2. editions.atelierbaie.fr Bruno Doan
n°43 |12 septembre 2013
|page 2/2
|sur abonnement
|Éditions
exorbitant. Au programme : à cheval, Cañero, et, pedibus, Chicuelo,
Cagancho, Lalanda, Armilita chico. Toros de Santa Coloma. À l’arrivée,
un pétard retentissant. Les toros sont nuls et, excepté deux, d’une pré-
sentation «scandaleuse». Les toreros n’en foutent pas une et toréent
sous la bronca. Conclusion d’un chroniqueur : « avec une autre corrida
comme celle d’hier, Pages peut ouvrir une épicerie. Parce que pour ce qui
est des toros, ni hablar.» Si, justement, à Murcie. Pages y dirige aussi les
arènes. Il met sur pied une autre goyesque pour la feria de septembre
1929. Gros tralala. Le journal Levante Agricola a organisé pour l’occasion
un concours de beauté pour les jeunes filles célibataires de Murcie et de
la huerta. Les reines de beautés choisies défileront aux cotés de celles de
Madrid et Valencia dans le grand défilé goyesque précédant la course. Il
doit réunir 300 participants : escadrons de dragons, jeunes gens et
jeunes filles déguisés en «chisperos, chulos, majos y majas», en habi-
tants de Madrid de l’époque de Goya. On n’a oublié ni les meutes de
chiens qui assaillaient les toros à l’époque ni les demi-lunes pour leur
couper les jarrets. Les costumes ont été fabriqués dans des ateliers
madrilènes ; la piste a été recouverte d’un tapis «le plus grand du
monde», de 20 mètres de long pour 25 de large et assuré pour 25.000
pesetas. On annonce que la mairie de Madrid a envoyé des calèches et
que des carrosses ont été demandés aux «grands d’Espagne». Un collec-
tif d’artistes locaux et madrilènes ont veillé aux préparatifs de la parade
et à la décoration des arènes où pendent des copies de tapis de Goya.
Deux d’entre eux, un à la présidence l’autre à l’autre bout de la piste,
représentent le peintre. De quoi rendre jalouse la patronne de la ville la
Virgen de la Fuensanta dont le magasin «la Alegria de la huerta» expose
le manteau brodé en soie de Murcie avec des motifs brodés représentant
la culture locale du ver à soie. Le cartel de la corrida : 4 toreros comme à
San Sébastian ; Niño de la Palma, Lalanda, Félix Rodriguez, Villalta. Les
toros : Lamamié de Clairac. La plaza : à ras bord. 20.000 personnes pour
voir la chose. Le prix des places : comme a San Sébastian, bonbon. Le
défilé ? «Une mascarade ridicule» avec des habits «grotesques».
Commentaire cruel dans Abc : «la procession saugrenue si elle n’a pas
réussi à donner la moindre idée de l’époque qu’elle était représentée a
servi à amuser les gens de la huerta. » À sauver «du comique» : «deux
jeunes filles magnifiques qui représentèrent très dignement la splendide
beauté des femmes de Murcie. Pour le goyesque, ce fut tout.» Et la
corrida du señor Pages alors ? Sous la pluie et comme à San Sébastian.
Une merde dans un bas de soie comme disait Napoléon de Talleyrand.
Les toros ? «Mauvais, grossiers, très mansos, laids de tête ; le second, un
veau.» Les toreros ? Lalanda fatigué, s’en tape. Pas une mariposa.
Villalta ? Avec les toros les plus petits. Malgré un quite serré il torée sous
une bronca carabinée. Niño de la Palma ? Il arrache les seuls applaudis-
sements pour des veronicas. Félix Rodriguez ? Il torée l’infâme premier
en prenant beaucoup de précautions et son deuxième, un fuyard avec
du nerf, il n’arrive pas à le dominer. Conclusion de l’Abc : «le truc
goyesque a été une bonne affaire pour l’organisateur. Mais le public,
patient, de Murcie, qu’on ne lui parle pas de sitôt de Goya.»
Le truc goyesque
Titre du compte-rendu de l’Abc du 17 septembre 1929 : «El truco
goyesco». Dessous, la démolition en règle de la corrida donnée le 15 à
Murcie. Une des toutes premières corridas goyesque. En 29, elles sont à
la mode. Il y en a eu à Gijón, à Astorga, à Pontevedra et sans doute
ailleurs. San Sébastian et Saragosse avaient ouvert le feu en 1928.
Prétexte : le centenaire de la mort à Bordeaux de Goya. Alors, reconsti-
tution d’époque. Ce qui se glisse derrière le fantôme de Goya ? L’ode au
patriotisme, à l’espagnolisme, encouragée par le gouvernement du dic-
tateur Primo de Rivera au pouvoir depuis 6 ans et pour qui le respect de
la tradition fonde l’être espagnol ; qui n’est pas peu. Primo de Rivera :
«nous sommes espagnols ce qui constitue une des rares choses sérieuses
qui existe dans le monde». Faites passer. À travers la corrida goyesque
sont, alors, en jeu, les valeurs de l’Espagne «authentique» illustrées par
ceux, le peuple de Madrid en particulier, qui, au début du XIXe
siècle, se
sont dressés contre Napoléon et contre les modes de vie non autoch-
tones et «afrancesadas», «francisées». On remarque que cette vogue
des corridas goyesques intervient dans ce que les historiens appellent la
«dénationalisation» des «masses urbaines espagnoles» acquises, autour
justement des années 1925, à des engouements nouveaux : le cinéma
hollywoodien, le jazz, le tango, le foxtrot, le charleston, le boom du foot-
ball d’origine anglaise. Ce cosmopolitisme menace le «casticisme», le
purement espagnol, que la corrida porte à son plus haut point. La patrie
est en danger moral, on sort la corrida des origines : Pedro Romero, Pepe
Hillo, Francisco de Goya «el de los toros». On notera par paradoxe que
Primo de Rivera rompt à cette époque avec la tradition taurine en impo-
sant,en 1928, le peto, la protection des chevaux des picadors. Par amour
des animaux ? Pas du tout. Au début de 1928, au premier rang, en
compagnie d’une jolie dame étrangère «proche d’un ministre français»
dit la chronique il assiste à une corrida à Aranjuez. Ville symbolique où,
en mars 1808, un soulèvement populaire a chassé du pouvoir le premier
ministre afrancesado Godoy. Par parenthèse, une corrida goyesque célé-
brant l’émeute est régulièrement organisée en septembre à Aranjuez
depuis 1989 sauf cette année. Pour cause de crise économique elle a été
remplacée par une novillada. Quant à la fameuse corrida goyesque de
Ronda, elle a été créée en 1954 par Pepe Belmonte puis consolidée par
Antonio Ordoñez. Donc en 1928, Primo de Rivera, en bonne compagnie,
regarde une corrida du premier rang des barrières d’Aranjuez. Lors d’une
pique, un toro éventre un cheval et d’un coup de tête envoie ses tripes
sur le premier rang des barreras en aspergeant la jolie dame. Ça la fout
mal. Primo de Rivera donnera ordre à son ministre, le général Martínez
Anido, de prendre des mesures pour en finir avec ce spectacle répu-
gnant. À partir du 8 avril, le peto, dans les tuyaux depuis deux ans, sera
obligatoire. En 1928 donc, corrida goyesque à San Sébastian. Les arènes
ont été décorées sous la direction du peintre Zuloaga. Un concours
d’habits goyesques pour les enfants a été organisé, Primo de Rivera est
venu à la course montée par l’homme d’affaires taurins catalan Eduardo
Pages. Gros succès. Les arènes sont pleines malgré un prix de billets
Escribano.Samedi à Sotillo de la Adrada, dans
la Vallée de la Terreur, Manuel Escribano se fait
«écrabouiller» dixit son père, par un toro contre la
barrière au cours d’un quiebro. On croit d’abord à
une simple commotion cérébrale. Son père pense que
c’est plus grave. Quelqu’un crie qu’il faut l’amener à
Mostoles où il y a un hôpital tout neuf. Les médecins
y diagnostiqueront une rupture de veine iliaque et
une grosse hémorragie interne. Plus de 3 litres de
sang dans son ventre. La cardiologue : «il a été sauvé
par miracle». Des examens vont préciser si sa rate,
son foi, ses reins n’ont pas été lésés par l’hémorragie.
À Arles dimanche il a été remplacé par Luis Bolivar.
Son deuxième toro, le meilleur de la course, s’appe-
lait Escribano. Pur hasard.
Blessures. VENDREDI, à Cartoxo (Portugal)
lésion du foie pour la rejoneadora Ana Rita renversée
et piétinée par un toro. SAMEDI. Pozuelo de Alarcon,
3 côtes cassées et pneumothorax pour le picador
Hector Vicente. Utiel : coups de corne dans la jambe
droite pour les novilleros Jésus Duque (le plus grave)
et Roman. DIMANCHE. Zacatecas (Mexique) coup de
corne de 15,10 et 5 cm dans le fessier pour Sergio
Flores. LUNDI. Albacete : coup de corne de 25 cm en
haut de la cuisse gauche pour le novillero Filiberto. Le
novillo était de Pedres.
Télévision.Dimanche 10h45, Signes du toro.
Programme : Blancanieves et Morante à Istres (itv et
images).
Programme. Féria de Nîmes. JEUDI corrida. Toros : FuenteYmbro.
Toreros : Finito, David Mora, Luque. VENDREDI corrida. Toros, 6 élevages
différents.Toreros : El Juli, Manzanares, Perera,Talavante, Jiménez Fortes,
Juan Leal. SAMEDI matin corrida à cheval, alternative Léa Vicens. Toros :
Bohorquez. Rejoneadores : Ojeda,Ventura, LéaVicens. Après midi corrida.
Toros : Garcigrande. Toreros : El Juli, Manzanares. DIMANCHE matin
corrida. Toros : Zalduendo. Toreros : Ponce, Castella, Perera. Après midi
corrida. Toros : Miura. Toreros : Castaño et X.
Succès. JEUDI. Valladolid. Padilla 2 oreilles, El Cid, 2, El Fandi 4.
SAMEDI. Arles. Espada 2 oreilles. Grand jeu des novillos de Patrick
Laugier. Deux vueltas posthumes. Dax. Fandiño, 1 et 1 oreille. Ronda.
Morante 1 et 2 oreilles. DIMANCHE. Arles. El Cid, 1 et 1 oreille. Luis
Bolivar et Silveti en dessous du bon jeu des toros de la Quinta. Dax.
Castella, 1 et 1.