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En Couverture60 Luxe 61
La clientèle du luxe est en en perpétuel mouvement, elle se renouvelle, fluctue, évolue régulièrement. Son épicentre se déplace en même temps
que celui de la richesse et de la croissance dans une économie mondiale qui se métamorphose sans cesse. C’est un véritable défi pour le luxe.
Comment à la fois capitaliser sur son patrimoine de marque, élargir son offre, intégrer les nouvelles technologies, étendre son territoire de marque
et répondre aux attentes d’une clientèle très aisée, grande voyageuse et exigeante, dont les codes culturels ne sont pas les mêmes partout ?
Isabelle Hossenloop
COMMENT LES MARQUES ENTRETIENNENT LE RêVE
dans les coulisses du LUXE :
L
es clients du luxe aiment être surpris et séduits. Mais ils sont discrets
sur leurs attentes, et souvent difficiles d’accès. C’est donc aux marques
de savoir lire en filigrane, deviner les ressorts de leurs désirs, se réin-
venter et anticiper en permanence. Et ne jamais oublier que, pour perdurer,
leur patrimoine reste leur atout maître.
PRECIEUX PATRIMOINE
Si les marques mettent en lumière leur passé, c’est parce que celui-ci leur
donne une légitimité incontestable dans un monde où les clients sont envahis
par les marques, sur-sollicités et surinformés, et ont besoin de repères solides et
rassurants. C’est encore plus vrai dans le luxe, où la référence au patrimoine offre
une sérénité, un ancrage sûr, une garantie de ne pas se tromper. Expositions,
événements, beaux livres, voire livres d’art en série limitée et hors de prix : rien
n’est trop beau pour célébrer brillamment l’histoire des belles maisons. Louis
Vuitton et Hermès ont mené tous deux en 2011 une opération de découverte de
leur patrimoine à travers des ateliers et des journées portes ouvertes. Yves Saint
Laurent en 2011, Van Cleef & Arpels en 2012, Cartier bientôt, en décembre
2013, nous enchantent avec de merveilleuses expositions où le vintage éclaire le
présent. Les maisons communiquent continuellement sur leur patrimoine, en
particulier autour des dates anniversaires, une excellente façon de rappeler l’an-
cienneté et l’expérience, donc l’expertise, et de raviver le rêve et la confiance. Par
exemple, en 2011, la maison Jaeger LeCoultre redessine sa mythique Reverso,
lance le modèle Ultra Thin Tribute to 1931, et fait renaître la légende : « Il y a
bien longtemps, en 1931, dans un tourbillon de poussière et le martèlement des
sabots des chevaux, une idée voyait le jour : une montre dont le cadran pouvait
se mettre à l’abri des chocs… ». La même année, Mercedes fête les 125 ans de
l’invention de la première automobile par Gottlieb Daimler and Carl Benz (eh
oui : Ford, ce sera plus tard, en 1908 !).
En 2012, Chanel Joaillerie lance une collection hommage aux bijoux de
diamants créés par Coco Chanel en 1932, ces mêmes bijoux historiques qui
avaient contribué à implanter la légitimité du nom dans la cour des grands,
place Vendôme, il y a bientôt vingt ans. En 2013, Aston Martin célèbre
ses 100 ans avec une rétrospective, tout au long de l’année, sur ses lieux
et ses modèles de légende. Bang et Olufsen, qui équipe les bolides d’une
acoustique de salle de concert, lui rend un très bel hommage à travers le
film Congratulations on 100 years of Aston Martin montrant le trajet paral-
lèle des deux maisons, deux légendes de génie, de défi et d’ingéniosité :
« Both companies were born of visionaries, not just founders ».
LA CONQUETE DE NOUVEAUX TERRITOIRES
L’association de marques, ponctuelle ou fidèle, est fréquente pour attirer une
nouvelle clientèle, bénéficier d’un effet de réciprocité, rajeunir ou modifier la
perception d’une marque. Mercedes s’est, entre autres, associé avec Giorgio
Armani pendant les Fashion Weeks pour toucher une clientèle jeune et élégante,
puis avec IWC (qui a réalisé une édition limitée à cette occasion) pour attirer
l’attention des connaisseurs et des collectionneurs d’horlogerie. Patek Philippe
s’est associé avec le joaillier Tiffany pour le cinquième anniversaire de leur
partenariat à New York (Tiffany abrite l’horloger dans sa mythique boutique
new yorkaise). Et quand Chanel décide de faire défiler sa collection Métiers
d’Art dans le palais de Linlithgow près d’Edimbourg, on peut aussi parler
d’association de territoires de marque, l’Ecosse étant liée à l’histoire de Coco
Chanel, et même à l’histoire de France. Au-delà de ces associations qui ont un
effet d’image certain, toutes les maisons de luxe étendent leur propre territoire
de marque, mesurant à chaque pas la pertinence de leur action et étudiant
longuement les retombées de ces lancements avant d’en décider. Il en va de
leur crédibilité à long terme. Ces nouvelles activités ne créent pas seulement du
chiffre d’affaires : elles leur donnent une visibilité supplémentaire et de nouveaux
« points d’entrée » auprès de leurs clients, mais aussi dans la presse et dans les
réseaux de distribution. Elles apportent une perception holistique nouvelle,
moderne et dynamique de la marque, l’image d’un monde dans lequel le client
se reconnaît, dont il fait partie. Le sentiment d’appartenance à un univers de
marque est une tendance forte aujourd’hui.
Ainsi Berluti, porté en 1993 sur les fonds baptismaux de LVMH - qui a toujours
su faire grandir ses nouveaux venus - vient de lancer une collection de prêt-à-
porter en reprenant les codes qui ont fait le succès de la marque (les matières
nobles, le fait main, le cuir, la patine, les couleurs chic et discrètes) et s’apprête
à développer le sur-mesure, comme le veulent aujourd’hui les nouveaux clients
du luxe. Egalement fidèles à leur patrimoine historique, d’autres marques se
lancent sur de nouveaux territoires, comme Ralph Lauren avec une collection
de joaillerie en 2011 (qui ne s’éloigne pas de son univers Nouvelle Angleterre
adepte de polo) ou Louis Vuitton, qui ouvre un Cabinet d’Ecriture dans un
superbe écrin, l’ex-boutique phare d’Arthus Bertrand en plein cœur de Saint-
Germain-des-Prés, et met en scène des pièces historiques reliant la marque au
monde de la littérature… lequel se tient traditionnellement à bonne distance
du luxe. Louis Vuitton édite à l’occasion un livre chez Gallimard dans lequel des
auteurs connus parlent de légendes de malles. Une façon habile de rappeler que
la marque ne s’adresse pas qu’aux fashionistas, mais aussi à l’intelligentsia.
Visite de l’usine Aston Martin par la reine Elisabeth II, ici àccompagnée de David Brown, propriétaire de la marque (années soixante).
En Couverture62 Luxe 63
LA TENDANCE DES « MAISONS »
Mais le plus grand pas franchi dans cette course inventive aux nouveaux
territoires de marque est sans doute dû à l’initiative de Giorgio Armani :
après Dubaï, il ouvre un nouvel hôtel à Milan dans un Palazzo des années 30
offrant le raffinement chaleureux et discret d’un palace 5 étoiles, entièrement
conçu et décoré dans ses teintes fétiches brun-crème. Un luxe au sommet,
ultramoderne, qu’apprécient les jeunes Asiatiques fortunés en route pour
la conquête du monde.
Ces palais de marques (hôtel Missoni, palazzo Versace, Bulgari Hotels &
Resorts) sont les héritiers naturels des fastueux temples du luxe que se sont
offert Hermès, Chanel, Louis Vuitton et d’autres grands noms à Tokyo dès
le début des années 2000, et des « maisons » maintenant, où l’on est reçu
comme dans une demeure privée aménagée en différents espaces décorés
par des artistes renommés. Ainsi les marques s’attachent à développer ce
concept de « maison », d’univers de marque, de club, d’expérience d’un
patrimoine connu de tous mais partagé par quelques-uns seulement. Patek
Philippe a aussi ouvert sa « maison » à Shanghai l’an dernier, dans une
ancienne résidence du consul britannique. Philippe Stern déclare : « Nous
désirons accueillir nos clients chinois dans un lieu qui ne soit ni un salon
ni une boutique, mais plutôt comme s’ils étaient personnellement reçus à la
maison, chez Patek Philippe ». Une des plus belles réussites architecturales :
le palais de style années 20 qui abrite à Shanghai les boutiques jumelles
Dunhill et Vacheron Constantin.
LE LUXE MECENE DE SON PROPRE SAVOIR-FAIRE
Le lien entre le monde du luxe et celui de l’art a toujours été puissant.
Il l’est encore plus aujourd’hui. Très prospères, les maisons de luxe se sentent
investies d’une mission d’éthique et de bienfaisance, de rayonnement de
l’art et du savoir-faire. Elles suscitent une nouvelle façon d’aborder le luxe :
le plaisir spirituel précède le plaisir matériel.
Dans la plupart des cas, elles savent expliquer que leur patrimoine histori-
que, c’est aussi le trésor d’une tradition artisanale qu’il convient de préserver.
Le rachat des artisans qui sont aussi leurs fournisseurs fait partie de cette
démarche de conservation du savoir-faire et de la qualité, du made in France,
made in Italy ou Swiss Made. Ainsi, ces dernières années, les maisons d’hor-
logerie suisse (mais aussi Hermès et Louis Vuitton) ont intégré des fabricants
de cadrans, de bracelets et de mouvements, tout comme Chanel a racheté des
artisans (couture, bijoux fantaisie, joaillerie...) et la manufacture horlogère
qui fabrique ses montres. Préemption sur la concurrence ou sauvegarde d’un
savoir-faire ? Toujours est-il que ces petites entreprises auraient sans doute
disparu ou auraient été avalées par d’autres. Cet adoubement, médiatisé
comme il se doit, s’intègre dans une vision plus vaste de protection et de
soutien des activités artistiques. Mécénat, fondations et sponsoring sont
indissociables de l’image des marques de luxe, qui n’oublient pas qu’elles
débutèrent elles-mêmes grâce aux mécènes et aux aristocrates fortunés qui
furent leurs clients.
ENCHINE,L’HORLOGERIEESTUNPONTENTRELESCULTURES
C’est sans doute dans l’horlogerie que cette association entre l’art, l’histoire
et un savoir-faire précieux, est la plus évidente. Sur cet immense marché aux
clientèles multiples, dont la maturité et la relation au luxe sont variées, les
marques ont la mission difficile de parler de leur patrimoine de telle façon que
les Chinois puissent s’approprier le discours par rapport à leur propre culture.
Pour en parler, Dandy a interviewé Jonathan Siboni, le jeune PDG de Deal
et de Luxurynsight, deux sociétés établies en Chine pour accompagner la
stratégie et l’implantation des entreprises françaises par une approche socio-
économique. « Le marché du luxe en Chine a d’abord été masculin, dit-il. Les
marques italiennes de mode pour hommes, telles qu’Armani et Zegna, ont été les
pionnières. Aujourd’hui encore, 55% du marché du luxe, et 75% du marché
de l’horlogerie, sont masculins. La tradition des cadeaux d’affaires - bien que
théoriquement interdite par la loi maintenant - est aussi une des causes de cette
prédominance masculine. Et l’horlogerie a toujours eu une place de choix pour
des raisons historiques » précise-t-il. Effectivement, au début du 17ème siècle,
c’est avec l’astronomie et les horloges mécaniques que le jésuite Matteo Ricci
essayera d’approcher l’empereur fasciné, comme son entourage, par les hor-
loges munies de « cloches qui sonnent toute seules ». Les horloges devinrent
les cadeaux les plus recherchés des dignitaires chinois (déjà la tradition des
cadeaux), et les seuls qui permirent aux jésuites de pénétrer dans la Cité
Interdite… pour la mise à l’heure. Depuis, l’horlogerie occidentale a conservé
son aura. Les marques horlogères capitalisent sur leur histoire, qu’elles mêlent
souvent à leur histoire en Chine ou à l’histoire de la Chine. Depuis une dizaine
d’années, on ne compte plus les expositions dans les plus prestigieux musées :
« Patek Philippe, par sa communication unique sur la filiation touche beaucoup
les Chinois. Ils sont parfaitement dans la lignée de l’héritage » précise encore
J. Siboni. Un concept très confucéen, pourrait-on ajouter. Il faut que les Chinois
puissent s’approprier les histoires, les partager avec leurs amis. Cette proximité
des marques avec eux et avec leur héritage est importante.
Ainsi en va-t-il du luxe moderne, dont les nouveaux territoires à conquérir
sont loin de l’Europe. Les marques ont un challenge délicat : faire connaître
leur patrimoine, socle de leur succès, et entendre les diversités et spécificités
culturelles de leurs nouveaux clients. Tout en restant attentives à ne pas se
couper de leur clientèle traditionnelle française, italienne… car les clients
étrangers sont sensibles et attentifs à l’aura d’une marque dans son pays
d’origine, gage de sa crédibilité à terme. q
en 2008, Bréguet expose à la Cité Interdite trois modèles ayant appartenu à
Napoléon (considéré comme un chef révolutionnaire en Chine) ; la même
année Blancpain réalise un modèle unique baptisé Qianlong en hommage à
l’empereur chinois né en 1735, comme la maison horlogère ; en 2011, Jacquet
Droz expose à Pékin ses « Automates et Merveilles » du XVIIIème siècle ;
en 2012, Jaeger LeCoultre réalise une exposition itinérante dans le pays, et
caetera… En dehors de l’horlogerie, Hermès se montre précurseur en 1998
avec l’exposition « Le cheval de 1 000 lieues » à la Cité Interdite, puis de
nouveau en 2008, avec « The Tale of Silk » au Today’s Art Museum de Pékin.
La maison s’inscrit naturellement, avec les thèmes du cheval (Chine du Nord)
et de la soie, dans les codes de la culture chinoise.
De nombreuses marques ont profité de 2012, la mythique année du Dragon,
pour faire parler d’elles, évoquer l’influence chinoise dans leurs créations et
rappeler qu’elles ont déjà eu des liens avec l’empire céleste. Louis Vuitton
entame un long voyage virtuel en train de Paris à Shanghaï (l’art du voyage)
à travers une campagne publicitaire évocatrice des belles années de Shanghaï,
dans le style « la Chine rêvée par l’Occident », et y ouvre lui aussi sa première
« maison », rappelant qu’il est présent en Chine depuis 1992.
Horlogers et joailliers reprennent le thème du dragon dans leurs créations les
plus luxueuses. Patek Philippe réalise quelques modèles en platine inspirés
par les signes zodiacaux chinois. En 2013, c’est Vacheron Constantin qui
inaugure l’année du Serpent avec des séries limitées en platine et en or rose.
©VacheronConstantin
©LouisVuitton/StéphaneMuratet
Comment capitaliser sur son
patrimoine, étendre son territoire
de marque et répondre aux
attentes d’une clientèle très aisée,
dont les codes culturels ne sont
pas les mêmes ?
Page de gauche :
les boutiques jumelles Vacheron
Constantin et Dunhill à Shanghaï.
Ci-dessus :
Louis Vuitton Paris-Shanghaï.

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Et ne jamais oublier que, pour perdurer, leur patrimoine reste leur atout maître. PRECIEUX PATRIMOINE Si les marques mettent en lumière leur passé, c’est parce que celui-ci leur donne une légitimité incontestable dans un monde où les clients sont envahis par les marques, sur-sollicités et surinformés, et ont besoin de repères solides et rassurants. C’est encore plus vrai dans le luxe, où la référence au patrimoine offre une sérénité, un ancrage sûr, une garantie de ne pas se tromper. Expositions, événements, beaux livres, voire livres d’art en série limitée et hors de prix : rien n’est trop beau pour célébrer brillamment l’histoire des belles maisons. Louis Vuitton et Hermès ont mené tous deux en 2011 une opération de découverte de leur patrimoine à travers des ateliers et des journées portes ouvertes. Yves Saint Laurent en 2011, Van Cleef & Arpels en 2012, Cartier bientôt, en décembre 2013, nous enchantent avec de merveilleuses expositions où le vintage éclaire le présent. 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En 2012, Chanel Joaillerie lance une collection hommage aux bijoux de diamants créés par Coco Chanel en 1932, ces mêmes bijoux historiques qui avaient contribué à implanter la légitimité du nom dans la cour des grands, place Vendôme, il y a bientôt vingt ans. En 2013, Aston Martin célèbre ses 100 ans avec une rétrospective, tout au long de l’année, sur ses lieux et ses modèles de légende. Bang et Olufsen, qui équipe les bolides d’une acoustique de salle de concert, lui rend un très bel hommage à travers le film Congratulations on 100 years of Aston Martin montrant le trajet paral- lèle des deux maisons, deux légendes de génie, de défi et d’ingéniosité : « Both companies were born of visionaries, not just founders ». LA CONQUETE DE NOUVEAUX TERRITOIRES L’association de marques, ponctuelle ou fidèle, est fréquente pour attirer une nouvelle clientèle, bénéficier d’un effet de réciprocité, rajeunir ou modifier la perception d’une marque. Mercedes s’est, entre autres, associé avec Giorgio Armani pendant les Fashion Weeks pour toucher une clientèle jeune et élégante, puis avec IWC (qui a réalisé une édition limitée à cette occasion) pour attirer l’attention des connaisseurs et des collectionneurs d’horlogerie. Patek Philippe s’est associé avec le joaillier Tiffany pour le cinquième anniversaire de leur partenariat à New York (Tiffany abrite l’horloger dans sa mythique boutique new yorkaise). Et quand Chanel décide de faire défiler sa collection Métiers d’Art dans le palais de Linlithgow près d’Edimbourg, on peut aussi parler d’association de territoires de marque, l’Ecosse étant liée à l’histoire de Coco Chanel, et même à l’histoire de France. Au-delà de ces associations qui ont un effet d’image certain, toutes les maisons de luxe étendent leur propre territoire de marque, mesurant à chaque pas la pertinence de leur action et étudiant longuement les retombées de ces lancements avant d’en décider. Il en va de leur crédibilité à long terme. Ces nouvelles activités ne créent pas seulement du chiffre d’affaires : elles leur donnent une visibilité supplémentaire et de nouveaux « points d’entrée » auprès de leurs clients, mais aussi dans la presse et dans les réseaux de distribution. Elles apportent une perception holistique nouvelle, moderne et dynamique de la marque, l’image d’un monde dans lequel le client se reconnaît, dont il fait partie. Le sentiment d’appartenance à un univers de marque est une tendance forte aujourd’hui. Ainsi Berluti, porté en 1993 sur les fonds baptismaux de LVMH - qui a toujours su faire grandir ses nouveaux venus - vient de lancer une collection de prêt-à- porter en reprenant les codes qui ont fait le succès de la marque (les matières nobles, le fait main, le cuir, la patine, les couleurs chic et discrètes) et s’apprête à développer le sur-mesure, comme le veulent aujourd’hui les nouveaux clients du luxe. Egalement fidèles à leur patrimoine historique, d’autres marques se lancent sur de nouveaux territoires, comme Ralph Lauren avec une collection de joaillerie en 2011 (qui ne s’éloigne pas de son univers Nouvelle Angleterre adepte de polo) ou Louis Vuitton, qui ouvre un Cabinet d’Ecriture dans un superbe écrin, l’ex-boutique phare d’Arthus Bertrand en plein cœur de Saint- Germain-des-Prés, et met en scène des pièces historiques reliant la marque au monde de la littérature… lequel se tient traditionnellement à bonne distance du luxe. Louis Vuitton édite à l’occasion un livre chez Gallimard dans lequel des auteurs connus parlent de légendes de malles. Une façon habile de rappeler que la marque ne s’adresse pas qu’aux fashionistas, mais aussi à l’intelligentsia. Visite de l’usine Aston Martin par la reine Elisabeth II, ici àccompagnée de David Brown, propriétaire de la marque (années soixante).
  • 2. En Couverture62 Luxe 63 LA TENDANCE DES « MAISONS » Mais le plus grand pas franchi dans cette course inventive aux nouveaux territoires de marque est sans doute dû à l’initiative de Giorgio Armani : après Dubaï, il ouvre un nouvel hôtel à Milan dans un Palazzo des années 30 offrant le raffinement chaleureux et discret d’un palace 5 étoiles, entièrement conçu et décoré dans ses teintes fétiches brun-crème. Un luxe au sommet, ultramoderne, qu’apprécient les jeunes Asiatiques fortunés en route pour la conquête du monde. Ces palais de marques (hôtel Missoni, palazzo Versace, Bulgari Hotels & Resorts) sont les héritiers naturels des fastueux temples du luxe que se sont offert Hermès, Chanel, Louis Vuitton et d’autres grands noms à Tokyo dès le début des années 2000, et des « maisons » maintenant, où l’on est reçu comme dans une demeure privée aménagée en différents espaces décorés par des artistes renommés. Ainsi les marques s’attachent à développer ce concept de « maison », d’univers de marque, de club, d’expérience d’un patrimoine connu de tous mais partagé par quelques-uns seulement. Patek Philippe a aussi ouvert sa « maison » à Shanghai l’an dernier, dans une ancienne résidence du consul britannique. Philippe Stern déclare : « Nous désirons accueillir nos clients chinois dans un lieu qui ne soit ni un salon ni une boutique, mais plutôt comme s’ils étaient personnellement reçus à la maison, chez Patek Philippe ». Une des plus belles réussites architecturales : le palais de style années 20 qui abrite à Shanghai les boutiques jumelles Dunhill et Vacheron Constantin. LE LUXE MECENE DE SON PROPRE SAVOIR-FAIRE Le lien entre le monde du luxe et celui de l’art a toujours été puissant. Il l’est encore plus aujourd’hui. Très prospères, les maisons de luxe se sentent investies d’une mission d’éthique et de bienfaisance, de rayonnement de l’art et du savoir-faire. Elles suscitent une nouvelle façon d’aborder le luxe : le plaisir spirituel précède le plaisir matériel. Dans la plupart des cas, elles savent expliquer que leur patrimoine histori- que, c’est aussi le trésor d’une tradition artisanale qu’il convient de préserver. Le rachat des artisans qui sont aussi leurs fournisseurs fait partie de cette démarche de conservation du savoir-faire et de la qualité, du made in France, made in Italy ou Swiss Made. Ainsi, ces dernières années, les maisons d’hor- logerie suisse (mais aussi Hermès et Louis Vuitton) ont intégré des fabricants de cadrans, de bracelets et de mouvements, tout comme Chanel a racheté des artisans (couture, bijoux fantaisie, joaillerie...) et la manufacture horlogère qui fabrique ses montres. Préemption sur la concurrence ou sauvegarde d’un savoir-faire ? Toujours est-il que ces petites entreprises auraient sans doute disparu ou auraient été avalées par d’autres. Cet adoubement, médiatisé comme il se doit, s’intègre dans une vision plus vaste de protection et de soutien des activités artistiques. Mécénat, fondations et sponsoring sont indissociables de l’image des marques de luxe, qui n’oublient pas qu’elles débutèrent elles-mêmes grâce aux mécènes et aux aristocrates fortunés qui furent leurs clients. ENCHINE,L’HORLOGERIEESTUNPONTENTRELESCULTURES C’est sans doute dans l’horlogerie que cette association entre l’art, l’histoire et un savoir-faire précieux, est la plus évidente. Sur cet immense marché aux clientèles multiples, dont la maturité et la relation au luxe sont variées, les marques ont la mission difficile de parler de leur patrimoine de telle façon que les Chinois puissent s’approprier le discours par rapport à leur propre culture. Pour en parler, Dandy a interviewé Jonathan Siboni, le jeune PDG de Deal et de Luxurynsight, deux sociétés établies en Chine pour accompagner la stratégie et l’implantation des entreprises françaises par une approche socio- économique. « Le marché du luxe en Chine a d’abord été masculin, dit-il. Les marques italiennes de mode pour hommes, telles qu’Armani et Zegna, ont été les pionnières. Aujourd’hui encore, 55% du marché du luxe, et 75% du marché de l’horlogerie, sont masculins. La tradition des cadeaux d’affaires - bien que théoriquement interdite par la loi maintenant - est aussi une des causes de cette prédominance masculine. Et l’horlogerie a toujours eu une place de choix pour des raisons historiques » précise-t-il. Effectivement, au début du 17ème siècle, c’est avec l’astronomie et les horloges mécaniques que le jésuite Matteo Ricci essayera d’approcher l’empereur fasciné, comme son entourage, par les hor- loges munies de « cloches qui sonnent toute seules ». Les horloges devinrent les cadeaux les plus recherchés des dignitaires chinois (déjà la tradition des cadeaux), et les seuls qui permirent aux jésuites de pénétrer dans la Cité Interdite… pour la mise à l’heure. Depuis, l’horlogerie occidentale a conservé son aura. Les marques horlogères capitalisent sur leur histoire, qu’elles mêlent souvent à leur histoire en Chine ou à l’histoire de la Chine. Depuis une dizaine d’années, on ne compte plus les expositions dans les plus prestigieux musées : « Patek Philippe, par sa communication unique sur la filiation touche beaucoup les Chinois. Ils sont parfaitement dans la lignée de l’héritage » précise encore J. Siboni. Un concept très confucéen, pourrait-on ajouter. Il faut que les Chinois puissent s’approprier les histoires, les partager avec leurs amis. Cette proximité des marques avec eux et avec leur héritage est importante. Ainsi en va-t-il du luxe moderne, dont les nouveaux territoires à conquérir sont loin de l’Europe. Les marques ont un challenge délicat : faire connaître leur patrimoine, socle de leur succès, et entendre les diversités et spécificités culturelles de leurs nouveaux clients. Tout en restant attentives à ne pas se couper de leur clientèle traditionnelle française, italienne… car les clients étrangers sont sensibles et attentifs à l’aura d’une marque dans son pays d’origine, gage de sa crédibilité à terme. q en 2008, Bréguet expose à la Cité Interdite trois modèles ayant appartenu à Napoléon (considéré comme un chef révolutionnaire en Chine) ; la même année Blancpain réalise un modèle unique baptisé Qianlong en hommage à l’empereur chinois né en 1735, comme la maison horlogère ; en 2011, Jacquet Droz expose à Pékin ses « Automates et Merveilles » du XVIIIème siècle ; en 2012, Jaeger LeCoultre réalise une exposition itinérante dans le pays, et caetera… En dehors de l’horlogerie, Hermès se montre précurseur en 1998 avec l’exposition « Le cheval de 1 000 lieues » à la Cité Interdite, puis de nouveau en 2008, avec « The Tale of Silk » au Today’s Art Museum de Pékin. La maison s’inscrit naturellement, avec les thèmes du cheval (Chine du Nord) et de la soie, dans les codes de la culture chinoise. De nombreuses marques ont profité de 2012, la mythique année du Dragon, pour faire parler d’elles, évoquer l’influence chinoise dans leurs créations et rappeler qu’elles ont déjà eu des liens avec l’empire céleste. Louis Vuitton entame un long voyage virtuel en train de Paris à Shanghaï (l’art du voyage) à travers une campagne publicitaire évocatrice des belles années de Shanghaï, dans le style « la Chine rêvée par l’Occident », et y ouvre lui aussi sa première « maison », rappelant qu’il est présent en Chine depuis 1992. Horlogers et joailliers reprennent le thème du dragon dans leurs créations les plus luxueuses. Patek Philippe réalise quelques modèles en platine inspirés par les signes zodiacaux chinois. En 2013, c’est Vacheron Constantin qui inaugure l’année du Serpent avec des séries limitées en platine et en or rose. ©VacheronConstantin ©LouisVuitton/StéphaneMuratet Comment capitaliser sur son patrimoine, étendre son territoire de marque et répondre aux attentes d’une clientèle très aisée, dont les codes culturels ne sont pas les mêmes ? Page de gauche : les boutiques jumelles Vacheron Constantin et Dunhill à Shanghaï. Ci-dessus : Louis Vuitton Paris-Shanghaï.