1. 1916, date de la
transcription du décès de
son mari.
Marcel Dumont, quant à
lui, maçon vivant derrière
le Parc était sur les
champs de bataille non
loin d’Eugène, à St
Thomas d’Argonne dans
la Marne.
Noëlle Rivière
Après un voyage dans le
Nord de la France, c’est
dans la Marne et la Meuse
que j’ai poursuivi mes
recherches sur nos héros
Orgerussiens.
Ce mois-ci le PEO hors
série sera surtout consacré
à Eugène Jeulin, cousin
de Gabriel (PEO de
novembre 2014). Eugène
a été tué à Beauséjour,
près de la Main de
Massiges dans la Marne.
Grâce aux échanges de
courriers entre Eugène et
Clothilde sa femme,
transmis par leur petit-fils,
je vous laisse découvrir le
quotidien d’Eugène et
certainement l’angoisse
de Clothilde vivant alors à
Béhoust avec leurs
enfants. A partir de juillet
1915, Clothilde est sans
nouvelle, jusqu’en janvier
Hors série : Centenaire de la guerre de 14 /18
La 2ème bataille de Champagne
La 1ère bataille de
Champagne a débuté le 20
décembre 1914 dont de
fortes attaques au début
janvier 1915. Comme
indiqué dans le Petit Echo
Hors série de février 2015, le
18 mars 1915, le général
Joffre stoppe cette 1ère
bataille qui a fait en trois
mois une perte de 94 000
hommes. Ensuite, les mois
s’écoulent, ponctués
d’actions locales où les
forces françaises s’usent
sans gain de terrain
appréciable. Cependant,
Eugène Jeulin sera tué à
Beauséjour le 9 juillet 1915.
La 2ème bataille de
Champagne démarre le 25
septembre 1915 lorsque
Joffre lance les 2ème et
4ème armées commandées
par le général de Castelnau
sur 27 km pour rompre le
front ennemi entre Auberive
et Massiges. Au soir du 27
septembre, les français ont
avancé de 4 km sans
ré a l i s e r l a p e rc é e
victorieuse, fait 25 000
prisonniers, pris 150 canons
en perdant 138 000 tués,
blessés, disparus. Parmi
eux, les Orgerussiens
Marcel Dumont et Victorien
Dareau et par la suite
Aurélien Guinant à Cuperly
en octobre 1915 et Robert
Rivet en avril 1916 à
Massiges.
Cette guerre est usante et
met à l’épreuve les forces
morales. Confrontés à une
violence insoupçonnée,
vivant comme des bêtes,
subissant des contraintes
h u m a i n e s , c e r t a i n s
combattants craquent. Des
permissions sont accordées,
mais elles n’empêchent pas
des désertions, des
abandons de poste, des
refus d’obéissance, des
mutilations volontaires.
Sommaire :
RAPPEL HISTOIRIQUE
LES ORGERUSSIENS
MORTS POUR LA
FRANCE
EUGÈNE JEULIN 2 & 3
MARCEL DUMONT 4
Dans ce numéro :
Le Petit Echo d’Orgerus
Journal
Municipal
d’Orgerus
Hors-Série Numéro N° 6 - septembre 2015
Photos prises du site reconstitué par
l’association de la Main de
Massiges (51)
2. Transcription de l’acte de
décès de Eugène Alexandre
JEULIN mort pour la
France : « L’an 1916 le 20
janvier à 16h transcription de
décès ; L’an 1915 le 12 juillet
à 16h10 étant à Beauséjour
Marne, acte de décès de
Eugène Alexandre Jeulin,
soldat de 2ème classe du
322ème régiment d’infanterie,
19ème compagnie,
immatriculé sous le numéro
3621, du recrutement de
Versailles, né le 18 mars
1884 à Orgerus, domicilié en
dernier à Béhoust décédé à
Beauséjour Marne aux
tranchées le 9 juillet 1915 à
23h des suites de ses
blessures occasionnés par
un obus. Fils de François
Edouard et de Pauline Nicole
domiciliés à Orgerus époux
de Clothilde Arinthe. »
Eugène est le cousin
germain de Gabriel Fernand,
mort à l’Echelle-Saint-Aurin
dans la Somme, comme
nous l’avons vu dans le
hors série de novembre
2014.
Les parents d’Eugène
habitaient au Moutier
d’Orgerus. Son père était
journalier. Le 2 mai 1908, il
épouse à Béhoust, Clotilde
Arinthe, blanchisseuse. De
leur union, nait à Orgerus
une fille Renée en 1909 et
à La Queue-lez-Yvelines,
Albert en 1912. Vers 1910,
Eugène quitte Orgerus pour
s’installer avec sa famille à La
Queue-lez-Yvelines. Il est alors
maçon chez Eugène Asselin,
entrepreneur de travaux
publics à La Queue.
En août 1914, il est mobilisé.
Son épouse quitte le domicile
pour rejoindre sa famille à
Béhoust. Le 9 juillet 1915, il
décède à Beauséjour dans la
Marne.
Extraits des courriers
adressés depuis les
tranchées par Eugène
Alexandre JEULIN à son
épouse Clotilde Eugénie
ARINTHE entre le 6 avril et
le 9 juillet 1915, transmis
par leur petit fils Daniel
Jeulin
En cantonnement, 6 avril 1915
…Nous avons changé de
cantonnement et de régiment…
22° d’infanterie, 5° Bataillon, 19°
compagnie, Secteur Postal 138
du mal à réussir, ce matin il y
avait beaucoup de malades…il
nous fait faire, étant au repos,
l’exercice comme aux bleus, si
cela continue personne ne vou-
dra marcher. …Ne te tourmente
pas si je suis blessé…S’il m’ar-
rive autre chose de fâcheux tu
le sauras car nous sommes
plusieurs camarades ensemble
que nous avons nos adresses,
et cela est convenu d’avertir la
famille.
Au repos, 27 avril 1915 …
Dans les tranchées…avec cette
fumée de fusils et d’obus on ne
voyait plus clair…Il vaudrait
mieux encore manquer de nour-
riture que de munitions…
Les Tranchées, 1° mai 1915
……Je passerais notre anniver-
saire de mariage demain dans
les tranchées…
Au repos, 3 mai 1915 …Ici ce
n’est pas gai, on ne voit pas des
fleurs comme chez nous, car il
n’y a plus d’arbres……J’ai bien
pensé à l’anniversaire de notre
mariage car dans les tranchées
on a beaucoup de temps de
penser à bien des choses.
Les tranchées, 7 mai 1915…
Quand tu m’écris ne met jamais
sur tes lettres Boches, pour que
je comprenne tu n’auras qu’a
mettre eux…Les chiffons que tu
m’as envoyés font bien mon
affaire……Tu pourrais m’en-
voyer un peu de camphre…pour
que je puisse le mettre à mon
cou pour chasser nos petits
habitants…
Les tranchées, 14 mai 1915 :
……J’ai bon appétit, mais la
graisse est bien disparue, mais
tant que l’on peut conserver le
reste cela n’est rien… …
Au repos, 15 avril 1915 …Ce
que j’avais fait de campagne
jusqu'à ce jour, je n’avais en-
core rien vu…Nous sommes
dans certains endroits sur des
cadavres Boches, ils servent
même à tenir les parois de la
tranchée……chaussettes
russes, alcool de menthe, tein-
ture d’iode, voila le plus urgent
dont je ne saurai me passer.
Les tranchées, 18 avril 1915
…Si on se repose un peu le
jour, c’est grâce à notre 75…qui
les chatouillent toujours un
peu…La nuit…nous avons des
projecteurs…on peut aussi bien
viser comme de jour…Voila en
deux mots notre vie qui ne vaut
pas celle d’un chien.
Au repos, 21 avril 1915 …
Nous avons un colon qui nous
mène la vie dure, mais il aura
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Le Petit Echo d’Orgerus Hors-série guerre de 14/18 Septembre 2015
LES
ORGERUSSIENS
MORTS POUR
LA FRANCE
Eugène Alexandre JEULIN
3. un coup de feu pendant 5
minutes.
Au repos, 28 mai 1915 …
Cela semble bon de pouvoir
se laver…Je me suis levé ce
matin à 3 heures pour laver à
la rivière, car il faut retenir sa
place. Je viens des bains
douches, cela est curieux de
voir une installation de ce
genre, cela est très pratique.
Les tranchées, 30 mai 1915
…Je suis soldat de 1° classe
depuis le 26 mai…j’ai voulu
refuser, mais j’aurai été mal
considéré vu que c’était le
chef de section qui m’avait
proposé…cela ne me plait
pas…je te prie de le garder
pour toi.
Les tranchées, 1° juin 1915
…Tu me demandes toujours
une longue lettre, mais que
veux tu que je te dise ? vu
que c’est toujours la même
chose.
Au repos, 6 juin 1915 …Je
suis comme les camarades,
on commence à en avoir
assez…Je vous promet que
vous, femmes françaises et
allemandes, que si vous
voyez notre situation, la
guerre serait finie d’ici une
quinzaine de jours. Car voir
des cadavres… en décompo-
sition, cela est bien triste, et
l’on dit sur le journal que le
service sanitaire est bien
établi…cependant il faut voir
ces milliers de mouches…au
combat du 8 mars il y a eu
45000 morts tant que Boches et
Français, vous voyez que l’on
ne peut pas faire disparaître
tous ces cadavres d’un seul
jour…
Les tranchées, 13 juin 1915
J’ai bien reçu ton colis…L’eau
de vie était bien bonne, et cela
chasse un peu les mauvaises
odeurs…l’andouille était bien
conservée…au moment d’un
orage qui a duré 1 heure…Dans
nos tranchées on avait 20 centi-
mètres d’eau, on ne voyait pas
à 2 mètres par l’eau et la fumée
de la poudre……Nous avons
subi assez de pertes…il faut
compter aux 2 bataillons 800
hommes hors de combat dont
200 tués environ.…Cette guerre
depuis hier matin et nous de-
vons repartir demain soir pour
les tranchées.
Les tranchées, 8 juillet 1915
(avant dernière lettre)
…Tout va pour le mieux. Nous
sommes dans les tranchées de
1° ligne depuis cette nuit, nous
y sommes pour 12 jours, nous
passerons donc le 14 juillet
dans les tranchées…
Les tranchées, 9 juillet 1915
(dernière lettre)
…Reçu à l’instant ton colis en
bon état qui m’a fait plaisir. Les
abricots sont bien bons, ils
chées pour 12 jours…
Les tranchées, 25 juin 1915
…Le colis était en bon état,
mais les fraises ne s’étaient
pas conservées, il y avait un
peu de fourmis, mais cela
était bien bon de pouvoir
goûter une fraise…j’ai eu la
courante pendant 2 jours,
cela va mieux aujourd’hui,
c’était la chaleur qui faisait
cela, il faisait vraiment chaud,
on était pas bien dans les
tranchées…
Au repos, 6 juillet 1915
…Nous sommes au repos
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Le Petit Echo d’Orgerus Hors-série guerre de 14/18 Septembre 2015
LES
ORGERUSSIENS
MORTS POUR
LA FRANCE
va se faire plutôt sous terre que
dessus…nous faisons des sou-
terrains de 8 mètres de profon-
deur et parfois les Boches se
rencontrent avec nous dans ces
souterrains.
Les Tranchées, 16 juin 1915
…Je n’ai plus de bretelles, les
miennes sont pourries par la
sueur et je ne peux plus les répa-
rer.
Les tranchées, 18 juin 1915…
Nous avons des masques contre
les gaz asphyxiants et brûlants…
Au repos, 22 juin 1915
…On repart ce soir aux tran-
J’attends avec impatience une
blessure comme ma première cela
serait toujours autant de bon……
On pourrait ramasser de l’alumi-
nium pour faire une batterie de
cuisine, on pourrait en avoir un
tombereau en peu de temps, car
maintenant une partie de leurs
obus sont fait rien qu’avec cela
……
Les tranchées, 24 mai 1915 …On
a appris hier matin que l’Italie fai-
sait une mobilisation générale
contre l’Autriche et l’Allemagne.
Nous l’avons appris hier soir aux
Boches en criant vive l’Italie à
haute voix de façon qu’ils puissent
nous entendre et avons hissé le
drapeau Français, ils n’ont pas tiré
un coup de fusil, même pas dans le
drapeau, cela faisait une drôle
d’impression de ne pas entendre
étaient bien conservés. Cela fait
plaisir de se servir d’un mouchoir
qui est si propre, si l’on mettait
notre lessive à coté de la tienne
on y trouverait de la différence.
Quand aurai-je le bonheur de
pouvoir mettre du linge si propre
pour toujours ? La santé est tou-
jours bonne et vous souhaite à
tous de même. Bonjour à nos
familles, embrasse bien nos petits
enfants. Merci de ton colis. Reçois
mes milles baisers. Ton mari qui
ne cesse de penser à toi. Eugène.
Les 9 et 10 juillet 1915 : attaque
par les Allemands de la tranchée
Crochet et contre attaque des
français. Bilan : 2 prisonniers, 30
tués, 95 blessés et 7 disparus.
Béhoust, 19 juillet 1915 :
Monsieur, Voudriez vous avoir la
bonté de me donner des nou-
velles de mon mari, Jeulin Eu-
gène dont je suis sans nouvelles
depuis 10 jours. Remercie-
ments. Clotilde Jeulin
Rodez, 4 août 1915 : Aucun
renseignement ne nous est en-
core parvenu au sujet de ce
militaire. Dès que nous rece-
vrons des Indications précises le
concernant vous en serez aus-
sitôt prévenue.
Orgerus, le 20 janvier 1916 :
transcription du décès d’Eu-
gène sur les registres d’état
civil d’Orgerus.
Merci à Daniel Jeulin, leur petit
fils, de nous avoir permis de
publier ces écrits. Difficile de
couper des passages, tant
l’émotion est intense.
4. Croquis envoyé par Eugène à son épouse
Marcel Dumont est né le 21
avril 1892 à Garennes dans
l’Eure. En 1911, il habitait
« derrière le Parc » chez ses
parents, Eugène et Julia,
avec sa sœur Fernande et
son frère Robert. Marcel était
maçon
Soldat au 168ème Régiment
d’infanterie, il est tué lors des
batailles de la Marne.
Mention du jugement déclaratif
de décès de Marcel Aimé
DUMONT
Par jugement du 10 août 1920
transcrit le 30 août 1920 sous
le numéro 28, le tribunal civil
de Rambouillet a déclaré
constant le décès de Marcel
Aimé Dumont, mort pour la
France le 25 septembre 1915
à St Thomas Argonne.
(Marne)
Plaque commémorative au cime-
tière du Moutier d’Orgerus.
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Le Petit Echo d’Orgerus hors série guerre de 14/18 - Septembre 2015
Le Petit Echo d’Orgerus est
édité par la mairie d’Orgerus.
Directeur de la publication : M
Jean-Michel Verplaetse, maire
Commission information
communication : Franck Lamas
vice-président.
Photos : Sophie Knoerr, Noëlle
Rivière
Bibliographie : sites internet
des Archives départementales
des Yvelines et généanet, notes
de Daniel Jeulin, ass. Main de
Massiges (51).
Ecrits et recherches : Noëlle
Rivière, Daniel Jeulin
I mpr esss ion : ma ir ie
d’Orgerus,
Distribution : bénévoles
d’Orgerus : Mmes MM
Dupuichs, Remoussin, Faburel,
Rousseau, Dorléans, Mazencq,
Pinsard, Larcher, Winstein,
Gobert, Knoerr, Quintin
Place des Halles
78910
ORGERUS
Tél : 01 34 87 20 31
Fax : 01 30 88 32 46
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Retrouvez nous :
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Marcel DUMONT
« Je te joins un petit croquis
des tranchées fait par un
camarade. Vous pourrez
vous rendre compte des
positions pour le moment, les
bois sont marqués, il faut
plutôt dire l’emplacement car
tout est coupé à environ 1
mètre du sol. »
Extrait d’une lettre d’Eu-
gène Jeulin à Clotilde du
14 mai 1915
Site de Beauséjour. Photo
prise en avril 2015