18 bellini et atelier la déploration sur le christ mort_bondetti
35 retable de saint ambroise rosa m rossello
1. Le tableau d’autel à Venise
entre Moyen Age et Renaissance
Ecole du Louvre, Instituto Veneto di
Scienze, Lettere ed Arti
XVIe Séminaire d’Histoire de l’art
vénitien
35) Alvise Vivarini et Marco
Basaiti, retable de Saint
Ambroise
1. Description de l'œuvre
Titre: Retable de Saint Ambroise
Auteur: Alvise Vivarini et Marco
Basaiti
Chronologie: 1503-1505. L'auteur
décède sans pouvoir finir son œuvre.
Technique: Huile sur bois
Sujet: Apothéose de Saint Ambroise
Dimensions: Hauteur: 500 cm.
Largeur: 250 cm.
Endroit: Église de Santa Maria dei
Frari. Dans le croisillon gauche, après la
chapelle Saint Michel et celle des
Franciscains, il y a la chapelle des
Milanais (Cappella dei Milanesi) où est
conservé le Retable de Saint Ambroise.
2. Étude iconographique
Saint Ambroise, né à Trèves vers
340 et mort à Milan en 397, est évêque
de Milan de 374 à 397. Docteur de
l'Église, il est l'un des quatre Pères de
l'Église d'Occident, avec Saint
Augustin, Saint Jérôme et Saint
Grégoire.
Il est connu en tant qu'écrivain et
poète, quasi fondateur de l’hymnologie
latine chrétienne et lecteur de Cicéron et des Pères grecs, dont il reprend les méthodes
d'interprétations allégoriques.
Il est aussi l'un des protagonistes des débats contre l'arianisme. C'est auprès de lui que
Augustin d'Hippone se convertit au christianisme.
L'empereur Constantin Ier y promulgue l'édit de Milan (313) qui légalise le culte chrétien.
Avec Saint Ambroise, Milan devient un des centres les plus importants du christianisme.
En ce qui concerne à la composition: le personnage principal, Saint Ambroise, est situé
dans le centre de la peinture ; il est représenté avec la robe épiscopale et la mitre. Saint patron
de Milan, il est représenté sous des arcades, armé d'un fouet dans la main droite et tenant la
crosse d'évêque de la main gauche. Derrière Saint Ambroise sont représentés deux soldats,
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2. signes de son pouvoir en tant que gouverneur romain, son pouvoir sur l'Etat. Pour rappel, il fut
le premier à reconnaître le pouvoir de l'église sur l'Etat.
Saint Ambroise est entouré de saints et de deux anges jouant du luth et de la mandore à ses
pieds. Sur la droite, nous trouvons Saint Grégoire (avec la robe papale: la tiare et la crosse) et
Saint Jérôme (également avec des vêtements épiscopaux). En bas du retable, saint Augustin est
représenté au moment où il décide de vivre dans l'ascétisme, après avoir été converti au
christianisme par saint Ambroise. Ces trois personnages portent un livre ouvert pour être
considéré, avec saint Ambroise, comme les quatre Pères de l'Église latine.
A gauche de Saint Ambroise, se trouvent Saint Gervais et Saint Protais (avec la palme du
martyre et le sabre). Ces deux frères milanais furent martyrisés pour leurs croyances religieuses
et Saint-Ambroise retrouva par miracle leurs reliques. En même temps qu'il défendait l'Église
contre l'invasion de l'arianisme, Ambroise devait la défendre contre les revendications du
paganisme.
En dessous de ces deux personnages se trouve Saint Sébastien. Saint Ambroise, au
quatrième siècle, fit le témoignage suivant à son sujet: « …saisir l'exemple du martyre de Saint
Sébastien, dont nous célébrons la fête aujourd'hui. Il est né à Milan et se rendit à Rome dans le
temps où la foi subissait une terrible persécution. Là il a souffert, là il a été couronné », le
présentant ainsi comme un modèle de vertu chrétienne. Au bas de l'œuvre, au pied de Saint
Ambroise, assis sur un marchepied, se trouvent deux anges musiciens, symboles de l’harmonie
divine, mais également en reconnaissance du travail de Saint Ambroise pour faire entrer les
chants dans la liturgie. Ces deux derniers groupes ont été réalisés par Basaiti, disciple d'Alvise
Vivarini, chargé de finir le travail après la mort de son maître.
Derrière les groupes d'accompagnement de Saint Ambroise, à gauche et à droite, il y a un
personnage anonyme sur chaque côté. Il pourrait s’agir des prieurs de la confrérie,
commanditaires de l’œuvre.
Dans la partie supérieure de l'œuvre, on obseve la scène du Couronnement de la Vierge.
Jésus porte un bâton avec une fleur de lys (référence possible à la Trinité) Cette scène est
importante parce que Marie est la médiatrice entre les morts et Dieu.
3. L'œuvre dans son contexte (historique, commanditaires, etc.)
La seconde moitié du XVe siècle est l'époque de l'apogée de la puissance de Venise; ses
domaines s'étendent, en Italie, des Alpes à Rimini et à Bergame; elle possède toutes les côtes de
l'Adriatique, de l'embouchure du Pô jusqu'à la Morée, et détient Zante, Chypre et la Crète;
elle a des comptoirs sur les côtes de la Mer Noire, de la Caspienne, de la Syrie et du Nord de
l'Afrique.
Située entre la mer et la terre, protégée contre l'une par le Lido, contre l'autre par les
lagunes, elle est à l'abri de toutes les attaques. Placée au centre des régions commerçantes, à
l'extrémité de la route maritime que constitue l'Adriatique et de la route continentale que forme
la dépression des Alpes, elle communique facilement avec tous les marchés de l'Allemagne
d'une part, de Flandre et de la Scandinavie de l'autre.
Cette brillante période fut presque immédiatement suivie d'une longue décadence dont les
causes furent multiples. Tout d'abord la découverte de l'Amérique (1492) enleva au bassin de la
Méditerranée une partie de son importance commerciale. Après la découverte de la route de
l'Inde par le cap de Bonne-Espérance (1498), elle perdit sa position d'intermédiaire obligé entre
l'Orient et l'Occident. Enfin, la prise de Constantinople (1453) lui avait fait perdre d'abord ses
marchés, puis ses conquêtes en Orient. Par les traités de paix conclus avec les Turcs en 1479,
1503 et 1540, elle dut renoncer à toutes ses possessions, à l'exception de la Crète, de Chypre,
des îles Ioniennes, et de quelques places en Albanie. En même temps, elle se voyait menacée en
Italie même.
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3. En 1494, la Scuola dei Milanesi a décidé de faire don d'un autel particulièrement
monumental à l'église de Santa Maria dei Frari.
Malgré la présence à Venise du grand artiste milanais Giovanni Agostino, la Scuola de Milan
choisit Alvise Vivarini, né à Venise, pour réaliser son tableau d’autel. Le cadre en bois qui
supporte cette grande œuvre, avec une décoration raffinée, aurait quant à lui été conçu par
Alessandro Caravage, artiste lombard qui avait travaillé avec Alvise à San Giovanni in Bragora.
En outre, il est possible que la tâche ait été attribuée à Alvise à la recommandation de son
collaborateur lombard.
Dans un but patriotique envers la Milan – la ville ayant été sous l’occupation française jusqu’en
1499 – l’œuvre et les personnages sont de taille imposante.
4. Quelques mots sur l’artiste
Alvise (Venise vers 1445 – Venise vers 1505)
La première mention documentaire d'Alvise apparaît dans le testament de sa mère vers
1457-1458). Alvise Vivarini est le fils du peintre Antonio Vivarini, mais il semble que sa
formation en tant qu'artiste ait été confiée à son oncle Bartolomeo Vivarini. Il était le neveu du
peintre Giovanni d'Alemagna, qui a travaillé aux côtés des Vivarini sur divers projets. En plus
de cette connaissance acquise auprès de son oncle Bartholomeo, on distingue chez Alvise
l'influence de Bellini, dans le traitement de la lumière et du volume, qui est le résultat de ses
propres recherches. Il devient artiste de plein droit en 1476 alors qu’il fait partie de la Scuola
della Carita à Venise et qu’il entreprend un polyptyque pour les Franciscains de
Montefiorentino.
En 1488, il doit peindre trois toiles pour la salle du Grand Conseil du Palais des Doges, où
travaillait également Giovanni Bellini. Mais ce dernier meurt avant de terminer son travail,
laissant ses toiles inachevées.
Comme on le voit dans sa signature, Alvise s’est toujours vu comme un peintre de Murano.
Mais il se débarrasse des formules répétitives de sa famille par la simplification des panneaux
et des volumes, mais aussi par un traitement cohérent de la lumière, permettant d’intégrer
couleur et lumière. Cette maturité démontre sa connaissance de l'œuvre de Bellini .
Giorgio Vasari mentionne le malheur de Vivarini dans "Les Vie" La maladie le ruine
physiquement et financièrement au cours des dernières années de sa vie.
Ses élèves sont Basaiti Marco, Girolamo Mocetto et Vincenzo Catena.
5. Place de l'œuvre commentée dans la carrière de l’artiste
Avec un retard certain sur la Toscane où la Renaissance voit le jour dès le début du
quinzième siècle, Venise attend la deuxième moitié du siècle pour que naisse et s'épanouisse la
représentation fidèle de la réalité dans ses volumes, ses perspectives et ses paysages.
Au milieu du quinzième siècle, on assiste aux premiers essais de perspectives dans les
représentations de dallages et de plafonds et à l'apparition en arrière-plan d'un paysage ou d’une
architecture. Les Vivarini de Murano annoncent la Renaissance par la richesse de leurs œuvres.
Ce travail sera le dernier effectué par Alvise. L'artiste étant décédé avant sa finalisation,
c’est son élève Marco Basaiti qui est en charge de la terminer et réalise les deux anges
musiciens et le Saint Sébastien. Un fragment du cartel, transcrit par Moschini en 1815, dit que
le travail a été terminé par Basaiti après la mort d'Alvise, entre 1503 et 1505. Une autre
inscription commémorative dans le cadre en pierre d’origine, indique que celui-ci fut posé en
1503.
Le rendu illusionniste de l’espace intérieur, largement influencé par le style de Mantegna
(« La Trinité avec la Vierge, Saint John et les commanditaires », qui date de 1427), est
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4. caractéristique de la Renaissance : les pilastres et les voûtes en berceau avec des caissons
relèvent d’un véritable exercice de perspective et de création de profondeur.
Même s'il était un représentant de la filière la plus stagnante de l'art vénitien de son temps,
le style d'Alvise est plus avancé que celui de ses parents, intégrant les effets de la perspective
architecturale.
6. Bibliographie
- DE LA QUESNERIE, G., article «Saint Ambroise», La Grande Encyclopédie, Paris, 1885-
1902, tome deuxième.
- DE VORAGINE, J., La légende dorée, trad. Teodor de Wyzewa, Paris, Perrin et cie, 1910.
- HUMFREY P., The Altarpiece in Renaissance Venice, Yale University Press, Singapore,
1993
- MADEC, G., Saint Ambroise et la philosophie. Paris, Institut d'Études Augustiniennes, 1974.
- MARCH , E., The Venetian School of Painting, Books for libraries Press, Freeport, New
York, 1972 (1912).
- SINIGAGLIA G., De’Vivarini: pittori da Murano, Bergamo, 1905
- STEER, J., Alvise Vivarini: his art and influence, Cambridge University Press, Cambridge,
1982.
- VON BRAUCHITSCH, B., Renaissance, Barron's, 2000.
- Choukah, S., article «L'origine des premières formes musicales en Occident», La Scèna
musicale, 2003. (http://www.scena.org/lsm/sm8-5/musique-fr.htm)
- Davidson, I., Saint Ambroise et son opposition a l'arianisme, Evansville University.
(http://www2.evansville.edu/ecoleweb/articles/ambrose.html)
- Rencontre de Saint Augustin par Saint Ambroise, Abbaye saint-Benoît de Port Valais.
(http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/augustin/histoire/chapitre6.htm)
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