Chronique sur le Facebookgate et les archives des utilisateurs conservées par la plateforme

1. #Delete or #Notdelete
Le Facebookgate secoue le monde des réseaux sociaux. Mais quelle est
exactement la nature des données des 50 millions d’utilisateurs qui ont fuité?
Les archives personnelles de ses abonnés mises à disposition par Facebook
nous le révèlent. J’ai voulu savoir et demandé le téléchargement des miennes.
Ça y est, c’est fait! J’ai téléchargé mes archives Facebook. Cela fait pas mal d’archives étant
donné que j’ai ouvert mon compte il y a plus d’une dizaine d’années. Dix années durant
lesquelles j’ai connu plusieurs vagues de désamour, où j’ai boudé Facebook, sans réussir
toutefois à couper complètement le cordon. Facebook a connu quelques crises aussi. Des
crises de croissance, semble-t-il. Rappelez-vous, le déclin de Facebook a déjà été annoncé
plusieurs fois. Ça n’empêche que le nombre d’utilisateurs actifs a dépassé les deux milliards
fin 2017. Seraient-ils tous naïfs ou idiots?
Alors, les voici ces archives… Un gros dossier plein de fichiers en bas de mon écran. Je me
jette dessus, impatiente de savoir si tout ce que l’on a lu ces derniers jours est vrai! Je veux
savoir quels fragments de ma vie Facebook, ce traître, a livré aux monstres sournois
collecteurs de données. Il y a des messages, des photos, des vidéos, des fichiers mp4…
«Tous ces précieux souvenirs sont conservés
sur les serveurs de Facebook.»
Je suis contente de constater que ces archives contiennent tant de si belles photos. Et que
tous ces précieux souvenirs sont conservés sur les serveurs de Facebook. On ne sait jamais. Si
on me volait mon MacBook et qu’un incendie détruisait tous mes backups, il me resterait ces

2. magnifiques photos de voyages, de joyeuses rencontres. (Sur Facebook, on n’expose pas les
épisodes malheureux de sa vie.)
Tiens, il y a aussi la liste de tous mes amis Facebook. Présents et passés, refusés ou
supprimés. (Elle, j’ai bien fait de la zapper, quelle quiche!). Mais également le détail des
événements auxquels je me suis intéressée et auxquels j’ai participé. C’est comme un
historique de mes relations virtuelles et de mes activités culturelles.
«Que faire? Ne plus utiliser Messenger ni WhatsApp pour
transmettre des trucs perso?»
Quoi? Et là, qu’est-ce que je vois? La liste de mes contacts et leur numéro de téléphone.
Parmi eux, des personnes qui n’ont même jamais eu l’idée de s’inscrire sur Facebook. Des
clients… Et là? Un fichier intitulé «Reconnaissance faciale»: des lignes de code et la photo de
mon profil Facebook. Au moins, elle ne livre aucun des traits de mon visage, j’y suis de dos. Et
sous le fichier «Messages», qu’est-ce qu’on trouve? Une conversation sur Messenger avec
Sandra. Texte et photos. De l’intime. Maintenant qu’il est clair que des données aussi
personnelles ne sont pas en sécurité chez Facebook, je m’interroge. Que faire? Ne plus
utiliser Messenger ni WhatsApp pour transmettre des trucs perso? Heureusement que, nous
informe WhatsApp, ses messages sont «protégés de bout en bout». Dans ce cas-là, il faut
éviter Google & Co., qui disposent de données encore plus détaillées sur nous. Mais comment
faire sans eux?
Faire appel à un bon vieux pigeon voyageur. Bientôt, c’est tout ce qu’il nous restera pour
communiquer incognito. Ou un service de messagers à cheval. Quoique le cheval, ça laisse
des traces en chemin. Peut-être que l’on se rencontrera, en petit comité, à heure fixe, pour
échanger des infos. Comme nos aînés le faisaient au bistrot à l’heure de l’apéro. On pourrait
rétablir les liens 100% humains. Sans l’intermédiaire de machines. Avoir des échanges loin
d’internet, émettre des données impossibles à siphonner. Enregistrables uniquement par des
cerveaux humains. Malheureusement, ceux-là ne sont a priori pas infaillibles non plus.
Sylvie Castagné est mère d’une adolescente qui, comme nombre de ses pairs, lâche difficilement son
smartphone. La jeune fille trouve toutefois que sa mère passe un peu trop de temps sur Facebook, Twitter et
Instagram. La rédactrice free-lance basée à Zurich prend plaisir à explorer l'univers numérique et à analyser
l’impact des réseaux sociaux sur nos vies.
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