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Charles Baudelaire
Charles-Pierre Baudelaire est un poète français, né à Paris le 9 avril 1821 et
mort dans la même ville le 31 août 1867. « Dante d'une époque déchue »1
selon le mot de Barbey d'Aurevilly, nourri de romantisme, tourné vers le
classicisme, à la croisée entre le Parnasse et le symbolisme, chantre de la «
modernité », il occupe une place qui lui est propre dans l'histoire littéraire
du xixe siècle.

Au cœur des débats sur la fonction de la littérature de son époque,
Baudelaire détache la poésie de la morale, la proclame tout entière
destinée au Beau et non à la Vérité2. Comme le suggère le titre de son
recueil Les Fleurs du mal, il a tenté de tisser des liens entre le mal et la
beauté, le bonheur et l'idéal inaccessible (À une passante), la violence et la
volupté (Une martyre), entre le poète et son lecteur (« Hypocrite lecteur,
mon semblable, mon frère »), entre les artistes à travers les âges (Les
Phares3). Outre les poèmes graves (Semper Eadem) ou scandaleux
(Delphine et Hippolyte), il a exprimé la mélancolie (Mœsta et errabunda) et
l'envie d'ailleurs (L'Invitation au voyage). Il a aussi extrait la beauté de
l'horreur (Une charogne).



Éléments biographiques
Charles Baudelaire naît rue Hautefeuille4 à Paris. Sa mère, Caroline
Archenbaut-Defayis (Dufaÿs ou Dufays, par corruption) a vingt-sept ans.
Son père, Joseph-François Baudelaire, né en 1759 à La Neuville-au-Pont5,
en Champagne, est alors sexagénaire. Quand il meurt, en 1827, Charles n'a
que six ans. Cet homme lettré, épris des idéaux des Lumières, et amateur
de peinture, peintre lui-même, lui laisse un héritage dont il n'aura jamais le
total usufruit. Il avait épousé, en première noces, le 7 mai 1797, Jeanne
Justine Rosalie Jasmin avec laquelle il eut un fils, Claude Alphonse
Baudelaire, le demi-frère de Charles.

Un an plus tard, sa mère, Caroline Archimbaut-Dufays (1793-1871) se
remarie avec le chef de bataillon Jacques Aupick. Le futur poète ne
pardonnera jamais à sa mère ce remariage, et l'officier Aupick, devenu plus
tard ambassadeur, incarne à ses yeux tout ce qui fait obstacle à ce qu'il
aime : sa mère, la poésie, le rêve, et la vie sans contingences.

« S'il va haïr le général Aupick, c'est sans doute que celui-ci s'opposera à sa
vocation. C'est surtout parce que son beau-père lui prenait une partie de
l'affection de sa mère. [...] Une seule personne a réellement compté dans la
vie de Charles Baudelaire : sa mère6 »

En 1831, le lieutenant-colonel Aupick ayant reçu une affectation à Lyon,
Baudelaire est inscrit à la pension Delorme puis suit les cours de sixième au
Collège royal de Lyon, en cinquième il devient interne. En janvier 1836, la
famille revient à Paris où Aupick est promu colonel en avril. Baudelaire,
alors âgé de quatorze ans, est inscrit au Collège Louis-le-Grand comme
pensionnaire, mais il doit redoubler sa troisième. En seconde, il obtient le
deuxième prix de vers latins au concours général.

Renvoyé du lycée Louis-le-Grand en avril 1839 pour une vétille7, Baudelaire
mène une vie en opposition aux valeurs bourgeoises incarnées par sa mère
et son beau-père. Il est reçu in extremis au Baccalauréat qu'il passe au lycée
Saint-Louis en fin d'année. Son beau-père jugeant la vie de son beau-fils «
scandaleuse », décide de l'envoyer en voyage vers les Indes, périple qui
prend fin aux Mascareignes (Maurice et La Réunion) en 1841.

De retour à Paris, il s'éprend de Jeanne Duval, jeune mulâtresse, avec
laquelle il connaîtra les charmes et les amertumes de la passion. Dandy
endetté, il est placé sous tutelle judiciaire, et connaît, dès 1842, une vie
dissolue. Il commence alors à composer plusieurs poèmes des Fleurs du
mal. Critique d'art et journaliste, il défend en Delacroix le représentant du
romantisme en peinture, mais aussi Balzac lorsque l'auteur de La Comédie
humaine est attaqué et caricaturé pour sa passion des chiffres8 ou pour sa
perversité présumée9. Grâce à son ami Louis Ménard, Baudelaire découvre
en 1843 les « paradis artificiels » dans le grenier de l'appartement familial
des Ménard : il y goûte la confiture verte. Même s'il contracte la colique à
cette occasion, cette expérience semble décupler sa créativité (il fait son
autoportrait en pied, très démesuré), aussi va-t-il renouveler cette
expérience occasionnellement sous contrôle médical en participant aux
réunions du "club des Haschischins". En revanche, sa pratique de l'opium
est plus longue : il fait d'abord un usage thérapeutique du laudanum10 dès
1847, prescrit pour combattre ses maux de tête et comme analgésique
(suite aux douleurs intestinales consécutives à une syphilis, probablement
contractée durant sa relation avec la prostituée Sarah la Louchette vers
1840). Comme De Quincey avant lui, l’accoutumance le fait augmenter
progressivement les doses. Croyant y trouver un adjuvant créatif, il en
décrira les enchantements et tortures11.

En 1848, il participe aux barricades. La révolution de février instituant la
liberté de la presse, Baudelaire fonde l'éphémère gazette Le Salut Public
(d'obédience résolument républicaine), qui ne va pas au-delà du deuxième
numéro. Le 15 juillet 1848, paraît dans La Liberté de penser un texte
d'Edgar Allan Poe traduit par Baudelaire : Révélation magnétique. À partir
de cette période, Baudelaire n'aura de cesse de clamer son admiration pour
l'écrivain américain et deviendra son traducteur attitré. La connaissance
des œuvres de Poe et de Joseph de Maistre atténue définitivement sa
"fièvre révolutionnaire"12. Plus tard, il partage la haine de Gustave Flaubert
et de Victor Hugo pour Napoléon III, mais sans s'engager outre mesure dans
son œuvre (« L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre / Ne fera pas lever
mon front de mon pupitre » - Paysage dans Tableaux parisiens du recueil
Les Fleurs du mal)13 Baudelaire se voit reprocher son écriture et le choix de
ses sujets. Il n'est compris que par quelques-uns de ses pairs comme
Armand Baschet, Édouard Thierry, Champfleury, Barbey d’Aurevilly,
Dulamon14, ou encore André Thomas... Cet engouement confidentiel
contraste avec l'accueil houleux que réserve la presse au poète des Fleurs
du mal. Dès la parution du recueil, en 185715, Gustave Bourdin réagit avec
une extrême virulence dans les colonnes du Figaro du 5 juillet 1857 : « Il y a
des moments où l'on doute de l'état mental de M. Baudelaire, il y en a où
l'on n'en doute plus ; —c'est, la plupart du temps, la répétition monotone
et préméditée des mêmes choses, des mêmes pensées. L'odieux y côtoie
l'ignoble ; le repoussant s'y allie à l'infect... » et cela deviendra le jugement
dominant de l'époque.

Moins de deux mois après leur parution, Les Fleurs du mal sont
poursuivies16 pour « offense à la morale religieuse » et « outrage à la
morale publique et aux bonnes mœurs ». Seul ce dernier chef d'inculpation
condamne Baudelaire à une forte amende de trois cents francs, réduite à
cinquante, suite à une intervention de l'impératrice Eugénie. L'éditeur,
Auguste Poulet-Malassis, s'acquitte pour sa part d'une amende de cent
francs, et doit retrancher six poèmes dont le procureur général Ernest
Pinard a demandé l'interdiction (Les bijoux ; Le Léthé ; À celle qui est trop
gaie ; Lesbos ; Femmes damnées [le premier poème] ; Les métamorphoses
du vampire). Malgré la relative clémence des jurés, eu égard au réquisitoire
qui vise onze poèmes, ce jugement touche profondément le poète, qui
réalisera, contraint et forcé, une nouvelle édition en 1861, enrichie de
trente-deux poèmes. En 1862, Baudelaire est candidat au fauteuil d'Eugène
Scribe à l'Académie Française. Il est parrainé par Sainte-Beuve et Vigny. Le 6
février 1862, il n'obtient aucune voix et se désiste. Par la suite, il renonce à
se présenter au fauteuil de Lacordaire17. En 1866, l'auteur réussit à publier
les six pièces condamnées, accompagnées de seize nouvelles, à Bruxelles,
c'est-à-dire hors de la juridiction française, sous le titre Les Épaves.

Le 24 avril 1864, le poète, criblé de dettes, part pour la Belgique pour
entreprendre une tournée de conférences où ses talents de critique d'art
éclairé ne déplacent guère les foules. Il se fixe à Bruxelles, et prépare un
pamphlet contre son éphémère pays d'accueil, qui figure, à ses yeux, une
caricature de la France bourgeoise. Le féroce Pauvre Belgique! restera
inachevé. Pressentant la mort inéluctable de ce royaume qu'il juge artificiel,
il résume son épitaphe en un mot : Enfin !
C'est en Belgique que Baudelaire rencontre Félicien Rops, qui illustre les
Fleurs du mal. Lors d'une visite à l'église Saint-Loup de Namur, Baudelaire
perd connaissance. Cet effondrement est suivi de troubles cérébraux, en
particulier d'aphasie. À partir de mars 1866, il souffre d'hémiplégie. Il meurt
à Paris de la syphilis le 31 août 1867, sans avoir pu réaliser le projet d'une
édition définitive - comme il la souhaitait - des Fleurs du Mal, travail de
toute une vie. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse (6e division),
dans la même tombe que son beau-père, le général Aupick et sa mère.

Le Spleen de Paris (autrement appelé Petits poèmes en prose) est édité à
titre posthume en 1869, dans une nouvelle édition remaniée par Asselineau
et Théodore de Banville. À sa mort, son héritage littéraire est mis aux
enchères. L'éditeur Michel Lévy l'acquiert pour 1750 francs. La troisième
édition des Fleurs du Mal que préparait Charles Baudelaire, accompagnée
des 11 pièces intercalaires, a disparu avec lui.

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  • 1. Charles Baudelaire Charles-Pierre Baudelaire est un poète français, né à Paris le 9 avril 1821 et mort dans la même ville le 31 août 1867. « Dante d'une époque déchue »1 selon le mot de Barbey d'Aurevilly, nourri de romantisme, tourné vers le classicisme, à la croisée entre le Parnasse et le symbolisme, chantre de la « modernité », il occupe une place qui lui est propre dans l'histoire littéraire du xixe siècle. Au cœur des débats sur la fonction de la littérature de son époque, Baudelaire détache la poésie de la morale, la proclame tout entière destinée au Beau et non à la Vérité2. Comme le suggère le titre de son recueil Les Fleurs du mal, il a tenté de tisser des liens entre le mal et la beauté, le bonheur et l'idéal inaccessible (À une passante), la violence et la volupté (Une martyre), entre le poète et son lecteur (« Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère »), entre les artistes à travers les âges (Les Phares3). Outre les poèmes graves (Semper Eadem) ou scandaleux (Delphine et Hippolyte), il a exprimé la mélancolie (Mœsta et errabunda) et l'envie d'ailleurs (L'Invitation au voyage). Il a aussi extrait la beauté de l'horreur (Une charogne). Éléments biographiques Charles Baudelaire naît rue Hautefeuille4 à Paris. Sa mère, Caroline Archenbaut-Defayis (Dufaÿs ou Dufays, par corruption) a vingt-sept ans. Son père, Joseph-François Baudelaire, né en 1759 à La Neuville-au-Pont5, en Champagne, est alors sexagénaire. Quand il meurt, en 1827, Charles n'a que six ans. Cet homme lettré, épris des idéaux des Lumières, et amateur de peinture, peintre lui-même, lui laisse un héritage dont il n'aura jamais le total usufruit. Il avait épousé, en première noces, le 7 mai 1797, Jeanne
  • 2. Justine Rosalie Jasmin avec laquelle il eut un fils, Claude Alphonse Baudelaire, le demi-frère de Charles. Un an plus tard, sa mère, Caroline Archimbaut-Dufays (1793-1871) se remarie avec le chef de bataillon Jacques Aupick. Le futur poète ne pardonnera jamais à sa mère ce remariage, et l'officier Aupick, devenu plus tard ambassadeur, incarne à ses yeux tout ce qui fait obstacle à ce qu'il aime : sa mère, la poésie, le rêve, et la vie sans contingences. « S'il va haïr le général Aupick, c'est sans doute que celui-ci s'opposera à sa vocation. C'est surtout parce que son beau-père lui prenait une partie de l'affection de sa mère. [...] Une seule personne a réellement compté dans la vie de Charles Baudelaire : sa mère6 » En 1831, le lieutenant-colonel Aupick ayant reçu une affectation à Lyon, Baudelaire est inscrit à la pension Delorme puis suit les cours de sixième au Collège royal de Lyon, en cinquième il devient interne. En janvier 1836, la famille revient à Paris où Aupick est promu colonel en avril. Baudelaire, alors âgé de quatorze ans, est inscrit au Collège Louis-le-Grand comme pensionnaire, mais il doit redoubler sa troisième. En seconde, il obtient le deuxième prix de vers latins au concours général. Renvoyé du lycée Louis-le-Grand en avril 1839 pour une vétille7, Baudelaire mène une vie en opposition aux valeurs bourgeoises incarnées par sa mère et son beau-père. Il est reçu in extremis au Baccalauréat qu'il passe au lycée Saint-Louis en fin d'année. Son beau-père jugeant la vie de son beau-fils « scandaleuse », décide de l'envoyer en voyage vers les Indes, périple qui prend fin aux Mascareignes (Maurice et La Réunion) en 1841. De retour à Paris, il s'éprend de Jeanne Duval, jeune mulâtresse, avec laquelle il connaîtra les charmes et les amertumes de la passion. Dandy endetté, il est placé sous tutelle judiciaire, et connaît, dès 1842, une vie dissolue. Il commence alors à composer plusieurs poèmes des Fleurs du mal. Critique d'art et journaliste, il défend en Delacroix le représentant du romantisme en peinture, mais aussi Balzac lorsque l'auteur de La Comédie
  • 3. humaine est attaqué et caricaturé pour sa passion des chiffres8 ou pour sa perversité présumée9. Grâce à son ami Louis Ménard, Baudelaire découvre en 1843 les « paradis artificiels » dans le grenier de l'appartement familial des Ménard : il y goûte la confiture verte. Même s'il contracte la colique à cette occasion, cette expérience semble décupler sa créativité (il fait son autoportrait en pied, très démesuré), aussi va-t-il renouveler cette expérience occasionnellement sous contrôle médical en participant aux réunions du "club des Haschischins". En revanche, sa pratique de l'opium est plus longue : il fait d'abord un usage thérapeutique du laudanum10 dès 1847, prescrit pour combattre ses maux de tête et comme analgésique (suite aux douleurs intestinales consécutives à une syphilis, probablement contractée durant sa relation avec la prostituée Sarah la Louchette vers 1840). Comme De Quincey avant lui, l’accoutumance le fait augmenter progressivement les doses. Croyant y trouver un adjuvant créatif, il en décrira les enchantements et tortures11. En 1848, il participe aux barricades. La révolution de février instituant la liberté de la presse, Baudelaire fonde l'éphémère gazette Le Salut Public (d'obédience résolument républicaine), qui ne va pas au-delà du deuxième numéro. Le 15 juillet 1848, paraît dans La Liberté de penser un texte d'Edgar Allan Poe traduit par Baudelaire : Révélation magnétique. À partir de cette période, Baudelaire n'aura de cesse de clamer son admiration pour l'écrivain américain et deviendra son traducteur attitré. La connaissance des œuvres de Poe et de Joseph de Maistre atténue définitivement sa "fièvre révolutionnaire"12. Plus tard, il partage la haine de Gustave Flaubert et de Victor Hugo pour Napoléon III, mais sans s'engager outre mesure dans son œuvre (« L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre / Ne fera pas lever mon front de mon pupitre » - Paysage dans Tableaux parisiens du recueil Les Fleurs du mal)13 Baudelaire se voit reprocher son écriture et le choix de ses sujets. Il n'est compris que par quelques-uns de ses pairs comme Armand Baschet, Édouard Thierry, Champfleury, Barbey d’Aurevilly, Dulamon14, ou encore André Thomas... Cet engouement confidentiel contraste avec l'accueil houleux que réserve la presse au poète des Fleurs
  • 4. du mal. Dès la parution du recueil, en 185715, Gustave Bourdin réagit avec une extrême virulence dans les colonnes du Figaro du 5 juillet 1857 : « Il y a des moments où l'on doute de l'état mental de M. Baudelaire, il y en a où l'on n'en doute plus ; —c'est, la plupart du temps, la répétition monotone et préméditée des mêmes choses, des mêmes pensées. L'odieux y côtoie l'ignoble ; le repoussant s'y allie à l'infect... » et cela deviendra le jugement dominant de l'époque. Moins de deux mois après leur parution, Les Fleurs du mal sont poursuivies16 pour « offense à la morale religieuse » et « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs ». Seul ce dernier chef d'inculpation condamne Baudelaire à une forte amende de trois cents francs, réduite à cinquante, suite à une intervention de l'impératrice Eugénie. L'éditeur, Auguste Poulet-Malassis, s'acquitte pour sa part d'une amende de cent francs, et doit retrancher six poèmes dont le procureur général Ernest Pinard a demandé l'interdiction (Les bijoux ; Le Léthé ; À celle qui est trop gaie ; Lesbos ; Femmes damnées [le premier poème] ; Les métamorphoses du vampire). Malgré la relative clémence des jurés, eu égard au réquisitoire qui vise onze poèmes, ce jugement touche profondément le poète, qui réalisera, contraint et forcé, une nouvelle édition en 1861, enrichie de trente-deux poèmes. En 1862, Baudelaire est candidat au fauteuil d'Eugène Scribe à l'Académie Française. Il est parrainé par Sainte-Beuve et Vigny. Le 6 février 1862, il n'obtient aucune voix et se désiste. Par la suite, il renonce à se présenter au fauteuil de Lacordaire17. En 1866, l'auteur réussit à publier les six pièces condamnées, accompagnées de seize nouvelles, à Bruxelles, c'est-à-dire hors de la juridiction française, sous le titre Les Épaves. Le 24 avril 1864, le poète, criblé de dettes, part pour la Belgique pour entreprendre une tournée de conférences où ses talents de critique d'art éclairé ne déplacent guère les foules. Il se fixe à Bruxelles, et prépare un pamphlet contre son éphémère pays d'accueil, qui figure, à ses yeux, une caricature de la France bourgeoise. Le féroce Pauvre Belgique! restera inachevé. Pressentant la mort inéluctable de ce royaume qu'il juge artificiel, il résume son épitaphe en un mot : Enfin !
  • 5. C'est en Belgique que Baudelaire rencontre Félicien Rops, qui illustre les Fleurs du mal. Lors d'une visite à l'église Saint-Loup de Namur, Baudelaire perd connaissance. Cet effondrement est suivi de troubles cérébraux, en particulier d'aphasie. À partir de mars 1866, il souffre d'hémiplégie. Il meurt à Paris de la syphilis le 31 août 1867, sans avoir pu réaliser le projet d'une édition définitive - comme il la souhaitait - des Fleurs du Mal, travail de toute une vie. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse (6e division), dans la même tombe que son beau-père, le général Aupick et sa mère. Le Spleen de Paris (autrement appelé Petits poèmes en prose) est édité à titre posthume en 1869, dans une nouvelle édition remaniée par Asselineau et Théodore de Banville. À sa mort, son héritage littéraire est mis aux enchères. L'éditeur Michel Lévy l'acquiert pour 1750 francs. La troisième édition des Fleurs du Mal que préparait Charles Baudelaire, accompagnée des 11 pièces intercalaires, a disparu avec lui.