aussi soucieux de garder
l’anonymat, le problème de
la cordonnerie se résume aux
matières premières. « Les produits
importés ont détruit notre métier.
Les parents ne viennent plus
chez nous pour chausser leurs
enfants.» Ce qui rend difficile la
vie des cordonniers qui veulent
vivre de leur métier. « Nous ne
vendons pratiquement plus rien. Il
est très difficile de vivre dans une
telle situation. » Mais ils disent se
débrouiller pour subvenir à leurs
besoins et à ceux de leurs familles.
Ces deux cordonniers pensent que
les solutions doivent passer par la
création d’écoles professionnelles.
L’un d’entre eux argumente sa
position : « Il n’y a pas assez de
places à l’université pour les
jeunes. Il leur faut des écoles
professionnelles. Parce qu’il est
évident que tout le monde n’aura
pas accès à l’université. » Pierre
ajoute avec conviction : « Il nous
faut des professionnels sans
lesquels, il n’y a pas de pays. »
Ils veulent leur prise en charge
par les autorités qui doivent leur
fournir les moyens d’exercer leur
métier. « Or, aux législatives du
9 août aucun candidat ne nous
a touchés dans son programme.
Aucun d’entre eux n’apportera un
changement. »
Dans cet espace restreint aux murs
nus, la chaleur n’empêche pas ces
deux cordonniers de travailler. Un
poste de radio diffuse une musique
évangélique tandis que deux
femmes essaient de les convaincre
de leur vendre une paire de
sandales au prix insignifiant de
trois cents cinquante gourdes.
Quoique réticent à se prononcer,
Pierre a finalement avoué que les
cordonniers doivent se mettre
ensemble pour rehausser l’image
de la cordonnerie qui tend à
disparaître en Haïti.
Certains métiers manuels tendent à disparaître
dans le pays. Il est de plus en plus rare de trouver un
cordonnier de nos jours. Plusieurs raisons expliquent
la rareté de ces professionnels qui chaussent hommes,
femmes et enfants.
Des sandales réalisées par des cordonniers haïtiens. / Photo : multimediahaiti.
blogspot.com
Autrefois, ils écrivaient des lettres passionnées à leurs bien-
aimées, cherchaient les plus belles tournures de phrases
pour s’approcher d’elles. Aujourd’hui, les mots les plus
romantiques que nous, pauvres filles, sommes en mesure
d’espérer ne vont guère au-delà de : Jtm, luv u, suivis
d’émoticônes censées nous exprimer de véritables émotions.
Charmant, n’est-ce pas ? (Je ne fais pas de particularité,
bien sûr, aussi improbable que cela paraisse, mesdemoi-
selles, il y a encore des garçons qui écrivent des poèmes.
Ouvrez l’œil !)
Évidemment, la langue française n’y a pas beaucoup gagné.
On n’a eu de cesse de le répéter. Mais il y a bien un avan-
tage que ces adorables passions épistolaires offraient, mais
qu’on oublie souvent de citer. Je parle de la liberté, de ce
petit carré de solitude que l’on s’aménage au sein même des
relations amoureuses. Eh bien, cette liberté est clairement
menacée !
Je m’imagine, au siècle dernier, attendant impatiemment,
deux longs jours ou plus, un signe de l’être aimé, me lan-
guissant (comme on aurait sûrement dit à l’époque). Mais
avec la technologie, tout est devenu si rapide et facile qu’on
n’a guère le temps de se manquer. Il n’y a pas que ça ! Les
« Othellos » modernes ont trouvé l’arme idéale.
Avec cette habitude des réseaux sociaux pour indiquer que
vous êtes en ligne, il arrive parfois que l’autre vous épie. Et
si d’aventure, il vous venait l’envie de le faire patienter. Ne
vous étonnez pas d’un : « Ah ! Ah ! Je te tiens ! » Ou pire : «
À qui d’autre écris-tu ? » Et les disputes, les longues fâcher-
ies. Nouvelles règles du jeu : songez à vous déconnecter
tout de suite après les échanges de « bonne nuits », sinon
gare à vous! Veillez à ne surtout pas trop espacer vos textos.
Oubliez aussi cet ami que peut-être vous aviez perdu de vue,
il est forcément malintentionné. Et encore ! Il y en a que
je connais comme de prodigieux mathématiciens, qui vont
jusqu’à faire le décompte de vos SMS et qui n’hésiteront pas
à vous questionner sur ces 10, 20 autres SMS qui ne leur
étaient pas adressés. Ajoutons à cela les appels vidéos (pas
si innocents que ça), les GPS et j’en passe !
Une chose est sûre, la confiance mutuelle au sein des cou-
ples en a pris un sérieux coup ! Et toutes celles qui ne se
laissent pas faire, je vous dis bravo ! Sérieusement, un
accès de jalousie peut être compréhensible, mais poussé à
un certain point, cela peut devenir carrément insoutenable.
Alors, attention ! Sinon, peut être bien qu’un de ces jours,
on assistera à une désertion des réseaux sociaux et à la
grève des textos. Bon, j’en doute un peu ! Mais qui sait !
L'amour
en abrégépar Magdalée Brunache
14. 14 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
SOCIÉTÉ
« Femmes en perdition » : entre
imagination populaire et réalité !par Ritzamarum ZÉTRENNE
B
eaucoup de gens en sont
convaincus. Les femmes
tombent souvent en
« perdition », croient-ils.
Aussi, cela ne reste pas au rang d’une
simple croyance populaire, comme
l’auraient pensé les plus avisés. Le fait
est agrémenté d’un grand nombre de
témoignages de gens qui ont connu
des femmes de leur entourage à avoir
été en « grossesse dépassée » ou qui
ont eux-mêmes vécu l’expérience.
Une mère vivant à Bizoton raconte
que sa fille a eu une grossesse
qui a duré douze mois. « Elle
était enceinte pendant un an. Et
après cette période, elle a mis
au monde une petite fille sans
aucune malformation », raconte
cette dame à des gens de la zone
qui, tous, croient à « cette histoire
». Une femme, ayant elle aussi
connu cette histoire, explique, de
son côté, que cela est dû à des
tentatives d’avortement échouées.
« Certainement, tout cela est dû
au fait que la jeune fille a voulu
procéder à un avortement qui
n’a pas pu réussir », spécule
cette femme, donnant l’air d’une
experte en infertilité.
De telles histoires sont très
courantes dans le pays, les unes
beaucoup plus vraisemblables que
les autres. Milou, nom d’emprunt,
jeune fille venant du 10e Palme
de la commune de Petit-Goâve,
explique avoir passé huit ans
et six mois dans le ventre de sa
mère. « Mes parents ont consulté
tous les « médecins- feuilles » de
la localité, mais aucun d’entre
eux n’a pu trouver une solution.
Ils ont finalement décidé d’aller
en ville pour voir un spécialiste.
Après un test de grossesse qui
s’est révélé positif, les médecins
n’ont rien pu faire, non plus, pour
eux », ajoute cette jeune femme
qui a aujourd’hui vingt-cinq ans.
Après toutes ces tentatives, Milou
raconte que ses parents sont
retournés au bourg perdant tout
espoir, jusqu’à ce qu’un jour une
vieille dame leur ait apporté son
aide salvatrice.
« C’est grâce à cette vieille dame
que je suis en vie aujourd’hui.
Elle a seulement donné une
dose préparée avec des feuilles
à ma mère et la « perdition »
s’est arrêtée, avoue-t-elle, très
convaincue.
Néanmoins, si beaucoup de
gens de la population croient
que ce phénomène existe, ils
ne l’expliquent pas tous par
les mêmes causes. En effet, si
pour certains ce fait est tout
simplement une éventualité de
la grossesse, pour d’autres, il
faut chercher les causes dans le
fétichisme. « Souvent, ce sont les
loas qui entravent le processus du
développement fœtal pour châtier
les parents fautifs », expliquent
des gens. C’est peut-être tout
aussi bien le résultat d’une «
expédition**» d’un voisin qui
a voulu du mal à une personne
pour se venger, à en croire les
explications de ces gens.
Pour une approche
scientifique du phénomène
Des spécialistes du Centre haïtien
d’investigation et de traitement
avancé de l’infertilité (Chitai)
ont révélé que ce phénomène est
impossible physiologiquement. «
Une grossesse ne peut pas aller
au-delà de quarante-deux semaines
», affirme une infirmière de Chitai.
Elle pense, de préférence, que
certaines femmes ignorent quand
elles sont tombées enceintes et
font des erreurs dans le contrôle
de la durée de la gestation. C’est
pourquoi l’infirmière conseille à
toute femme, ayant des rapports
sexuels plus ou moins réguliers,
de procéder à un test de grossesse,
dès qu’elles comptent des retards
dans leur menstruation.
Outre la question d’erreur dans
le contrôle de la grossesse, le
docteur Harry Beauvais explique
ce phénomène sur deux autres
angles. D’une part, il le voit
comme une représentation
mentale des femmes, infertiles
ou pas, qui rêvent d’enfanter. «
Certaines fois, après des années
de vie en couple, beaucoup de
femmes veulent à tout prix avoir
des enfants pour ne pas être
appelées jument par les gens de
leur quartier. Ainsi inventent-elles
des grossesses qui n’existent que
dans leur imagination », affirme
le spécialiste en médecine. Avec
cette représentation mentale, il
n’est pas étonnant que plusieurs
symptômes de grossesse se
développent chez elles.
D’autre part, le docteur Beauvais
explique que des problèmes
au niveau gynécologique
peuvent créer une telle idée
dans l’imaginaire de certaines
femmes. « Une femme peut avoir
des irrégularités dans son cycle
et penser, d’un coup, qu’elle
est tombée enceinte », ajoute
le médecin. Là encore, selon le
docteur, certains symptômes de
la grossesse risquent de paraître
chez la femme en question. «
La femme sexuellement active
peut tomber enceinte un an plus
tard. Ayant cru avoir été enceinte
depuis les premiers signes
(apparents), déclare ainsi avoir
été en « perdition » », avoue le
médecin.
Harry Beauvais pense qu’il faut
barrer la route à ces genres
de croyance dans le pays. « En
ce siècle, nous ne devons pas
en être encore là. Je pense que
c’est aux journalistes d’éclairer
la population sur ces mythes »,
nous dit-il.
*
«
Souvent, en Haïti, les gens parlent de « femmes en perdition ». Nombreux sont ceux qui y croient. Il est très
couramment véhiculé dans l’opinion publique haïtienne que des femmes ont une grossesse qui n’arrive à terme
qu’après plusieurs années. Que faut-il comprendre d’un tel phénomène ? Est-il réellement possible qu’un tel fait
se produise scientifiquement ?
femmes en perdition » : ce serait
l’expression utilisée en Haïti pour
parler de la grossesse post terme,
appelée aussi grossesse prolongée.
Toutefois, la réalité que décrit ce
phénomène est différente de celle
décrite par la grossesse prolongée
qui est une grossesse qui va au-delà
de quarante et une semaines.
Au-delà de quarante-deux semaines,
la grossesse est dite dépassée. Les
nouveau-nés post terme présentent
un risque majoré de complications
neurologiques (risque multiplié par
1,5) (grade B), d’encéphalopathie
anoxo-ischémique (grade C),
d’infirmité motrice cérébrale (risque
multiplié par 2,4) (grade B), de
troubles du développement 700
CNGOF 701 RPC - GROSSESSE
PROLONGÉE ET TERME DÉPASSÉ
psychomoteur (risque multiplié
par 2,2) (grade C) et d’épilepsie
dans l’enfance (risque multiplié par
1,9) (grade B), sans que l’on puisse
affirmer que ces complications
sont directement attribuables au
dépassement de terme. (Réf. : http://
www.cngof.asso.fr/)
** Expédition : ce terme est utilisé
en vodou pour qualifier un travail
mystique fait contre quelqu’un avec
des conséquences néfastes.
15. MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 15
SOCIÉTÉ
Voter plusieurs fois, c'est possible !Par Lamy Obed
«
J’ai voté cinq fois Zokiki, cinq
foisDonKato,cinqfoisGermain
», a hurlé de joie, sur la place
publique, un superviseur en fin
de journée électorale. Comme si, pour
lui, non seulement le vote n’est pas
secret mais encore voter plusieurs fois
est loin d’être un « péché ». À Petit-
Goâve, où la population a pris part
massivement aux élections, ce cas de
fraude est incessamment dénoncé
dans les bureaux de vote, annoncé
dans les médias et avoué par les
coupables eux-mêmes.
Pour gagner les élections en
Haïti, partisans et opposants se
permettent tous les coups bas.
« C’est tellement possible qu’il
est plus que possible », confirme
fermement ce citoyen qui fait
office d’observateur électoral.
Sans être muni de sa carte
électorale, il s’est arrogé le droit de
voter à différents bureaux de vote.
Il s’enorgueillit de son autorité : «
J’entre dans les bureaux, je vote
et je pars. On ne m’a même pas
exigé de signer. » Dans un même
bureau de vote, un électeur a pu
voter à deux reprises parce que
son nom est inscrit deux fois sur
la même liste électorale.
Les fins connaisseurs en tricherie
électorale maîtrisent bien toutes
les tactiques pour effectuer
plusieurs votes. « Grâce au mandat
que je détiens, je parviens à voter
sous différents noms. » Pour
mener à bien ces opérations, les
tricheurs bénéficient parfois de
la complicité du bureau de vote,
sinon ils sèment la pagaille.
Avec la complaisance des forces
de l’ordre. Un membre d’un
bureau de vote a confié : « Quand
ces bandits débarquent dans le
bureau, nous ne pouvons pas les
contrecarrer.» Et devant le refus
de certains votants de se faire
marquer le pouce avec l’encre
indélébile, les préposés sont
obligés de céder.
Même certains membres des
bureaux de vote, eux aussi, ont
eu l’opportunité de se mettre en
besogne. « Je suis vice-président
de mon bureau. C’est moi qui signe
les bulletins. Je me suis servi de
deux bulletins de vote pour chaque
poste. » Certains citoyens ont été
surpris en flagrant délit, avec des
bulletins de vote en dehors des
bureaux pour bourrer les urnes.
« Le vote en Haïti, ce n’est pas
comme rester dans la file d’attente
pour pénétrer dans une banque »,
a lâché un votant.
Un observateur du POHDH, sur
le terrain, a révélé avoir bien
noté, dans son rapport, cette
irrégularité. « Il n’y a pas d’agents
de sécurité affectés à chaque
bureau, les isoloirs sont mal placés
», a-t-il déploré. Il rejette aussi la
faute aux acteurs, aux mandataires
qui créent le désordre. Si on traite
scrupuleusement les documents,
on pourrait détecter ces marges
d’erreurs quand on constate que le
nombre de bulletins ne correspond
pas au nombre de votants, a-t-il
tenu à préciser. Mais, réaliste,
il atout de suite soulevé une
objection déplaisante : « Nous ne
pouvons pas en arriver là, nous
sommes en Haïti quand même ! »
Statuant sur les délits électoraux,
les articles 195 et 195.1 du décret
électoral en vigueur stipulent : «
Est puni d’un emprisonnement de
six mois à un an et d’une amende
de dix mille à vingt-cinq mille
gourdes, le fait par toute personne
de voter plus d’une fois dans une
assemblée électorale. Est puni
d’un emprisonnement de six mois
à un an et d’une amende de dix
mille à vingt-cinq mille gourdes,
le fait par tout fonctionnaire
électoral de faciliter une personne
à voter de manière frauduleuse.
» Pour l’heure, aucune décision
judiciaire n’a été rendue contre
l’un de ces fraudeurs dont les noms
font la clameur publique. Certains
fauteurs de troubles appréhendés
par les agents de la PNH ont été
relâchés dans l’immédiat.
Outre les irrégularités
organisationnelles, avec ces
truquages incalculables et
les éventuelles erreurs de
dépouillement, la falsification
des résultats du scrutin est déjà
à redouter. Pour lutter contre
de telles fraudes électorales,
beaucoup de pays ont adopté
le vote électronique, mais Haïti
se montre encore réticente à
franchir cette étape. Si la tenue
des élections est un signe de
vitalité démocratique dans un
pays, la régularisation du système
électoral doit en être un préalable
pour l’organisation d’élections
crédibles et démocratiques.
Le premier tour des élections législatives tenues ce dimanche 9 août a été l’objet d’irrégularités et de fraudes.
16. C
’est un nouveau pas du pape
François en faveur de la
défense de l’environnement
: le Vatican a annoncé, lundi
10 août, une « Journée mondiale
de prière pour la sauvegarde de
la Création », qui aura lieu le 1er
septembre.
« En tant que chrétiens,
nous souhaitons offrir notre
contribution à la résolution de
la crise écologique à laquelle
l’humanité est actuellement
confrontée », écrit le pontife dans
une lettre expliquant sa décision.
« [Cette journée mondiale]
offrira à chacun des croyants et
aux communautés la précieuse
occasion de renouveler leur
adhésion personnelle à leur
vocation de gardiens de la
création, en rendant grâce à Dieu
pour l’œuvre merveilleuse qu’Il a
confiée à nos soins et en invoquant
son aide pour la protection de la
Création et sa miséricorde pour les
péchés commis contre le monde
dans lequel nous vivons ».
Dans un souci d’œcuménisme,
« pour témoigner de notre
communion croissante avec
nos frères orthodoxes », la
date retenue est la même
que celle déjà en vigueur au
sein de l’Eglise orthodoxe.
Elle se distingue toutefois du
5 juin, journée mondiale de
l’environnement décrétée par les
Nations unies.
Encyclique sur le climat
Le 18 juin, la publication de
l’encyclique sur le climat, Lau-
dato si’ (« Loué sois-tu »), avait
déjà engagé l’Eglise dans cette
voie, invitant les catholiques à
entreprendre une « conversion
écologique », et reprenant les
conclusions de la communauté
scientifique sur le réchauffement
climatique. Il présentait ainsi sans
ambiguïté l’homme comme le «
principal responsable » des per-
turbations météorologiques, qui
constituent elles-mêmes « l’un
des principaux défis actuels de
l’humanité ». Tout au long des 187
pages de l’encyclique, le pontife
argentin exhorte gouvernements
et particuliers à une révolution
« verte » pour sauver la planète.
Il prend la défense des plus pau-
vres et dénonce l’indifférence des
pays riches, la responsabilité de
leur mode de vie « consumériste »
et leur « gaspillage ». Il prône
« une certaine décroissance dans
quelques parties du monde » pour
permettre « une saine croissance
en d’autres parties », et critique
vivement le pouvoir de la finance.
Cette prise de position, sur un
sujet éminemment politique,
n’a pas manqué de déclencher
l’indignation des milieux
catholiques conservateurs, et
notamment climatosceptiques.
Le pape François a néanmoins
dit souhaiter que ces initiatives
en faveur de l’écologie aient
une influence sur la conférence
internationale sur le climat qui se
tiendra en décembre à Paris.
En faisant de la protection de
l’environnement un impératif
moral, il pourrait inciter les 1,2
milliard de catholiques dans le
monde à faire pression sur leurs
gouvernements. Il pourrait peser
particulièrement dans les pays
d’Amérique latine, où l’élection
d’un pape argentin avait gonflé
la popularité du Vatican. Leurs
voix pourraient en effet être
déterminantes à la COP21.
L
’Univers est en train de mourir
de mort lente, selon une équipe
internationale de scientifiques
qui a mesuré l’énergie produite
par 200 000 galaxies et découvert
qu’elle était deux fois moindre que
celle générée il y a deux milliards
d’années.
« A partir de maintenant, l’Univers
est voué au déclin, comme une
vieillesse qui durerait pour
toujours. (...) [Il] s’est écroulé sur
son sofa, a ramené la couverture
sur lui et s’apprête à dormir d’un
sommeil éternel », a expliqué
Simon Driver, membre du Centre
international de recherches
radioastronomiques (Icrar) de
l’Etat d’Australie occidentale qui
a participé au projet.
Les chercheurs ont utilisé sept des
télescopes les plus puissants de
la planète pour observer pendant
huit ans des galaxies dans 21
longueurs d’onde différentes,
comme l’infrarouge ou l’utraviolet,
dans le cadre de l’étude GAMA
(Galaxy and mass assembly). Deux
télescopes spatiaux de la NASA,
un télescope spatial de l’Agence
spatiale européenne (ESA) et le
Télescope anglo-australien de
Nouvelle-Galles du Sud ont en
particulier été mis à contribution
pour cette étude, fruit d’une
collaboration entre une centaine
de scientifiques issus de plus
de 30 universités australiennes,
européennes et américaines.
Moins de création d’étoiles
Une bonne partie de l’énergie qui
circule dans l’Univers a été générée
après le Big Bang mais de l’énergie
nouvelle est constamment libérée
lors de la fusion thermonucléaire
dans les étoiles. Andrew Hopkins,
de l’Observatoire astronomique
australien, explique que les
chercheurs savent depuis un
moment que le rythme de
création d’étoiles dans l’Univers
est en déclin. Mais cette étude
montre que le taux de production
d’énergie diminue de manière
semblable dans les différentes
longueurs d’onde, souligne-t-il. «
Peu importe les longueurs d’onde
utilisées, la production d’énergie
ralentit de la même manière », a
expliqué M. Hopkins.
Les chercheurs espèrent aussi que
les données recueillies permettront
de mieux comprendre le processus
de formation des galaxies. Ils
veulent également élargir leurs
études pour documenter la
production d’énergie tout au long
de l’histoire de l’Univers.
16 | N0
58 MARDI 11 AOÛT 2015
SOCIÉTÉ
Le pape François lance une journée
mondiale pour l'environnementSources : Le Monde.fr avec AFP
L'Univers produit de moins en moins d'énergie
Sources : Le Monde.fr avec AFP
Le pape François, place Saint-Pierre au Vatican, le 9 août. / Photo : directmatin.fr
L’Univers est en train de mourir de mort lente, selon une équipe internationale
17. MARDI 11 AOÛT 2015 N0
58 | 17
CULTURE
Le National : Akoustik Prod,
c’est quoi ?
Allenby Augustin : C’est une asso-
ciation culturelle qui a vu le jour
en 2010. Sa mission est la valo-
risation du patrimoine culturel
d’Haïti et la préservation de nos
traditions à travers des activités
novatrices qui permettent la plu-
ridisciplinarité et les échanges de
compétences entre les profession-
nels du milieu.
L. N. : Faites-nous un bref rappel
du concours que vous organisez ?
A. A. : À l’occasion des cinq ans
de l’Association, Akoustik Prod a
organisé un concours de photog-
raphies intitulé « Konkou foto sou
tradisyon kiltirèl nan peyi d’Ayiti
». Dans ce contexte, tous les pho-
tographes sensibilisés à la préser-
vation de la culture haïtienne sont
invités à effectuer des expériences
photographiques au sein des com-
munautés artistiques, d’artisans
et/ ou religieuses pour mettre en
avant les traditions populaires
d’Haïti. Le concours a pris fin le
10 août et les gagnants recevront
leur prix le samedi 15 août 2015,
lors de la journée porte ouverte
au Yanvalou Café Bar Restaurant.
Le premier prix est de 25 000
gourdes et le 2e prix de 10 000
gourdes.
L. N. : Quel type de patrimoine le
concours permettra-t-il de sauveg-
arder ? Si on prend « Gingerbread
», par exemple, comme modèle
architectural, c’est un patrimoine
national, typiquement haïtien,
qui est en péril. En quoi ce con-
cours permettra-t-il de le protéger
?
A. A. : En tant que membres
d’Akoustik Prod, nous avons un
étroit contact avec les créateurs
et les opérateurs culturels et
nous avons remarqué l’émergence
d’une cohorte de jeunes photog-
raphes qui témoignent de leur
vécu et de leur temps. Il nous a
paru important de les sensibil-
iser à la richesse de notre patri-
moine culturel et d’en faire un
sujet de concours. Par rapport à
l’exemple spécifique des maisons
Gingerbread, nous avons à trav-
ers la promenade de découverte
artistique « Atis nan kay la » fait la
valorisation de ce joyau de notre
architecture.
L. N. : Suivant l’article 3 du con-
cours, les photographies seront
exposées à Yanvalou, # 46 avenue
N, Pacot, lors de la journée porte
ouverte à l’occasion des cinq ans
d’Akoustik Prod le samedi 15 août
2015, où les gagnants seront pub-
liquement annoncés. Dites-nous,
n’y a-t-il pas d’autres projets pour
ces photos ?
A. A. : Nous avons choisi de faire
un montage photo-vidéo avec le
célèbre vidéo-artiste Maksaens
Denis afin d’avoir ces photos sur
un support souple qui pourra
aussi être largement diffusé sur
internet et à travers les réseaux
sociaux. Comme vous le voyez,
nous essayons de nous adapter à
de nouvelles technologies et, tout
en faisant la promotion des tradi-
tions, d’utiliser des moyens mod-
ernes pour en faire la valorisation.
L. N. : Quel est le bilan de cette
association culturelle pour ses
cinq ans d’existence ?
A. A. : Nous avons pu avec l’aide
de différentes institutions, Fokal,
ambassade de Suisse, Wallonie
Bruxelles International, Centre
culturel Pye poudre et le sup-
port d’autres partenaires (IPDEC
des Cayes, Alliance française des
Cayes, APACH), réaliser quatre
éditions de festival Krik-Krak sur
les contes, jeux et musique tradi-
tionnels. Cela nous a permis en
2013 de devenir membre fonda-
teur de la Fédération caribéenne
des Jeux traditionnels initié par
Jean Paul Quiko de la Guade-
loupe. Il sera d’ailleurs de passage
en Haïti à Carifesta.
L’autre activité dont nous sommes
très fiers est « Atis nan kay la
», la promenade de découverte
artistique inédite dans les mai-
sons Gingerbread du quartier de
Pacot où nous avons offert avec
des bénévoles, la confiance des
propriétaires et les performances
à titre gracieux d’artistes de disci-
plines différentes, des spectacles
inoubliables à plusieurs centaines
de piétons.
L. N. : Après ce concours, le public
peut-il s’attendre à d’autres choses
de vous ?
A. A. : Akoustik Prod a encore de
nombreuses occasions d’étonner
le public, mais précisons que nos
activités ne sont pas uniquement
des spectacles. Nous essayons
toujours d’offrir des occasions
d’échanges et d’apprentissage. Par
exemple, lors de la journée porte
ouverte, il y aura bien sûr des
occasions de jouer et d’écouter
de la musique, mais nous propo-
serons aussi des tables rondes sur
le conte, les jeux et la musique
traditionnelle en Haïti, afin de
permettre aux différents professi-
onnels d’échanger avec le public.
L. N. : « La culture plus près de
vous », C’est le thème du concours
ou le slogan de l’Association ?
A. A. : Il s’agit effectivement du
slogan de l’Association, car nous
voulions rendre la culture plus
accessible à tous. Nos activités
sont gratuites et nous parvenons
à toucher un public très diversi-
fié. Aussi nous essayons dans la
mesure du possible de mélanger
les genres : faire des groupes de
bandes à pied centenaires jouer
sur scène, utiliser les nouvelles
technologies pour la promotion
de la tradition, faire des maisons
Gingerbread des lieux de perfor-
mances éphémères, utiliser les
raras comme guides touristiques,
etc.
Cela donne à Akoustik Prod une
versatilité et une proximité par
rapport au public.
«La culture plus près de vous »Par Carl henri Pierre
INTERVIEW
« Par rapport à l’exemple spécifique des maisons Gingerbread, nous avons, à travers la promenade de découverte
artistique, « Atis nan kay la» fait la valorisation de ce joyau de notre architecture », a déclaré Allenby Augustin,
dans une interview avec Le National. Il est le secrétaire général d’Akoustik Prod.
Allenby Augustin.