1. Travail - Liberté - Justice sociale
Le bulletin d'Al-Qotb France
Editorial
N° 6 - Juin 2013
Refonder l'éducation, au cœur du projet progressiste
cela signifie : une loi pourra directement être inspirée
L
caractère constitutionnel d’une loi qui s’en éloignerait.
développement des peuples, et
L
E PROJET
de constitution maintient la référence
explicite à une religion d’Etat. Rappelons ce que
d’un texte religieux ; a contrario, il faudra « prouver » le
Un député a parlé d’un projet « diabolique ». Reste à en
convaincre quelques personnalités de l’opposition qui
ont donné l’impression, « à quelques réserves près », de
diner avec le diable. Pourtant, introduire la possibilité
de la charia dans la Constitution, n’est-ce pas en totale
contradiction avec la proclamation affichée du
caractère « neutre et civil » de l’Etat ? Certains
paraissent accepter l’ambiguïté au détriment de la
vigilance. Sommes-nous pour autant des « extrémistes
laïcs » ? Rassurons-les : nous nous revendiquons
démocrates, c’est-à-dire partisans du débat, soucieux
des libertés, y compris celle de conscience, certes
inscrite dans le projet constitutionnel mais quasi réfutée
quelques articles plus loin. Après s’être libérée d’une
dictature, la Tunisie ne peut pas prendre le risque d’une
théocratie. Alors, oui, disons que nous sommes «
extrêmement » démocrates ! Mieux, démocrates et de
gauche. C’est pourquoi nous nous réjouissons de notre
intégration au Front Populaire avec lequel nous
partageons tant de convictions : celle de mettre les
préoccupations sociales au cœur du débat politique,
celles aussi de penser que seules l’éducation et la
culture permettent une émancipation des peuples. En
donnant à chaque citoyen un égal accès à la
connaissance, un véritable sens critique ainsi qu’une
ouverture au monde, la révolution aura atteint un de
ses principaux objectifs : faire de la Tunisie une terre
d’hommes et de femmes libres ! Ce bulletin est consacré
à cette ambition. Victor Hugo ne disait-il pas qu’à
chaque fois qu’une école s’ouvre, c’est une prison que
l’on ferme ?
'ÉDUCATION, qu'il convient de
ne pas réduire à l'instruction,
a de tout temps été un
indicateur pertinent du
même plus un outil et un vecteur
de l'accès à leurs libérations.
Dans le contexte tunisien, on ne
peut que relever ainsi le rôle
qu'ont joué les élèves du collège
Sadiki dans le mouvement
national et la naissance de l'Etat
moderne. Cette institution fut
créée au 19ème siècle par
Le collège Sadiki à Tunis, symbole de l'avènement de
époque établi la corrélation entre
national tunisien
Kheireddine qui avait dès cette
progrès et éducation. Ce fut l'un
l'enseignement moderne et terreau du mouvement
des lieux les plus actifs du mouvement
réformiste tunisien.
Avec l'indépendance, et à contre-courant des
communicants du régime vantaient le haut
niveau d'éducation de la jeunesse du pays. La
réalité était nettement moins glorieuse. La
autres pays arabes, Bourguiba décida d'une
"A partir des années 90, tous les
poursuite de son projet de construction rapide
dégradation importante de ce secteur,
massification de l'enseignement. Dans la
et autoritaire d'un État moderne, il avait compris
que celui-ci devait s'appuyer sur une population
disposant d'une instruction allant bien au-delà
des rudiments qui étaient dispensés dans les
Kottabs. Redoutant toutefois l'émergence d'une
contestation parmi la jeunesse qui pouvait par
conséquent disposer d'outils d'analyse et de
critique de la conduite du pays, le PSD, parti-État
de l'époque, s'était infiltré dans toutes les
institutions éducatives et surveillait aussi bien le
corps enseignant que les lycéens et étudiants.
A partir des années 90, tous les analystes
s'accordent à relever une dégradation
importante de ce secteur, alors même que les
analystes s'accordent à relever une
alors même que les communicants du
régime vantaient le haut niveau
d'éducation de la jeunesse du pays.""
généralisation de la pratique des cours
particuliers, compensant au passage les faibles
revenus des enseignants, étaient un premier et
sérieux accroc au principe de la gratuité de
l'enseignement. L'augmentation arithmétique
du nombre d'étudiants via la multiplication des
institutions d'enseignement supérieur servait en
fait à masquer la crise structurelle du marché de
l'emploi, en contenant pour encore quelques
années un grand nombre de jeunes dans le
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2. Le bulletin d'Al-Qotb France
système éducatif, réduisant artificiellement les
de qualité. Il n'y aurait en effet pas plus
Aujourd'hui, ce secteur continue à souffrir des
et le droit à l'éducation, tel qu'énoncé dans la
statistiques du chômage.
mêmes maux. Maintenant que la parole est libre
et que l'information n'est plus sous surveillance,
on constate que la situation est parfois encore
pire que l'on pouvait l'imaginer. La
déscolarisation et l'analphabétisme sont des
phénomènes beaucoup plus répandus qu'on ne
contradictoire qu'un système éducatif privatisé
déclaration universelle des droits de l'homme.
"Alors que faire ? D'abord mettre
l'éducation au cœur des préoccupations
d'un programme politique alternatif à
celui qui nous est infligé en ce moment"
le croyait. L'état de délabrement des écoles
Sur le plan du contenu, les programmes devront
particulièrement grave, et l'indifférence des
généraux mais aussi donner les outils de
primaires dans les zones rurales est
pouvoirs publics n'est que partiellement
compensé par la société civile. En témoignent
par exemple les actions entreprises par
différentes associations de la région de Bizerte à
Fejjet Errih, à Sejnane et ailleurs où elles
apportent une aide matérielle aux élèves et
contribuent à la réfection de salles de classes.
Mais les associations ne peuvent se substituer
durablement à l'Etat, elles mettent par contre à
jour ses carences inacceptables.
Alors que faire ? D'abord mettre l'éducation au
cœur des préoccupations d'un programme
politique alternatif à celui qui nous est infligé en
ce moment. Ce secteur doit disposer des
moyens humains et matériels en adéquation
avec sa mission, et rester intégralement gratuit
et accessible à toutes et tous. L'éducation se doit
d'être l'un des symboles forts d'un service public
bien entendu assurer la transmission des savoirs
réflexion autonome, de sensibilisation aux arts...
Il faudra également donner une seconde
chance à celles et ceux qui n'ont pas pu
bénéficier de conditions d'accès correctes à
l'école, via des programmes d'éducation
populaire.
Tout cela aura un coût très important, bien sûr.
Les moyens de l'Etat sont aujourd'hui modestes
certes, mais dès qu'une réforme fiscale juste, car
progressive et étendue à tous les revenus sera
mise en place, la réalisation d'un tel chantier
deviendra possible.
Encore faut-il que l'émancipation des citoyens, la
volonté de donner les moyens de réfléchir,
d'agir, et par conséquent de disposer
pleinement de sa liberté soient inscrits au cœur
des convictions de ceux qui nous gouvernent.
Actualités Al-Qotb
N° 6 - Juin 2013
A
Zoom
le 14 janvier la Tunisie a connu un
véritable bouillonnement artistique. Libérés
de la censure, les artistes tunisiens, créatifs et en
phase avec la société civile, ont cherché à
réorganiser et révolutionner la scène culturelle
tunisienne. Pour autant ils ont rapidement été
confrontés à de nombreuses difficultés. Le
manque de financement, le manque de soutien
institutionnel, ou encore le retour de la censure
sont autant d’obstacles à l’avènement d’un
paysage culturel riche, novateur et ouvert sur le
monde.
Notre pays ne compte qu’une dizaine de salles de
cinéma, l’industrie cinématographique est quasiinexistante, la production théâtrale manque
cruellement de moyens, et il en va de même pour
la danse et la musique qui peinent à s'affranchir
du folklorisme. Pour autant la Tunisie regorge
d’artistes talentueux, débrouillards, connectés au
monde et engagés.
S’interroger sur l’avenir de la culture en Tunisie
n’a rien d’élitiste, bien au contraire, cela touche
aux valeurs fondatrices que nous voulons mettre
au cœur de notre projet de société. Si la culture a
toute sa place dans une société démocratique où
chaque citoyen a le droit de s’exprimer librement,
son sort est plus incertain dans une société
statique et repliée sur sa supposée identité
millénaire. De plus la marginalisation de nombre
de Tunisiens n’était pas uniquement économique
et sociale, mais également culturelle. L’art est un
puissant moyen d’expression, vecteur de
changements, il est dès lors important de favoriser
et de soutenir la création artistique.
L’un des phénomènes marquants de la révolution
est la montée en puissance de l’activisme culturel
mais également des arts de la rue. Les artistes
tunisiens ont su s’approprier avec brio les codes
de la culture urbaine et se sont imposés comme
les chantres de la contestation anti-régime. La
scène culturelle tunisienne doit être soutenue et
cela implique toutes les formes de culture.
PRÈS
A
l-Qotb a pris la décision d'adhérer au Front
Populaire, et ce à l'issue d'un Conseil Executif
du parti qui examinait les enseignements de sa
participation aux travaux à la conférence du Front
Populaire, tenue le 1er et 2 juin dernier. Cette décision a été communiquée lors d'une conférence de presse tenue le jeudi 13 juin à Tunis, et
ce en présence du Conseil des Secrétariats du Front. Cette adhésion marque l'attachement des militants du Qotb à la construction de l'union
des forces de gauche en Tunisie.
Le Bulletin d'Al-Qotb France se met en pause estivale; il revient en septembre.
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