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RESTRUCTURATION DE DETTE OBLIGATAIRE
RECAPITALISATION DE LA DERNIERE CHANCE
ET INTERVENTIONNISME ETATIQUE
Analyse des conséquences de l’inefficacité du droit français sur la restructuration des
entreprises de taille significative
Sophie Vermeille
Avocat en Corporate et Restructuring
Chercheur au Laboratoire d’économie du droit de Paris II
Présidente de Droit & Croissance / Rules for Growth
V2 – 23/04/2017 – Work in Progress
Introduction Contextualisation – Études Empiriques Page 3
Partie I Neuf constats Page 16
Cas Pratique
Bull, Technicolor, Alcatel, CGG, Solocal, Alstom, Areva
et General Motors
Partie II Conclusion et cinq recommandations Page 62
2
SOMMAIRE
3
INTRODUCTION
Contextualisation – Études empiriques
Introduction : désaffection des grandes entreprises en difficulté pour la
procédure collective
• Sur les cinq dernières années, on observe un certain nombre de
restructurations / recapitalisations de sociétés cotées (dont plusieurs
rechutes)
• Précédemment, on notera certaines restructurations / recapitalisations
emblématiques (Eurotunnel, Bull, Alstom, Rhodia, Technicolor, déjà France
Telecom et Air France)
• Deux seules grandes entreprises ont fait l’objet d’une procédure collective
(Technicolor et Eurotunnel)
4
Dexia
CGG
Sequana
Alcatel,
France
Telecom
PSA, Solocal
Gascogne
Sequana
CGG,
Vallourec,
Solocal
CGG
EDF, Air
France,
Areva
2012 2013 20162014 2017
Introduction : à la place, un grand nombre d’opérations de recapitalisation
« de la dernière chance » dans les entreprises cotées (distressed equity
offering)
• Augmentation de capital essentielle à la survie d’une entreprise et dont le produit
à vocation à : 1) apurer le passif antérieur et / ou 2) à financer son plan de
restructuration et/ou 3) à réaliser des investissements indispensables
5
• Pari financier risqué pour les
actionnaires qui doivent se convaincre
que l’opération de recapitalisation va
créer suffisamment de valeur nette
positive pour eux-mêmes
• À défaut, transfert de richesse des
actionnaires au profit des créanciers
• Pari risqué également pour les créanciers si la recapitalisation sert à financer des
projets d’investissement qui ne créent pas de valeur et font perdre du temps
Introduction : des études empiriques mettent en évidence le pari risqué des
actionnaires
• Pourtant, il existe une corrélation positive entre le niveau des difficultés
d’entreprises et l’organisation d’opérations de recapitalisation (Ph. Jostarndt,
2009)
• Pourtant, il y a peu de concessions significatives de la part des créanciers (26%-
30%), (N. Keifer, 2003 et J. Franks, S. Sanzhar, 2006)
6
• Chute importante du cours de bourse à la suite de ces
recapitalisations (10%) (J. Franks, S Sanzhar, 2006)
• Transfert de richesse entre anciens actionnaires et
nouveaux actionnaires ? Pas vraiment, le rendement
moyen de l’action des entreprises en difficulté est inférieur
au rendement moyen de l’action des entreprises en bonne
santé dans le même secteur. Phénomène de « Distressed
puzzle » (J. Campbell, J. Hilscher et J. Szillagyi 2008)
Introduction : constats et problématiques
• En France, on observe un grand nombre de recapitalisations « de la dernière
chance » sans réelle, voire aucune concession de la part des créanciers
(Eurotunnel dans les premières années, Alcatel en 2013, Rhodia en 2008 et 2010,
CGG en 2016, Solocal en 2014, Vallourec en 2016 etc.)
• Transferts de richesse importants des actionnaires au profit des créanciers, ce qui
est problématique car l’État intervient souvent dans ce type d’opérations
 Pourquoi alors les actionnaires participent-ils à de telles opérations ?
 Pourquoi les entreprises n’arrivent-elles n’arrivent-elles pas à obtenir davantage
de concessions significatives de la part des créanciers pour protéger leurs
actionnaires ?
7
Introduction : constats et problématiques
 Pourquoi le dirigeant propose-t-il à ses actionnaires de réaliser de tels paris
financiers ?
 Quel lien avec le fait que les entreprises françaises de taille significative n’ont pas
recours à la procédure collective, même en grande difficulté ?
 Quelle explication à l’intervention fréquente de l’État dans les grandes entreprises
en difficulté?
 Pourquoi l’État ne parvient-il pas à réduire son risque lorsqu’il endosse le rôle
« d’actionnaire en dernier ressort ? »
8
Introduction : à démontrer, l’existence d’un lien entre les lacunes du droit
français et… :
• La difficulté des grandes entreprises ayant fait appel aux marchés obligataires à
restructurer en profondeur leur bilan, faute de pouvoir rendre crédible la menace
de l’ouverture d’une procédure collective
• La protection insuffisante des actionnaires minoritaires dans le cadre des
recapitalisations de la « dernière chance »
• La trop grande tentation des dirigeants de solliciter leurs actionnaires minoritaires
à prendre des paris risqués
• L’intervention fréquente de l’État français dans des opérations de recapitalisation
de la « dernière chance »
• Les modalités de l’intervention de l’État français, coûteuses pour les finances
publiques
9
1er
Constat
Le pouvoir de négociation du dirigeant face aux obligataires dépend de la
crédibilité de la menace d’une procédure collective
Slide 15
2ème
Constat
La procédure collective ne permet pas au dirigeant de contraindre les
obligataires à participer à l’offre publique
Slide 20
3ème
Constat
La procédure collective ne permet pas au dirigeant de convaincre les
obligataires de participer à l’offre publique
Slide 23
4e
Constat
Les règles de la procédure collective ne favorisent pas la formation d’un
marché pour le contrôle des grandes entreprise en difficulté – les
dirigeants ne sont pas contraints pas leurs propres créanciers de
restructurer le bilan en profondeur
Slide 34
5ème
Constat
Faute de restructuration en profondeur du bilan, le dirigeant est incité à
recourir à des augmentations de capital « de la dernière chance »
risquées pour les actionnaires ; en principe ces derniers devraient refuser
Slide 39
10
Introduction : démonstration en huit constats
6ème
Constat
Toutefois, grande difficulté des actionnaires, en situation d’asymétrie
d’information, à évaluer leur intérêt patrimonial et à reconnaître qu’ils
sont sujets à des biais cognitifs
Slide 45
7ème
Constat
De même, existence d’un certain nombre conflits d’intérêts et de biais
cognitifs au niveau des dirigeants
Slide 48
8ème
Constat
Enfin, la forte participation de l’État, en l’absence de marché pour le
contrôle des entreprises en grande difficulté, envoie un signal trompeur
pour les actionnaires minoritaires
Slide 54
9ème
Constat
Le Chapter 11 américain permet de forcer les obligataires à faire des
concessions significatives d’où un nombre important d’offres publiques
d’échange d’obligations en actions ; le Trésor américain n’a pas à endosser
le rôle d’actionnaire en dernier ressort
Slide 64
11
Introduction : démonstration en huit constats
Analyse micro-économique Analyse macro-économique
• Difficultés financières,
opérationnelles ou les deux
• Dans un environnement ultra-
concurrentiel, lorsque les difficultés
opérationnelles ne sont pas que
temporaires, il faut plus qu’un simple
rééchelonnement pour garantir la
pérennité de l’entreprise => la
réduction rapide du niveau
d’endettement des entreprises est un
impératif
• Fort endettement des entreprises
compte tenu de la bulle de crédit
d’avant 2008 et de la bulle obligataire
consécutive à la politique monétaire
accommodante de la BCE
• Longue période de récession /
stagnation en Europe
• Autres grands bouleversements à
l’échelle mondiale (énergétique,
numérique)
12
Préambule : il n’a jamais été autant nécessaire de réduire la dette
 De plus en plus d’entreprises de taille significative auront besoin de
restructurer en profondeur leur bilan
Préambule : modes de restructuration du bilan
13
PassifActif PassifActif PassifActif
Cession d’actifs et
allocation du produit
au remboursement
de la dette mais
risque de cession au
rabais, et si
autorisation des
créanciers
Rachat par
l’entreprise sur les
marchés de ses
obligations avec une
décote, mais pas
toujours facile et
accord nécessaire
des créanciers
Annulation de la
dette consentie par
les créanciers, le plus
souvent en
contrepartie de
l’émission d’actions
14
PARTIE I
LES CONSTATS
Constat n°1
• Le pouvoir de négociation du dirigeant dépend de la
crédibilité de la menace d’une procédure collective
• L’absence en France d’offre publique d’échange d’obligations
en actions est révélatrice des lacunes du droit des procédures
collectives
• Le dirigeant se limite à proposer une restructuration limitée
de sa dette obligataire ; il sait qu’il n’a pas les moyens de
convaincre et contraindre les obligataires à faire des
concessions plus significatives
15
Les difficultés de la restructuration de la dette obligataire hors procédure
collective
• Hors procédure collective, l’accord de chaque créancier est nécessaire si les
obligations sont soumis au droit français (ou au droit de l’État de NY)
▫ La masse des obligataires n’a pas compétence ni pour réduire le montant
nominal des obligations, ni pour les convertir en actions
▫ Interdiction des clauses collectives
• Lorsque le nombre d’obligataires est important, l’entreprise n’a d’autre choix que
celui de faire une offre publique d’échange d’obligations en actions
▫ Pour être attractive, l’offre doit être plus intéressante que le maintien du statu
quo
▫ Ceux qui ne souscrivent pas à l’offre devraient se retrouver titulaires d’un titre
moins liquide, parfois dépourvu de ses covenants et garanties avec une date de
maturité reportée
16
• Deux risques de rejet de l’offre publique (hold out) :
▫ Refus d’une minorité au sein même série d’obligations
▫ Refus d’une série entière d’obligation
• Risque de rejet élevé car les autres créanciers (les établissements de crédit) mis
dans la situation de devoir accepter seuls les concessions significatives nécessaires
au redressement de l’entreprise
• Constat : ABSENCE d’offre publique d’échange de titres obligataires en actions en
France, à comparer avec la situation aux Etats-Unis
• Détournement des règles de masse afin de permettre la restructuration en
profondeur de la dette obligataire à la majorité qualifiée (Bull)
17
Les difficultés de la restructuration de la dette obligataire hors procédure
collective
Préambule : CAS PRATIQUE – Bull
 Groupe spécialisé dans les technologies informatiques
 2004 : Bull se recapitalise à hauteur de 44 millions d’euros auprès d’investisseurs
institutionnels, sous réserve d’une modification des termes et conditions du
contrat d’émission des OCEANES
 Il est prévu une assemblée spéciale des obligataires afin de reporter l’échéance de
remboursement des OCEANES au 1er janvier 2033 avec application d’un taux
d’intérêt annuel de 0,1%
 Afin d’encourager les porteurs d’OCEANES à participer à la recapitalisation, Bull
avait proposé une modification temporaire de la parité de conversion à raison de
10 actions pour 1 OCEANE pendant 15 jours. Au-delà, la parité revenait à 1 pour 1
 Conclusion : la restructuration des OCEANES de Bull revient à réduire le montant
de leur nominal, ce qui est pourtant interdit par les textes
18
Pas d’offre publique, la faute au ….?
19
Droit des sociétés Droit boursier
Droit des entreprises en
difficulté
En cas d’augmentation de
capital, accord de l’AG
nécessaire avec délégation
au CA possible
≠
États-Unis (Delaware).
Néanmoins Les règles de
cotation (NYSE et Nasdaq)
rendent l’accord de l’AG
nécessaire si plus de 20% du
capital ou changement de
contrôle (sauf exceptions)
Obligation de
déclencher une
offre publique en
cas de dépassement
de certains seuils
(30% ou 1% sur 12
mois en 30% et
50%), néanmoins
dérogation à portée
de main
Règles rendent le coût de
l’ouverture d’une procédure
collective trop important
pour que le dirigeant puisse
en faire une menace
crédible
Règles floues quant à la
détermination des droits
des obligataires rendant
l’évaluation de l’intérêt de
participer à une offre
publique délicate
NON NON OUI
Constat n°2
• La procédure collective ne permet pas au dirigeant de
contraindre les obligataires à accepter des concessions
significatives = à participer à l’offre publique
• La faiblesse du pouvoir de négociation du dirigeant à deux
facteurs :
▫ L’ouverture d’une procédure est un coût trop important pour
l’entreprise au regard du bénéfice escompté
▫ l’absence d’un marché du financement de la période
d’observation
20
Analyse coûts-bénéfices de l’ouverture d’une procédure
collective négative du point de vue du dirigeant
21
Entreprise protégée
contre les actions des
créanciers, dès le
lendemain de l’échec de
l’OPE
Possibilité d’imposer
une réduction
unilatérale des droits
des créanciers
Coût de l’ouverture
d’une procédure
collective inférieur au
bénéfice escompté
Condition remplie dans
le cadre de procédure de
sauvegarde avec l’arrêt
des poursuites
Condition non remplie
car le consentement des
créanciers est toujours
nécessaire pour une
conversion en actions
Condition non remplie
au regard de l’impact sur
fournisseurs et clients,
d’autant plus que le taux
de rechute est
notoirement élevé
+
–
 Faible nombre de procédures collectives sur les entreprises de taille significative
II
Concernant l’insuffisance d’un
bénéfice escompté, on regrette
l’absence d’un marché du
financement de la période
d’observation en raison de :
22
Super-privilège
des salaires
Frais de justice
Privilège de
conciliation
En LJ, créances
garantie par une
sûreté mobilière
Privilège de
procédure
Privilège de
conciliation
Privilège de
procédure
Super-privilège
des salaires
Frais de justice
Privilège de
conciliation
• la faiblesse du privilège de
procédure
• l’imprévisibilité de l’issue
de la procédure collective
qui est à la main du
débiteur en procédure de
sauvegarde => aucune
garantie d’être remboursé
Constat n°3
• La procédure collective ne permet pas au dirigeant de
convaincre les obligataires de l’intérêt de participer à l’offre
publique et donc d’accepter de faire des concessions
significatives
• Les règles de la procédure collective ne permettent pas de
déterminer le coût de l’économie réalisée en évitant la
procédure (économie à distribuer aux obligataires)
• Les règles de la procédure collective ne permettent pas une
répartition du risque prévisible, juste et transparente
23
Pour que les créanciers puissent évaluer leur intérêt à participer à l’offre, la
procédure collective doit permettre une répartition du risque :
24
PREVISIBLE
Les droits des investisseurs
doivent être fonction du niveau
de difficultés de l’entreprise et
de l’ordre de priorité =>
les investisseurs doivent être
répartis en classes pour
approuver le plan de
restructuration
JUSTE
Les obligataires doivent
avoir la certitude qu’un
ou plusieurs obligataires
ne pourront pas bloquer
indûment l’approbation
du plan (au sein d’une
même série d’obligation
ou au niveau d’une série
entière)
Condition non remplie
Pas de respect de l’ordre de
priorité => à situation différente,
pas de garantie d’être traité
différemment + pas de droit pour
les créanciers seniors de ne pas
être affectés par le plan si maintien
des droits des créanciers juniors
Condition non remplie
car tout dépend si les
obligataires dissidents
ont ou non une minorité
de blocage au sein de
l’assemblée UNIQUE des
obligataires
Condition non remplie
Les créanciers ont très peu de
pouvoir durant la procédure
collective
TRANSPARENTE
Niveau d’information des
investisseurs sur le le débiteur
suffisant + transparence des
diligences réalisées par les
différents acteurs + possibilité
de faire tierce-opposition de
toutes les décisions affectant
leurs droits
25
Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste >
détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre
un refus
• Les droits des investisseurs ne doivent pas être modifiés selon l’issue de la
procédure collective = peu importante si l’entreprise fait l’objet d’un plan de
redressement ou un plan de cession => Condition non remplie
• Les investisseurs doivent être répartis pas classes avant l’approbation du
plan => Condition non remplie
• La collectivité des créanciers doit avoir la certitude que la procédure
collective permettra à la société d’approuver un plan si certains créanciers
dissidents font INDUMENT obstacle => Condition non remplie
• Lorsqu’une majorité d’obligataires ayant les mêmes droits qu’un ou des
obligataires dissidents approuve le plan > principe du no worse off
• Lorsqu’une série entière de porteurs d’obligations, voire la totalité des
obligataires refuse le plan alors que d’autres créanciers plus senior ont
accepté > cela dépend de là « où la valeur casse »
Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste >
détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre
un refus
26
Liquidation value On going concern value
Liquidation de l’activité
(l’entreprise n’est pas
viable)
Continuation de l’activité
avec restructuration
(l’entreprise est viable)
Continuation de l’activité
sans restructuration
(fonctionnement normal)
Valeur de l’entreprise
Droits des créanciers
Valeur liquidative (Liquidation value) : possibilité de forcer le consentement d’un
obligataire dissident, à partir du moment où la majorité des deux tiers des obligataires
de la MEME série ont approuvé le plan, si pas moins bien traité qu’en cas de liquidation
= no worse off principle
Valeur d’entreprise en redressement (On going concern value) : possibilité de forcer le
consentement d’une série ENTIERE d’obligations, à partir du moment où ladite série pas
moins bien traitée si pas moins bien traité qu’en cas de cession de l’activité de l’activité
à un prix égal à la valeur d’entreprise en redressement
27
Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste >
détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre
un refus
• Le juge doit nécessairement trancher les conflits d’intérêt =>
Condition non remplie
• C’est également en fonction du critère de la valeur
d’entreprise en redressement qu’il doit être possible de forcer
le consentement des actionnaires => Condition non remplie
• À défaut le débiteur pourrait être tenté de demander des
concessions aux obligataires au-delà de ce qui est
nécessaire au regard de la situation financière du débiteur
CAS PRATIQUE – Technicolor
 Groupe spécialisé dans la fabrication de systèmes vidéo et d’image
numérique destinés aux professionnels des médias
 Endettement composé de prêts bancaires, d’une émission obligataire
senior et d’une émission de titres supers subordonnés (TSS)
 Échec de la restructuration amiable faute d’accord des créanciers
obligataires et bancaires et en raison de l’existence de nombreux CDS
 Les intérêts des détenteurs de CDS ne sont plus alignés sur l’intérêt de
l’entreprise ce qui a perturbé les négociations. Cette perturbation a été
démultipliée en raison de l’incapacité de la procédure collective de
conduire à une répartition du risque de manière prévisible, juste et
transparente
28
CAS PRATIQUE – Technicolor (2)
 2009 : ouverture d’une procédure de sauvegarde
 2010 : 1re recapitalisation suivie d’autres opérations de restructuration
 Résultat de la restructuration
 L’endettement à 1,55 Mds d’euros (contre 2,8 Mds précédemment)
 Les actionnaires de Technicolor ont réussi à conserver 16% du capital
 Conversion d’une partie significative de la dette (prêts et obligations) en actions
 Les porteurs de titres super subordonnés (TSS) ont pu maintenir leur droit au paiement
du montant nominal (cependant remboursement théorique). La somme de 25 millions
d’euros, correspondant à environ 6% du nominal des titres, leur a été proposé pour solde
de tout compte des intérêts > contentieux important
 Conclusion : Le cas Technicolor montre les difficultés à restructurer la dette
obligataire quand la procédure collective offre aux créanciers junior un pouvoir de
nuisance
29
Conséquences de la difficulté à contraindre et à convaincre
• Tentatives de contournement et effets induits :
subordination structurelle des obligataires et double LuxCo
• Abandonner la règle de l’unanimité ? Sur un plan théorique, passage à la
règle de la majorité nécessite que :
▫ 1) les créanciers sont suffisamment bien informés
▫ 2) les créanciers recherchent l’issue qui maximise la valeur de l’investissement
(=> risque de conflit d’intérêts limité)
▫ 3) les règles la masse des obligataires soit réformées (=> loi Sapin II)
30
Constat n°4
• Les règles de la procédure collective ne favorisent pas la
formation d’un marché pour l’acquisition du contrôle des
grandes entreprises en difficulté, animé par des fonds
d’investissement de taille significative
• La formation d’un tel marché se traduit par la consolidation
de la dette d’entreprises en un faible nombre de mains
• La discipline du marché peut permettre de contraindre les
dirigeants à davantage anticiper les difficultés et à davantage
restructurer le bilan de leur entreprise
31
La recapitalisation par les actionnaires, une bonne affaire
pour les créanciers ?
• A priori, intéressante,
surtout lorsque la
recapitalisation est
allouée au
remboursement des
créances, ce qui est rare
• En réalité, souvent
dangereuse car repousse
à plus tard les problèmes
32
En pratique, la
documentation
financière interdit
souvent au débiteur de
se recapitaliser sans
l’accord des créanciers
Intérêt des créanciers ? Les stratégies de loan to own –
Définition
• Il s’agit pour des investisseurs de prêter à une entreprise en
difficulté (ou de racheter ses dettes sur le marché secondaire) en
vue d’acquérir son contrôle
• Contrairement à des établissements bancaires, ces investisseurs
cherchent à gagner de l’argent en étant actionnaire d’une société
en difficulté au moment où ils investissent, ils sont dès lors incités :
▫ À désendetter autant que nécessaire l’entreprise
▫ A fermer les sites non viables
33
L’absence de loan to own en France - Les raisons
34
• Confère le pouvoir d’approuver le
plan de redressement de l’entreprise
à un nombre limité de créanciers
• Permette d’identifier quelle tranche
de dette permet cette stratégie (en
fonction de l’ordre de priorité des
paiement et la situation de
l’entreprise)
• Ne permette pas aux autres classes
de créanciers et actionnaires de
s’opposer à la procédure
Cette stratégie requiert que la procédure :
En France,
l’approbation du plan
relève des comités de
créanciers. Le
classement des
créanciers est réalisé
en fonction de la
nature de la créance
et non de leur priorité
dans l’ordre des
paiements. Chaque
comité ainsi que
l’assemblée unique
des obligataire doit
approuver le plan
L’absence de loan to own en France - Les raisons
35
• En l’état du droit, les fonds d’investissement ne peuvent
acquérir que des entreprises, soit de taille plus relative, soit
avec une structure de dette relativement simple
▫ Ex Latécoère et Apollo Management
▫ Ex Vivarte et Oaktree Capital Management
• Les créanciers ne peuvent exercer une discipline suffisante sur
les dirigeants de grandes entreprises
PARALLELE : Crise de la dette souveraine – Peut-on pallier l’absence de
procédure collective lors d’une restructuration de dette obligataire ?
La crise de la dette souveraine grecque a montré les limites d’une
approche purement consensuelle du règlement des difficulté. La
négociation a aboutit à des impasses
La Grèce a relancé le débat sur l’intérêt de créer un tribunal international
compétent
Le FMI a souhaité réduire les situations de hold out et la modification des
clauses collectives dans les contrats obligataires afin de contraindre :
▫ les créanciers minoritaires au sein d’une même série d’obligation
▫ une série entière d’obligations si la majorité des créanciers en valeur et l’État
concerné y consentent
 Limites de cette approche compte-tenu du caractère incomplet des
contrats
36
PARALLELE : Crise de la dette LBO
 Les négociations se caractérisent par 1) la présence d’un actionnaire majoritaire, le
fonds de private equity, 2) une plus faible dispersion de la dette (en principe) que
dans les sociétés cotées de taille significative
 Il est ainsi plus facile de coordonner les créanciers en dépit des lacunes du droit
des entreprises en difficulté
 Toutefois, on observe des difficultés à aboutir à un accord pérenne au cours de la
phase amiable et des difficultés à aboutir à un accord permettant un
désendettement suffisant pour l’entreprise compte tenu de l’obligation de
composer avec l’ensemble des créanciers et des actionnaires
 Taux de « rechute » élevé en mandat ad hoc et en conciliation (Vivarte)
37
Conclusion intermédiaire
• L’incapacité du dirigeant à restructurer suffisamment sa dette
obligataire a trois types de conséquences :
 Une plus grande propension des entreprises à céder leurs actifs au rabais avec
un risque de démantèlement (Belvédère, Alstom)
 Une plus grande probabilité de recourir à des augmentations de capital « de la
dernière chance » très risquées pour les actionnaires (Solocal, CGG, Alcatel)
 Un plus grand risque d’adossement auprès d’un tiers, faute de mieux (Alcatel,
Rhodia)
38
Constat n°5
• En l’absence de restructuration profonde du bilan, le dirigeant
est incité à recourir à des augmentations de capital de la
dernière chance même en l’absence de concessions
significatives de la part des créanciers
• En théorie, les actionnaires devraient être peu enclins à y
participer car il s’opère alors un transfert de richesse au profit
des créanciers : théorie du debt overhang
• En France (mais aussi en Europe) la réalité contredit cette
théorie
39
40
Principe Raisons En pratique
Réticence des
actionnaires à réduire
le niveau
d’endettement d’une
entreprise déjà
fortement endettée
L’actionnaire ne
souscrit à une
augmentation de
capital que si elle crée
suffisamment de valeur
pour lui, peu importe
qu’elle créé déjà de la
valeur pour l’entreprise
L’actionnaire est placé dans une
situation de conflit d’intérêts
par rapport à l’entreprise car la
réduction consentie profite
avant tout aux créanciers sauf
en cas de concessions
suffisantes
Ce transfert de valeur est acté
par le marché. Le cours de
l’action diminue toujours à
l’annonce d’une opération de
recapitalisation
Relation positive entre le
niveau des difficultés et
la survenance d’une
augmentation de capital,
et ce, même si pas de
concessions
significatives de la part
des créanciers
Dans certains cas, le
produit de
l’augmentation de
capital est entièrement
alloué au
remboursement de la
dette !
Théorie du debt overhang
CAS PRATIQUE – Solocal – restructuration de 2014
 Société mère des Pages jaunes ayant pour activité la recherche
d’informations, la mise en relation et la publicité locale
 2011 : 1re restructuration avec rééchelonnement de la dette et émission
obligataire de 350 millions d’euros pour refinancer la dette
 2013 : 2e restructuration dans le cadre d’un mandat ad hoc en vue
d’obtenir une autre rééchelonnement de la dette bancaire
 2014 : 3e restructuration conduisant à l’approbation d’un plan de
sauvegarde accélérée aux termes duquel est prévu :
 Une augmentation de capital de 440 millions d’euros au prix de 0,5 centimes soit
l’équivalent de 15 euros après le regroupement d’actions
 91% du produit de l’augmentation de capital alloué au remboursement de la dette
 Opération sursouscrite à hauteur de 254,83%
41
CAS PRATIQUE – Solocal (2)
 2015 : nouvelle augmentation de capital
réservée aux salariés et anciens salariés au
prix de 16,80 euros par action
 2016 : ouverture d’un mandat ad hoc pour
qui a conduit à :
 Une augmentation de capital de 400 millions d’euros
entièrement allouée au remboursement de la dette.
Prix de souscription : 1 euro
 La conversion d’une partie de la dette en actions à
des termes moins avantageux que ceux de
l’augmentation de capital en numéraire. Cette fois-ci
les créanciers acceptent de faire des concessions
significatives
 Conclusion : la restructuration de Solocal en
2014 illustre le caractère irrationnel de la
décision des actionnaires
42
CAS PRATIQUE – CGG
 Groupe spécialisé dans l’exploration du sous-sol et les géosciences dans
l’énergie (pétrole et gaz principalement)
 Fin 2015 : endettement de 2,8 Mds d’euros et impossibilité de respecter
les covenants financiers
 Début 2016 : augmentation de capital de 350 millions d’euros avec
maintient des DPS pour financer un plan de transformation de 200
millions d’euros et 150 millions pour financer le fonds de roulement.
L’opération était fortement dilutive. Elle a été intégralement souscrite
 Novembre 2016 : il est envisagé une nouvelle restructuration dans le
cadre d’un mandat ad hoc où il est prévu d’évincer les actionnaires et de
convertir la dette en action
43
CAS PRATIQUE – Alcatel
 Leader technologique des années 1980 dans la téléphonie fixe et mobile,
Alcatel a mal géré le virage Internet et la mondialisation et ses difficultés
se sont aggravées avec la fusion avec Lucent, entreprise aussi en difficulté
 Historiquement, l’entreprise a toujours été sous capitalisée. Elle est issue
de la Compagnie générale des eaux (CGE), entreprise privée sans capitaux,
encastrée dans l’État et elle s’est toujours financée par l’endettement
 2013 : Alcatel réussit une recapitalisation de la dernière chance d’un
montant de 995 millions d’euros, un programme obligataire high yield de
750 millions d’euros et un prêt syndiqué de 500 millions d’euros
 À aucun moment, Alcatel n’a été en mesure de réduire significativement
sa dette et, au bord de la faillite en 2015, elle s’est laissée absorber par
Nokia
44
Constat n°6
• L’écart entre la théorie du debt overhang et la pratique
s’explique d’abord par la difficulté des actionnaires, en
situation d’asymétrie d’information, à évaluer leur intérêt
patrimonial
• L’écart s’explique également compte tenu de l’existence de
biais cognitifs importants au niveau des actionnaires
45
L’actionnaire dispose rarement d’un niveau
d’information suffisant
• Asymétrie d’information entre le dirigeant et les actionnaires => règles de
gouvernance d’entreprise incitant le dirigeant à transmettre l’information.
Parfois le dirigeant ne dispose pas lui-même de l’information (ex : chances
de succès d’un plan de redressement)
• Nécessité de renforcer les obligations à la charge de l’entreprise et du
garant de l’émission d’actions nouvelles
• Difficultés de valorisation des sociétés en difficulté (ex : DCF non utilisable
lorsque les flux de trésorerie de l’entreprise sont négatifs, ce qui est
souvent le cas dans les entreprises en difficulté)
• Nécessité d’encourager les PIPE (Private Investment in Public Equity) dans
les entreprises en difficulté
46
L’actionnaire est sujet à des biais cognitifs et risque de
prendre sa décision au regard de :
• La différence entre le cours de bourse
au moment de l’annonce de
l’opération et le prix de souscription,
or le cours de bourse est un mauvais
référentiel, car sociétés est en
difficulté
• La différence entre le cours historique
de l’action au moment où il a acquis
ses actions et le prix de souscription,
volonté de vouloir « se refaire »
47
Constat n°7
• L’écart entre la théorie du
debt overhang et la pratique
s’explique également par les
conflits d’intérêts et les biais
cognitifs des dirigeants et,
plus généralement par
l’insuffisance des règles
française en matière de
gouvernance d’entreprise
48
Conflits d’intérêts des
dirigeants
• Excès de confiance
• Biais d’attribution : tendance
naturelle de l’individu à sous-
évaluer le poids de facteurs
externes dans l’analyse des
facteurs de sa réussite
professionnelle
49
• Perte de leur emploi
• Diminution de leur
rémunération s’il retrouve un
nouvel emploi
Biais cognitifs des dirigeants
Nécessité de mettre en place des contre-pouvoirs
CAS PRATIQUE – Eurotunnel
 Groupe dédié pour porter la construction du tunnel entre la France et le
Royaume-Uni
 1995 : suspension du paiement d’une dette s’élevant à 8,56 milliards de
livres sterling en raison de difficultés liées aux erreurs de structuration du
financement de projet insuffisamment pourvu en capital et dépourvu de
sponsor (capital composé exclusivement d’actionnaires minoritaires)
 Cette répartition du capital a donné une large latitude à la direction
d’Eurotunnel qui a conclu des contrats à des conditions beaucoup trop
onéreuses
 Pendant plusieurs années, le groupe a été contraint de se restructurer.
Cela est passé notamment par des augmentations de capital de la
dernière chance, puis par l’ouverture d’une procédure de sauvegarde en
2016
50
CAS PRATIQUE – Eurotunnel (2)
 En 2006, la direction est de nouveau confronté à l’impossibilité de faire
face à ses dettes et demande un waiver avant l’expiration duquel la
direction s’empresse d’ouvrir une procédure de sauvegarde, sans accord
préalable des créanciers
 Dans le cas d’Eurotunnel, la dette était composée essentiellement
d’instruments financiers de marché qui n’étaient pas détenus par des
établissements de crédit, ce qui rendait difficile une négociation amiable
51
Les lacunes du droit français en matière de gouvernance d’entreprise
52
Le dirigeant doit agir
dans l’intérêt social et
non dans l’intérêts des
actionnaires
Insuffisance des sanctions de
violations des règles de marché faute
d’envisager le droit pénal comme
outil d’amélioration de l’efficacité des
marchés
Il n’existe pas d’obligations
fiduciaires (fiduciary duties) à l’égard
des actionnaires et des créanciers
qui soit sanctionnées, comme aux
États-Unis, mais aussi au Royaume-
Unis et en Allemagne
Contours restreints de l’action
ut singuli et de l’action en
insuffisance d’actif
Absence de class action
Manque de contre-pouvoirs internes Manque de contre-pouvoirs externes
Les lacunes du droit français en matière de gouvernance d’entreprise
53
La jurisprudence en matière
de responsabilité pour
gestion de fait (immixtion) est
extensive
l l
Les créanciers craignent de
s’immiscer dans la gestion
alors que leurs intérêts sont
alignés à ceux de l’entreprise
Les créanciers ne peuvent pas
prendre le contrôle de la
société sans le consentement
du dirigeant tant que la
société n’est pas en état de
cessation des paiements
l l
Les créanciers ne peuvent pas
exercer de pouvoir en amont
Défauts du droit des entreprises en
difficulté = pas de discipline imposée par
le marché
Constat n°8
• L’écart entre la théorie du debt overhang et la pratique
s’explique enfin par la participation de l’État aux opérations
de recapitalisation en l’absence de marché pour le contrôle
des entreprises en grande difficulté
• L’État est amené souvent à endosser le rôle « d’actionnaire en
dernier ressort »
• Cette participation est susceptible d’encourager à tort les
autres actionnaires à participer à l’opération
54
• L’annonce de la participation d’un actionnaire de référence
est importante pour le succès d’une augmentation de capital
• L’actionnaire de référence n’a pas d’obligation à recapitaliser
l’obligation, nuance :
▫ Lorsque l’actionnaire fait abstraction de cette situation
pour préserver sa réputation (ex : fonds de private equity
qui se trompe de cible et politique de distribution agressive
de dividende)
▫ Le défaut de surveillance des dirigeants est insuffisant pour
mettre à la charge des actionnaires l’obligation de
recapitaliser l’entreprise
55
L’intervention de l’État dictée par une politique
volontariste
• L’État n’est pas un actionnaire comme les autres. Il est soumis à des
conflits d’objectifs qui le poussent à endosser le rôle d’actionnaire en
dernier ressort, même si simple erreur de défaut de surveillance :
56
Lorsqu’il est actionnaire :
Il est politiquement très difficile
pour l’État de s’abstenir de prêter
assistance, qu’il soit minoritaire
(CGG, Vallourec) ou majoritaire (
Areva)
Lorsqu’il n’est pas actionnaire :
l’État est quand même prompt à
réaliser des bail-out (Alstom) en
raison d’une politique
particulièrement volontariste.
Problème : pas de doctrine
publique quant aux modalités de
son intervention (ex : n’intervenir
que lorsque l’échec est imputable à
des circonstances exceptionnelles)
CAS PRATIQUE – PSA
 En 2008, les difficultés de PSA s’aggravent entraînant la dégradation de sa
note ainsi que celle de sa banque captive PSA Finance par les agences de
notation.
 Cette situation fragilise PSA finance dont le coût du crédit se renchérit
significativement-
 La Commission européenne autorise l’Etat français à garantir les émissions
obligataires émises par PSA finance afin de pouvoir assurer la poursuite de
ses activités et faciliter le refinancement de la dette du groupe.
 La Commission européenne oblige le groupe PSA à se restructurer en
profondeur – l’entrée au capital de l’Etat français est conditionnée à
l’arrivée au capital d’un tiers.
57
CAS PRATIQUE – PSA (2)
• 2014 : le groupe chinois Dongfeng et l’État français deviennent
actionnaires (14% chacun du capital) dans le cadre d’une augmentation de
capital de 3 Mds d’euros. Dilution de la famille Peugeot qui passe à 14%
• 2017 : PSA fait état d’un redressement spectaculaire et annonce le rachat
à GM d’Opel et Vauxhall pour un montant de 1,3 Mds, branche
européenne en déficit du groupe. L’État transfère à Bpifrance ses parts
dans PSA pour 1,92 milliards d’euros (PV de 1,12 milliard)
• Conclusion : l’intervention en amont des difficultés de l’Etat, en raison de
la fragilisation soudaine de PSA Finance, a permis de réduire le risque que
l’intervention en fonds propres de l’Etat soit coûteuse pour les finances
publiques
58
CAS PRATIQUE – Alstom
 Issue de la scission Alcatel-Alstom (1989), Alstom fut sous-capitalisée au
profit d’Alcatel et une acquisition hasardeuse a entraîné accident
industriel, à la suite de la livraison de turbines défectueuses
 2003 : pertes de 1,4 Mds et niveau d’endettement à 5,3 Mds d’euros (sans
recours aux obligations) mais les établissements bancaires refusent de
convertir leurs créances en actions
 En l’absence de marché privé pour le contrôle des grandes entreprises en
difficulté, Alstom a dû se tourner vers l’État qui obtient l’autorisation de la
Commission européenne pour verser 720 millions d’euros contre 30% du
capital à la condition de céder sa participation dans un délai de 4 ans
 Problème, la Commission européenne demande des cessions
douloureuses, ces cessions n’auraient pas eu lieu si investisseur privé
59
CAS PRATIQUE – Alstom
 L’Etat Français parvient à céder sa participation à Bouygues et
à réaliser une plus value de 2 milliards.
 Conclusion : intervention en amont de l’Etat à un moment où
l’appareil industriel était encore concurrentiel en raison de
l’accident des turbines. Le risque pour les finances publiques
a été réduit
 Aujourd’hui Alstom est à nouveau dans une situation difficile
ce qui a conduit à son démantèlement et ne peut être repris
par un fonds d’investissement
60
Les modalités de l’intervention de l’État
• L’État ne cherche pas à limiter les coûts de son intervention pour le
contribuable. Rarement, l’État demande aux créanciers d’absorber
les pertes préalablement à son intervention
• Pour contourner les difficultés du droit des entreprises en difficulté,
l’État pourrait avoir recours à une structure de defeasance (ou
désendettement de fait) sur le modèle good bank / bad bank
afin de forcer les créanciers à absorber les pertes
• C’est pas le cas en pratique, même en l’absence de risque
systémique (Areva)
• L’État se rend coupable d’envoyer un signal faussement positif aux
actionnaires minoritaires
61
CAS PRATIQUE – Areva
 Groupe du secteur de l’énergie qui fournit des produits et services sur
l’ensemble du cycle du nucléaire
 Détenu à hauteur de 86,82% par l’État français (directement ou à travers
la BPI et le Commissariat de l’énergie atomique)
 2015 : pertes accumulées de 9 Mds d’euros sur 4 ans que l’État n’a pu
empêcher
 2016 : plan de restructuration qui inclut notamment deux injections de
capital (4,5 milliards) par l’État français dans la maison mère (Areva) et
dans une entité constituée pour accueillir les activités combustibles
(Nouvel Areva).
62
CAS PRATIQUE – Areva (2)
 La Commission européenne a
estimé que ces injections de
capital constituaient une aide
d’État compatible avec le marché
intérieur, mais exige des cessions
 Pas de restructuration de la dette
préalablement à l’injection de
capital
63
 Conclusion : sans y être tenu, l’État apporte son soutien à des entreprises
de taille significative dans les conditions qui ne lui sont pas forcément
favorables. Ce faisant, l’État envoie le message d’une garantie implicite
pour les établissements too big to fail
L’État français – problématiques
64
Pour respecter la règlementation
européenne sur les aides d’État, l’État
conditionne sa participation à celle de
partenaires privés
Sauf que dans la plupart des cas ces
partenaires privés sont des industriels
concurrents à l’entreprise en difficulté
(ex : PSA / Dongfeng, Valourrec /
NSSMC) => risque de « tunneling »,
extraction de valeur importante au
détriment des actionnaires
minoritaires, pour compenser la perte
financière du partenaire
PARALLELE AVEC LA CRISE BANCAIRE - Les contingent
convertibles, une solution au problème ?
65
⎕Les « cocos » sont des valeurs mobilières hybrides qui
absorbent les pertes – modalités de la conversion de la dette
en actions sont fixées dans le contrat d’émission. L’élément
déclencheur est souvent la violation d’un ratio de fonds
propres fixé par la réglementation prudentielle
⎕Initialement créés dans le secteur financier, les cocos
pourraient également permettre de contourner les problèmes
posés par le droit des entreprises en difficulté. Reste à fixer le
critère permettant la conversion automatique des
obligations…
Constat n°9
• Le Chapter 11 américain permet de forcer les
obligataires à faire des concessions significatives =>
nombre important de succès d’offres publiques
d’échange d’obligations en actions
• Un débat existe néanmoins sur l’intérêt de
réintroduire les clauses collectives dans les contrats
d’émission obligataires
66
Comment le droit américain permet de contraindre et
de convaincre les créanciers ?
• Le Chapter 11 autorise le redressement de la société à la
condition qu’il génère un surcroît de valeur par rapport à
l’arrêt d’activité
• Les règles d’approbation du plan reposent sur l’idée que le
contrôle de l’entreprise doit revenir aux créanciers dont les
intérêts sont les plus alignés sur ceux de l’entreprise (les
détenteurs de la fulcrum security)
67
Comment le droit américain permet de contraindre les
créanciers ?
• Le juge ne décide pas du sort de l’entreprise mais apprécie le
caractère équitable du traitement des investisseurs par
rapport à :
▫ La valeur liquidative lorsqu’il s’agit de forcer le consentement
d’une minorité de créanciers au sein d’une classe de créanciers
▫ La valeur d’entreprise en redressement lorsqu’il s’agit de forcer
le consentement d’une classe entière de créanciers
68
Avantages et inconvénients du système américain
Avantages
• Évite une destruction de valeur
inutile au niveau de l’entreprise en
cas de réalisation de l’ensemble
des actifs et en cas de
redressement de l’entreprise
• Favorise le regroupement de la
dette entre les mains de fonds
d’investissement qui valorisent le
plus l’entreprise. Cela :
▫ modifie ex ante la négociation
▫ facilite la restructuration
▫ améliore la gouvernance
d’entreprise
69
Inconvénients
• Lourdeur et coût de la période
d’observation. L’absence
d’administrateur nécessite le
passage par le juge pour chaque
acte
• Important contentieux sur la
valeur de l’entreprise et conflits
pour le contrôle de la société
• Cession trop vite de l’ensemble des
actifs de la société au profit des
créanciers seniors pour préserver
la valeur des actifs
Impact du système américain
70
Sur les
augmentation de
capital en
numéraire
L’augmentation de capital est réalisée, au besoin,
APRES une restructuration en profondeur du bilan
Sur les modalités
d’intervention du
Trésor américain
Le Trésor américain est très peu intervenu pour
prêter assistance sauf au cœur de la crise financière
Le Trésor est intervenu en limitant le coût de
l’opération pour les finances publiques
CAS PRATIQUE – General Motors
 Le groupe est spécialisé dans la production d’automobiles
 Lors de la crise financière, le groupe s’est retrouvé en difficulté du fait de
la fermeture du marché du crédit. Le Trésor américain est intervenu après
que les créanciers et actionnaires ont été invités à apurer les pertes
 Le Trésor a d’abord accordé sous forme de prêts assortis de garanties 20
Mds d’euros, puis 30 Mds d’euros postérieurement à l’ouverture d’une
procédure collective garantis par le privilège accordé aux Debtor In
Possession Financing (DIP financing)
71
CAS PRATIQUE – General Motors (2)
 Le Trésor américain a ensuite pris, aux côtés de l’État canadien, le contrôle
de New GM, nouvelle entité réceptacle des actifs viables de GM, laissant
les « mauvais » actifs dans l’ancien GM devant être liquidé
 Le Trésor a profité de l’introduction en bourse de New GM en 2010 pour
céder sa participation, réalisant une moins value de 9 Mds d’euros dans
l’opération
 Conclusion : Le Trésor n’a jamais poursuivi l’objectif de prendre le contrôle
du groupe et a toujours eu le souci de minimiser le coût de son
intervention pour les finances publiques
72
73
PARTIE II
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
• Des conséquences, sur un plan micro-économique, des
lacunes du droit, encore méconnues
• Des conséquences, sur un plan macro-économique, des
lacunes du droit, encore insuffisamment analysées, à noter le
taux de rechute à 5 ans :
▫ En France, 85% pour les entreprises en redressement, 50% pour
les entreprises en sauvegarde => cela signifie que 1) les tribunaux
forcent le redressement malgré l’absence de viabilité de
l’entreprise ou 2) les tribunaux laissent émerger de la procédure
collectives des entreprises trop endettées
Conclusion
74
• 2e obstacle : importance de la
culture et de l’histoire d’un
pays. L’État subit la
dépendance au sentier
(« path dependance »)
▫ Prise de conscience de la
nécessité de réformer le droit
▫ Dernièrement, ordonnances de
2014 et loi Macron de 2015 ont
opéré un retour au
consensualisme
La lente évolution du droit des entreprises en difficulté
– obstacles à des réformes ambitieuses et rapides :
75
• 1er obstacle : le droit des
entreprises en difficulté est à
l’embranchement d’autres
droits
 Penser que le règlement à l’amiable est toujours préférable à l’ouverture
d’une procédure collective (ce qui n’est pas le cas lorsque l’entreprise a de
nombreux créanciers individuels non coordonnés)
 Multiplier les exemptions à la règle de l’arrêt des poursuites (ex : fiducie)
 Multiplier les dérogations au caractère collectif de la procédure
conduisant à violer le consentement des créanciers sans garde-fous
suffisants (SA, SFA)
Les écueils de la stratégie des petits pas du législateur
sont nombreux
76
 Introduire des garde-fous, conférant la possibilité à une minorité de
créanciers de bloquer injustement l’adoption du plan, et ce, en violation
de l’ordre de priorité (ex : remise en cause du principe 1euro/1vote, sans
transparence)
 Introduire un dispositif pour mettre fin aux blocages résultant des
actionnaires pouvant voter la réduction de la dette en violation de l’ordre
de priorité mais pb de lisibilité
 Prendre des mesures permettant partiellement de rétablir l’objectif de
maximisation de la valeur d’usage des actifs mais en dehors du contrôle
du juge (ex : pre-pack cessions)
Les écueils de la stratégie des petits pas du législateur
sont nombreux
77
• La Commission européenne
fait valoir deux enjeux :
▫ Le traitement des créances douteuses
dans les bilans bancaires
▫ Le développement des marchés
obligataires dans le cadre de la CMU
▫ D’autres enjeux : prochaine crise
obligataire, changement
d’environnement (révolution
industrielle, révolution énergétique,
dématérialisation de l’économie)
Les avancées du droit européen
78
• La proposition de directive du 22 novembre 2016 montre le
chemin pour améliorer le traitement en amont des
difficultés des grandes entreprises
• La France en serait la première bénéficiaire en raison :
▫ de l’absence TOTALE de répartition des risques de manière prévisible,
transparente et juste
▫ de la taille de son économie et la profondeur de ses marchés financiers
▫ d’un grand nombre d’entreprises significatives
Les avancées du droit européen
79
Recommandation n°1
• Rendre la répartition des risques prévisible, juste et
transparente lorsque la société entre en procédure
collective
• Il est important de comprendre que l’efficacité du
traitement en amont des difficultés dépend de l’efficacité
de la procédure collective
80
Pour cela, s’appuyer sur les proposition de la directive :
81
Respect de l’ordre de
priorité des paiements
(absolute priority rule)
Principe du
consensualisme
(accord d’au moins une
classe de créanciers sur
le plan)
Principe de no worse
off ou best interest test
Possibilité d’évincer les
actionnaires et les
classes de créanciers
n’ayant droit à rien pour
la going concern value
Traitement juste et
équitable des
investisseurs
Recommandation n°2
• Autoriser les aménagements contractuels aux règles de la
masse des obligataires afin d’autoriser, hors procédure
collective ou hybride la conversion de dette obligataire soumise
au droit français en actions sur décision des 2/3 obligataires
d’une seule et même série d’obligations
82
Recommandation n°3 et 4
Pour améliorer la transparence de l’information :
83
• Exiger des émetteurs classés valeur spéculative, qui décident
d’émettre des actions nouvelles d’obtenir un certificat de
solvabilité établi par un expert indépendant permettant de
mettre à la disposition du marché les prévisions, à l’appui
desquelles, l’entreprise est confiante dans le succès de sa
recapitalisation
• Renforcer le régime de responsabilité des établissements
financiers qui garantissent des émissions d’actions réalisées
par des émetteurs classés valeur spéculative, sur le modèle
de la règle du « 10b5 » américaine
Recommandation n°5 et n°6
• Forcer les garants d’émissions nouvelles d’actions à divulguer
l’ensemble de leurs positions : actions mais aussi dérivés
• Encourager une modification de la doctrine AMF en matière
d’égalité de traitement des actionnaires afin d’encourager les
investissements privés dans les sociétés cotées (PIPEs) en
difficulté afin de laisser aux professionnels du retournement
ce type de paris financiers risqués
84
Pour plus tard
• D’autres recommandations sont nécessaires afin d’améliorer
les règles de gouvernance et feront l’objet d’une étude à part
• Une amélioration des conditions de la recherche multi-
pluridisciplinaire en France est également clé pour
d’améliorer l’efficacité du cadre juridique
85
Références
 Ph. Jostarndt, « Equity Offerings in Financial Distress - Evidence from
German Restructurings », 2009
 N. Keifer, « Essays in corporate finance », 2003
 J. Franks, S. Sanzhar, « Evidence on Debt Overhang from Distressed Equity
Issues », 2006
 J. Campbell, J. Hilscher et J. Szillagyi, « In Search of Distress Risk », 2008
 W. Adam, A. Levitin, « The New Bond Workouts », 2017
 Wachtell, Lipton, Rosen & Kate, « Distressed Mergers and Acquisitions »,
2013
86
87
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Sophie VERMEILLE
Présidente
Droit & Croissance
Rules for Growth
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V2 D&C - restructuration obligataire et recapitalisation

  • 1. RESTRUCTURATION DE DETTE OBLIGATAIRE RECAPITALISATION DE LA DERNIERE CHANCE ET INTERVENTIONNISME ETATIQUE Analyse des conséquences de l’inefficacité du droit français sur la restructuration des entreprises de taille significative Sophie Vermeille Avocat en Corporate et Restructuring Chercheur au Laboratoire d’économie du droit de Paris II Présidente de Droit & Croissance / Rules for Growth V2 – 23/04/2017 – Work in Progress
  • 2. Introduction Contextualisation – Études Empiriques Page 3 Partie I Neuf constats Page 16 Cas Pratique Bull, Technicolor, Alcatel, CGG, Solocal, Alstom, Areva et General Motors Partie II Conclusion et cinq recommandations Page 62 2 SOMMAIRE
  • 4. Introduction : désaffection des grandes entreprises en difficulté pour la procédure collective • Sur les cinq dernières années, on observe un certain nombre de restructurations / recapitalisations de sociétés cotées (dont plusieurs rechutes) • Précédemment, on notera certaines restructurations / recapitalisations emblématiques (Eurotunnel, Bull, Alstom, Rhodia, Technicolor, déjà France Telecom et Air France) • Deux seules grandes entreprises ont fait l’objet d’une procédure collective (Technicolor et Eurotunnel) 4 Dexia CGG Sequana Alcatel, France Telecom PSA, Solocal Gascogne Sequana CGG, Vallourec, Solocal CGG EDF, Air France, Areva 2012 2013 20162014 2017
  • 5. Introduction : à la place, un grand nombre d’opérations de recapitalisation « de la dernière chance » dans les entreprises cotées (distressed equity offering) • Augmentation de capital essentielle à la survie d’une entreprise et dont le produit à vocation à : 1) apurer le passif antérieur et / ou 2) à financer son plan de restructuration et/ou 3) à réaliser des investissements indispensables 5 • Pari financier risqué pour les actionnaires qui doivent se convaincre que l’opération de recapitalisation va créer suffisamment de valeur nette positive pour eux-mêmes • À défaut, transfert de richesse des actionnaires au profit des créanciers • Pari risqué également pour les créanciers si la recapitalisation sert à financer des projets d’investissement qui ne créent pas de valeur et font perdre du temps
  • 6. Introduction : des études empiriques mettent en évidence le pari risqué des actionnaires • Pourtant, il existe une corrélation positive entre le niveau des difficultés d’entreprises et l’organisation d’opérations de recapitalisation (Ph. Jostarndt, 2009) • Pourtant, il y a peu de concessions significatives de la part des créanciers (26%- 30%), (N. Keifer, 2003 et J. Franks, S. Sanzhar, 2006) 6 • Chute importante du cours de bourse à la suite de ces recapitalisations (10%) (J. Franks, S Sanzhar, 2006) • Transfert de richesse entre anciens actionnaires et nouveaux actionnaires ? Pas vraiment, le rendement moyen de l’action des entreprises en difficulté est inférieur au rendement moyen de l’action des entreprises en bonne santé dans le même secteur. Phénomène de « Distressed puzzle » (J. Campbell, J. Hilscher et J. Szillagyi 2008)
  • 7. Introduction : constats et problématiques • En France, on observe un grand nombre de recapitalisations « de la dernière chance » sans réelle, voire aucune concession de la part des créanciers (Eurotunnel dans les premières années, Alcatel en 2013, Rhodia en 2008 et 2010, CGG en 2016, Solocal en 2014, Vallourec en 2016 etc.) • Transferts de richesse importants des actionnaires au profit des créanciers, ce qui est problématique car l’État intervient souvent dans ce type d’opérations  Pourquoi alors les actionnaires participent-ils à de telles opérations ?  Pourquoi les entreprises n’arrivent-elles n’arrivent-elles pas à obtenir davantage de concessions significatives de la part des créanciers pour protéger leurs actionnaires ? 7
  • 8. Introduction : constats et problématiques  Pourquoi le dirigeant propose-t-il à ses actionnaires de réaliser de tels paris financiers ?  Quel lien avec le fait que les entreprises françaises de taille significative n’ont pas recours à la procédure collective, même en grande difficulté ?  Quelle explication à l’intervention fréquente de l’État dans les grandes entreprises en difficulté?  Pourquoi l’État ne parvient-il pas à réduire son risque lorsqu’il endosse le rôle « d’actionnaire en dernier ressort ? » 8
  • 9. Introduction : à démontrer, l’existence d’un lien entre les lacunes du droit français et… : • La difficulté des grandes entreprises ayant fait appel aux marchés obligataires à restructurer en profondeur leur bilan, faute de pouvoir rendre crédible la menace de l’ouverture d’une procédure collective • La protection insuffisante des actionnaires minoritaires dans le cadre des recapitalisations de la « dernière chance » • La trop grande tentation des dirigeants de solliciter leurs actionnaires minoritaires à prendre des paris risqués • L’intervention fréquente de l’État français dans des opérations de recapitalisation de la « dernière chance » • Les modalités de l’intervention de l’État français, coûteuses pour les finances publiques 9
  • 10. 1er Constat Le pouvoir de négociation du dirigeant face aux obligataires dépend de la crédibilité de la menace d’une procédure collective Slide 15 2ème Constat La procédure collective ne permet pas au dirigeant de contraindre les obligataires à participer à l’offre publique Slide 20 3ème Constat La procédure collective ne permet pas au dirigeant de convaincre les obligataires de participer à l’offre publique Slide 23 4e Constat Les règles de la procédure collective ne favorisent pas la formation d’un marché pour le contrôle des grandes entreprise en difficulté – les dirigeants ne sont pas contraints pas leurs propres créanciers de restructurer le bilan en profondeur Slide 34 5ème Constat Faute de restructuration en profondeur du bilan, le dirigeant est incité à recourir à des augmentations de capital « de la dernière chance » risquées pour les actionnaires ; en principe ces derniers devraient refuser Slide 39 10 Introduction : démonstration en huit constats
  • 11. 6ème Constat Toutefois, grande difficulté des actionnaires, en situation d’asymétrie d’information, à évaluer leur intérêt patrimonial et à reconnaître qu’ils sont sujets à des biais cognitifs Slide 45 7ème Constat De même, existence d’un certain nombre conflits d’intérêts et de biais cognitifs au niveau des dirigeants Slide 48 8ème Constat Enfin, la forte participation de l’État, en l’absence de marché pour le contrôle des entreprises en grande difficulté, envoie un signal trompeur pour les actionnaires minoritaires Slide 54 9ème Constat Le Chapter 11 américain permet de forcer les obligataires à faire des concessions significatives d’où un nombre important d’offres publiques d’échange d’obligations en actions ; le Trésor américain n’a pas à endosser le rôle d’actionnaire en dernier ressort Slide 64 11 Introduction : démonstration en huit constats
  • 12. Analyse micro-économique Analyse macro-économique • Difficultés financières, opérationnelles ou les deux • Dans un environnement ultra- concurrentiel, lorsque les difficultés opérationnelles ne sont pas que temporaires, il faut plus qu’un simple rééchelonnement pour garantir la pérennité de l’entreprise => la réduction rapide du niveau d’endettement des entreprises est un impératif • Fort endettement des entreprises compte tenu de la bulle de crédit d’avant 2008 et de la bulle obligataire consécutive à la politique monétaire accommodante de la BCE • Longue période de récession / stagnation en Europe • Autres grands bouleversements à l’échelle mondiale (énergétique, numérique) 12 Préambule : il n’a jamais été autant nécessaire de réduire la dette  De plus en plus d’entreprises de taille significative auront besoin de restructurer en profondeur leur bilan
  • 13. Préambule : modes de restructuration du bilan 13 PassifActif PassifActif PassifActif Cession d’actifs et allocation du produit au remboursement de la dette mais risque de cession au rabais, et si autorisation des créanciers Rachat par l’entreprise sur les marchés de ses obligations avec une décote, mais pas toujours facile et accord nécessaire des créanciers Annulation de la dette consentie par les créanciers, le plus souvent en contrepartie de l’émission d’actions
  • 15. Constat n°1 • Le pouvoir de négociation du dirigeant dépend de la crédibilité de la menace d’une procédure collective • L’absence en France d’offre publique d’échange d’obligations en actions est révélatrice des lacunes du droit des procédures collectives • Le dirigeant se limite à proposer une restructuration limitée de sa dette obligataire ; il sait qu’il n’a pas les moyens de convaincre et contraindre les obligataires à faire des concessions plus significatives 15
  • 16. Les difficultés de la restructuration de la dette obligataire hors procédure collective • Hors procédure collective, l’accord de chaque créancier est nécessaire si les obligations sont soumis au droit français (ou au droit de l’État de NY) ▫ La masse des obligataires n’a pas compétence ni pour réduire le montant nominal des obligations, ni pour les convertir en actions ▫ Interdiction des clauses collectives • Lorsque le nombre d’obligataires est important, l’entreprise n’a d’autre choix que celui de faire une offre publique d’échange d’obligations en actions ▫ Pour être attractive, l’offre doit être plus intéressante que le maintien du statu quo ▫ Ceux qui ne souscrivent pas à l’offre devraient se retrouver titulaires d’un titre moins liquide, parfois dépourvu de ses covenants et garanties avec une date de maturité reportée 16
  • 17. • Deux risques de rejet de l’offre publique (hold out) : ▫ Refus d’une minorité au sein même série d’obligations ▫ Refus d’une série entière d’obligation • Risque de rejet élevé car les autres créanciers (les établissements de crédit) mis dans la situation de devoir accepter seuls les concessions significatives nécessaires au redressement de l’entreprise • Constat : ABSENCE d’offre publique d’échange de titres obligataires en actions en France, à comparer avec la situation aux Etats-Unis • Détournement des règles de masse afin de permettre la restructuration en profondeur de la dette obligataire à la majorité qualifiée (Bull) 17 Les difficultés de la restructuration de la dette obligataire hors procédure collective
  • 18. Préambule : CAS PRATIQUE – Bull  Groupe spécialisé dans les technologies informatiques  2004 : Bull se recapitalise à hauteur de 44 millions d’euros auprès d’investisseurs institutionnels, sous réserve d’une modification des termes et conditions du contrat d’émission des OCEANES  Il est prévu une assemblée spéciale des obligataires afin de reporter l’échéance de remboursement des OCEANES au 1er janvier 2033 avec application d’un taux d’intérêt annuel de 0,1%  Afin d’encourager les porteurs d’OCEANES à participer à la recapitalisation, Bull avait proposé une modification temporaire de la parité de conversion à raison de 10 actions pour 1 OCEANE pendant 15 jours. Au-delà, la parité revenait à 1 pour 1  Conclusion : la restructuration des OCEANES de Bull revient à réduire le montant de leur nominal, ce qui est pourtant interdit par les textes 18
  • 19. Pas d’offre publique, la faute au ….? 19 Droit des sociétés Droit boursier Droit des entreprises en difficulté En cas d’augmentation de capital, accord de l’AG nécessaire avec délégation au CA possible ≠ États-Unis (Delaware). Néanmoins Les règles de cotation (NYSE et Nasdaq) rendent l’accord de l’AG nécessaire si plus de 20% du capital ou changement de contrôle (sauf exceptions) Obligation de déclencher une offre publique en cas de dépassement de certains seuils (30% ou 1% sur 12 mois en 30% et 50%), néanmoins dérogation à portée de main Règles rendent le coût de l’ouverture d’une procédure collective trop important pour que le dirigeant puisse en faire une menace crédible Règles floues quant à la détermination des droits des obligataires rendant l’évaluation de l’intérêt de participer à une offre publique délicate NON NON OUI
  • 20. Constat n°2 • La procédure collective ne permet pas au dirigeant de contraindre les obligataires à accepter des concessions significatives = à participer à l’offre publique • La faiblesse du pouvoir de négociation du dirigeant à deux facteurs : ▫ L’ouverture d’une procédure est un coût trop important pour l’entreprise au regard du bénéfice escompté ▫ l’absence d’un marché du financement de la période d’observation 20
  • 21. Analyse coûts-bénéfices de l’ouverture d’une procédure collective négative du point de vue du dirigeant 21 Entreprise protégée contre les actions des créanciers, dès le lendemain de l’échec de l’OPE Possibilité d’imposer une réduction unilatérale des droits des créanciers Coût de l’ouverture d’une procédure collective inférieur au bénéfice escompté Condition remplie dans le cadre de procédure de sauvegarde avec l’arrêt des poursuites Condition non remplie car le consentement des créanciers est toujours nécessaire pour une conversion en actions Condition non remplie au regard de l’impact sur fournisseurs et clients, d’autant plus que le taux de rechute est notoirement élevé + –  Faible nombre de procédures collectives sur les entreprises de taille significative II
  • 22. Concernant l’insuffisance d’un bénéfice escompté, on regrette l’absence d’un marché du financement de la période d’observation en raison de : 22 Super-privilège des salaires Frais de justice Privilège de conciliation En LJ, créances garantie par une sûreté mobilière Privilège de procédure Privilège de conciliation Privilège de procédure Super-privilège des salaires Frais de justice Privilège de conciliation • la faiblesse du privilège de procédure • l’imprévisibilité de l’issue de la procédure collective qui est à la main du débiteur en procédure de sauvegarde => aucune garantie d’être remboursé
  • 23. Constat n°3 • La procédure collective ne permet pas au dirigeant de convaincre les obligataires de l’intérêt de participer à l’offre publique et donc d’accepter de faire des concessions significatives • Les règles de la procédure collective ne permettent pas de déterminer le coût de l’économie réalisée en évitant la procédure (économie à distribuer aux obligataires) • Les règles de la procédure collective ne permettent pas une répartition du risque prévisible, juste et transparente 23
  • 24. Pour que les créanciers puissent évaluer leur intérêt à participer à l’offre, la procédure collective doit permettre une répartition du risque : 24 PREVISIBLE Les droits des investisseurs doivent être fonction du niveau de difficultés de l’entreprise et de l’ordre de priorité => les investisseurs doivent être répartis en classes pour approuver le plan de restructuration JUSTE Les obligataires doivent avoir la certitude qu’un ou plusieurs obligataires ne pourront pas bloquer indûment l’approbation du plan (au sein d’une même série d’obligation ou au niveau d’une série entière) Condition non remplie Pas de respect de l’ordre de priorité => à situation différente, pas de garantie d’être traité différemment + pas de droit pour les créanciers seniors de ne pas être affectés par le plan si maintien des droits des créanciers juniors Condition non remplie car tout dépend si les obligataires dissidents ont ou non une minorité de blocage au sein de l’assemblée UNIQUE des obligataires Condition non remplie Les créanciers ont très peu de pouvoir durant la procédure collective TRANSPARENTE Niveau d’information des investisseurs sur le le débiteur suffisant + transparence des diligences réalisées par les différents acteurs + possibilité de faire tierce-opposition de toutes les décisions affectant leurs droits
  • 25. 25 Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste > détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre un refus • Les droits des investisseurs ne doivent pas être modifiés selon l’issue de la procédure collective = peu importante si l’entreprise fait l’objet d’un plan de redressement ou un plan de cession => Condition non remplie • Les investisseurs doivent être répartis pas classes avant l’approbation du plan => Condition non remplie • La collectivité des créanciers doit avoir la certitude que la procédure collective permettra à la société d’approuver un plan si certains créanciers dissidents font INDUMENT obstacle => Condition non remplie • Lorsqu’une majorité d’obligataires ayant les mêmes droits qu’un ou des obligataires dissidents approuve le plan > principe du no worse off • Lorsqu’une série entière de porteurs d’obligations, voire la totalité des obligataires refuse le plan alors que d’autres créanciers plus senior ont accepté > cela dépend de là « où la valeur casse »
  • 26. Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste > détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre un refus 26 Liquidation value On going concern value Liquidation de l’activité (l’entreprise n’est pas viable) Continuation de l’activité avec restructuration (l’entreprise est viable) Continuation de l’activité sans restructuration (fonctionnement normal) Valeur de l’entreprise Droits des créanciers Valeur liquidative (Liquidation value) : possibilité de forcer le consentement d’un obligataire dissident, à partir du moment où la majorité des deux tiers des obligataires de la MEME série ont approuvé le plan, si pas moins bien traité qu’en cas de liquidation = no worse off principle Valeur d’entreprise en redressement (On going concern value) : possibilité de forcer le consentement d’une série ENTIERE d’obligations, à partir du moment où ladite série pas moins bien traitée si pas moins bien traité qu’en cas de cession de l’activité de l’activité à un prix égal à la valeur d’entreprise en redressement
  • 27. 27 Focus sur la répartition du risque de manière prévisible et juste > détermination des conditions dans lesquelles il est possible de passer outre un refus • Le juge doit nécessairement trancher les conflits d’intérêt => Condition non remplie • C’est également en fonction du critère de la valeur d’entreprise en redressement qu’il doit être possible de forcer le consentement des actionnaires => Condition non remplie • À défaut le débiteur pourrait être tenté de demander des concessions aux obligataires au-delà de ce qui est nécessaire au regard de la situation financière du débiteur
  • 28. CAS PRATIQUE – Technicolor  Groupe spécialisé dans la fabrication de systèmes vidéo et d’image numérique destinés aux professionnels des médias  Endettement composé de prêts bancaires, d’une émission obligataire senior et d’une émission de titres supers subordonnés (TSS)  Échec de la restructuration amiable faute d’accord des créanciers obligataires et bancaires et en raison de l’existence de nombreux CDS  Les intérêts des détenteurs de CDS ne sont plus alignés sur l’intérêt de l’entreprise ce qui a perturbé les négociations. Cette perturbation a été démultipliée en raison de l’incapacité de la procédure collective de conduire à une répartition du risque de manière prévisible, juste et transparente 28
  • 29. CAS PRATIQUE – Technicolor (2)  2009 : ouverture d’une procédure de sauvegarde  2010 : 1re recapitalisation suivie d’autres opérations de restructuration  Résultat de la restructuration  L’endettement à 1,55 Mds d’euros (contre 2,8 Mds précédemment)  Les actionnaires de Technicolor ont réussi à conserver 16% du capital  Conversion d’une partie significative de la dette (prêts et obligations) en actions  Les porteurs de titres super subordonnés (TSS) ont pu maintenir leur droit au paiement du montant nominal (cependant remboursement théorique). La somme de 25 millions d’euros, correspondant à environ 6% du nominal des titres, leur a été proposé pour solde de tout compte des intérêts > contentieux important  Conclusion : Le cas Technicolor montre les difficultés à restructurer la dette obligataire quand la procédure collective offre aux créanciers junior un pouvoir de nuisance 29
  • 30. Conséquences de la difficulté à contraindre et à convaincre • Tentatives de contournement et effets induits : subordination structurelle des obligataires et double LuxCo • Abandonner la règle de l’unanimité ? Sur un plan théorique, passage à la règle de la majorité nécessite que : ▫ 1) les créanciers sont suffisamment bien informés ▫ 2) les créanciers recherchent l’issue qui maximise la valeur de l’investissement (=> risque de conflit d’intérêts limité) ▫ 3) les règles la masse des obligataires soit réformées (=> loi Sapin II) 30
  • 31. Constat n°4 • Les règles de la procédure collective ne favorisent pas la formation d’un marché pour l’acquisition du contrôle des grandes entreprises en difficulté, animé par des fonds d’investissement de taille significative • La formation d’un tel marché se traduit par la consolidation de la dette d’entreprises en un faible nombre de mains • La discipline du marché peut permettre de contraindre les dirigeants à davantage anticiper les difficultés et à davantage restructurer le bilan de leur entreprise 31
  • 32. La recapitalisation par les actionnaires, une bonne affaire pour les créanciers ? • A priori, intéressante, surtout lorsque la recapitalisation est allouée au remboursement des créances, ce qui est rare • En réalité, souvent dangereuse car repousse à plus tard les problèmes 32 En pratique, la documentation financière interdit souvent au débiteur de se recapitaliser sans l’accord des créanciers
  • 33. Intérêt des créanciers ? Les stratégies de loan to own – Définition • Il s’agit pour des investisseurs de prêter à une entreprise en difficulté (ou de racheter ses dettes sur le marché secondaire) en vue d’acquérir son contrôle • Contrairement à des établissements bancaires, ces investisseurs cherchent à gagner de l’argent en étant actionnaire d’une société en difficulté au moment où ils investissent, ils sont dès lors incités : ▫ À désendetter autant que nécessaire l’entreprise ▫ A fermer les sites non viables 33
  • 34. L’absence de loan to own en France - Les raisons 34 • Confère le pouvoir d’approuver le plan de redressement de l’entreprise à un nombre limité de créanciers • Permette d’identifier quelle tranche de dette permet cette stratégie (en fonction de l’ordre de priorité des paiement et la situation de l’entreprise) • Ne permette pas aux autres classes de créanciers et actionnaires de s’opposer à la procédure Cette stratégie requiert que la procédure : En France, l’approbation du plan relève des comités de créanciers. Le classement des créanciers est réalisé en fonction de la nature de la créance et non de leur priorité dans l’ordre des paiements. Chaque comité ainsi que l’assemblée unique des obligataire doit approuver le plan
  • 35. L’absence de loan to own en France - Les raisons 35 • En l’état du droit, les fonds d’investissement ne peuvent acquérir que des entreprises, soit de taille plus relative, soit avec une structure de dette relativement simple ▫ Ex Latécoère et Apollo Management ▫ Ex Vivarte et Oaktree Capital Management • Les créanciers ne peuvent exercer une discipline suffisante sur les dirigeants de grandes entreprises
  • 36. PARALLELE : Crise de la dette souveraine – Peut-on pallier l’absence de procédure collective lors d’une restructuration de dette obligataire ? La crise de la dette souveraine grecque a montré les limites d’une approche purement consensuelle du règlement des difficulté. La négociation a aboutit à des impasses La Grèce a relancé le débat sur l’intérêt de créer un tribunal international compétent Le FMI a souhaité réduire les situations de hold out et la modification des clauses collectives dans les contrats obligataires afin de contraindre : ▫ les créanciers minoritaires au sein d’une même série d’obligation ▫ une série entière d’obligations si la majorité des créanciers en valeur et l’État concerné y consentent  Limites de cette approche compte-tenu du caractère incomplet des contrats 36
  • 37. PARALLELE : Crise de la dette LBO  Les négociations se caractérisent par 1) la présence d’un actionnaire majoritaire, le fonds de private equity, 2) une plus faible dispersion de la dette (en principe) que dans les sociétés cotées de taille significative  Il est ainsi plus facile de coordonner les créanciers en dépit des lacunes du droit des entreprises en difficulté  Toutefois, on observe des difficultés à aboutir à un accord pérenne au cours de la phase amiable et des difficultés à aboutir à un accord permettant un désendettement suffisant pour l’entreprise compte tenu de l’obligation de composer avec l’ensemble des créanciers et des actionnaires  Taux de « rechute » élevé en mandat ad hoc et en conciliation (Vivarte) 37
  • 38. Conclusion intermédiaire • L’incapacité du dirigeant à restructurer suffisamment sa dette obligataire a trois types de conséquences :  Une plus grande propension des entreprises à céder leurs actifs au rabais avec un risque de démantèlement (Belvédère, Alstom)  Une plus grande probabilité de recourir à des augmentations de capital « de la dernière chance » très risquées pour les actionnaires (Solocal, CGG, Alcatel)  Un plus grand risque d’adossement auprès d’un tiers, faute de mieux (Alcatel, Rhodia) 38
  • 39. Constat n°5 • En l’absence de restructuration profonde du bilan, le dirigeant est incité à recourir à des augmentations de capital de la dernière chance même en l’absence de concessions significatives de la part des créanciers • En théorie, les actionnaires devraient être peu enclins à y participer car il s’opère alors un transfert de richesse au profit des créanciers : théorie du debt overhang • En France (mais aussi en Europe) la réalité contredit cette théorie 39
  • 40. 40 Principe Raisons En pratique Réticence des actionnaires à réduire le niveau d’endettement d’une entreprise déjà fortement endettée L’actionnaire ne souscrit à une augmentation de capital que si elle crée suffisamment de valeur pour lui, peu importe qu’elle créé déjà de la valeur pour l’entreprise L’actionnaire est placé dans une situation de conflit d’intérêts par rapport à l’entreprise car la réduction consentie profite avant tout aux créanciers sauf en cas de concessions suffisantes Ce transfert de valeur est acté par le marché. Le cours de l’action diminue toujours à l’annonce d’une opération de recapitalisation Relation positive entre le niveau des difficultés et la survenance d’une augmentation de capital, et ce, même si pas de concessions significatives de la part des créanciers Dans certains cas, le produit de l’augmentation de capital est entièrement alloué au remboursement de la dette ! Théorie du debt overhang
  • 41. CAS PRATIQUE – Solocal – restructuration de 2014  Société mère des Pages jaunes ayant pour activité la recherche d’informations, la mise en relation et la publicité locale  2011 : 1re restructuration avec rééchelonnement de la dette et émission obligataire de 350 millions d’euros pour refinancer la dette  2013 : 2e restructuration dans le cadre d’un mandat ad hoc en vue d’obtenir une autre rééchelonnement de la dette bancaire  2014 : 3e restructuration conduisant à l’approbation d’un plan de sauvegarde accélérée aux termes duquel est prévu :  Une augmentation de capital de 440 millions d’euros au prix de 0,5 centimes soit l’équivalent de 15 euros après le regroupement d’actions  91% du produit de l’augmentation de capital alloué au remboursement de la dette  Opération sursouscrite à hauteur de 254,83% 41
  • 42. CAS PRATIQUE – Solocal (2)  2015 : nouvelle augmentation de capital réservée aux salariés et anciens salariés au prix de 16,80 euros par action  2016 : ouverture d’un mandat ad hoc pour qui a conduit à :  Une augmentation de capital de 400 millions d’euros entièrement allouée au remboursement de la dette. Prix de souscription : 1 euro  La conversion d’une partie de la dette en actions à des termes moins avantageux que ceux de l’augmentation de capital en numéraire. Cette fois-ci les créanciers acceptent de faire des concessions significatives  Conclusion : la restructuration de Solocal en 2014 illustre le caractère irrationnel de la décision des actionnaires 42
  • 43. CAS PRATIQUE – CGG  Groupe spécialisé dans l’exploration du sous-sol et les géosciences dans l’énergie (pétrole et gaz principalement)  Fin 2015 : endettement de 2,8 Mds d’euros et impossibilité de respecter les covenants financiers  Début 2016 : augmentation de capital de 350 millions d’euros avec maintient des DPS pour financer un plan de transformation de 200 millions d’euros et 150 millions pour financer le fonds de roulement. L’opération était fortement dilutive. Elle a été intégralement souscrite  Novembre 2016 : il est envisagé une nouvelle restructuration dans le cadre d’un mandat ad hoc où il est prévu d’évincer les actionnaires et de convertir la dette en action 43
  • 44. CAS PRATIQUE – Alcatel  Leader technologique des années 1980 dans la téléphonie fixe et mobile, Alcatel a mal géré le virage Internet et la mondialisation et ses difficultés se sont aggravées avec la fusion avec Lucent, entreprise aussi en difficulté  Historiquement, l’entreprise a toujours été sous capitalisée. Elle est issue de la Compagnie générale des eaux (CGE), entreprise privée sans capitaux, encastrée dans l’État et elle s’est toujours financée par l’endettement  2013 : Alcatel réussit une recapitalisation de la dernière chance d’un montant de 995 millions d’euros, un programme obligataire high yield de 750 millions d’euros et un prêt syndiqué de 500 millions d’euros  À aucun moment, Alcatel n’a été en mesure de réduire significativement sa dette et, au bord de la faillite en 2015, elle s’est laissée absorber par Nokia 44
  • 45. Constat n°6 • L’écart entre la théorie du debt overhang et la pratique s’explique d’abord par la difficulté des actionnaires, en situation d’asymétrie d’information, à évaluer leur intérêt patrimonial • L’écart s’explique également compte tenu de l’existence de biais cognitifs importants au niveau des actionnaires 45
  • 46. L’actionnaire dispose rarement d’un niveau d’information suffisant • Asymétrie d’information entre le dirigeant et les actionnaires => règles de gouvernance d’entreprise incitant le dirigeant à transmettre l’information. Parfois le dirigeant ne dispose pas lui-même de l’information (ex : chances de succès d’un plan de redressement) • Nécessité de renforcer les obligations à la charge de l’entreprise et du garant de l’émission d’actions nouvelles • Difficultés de valorisation des sociétés en difficulté (ex : DCF non utilisable lorsque les flux de trésorerie de l’entreprise sont négatifs, ce qui est souvent le cas dans les entreprises en difficulté) • Nécessité d’encourager les PIPE (Private Investment in Public Equity) dans les entreprises en difficulté 46
  • 47. L’actionnaire est sujet à des biais cognitifs et risque de prendre sa décision au regard de : • La différence entre le cours de bourse au moment de l’annonce de l’opération et le prix de souscription, or le cours de bourse est un mauvais référentiel, car sociétés est en difficulté • La différence entre le cours historique de l’action au moment où il a acquis ses actions et le prix de souscription, volonté de vouloir « se refaire » 47
  • 48. Constat n°7 • L’écart entre la théorie du debt overhang et la pratique s’explique également par les conflits d’intérêts et les biais cognitifs des dirigeants et, plus généralement par l’insuffisance des règles française en matière de gouvernance d’entreprise 48
  • 49. Conflits d’intérêts des dirigeants • Excès de confiance • Biais d’attribution : tendance naturelle de l’individu à sous- évaluer le poids de facteurs externes dans l’analyse des facteurs de sa réussite professionnelle 49 • Perte de leur emploi • Diminution de leur rémunération s’il retrouve un nouvel emploi Biais cognitifs des dirigeants Nécessité de mettre en place des contre-pouvoirs
  • 50. CAS PRATIQUE – Eurotunnel  Groupe dédié pour porter la construction du tunnel entre la France et le Royaume-Uni  1995 : suspension du paiement d’une dette s’élevant à 8,56 milliards de livres sterling en raison de difficultés liées aux erreurs de structuration du financement de projet insuffisamment pourvu en capital et dépourvu de sponsor (capital composé exclusivement d’actionnaires minoritaires)  Cette répartition du capital a donné une large latitude à la direction d’Eurotunnel qui a conclu des contrats à des conditions beaucoup trop onéreuses  Pendant plusieurs années, le groupe a été contraint de se restructurer. Cela est passé notamment par des augmentations de capital de la dernière chance, puis par l’ouverture d’une procédure de sauvegarde en 2016 50
  • 51. CAS PRATIQUE – Eurotunnel (2)  En 2006, la direction est de nouveau confronté à l’impossibilité de faire face à ses dettes et demande un waiver avant l’expiration duquel la direction s’empresse d’ouvrir une procédure de sauvegarde, sans accord préalable des créanciers  Dans le cas d’Eurotunnel, la dette était composée essentiellement d’instruments financiers de marché qui n’étaient pas détenus par des établissements de crédit, ce qui rendait difficile une négociation amiable 51
  • 52. Les lacunes du droit français en matière de gouvernance d’entreprise 52 Le dirigeant doit agir dans l’intérêt social et non dans l’intérêts des actionnaires Insuffisance des sanctions de violations des règles de marché faute d’envisager le droit pénal comme outil d’amélioration de l’efficacité des marchés Il n’existe pas d’obligations fiduciaires (fiduciary duties) à l’égard des actionnaires et des créanciers qui soit sanctionnées, comme aux États-Unis, mais aussi au Royaume- Unis et en Allemagne Contours restreints de l’action ut singuli et de l’action en insuffisance d’actif Absence de class action Manque de contre-pouvoirs internes Manque de contre-pouvoirs externes
  • 53. Les lacunes du droit français en matière de gouvernance d’entreprise 53 La jurisprudence en matière de responsabilité pour gestion de fait (immixtion) est extensive l l Les créanciers craignent de s’immiscer dans la gestion alors que leurs intérêts sont alignés à ceux de l’entreprise Les créanciers ne peuvent pas prendre le contrôle de la société sans le consentement du dirigeant tant que la société n’est pas en état de cessation des paiements l l Les créanciers ne peuvent pas exercer de pouvoir en amont Défauts du droit des entreprises en difficulté = pas de discipline imposée par le marché
  • 54. Constat n°8 • L’écart entre la théorie du debt overhang et la pratique s’explique enfin par la participation de l’État aux opérations de recapitalisation en l’absence de marché pour le contrôle des entreprises en grande difficulté • L’État est amené souvent à endosser le rôle « d’actionnaire en dernier ressort » • Cette participation est susceptible d’encourager à tort les autres actionnaires à participer à l’opération 54
  • 55. • L’annonce de la participation d’un actionnaire de référence est importante pour le succès d’une augmentation de capital • L’actionnaire de référence n’a pas d’obligation à recapitaliser l’obligation, nuance : ▫ Lorsque l’actionnaire fait abstraction de cette situation pour préserver sa réputation (ex : fonds de private equity qui se trompe de cible et politique de distribution agressive de dividende) ▫ Le défaut de surveillance des dirigeants est insuffisant pour mettre à la charge des actionnaires l’obligation de recapitaliser l’entreprise 55
  • 56. L’intervention de l’État dictée par une politique volontariste • L’État n’est pas un actionnaire comme les autres. Il est soumis à des conflits d’objectifs qui le poussent à endosser le rôle d’actionnaire en dernier ressort, même si simple erreur de défaut de surveillance : 56 Lorsqu’il est actionnaire : Il est politiquement très difficile pour l’État de s’abstenir de prêter assistance, qu’il soit minoritaire (CGG, Vallourec) ou majoritaire ( Areva) Lorsqu’il n’est pas actionnaire : l’État est quand même prompt à réaliser des bail-out (Alstom) en raison d’une politique particulièrement volontariste. Problème : pas de doctrine publique quant aux modalités de son intervention (ex : n’intervenir que lorsque l’échec est imputable à des circonstances exceptionnelles)
  • 57. CAS PRATIQUE – PSA  En 2008, les difficultés de PSA s’aggravent entraînant la dégradation de sa note ainsi que celle de sa banque captive PSA Finance par les agences de notation.  Cette situation fragilise PSA finance dont le coût du crédit se renchérit significativement-  La Commission européenne autorise l’Etat français à garantir les émissions obligataires émises par PSA finance afin de pouvoir assurer la poursuite de ses activités et faciliter le refinancement de la dette du groupe.  La Commission européenne oblige le groupe PSA à se restructurer en profondeur – l’entrée au capital de l’Etat français est conditionnée à l’arrivée au capital d’un tiers. 57
  • 58. CAS PRATIQUE – PSA (2) • 2014 : le groupe chinois Dongfeng et l’État français deviennent actionnaires (14% chacun du capital) dans le cadre d’une augmentation de capital de 3 Mds d’euros. Dilution de la famille Peugeot qui passe à 14% • 2017 : PSA fait état d’un redressement spectaculaire et annonce le rachat à GM d’Opel et Vauxhall pour un montant de 1,3 Mds, branche européenne en déficit du groupe. L’État transfère à Bpifrance ses parts dans PSA pour 1,92 milliards d’euros (PV de 1,12 milliard) • Conclusion : l’intervention en amont des difficultés de l’Etat, en raison de la fragilisation soudaine de PSA Finance, a permis de réduire le risque que l’intervention en fonds propres de l’Etat soit coûteuse pour les finances publiques 58
  • 59. CAS PRATIQUE – Alstom  Issue de la scission Alcatel-Alstom (1989), Alstom fut sous-capitalisée au profit d’Alcatel et une acquisition hasardeuse a entraîné accident industriel, à la suite de la livraison de turbines défectueuses  2003 : pertes de 1,4 Mds et niveau d’endettement à 5,3 Mds d’euros (sans recours aux obligations) mais les établissements bancaires refusent de convertir leurs créances en actions  En l’absence de marché privé pour le contrôle des grandes entreprises en difficulté, Alstom a dû se tourner vers l’État qui obtient l’autorisation de la Commission européenne pour verser 720 millions d’euros contre 30% du capital à la condition de céder sa participation dans un délai de 4 ans  Problème, la Commission européenne demande des cessions douloureuses, ces cessions n’auraient pas eu lieu si investisseur privé 59
  • 60. CAS PRATIQUE – Alstom  L’Etat Français parvient à céder sa participation à Bouygues et à réaliser une plus value de 2 milliards.  Conclusion : intervention en amont de l’Etat à un moment où l’appareil industriel était encore concurrentiel en raison de l’accident des turbines. Le risque pour les finances publiques a été réduit  Aujourd’hui Alstom est à nouveau dans une situation difficile ce qui a conduit à son démantèlement et ne peut être repris par un fonds d’investissement 60
  • 61. Les modalités de l’intervention de l’État • L’État ne cherche pas à limiter les coûts de son intervention pour le contribuable. Rarement, l’État demande aux créanciers d’absorber les pertes préalablement à son intervention • Pour contourner les difficultés du droit des entreprises en difficulté, l’État pourrait avoir recours à une structure de defeasance (ou désendettement de fait) sur le modèle good bank / bad bank afin de forcer les créanciers à absorber les pertes • C’est pas le cas en pratique, même en l’absence de risque systémique (Areva) • L’État se rend coupable d’envoyer un signal faussement positif aux actionnaires minoritaires 61
  • 62. CAS PRATIQUE – Areva  Groupe du secteur de l’énergie qui fournit des produits et services sur l’ensemble du cycle du nucléaire  Détenu à hauteur de 86,82% par l’État français (directement ou à travers la BPI et le Commissariat de l’énergie atomique)  2015 : pertes accumulées de 9 Mds d’euros sur 4 ans que l’État n’a pu empêcher  2016 : plan de restructuration qui inclut notamment deux injections de capital (4,5 milliards) par l’État français dans la maison mère (Areva) et dans une entité constituée pour accueillir les activités combustibles (Nouvel Areva). 62
  • 63. CAS PRATIQUE – Areva (2)  La Commission européenne a estimé que ces injections de capital constituaient une aide d’État compatible avec le marché intérieur, mais exige des cessions  Pas de restructuration de la dette préalablement à l’injection de capital 63  Conclusion : sans y être tenu, l’État apporte son soutien à des entreprises de taille significative dans les conditions qui ne lui sont pas forcément favorables. Ce faisant, l’État envoie le message d’une garantie implicite pour les établissements too big to fail
  • 64. L’État français – problématiques 64 Pour respecter la règlementation européenne sur les aides d’État, l’État conditionne sa participation à celle de partenaires privés Sauf que dans la plupart des cas ces partenaires privés sont des industriels concurrents à l’entreprise en difficulté (ex : PSA / Dongfeng, Valourrec / NSSMC) => risque de « tunneling », extraction de valeur importante au détriment des actionnaires minoritaires, pour compenser la perte financière du partenaire
  • 65. PARALLELE AVEC LA CRISE BANCAIRE - Les contingent convertibles, une solution au problème ? 65 ⎕Les « cocos » sont des valeurs mobilières hybrides qui absorbent les pertes – modalités de la conversion de la dette en actions sont fixées dans le contrat d’émission. L’élément déclencheur est souvent la violation d’un ratio de fonds propres fixé par la réglementation prudentielle ⎕Initialement créés dans le secteur financier, les cocos pourraient également permettre de contourner les problèmes posés par le droit des entreprises en difficulté. Reste à fixer le critère permettant la conversion automatique des obligations…
  • 66. Constat n°9 • Le Chapter 11 américain permet de forcer les obligataires à faire des concessions significatives => nombre important de succès d’offres publiques d’échange d’obligations en actions • Un débat existe néanmoins sur l’intérêt de réintroduire les clauses collectives dans les contrats d’émission obligataires 66
  • 67. Comment le droit américain permet de contraindre et de convaincre les créanciers ? • Le Chapter 11 autorise le redressement de la société à la condition qu’il génère un surcroît de valeur par rapport à l’arrêt d’activité • Les règles d’approbation du plan reposent sur l’idée que le contrôle de l’entreprise doit revenir aux créanciers dont les intérêts sont les plus alignés sur ceux de l’entreprise (les détenteurs de la fulcrum security) 67
  • 68. Comment le droit américain permet de contraindre les créanciers ? • Le juge ne décide pas du sort de l’entreprise mais apprécie le caractère équitable du traitement des investisseurs par rapport à : ▫ La valeur liquidative lorsqu’il s’agit de forcer le consentement d’une minorité de créanciers au sein d’une classe de créanciers ▫ La valeur d’entreprise en redressement lorsqu’il s’agit de forcer le consentement d’une classe entière de créanciers 68
  • 69. Avantages et inconvénients du système américain Avantages • Évite une destruction de valeur inutile au niveau de l’entreprise en cas de réalisation de l’ensemble des actifs et en cas de redressement de l’entreprise • Favorise le regroupement de la dette entre les mains de fonds d’investissement qui valorisent le plus l’entreprise. Cela : ▫ modifie ex ante la négociation ▫ facilite la restructuration ▫ améliore la gouvernance d’entreprise 69 Inconvénients • Lourdeur et coût de la période d’observation. L’absence d’administrateur nécessite le passage par le juge pour chaque acte • Important contentieux sur la valeur de l’entreprise et conflits pour le contrôle de la société • Cession trop vite de l’ensemble des actifs de la société au profit des créanciers seniors pour préserver la valeur des actifs
  • 70. Impact du système américain 70 Sur les augmentation de capital en numéraire L’augmentation de capital est réalisée, au besoin, APRES une restructuration en profondeur du bilan Sur les modalités d’intervention du Trésor américain Le Trésor américain est très peu intervenu pour prêter assistance sauf au cœur de la crise financière Le Trésor est intervenu en limitant le coût de l’opération pour les finances publiques
  • 71. CAS PRATIQUE – General Motors  Le groupe est spécialisé dans la production d’automobiles  Lors de la crise financière, le groupe s’est retrouvé en difficulté du fait de la fermeture du marché du crédit. Le Trésor américain est intervenu après que les créanciers et actionnaires ont été invités à apurer les pertes  Le Trésor a d’abord accordé sous forme de prêts assortis de garanties 20 Mds d’euros, puis 30 Mds d’euros postérieurement à l’ouverture d’une procédure collective garantis par le privilège accordé aux Debtor In Possession Financing (DIP financing) 71
  • 72. CAS PRATIQUE – General Motors (2)  Le Trésor américain a ensuite pris, aux côtés de l’État canadien, le contrôle de New GM, nouvelle entité réceptacle des actifs viables de GM, laissant les « mauvais » actifs dans l’ancien GM devant être liquidé  Le Trésor a profité de l’introduction en bourse de New GM en 2010 pour céder sa participation, réalisant une moins value de 9 Mds d’euros dans l’opération  Conclusion : Le Trésor n’a jamais poursuivi l’objectif de prendre le contrôle du groupe et a toujours eu le souci de minimiser le coût de son intervention pour les finances publiques 72
  • 73. 73 PARTIE II CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
  • 74. • Des conséquences, sur un plan micro-économique, des lacunes du droit, encore méconnues • Des conséquences, sur un plan macro-économique, des lacunes du droit, encore insuffisamment analysées, à noter le taux de rechute à 5 ans : ▫ En France, 85% pour les entreprises en redressement, 50% pour les entreprises en sauvegarde => cela signifie que 1) les tribunaux forcent le redressement malgré l’absence de viabilité de l’entreprise ou 2) les tribunaux laissent émerger de la procédure collectives des entreprises trop endettées Conclusion 74
  • 75. • 2e obstacle : importance de la culture et de l’histoire d’un pays. L’État subit la dépendance au sentier (« path dependance ») ▫ Prise de conscience de la nécessité de réformer le droit ▫ Dernièrement, ordonnances de 2014 et loi Macron de 2015 ont opéré un retour au consensualisme La lente évolution du droit des entreprises en difficulté – obstacles à des réformes ambitieuses et rapides : 75 • 1er obstacle : le droit des entreprises en difficulté est à l’embranchement d’autres droits
  • 76.  Penser que le règlement à l’amiable est toujours préférable à l’ouverture d’une procédure collective (ce qui n’est pas le cas lorsque l’entreprise a de nombreux créanciers individuels non coordonnés)  Multiplier les exemptions à la règle de l’arrêt des poursuites (ex : fiducie)  Multiplier les dérogations au caractère collectif de la procédure conduisant à violer le consentement des créanciers sans garde-fous suffisants (SA, SFA) Les écueils de la stratégie des petits pas du législateur sont nombreux 76
  • 77.  Introduire des garde-fous, conférant la possibilité à une minorité de créanciers de bloquer injustement l’adoption du plan, et ce, en violation de l’ordre de priorité (ex : remise en cause du principe 1euro/1vote, sans transparence)  Introduire un dispositif pour mettre fin aux blocages résultant des actionnaires pouvant voter la réduction de la dette en violation de l’ordre de priorité mais pb de lisibilité  Prendre des mesures permettant partiellement de rétablir l’objectif de maximisation de la valeur d’usage des actifs mais en dehors du contrôle du juge (ex : pre-pack cessions) Les écueils de la stratégie des petits pas du législateur sont nombreux 77
  • 78. • La Commission européenne fait valoir deux enjeux : ▫ Le traitement des créances douteuses dans les bilans bancaires ▫ Le développement des marchés obligataires dans le cadre de la CMU ▫ D’autres enjeux : prochaine crise obligataire, changement d’environnement (révolution industrielle, révolution énergétique, dématérialisation de l’économie) Les avancées du droit européen 78
  • 79. • La proposition de directive du 22 novembre 2016 montre le chemin pour améliorer le traitement en amont des difficultés des grandes entreprises • La France en serait la première bénéficiaire en raison : ▫ de l’absence TOTALE de répartition des risques de manière prévisible, transparente et juste ▫ de la taille de son économie et la profondeur de ses marchés financiers ▫ d’un grand nombre d’entreprises significatives Les avancées du droit européen 79
  • 80. Recommandation n°1 • Rendre la répartition des risques prévisible, juste et transparente lorsque la société entre en procédure collective • Il est important de comprendre que l’efficacité du traitement en amont des difficultés dépend de l’efficacité de la procédure collective 80
  • 81. Pour cela, s’appuyer sur les proposition de la directive : 81 Respect de l’ordre de priorité des paiements (absolute priority rule) Principe du consensualisme (accord d’au moins une classe de créanciers sur le plan) Principe de no worse off ou best interest test Possibilité d’évincer les actionnaires et les classes de créanciers n’ayant droit à rien pour la going concern value Traitement juste et équitable des investisseurs
  • 82. Recommandation n°2 • Autoriser les aménagements contractuels aux règles de la masse des obligataires afin d’autoriser, hors procédure collective ou hybride la conversion de dette obligataire soumise au droit français en actions sur décision des 2/3 obligataires d’une seule et même série d’obligations 82
  • 83. Recommandation n°3 et 4 Pour améliorer la transparence de l’information : 83 • Exiger des émetteurs classés valeur spéculative, qui décident d’émettre des actions nouvelles d’obtenir un certificat de solvabilité établi par un expert indépendant permettant de mettre à la disposition du marché les prévisions, à l’appui desquelles, l’entreprise est confiante dans le succès de sa recapitalisation • Renforcer le régime de responsabilité des établissements financiers qui garantissent des émissions d’actions réalisées par des émetteurs classés valeur spéculative, sur le modèle de la règle du « 10b5 » américaine
  • 84. Recommandation n°5 et n°6 • Forcer les garants d’émissions nouvelles d’actions à divulguer l’ensemble de leurs positions : actions mais aussi dérivés • Encourager une modification de la doctrine AMF en matière d’égalité de traitement des actionnaires afin d’encourager les investissements privés dans les sociétés cotées (PIPEs) en difficulté afin de laisser aux professionnels du retournement ce type de paris financiers risqués 84
  • 85. Pour plus tard • D’autres recommandations sont nécessaires afin d’améliorer les règles de gouvernance et feront l’objet d’une étude à part • Une amélioration des conditions de la recherche multi- pluridisciplinaire en France est également clé pour d’améliorer l’efficacité du cadre juridique 85
  • 86. Références  Ph. Jostarndt, « Equity Offerings in Financial Distress - Evidence from German Restructurings », 2009  N. Keifer, « Essays in corporate finance », 2003  J. Franks, S. Sanzhar, « Evidence on Debt Overhang from Distressed Equity Issues », 2006  J. Campbell, J. Hilscher et J. Szillagyi, « In Search of Distress Risk », 2008  W. Adam, A. Levitin, « The New Bond Workouts », 2017  Wachtell, Lipton, Rosen & Kate, « Distressed Mergers and Acquisitions », 2013 86
  • 87. 87 Suivez-nous sur les réseaux sociaux ! NOUS CONTACTER Sophie VERMEILLE Présidente Droit & Croissance Rules for Growth + 33 (0) 6 73 04 89 90 Mail : svermeille@droitetcroissance.fr Internet : www.droitetcroissance.fr LinkedIn : http://fr.linkedin.com/in/sophievermeille

Notes de l'éditeur

  1. Eventuellement intégrer le fait que l’on soit à la veille de l’explosion d’une bulle obligataire !
  2. ATTENTION : Dans ton article, la formulation du constat ne correspond plus suffisamment au contenu
  3. SLIDE ALTERNATIVE A LA SLIDE PRECEDENTE
  4. Je n’ai pas compris le point 27 dans lequel tu dis que même si les privilèges étaient suffisamment important, l’incertitude de l’issue de la procédure fait peser sur l
  5. SLIDE ALTERNATIVE A LA SLIDE PRECEDENTE
  6. SLIDE ALTERNATIVE AUX 3 SLIDES PRECEDENTES
  7. POURQUOI ALCATEL POUR ILLUSTRER LA THEORIE DU DEBT OVERHANG
  8. SLIDE ALTERNATIVE A LA SLIDE PRECEDENTE
  9. SLIDE ALTERNATIVE A LA SLIDE PRECEDENTE