Une ressource pour financer le développement des entreprises patrimoniales et familiales ?
En cette période de raréfaction des ressources financières, les entreprises patrimoniales et familiales doivent plus que jamais exercer une certaine créativité pour trouver les financements nécessaires à leur développement.
Une possibilité qui semble encore insuffisamment exploitée aujourd’hui consisterait pour elles à se tourner vers les fonds de mezzanine, qui disposent de liquidités importantes mais peinent à leur trouver emploi depuis la réduction drastique du nombre de LBO, et l’augmentation du nombre d’opérations minoritaires, dans lesquelles on ne trouve pas toujours de dette mezzanine.
Interview Les Echos le 4 janv 2014 sur la charte familiale
La dette mezzanine
1. 24 Option Finance n°1086 - Lundi 19 juillet 2010
Entreprise et expertise Juridique
Il est à noter que la
dette mezzanine dont
nous parlons ici, que les
opérateurs spécialisés
tendent aujourd’hui à
appeler «dette mezzanine de
croissance», peut être mise
en place soit au niveau de
la société opérationnelle,
soit au niveau d’une holding
actionnaire interposée.
La dette mezzanine : une ressource
pour financer le développement
des entreprises patrimoniales et familiales ?
En cette période de raréfaction des
ressources financières, les entreprises
patrimoniales et familiales (EPF) doivent
plus que jamais exercer une certaine
créativité pour trouver les financements
nécessaires à leur développement.
Par Valérie Tandeau
de Marsac, avocat associée
Jeantet & Associés
U
ne possibilité qui semble encore insuffisam-
ment exploitée aujourd’hui consisterait pour
elles à se tourner vers les fonds de mezzanine,
qui disposent de liquidités importantes mais
peinent à leur trouver emploi depuis la réduction drastique
du nombre de LBO, et l’augmentation du nombre d’opéra-
tions minoritaires, dans lesquelles
on ne trouve pas toujours de
dette mezzanine.
En effet, la dette mezzanine, qui
ne désigne rien d’autre qu’une
dette subordonnée, avec ou sans
le «kicker1
» permettant de la
convertir en capital au terme de
sa maturité, est un instrument de
quasi-fonds propres susceptible
de répondre de façon satisfaisante
aux besoins des EPF, comme à
ceux des fonds de mezzanine.
Pour les EPF, la dette mezzanine
évite la dilution du capital, et ne
se traduit pas non plus obligatoi-
rement par une dilution au terme
de l’opération. Le plus souvent,
le fonds de mezzanine propose
d’émettre des obligations convertibles en actions (OCA), ou
des obligations à bons de souscription d’actions (OBSA),
sur une durée qui est en général de huit à dix ans. La rému-
nération demandée est certes élevée, mais c’est la contre-
partie du caractère non dilutif de ce mode de financement,
qui ne remet aucunement en cause le plein exercice du
pouvoir par le chef d’entreprise. La référence en la matière
est le taux pratiqué par le fonds OC +, constitué sous la
forme d’un fonds commun de placement à risque (FCPR),
géré par CDC Entreprises2
et Avenir Entreprises pour le
compte du FSI3
. La rémunération des OC + est généra-
lement comprise entre 12 et 15 %, dont une partie (entre
un tiers et la moitié) est versée sous la forme d’un intérêt,
qui peut d’ailleurs être capitalisé et payé in fine, dans des
proportions négociables, et l’autre partie liée à la plus-value
résultant de la formule de valorisation retenue pour l’ins-
trument de conversion en capital. Il est intéressant de noter
que la conversion peut être évitée au moyen d’une prime
de non-conversion, qui sera versée par l’entreprise, en utili-
sant les fruits de la croissance que le prêt mezzanine aura
permis de financer. Dans ces conditions, le taux d’intérêt
nominal, hors partie capitalisée et hors rémunération liée
à la plus-value résultant de la conversion (ou la prime de
non-conversion) de l’obligation peut se rapprocher de 5 %.
Dans le jargon des professionnels, cette partie de la rému-
nération est désignée par le vocable «cash», tandis que la
partie de la rémunération versée «in fine», à l’échéance du
prêt, est appelée « PIK » pour «payment in kind».
Il est à noter que la dette mezzanine dont nous parlons ici,
que les opérateurs spécialisés tendent aujourd’hui à appeler
«dette mezzanine de croissance», peut être mise en place
soit au niveau de la société opérationnelle, soit au niveau
d’une holding actionnaire interposée. Cette dernière solu-
tion peut être intéressante, notamment, lorsque des sûretés
ont déjà été consenties sur les actifs de la société opéra-
tionnelle, à titre de garantie des dettes bancaires souscrites
pour l’exploitation. La «dette mezzanine de croissance» est
alors structurellement subordonnée aux dettes bancaires
d’exploitation, contrairement à la dette mezzanine utilisée
dans le contexte d’un LBO, qui est généralement contrac-
tuellement subordonnée à la dette senior, toutes deux étant
souscrites par la même entité, en l’occurrence la holding
de reprise.
Si le marché s’intéresse aujourd’hui à ce type de montage,
c’est sans doute parce qu’il existe un vrai intérêt à favoriser
les passerelles entre deux mondes, celui des EPF et celui du
private equity, qui se côtoient finalement assez peu, et ne se
connaissent pas toujours bien, ce qui peut parfois engen-
drer une méfiance dommageable pour tous. N’est-il pas
dans l’intérêt bien compris de tous de créer des conditions
favorables à une reprise de la croissance ? ■
1. Le «kicker»
désigne l’instrument
juridique qui permet
au prêteur de la
dette mezzanine
de convertir sa
créance en actions,
selon une formule
de conversion
préalablement
convenue.
2. Filiale de la
Caisse des Dépôts
et Consignations.
3. Fonds Stratégique
d’Investissement.