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-354330-30480Eléments de filmologie Introduction <br />Film/Cinéma <br />Langages et codes <br />Codes du film <br />Narration filmique <br />Conclusion <br />Bibliographie  <br />    <br />Eléments de narratologie <br />INTRODUCTION <br />La naissance de l'analyse théorique du cinéma s'est faite tardivement par rapport à ses origines (autour de 1895); elle s'est élaborée à partir des concepts linguistiques appliqués aux oeuvres cinématographiques et a impliqué une rupture avec la critique de type impressionniste ou esthétisante. Elle a dû se dégager de l'étude des entours du cinéma qui relèvent de la sociologie, de l'économie, de l'esthétique... On peut en effet analyser le cinéma en termes de production, en tant que show-business, étudier des phénomènes associés comme le vedettariat.  <br />La constitution d'une analyse filmique méthodique, d'une filmologie renvoie à la spécificité du langage filmique qui constitue à proprement parler l'objet de la sémiologie du cinéma. <br />                                                              Ces modestes éléments reprennent en partie l'ossature d'un travail de Jean Mottet, Portée sémiologique de quelques concepts linguistiques appliqués au cinéma. <br />Les photogrammes qui servent d'illustrations à ces pages sont la propriété de leurs auteurs et des ayants droit. Ces images réduites sont utilisées ici à des fins d'analyse pédagogique, dans une perspective strictement non commerciale. Nous nous engageons à les supprimer sur simple demande des ayants droit.<br />DISTINCTION FILM / CINEMA <br /> Gilbert Cohen Séat a finement distingué le fait cinématographique du fait filmique: <br />« Le film n'est qu'une petite partie du cinéma, car ce dernier constitue un vaste ensemble de faits dont certains interviennent AVANT le film (infrastructures économiques de la production, financement, techniques des appareils, studios...), d'autres APRES le film (influence culturelle, réaction des spectateurs, mythologie des quot;
starsquot;
...), d'autres encore PENDANT le film, mais à côté et en dehors de lui (rituel social de la séance de cinéma, équipement des salles, problème de la perception des images..).» <br />La sémiologie du cinéma va s'établir du côté du fait filmique. <br />Pour Christian Metz, le cinématographique, en plus du total des entours du film, c'est le total des films mêmes ou encore le total des traits qui dans les films sont supposés caractéristiques d'un certain langage pressenti. Le cinématographique de Metz dépend de la sémiologie, celui de Cohen Séat relève de la sociologie, de l'économie. Il faut être prudent avec la terminologie: le cinématographique de Metz correspond en gros au fait filmique de Cohen Séat. <br />L'analyse du cinéma doit caractériser le cinématographique, cette «somme virtuelle de tous les films» à partir de l'analyse des unités concrètes de discours, des messages différents que sont les films. On peut ainsi opposer une analyse du système cinématographique, une étude de son «langage», à une étude des textes filmiques, une analyse textuelle des oeuvres; on rapprochera de l'opposition entre l'étude linguistique de la langue et la linguistique du discours. <br />  <br />LANGAGES ET CODES AU CINEMA <br />I. Définition <br />II. Langage du cinéma <br />L'image photo mouvante Les mentions écritesLe son phoniqueLe bruitLa musiqueLes catégories de sonSon et temporalité <br />I. Définition <br />Le langage verbal utilise une seule matière d'expression, phonique, mais il comporte plusieurs codes. La langue n'en représente qu'un seul (règles de grammaire...); il existe par exemple des codes sociaux qui interviennent dans la communication: le code de politesse, entre autres. Inversement, un même code se manifeste d'une manière manuelle ([applaudir]) ou phonique («bravo»). La quot;
désapprobationquot;
 peut se manifester par des sifflets, de manière labiale, par des cris, de façon phonique... <br />Un code peut se transposer d'une matière d'expression dans une autre: ainsi, les codes picturaux du XIX ème influencent l'image photographique; certaines formes esthétiques propres au peintre Auguste Renoir se retrouvent chez son fils, le cinéaste Jean Renoir. <br />Le western, au cinéma, ne fait que reprendre des codes narratifs et culturels antérieurs, dont on trouve l'origine dans des chansons folkloriques de l'Ouest, dans la littérature populaire américaine, dans des mélodrames voire des bandes dessinées. Par exemple, la place de la femme, du cheval, le code de l'honneur ou le duel final... ne sont pas propres au cinéma !<br />Il faut ainsi bien distinguer les codes et le langage ; dans l'analyse du cinéma, il est possible de rechercher les unités significatives minimales (comme en linguistique, on a isolé les les monèmes ou les phonèmes), mais les chercheurs ne sont pas d'accord. Ainsi pour Eisenstein, l'unité de base est le plan, mais pour certains, c'est le photogramme (c.a.d. une image sur la pellicule). Pour d'autres encore, le cinème, c.a.d. un objet filmé, constitue l'unité de la deuxième articulation et le plan l'unité de la première articulation. Rappelons que selon Martinet, le langage humain est doublement articulé : le niveau de la première articulation dans le langage verbal est celui des monèmes (ces unités sont les morphèmes et lexèmes : donn-er-ons) et la deuxième articulation renvoie aux phonèmes, les 36 quot;
sonsquot;
 de base retenus par le système du français pour signifier des oppositions de sens. . <br />Cette confusion résulte d'un malentendu; comme il y a plusieurs codes en jeu au cinéma, il y a plusieurs unités minimales. On peut utiliser plusieurs unités d'analyse. Avant d'ergoter sur les unités minimales, il faut déterminer les différents codes à l'oeuvre. <br />II. Le langage du cinéma <br />Le langage cinématographique est hétérogène car il combine cinq matières d'expression, qui se présentent dans la bande image et dans la bande sonore, depuis le parlant: <br />Bande image <br />l'image photographique mouvante, qui est seule spécifiquement cinématographique (NB parfois, on peut rencontrer des images quot;
fixesquot;
 dans le film) <br />le tracé graphique des mentions écrites (des notations graphiques sont présentes dans l'image). <br />Bande sonore le son phonique, c.a.d. les paroles le son musical le son analogique, c.a.d. les bruits. <br />Le langage radiophonique n'utilise que la bande sonore; la simultanéité des deux bandes est propre au langage du cinéma parlant (/muet). <br />On remarquera que le cinéma dit muet ne l'est pas vraiment strictement : en effet, les personnages s'expriment aussi par des discours, des paroles et dialoguent; seuls les spectateurs ne les entendent pas. <br />La bande sonore participe activement à la narration comme à sa structuration — par son rôle dans le montage — ou à son rythme ; elle oriente, en effet, et construit la perception du réel : dans la séquence de la tentative de suicide de Susan Alexander chez Welles, par exemple, nous entendons distinctement deux sons nécessaires à l'interprétation : le souffle, les râles de l'épouse de Kane et les coups que donne celui-ci pour enfoncer la porte de la chambre ; mais nous ne voyons pas le mari inquiet qui reste hors-champ et nous distinguons mal les traits de Susan. C'est donc la rencontre des deux informations sonores croisées avec la fiole au premier plan qui nous donne à entendre ce qui se passe car nous en tirons une inférence sur la situation. La bande sonore joue ainsi un rôle important à ne pas perdre de vue.<br />A) L'image photo mouvante <br />a) Niveau de l'analogie photographique <br />L'image présente une particularité communicative par rapport à d'autres objets signifiants: elle a un statut analogique qui se manifeste dans la ressemblance perceptive globale avec l'objet représenté. <br />A première vue, naïvement, la photo semble un message objectif, sans code. On peut croire qu'elle reproduit mécaniquement le réel, mais son objectivité est mythique, car l'image n'est pas neutre, elle est connotée (cf. Roland Barthes). De plus, il y a intervention des éléments techniques, du point de vue, du cadrage... Les couleurs elles-mêmes varient selon les systèmes, le noir et blanc transforme. La photo réduit l'univers à deux dimensions. <br />En fait, dans la photo, il y a deux messages: un sans code et un autre codé, culturel, se développant à partir du premier. <br />Si le récepteur d'une photo peut faire la part des choses, entre la représentation du réel et les intentions conscientes ou non du photographe, au cinéma, la dénotation même truque systématiquement ce qu'elle représente, ce qu'elle nous montre. <br />Le travail de montage, base du langage filmique, manipule le réel. Ainsi dans un film, on n'est pas obligé de montrer réellement pour faire voir. Dans une scène à deux personnages, si les deux acteurs ne sont pas disponibles en même temps, on peut tourner la scène en filmant séparément les deux acteurs et au montage on assemblera. Cf. le cas d'un seul acteur jouant deux personnages différents, des jumeaux. De plus l'ordre de présentation des séquences (c.a.d. un ensemble de plans successifs relatifs au même sujet) n'est pas l'ordre du tournage. <br />Le message littéral d'un film est déjà le résultat d'une construction; le réel du film est loin de la réalité. Ainsi, on songera à l'importance de la reconstitution au cinéma; avant on reconstruisait les décors dans des studios (carton pâte); Pagnol faisait construire des décors en dur dans la nature (fermes...). <br />Bien des mouvements sont illusoires comme les chevauchées des westerns; le vent et la pluie sont fabriqués. Il faut tenir compte de la puissance de l'illusion technique même dans des films réalistes, sans parler des effets spéciaux des films de Science Fiction. (2001 -L'odyssée de l'espace). <br />b) Niveau de l'implication diégétique <br />L'image filmique, image d'un aspect du monde, pas du monde, ne peut pas signifier pleinement par elle-même ; son sens lui est attribué par la fiction dans laquelle elle est incluse: il faut tenir compte de l'axe syntagmatique. Ainsi, le lorgnon du Docteur Smirnov, dans le Cuirassé Potemkine de Serge Eisenstein (1925), accroché à un cordage, tire son sens du contexte et d'un amont sémantique. Il ne peut s'interpréter que dans le cadre d'une ellipse et d'une mise en réseau avec d'autres informations : il y a des inférences à faire, des liens à établir. Au final, le lorgnon, plus qu'un objet dénotant une classe sociale privilégiée, signifie symboliquement la myopie «sociale» du médecin qui refuse de voir certaines réalités que l'oeil de la caméra nous montre «objectifs» et il en est puni. <br />Pour Eisenstein un gros plan comme celui sur les lorgnons est un élément capable d'éveiller chez les spectateurs la conscience ou le sentiment du tout : le pince-nez du médecin se substitue ainsi à lui ; cet emploi du gros plan produit une figure de style comparable à la synecdoque, exprimant le tout par la représentation de la partie. <br />D'une manière plus générale, cela s'illustre dans « l'effet Koulechov ». Lev Koulechov, à partir de l'étude de films et d'une série d'expériences, a conclu vers 1922 qu'une image a deux valeurs :<br />1. sa valeur en tant qu'image photographique;2. la valeur acquise quand elle est associée à une autre, juxtaposée avec elle. <br />En partant ainsi d'un plan du visage totalement inexpressif d'un acteur, Mosjoukine, Koulechov, par trois montages différents, dans trois contextes, a obtenu trois significations perceptibles distinctes aux yeux des spectateurs. <br />Le même plan suivi d'un plan différent n'est plus le même plan.Associé à l'image d'une assiette ou un bol de soupe, le plan signifie la faim; avec l'image associée d'un cadavre d'enfant dans un cercueil, les spectateurs lisent l'angoisse devant la mort, la tristesse ; enfin, associé à la représentation d'une femme aguichante, on perçoit le désir sur le visage. Pourtant, il s'agit de la même image! A chaque fois les spectateurs estiment que l'artiste a bien su exprimer ou représenter le sentiment en question : Mosjoukine traduit si bien la peur, la faim... Koulechov a ainsi démontré qu’une image plus une autre faisaient bien, non pas deux images, mais une troisième issue des impressions des deux quot;
mèresquot;
. Pour construire la signification, il ne s'agit donc pas d'ajouter les deux images, mais plutôt de faire plutôt le produit des deux.<br />L'image filmique peut ainsi peut donc signifier tout autre chose que ce qu'elle montre. La réalité de l'oeuvre filmique n'est pas ce qui est montré, dénoté, mais ce qui est signifié par le système complexe du film; il faut tenir compte du contexte. L'image ne fonctionne pas comme le mot, signe fixe doté d'un sens lexical ; elle ne correspond pas à une convention définitive. Notons que le mot, actualisé dans un contexte linguistique, dans un texte, peut prendre une valeur particulière qui n'est pas le sens habituel; seuls le contexte situationnel ou le contexte textuel peuvent, par ailleurs, permettre de résoudre la polysémie d'un terme ou de comprendre la présence d'éventuelles connotations : «Passe-moi le rouge.», «J'ai mangé une note.», «Ma cuisinière fume.» = quid ? <br />En d’autres termes encore ou plus simplement, les images n’ont pas une signification univoque ou intrinsèque, elles ne prennent un sens que les unes par rapport aux autres ou mises dans un contexte. Cela souligne ainsi le rôle décisif du spectateur pour construire activement le sens de ce qu’il reçoit. Les images comme les discours verbaux, les textes littéraires sont susceptibles d’être interprétées. Cf. Umberto Eco, Lector in Fabula. <br />NB La bande filmique d'origine relative à l'expérience de Koulechov a été perdue. <br />L'homme à la caméra, D. Vertov, 1928. Les temps modernes, Ch. Chaplin, 1936. <br />Ces deux photogrammes semblent ainsi a priori porter le même message et faire de manière allusive apparaître l'homme moderne / le prolétaire des temps industriels comme perdu dans la machine. Mais la simple mise en réseau avec les images voisines (sans parler de remettre le film dans le contexte historique d'émission, de replacer le plan dans la séquence ou l'ensemble du film comme message culturel et idéologique) permet de comprendre que la signification est radicalement opposée. <br />   <br />Pour Charlie Chaplin, certes, l'homme est réduit à une sorte d'objet englouti par une machine qui l'écrase, le broie. Mais pour Dziga Vertov, les quelques plans en amont du photogramme soulignent la maîtrise de la main de l'homme sur les commandes, les rouages de la machine et les plans suivant montrent la puissance, l'effet de cette main et du regard expert sur la machine mise en fonctionnement. En outre, ces images sont montées en relation avec d'autres images soulignant l'efficace technique du geste humain, souverain. Vision optimiste et futuriste de la machine libératrice au service de l'humanité. Chez Chaplin l'homme est plutôt déshumanisé, pantin inefficace ou automate soumis à une hiérarchie, dans un monde déjà orwellien, écrasé par un système économique, devenu donc un simple objet dans une chaîne taylorienne de production qui l'avale et l'expulse métaphoriquement. <br />B) Les mentions écrites <br />Des notations graphiques peuvent apparaître dans l'image, en dehors des oeuvres originales sous-titrées; elles peuvent <br />a) se substituer carrément à elle : intertitres sur carton ; <br />b) s'y superposer : sous-titres explicitant le lieu, la date, l'écoulement d'un laps de temps... <br />c) s'y intégrer : mentions graphiques internes à l'image, lues par la caméra, éventuellement via le regard d'un personnage (banderoles, lettres ou télégrammes en gros plan, pancartes, enseignes...).Cf. les divers emplois suivants dans Citizen Kane d'O. Welles.<br />Aux origines, le cinéma muet avait besoin d'insérer l'écriture dans l'image pour pallier l'absence de bande sonore. Aujourd'hui, on notera l'importance du texte au début et à la fin du film avec le générique, la distribution, les quot;
créditsquot;
, des avertissements, des rappels historiques... On peut mêler texte et images, les superposer. Parfois le générique, outre qu'il ancre souvent dans un genre filmique et le signifie aux spectateurs, peut déjà jouer un rôle dans la diégèse, c.a.d. l'économie générale du récit : ainsi, dans les Chasses du comte Zaroff (The most dangerous game), de E.B. Schoedsack et I. Pichel, on peut lire une annonce, un élément prédestinateur dans certaines images. De même, pour The Big Sleep de H. Hawks, l'image des deux acteurs derrière le titre, associée aux deux cigarettes côte à côte, annonce de façon cataphorique la formation ultérieure du couple. Le générique prend alors une fonction «programmatique» qui relaie une éventuelle affiche ou une bande annonce; il permet aux destinataires d'anticiper comme au réalisateur d'accrocher par là son public. <br />Parfois, un texte dit par une voix off s'affiche au début du film ou d'une séquence, situant l'espace historique ou géographique... Ce texte peut occuper tout l'écran ou s'inscrire dans une partie de l'image. Voir un exemple d'une « séquence générique » à l'ouverture des Liaisons dangereuses de Stephen Frears. <br />Les mentions écrites internes font aussi partie du décor, elles participent à l'effet de réel. <br />C) Le son phonique <br />On notera que durant une longue période le cinéma est resté muet, ce qui ne l'a pas empêché de produire des chefs d'oeuvre. Alors, des intertitres, des cartons, étaient nécessaires à la compréhension du film, à la présentation minimale des éléments de discours des personnages. Au début du parlant, selon certains, on avait une nette prédominance des bruits, des sons par rapport au dialogue, dans beaucoup de films. Le rôle du message linguistique par rapport à l'image est variable et complexe. On peut distinguer deux grandes fonctions:<br />a) la fonction d'ancrage: le texte indique la direction d'un signifié précis; on limite la polysémie d'une image, on lève une ambiguïté. Ce cas est rare au cinéma (mais cf. photo de presse) et se traduit dans le recours à une voix off (voir plus bas). <br />b) la fonction de relais: le message linguistique seconde l'image dans la production d'un sens en rapport avec l'histoire racontée; le dialogue, bien conçu, bien utilisé, a un rôle complémentaire et non de redondance par rapport à l'image, il fait avancer l'action, donne des informations pertinentes. <br />On remarquera que bien souvent le son est postsynchronisé, refait en laboratoire et mixé savamment; il n'est pas naturel, spontané. Pour les films étrangers, il faut avoir à l'esprit que les acteurs sont doublés (V.O. / V.F.). <br />D) Bruits <br />On constatera qu'un grand nombre de bruits de la vie réelle ne sont pas naturels, mais produits plus ou moins directement par les hommes, c.a.d. qu'ils ont une origine sociale et par conséquent un sens social. Les bruits d'un film ne sont pas d'ailleurs une reproduction pure et simple des bruits extérieurs: ils sont élaborés en laboratoire, parfois truqués (cf. le bruitage). Une sélection, en pratique, s'impose car les bruits ne doivent pas, en principe, perturber la perception des sons phoniques, des dialogues; si cela se fait, il y a une intention. <br />Fréquemment, certains sons sont modifié en laboratoire: par exemple, on amplifie les paroles pour les rendre distinctes. Paradoxalement, les bruits d'un film ne sont pas de simples bruits et pas des « bruits » au sens linguistique du terme, c.a.d. des éléments entraînant une mauvaise transmission ou réception du message. Au lieu d'amener une perte d'informations, ils sont au contraire signifiants. De même, le silence peut être éloquent/ signifiant en termes de tension, menace... <br />Les bruits entrent en relation avec l'image, le son phonique et la musique via le mixage. Dans le film on constate une interdépendance sonore et plus généralement une interdépendance sémantique systématique : tous les éléments concourent à la production du sens. Les bruits comme la musique contribuent ainsi à la perception de la situation, à l'interprétation du contexte par le spectateur ou ils aident encore à caractériser un personnage. <br />E) La musique <br />Elle a joué un grand rôle à l'époque du muet ; non seulement les acteurs jouaient accompagnés d'un violon etc., mais à la projection un piano ou un disque... accompagnait le film; la musique n'était pas synchronisée. Actuellement deux grandes possibilités d'utilisation s'affirment: <br />1) rapport de redondance par rapport au visuel et au son; la musique double, renforce l'image et le discours: ainsi les violons langoureux commentent la scène d'amour, les trompettes accompagnent la scène guerrière... Naturellement tout cela reste codé, marqué par le culturel. <br />2) rapport de contraste: on peut noter des effets d'antithèse; ainsi un accordéon guilleret illustre une scène d'enterrement. Voir dans ce registre le générique de Gervaise de René Clément qui met en opposition des images quot;
sombresquot;
, renvoyant à un univers carcéral avec les grilles du chantier, et une musique allègre et festive de cabaret. <br />Une troisième fonction peut exister selon J. Mitry : parfois la musique ne paraphrase pas l'image ; elle ne vaut pas non plus pour elle-même, son intrusion à un moment donné a une signification, rien de plus, mais elle tire sa force rapportée aux autres éléments (son, bruits, images). <br />La musique a donc plusieurs fonctions :- elle soutient l'action,- elle accompagne l'expression des sentiments,- elle ponctue le film : elle prévient, annonce... <br />F) Les catégories de sons <br />On peut classer les sons présents dans un film en fonction de leur place, de la zone où on peut les situer. <br />1) Certains sons prennent ainsi place dans l'histoire racontée : ce sont les bruits, les sons, la musique, les paroles qui existent dans l'univers représenté, dans le cadre diégétique donc. <br />2) D'autres sont extérieurs à l'histoire et relèvent du récit, ils sont rajoutés après le tournage comme la musique d'accompagnement ou la voix off ; ils sont dits extradiégétiques. <br />Selon Michel Chion, un son «off» est proprement un son dont la source supposée est non seulement absente de l'image, mais aussi non-diégétique, c'est-à-dire située en un autre temps et un autre lieu que la situation directement évoquée : cas très répandu, des voix de commentaire ou de narration, dites en anglais « voice-over» , et bien sûr de la musique de fosse. <br />3) On observera que certains sons trouvent leur origine, leur source d'émission dans le cadre de l'image : on parle alors de sons quot;
INquot;
. D'autres sons restent extérieurs et renvoient à ce qui n'est pas inclus dans le champ, mais ils existent dans l'univers représenté, on dit alors qu'ils sont des sons quot;
HORS CHAMPquot;
. Une voix hors-champ, par exemple, est celle d'un personnage présent dans la situation évoquée à l'écran, mais ne se trouvant pas dans le champ de la caméra. L'usage de cette voix invite le spectateur à imaginer l'espace extérieur à celui de l'écran.Les sons rajoutés a posteriori sont qualifiés de sons quot;
OFFquot;
. <br />Pierre Schaeffer dit d’un son qu’il est acousmatique quand il s’agit d’un son que l’on entend mais sans voir sa cause productrice (Traité des objets musicaux, Seuil, 1966). Les sons acousmatiques sont des sons diégétiques et des sons non diégétiques ; ils ne sont pas émis dans le champ de l'image : c'est un ensemble constitué par les sons hors champ de la diégèse et les sons off rajoutés après le tournage. <br />G) Sons et temporalité <br />Par ailleurs, sur le plan de la temporalité, si l'on suit David Bordwell et Kristin Thompson (Film Art: An Introduction, 1979 et réédit.), on peut observer que les sons diégétiques et non-diégétiques peuvent être dans un rapport de simultanéité, de concomitance avec l'image ou de non-simultanéité, qu'ils soient décalés parce qu'ils renvoient à un moment antérieur ou parce qu'ils font référence à un autre moment postérieur à celui montré par l'image. <br />La musique, les bruits ou les paroles en provenance de l'univers de l'histoire peuvent, bien entendu, sembler nous parvenir en même temps que les images, synchrones, ou plutôt être issus du même moment de référence. Mais le son peut venir d'un moment antérieur à celui représenté par l'image ; on pourrait parler alors de « son rétrospectif » (sound flash-back) comme à la fin d'Accident (1967) de Joseph Losey : on entend sur un plan du portail d'une demeure ouvrant sur une allée le bruit d'un accident de voiture, celui du début du film. Le récit filmique, en effet, part d'un accident automobile et remonte le temps pour évoquer les événements qui l'ont précédé. <br />Parfois aussi, avec des images proleptiques (image flash-forward), le son peut servir de lien, de transition entre deux scènes : on continue ainsi par exemple d'entendre le son de la scène précédente alors que l'on voit déjà des images de la scène suivante. Cf. en ce domaine la musique dans Short Cuts d'Altman. <br />Le son, au contraire, peut se rattacher à un moment postérieur à celui présenté par l'image à l'écran. Les images (image flash-back) renvoient à un moment passé, antérieur au moment du son, celui d'un présent ou d'un passé plus récent. Des exemples canoniques sont à chercher dans les documentaires ou dans des fictions relatant un procès : la bande son présente alors le récit d'un témoin pendant que l'image nous ramène dans le passé. L'image illustre le récit rétrospectif du passé ou la parole commente les images de celui-ci ; ainsi, la voix off d'un narrateur peut commenter a posteriori comme dans la Splendeur des Amberson (1946) d'O. Welles. Enfin, le son peut être proleptique (sound flash-forward) : les images vues à l'écran désignent un présent et le son qui les accompagne appartient à une scène ultérieure. Dans Bande à part (1964) de J.-L. Godard, on entend ainsi comme un leitmotiv un tigre rugir pendant plusieurs scènes avant de finir par le voir paraître à l'image. <br />1903095-87630<br />I. Généralités <br />II. Codes non spécifiques <br />A) CODES PERCEPTIFS <br />B) IDENTIFICATION DES OBJETS VISUELS ET SONORES <br />C) LE CODE DU RECIT <br />III. Codes spécifiques <br />A) REMARQUES LIMINAIRES <br />B) LE MONTAGE <br />C) LES PLANS CINEMATOGRAPHIQUES <br />D) LES ANGLES DE PRISE DE VUE <br />E) CHAMP / CONTRE-CHAMP / HORS-CHAMP <br />F) EFFETS OPTIQUES <br />I. GENERALITES <br />La compréhension correcte d'un film suppose la connaissance de ces cinq langages. Cependant, il faut aussi connaître plusieurs autres codes extra-cinématographiques. En effet, le cinéma n'est pas une nouvelle langue, originale, avec des moyens propres: les films sont des réseaux structurés par une multitude de codes et une partie seulement de ces codes est proprement cinématographique. <br />On constate la souplesse du cinéma: il peut tout dire, il est très ouvert: ouvert aux modes diverses, aux symboles, aux courants culturels et idéologiques, aux influences artistiques extérieures. Le cinéma importe ainsi des signifiés qu'il emprunte à d'autres langages comme la littérature, le théâtre, le gestus social, les modes vestimentaires... <br />Celui qui veut analyser un film doit d'abord démonter l'importance de ces morceaux étrangers et, ensuite, se dégager de ces interférences codiques; en effet, on ne peut tout étudier à fond, être un spécialiste universel, être historien, sociologue, esthéticien. Le sémiologue du cinéma se limitera à un domaine de recherche; il a deux possibilités de travail : <br />le langage cinématographique, le total des traits qui sont supposés être dans les films caractéristiques du langage filmique, <br />le message total, complexe de chaque film particulier (analyse textuelle d'une oeuvre). <br />II. QUELQUES CODES NON SPECIFIQUES <br />Parmi les plus importants et les plus opératoires, relevons: <br />A) CODES PERCEPTIFS <br />Il faut prendre conscience du caractère psychologique et social de la perspective: ce n'est pas une réalité de la nature, mais un phénomène culturel, issu de la Renaissance. Le cinéma a repris à son compte la vision monoculaire et ses principes. <br />Ainsi, les figures sont étagées dans la profondeur; cet étagement est réglé par leur grandeur respective: la plus petite est la plus éloignée, la scène s'ordonnant en fonction de la place assignée à un individu. <br />L'espace au cinéma se définit aussi par rapport au cadre, c'est en fonction de lui que s'opère la distribution des éléments, des personnages. En effet, l'image est fortement composée dans le cadre, comme en peinture. Les masses, les volumes, les lignes sont organisées à l'intérieur du plan (axes verticaux, horizontaux...). <br />La structuration de l'espace se fait à partir des lois de la perspective et des exigences de la délimitation par des cadres, en reprenant l'héritage de la peinture, de la photographie. Mais on notera aussi que l'espace s'organise aussi dans le montage : en effet, le film présente l'espace, le constitue plan après plan ; l'espace se compose ainsi sur un axe syntaxique et le spectateur articule les différents éléments, reconstitue le référent fictionnel. (Note : plan ici désigne un segment de pellicule impressionnée entre l’ordre de départ de la caméra «Moteur» et l’ordre d'arrêt «Coupez», c'est donc l'unité de base du tournage du film.)<br />Ainsi, l'établissement éponyme dans Hôtel du Nord de Marcel Carné est présenté, après l'évocation du contexte du quartier, par une vue de la façade, un plan d'ensemble du rez-de-chaussée (Note : plan ici renvoie à un type de cadrage), une vue intérieure de la salle, une plongée sur l'escalier d'accès à l'étage, une vue sur le couloir, une vue exploratrice sur l'intérieur d'une chambre, un plan rapproché de la fenêtre, cadrée de l'extérieur, et la vue sur l'extérieur que l'on a depuis cette fenêtre. L'espace ainsi constitué servira en quelque manière à une sorte de huis clos. Voir une série d'images sur l'espace dans ce film.<br />L'espace peut aussi se construire à travers le regard d'une instance narrative ou celui d'un personnage qui le balaie ou l'explore : ainsi, au début de Fenêtre sur cour d'A. Hitchcock, à partir d'une fenêtre.<br />L'espace filmique est donc constitué sur un double niveau : <br />celui de l'écran, celui de la structure du film. <br /> <br />Le passage du noir et blanc à la couleur a été important. On remarquera qu'il y a plusieurs systèmes de couleurs comme il existe différents formats, tailles d'écrans. On voit nettement le côté artificiel du noir et blanc ; si la couleur est sentie comme plus naturelle, plus réelle par des spectateurs naïfs, on ne doit pas oublier qu'elle ne donne que des équivalences des vraies couleurs; selon les systèmes, il y a des nuances. Consulter une fiche sur les formats et couleurs. <br />Le noir et blanc est encore utilisé pour ses effets esthétiques, très codés, il évoque, en effet, certains genres. On pensera à son utilisation par Mel Brooks dans sa parodie du fantastique d'épouvante, Frankenstein Junior, ou encore à Woodie Allen dans certains passages de La rose pourpre du Caire. <br />Parfois, dans un film tourné en couleurs, une ou plusieurs séquences en noir et blanc sont insérées ; cela amène un décalage : il s'agit de signifier, par exemple, qu'il s'agit d'une autre époque, antérieure, d'un rêve... On identifie ainsi au procédé des archives, la logique d'une rétrospection comme dans JFK d'Oliver Stone. Cf. aussi les séquences dans l'asile pour Memento de Cristopher Nolan. Les effets recherchés peuvent être autres : voir Kill Bill de Quentin Tarantino...<br />B) IDENTIFICATION DES OBJETS VISUELS ET SONORES <br />Le décodage pertinent des objets apparus à l'écran requiert des connaissances culturelles, civilisationnelles. Par exemple, les vêtements sont des signes du niveau social, professionnel. Ils peuvent désigner une époque historique comme dans les films quot;
en costumesquot;
, avec un effet de couleur locale, spatio-temporelle. Il faut donc maîtriser des codes sociaux ou historiques extra-cinématographiques pour les entendre : des connaissances encyclopédiques, culturelles sont nécessaires pour décoder.. <br />Ainsi, un coup d'avertisseur signifie « voiture », même si on ne voit pas le véhicule à l'image. La rumeur de la circulation désigne ainsi une grande ville moderne... <br />Le cinéma peut importer tous les symbolismes attachés à des objets dans le cadre d'une société. Cf. le petit livre rouge de Mao dans la Chinoise de Godard, à la fois arme et défense.<br />C) LE CODE DU RECIT <br />On peut appliquer aux films le même type d'analyse narratologique qu'aux textes littéraires. Les instruments issus des travaux de V. Propp, de Cl. Brémond, des structuralistes etc. sont pertinents, car le cinéma a importé ses codes narratifs pour l'essentiel. Les concepts de points de vue, de focalisation, de temps de l'histoire et du récit, de syntaxe des séquences narratives... sont directement réutilisables. <br />Ainsi, cette neige tombant dans la résidence de Kane, à l'intérieur de la chambre, est «subjective». Ce n'est assurément pas la vision du narrateur mais celle du personnage : cela présuppose une focalisation interne.In Citizen Kane d'O. Welles.<br />Sans l'aide d'un magnétoscope, minimum minimorum, d'une platine DVD ou d'un ordinateur multimédia, il faut souligner la difficulté de l'étude syntaxique d'un film ou de l'analyse précise des images. Les conditions de la vision diffèrent de la lecture d’un texte littéraire et quand un film n'est pas à disposition, on ne peut pas facilement procéder à des relectures partielles ou totales, pourtant nécessaires. D'autre part, seul un arrêt sur image permet d'observer de près le décor dans une oeuvre, l'arrière-plan ou d'étudier la composition du cadre, les effets de lumière... <br />Avant les temps du scope, les retours en arrière comparatifs n'étaient pas aisés et le spectateur était pris dans le déroulement mécanique de la projection ; l'analyse était gênée par les contraintes du temps filmique (1h 30...). Depuis que l'on dispose aisément d'un magnétoscope, plus accessible qu’une visionneuse, les conditions de réception pour analyse ont bien changé ; il faut cependant garder à l'esprit que le spectateur ordinaire dans une salle de cinéma ne peut pas décortiquer un film lors de sa consommation / réception. Cela a certes déjà un impact sur la perception des effets spéciaux, des trucages comme de certains plans très brefs aux limites du perceptible : depuis le Napoléon d’Abel Gance jusqu’à Matrix, l’analyse dégage l’existence de plans de l’ordre de quelques photogrammes, d’une durée voisine de la seconde.La critique a souvent constaté autrefois que le texte filmique ne pouvait être traité comme une oeuvre littéraire écrite, donc à disposition. On peut imaginer combien la possibilité de revoir ad libitum un film sur un scope a transformé et amélioré le travail d'observation nécessaire à une analyse sérieuse, raisonnée. L’arrivée des lecteurs de DVD a encore enrichi les possibilités du regard et de la réflexion critiques.<br />Pour mener à bien une analyse filmologique, il faut sans doute d'abord regarder le film dans sa continuité au moins deux fois ; il convient de prendre des notes et d'avoir recours ensuite au magnétoscope ou mieux au lecteur de DVD comme outil d'analyse. Le DVD possède alors des avantages incontournables : il permet des retours en arrière faciles, et par là la confrontation de passages ; il facilite l’arrêt sur image puis la reprise instantanée de la lecture ; il offre le ralenti ou la lecture accélérée qui aide à la recherche de plans ; l’usage du chapitrage permet enfin des lectures sélectives... Sur un plan linguistique, pour un film étranger, on peut choisir la bande son d'origine (VO relayée ou non à la demande de sous-titres) ou la version française.L'usage d'un ordinateur avec un moniteur de grande dimension donne encore plus d’efficacité en termes de production pour une analyse, car on peut ainsi basculer instantanément des images filmiques à un traitement de texte pour prendre des notes, rédiger un brouillon d'analyse ou encore passer dans un navigateur Web pour chercher des informations sur l’Internet. On peut également faire des captures d'écran et isoler des photogrammes permettant de construire et illustrer un découpage de séquence en plans... La possibilité de placer des signets personnels est aussi très intéressante dans la phase d'analyse et de repérage ; la plupart des logiciels lecteurs de DVD permettent ainsi de repérer instantanément une séquence, un plan et d'y accéder ensuite d’un simple clic de souris.<br />On remarquera qu'au cinéma, sur un plan quantitatif, la fiction narrative prédomine. Très vite, le cinéma, avec Georges Méliès en 1896, a adopté la narrativité et les codes du récit. A ses origines, les frères Lumière, en 1895, le concevaient plutôt comme un moyen d'archiver des informations, de pratiquer le journalisme, de constituer des documents divers, voire comme un auxiliaire pédagogique. Peu de Vues Lumière, plans fixes de moins d'une minute, tournés souvent en lumière extérieure naturelle, relèvent ainsi du narratif et / ou de la fiction pure comme « l'Arroseur arrosé », un des premiers gags cinématographiques. Souvent, elles nous semblent proposer des vues documentaires, des actualités, des souvenirs personnels, l'esquisse d'une forme de publicité... On se gardera toutefois de croire à l'aspect authentiquement , naïvement quot;
documentairequot;
 de certaines vues ; ainsi même «la sortie des usines Lumière» n'a rien de vraiment spontané.Georges Méliès, quant à lui, est vite passé du filmage d'un spectacle de music-hall ou d'un gag reposant sur l'exploitation de la technique cinématographique, cf. Un homme de têtes en 1898, à une écriture narrative, créative comme dans le Voyage dans la lune en 1902. Aujourd'hui, le cinéma est bien la première machine à raconter des histoires ; les genres non narratifs, non fictifs sont marginaux.<br />Le cinéma a rencontré la nécessité de se constituer une rhétorique, un système narratif avant de devenir une machine efficace pour narrer. Les premiers films narratifs ont emprunté leurs récits à des images immobiles (B.D., reproductions de journaux à sensation), à des thèmes de chansons populaires, à des romans et des pièces à quatre sous. Dès le départ, le cinéma a été populaire et a touché un grand public, au grand dam de certains intellectuels. <br />Les premières oeuvres furent brèves (historiettes), puis elles s'allongèrent sur le modèle du théâtre mélodramatique ; au départ on avait en quelque sorte du théâtre filmé, souvent frontalement — même si les Vues Lumière avaient adopté fréquemment un angle oblique— la scène étant souvent cadrée dans un plan d'ensemble ; une esthétique du tableau, au sens du terme au théâtre ou au music-hall, domina ainsi à la suite de G. Méliès, de Ferdinand Zecca etc. mais l'évolution et la séparation furent rapides. Par la suite, les romans classiques du XIX ème constituèrent une source fertile d'inspiration. Les courses poursuites, souvent burlesques, amenèrent à inventer : les personnages traversant un espace complexe, les lieux devaient se succéder, s'enchaîner et les plans pouvaient alterner entre le(s) chasseur(s) et le(s) personnage(s) poursuivi(s), cela donnant un effet de rythme. Cf. quot;
La course des sergents de villequot;
 de F. Zecca en 1907, premier exemple historique du genre. <br />Pour obtenir la crédibilité romanesque, le film a dû aussi montrer de près, d'où la constitution de procédés spécifiques, en liaison étroite avec les possibilité et conditions techniques. Par exemple, en France, c'est Abel Gance, après Griffith, qui utilisa pour la première fois les gros plans sur des visages ; son producteur le crut fou. <br />C.T. Dreyer dans sa Passion de Jeanne d'Arc, en 1928, utilisa systématiquement ces gros plans expressifs. F.W. Murnau utilisa pour sa part la caméra mobile dans Le Dernier des Hommes, en 1924. Jeanne (Falconetti) vue par DreyerIdem Dreyer. Pendant longtemps le manque de  souplesse, l'impossibilité de changer d'angle, de grosseur de plan ont été des obstacles; parallèlement aux moyens techniques, la rhétorique s'est aussi perfectionnée et le public s'est habitué. Citizen Kane.Idem Citizen Kane.<br />Ascenseur en mouvement et changement d'angles de vue dans Le Dernier des Hommes.<br />F.-W. Murnau dans son film de 1924 (Der Letzte Mann) utilise ainsi une caméra mobile; dans les premiers plans de l'oeuvre, nous découvrons le contexte avec une caméra placée dans l'ascenseur de l'hôtel ; elle explore ensuite le hall du palace dans un travelling avant pour arriver sur le portier à l'entrée. Le procédé va s'imposer et gagner rapidement Hollywood. Ce film innova beaucoup et se caractérisa encore par un refus significatif des intertitres ou cartons, la narration filmique devenant essentiellement visuelle, et non plus scripto-visuelle.Déjà, en 1896, un opérateur des frères Lumière, Alexandre Promio, avait eu l'idée de placer une caméra dans une gondole à Venise ; même si la prise de vues restait fixe, le déplacement de la gondole permit une vue «panoramique» sur le grand canal et donna le premier travelling de l'histoire du cinéma. Cf. Jean Mitry, Histoire du cinéma… <br />III. CODES SPECIFIQUES AU CINEMA <br />A) REMARQUES LIMINAIRES <br />La liste des codes propres au cinéma est encore à établir, à compléter; elle constitue déjà une rhétorique complexe, plus ou moins bien définie et analysée. <br />Relevons parmi les éléments déjà répertoriés: <br />- le code de montage, - le code des mouvements d'appareil, - le code de variation d'échelle de plans, - le code des changements d'angle de prise de vue, - le code des effets optiques. <br />Dans cette analyse on peut revenir au découpage en unités minimales de signification. Ainsi, on peut commuter en bloc le travelling avant avec le travelling arrière. Le montage alterné (A/B/A/B) signifie que les événements représentés sont simultanés dans la fiction. A la différence de la langue, ces éléments n'ont pas un sens fixe, univoque: le travelling peut aussi bien signifier l'introspection que la découverte d'un paysage nouveau; cela dépend du contexte. La plongée traduira une impression d'écrasement ou permettra simplement une meilleure vision de la scène. Ce sont d'abord des moyens au service d'une intention. <br />Les effets optiques (fondu par exemple) constituent un cas particulier: des modifications sont apportées à l'image; souvent ils marquent une transition extradiégétique, une intervention du cinéaste dans le récit. <br />B) LE MONTAGE <br />Le cinéma est un art de la combinaison, de l'agencement; c'est là qu'intervient le montage, tâche de spécialiste, de technicien, pas forcément réalisé par le cinéaste.Le principe du montage narratif a été inventé par E.S. Porter pour son film The Great Train robbery, en 1903. Voir une fiche sur ce western et les différentes scènes le composant. Dans La Vie d'un Pompier américain en 1903 Porter avait réalisé un film innovant, déjà complexe, même si les principes du montage narratif n'étaient pas encore aussi sophistiqués.Très vite Griffith ou les cinéastes soviétiques comprennent l'importance esthétique ou narrative du montage, son potentiel ; la célébration du travail de montage par D. Vertov en 1929 dans l'Homme à la caméra témoigne de cette prise de conscience.Si le montage est réalisé par des techniciens experts, il ne faut pas en conclure naïvement qu'il se limite à une pure et simple opération technique; en effet, il convient plutôt d'y voir un principe cinématographique essentiel car ce travail régit l'organisation des divers éléments filmiques en employant des procédés techniques, mis au service d'intentions narratives. Les effets qu'il mobilise pour l'image et la bande son (liaison, symétrie, rupture, contrepoint, enchaînement linéaire ou non, ponctuation des plans, alternance de point de vue...) sont d'ordre syntaxique, rythmique mais aussi sémantique et esthétique. Le montage est par là même un aspect essentiel de la construction/ production du sens d'un film; il donne sens aux images et aux sons, il donne forme à une esthétique. Il est un élément constituant de la textualité filmique (étymologiquement, le texte est aussi un tissu !).<br />1. Le montage comme travail <br />Le processus de fabrication d'un film est complexe : <br />- scénario (inventé ou élaboré à partir d'un texte littéraire...) - découpage du scénario en unités d'action; ces unités seront découpées en unités de tournage (plans) - les plans sont filmés en différentes prises de vue, pas forcément selon un ordre logique, (plusieurs caméras tournent en même temps; on recommence x fois...) - l'ensemble des plans est mis bout à bout (rushes) et ils sont visionnés : <br />1) sélection des meilleures prises de vue; les autres constituent les quot;
chutesquot;
, 2) assemblage bout à bout des bonnes prises : cela constitue l'ours, 3) détermination exacte de la longueur des plans et assemblage précis avec raccords.<br />NB Parfois le cinéma donne à voir à ses spectateurs le processus de fabrication, d'écriture du film : ainsi fait Orson Welles dans la Splendeur des Amberson. <br />2. Le rôle des raccords <br />Les raccords sont importants car ils enchaînent les plans et donnent l'impression de continuité du film. « Raccorder, c’est faire en sorte, comme le terme l’indique, que le cut ne soit pas ressenti comme une rupture définitive et radicale, mais comme l’occasion d’une couture, qui permet d’assembler des morceaux différents avec la plus grande discrétion. Il s’agit de camoufler la césure, d’en effacer l’impression, tout en conservant la qualité d’articulation qui est au principe des changements de plan.»Vincent Amiel, Esthétique du montage, Paris, Nathan, 2001. <br />Voici un bref inventaire de quelques procédés de base dans cette opération de couture : <br /> <br />- raccord sur un regard: un personnage regarde un objet, souvent hors-champ, dans le plan n°1; dans le plan suivant, on montre l'objet de ce regard. - raccord de mouvement: un mouvement doté d'une vitesse et d'une direction donnée est répété dans un deuxième plan, par deux personnages éventuellement. - raccord sur un geste: un geste est commencé dans un plan, achevé dans le plan n°2. - raccord dans l'axe: deux moments successifs d'un même événement sont traités en deux plans, mais la caméra s'est rapprochée ou éloignée pour le plan n°2. - raccord champ contre-champ. <br />Gervaise de René Clément : conversation entre Gervaise et Mme Boche. Raccord sur le regard et croisement des points de vue.<br />Les raccords jouent aussi bien sur l'image que sur le son. Le raccord sur ou par le son ou encore «raccord son» (voix, bruit, musique) fait ainsi entendre vers la fin d'un plan un bruit présent au début du plan suivant. Le raccord peut se faire par la parole, sur un mot employé dans le discours d'un personnage (il parle de quelque chose, on voit ensuite ce quelque chose...); on peut entendre dans un plan la voix, le cri d'un personnage qu'on découvre dans le plan suivant (La Nuit du Chasseur de Ch. Laughton en 1955). Le raccord peut aussi se faire sur ou par la musique. Celle-ci peut alors changer de statut, comme dans Short Cuts de Robert Altman, en 1993 : d'intradiégétique, produite par un personnage dans le monde de la fiction, elle devient au plan suivant accompagnement, (presque) musique off qui tisse un lien entre les plans des diverses séquences qui se croisent et souligne une atmosphère. <br />Le raccord cut est une option fréquente de montage : c'est une coupe franche, un passage brusque d'un plan à un autre sans aucun effet optique, sans ponctuation.Le jump cut est une technique de montage moderne marqué, provoquant une sorte de saut visuel, juxtaposant deux moments différents. A l'intérieur même d'un plan, on a supprimé quelques images, un fragment pour garder seulement le début et la fin; ces deux moments sont liés par un simple cut. Ainsi, par exemple, un personnage après cette coupe se retrouve propulsé à un autre endroit du cadre. Voir aussi dans A bout de souffle l'usage de J.-L. Godard. On pourrait percevoir le quot;
jump cutquot;
 comme un plan syncopé. <br />Le faux raccord repose, volontairement ou non, sur un effet de discontinuité obtenu par la mise en évidence du changement de plan. <br />3. Les tables de montage et les catégories <br />Le montage, au sens strict, est «l'organisation des plans du film dans certaines conditions d'ordre ou de durée», selon Marcel Martin. Techniquement, le montage consiste à assembler les nombreux plans selon un ordre logique. En effet, lors du tournage, les différents plans ont été souvent enregistrés dans un certain désordre. Il s'agit alors de les assembler selon un ordre prévu par le réalisateur, plus ou moins complètement au préalable.Plus largement, le montage constitue le principe qui régit l'organisation des éléments filmiques visuels ou sonores, l'assemblage de tels éléments, par leur juxtaposition, leur enchaînement, le réglage de leur durée. <br />La première fonction du montage est narrative : il va assurer la liaison syntaxique des différents éléments de l'action selon un rapport général de causalité, de temporalité diégétique. La deuxième fonction est expressive, d'ordre sémantique ou esthétique ; alors le montage vise à exprimer par la rencontre ou le choc de deux images un sentiment, une idée. Une autre fonction importante est d'ordre rythmique, souvent alors en liaison avec la bande sonore, la musique, <br />Il existe plusieurs sortes de montages qui renvoient à des tables de montage, des grilles empiriques, d'origine pratique : <br />- Poudovkine : antithèse/ parallélisme/ analogie/ synchronisme/ leitmotiv (les séquences sont organisées selon un thème). <br />- Balazs : idéologique/ métaphorique/ poétique/ allégorique/ intellectuel/ rythmique/ formel/ subjectif. <br /> Les montages linéaire, alterné, parallèle correspondent à divers types de construction séquentielle, différents assemblages des segments du film. <br />- Le montage alterné : le montage instaure une relation de simultanéité entre les séries. <br />A / B / A / B <br />Ce montage fait alterner deux séries d’événements se déroulant dans des espaces différents mais dans le même segment de temps. Dans ce type de montage, on fait alterner au moins deux situations qui ont un rapport direct à la même histoire. Ce montage accentue la convergence et amplifie le suspense : l'exemple canonique est celui du sauveur qui vient au secours de la victime ; on passe alternativement du héros qui s'en vient à la victime... <br />Quelques images de La télégraphiste de Lonedale, The Lonedale Operator, de David Wark Griffith en 1911 : prisonnière d'un groupe de bandits qui a voulu voler la paie des employés du train, dans une gare isolée, une jeune fille appelle son fiancé à la rescousse par le télégraphe. Celui-ci arrive par le train, à temps ! Une part essentielle du film repose sur la logique d'un contre la montre. <br />- Le montage linéaire : les séquences s'enchaînent selon une progression purement, strictement chronologique. Il existe un montage flash-back ou montage inversé avec rétrospection comme dans la littérature narrative. Le montage classique présente une histoire de façon chronologique ou linéaire (début , milieu, fin), sans jouer sur la chronologie. Ce type de montage se concentre ainsi sur une seule action à la fois. A => B => C => D - Le montage parallèle correspond à une thématique. Il fait alterner deux ou plusieurs séries d’événements présentant des similitudes ou comportant des relations logiques, mais ne se situant pas nécessairement dans le même segment temporel. D.W. Griffith dans Intolérance, en 1916, l'utilise avec des parallèles de séquences entières pour montrer l'identité, sur un mode analogique, de l'intolérance au cours des périodes historiques. Le cinéaste avait déjà exploré le procédé en 1909 dans Les Spéculateurs, A Corner in wheat, réflexion sur le capitalisme où il oppose le luxe des spéculateurs en grain à la pauvreté des gens du peuple. Ce montage contrasté permet de porter un regard accusateur; il prend une fonction argumentative. Voir un découpage des Spéculateurs. A // B // C // D Corner in wheat: réception du magnat qui fête son succès sur le marché.En écho : les conséquences pour le peuple, accablé par la hausse des prix du pain. Les conséquences de la spéculation frappent le peuple des campagnes...comme les pauvres des villes. Le parallèle est appuyé. Intolérance est essentiellement construit sur des montages parallèles, unissant des actions se déroulant à quatre époques et en dix lieux différents. Les quatre récits d'abord présentés séparément, vont s'enchaîner les uns à la suite des autres, selon un rythme de plus en plus rapide.<br />I. Amérique contemporaine :II. Palestine  antique :Episode moderne : après une grève durement réprimée par un industriel poussé par sa soeur, un jeune garçon va vivre en ville où il épouse sa bien-aimée et fréquente des vauriens...Le conflit de Jésus avec les Pharisiens et avec Rome.III.  France du XVI ème :IV. Babylone, en 539 avant Jésus-Christ :Une jeune huguenote et son fiancé arrivent à Paris où Charles IX et Catherine de Médicis préparent la Saint-Barthélémy; ils seront massacrés.Les prêtres de Baal, aidés d'un rhapsode, conspirent contre Balthazar, prince tolérant. Au cours d'un festin fastueux les troupes de Cyrus envahissent Babylone...<br />Intolérance, dont le sous-titre est Love's Struggle through the Ages, mêle ainsi quatre histoires «coulant d'abord comme des fleuves majestueux, puis se mélangeant comme des torrents impétueux». Le montage parallèle est généralisé à la construction d'ensemble. On observera d'après ces photogrammes que Griffith a fait teinter avec 4 couleurs différentes les périodes pour les typer en quelque sorte : l'histoire moderne est ambrée, l'épisode évangélique est en bleu... On pourrait presque parler cum grano salis de couleur locale. <br />D'autres types de montages peuvent aussi être évoqués : <br />- Montage inversé : ce montage fait voyager dans le temps, passé ou futur. On suit une situation puis, par un flash back, un plan, une scène vient nous raconter ce qui s'est passé avant. Ce jeu présent /passé /présent vient souvent aider à la compréhension d'une situation, d'un personnage. <br />- Montage analytique : ici, l'action est découpée, décortiquer en une foule de plans différents. On en fait ressortir ainsi toutes les facettes, tous les détails. Cette façon de décomposer permet au spectateur de mieux analyser une situation. <br />- Montage synthétique : ce montage complexifie les plans pour leur donner un haut degré de signification. Cette façon de procéder favorise les ellipses, ce qui reste non-dit. <br />- Montage à leitmotiv : ce montage fait appel à la répétition de certains plans significatifs. Ces motifs qui reviennent tout au long du film rappellent ainsi le refrain d'une chanson. On emploie ce type de montage autant dans le cinéma de propagande politique — le plan répété devient un slogan — que dans des comédies où la répétition du gag devient un mécanisme essentiel du rire (cf. Bergson). <br />Serguei M. Eisenstein a distingué dans Méthodes de Montage (article de 1929) plusieurs principes de montage : 1. Le montage métrique qui se fonde sur la longueur absolue d'un plan. «Les images sont montées en fonction de leur longueur, selon un schéma structurel correspondant à une mesure musicale.» Ce montage ne prend pas en compte le contenu de l'image, la substance du cadre. Exemple : un pied (unité de mesure) d'un plan A est suivi de deux pieds d'un plan B, puis un pied de A', suivi de deux de B', et ainsi de suite...On peut trouver de tels montages également chez D. Vertov, dans L'Homme à la caméra, avec un travail de synchronisation entre la bande son et l'image, morcelée en petits fragments, pour traduire l'expérience de la ville et la vitesse.2. Le montage rythmique qui fonctionne sur le rythme de l'enchaînement des plans : exemple canonique de la séquence des escaliers d'Odessa dans le Potemkine (1925). Ce montage va un peu plus loin que le montage métrique car on prend en compte le mouvement à l'intérieur du cadre et la composition de l'image. Avec la sonorisation du cinéma, le montage rythmique a bien sûr joué aussi des éléments auditifs: sons, musique, paroles. 3. Le montage tonal fondé sur le sens émotionnel des séquences ; il se fait d'après des dominantes et le conflit rythme/ dominante. Exemple : la séquence du deuil à Odessa lors de l'hommage funèbre rendu au marin Vakoulinchouk, «tué pour une assiette de soupe» dans le Potemkine.4. Le montage overtonal ou harmonique, qui résulte du conflit entre le ton dominant d'une séquence et ses harmoniques, il travaille l'harmonie mélodique de l'enchaînement des plans ; ce montage est fondé sur la perception physiologique du corps. Il cumule et associe les procédés des trois précédents types. Exemple: la fin de La Mère (1925) de Vsevolod Poudovkine.5. Le montage intellectuel ou idéologique, fondé sur le contenu symbolique produit par deux ou plusieurs images enchaînées, qui relève d'une démarche dialectique. Le sens naît de la juxtaposition des plans. Voir la séquence dite des dieux dans Octobre (1927) ou un peu avant la fin du film La Grève (1924) la séquence alternant brutalement des images d'abattage de bestiaux et d'affrontements sanglants entre ouvriers grévistes et forces de l'ordre. Cette mise en série d'images juxtaposées est perçue sur le mode de la comparaison; on entend ensuite par là le propos : «Les prolétaires sont traités comme du bétail, perdant leur humanité et massacrés bestialement.»  Ce montage dialectique, conceptualisé par Eisenstein, est mis en oeuvre par le cinéma soviétique dans les années 1920 -30. Pour le cinéaste russe, de deux plans peut surgir une nouvelle et troisième idée ; la notion dynamique de conflit, nodale, est empruntée à la dialectique hégélienne puis marxiste; pour les philosophes de l'Histoire au XIXème l'histoire avance en effet au fur et à mesure des conflits. Eisenstein s'inscrit dans cette logique en privilégiant l'art de la collision. L'exemple de la Grève emprunte à deux domaines éloignés, hétérogènes a priori: comme dans l'image surréaliste selon Pierre Reverdy (1918) plus la distance entre les deux termes associés est grande, plus l'effet chez le spectateur est fort, sur le plan logique et émotionnel. « L'image est une création pure de l'esprit. Elle ne peut naître d'une comparaison mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées. »« Le montage est l'art d'exprimer ou de signifier par le rapport de deux plans juxtaposés de telle sorte que cette juxtaposition fasse naître l'idée ou exprime quelque chose qui n'est contenu dans aucun des deux plans pris séparément. L'ensemble est supérieur à la somme des parties. » S. M. Eisenstein s'inscrit ainsi clairement dans la ligne de Koulechov. 1 + 1 = 3 ?Le cinéaste travaille alors la relation réciproque des scènes ou plutôt des fragments juxtaposés et il met en scène une lutte entre des principes opposés. Dans le Cuirassé Potemkine, 1925, par exemple, Eisenstein met en lumière par le biais du montage les antagonismes ou tensions qui déboucheront sur le conflit. Voir ici le chapitre Langages et codes sur le lorgnon du Dr Smirnov. En effet, le cinéma d'Eisenstein ne cherche pas tant à décrire le réel qu'à le révéler : c'est là le rôle didactique du montage. Tout art, et donc le cinéma, doit servir un projet politique, social et pédagogique : engagé, il s'adresse aux masses populaires pour leur faire comprendre le réel, en le décryptant. <br />4. Montage interne à l'image <br />a- Split screen ou écran partagé <br />Le split screen, est une forme de montage, dans un sens plus large du terme, mais sur / dans le plan de l'image. Cet effet cinématographique consiste à diviser l'écran en plusieurs fenêtres, à le partager en deux, trois parties ou plus ; chacune d'elles présente alors soit une scène différente, soit une autre perspective sur le même événement, dans une sorte d'effet stéréoscopique ou dans la recherche d'une vision plus complexe du réel. <br />Généralement, l'action présentée dans les fenêtres est synchronisée ; il s'agit de permettre aux spectateurs de suivre diverses actions simultanées ou de bénéficier de plusieurs points de vue en parallèle sur une même scène. Les scènes de dialogue à distance (téléphone...) en quot;
écran partagéquot;
 sont fréquentes, y compris dans les téléfilms.On peut trouver des exemples préfigurateurs de ce procédé dès le Napoléon d'Abel Gance, en 1926, qui utilise trois volets simultanés, tournés avec trois caméras et destinés à être projetés simultanément sur trois écrans; mais chez Gance le procédé du triptyque va plus loin.<br />Napoléon d'Abel Gance : découpage en triptyque de l'écran (1926).<br />Chez Abel Gance, outre l'apport spectaculaire d'une image trois fois plus large, la juxtaposition ou polyvision — cette appellation est de Gance — permet des effets d'écriture variés dans un registre épico-lyrique : la même image peut ainsi se répéter en écho sur les trois écrans ; on peut aussi avoir trois points de vue sur la même scène comme dans un split screen ; on peut enfin avoir une symétrie par inversion des images latérales. « La partie centrale du triptyque, c'est de la prose et les deux parties latérales sont de la poésie, le tout s'appelant du cinéma. » <br />Il est connu que Brian de Palma affectionne cette technique comme en atteste Phantom of Paradise en 1974.<br />Winslow, le fantôme, pendant la répétition du spectacle au Paradise, a posé une bombe dans une voiture qui sert d'accessoire. Elle explose sous les yeux du diabolique propriétaire. La séquence montée en split screen évoque en référence, pour lui rendre hommage, La Soif du Mal, Touch of Evil, d'Orson Welles (1958).<br />Quelquefois, certains cinéastes, comme A. Hitchcock dans ces images de Pas de printemps pour Marnie, découpent quot;
naturellementquot;
 l'espace dans la même image en deux parties, juxtaposées, qui semblent comme indépendantes ; les personnages ne se voient pas et évoluent ainsi dans deux espaces qui s'ignorent, séparés par une cloison, celle du bureau ou celle du couloir. Le spectateur, quant à lui, a une perspective d'ensemble : sans parler d'omniscience, il en voit / sait plus que chaque personnage, pris séparément. <br />On trouve d'autres exemples de split screen naturel chez Jacques Tati dans Playtime, en 70 mm. <br /> <br />b- Montage interne et profondeur de champ<br />Voir infra à Effets Optiques les commentaires sur le travail d'O. Welles en ce domaine, dans Citizen Kane ou les Amberson.<br />Welles mobilise la profondeur de champ dans des séquences où la caméra reste fixe : ce sont les personnages qui bougent dans le cadre et qui y occupent des places variables. Le spectateur prend alors un rôle actif: c'est à lui de voir ce qui se passe dans les divers plans (en profondeur) de l'image, à lui de trier, puis lier les informations;Welles étage ses informations sur deux ou trois plans qu'il faut mettre en relation.<br /> <br />C) LES PLANS CINEMATOGRAPHIQUES <br />Le plan est une unité de base dans le cinéma : c'est un morceau de pellicule, sélectionné au montage, correspondant à une prise de vue de la caméra, effectuée sans interruption. On peut ordonner les plans en fonction de différents critères, selon : <br />- la grosseur, - la mobilité, - la durée ou encore- l'angle de prise de vue. <br />1) GROSSEUR DES PLANS <br />On définit traditionnellement plusieurs tailles de plans en fonction des divers cadrages possibles d'un personnage, d'un sujet, en rapport avec l'éloignement de l'objectif et du sujet. <br />Voici un classement selon une échelle des plans classique : <br />- plan général- plan américain  - plan d'ensemble  - plan rapproché  - plan de demi-ensemble ou de petit ensemble- gros plan, insert  - plan moyen  - très gros plan.<br />Dès les premières vues Lumière en 1895, l'intérêt des diverses valeurs de cadre a été perçu : voir l'Arrivée d'un train en gare de la Ciotat. <br /> <br />Le plan général et d'ensemble permettent de situer un lieu, de présenter, d'embrasser tout un décor; ils suggèrent souvent une ambiance (pluie), un moment (nuit). NB Les exemples proposés ici sont tous tirés de Pas de printemps pour Marnie d'Alfred Hitchcock, 1964.- Le plan général situe la totalité des décors et, de la façon la plus large possible : il est strictement d'ordre descriptif. Il est particulièrement intéressant pour montrer un grand espace, extérieur souvent, comme dans les westerns.- Le plan d'ensemble établit de façon plus précise le décor, le lieu de l'action ; il constitue déjà un choix. Dans ce type de cadrage, on peut retrouver des personnages mais ils sont perdus dans le décor : c'est donc encore un plan d'ordre descriptif. Dans le plan de demi-ensemble, le décor est réduit par rapport au plan d'ensemble; souvent, les personnages sont groupés; ils sont plus importants que le décor : ce plan situe ainsi les personnages dans leur décor. <br />Le plan moyen permet de montrer des groupes de personnages, en coupant le décor autour d'eux; on montre leurs occupations... Ce plan cadre un ou des personnages en entier, des pieds à la tête, en référence à un adulte debout. A partir de ce cadrage, l'action a prédominance sur le décor : ce plan est plutôt d'ordre narratif, l'aspect descriptif devenant secondaire.<br /> <br />Le plan américain, voisin du plan italien, coupe les personnages plus bas que la ceinture : il les isole à mi-cuisse ; on voit donc ainsi souvent leurs mains. Ce plan tirerait son appellation des westerns : on y cadre souvent les cowboys de la tête aux revolvers colts. Ce type de cadrage est usité lors de scènes de discussion entre deux personnages ; ce procédé prend ainsi une valeur dramatique.<br /> <br />Le plan rapproché permet l'approche d'un groupe, montre un acteur en buste; on s'intéresse à son jeu, ses mimiques, ses réactions.  On fixe alors l'attention sur un personnage ; l'action est donc moins importante que la psychologie du personnage. Ce cadrage est souvent utilisé pour les conversations ; il relève d'une valeur dramatique;On peut distinguer dans les plans rapprochés, selon la coupe, le plan poitrine, le plan taille et le plan épaule.<br /> <br />Le gros plan peut montrer en détail un visage, détailler un objet. Il a une grande capacité de renseignement, un pouvoir suggestif : c'est un plan très puissant parce que très concentré.  Il a évidemment une valeur dramatique et essentiellement psychologique : «Il constitue un des apports les plus prestigieux du cinéma. (...) C'est dans le gros plan du visage humain que se manifeste le mieux la puissance de signification psychologique et dramatique du film. La caméra sait fouiller les visages, y faire lire les drames les plus intimes.» Marcel Martin, Le langage cinématographique, 1962.Le très gros plan ou  plan serré peut focaliser sur les lèvres, les yeux d'un personnage ou sur un bouton de commande, un objet etc. Il peut donner une acuité monstrueuse, créer une tension. Il isole souvent un détail du corps ou du visage qui prend une importance dramatique. Il peut encore provoquer un effet de suspense; si l'on ne montre que la bouche d'une personne au téléphone : on tait ainsi son identité provisoirement....L'insert, stricto sensu, est un plan qui, comme l'indique l'étymologie, est tourné séparément pour être intercalé, quot;
inséréquot;
 ensuite lors du montage. Il montre en gros plan un objet ou un détail : il sert à désigner un élément de l'action susceptible de prendre une importance dramatique ; les inserts représentent aussi fréquemment des documents : lettres, livres, journaux... Souvent le terme d'insert est assimilé de façon réductrice au gros plan, voire au plan de coupe qui est un plan de brève durée inséré au montage pour assembler deux plans qui ne se raccordent pas parfaitement. Travail de classement à faire sur une série d'images de la Nuit du Chasseur.<br />Voici un schéma représentant les lignes de découpe possibles d'un personnage, dans une échelle classique des plans.<br />Un exemple possible de montage des plans donné en exemple. Cette série d'images assemblées constitue une séquence, une unité sémantique : on suit la promenade d'une jeune femme sur un quai. La séquence correspond à une unité narrative ; elle se constitue d'une série de plans ou de scènes qui forme un tout et qui raconte une histoire, un moment d'une histoire.<br />Exemple d'usage des plans par Renoir dans une séquence de la Règle du Jeu, 1939 <br />Jean Renoir se rapproche dans cette scène de plus en plus de ses personnages : plan d'ensemble avec un arrière plan très net (on voit nettement ici, à travers la fenêtre, le palais de Chaillot, le Trocadéro à l'arrière plan qui authentifie le cadre), puis plans américains, ensuite plans rapprochés et enfin gros plan. <br />2) EN TERME DE MOBILITE <br />On peut opposer le plan fixe aux différents types de mouvement d'appareil, y compris le zoom. <br />- Le panoramique <br />C'est le balayage par l'axe optique de la caméra d'un angle, sans bouger l'appareil de place.Un panoramique pertinent part souvent d'un élément intéressant pour aller vers quelque chose d'encore plus intéressant... <br />On peut classer les panoramiques en fonction de l'angle de déplacement du rayon visuel de la caméra. <br />- panoramique horizontal: <---> un paysage est présenté d'un point de vue élevé.  - panoramique vertical: | on regarde un monument élevé, un personnage est montré des pieds à la tête.  - panoramique oblique / on suit l'envol d'un oiseau, la descente d'un skieur.  - panoramique brisé : la trajectoire suit plusieurs plans, elle peut être fantaisiste; on présente ainsi les recoins d'un décor, le déplacement hésitant d'une personne.<br />On pourrait aussi les classer en fonction du résultat recherché : <br />- Le panoramique d'exploration, en général plutôt lent, montre tous les détails d'un décor. Il prend souvent par sa fonction descriptive un rôle introductif, permettant la découverte d'un espace....  - Le panoramique d'accompagnement suit un sujet en mouvement, l'image est centrée sur lui pour concentrer l'attention.  - Le panoramique rapide, de balayage permet de réunir deux sujets liés, sans coupure visuelle, rapidement.<br />  <br />- Le travelling <br />Le travelling implique un déplacement de la caméra dans l'espace; elle est souvent placée sur un chariot qui se déplace sur des rails (dolly...), sur / dans une voiture, avec une Louma... (La Louma est une grue légère, montée sur chariot, dotée d'un bras télescopique portant une caméra sur pivot mobile. Le cadrage ou la mise au point sont réglés à distance via une télécommande et on contrôle sur un moniteur.)On peut distinguer : <br />- le travelling latéral : vertical avec une caméra dans un ascenseur, par exemple, qui se déplace de haut en bas; horizontal avec la caméra dans une voiture, un train ou des rails en studio, elle se déplace de gauche à droite. Le rayon visuel de la caméra se déplace parallèlement à l'objet, la caméra étant fixe à bord d'un engin mobile. Cf. les galopades des westerns. <br />- le travelling dans l'axe optique : la caméra se déplace dans l'axe de son rayon visuel, soit en s'éloignant ou se rapprochant du sujet fixe. <br />On parle de travelling avant et de travelling arrière. En prise de vue continue on passe d'un type de plan à un autre: du plan général au gros plan, par exemple; dans ce cas on a un travelling avant d'approche. <br />  <br />- travelling d'accompagnement, travelling d'exploration: technique analogue à celle du panoramique d'accompagnement. <br /> <br />- Le pano-travelling <br />Il résulte de la combinaison d'un panoramique et d'un travelling ; souvent il est réalisé à l'aide d'une grue. <br />- Le zoom <br />Au sens strict, il désigne un type d'objectif spécial à focale variable; sans bouger la caméra de place, il permet d'obtenir des effets de travelling dans l'axe, avant ou arrière. On peut considérer le zoom comme un travelling optique. Alors que le travelling amène un changement de perspective, lié au déplacement de la caméra, le zoom se contente de jouer sur le grossissement de l'image. <br />Usage du zoom pour dégager un personnage de la foule.Le Syndrome de Stendhal de Dario Argento, 1993.<br />3) EN TERME DE DUREE <br />Les plans, unités de montage, peuvent être très brefs (1 seconde), ou plus ou moins longs (x minutes). On arrive au plan-séquence quand un plan est suffisamment long pour contenir l'équivalent événementiel d'une séquence, c.a.d. un enchaînement, une suite logique d'événements distincts. La signification d'un plan simple est perçue rapidement; dans le cas d'un gros plan, deux secondes suffisent. Si le plan est touffu, s'il y a plusieurs personnages, objets, la présence à l'écran doit être nécessairement plus longue. Ainsi, dix secondes semblent utiles pour un plan d'ensemble fixe. <br />Le temps de perception est inversement proportionnel à la grosseur de l'image.<br />D) LES ANGLES DE PRISE DE VUE <br />La prise de vue, la visée, peut se faire selon des angles et des axes variés.  On peut distinguer, selon l'angle formé par l’axe de la caméra et le sol, trois grands types d'angles : 1- vue dans l'axe de l'objectif, sur un plan horizontal : la caméra est à hauteur d'oeil, c'est le cas, non marqué, ordinaire. Certains cinéastes jouent subtilement sur la hauteur de la caméra : le Japonais Yasujiro Ozu a ainsi filmé « au niveau des tatamis » en plaçant la caméra très bas, presque au niveau du sol pour s'adapter à l'ameublement oriental ; cf. le Voyage à Tokyo en 1953 ci-contre et une photographie du tournage de Riz au thé vert en 1952.2- vue en plongée : l'axe optique de la caméra est dirigé vers le bas, très penché éventuellement. On quot;
dominequot;
 le spectacle, on écrase le sujet filmé, on l'amenuise potentiellement. On peut en tirer des effets psychologiques ou symboliques.3- vue en contre-plongée : l'axe optique de la caméra est dirigé vers le haut, cf. la célèbre boutade «On filme les plafonds.» Fréquent, quand il s'agit de montrer un monument, une tour; on peut ainsi accentuer un effet de majesté, le bâtiment paraît dominateur. L'effet est plus ou moins marqué ; la c-p peut être légère.Orson Welles filmant « au ras des marguerites » pour une contre-plongée. Le réalisateur utilise à plusieurs reprises le même procédé dans Citizen Kane ; l'épisode est évoqué de façon pittoresque dans RKO 281 (Citizen Welles) de Benjamin Ross (1999). On peut aussi être attentif à l'axe de la caméra : celle-ci peut-être, par rapport à l'objet filmé, placée en face, frontalement, ou latéralement avec un angle variable : 60°, 45°, 30°... Pour un personnage, on peut observer qu'il peut être vu dans le cadre de l'image sous différents axes de regards : de face, de dos, de profil, de trois-quarts par la gauche ou la droite... Welles compose ainsi habilement ce plan de Citizen Kane.<br />Exemple d'usage des angles et des axes tiré d'une séquence de Citizen Kane. <br />Le dernier photogramme de Welles montre qu'il ne faut pas interpréter mécaniquement ou de façon univoque les valeurs des angles de prise de vue. Kane est réduit et vu d'en haut, mais il serait naïf de dire sommairement qu'il est écrasé symboliquement. Il est au fait de sa puissance ; il est donc l'objet de tous les regards. La surcomposition de l'image avec des cadres dans le cadre et l'effet de lumière attirent l'attention sur lui ou plutôt sur son image même ; cela dit, quelque chose aussi se joue à droite du cadre. Un regard, une menace potentielle sont déjà là. Question de nuance. <br />Dreyer a utilisé dans sa Passion de Jeanne d'Arc des caméras à la verticale, en plongée totale. Cet angle de vue inhabituel attire l'attention du spectateur et dans le contexte signifie le bourleversement du peuple lors de l'exécution de Jeanne. Les Américains appellent cette vue à la verticale bird's eyeview ou bird's eye shot.<br />E) CHAMP / CONTRE-CHAMP / HORS-CHAMP <br />Le champ est la portion d'espace imaginaire contenue à l'intérieur du cadre de l'image. <br />Le hors-champ est lié au champ, il n'existe qu'en fonction de lui : c'est l'ensemble des éléments (personnages, décor...) qui, n'étant pas inclus dans le champ, lui sont néanmoins rattachés imaginairement, pour le spectateur, par un moyen quelconque, selon la définition de Jacques Aumont dans son Esthétique du Film. Avec le hors-champ, on laisse des éléments de l'action hors du cadre, mais pour obtenir un effet : par exemple, on suit sur le visage de spectateurs masculins les étapes d'un strip-tease. On observera que le regard comme le son de la voix sont des éléments essentiels pour constituer ce qui est hors-champ. <br />Le champ et le hors-champ communiquent de différentes façons : <br />- entrée dans le champ / sortie du champ de la caméra (généralement, par le bord latéral du cadre); un personnage sort du cadre ou entre ; - interpellation du hors-champ : un personnage regarde à l'extérieur du champ ; il adresse la parole à quelqu'un qu'on ne voit pas dans le champ ;- le hors-champ peut se définir aussi par rapport à des personnages : une partie d'un personnage est hors cadre. <br />Echange cordial dans Pas de printemps pour Marnie.<br />Le hors-champ peut interagir avec le champ et il investit parfois l'image selon divers procédés : un miroir cadré par la caméra peut refléter des éléments hors-champ; l'ombre d'un personnage hors champ peut se projeter sur le sol ou sur un mur... On pense ainsi au plan célèbre de M. le Maudit de F. Lang.<br />Le champ et le contre-champ : la caméra braquée sur un sujet définit un champ de prise de vue; si on la déplace de 180°, on cadre un contre-champ. On utilise souvent pour cela deux caméras qui tournent en même temps. Par exemple, on filme deux interlocuteurs assis, face à face, à une table; on voit, d'abord, X de face et Y de dos, ensuite Y de face et X de dos. Dans la pratique, les caméras ne sont pas en face à face, en opposition à 180 °, mais elles se situent entre 90 et 120 ° d'opposition ; cela permet d'éviter de les placer l'une dans le champ de l'autre et cela contribue à donner un effet de continuité d'espace au spectateur. <br />Hôtel du Nord (1938) de M. Carné : usage des regards dans l'opposition champ/ contre-champ au comptoir.Citizen Kane d'Orson Welles <br />F) EFFETS OPTIQUES <br />Sans parler des effets spéciaux et de l'image de synthèse, élaborée sur ordinateur, évoquons quelques procédés de base. <br />La profondeur de champ concerne la netteté des différents plans de l'image, elle joue sur la troisième dimension de l'image et permet une mise en perspective. Le cinéaste peut utiliser le flou artistique ou au contraire une grande netteté des objets à l'écran, en faisant varier la P.D.C. (grande / nulle); pour cela, il change la focale de l'objectif (courte / longue) ou l'ouverture du diaphragme. En diminuant la taille de l’ouverture, on augmente ainsi la profondeur de champ... La P.D.C. a un rôle esthétique et expressif. Chez Renoir, par exemple, la netteté de l'arrière plan montre son importance, il essaie de l'utiliser pour suggérer une atmosphère. Orson Welles dans Citizen Kane a utilisé une P.D.C. maximale, où tout est net, du premier à l'arrière plan ; chez lui, la p.d.c. est un des ressorts du plan séquence et participe à la dramatisation.Au contraire, chez Sergio Leone, la P.D.C. est réduite ; le cinéaste, en utilisant de longues focales, centre la vision sur les personnages, réduisant le rôle du décor : il privilégie ainsi un élément dans le contexte.Le Bon, la Brute et le Truand (Il Buono, il Brutto, il Cattivo) de Sergio Leone, Italie, 1966.Ces quelques images de Citizen Kane (1941) montrent d'abord comment Welles fait communiquer les différents plans en jouant de la P.D.C. et de la focale. Il met ainsi en interaction arrière plan et avant plan : c'est le destin de l'enfant, isolé à l'extérieur dans le cadre blanc de la fenêtre, qui est scellé par la signature à l'intérieur, dans cet extrait d'un plan séquence.Dans le deuxième photogramme, notre regard accompagne celui de Kane au 1er plan, vu de dos en amorce ; le regard de Kane et les lignes de fuite convergent ainsi sur Bernstein au fond, au bout de la table.L'effet de perspective est accentué dans le 3ème photogramme : nous avons une forme de «montage parallèle» au sein de la même image, très structurée en profondeur. Le 1er plan met en relief une information et guide le spectateur dans l'interprétation de la tentative de suicide. Pour information, le résultat n'a été permis que par des jeux de lumière et un trucage via surimpression de la pellicule, avec plusieurs prises d'images par Welles.La série des trois dernières images montre l'usage dans un plan séquence d'un cadre très travaillé ; l'axe choisi permet de jouer avec le plafond à l'arrière plan ; l'éclairage est contrasté, le jeu des regards est habile. Kane, au 1er plan de l'image, tourne le dos à Leland au deuxième plan qui se rapproche et Bernstein s'aperçoit dans l'encadrement de la porte à l'arrière plan, spectateur du conflit.Dans la Splendeur des Amberson (1942), Welles en jouant de la P.D.C., dans la scène du bal, met plus le spectateur en position de décider ce qui est important dans le plan (au sens cinématographique) ou ce qui mérite d'être regardé ; plusieurs niveaux de profondeur, donc de lecture, premier plan, second plan, arrière plan de l'image, sont ainsi en interaction. Diverses actions se jouent en même temps et interfèrent entre elles avec le rapprochement des deux jeunes gens ou celui des parents respectifs, dans les photogrammes 2 et 3... Le jeu des regards est important dans le fonctionnement des effets et amène des liens entre les plans de l'image, relayé par l'interpellation de la voix (quot;
Lucyquot;
).A. Hitchcock dans Rebecca (1940) utilise moins de P.D.C. lors de la découverte de Manderley par son héroïne : cela contribue à donner une dimension quelque peu étrange, voire gothique, à la grande salle de la demeure et à la situation de parade/ revue des domestiques ; de même, cela permet de faire surgir dans les plans suivants un personnage que l'on n'avait pas aperçu avec l'inquiétante gouvernante, Mme Danvers. Les éclairages et les regards, outre le décor, ont ici un rôle essentiel.<br />La surimpression a été utilisée pour des effets spéciaux ou artistiques, et pas seulement pour des transitions. On superpose ainsi (au moins) deux images l'une à l'autre avec une intention esthétique, psychologique ou symbolique comme Abel Gance le fait avec des images de l'océan déchaîné et des scènes de la Révolution dans son Napoléon, en 1926. Voir aussi Citizen Kane de Welles avec les surimpressions des unes de presse et des visages de Susan ou de son professeur de chant, à la rubrique Langages et codes. <br />On observera que Gance superpose ici à l'image de Napoléon sur fond de mer en proie à la tempête (évocation métaphorique de la violence déchaînée) des images de bataille. Le dernier photogramme aggrave la surcharge symbolique avec la figure impériale de l'aigle.<br />Dans le thriller Un crime dans la tête (The Mandchurian candidate, 1962), John Frankenheimer utilise la surimpression pour présenter un personnage en train de raconter et en même temps montrer les images très subjectives du souvenir relaté. Miracle en Alabama : jeu de reflets<br /> <br />Dans Miracle en Alabama (The Miracle Worker, 1962), Arthur Penn utilise avec les reflets une forme de surimpression «naturelle» ; ainsi l'image d'Hélène Keller, réduite et transformée, se lit sur la surface de la boule et celle d'Annie Sullivan sur la vitre qui souligne la frontière entre deux espaces. L'image de l'enfant rappelle, bien entendu, un motif de la peinture hollandaise ou flamande tout comme Orson Welles sans doute...Le troisième photogramme est, à proprement parler, une surimpression ; cette image de nature subjective traduit une plongée dans la mémoire d'Annie; celle-ci revoit une figure de son passé qui la hante, celle de son frère abandonné. Dans les trois cas, le travail sur la lumière et les ombres est notable. « Vanité avec une boule de cristal » de Vincent Laurensz van der Vinne (1629-1702).L'éclairage peut être ainsi l'objet d'une élaboration savante, comme dans la peinture, avec le clair-obscur. On recherche des effets à valeurs diverses en jouant sur la lumière et l'ombre, voire en travaillant l'effet de cadre, comme dans cette image extraite de la Nuit du chasseur. <br /> <br />Le fondu consiste techniquement à l'origine à ouvrir ou fermer progressivement l'iris de la caméra, en faisant apparaître ou disparaître l'image, progressivement. L'ouverture à l'iris consiste à ouvrir sur l'écran, généralement noir, une image en élargissant un cache en forme de cercle, cf. infra pour Intolérance. La fermeture à l'iris consiste à noircir l'écran en rétrécissant le cercle de l'image visible à partir des bords ; voir un exemple d'usage symbolique de ce procédé par Orson Welles.<br />Avec le fondu enchaîné, on recherche un effet, en substituant progressivement une image à une autre qui s'efface ; il a un rôle syntaxique de transition par cette superposition. Les fondus sont utilisés comme effets pour marquer le temps, pour nous faire passer d'une séquence à l'autre, ainsi qu'on le voit ci-dessus avec ces trois photogrammes de Gervaise de René Clément. Dans ce cas singulier, la transition est accompagnée par la voix off de Gervaise qui commente les diverses étapes de sa propre vie. Ces fondus enchaînés ont donc un rôle de ponctuation, mais avec l'avènement de la vidéo, les films, les vidéo-clips comportent de plus en plus de volets : une image apparaît pour chasser ou balayer la précédente.<br />Trois images d'Intolérance de Griffith : ouverture à l'iris pour la séquence babylonienne.<br />Avec le fondu au noir ou au blanc, l'image s'assombrit ou s'éclaircit progressivement pour disparaître complètement. Ce fondu marque souvent la fin d'une étape, d'une période. Cette sorte d'extinction puis brève suspension des images filmiques par obscurcissement ou éclaircissement est transitoire ; elle peut servir à marquer un écart temporel entre deux séquences. Le fondu constitue ainsi un moyen efficace pour exprimer une ellipse narrative, qu'elle soit d'ordre temporel ou spatial.La fermeture au noir ou au blanc (fade out) est la disparition progressive de l'image de l'ensemble de l'écran. L'ouverture au noir ou au blanc (fade in) est le procédé inverse : on part de l'écran noir ou blanc sur l'ensemble de la surface d'écran pour aboutir progressivement à l'image.<br />Exemple de volets tiré de Citizen Kane : <br />Exemple de transition chez Renoir, dans la Règle du Jeu, 1939 :<br /> <br />Autre exemple, avec effet d'iris, tiré de La Nuit du chasseur de Ch. Laughton, 1955 : <br /> <br />On observera que cet exemple est intéressant pour poser la question du point de vue. <br />Le ralenti / accéléré : on peut faire varier le rythme de présentation des images. On décompose, par exemple, avec un ralenti les étapes d'un événement (mort d'un personnage, chute dans un western). Le ralenti peut avoir une valeur psychologique, suggérer une scène onirique ou donner une dimension magique... Voir Jean Cocteau, le Testament d'Orphée, 1960: quand le poète sort du laboratoire et s'en va croiser l'homme-cheval, sa démarche devient ainsi presque aérienne... <br />Sur le plan de la technique cinématographique, pour obtenir un ralenti, on filme les images à une vitesse plus rapide qu' à la normale pour projeter ensuite à la vitesse de 24 images/ seconde. Cela permet de décomposer le mouvement et des effets esthétiques. <br />LA NARRATION FILMIQUE <br />Remarques sur la narration et les points de vue...<br /> <br />Depuis ses origines pratiquement (Méliès, Porter, Griffith...) le cinéma est une machine à raconter des histoires ; dès le départ le film a ainsi croisé la route de la narrativité littéraire, soit qu'il s'inspire de romans en les adaptant, soit qu'il transpose des procédés narratifs, soit qu'il importe des codes génériques comme celui du western, du roman historique ou policier... Par là, on comprend qu'une étude de type narratologique soit féconde pour aborder des films narratifs fictionnels où les catégories d’intrigue, de personnages sont nettement prégnantes.Pour s'informer sur l'approche narratologique et se doter a minima d'outils et concepts d'analyse, on pourra consulter ces pages spécifiques. L'étude narratologique des textes littéraires aborde des éléments suffisamment généraux pour qu'on puisse aisément les transférer avec profit dans l'abord du cinéma, le film narratif étant une forme de récit en images. <br />Mais on se doit cependant de constater une spécificité du cinéma liée à ses diverses matières d'expression, véhiculées par divers canaux. Une analyse méthodique d'un récit cinématographique peut ainsi difficilement se passer de la prise en compte des dimensions visuelles et auditives des structures narratives : on peut en effet transmettre des éléments relevant de l'actantiel dans un film avec les visages, la position, les postures des acteurs, les angles de prises de vue, voire la musique... Les passages descriptifs, la présentation de l'espace ne fonctionnent pas comme dans un roman qui ne dispose quant à lui que des mots.<br />Le cinéma aux origines s’est bien sûr posé le problème de la narration : comment raconter efficacement, en effet, au temps du cinéma muet, une histoire par le seul biais des images mouvantes ? Si pour assurer la cohésion des scènes et donner une cohérence explicite aux plans et aux séquences, on a utilisé d'abord un commentateur externe lors de la projection, très vite on a intégré au film des cartons, des intertitres, des discours écrits introductifs pour contextualiser... Mais certains cinéastes ont ambitionné de réaliser des oeuvres sans mentions écrites, en quelque manière senties comme plaquées, tels F-W. Murnau avec Le Dernier des hommes en 1924 ou D. Vertov dans L'homme à la caméra en 1929. Observons ici au passage que les cartons ou autres écrits intégrés au film relèvent du discours d'un narrateur extradiégétique. <br />L'analyse de la narration met en évidence cette spécificité : l'énonciation filmique ne passe pas pour l'essentiel par l'énonciation linguistique et n'est pas à caractère déictique. Le cinéma représente autant qu'il raconte à l'instar du genre dramatique : comme au théâtre on semble ne pas pouvoir parler de narrateur car on n'est plus dans le simple domaine du discours narratif mais dans celui de la représentation. Ainsi, le récit cinématographique ne sera jamais vraiment comme un récit écrit, d'ordre scriptural, pour la seule raison que si l’un est quot;
polyphoniquequot;
, l’autre reste quot;
monodiquequot;
. En fin de compte, le récit filmique renvoie au théâtre parce qu’il met en scène des actions, mais il renvoie aussi au roman parce qu’il utilise le verbe ou réinvente la narration. <br />Par ailleurs, il convient d'observer que dans le cas du film la communication est aussi différée et quot;
figéequot;
 : on opposera donc une narration orale qui se fait quot;
en présencequot;
, avec des interactions locuteur / interlocuteur(s), à la narration filmique qui, tout comme la narration écrite, se fait quot;
en absencequot;
... La communication orale d'un conte est mouvante comme le spectacle théâtral alors que le film nous donne une version figée par la mémoire artificielle de la pellicule.<br /> <br />1. Enonciation et narration au cinéma : aspects spécifiques<br />L'énonciation filmique souvent ne semble pas manifester de marques spécifiques et le cinéma, dans sa période classique tout au moins, a essayé d'occulter son processus d'énonciation et les traces d'une émission. De là, une apparente transparence du cinéma où l'histoire quot;
racontéequot;
 semble le plus souvent s’engendrer d’elle-même car, en apparence du moins, personne n’est là pour la raconter et elle semble se dérouler simplement sous nos yeux. Toutefois, il convient de percevoir que ce qui se montre à nos yeux, dans tout film narratif de fiction, depuis L’Arroseur arrosé des frères Lumière comme d'ailleurs leurs documentaires, est bien organisé et passe par un processus d'énonciation et de structuration du discours. Cette énonciation est repérable par certaines images ou par leur agencement qui nous donnent à voir de façon humainement impossible, non naturelle, non spontanée, non objective. Certains indices rompent ainsi l'illusion référentielle et manifestent la présence d'un narrateur fondamental, virtuel, appelé «le grand imagier» ou le maître de cérémonie par Albert Laffay, dans la Logique du cinéma. Ainsi, une opposition par passage du flou au net, un changement d'échelle, l'usage de la contre-plongée sont révélateurs... Dans un discours filmique, un jeu musical servant à mettre en relief un mouvement dramatique ou un mouvement de la caméra fixant en gros plan le visage d'un acteur, afin d’en souligner l’expression psychologique, peuvent s'interpréter comme des marques d’une énonciation. En quelque sorte, un narrateur virtuel tourne pour nous les pages de l'histoire et c'est bien lui qui attire, d'une manière ou d'une autre, notre attention sur tel détail, insignifiant en apparence, par une image rapide ou par la composition du cadre, d&ap
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  • 1. -354330-30480Eléments de filmologie Introduction <br />Film/Cinéma <br />Langages et codes <br />Codes du film <br />Narration filmique <br />Conclusion <br />Bibliographie  <br />    <br />Eléments de narratologie <br />INTRODUCTION <br />La naissance de l'analyse théorique du cinéma s'est faite tardivement par rapport à ses origines (autour de 1895); elle s'est élaborée à partir des concepts linguistiques appliqués aux oeuvres cinématographiques et a impliqué une rupture avec la critique de type impressionniste ou esthétisante. Elle a dû se dégager de l'étude des entours du cinéma qui relèvent de la sociologie, de l'économie, de l'esthétique... On peut en effet analyser le cinéma en termes de production, en tant que show-business, étudier des phénomènes associés comme le vedettariat.  <br />La constitution d'une analyse filmique méthodique, d'une filmologie renvoie à la spécificité du langage filmique qui constitue à proprement parler l'objet de la sémiologie du cinéma. <br />                                                              Ces modestes éléments reprennent en partie l'ossature d'un travail de Jean Mottet, Portée sémiologique de quelques concepts linguistiques appliqués au cinéma. <br />Les photogrammes qui servent d'illustrations à ces pages sont la propriété de leurs auteurs et des ayants droit. Ces images réduites sont utilisées ici à des fins d'analyse pédagogique, dans une perspective strictement non commerciale. Nous nous engageons à les supprimer sur simple demande des ayants droit.<br />DISTINCTION FILM / CINEMA <br /> Gilbert Cohen Séat a finement distingué le fait cinématographique du fait filmique: <br />« Le film n'est qu'une petite partie du cinéma, car ce dernier constitue un vaste ensemble de faits dont certains interviennent AVANT le film (infrastructures économiques de la production, financement, techniques des appareils, studios...), d'autres APRES le film (influence culturelle, réaction des spectateurs, mythologie des quot; starsquot; ...), d'autres encore PENDANT le film, mais à côté et en dehors de lui (rituel social de la séance de cinéma, équipement des salles, problème de la perception des images..).» <br />La sémiologie du cinéma va s'établir du côté du fait filmique. <br />Pour Christian Metz, le cinématographique, en plus du total des entours du film, c'est le total des films mêmes ou encore le total des traits qui dans les films sont supposés caractéristiques d'un certain langage pressenti. Le cinématographique de Metz dépend de la sémiologie, celui de Cohen Séat relève de la sociologie, de l'économie. Il faut être prudent avec la terminologie: le cinématographique de Metz correspond en gros au fait filmique de Cohen Séat. <br />L'analyse du cinéma doit caractériser le cinématographique, cette «somme virtuelle de tous les films» à partir de l'analyse des unités concrètes de discours, des messages différents que sont les films. On peut ainsi opposer une analyse du système cinématographique, une étude de son «langage», à une étude des textes filmiques, une analyse textuelle des oeuvres; on rapprochera de l'opposition entre l'étude linguistique de la langue et la linguistique du discours. <br />  <br />LANGAGES ET CODES AU CINEMA <br />I. Définition <br />II. Langage du cinéma <br />L'image photo mouvante Les mentions écritesLe son phoniqueLe bruitLa musiqueLes catégories de sonSon et temporalité <br />I. Définition <br />Le langage verbal utilise une seule matière d'expression, phonique, mais il comporte plusieurs codes. La langue n'en représente qu'un seul (règles de grammaire...); il existe par exemple des codes sociaux qui interviennent dans la communication: le code de politesse, entre autres. Inversement, un même code se manifeste d'une manière manuelle ([applaudir]) ou phonique («bravo»). La quot; désapprobationquot; peut se manifester par des sifflets, de manière labiale, par des cris, de façon phonique... <br />Un code peut se transposer d'une matière d'expression dans une autre: ainsi, les codes picturaux du XIX ème influencent l'image photographique; certaines formes esthétiques propres au peintre Auguste Renoir se retrouvent chez son fils, le cinéaste Jean Renoir. <br />Le western, au cinéma, ne fait que reprendre des codes narratifs et culturels antérieurs, dont on trouve l'origine dans des chansons folkloriques de l'Ouest, dans la littérature populaire américaine, dans des mélodrames voire des bandes dessinées. Par exemple, la place de la femme, du cheval, le code de l'honneur ou le duel final... ne sont pas propres au cinéma !<br />Il faut ainsi bien distinguer les codes et le langage ; dans l'analyse du cinéma, il est possible de rechercher les unités significatives minimales (comme en linguistique, on a isolé les les monèmes ou les phonèmes), mais les chercheurs ne sont pas d'accord. Ainsi pour Eisenstein, l'unité de base est le plan, mais pour certains, c'est le photogramme (c.a.d. une image sur la pellicule). Pour d'autres encore, le cinème, c.a.d. un objet filmé, constitue l'unité de la deuxième articulation et le plan l'unité de la première articulation. Rappelons que selon Martinet, le langage humain est doublement articulé : le niveau de la première articulation dans le langage verbal est celui des monèmes (ces unités sont les morphèmes et lexèmes : donn-er-ons) et la deuxième articulation renvoie aux phonèmes, les 36 quot; sonsquot; de base retenus par le système du français pour signifier des oppositions de sens. . <br />Cette confusion résulte d'un malentendu; comme il y a plusieurs codes en jeu au cinéma, il y a plusieurs unités minimales. On peut utiliser plusieurs unités d'analyse. Avant d'ergoter sur les unités minimales, il faut déterminer les différents codes à l'oeuvre. <br />II. Le langage du cinéma <br />Le langage cinématographique est hétérogène car il combine cinq matières d'expression, qui se présentent dans la bande image et dans la bande sonore, depuis le parlant: <br />Bande image <br />l'image photographique mouvante, qui est seule spécifiquement cinématographique (NB parfois, on peut rencontrer des images quot; fixesquot; dans le film) <br />le tracé graphique des mentions écrites (des notations graphiques sont présentes dans l'image). <br />Bande sonore le son phonique, c.a.d. les paroles le son musical le son analogique, c.a.d. les bruits. <br />Le langage radiophonique n'utilise que la bande sonore; la simultanéité des deux bandes est propre au langage du cinéma parlant (/muet). <br />On remarquera que le cinéma dit muet ne l'est pas vraiment strictement : en effet, les personnages s'expriment aussi par des discours, des paroles et dialoguent; seuls les spectateurs ne les entendent pas. <br />La bande sonore participe activement à la narration comme à sa structuration — par son rôle dans le montage — ou à son rythme ; elle oriente, en effet, et construit la perception du réel : dans la séquence de la tentative de suicide de Susan Alexander chez Welles, par exemple, nous entendons distinctement deux sons nécessaires à l'interprétation : le souffle, les râles de l'épouse de Kane et les coups que donne celui-ci pour enfoncer la porte de la chambre ; mais nous ne voyons pas le mari inquiet qui reste hors-champ et nous distinguons mal les traits de Susan. C'est donc la rencontre des deux informations sonores croisées avec la fiole au premier plan qui nous donne à entendre ce qui se passe car nous en tirons une inférence sur la situation. La bande sonore joue ainsi un rôle important à ne pas perdre de vue.<br />A) L'image photo mouvante <br />a) Niveau de l'analogie photographique <br />L'image présente une particularité communicative par rapport à d'autres objets signifiants: elle a un statut analogique qui se manifeste dans la ressemblance perceptive globale avec l'objet représenté. <br />A première vue, naïvement, la photo semble un message objectif, sans code. On peut croire qu'elle reproduit mécaniquement le réel, mais son objectivité est mythique, car l'image n'est pas neutre, elle est connotée (cf. Roland Barthes). De plus, il y a intervention des éléments techniques, du point de vue, du cadrage... Les couleurs elles-mêmes varient selon les systèmes, le noir et blanc transforme. La photo réduit l'univers à deux dimensions. <br />En fait, dans la photo, il y a deux messages: un sans code et un autre codé, culturel, se développant à partir du premier. <br />Si le récepteur d'une photo peut faire la part des choses, entre la représentation du réel et les intentions conscientes ou non du photographe, au cinéma, la dénotation même truque systématiquement ce qu'elle représente, ce qu'elle nous montre. <br />Le travail de montage, base du langage filmique, manipule le réel. Ainsi dans un film, on n'est pas obligé de montrer réellement pour faire voir. Dans une scène à deux personnages, si les deux acteurs ne sont pas disponibles en même temps, on peut tourner la scène en filmant séparément les deux acteurs et au montage on assemblera. Cf. le cas d'un seul acteur jouant deux personnages différents, des jumeaux. De plus l'ordre de présentation des séquences (c.a.d. un ensemble de plans successifs relatifs au même sujet) n'est pas l'ordre du tournage. <br />Le message littéral d'un film est déjà le résultat d'une construction; le réel du film est loin de la réalité. Ainsi, on songera à l'importance de la reconstitution au cinéma; avant on reconstruisait les décors dans des studios (carton pâte); Pagnol faisait construire des décors en dur dans la nature (fermes...). <br />Bien des mouvements sont illusoires comme les chevauchées des westerns; le vent et la pluie sont fabriqués. Il faut tenir compte de la puissance de l'illusion technique même dans des films réalistes, sans parler des effets spéciaux des films de Science Fiction. (2001 -L'odyssée de l'espace). <br />b) Niveau de l'implication diégétique <br />L'image filmique, image d'un aspect du monde, pas du monde, ne peut pas signifier pleinement par elle-même ; son sens lui est attribué par la fiction dans laquelle elle est incluse: il faut tenir compte de l'axe syntagmatique. Ainsi, le lorgnon du Docteur Smirnov, dans le Cuirassé Potemkine de Serge Eisenstein (1925), accroché à un cordage, tire son sens du contexte et d'un amont sémantique. Il ne peut s'interpréter que dans le cadre d'une ellipse et d'une mise en réseau avec d'autres informations : il y a des inférences à faire, des liens à établir. Au final, le lorgnon, plus qu'un objet dénotant une classe sociale privilégiée, signifie symboliquement la myopie «sociale» du médecin qui refuse de voir certaines réalités que l'oeil de la caméra nous montre «objectifs» et il en est puni. <br />Pour Eisenstein un gros plan comme celui sur les lorgnons est un élément capable d'éveiller chez les spectateurs la conscience ou le sentiment du tout : le pince-nez du médecin se substitue ainsi à lui ; cet emploi du gros plan produit une figure de style comparable à la synecdoque, exprimant le tout par la représentation de la partie. <br />D'une manière plus générale, cela s'illustre dans « l'effet Koulechov ». Lev Koulechov, à partir de l'étude de films et d'une série d'expériences, a conclu vers 1922 qu'une image a deux valeurs :<br />1. sa valeur en tant qu'image photographique;2. la valeur acquise quand elle est associée à une autre, juxtaposée avec elle. <br />En partant ainsi d'un plan du visage totalement inexpressif d'un acteur, Mosjoukine, Koulechov, par trois montages différents, dans trois contextes, a obtenu trois significations perceptibles distinctes aux yeux des spectateurs. <br />Le même plan suivi d'un plan différent n'est plus le même plan.Associé à l'image d'une assiette ou un bol de soupe, le plan signifie la faim; avec l'image associée d'un cadavre d'enfant dans un cercueil, les spectateurs lisent l'angoisse devant la mort, la tristesse ; enfin, associé à la représentation d'une femme aguichante, on perçoit le désir sur le visage. Pourtant, il s'agit de la même image! A chaque fois les spectateurs estiment que l'artiste a bien su exprimer ou représenter le sentiment en question : Mosjoukine traduit si bien la peur, la faim... Koulechov a ainsi démontré qu’une image plus une autre faisaient bien, non pas deux images, mais une troisième issue des impressions des deux quot; mèresquot; . Pour construire la signification, il ne s'agit donc pas d'ajouter les deux images, mais plutôt de faire plutôt le produit des deux.<br />L'image filmique peut ainsi peut donc signifier tout autre chose que ce qu'elle montre. La réalité de l'oeuvre filmique n'est pas ce qui est montré, dénoté, mais ce qui est signifié par le système complexe du film; il faut tenir compte du contexte. L'image ne fonctionne pas comme le mot, signe fixe doté d'un sens lexical ; elle ne correspond pas à une convention définitive. Notons que le mot, actualisé dans un contexte linguistique, dans un texte, peut prendre une valeur particulière qui n'est pas le sens habituel; seuls le contexte situationnel ou le contexte textuel peuvent, par ailleurs, permettre de résoudre la polysémie d'un terme ou de comprendre la présence d'éventuelles connotations : «Passe-moi le rouge.», «J'ai mangé une note.», «Ma cuisinière fume.» = quid ? <br />En d’autres termes encore ou plus simplement, les images n’ont pas une signification univoque ou intrinsèque, elles ne prennent un sens que les unes par rapport aux autres ou mises dans un contexte. Cela souligne ainsi le rôle décisif du spectateur pour construire activement le sens de ce qu’il reçoit. Les images comme les discours verbaux, les textes littéraires sont susceptibles d’être interprétées. Cf. Umberto Eco, Lector in Fabula. <br />NB La bande filmique d'origine relative à l'expérience de Koulechov a été perdue. <br />L'homme à la caméra, D. Vertov, 1928. Les temps modernes, Ch. Chaplin, 1936. <br />Ces deux photogrammes semblent ainsi a priori porter le même message et faire de manière allusive apparaître l'homme moderne / le prolétaire des temps industriels comme perdu dans la machine. Mais la simple mise en réseau avec les images voisines (sans parler de remettre le film dans le contexte historique d'émission, de replacer le plan dans la séquence ou l'ensemble du film comme message culturel et idéologique) permet de comprendre que la signification est radicalement opposée. <br />   <br />Pour Charlie Chaplin, certes, l'homme est réduit à une sorte d'objet englouti par une machine qui l'écrase, le broie. Mais pour Dziga Vertov, les quelques plans en amont du photogramme soulignent la maîtrise de la main de l'homme sur les commandes, les rouages de la machine et les plans suivant montrent la puissance, l'effet de cette main et du regard expert sur la machine mise en fonctionnement. En outre, ces images sont montées en relation avec d'autres images soulignant l'efficace technique du geste humain, souverain. Vision optimiste et futuriste de la machine libératrice au service de l'humanité. Chez Chaplin l'homme est plutôt déshumanisé, pantin inefficace ou automate soumis à une hiérarchie, dans un monde déjà orwellien, écrasé par un système économique, devenu donc un simple objet dans une chaîne taylorienne de production qui l'avale et l'expulse métaphoriquement. <br />B) Les mentions écrites <br />Des notations graphiques peuvent apparaître dans l'image, en dehors des oeuvres originales sous-titrées; elles peuvent <br />a) se substituer carrément à elle : intertitres sur carton ; <br />b) s'y superposer : sous-titres explicitant le lieu, la date, l'écoulement d'un laps de temps... <br />c) s'y intégrer : mentions graphiques internes à l'image, lues par la caméra, éventuellement via le regard d'un personnage (banderoles, lettres ou télégrammes en gros plan, pancartes, enseignes...).Cf. les divers emplois suivants dans Citizen Kane d'O. Welles.<br />Aux origines, le cinéma muet avait besoin d'insérer l'écriture dans l'image pour pallier l'absence de bande sonore. Aujourd'hui, on notera l'importance du texte au début et à la fin du film avec le générique, la distribution, les quot; créditsquot; , des avertissements, des rappels historiques... On peut mêler texte et images, les superposer. Parfois le générique, outre qu'il ancre souvent dans un genre filmique et le signifie aux spectateurs, peut déjà jouer un rôle dans la diégèse, c.a.d. l'économie générale du récit : ainsi, dans les Chasses du comte Zaroff (The most dangerous game), de E.B. Schoedsack et I. Pichel, on peut lire une annonce, un élément prédestinateur dans certaines images. De même, pour The Big Sleep de H. Hawks, l'image des deux acteurs derrière le titre, associée aux deux cigarettes côte à côte, annonce de façon cataphorique la formation ultérieure du couple. Le générique prend alors une fonction «programmatique» qui relaie une éventuelle affiche ou une bande annonce; il permet aux destinataires d'anticiper comme au réalisateur d'accrocher par là son public. <br />Parfois, un texte dit par une voix off s'affiche au début du film ou d'une séquence, situant l'espace historique ou géographique... Ce texte peut occuper tout l'écran ou s'inscrire dans une partie de l'image. Voir un exemple d'une « séquence générique » à l'ouverture des Liaisons dangereuses de Stephen Frears. <br />Les mentions écrites internes font aussi partie du décor, elles participent à l'effet de réel. <br />C) Le son phonique <br />On notera que durant une longue période le cinéma est resté muet, ce qui ne l'a pas empêché de produire des chefs d'oeuvre. Alors, des intertitres, des cartons, étaient nécessaires à la compréhension du film, à la présentation minimale des éléments de discours des personnages. Au début du parlant, selon certains, on avait une nette prédominance des bruits, des sons par rapport au dialogue, dans beaucoup de films. Le rôle du message linguistique par rapport à l'image est variable et complexe. On peut distinguer deux grandes fonctions:<br />a) la fonction d'ancrage: le texte indique la direction d'un signifié précis; on limite la polysémie d'une image, on lève une ambiguïté. Ce cas est rare au cinéma (mais cf. photo de presse) et se traduit dans le recours à une voix off (voir plus bas). <br />b) la fonction de relais: le message linguistique seconde l'image dans la production d'un sens en rapport avec l'histoire racontée; le dialogue, bien conçu, bien utilisé, a un rôle complémentaire et non de redondance par rapport à l'image, il fait avancer l'action, donne des informations pertinentes. <br />On remarquera que bien souvent le son est postsynchronisé, refait en laboratoire et mixé savamment; il n'est pas naturel, spontané. Pour les films étrangers, il faut avoir à l'esprit que les acteurs sont doublés (V.O. / V.F.). <br />D) Bruits <br />On constatera qu'un grand nombre de bruits de la vie réelle ne sont pas naturels, mais produits plus ou moins directement par les hommes, c.a.d. qu'ils ont une origine sociale et par conséquent un sens social. Les bruits d'un film ne sont pas d'ailleurs une reproduction pure et simple des bruits extérieurs: ils sont élaborés en laboratoire, parfois truqués (cf. le bruitage). Une sélection, en pratique, s'impose car les bruits ne doivent pas, en principe, perturber la perception des sons phoniques, des dialogues; si cela se fait, il y a une intention. <br />Fréquemment, certains sons sont modifié en laboratoire: par exemple, on amplifie les paroles pour les rendre distinctes. Paradoxalement, les bruits d'un film ne sont pas de simples bruits et pas des « bruits » au sens linguistique du terme, c.a.d. des éléments entraînant une mauvaise transmission ou réception du message. Au lieu d'amener une perte d'informations, ils sont au contraire signifiants. De même, le silence peut être éloquent/ signifiant en termes de tension, menace... <br />Les bruits entrent en relation avec l'image, le son phonique et la musique via le mixage. Dans le film on constate une interdépendance sonore et plus généralement une interdépendance sémantique systématique : tous les éléments concourent à la production du sens. Les bruits comme la musique contribuent ainsi à la perception de la situation, à l'interprétation du contexte par le spectateur ou ils aident encore à caractériser un personnage. <br />E) La musique <br />Elle a joué un grand rôle à l'époque du muet ; non seulement les acteurs jouaient accompagnés d'un violon etc., mais à la projection un piano ou un disque... accompagnait le film; la musique n'était pas synchronisée. Actuellement deux grandes possibilités d'utilisation s'affirment: <br />1) rapport de redondance par rapport au visuel et au son; la musique double, renforce l'image et le discours: ainsi les violons langoureux commentent la scène d'amour, les trompettes accompagnent la scène guerrière... Naturellement tout cela reste codé, marqué par le culturel. <br />2) rapport de contraste: on peut noter des effets d'antithèse; ainsi un accordéon guilleret illustre une scène d'enterrement. Voir dans ce registre le générique de Gervaise de René Clément qui met en opposition des images quot; sombresquot; , renvoyant à un univers carcéral avec les grilles du chantier, et une musique allègre et festive de cabaret. <br />Une troisième fonction peut exister selon J. Mitry : parfois la musique ne paraphrase pas l'image ; elle ne vaut pas non plus pour elle-même, son intrusion à un moment donné a une signification, rien de plus, mais elle tire sa force rapportée aux autres éléments (son, bruits, images). <br />La musique a donc plusieurs fonctions :- elle soutient l'action,- elle accompagne l'expression des sentiments,- elle ponctue le film : elle prévient, annonce... <br />F) Les catégories de sons <br />On peut classer les sons présents dans un film en fonction de leur place, de la zone où on peut les situer. <br />1) Certains sons prennent ainsi place dans l'histoire racontée : ce sont les bruits, les sons, la musique, les paroles qui existent dans l'univers représenté, dans le cadre diégétique donc. <br />2) D'autres sont extérieurs à l'histoire et relèvent du récit, ils sont rajoutés après le tournage comme la musique d'accompagnement ou la voix off ; ils sont dits extradiégétiques. <br />Selon Michel Chion, un son «off» est proprement un son dont la source supposée est non seulement absente de l'image, mais aussi non-diégétique, c'est-à-dire située en un autre temps et un autre lieu que la situation directement évoquée : cas très répandu, des voix de commentaire ou de narration, dites en anglais « voice-over» , et bien sûr de la musique de fosse. <br />3) On observera que certains sons trouvent leur origine, leur source d'émission dans le cadre de l'image : on parle alors de sons quot; INquot; . D'autres sons restent extérieurs et renvoient à ce qui n'est pas inclus dans le champ, mais ils existent dans l'univers représenté, on dit alors qu'ils sont des sons quot; HORS CHAMPquot; . Une voix hors-champ, par exemple, est celle d'un personnage présent dans la situation évoquée à l'écran, mais ne se trouvant pas dans le champ de la caméra. L'usage de cette voix invite le spectateur à imaginer l'espace extérieur à celui de l'écran.Les sons rajoutés a posteriori sont qualifiés de sons quot; OFFquot; . <br />Pierre Schaeffer dit d’un son qu’il est acousmatique quand il s’agit d’un son que l’on entend mais sans voir sa cause productrice (Traité des objets musicaux, Seuil, 1966). Les sons acousmatiques sont des sons diégétiques et des sons non diégétiques ; ils ne sont pas émis dans le champ de l'image : c'est un ensemble constitué par les sons hors champ de la diégèse et les sons off rajoutés après le tournage. <br />G) Sons et temporalité <br />Par ailleurs, sur le plan de la temporalité, si l'on suit David Bordwell et Kristin Thompson (Film Art: An Introduction, 1979 et réédit.), on peut observer que les sons diégétiques et non-diégétiques peuvent être dans un rapport de simultanéité, de concomitance avec l'image ou de non-simultanéité, qu'ils soient décalés parce qu'ils renvoient à un moment antérieur ou parce qu'ils font référence à un autre moment postérieur à celui montré par l'image. <br />La musique, les bruits ou les paroles en provenance de l'univers de l'histoire peuvent, bien entendu, sembler nous parvenir en même temps que les images, synchrones, ou plutôt être issus du même moment de référence. Mais le son peut venir d'un moment antérieur à celui représenté par l'image ; on pourrait parler alors de « son rétrospectif » (sound flash-back) comme à la fin d'Accident (1967) de Joseph Losey : on entend sur un plan du portail d'une demeure ouvrant sur une allée le bruit d'un accident de voiture, celui du début du film. Le récit filmique, en effet, part d'un accident automobile et remonte le temps pour évoquer les événements qui l'ont précédé. <br />Parfois aussi, avec des images proleptiques (image flash-forward), le son peut servir de lien, de transition entre deux scènes : on continue ainsi par exemple d'entendre le son de la scène précédente alors que l'on voit déjà des images de la scène suivante. Cf. en ce domaine la musique dans Short Cuts d'Altman. <br />Le son, au contraire, peut se rattacher à un moment postérieur à celui présenté par l'image à l'écran. Les images (image flash-back) renvoient à un moment passé, antérieur au moment du son, celui d'un présent ou d'un passé plus récent. Des exemples canoniques sont à chercher dans les documentaires ou dans des fictions relatant un procès : la bande son présente alors le récit d'un témoin pendant que l'image nous ramène dans le passé. L'image illustre le récit rétrospectif du passé ou la parole commente les images de celui-ci ; ainsi, la voix off d'un narrateur peut commenter a posteriori comme dans la Splendeur des Amberson (1946) d'O. Welles. Enfin, le son peut être proleptique (sound flash-forward) : les images vues à l'écran désignent un présent et le son qui les accompagne appartient à une scène ultérieure. Dans Bande à part (1964) de J.-L. Godard, on entend ainsi comme un leitmotiv un tigre rugir pendant plusieurs scènes avant de finir par le voir paraître à l'image. <br />1903095-87630<br />I. Généralités <br />II. Codes non spécifiques <br />A) CODES PERCEPTIFS <br />B) IDENTIFICATION DES OBJETS VISUELS ET SONORES <br />C) LE CODE DU RECIT <br />III. Codes spécifiques <br />A) REMARQUES LIMINAIRES <br />B) LE MONTAGE <br />C) LES PLANS CINEMATOGRAPHIQUES <br />D) LES ANGLES DE PRISE DE VUE <br />E) CHAMP / CONTRE-CHAMP / HORS-CHAMP <br />F) EFFETS OPTIQUES <br />I. GENERALITES <br />La compréhension correcte d'un film suppose la connaissance de ces cinq langages. Cependant, il faut aussi connaître plusieurs autres codes extra-cinématographiques. En effet, le cinéma n'est pas une nouvelle langue, originale, avec des moyens propres: les films sont des réseaux structurés par une multitude de codes et une partie seulement de ces codes est proprement cinématographique. <br />On constate la souplesse du cinéma: il peut tout dire, il est très ouvert: ouvert aux modes diverses, aux symboles, aux courants culturels et idéologiques, aux influences artistiques extérieures. Le cinéma importe ainsi des signifiés qu'il emprunte à d'autres langages comme la littérature, le théâtre, le gestus social, les modes vestimentaires... <br />Celui qui veut analyser un film doit d'abord démonter l'importance de ces morceaux étrangers et, ensuite, se dégager de ces interférences codiques; en effet, on ne peut tout étudier à fond, être un spécialiste universel, être historien, sociologue, esthéticien. Le sémiologue du cinéma se limitera à un domaine de recherche; il a deux possibilités de travail : <br />le langage cinématographique, le total des traits qui sont supposés être dans les films caractéristiques du langage filmique, <br />le message total, complexe de chaque film particulier (analyse textuelle d'une oeuvre). <br />II. QUELQUES CODES NON SPECIFIQUES <br />Parmi les plus importants et les plus opératoires, relevons: <br />A) CODES PERCEPTIFS <br />Il faut prendre conscience du caractère psychologique et social de la perspective: ce n'est pas une réalité de la nature, mais un phénomène culturel, issu de la Renaissance. Le cinéma a repris à son compte la vision monoculaire et ses principes. <br />Ainsi, les figures sont étagées dans la profondeur; cet étagement est réglé par leur grandeur respective: la plus petite est la plus éloignée, la scène s'ordonnant en fonction de la place assignée à un individu. <br />L'espace au cinéma se définit aussi par rapport au cadre, c'est en fonction de lui que s'opère la distribution des éléments, des personnages. En effet, l'image est fortement composée dans le cadre, comme en peinture. Les masses, les volumes, les lignes sont organisées à l'intérieur du plan (axes verticaux, horizontaux...). <br />La structuration de l'espace se fait à partir des lois de la perspective et des exigences de la délimitation par des cadres, en reprenant l'héritage de la peinture, de la photographie. Mais on notera aussi que l'espace s'organise aussi dans le montage : en effet, le film présente l'espace, le constitue plan après plan ; l'espace se compose ainsi sur un axe syntaxique et le spectateur articule les différents éléments, reconstitue le référent fictionnel. (Note : plan ici désigne un segment de pellicule impressionnée entre l’ordre de départ de la caméra «Moteur» et l’ordre d'arrêt «Coupez», c'est donc l'unité de base du tournage du film.)<br />Ainsi, l'établissement éponyme dans Hôtel du Nord de Marcel Carné est présenté, après l'évocation du contexte du quartier, par une vue de la façade, un plan d'ensemble du rez-de-chaussée (Note : plan ici renvoie à un type de cadrage), une vue intérieure de la salle, une plongée sur l'escalier d'accès à l'étage, une vue sur le couloir, une vue exploratrice sur l'intérieur d'une chambre, un plan rapproché de la fenêtre, cadrée de l'extérieur, et la vue sur l'extérieur que l'on a depuis cette fenêtre. L'espace ainsi constitué servira en quelque manière à une sorte de huis clos. Voir une série d'images sur l'espace dans ce film.<br />L'espace peut aussi se construire à travers le regard d'une instance narrative ou celui d'un personnage qui le balaie ou l'explore : ainsi, au début de Fenêtre sur cour d'A. Hitchcock, à partir d'une fenêtre.<br />L'espace filmique est donc constitué sur un double niveau : <br />celui de l'écran, celui de la structure du film. <br /> <br />Le passage du noir et blanc à la couleur a été important. On remarquera qu'il y a plusieurs systèmes de couleurs comme il existe différents formats, tailles d'écrans. On voit nettement le côté artificiel du noir et blanc ; si la couleur est sentie comme plus naturelle, plus réelle par des spectateurs naïfs, on ne doit pas oublier qu'elle ne donne que des équivalences des vraies couleurs; selon les systèmes, il y a des nuances. Consulter une fiche sur les formats et couleurs. <br />Le noir et blanc est encore utilisé pour ses effets esthétiques, très codés, il évoque, en effet, certains genres. On pensera à son utilisation par Mel Brooks dans sa parodie du fantastique d'épouvante, Frankenstein Junior, ou encore à Woodie Allen dans certains passages de La rose pourpre du Caire. <br />Parfois, dans un film tourné en couleurs, une ou plusieurs séquences en noir et blanc sont insérées ; cela amène un décalage : il s'agit de signifier, par exemple, qu'il s'agit d'une autre époque, antérieure, d'un rêve... On identifie ainsi au procédé des archives, la logique d'une rétrospection comme dans JFK d'Oliver Stone. Cf. aussi les séquences dans l'asile pour Memento de Cristopher Nolan. Les effets recherchés peuvent être autres : voir Kill Bill de Quentin Tarantino...<br />B) IDENTIFICATION DES OBJETS VISUELS ET SONORES <br />Le décodage pertinent des objets apparus à l'écran requiert des connaissances culturelles, civilisationnelles. Par exemple, les vêtements sont des signes du niveau social, professionnel. Ils peuvent désigner une époque historique comme dans les films quot; en costumesquot; , avec un effet de couleur locale, spatio-temporelle. Il faut donc maîtriser des codes sociaux ou historiques extra-cinématographiques pour les entendre : des connaissances encyclopédiques, culturelles sont nécessaires pour décoder.. <br />Ainsi, un coup d'avertisseur signifie « voiture », même si on ne voit pas le véhicule à l'image. La rumeur de la circulation désigne ainsi une grande ville moderne... <br />Le cinéma peut importer tous les symbolismes attachés à des objets dans le cadre d'une société. Cf. le petit livre rouge de Mao dans la Chinoise de Godard, à la fois arme et défense.<br />C) LE CODE DU RECIT <br />On peut appliquer aux films le même type d'analyse narratologique qu'aux textes littéraires. Les instruments issus des travaux de V. Propp, de Cl. Brémond, des structuralistes etc. sont pertinents, car le cinéma a importé ses codes narratifs pour l'essentiel. Les concepts de points de vue, de focalisation, de temps de l'histoire et du récit, de syntaxe des séquences narratives... sont directement réutilisables. <br />Ainsi, cette neige tombant dans la résidence de Kane, à l'intérieur de la chambre, est «subjective». Ce n'est assurément pas la vision du narrateur mais celle du personnage : cela présuppose une focalisation interne.In Citizen Kane d'O. Welles.<br />Sans l'aide d'un magnétoscope, minimum minimorum, d'une platine DVD ou d'un ordinateur multimédia, il faut souligner la difficulté de l'étude syntaxique d'un film ou de l'analyse précise des images. Les conditions de la vision diffèrent de la lecture d’un texte littéraire et quand un film n'est pas à disposition, on ne peut pas facilement procéder à des relectures partielles ou totales, pourtant nécessaires. D'autre part, seul un arrêt sur image permet d'observer de près le décor dans une oeuvre, l'arrière-plan ou d'étudier la composition du cadre, les effets de lumière... <br />Avant les temps du scope, les retours en arrière comparatifs n'étaient pas aisés et le spectateur était pris dans le déroulement mécanique de la projection ; l'analyse était gênée par les contraintes du temps filmique (1h 30...). Depuis que l'on dispose aisément d'un magnétoscope, plus accessible qu’une visionneuse, les conditions de réception pour analyse ont bien changé ; il faut cependant garder à l'esprit que le spectateur ordinaire dans une salle de cinéma ne peut pas décortiquer un film lors de sa consommation / réception. Cela a certes déjà un impact sur la perception des effets spéciaux, des trucages comme de certains plans très brefs aux limites du perceptible : depuis le Napoléon d’Abel Gance jusqu’à Matrix, l’analyse dégage l’existence de plans de l’ordre de quelques photogrammes, d’une durée voisine de la seconde.La critique a souvent constaté autrefois que le texte filmique ne pouvait être traité comme une oeuvre littéraire écrite, donc à disposition. On peut imaginer combien la possibilité de revoir ad libitum un film sur un scope a transformé et amélioré le travail d'observation nécessaire à une analyse sérieuse, raisonnée. L’arrivée des lecteurs de DVD a encore enrichi les possibilités du regard et de la réflexion critiques.<br />Pour mener à bien une analyse filmologique, il faut sans doute d'abord regarder le film dans sa continuité au moins deux fois ; il convient de prendre des notes et d'avoir recours ensuite au magnétoscope ou mieux au lecteur de DVD comme outil d'analyse. Le DVD possède alors des avantages incontournables : il permet des retours en arrière faciles, et par là la confrontation de passages ; il facilite l’arrêt sur image puis la reprise instantanée de la lecture ; il offre le ralenti ou la lecture accélérée qui aide à la recherche de plans ; l’usage du chapitrage permet enfin des lectures sélectives... Sur un plan linguistique, pour un film étranger, on peut choisir la bande son d'origine (VO relayée ou non à la demande de sous-titres) ou la version française.L'usage d'un ordinateur avec un moniteur de grande dimension donne encore plus d’efficacité en termes de production pour une analyse, car on peut ainsi basculer instantanément des images filmiques à un traitement de texte pour prendre des notes, rédiger un brouillon d'analyse ou encore passer dans un navigateur Web pour chercher des informations sur l’Internet. On peut également faire des captures d'écran et isoler des photogrammes permettant de construire et illustrer un découpage de séquence en plans... La possibilité de placer des signets personnels est aussi très intéressante dans la phase d'analyse et de repérage ; la plupart des logiciels lecteurs de DVD permettent ainsi de repérer instantanément une séquence, un plan et d'y accéder ensuite d’un simple clic de souris.<br />On remarquera qu'au cinéma, sur un plan quantitatif, la fiction narrative prédomine. Très vite, le cinéma, avec Georges Méliès en 1896, a adopté la narrativité et les codes du récit. A ses origines, les frères Lumière, en 1895, le concevaient plutôt comme un moyen d'archiver des informations, de pratiquer le journalisme, de constituer des documents divers, voire comme un auxiliaire pédagogique. Peu de Vues Lumière, plans fixes de moins d'une minute, tournés souvent en lumière extérieure naturelle, relèvent ainsi du narratif et / ou de la fiction pure comme « l'Arroseur arrosé », un des premiers gags cinématographiques. Souvent, elles nous semblent proposer des vues documentaires, des actualités, des souvenirs personnels, l'esquisse d'une forme de publicité... On se gardera toutefois de croire à l'aspect authentiquement , naïvement quot; documentairequot; de certaines vues ; ainsi même «la sortie des usines Lumière» n'a rien de vraiment spontané.Georges Méliès, quant à lui, est vite passé du filmage d'un spectacle de music-hall ou d'un gag reposant sur l'exploitation de la technique cinématographique, cf. Un homme de têtes en 1898, à une écriture narrative, créative comme dans le Voyage dans la lune en 1902. Aujourd'hui, le cinéma est bien la première machine à raconter des histoires ; les genres non narratifs, non fictifs sont marginaux.<br />Le cinéma a rencontré la nécessité de se constituer une rhétorique, un système narratif avant de devenir une machine efficace pour narrer. Les premiers films narratifs ont emprunté leurs récits à des images immobiles (B.D., reproductions de journaux à sensation), à des thèmes de chansons populaires, à des romans et des pièces à quatre sous. Dès le départ, le cinéma a été populaire et a touché un grand public, au grand dam de certains intellectuels. <br />Les premières oeuvres furent brèves (historiettes), puis elles s'allongèrent sur le modèle du théâtre mélodramatique ; au départ on avait en quelque sorte du théâtre filmé, souvent frontalement — même si les Vues Lumière avaient adopté fréquemment un angle oblique— la scène étant souvent cadrée dans un plan d'ensemble ; une esthétique du tableau, au sens du terme au théâtre ou au music-hall, domina ainsi à la suite de G. Méliès, de Ferdinand Zecca etc. mais l'évolution et la séparation furent rapides. Par la suite, les romans classiques du XIX ème constituèrent une source fertile d'inspiration. Les courses poursuites, souvent burlesques, amenèrent à inventer : les personnages traversant un espace complexe, les lieux devaient se succéder, s'enchaîner et les plans pouvaient alterner entre le(s) chasseur(s) et le(s) personnage(s) poursuivi(s), cela donnant un effet de rythme. Cf. quot; La course des sergents de villequot; de F. Zecca en 1907, premier exemple historique du genre. <br />Pour obtenir la crédibilité romanesque, le film a dû aussi montrer de près, d'où la constitution de procédés spécifiques, en liaison étroite avec les possibilité et conditions techniques. Par exemple, en France, c'est Abel Gance, après Griffith, qui utilisa pour la première fois les gros plans sur des visages ; son producteur le crut fou. <br />C.T. Dreyer dans sa Passion de Jeanne d'Arc, en 1928, utilisa systématiquement ces gros plans expressifs. F.W. Murnau utilisa pour sa part la caméra mobile dans Le Dernier des Hommes, en 1924. Jeanne (Falconetti) vue par DreyerIdem Dreyer. Pendant longtemps le manque de  souplesse, l'impossibilité de changer d'angle, de grosseur de plan ont été des obstacles; parallèlement aux moyens techniques, la rhétorique s'est aussi perfectionnée et le public s'est habitué. Citizen Kane.Idem Citizen Kane.<br />Ascenseur en mouvement et changement d'angles de vue dans Le Dernier des Hommes.<br />F.-W. Murnau dans son film de 1924 (Der Letzte Mann) utilise ainsi une caméra mobile; dans les premiers plans de l'oeuvre, nous découvrons le contexte avec une caméra placée dans l'ascenseur de l'hôtel ; elle explore ensuite le hall du palace dans un travelling avant pour arriver sur le portier à l'entrée. Le procédé va s'imposer et gagner rapidement Hollywood. Ce film innova beaucoup et se caractérisa encore par un refus significatif des intertitres ou cartons, la narration filmique devenant essentiellement visuelle, et non plus scripto-visuelle.Déjà, en 1896, un opérateur des frères Lumière, Alexandre Promio, avait eu l'idée de placer une caméra dans une gondole à Venise ; même si la prise de vues restait fixe, le déplacement de la gondole permit une vue «panoramique» sur le grand canal et donna le premier travelling de l'histoire du cinéma. Cf. Jean Mitry, Histoire du cinéma… <br />III. CODES SPECIFIQUES AU CINEMA <br />A) REMARQUES LIMINAIRES <br />La liste des codes propres au cinéma est encore à établir, à compléter; elle constitue déjà une rhétorique complexe, plus ou moins bien définie et analysée. <br />Relevons parmi les éléments déjà répertoriés: <br />- le code de montage, - le code des mouvements d'appareil, - le code de variation d'échelle de plans, - le code des changements d'angle de prise de vue, - le code des effets optiques. <br />Dans cette analyse on peut revenir au découpage en unités minimales de signification. Ainsi, on peut commuter en bloc le travelling avant avec le travelling arrière. Le montage alterné (A/B/A/B) signifie que les événements représentés sont simultanés dans la fiction. A la différence de la langue, ces éléments n'ont pas un sens fixe, univoque: le travelling peut aussi bien signifier l'introspection que la découverte d'un paysage nouveau; cela dépend du contexte. La plongée traduira une impression d'écrasement ou permettra simplement une meilleure vision de la scène. Ce sont d'abord des moyens au service d'une intention. <br />Les effets optiques (fondu par exemple) constituent un cas particulier: des modifications sont apportées à l'image; souvent ils marquent une transition extradiégétique, une intervention du cinéaste dans le récit. <br />B) LE MONTAGE <br />Le cinéma est un art de la combinaison, de l'agencement; c'est là qu'intervient le montage, tâche de spécialiste, de technicien, pas forcément réalisé par le cinéaste.Le principe du montage narratif a été inventé par E.S. Porter pour son film The Great Train robbery, en 1903. Voir une fiche sur ce western et les différentes scènes le composant. Dans La Vie d'un Pompier américain en 1903 Porter avait réalisé un film innovant, déjà complexe, même si les principes du montage narratif n'étaient pas encore aussi sophistiqués.Très vite Griffith ou les cinéastes soviétiques comprennent l'importance esthétique ou narrative du montage, son potentiel ; la célébration du travail de montage par D. Vertov en 1929 dans l'Homme à la caméra témoigne de cette prise de conscience.Si le montage est réalisé par des techniciens experts, il ne faut pas en conclure naïvement qu'il se limite à une pure et simple opération technique; en effet, il convient plutôt d'y voir un principe cinématographique essentiel car ce travail régit l'organisation des divers éléments filmiques en employant des procédés techniques, mis au service d'intentions narratives. Les effets qu'il mobilise pour l'image et la bande son (liaison, symétrie, rupture, contrepoint, enchaînement linéaire ou non, ponctuation des plans, alternance de point de vue...) sont d'ordre syntaxique, rythmique mais aussi sémantique et esthétique. Le montage est par là même un aspect essentiel de la construction/ production du sens d'un film; il donne sens aux images et aux sons, il donne forme à une esthétique. Il est un élément constituant de la textualité filmique (étymologiquement, le texte est aussi un tissu !).<br />1. Le montage comme travail <br />Le processus de fabrication d'un film est complexe : <br />- scénario (inventé ou élaboré à partir d'un texte littéraire...) - découpage du scénario en unités d'action; ces unités seront découpées en unités de tournage (plans) - les plans sont filmés en différentes prises de vue, pas forcément selon un ordre logique, (plusieurs caméras tournent en même temps; on recommence x fois...) - l'ensemble des plans est mis bout à bout (rushes) et ils sont visionnés : <br />1) sélection des meilleures prises de vue; les autres constituent les quot; chutesquot; , 2) assemblage bout à bout des bonnes prises : cela constitue l'ours, 3) détermination exacte de la longueur des plans et assemblage précis avec raccords.<br />NB Parfois le cinéma donne à voir à ses spectateurs le processus de fabrication, d'écriture du film : ainsi fait Orson Welles dans la Splendeur des Amberson. <br />2. Le rôle des raccords <br />Les raccords sont importants car ils enchaînent les plans et donnent l'impression de continuité du film. « Raccorder, c’est faire en sorte, comme le terme l’indique, que le cut ne soit pas ressenti comme une rupture définitive et radicale, mais comme l’occasion d’une couture, qui permet d’assembler des morceaux différents avec la plus grande discrétion. Il s’agit de camoufler la césure, d’en effacer l’impression, tout en conservant la qualité d’articulation qui est au principe des changements de plan.»Vincent Amiel, Esthétique du montage, Paris, Nathan, 2001. <br />Voici un bref inventaire de quelques procédés de base dans cette opération de couture : <br /> <br />- raccord sur un regard: un personnage regarde un objet, souvent hors-champ, dans le plan n°1; dans le plan suivant, on montre l'objet de ce regard. - raccord de mouvement: un mouvement doté d'une vitesse et d'une direction donnée est répété dans un deuxième plan, par deux personnages éventuellement. - raccord sur un geste: un geste est commencé dans un plan, achevé dans le plan n°2. - raccord dans l'axe: deux moments successifs d'un même événement sont traités en deux plans, mais la caméra s'est rapprochée ou éloignée pour le plan n°2. - raccord champ contre-champ. <br />Gervaise de René Clément : conversation entre Gervaise et Mme Boche. Raccord sur le regard et croisement des points de vue.<br />Les raccords jouent aussi bien sur l'image que sur le son. Le raccord sur ou par le son ou encore «raccord son» (voix, bruit, musique) fait ainsi entendre vers la fin d'un plan un bruit présent au début du plan suivant. Le raccord peut se faire par la parole, sur un mot employé dans le discours d'un personnage (il parle de quelque chose, on voit ensuite ce quelque chose...); on peut entendre dans un plan la voix, le cri d'un personnage qu'on découvre dans le plan suivant (La Nuit du Chasseur de Ch. Laughton en 1955). Le raccord peut aussi se faire sur ou par la musique. Celle-ci peut alors changer de statut, comme dans Short Cuts de Robert Altman, en 1993 : d'intradiégétique, produite par un personnage dans le monde de la fiction, elle devient au plan suivant accompagnement, (presque) musique off qui tisse un lien entre les plans des diverses séquences qui se croisent et souligne une atmosphère. <br />Le raccord cut est une option fréquente de montage : c'est une coupe franche, un passage brusque d'un plan à un autre sans aucun effet optique, sans ponctuation.Le jump cut est une technique de montage moderne marqué, provoquant une sorte de saut visuel, juxtaposant deux moments différents. A l'intérieur même d'un plan, on a supprimé quelques images, un fragment pour garder seulement le début et la fin; ces deux moments sont liés par un simple cut. Ainsi, par exemple, un personnage après cette coupe se retrouve propulsé à un autre endroit du cadre. Voir aussi dans A bout de souffle l'usage de J.-L. Godard. On pourrait percevoir le quot; jump cutquot; comme un plan syncopé. <br />Le faux raccord repose, volontairement ou non, sur un effet de discontinuité obtenu par la mise en évidence du changement de plan. <br />3. Les tables de montage et les catégories <br />Le montage, au sens strict, est «l'organisation des plans du film dans certaines conditions d'ordre ou de durée», selon Marcel Martin. Techniquement, le montage consiste à assembler les nombreux plans selon un ordre logique. En effet, lors du tournage, les différents plans ont été souvent enregistrés dans un certain désordre. Il s'agit alors de les assembler selon un ordre prévu par le réalisateur, plus ou moins complètement au préalable.Plus largement, le montage constitue le principe qui régit l'organisation des éléments filmiques visuels ou sonores, l'assemblage de tels éléments, par leur juxtaposition, leur enchaînement, le réglage de leur durée. <br />La première fonction du montage est narrative : il va assurer la liaison syntaxique des différents éléments de l'action selon un rapport général de causalité, de temporalité diégétique. La deuxième fonction est expressive, d'ordre sémantique ou esthétique ; alors le montage vise à exprimer par la rencontre ou le choc de deux images un sentiment, une idée. Une autre fonction importante est d'ordre rythmique, souvent alors en liaison avec la bande sonore, la musique, <br />Il existe plusieurs sortes de montages qui renvoient à des tables de montage, des grilles empiriques, d'origine pratique : <br />- Poudovkine : antithèse/ parallélisme/ analogie/ synchronisme/ leitmotiv (les séquences sont organisées selon un thème). <br />- Balazs : idéologique/ métaphorique/ poétique/ allégorique/ intellectuel/ rythmique/ formel/ subjectif. <br /> Les montages linéaire, alterné, parallèle correspondent à divers types de construction séquentielle, différents assemblages des segments du film. <br />- Le montage alterné : le montage instaure une relation de simultanéité entre les séries. <br />A / B / A / B <br />Ce montage fait alterner deux séries d’événements se déroulant dans des espaces différents mais dans le même segment de temps. Dans ce type de montage, on fait alterner au moins deux situations qui ont un rapport direct à la même histoire. Ce montage accentue la convergence et amplifie le suspense : l'exemple canonique est celui du sauveur qui vient au secours de la victime ; on passe alternativement du héros qui s'en vient à la victime... <br />Quelques images de La télégraphiste de Lonedale, The Lonedale Operator, de David Wark Griffith en 1911 : prisonnière d'un groupe de bandits qui a voulu voler la paie des employés du train, dans une gare isolée, une jeune fille appelle son fiancé à la rescousse par le télégraphe. Celui-ci arrive par le train, à temps ! Une part essentielle du film repose sur la logique d'un contre la montre. <br />- Le montage linéaire : les séquences s'enchaînent selon une progression purement, strictement chronologique. Il existe un montage flash-back ou montage inversé avec rétrospection comme dans la littérature narrative. Le montage classique présente une histoire de façon chronologique ou linéaire (début , milieu, fin), sans jouer sur la chronologie. Ce type de montage se concentre ainsi sur une seule action à la fois. A => B => C => D - Le montage parallèle correspond à une thématique. Il fait alterner deux ou plusieurs séries d’événements présentant des similitudes ou comportant des relations logiques, mais ne se situant pas nécessairement dans le même segment temporel. D.W. Griffith dans Intolérance, en 1916, l'utilise avec des parallèles de séquences entières pour montrer l'identité, sur un mode analogique, de l'intolérance au cours des périodes historiques. Le cinéaste avait déjà exploré le procédé en 1909 dans Les Spéculateurs, A Corner in wheat, réflexion sur le capitalisme où il oppose le luxe des spéculateurs en grain à la pauvreté des gens du peuple. Ce montage contrasté permet de porter un regard accusateur; il prend une fonction argumentative. Voir un découpage des Spéculateurs. A // B // C // D Corner in wheat: réception du magnat qui fête son succès sur le marché.En écho : les conséquences pour le peuple, accablé par la hausse des prix du pain. Les conséquences de la spéculation frappent le peuple des campagnes...comme les pauvres des villes. Le parallèle est appuyé. Intolérance est essentiellement construit sur des montages parallèles, unissant des actions se déroulant à quatre époques et en dix lieux différents. Les quatre récits d'abord présentés séparément, vont s'enchaîner les uns à la suite des autres, selon un rythme de plus en plus rapide.<br />I. Amérique contemporaine :II. Palestine  antique :Episode moderne : après une grève durement réprimée par un industriel poussé par sa soeur, un jeune garçon va vivre en ville où il épouse sa bien-aimée et fréquente des vauriens...Le conflit de Jésus avec les Pharisiens et avec Rome.III.  France du XVI ème :IV. Babylone, en 539 avant Jésus-Christ :Une jeune huguenote et son fiancé arrivent à Paris où Charles IX et Catherine de Médicis préparent la Saint-Barthélémy; ils seront massacrés.Les prêtres de Baal, aidés d'un rhapsode, conspirent contre Balthazar, prince tolérant. Au cours d'un festin fastueux les troupes de Cyrus envahissent Babylone...<br />Intolérance, dont le sous-titre est Love's Struggle through the Ages, mêle ainsi quatre histoires «coulant d'abord comme des fleuves majestueux, puis se mélangeant comme des torrents impétueux». Le montage parallèle est généralisé à la construction d'ensemble. On observera d'après ces photogrammes que Griffith a fait teinter avec 4 couleurs différentes les périodes pour les typer en quelque sorte : l'histoire moderne est ambrée, l'épisode évangélique est en bleu... On pourrait presque parler cum grano salis de couleur locale. <br />D'autres types de montages peuvent aussi être évoqués : <br />- Montage inversé : ce montage fait voyager dans le temps, passé ou futur. On suit une situation puis, par un flash back, un plan, une scène vient nous raconter ce qui s'est passé avant. Ce jeu présent /passé /présent vient souvent aider à la compréhension d'une situation, d'un personnage. <br />- Montage analytique : ici, l'action est découpée, décortiquer en une foule de plans différents. On en fait ressortir ainsi toutes les facettes, tous les détails. Cette façon de décomposer permet au spectateur de mieux analyser une situation. <br />- Montage synthétique : ce montage complexifie les plans pour leur donner un haut degré de signification. Cette façon de procéder favorise les ellipses, ce qui reste non-dit. <br />- Montage à leitmotiv : ce montage fait appel à la répétition de certains plans significatifs. Ces motifs qui reviennent tout au long du film rappellent ainsi le refrain d'une chanson. On emploie ce type de montage autant dans le cinéma de propagande politique — le plan répété devient un slogan — que dans des comédies où la répétition du gag devient un mécanisme essentiel du rire (cf. Bergson). <br />Serguei M. Eisenstein a distingué dans Méthodes de Montage (article de 1929) plusieurs principes de montage : 1. Le montage métrique qui se fonde sur la longueur absolue d'un plan. «Les images sont montées en fonction de leur longueur, selon un schéma structurel correspondant à une mesure musicale.» Ce montage ne prend pas en compte le contenu de l'image, la substance du cadre. Exemple : un pied (unité de mesure) d'un plan A est suivi de deux pieds d'un plan B, puis un pied de A', suivi de deux de B', et ainsi de suite...On peut trouver de tels montages également chez D. Vertov, dans L'Homme à la caméra, avec un travail de synchronisation entre la bande son et l'image, morcelée en petits fragments, pour traduire l'expérience de la ville et la vitesse.2. Le montage rythmique qui fonctionne sur le rythme de l'enchaînement des plans : exemple canonique de la séquence des escaliers d'Odessa dans le Potemkine (1925). Ce montage va un peu plus loin que le montage métrique car on prend en compte le mouvement à l'intérieur du cadre et la composition de l'image. Avec la sonorisation du cinéma, le montage rythmique a bien sûr joué aussi des éléments auditifs: sons, musique, paroles. 3. Le montage tonal fondé sur le sens émotionnel des séquences ; il se fait d'après des dominantes et le conflit rythme/ dominante. Exemple : la séquence du deuil à Odessa lors de l'hommage funèbre rendu au marin Vakoulinchouk, «tué pour une assiette de soupe» dans le Potemkine.4. Le montage overtonal ou harmonique, qui résulte du conflit entre le ton dominant d'une séquence et ses harmoniques, il travaille l'harmonie mélodique de l'enchaînement des plans ; ce montage est fondé sur la perception physiologique du corps. Il cumule et associe les procédés des trois précédents types. Exemple: la fin de La Mère (1925) de Vsevolod Poudovkine.5. Le montage intellectuel ou idéologique, fondé sur le contenu symbolique produit par deux ou plusieurs images enchaînées, qui relève d'une démarche dialectique. Le sens naît de la juxtaposition des plans. Voir la séquence dite des dieux dans Octobre (1927) ou un peu avant la fin du film La Grève (1924) la séquence alternant brutalement des images d'abattage de bestiaux et d'affrontements sanglants entre ouvriers grévistes et forces de l'ordre. Cette mise en série d'images juxtaposées est perçue sur le mode de la comparaison; on entend ensuite par là le propos : «Les prolétaires sont traités comme du bétail, perdant leur humanité et massacrés bestialement.»  Ce montage dialectique, conceptualisé par Eisenstein, est mis en oeuvre par le cinéma soviétique dans les années 1920 -30. Pour le cinéaste russe, de deux plans peut surgir une nouvelle et troisième idée ; la notion dynamique de conflit, nodale, est empruntée à la dialectique hégélienne puis marxiste; pour les philosophes de l'Histoire au XIXème l'histoire avance en effet au fur et à mesure des conflits. Eisenstein s'inscrit dans cette logique en privilégiant l'art de la collision. L'exemple de la Grève emprunte à deux domaines éloignés, hétérogènes a priori: comme dans l'image surréaliste selon Pierre Reverdy (1918) plus la distance entre les deux termes associés est grande, plus l'effet chez le spectateur est fort, sur le plan logique et émotionnel. « L'image est une création pure de l'esprit. Elle ne peut naître d'une comparaison mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées. »« Le montage est l'art d'exprimer ou de signifier par le rapport de deux plans juxtaposés de telle sorte que cette juxtaposition fasse naître l'idée ou exprime quelque chose qui n'est contenu dans aucun des deux plans pris séparément. L'ensemble est supérieur à la somme des parties. » S. M. Eisenstein s'inscrit ainsi clairement dans la ligne de Koulechov. 1 + 1 = 3 ?Le cinéaste travaille alors la relation réciproque des scènes ou plutôt des fragments juxtaposés et il met en scène une lutte entre des principes opposés. Dans le Cuirassé Potemkine, 1925, par exemple, Eisenstein met en lumière par le biais du montage les antagonismes ou tensions qui déboucheront sur le conflit. Voir ici le chapitre Langages et codes sur le lorgnon du Dr Smirnov. En effet, le cinéma d'Eisenstein ne cherche pas tant à décrire le réel qu'à le révéler : c'est là le rôle didactique du montage. Tout art, et donc le cinéma, doit servir un projet politique, social et pédagogique : engagé, il s'adresse aux masses populaires pour leur faire comprendre le réel, en le décryptant. <br />4. Montage interne à l'image <br />a- Split screen ou écran partagé <br />Le split screen, est une forme de montage, dans un sens plus large du terme, mais sur / dans le plan de l'image. Cet effet cinématographique consiste à diviser l'écran en plusieurs fenêtres, à le partager en deux, trois parties ou plus ; chacune d'elles présente alors soit une scène différente, soit une autre perspective sur le même événement, dans une sorte d'effet stéréoscopique ou dans la recherche d'une vision plus complexe du réel. <br />Généralement, l'action présentée dans les fenêtres est synchronisée ; il s'agit de permettre aux spectateurs de suivre diverses actions simultanées ou de bénéficier de plusieurs points de vue en parallèle sur une même scène. Les scènes de dialogue à distance (téléphone...) en quot; écran partagéquot; sont fréquentes, y compris dans les téléfilms.On peut trouver des exemples préfigurateurs de ce procédé dès le Napoléon d'Abel Gance, en 1926, qui utilise trois volets simultanés, tournés avec trois caméras et destinés à être projetés simultanément sur trois écrans; mais chez Gance le procédé du triptyque va plus loin.<br />Napoléon d'Abel Gance : découpage en triptyque de l'écran (1926).<br />Chez Abel Gance, outre l'apport spectaculaire d'une image trois fois plus large, la juxtaposition ou polyvision — cette appellation est de Gance — permet des effets d'écriture variés dans un registre épico-lyrique : la même image peut ainsi se répéter en écho sur les trois écrans ; on peut aussi avoir trois points de vue sur la même scène comme dans un split screen ; on peut enfin avoir une symétrie par inversion des images latérales. « La partie centrale du triptyque, c'est de la prose et les deux parties latérales sont de la poésie, le tout s'appelant du cinéma. » <br />Il est connu que Brian de Palma affectionne cette technique comme en atteste Phantom of Paradise en 1974.<br />Winslow, le fantôme, pendant la répétition du spectacle au Paradise, a posé une bombe dans une voiture qui sert d'accessoire. Elle explose sous les yeux du diabolique propriétaire. La séquence montée en split screen évoque en référence, pour lui rendre hommage, La Soif du Mal, Touch of Evil, d'Orson Welles (1958).<br />Quelquefois, certains cinéastes, comme A. Hitchcock dans ces images de Pas de printemps pour Marnie, découpent quot; naturellementquot; l'espace dans la même image en deux parties, juxtaposées, qui semblent comme indépendantes ; les personnages ne se voient pas et évoluent ainsi dans deux espaces qui s'ignorent, séparés par une cloison, celle du bureau ou celle du couloir. Le spectateur, quant à lui, a une perspective d'ensemble : sans parler d'omniscience, il en voit / sait plus que chaque personnage, pris séparément. <br />On trouve d'autres exemples de split screen naturel chez Jacques Tati dans Playtime, en 70 mm. <br /> <br />b- Montage interne et profondeur de champ<br />Voir infra à Effets Optiques les commentaires sur le travail d'O. Welles en ce domaine, dans Citizen Kane ou les Amberson.<br />Welles mobilise la profondeur de champ dans des séquences où la caméra reste fixe : ce sont les personnages qui bougent dans le cadre et qui y occupent des places variables. Le spectateur prend alors un rôle actif: c'est à lui de voir ce qui se passe dans les divers plans (en profondeur) de l'image, à lui de trier, puis lier les informations;Welles étage ses informations sur deux ou trois plans qu'il faut mettre en relation.<br /> <br />C) LES PLANS CINEMATOGRAPHIQUES <br />Le plan est une unité de base dans le cinéma : c'est un morceau de pellicule, sélectionné au montage, correspondant à une prise de vue de la caméra, effectuée sans interruption. On peut ordonner les plans en fonction de différents critères, selon : <br />- la grosseur, - la mobilité, - la durée ou encore- l'angle de prise de vue. <br />1) GROSSEUR DES PLANS <br />On définit traditionnellement plusieurs tailles de plans en fonction des divers cadrages possibles d'un personnage, d'un sujet, en rapport avec l'éloignement de l'objectif et du sujet. <br />Voici un classement selon une échelle des plans classique : <br />- plan général- plan américain  - plan d'ensemble  - plan rapproché  - plan de demi-ensemble ou de petit ensemble- gros plan, insert  - plan moyen  - très gros plan.<br />Dès les premières vues Lumière en 1895, l'intérêt des diverses valeurs de cadre a été perçu : voir l'Arrivée d'un train en gare de la Ciotat. <br /> <br />Le plan général et d'ensemble permettent de situer un lieu, de présenter, d'embrasser tout un décor; ils suggèrent souvent une ambiance (pluie), un moment (nuit). NB Les exemples proposés ici sont tous tirés de Pas de printemps pour Marnie d'Alfred Hitchcock, 1964.- Le plan général situe la totalité des décors et, de la façon la plus large possible : il est strictement d'ordre descriptif. Il est particulièrement intéressant pour montrer un grand espace, extérieur souvent, comme dans les westerns.- Le plan d'ensemble établit de façon plus précise le décor, le lieu de l'action ; il constitue déjà un choix. Dans ce type de cadrage, on peut retrouver des personnages mais ils sont perdus dans le décor : c'est donc encore un plan d'ordre descriptif. Dans le plan de demi-ensemble, le décor est réduit par rapport au plan d'ensemble; souvent, les personnages sont groupés; ils sont plus importants que le décor : ce plan situe ainsi les personnages dans leur décor. <br />Le plan moyen permet de montrer des groupes de personnages, en coupant le décor autour d'eux; on montre leurs occupations... Ce plan cadre un ou des personnages en entier, des pieds à la tête, en référence à un adulte debout. A partir de ce cadrage, l'action a prédominance sur le décor : ce plan est plutôt d'ordre narratif, l'aspect descriptif devenant secondaire.<br /> <br />Le plan américain, voisin du plan italien, coupe les personnages plus bas que la ceinture : il les isole à mi-cuisse ; on voit donc ainsi souvent leurs mains. Ce plan tirerait son appellation des westerns : on y cadre souvent les cowboys de la tête aux revolvers colts. Ce type de cadrage est usité lors de scènes de discussion entre deux personnages ; ce procédé prend ainsi une valeur dramatique.<br /> <br />Le plan rapproché permet l'approche d'un groupe, montre un acteur en buste; on s'intéresse à son jeu, ses mimiques, ses réactions.  On fixe alors l'attention sur un personnage ; l'action est donc moins importante que la psychologie du personnage. Ce cadrage est souvent utilisé pour les conversations ; il relève d'une valeur dramatique;On peut distinguer dans les plans rapprochés, selon la coupe, le plan poitrine, le plan taille et le plan épaule.<br /> <br />Le gros plan peut montrer en détail un visage, détailler un objet. Il a une grande capacité de renseignement, un pouvoir suggestif : c'est un plan très puissant parce que très concentré.  Il a évidemment une valeur dramatique et essentiellement psychologique : «Il constitue un des apports les plus prestigieux du cinéma. (...) C'est dans le gros plan du visage humain que se manifeste le mieux la puissance de signification psychologique et dramatique du film. La caméra sait fouiller les visages, y faire lire les drames les plus intimes.» Marcel Martin, Le langage cinématographique, 1962.Le très gros plan ou  plan serré peut focaliser sur les lèvres, les yeux d'un personnage ou sur un bouton de commande, un objet etc. Il peut donner une acuité monstrueuse, créer une tension. Il isole souvent un détail du corps ou du visage qui prend une importance dramatique. Il peut encore provoquer un effet de suspense; si l'on ne montre que la bouche d'une personne au téléphone : on tait ainsi son identité provisoirement....L'insert, stricto sensu, est un plan qui, comme l'indique l'étymologie, est tourné séparément pour être intercalé, quot; inséréquot; ensuite lors du montage. Il montre en gros plan un objet ou un détail : il sert à désigner un élément de l'action susceptible de prendre une importance dramatique ; les inserts représentent aussi fréquemment des documents : lettres, livres, journaux... Souvent le terme d'insert est assimilé de façon réductrice au gros plan, voire au plan de coupe qui est un plan de brève durée inséré au montage pour assembler deux plans qui ne se raccordent pas parfaitement. Travail de classement à faire sur une série d'images de la Nuit du Chasseur.<br />Voici un schéma représentant les lignes de découpe possibles d'un personnage, dans une échelle classique des plans.<br />Un exemple possible de montage des plans donné en exemple. Cette série d'images assemblées constitue une séquence, une unité sémantique : on suit la promenade d'une jeune femme sur un quai. La séquence correspond à une unité narrative ; elle se constitue d'une série de plans ou de scènes qui forme un tout et qui raconte une histoire, un moment d'une histoire.<br />Exemple d'usage des plans par Renoir dans une séquence de la Règle du Jeu, 1939 <br />Jean Renoir se rapproche dans cette scène de plus en plus de ses personnages : plan d'ensemble avec un arrière plan très net (on voit nettement ici, à travers la fenêtre, le palais de Chaillot, le Trocadéro à l'arrière plan qui authentifie le cadre), puis plans américains, ensuite plans rapprochés et enfin gros plan. <br />2) EN TERME DE MOBILITE <br />On peut opposer le plan fixe aux différents types de mouvement d'appareil, y compris le zoom. <br />- Le panoramique <br />C'est le balayage par l'axe optique de la caméra d'un angle, sans bouger l'appareil de place.Un panoramique pertinent part souvent d'un élément intéressant pour aller vers quelque chose d'encore plus intéressant... <br />On peut classer les panoramiques en fonction de l'angle de déplacement du rayon visuel de la caméra. <br />- panoramique horizontal: <---> un paysage est présenté d'un point de vue élevé.  - panoramique vertical: | on regarde un monument élevé, un personnage est montré des pieds à la tête.  - panoramique oblique / on suit l'envol d'un oiseau, la descente d'un skieur.  - panoramique brisé : la trajectoire suit plusieurs plans, elle peut être fantaisiste; on présente ainsi les recoins d'un décor, le déplacement hésitant d'une personne.<br />On pourrait aussi les classer en fonction du résultat recherché : <br />- Le panoramique d'exploration, en général plutôt lent, montre tous les détails d'un décor. Il prend souvent par sa fonction descriptive un rôle introductif, permettant la découverte d'un espace....  - Le panoramique d'accompagnement suit un sujet en mouvement, l'image est centrée sur lui pour concentrer l'attention.  - Le panoramique rapide, de balayage permet de réunir deux sujets liés, sans coupure visuelle, rapidement.<br />  <br />- Le travelling <br />Le travelling implique un déplacement de la caméra dans l'espace; elle est souvent placée sur un chariot qui se déplace sur des rails (dolly...), sur / dans une voiture, avec une Louma... (La Louma est une grue légère, montée sur chariot, dotée d'un bras télescopique portant une caméra sur pivot mobile. Le cadrage ou la mise au point sont réglés à distance via une télécommande et on contrôle sur un moniteur.)On peut distinguer : <br />- le travelling latéral : vertical avec une caméra dans un ascenseur, par exemple, qui se déplace de haut en bas; horizontal avec la caméra dans une voiture, un train ou des rails en studio, elle se déplace de gauche à droite. Le rayon visuel de la caméra se déplace parallèlement à l'objet, la caméra étant fixe à bord d'un engin mobile. Cf. les galopades des westerns. <br />- le travelling dans l'axe optique : la caméra se déplace dans l'axe de son rayon visuel, soit en s'éloignant ou se rapprochant du sujet fixe. <br />On parle de travelling avant et de travelling arrière. En prise de vue continue on passe d'un type de plan à un autre: du plan général au gros plan, par exemple; dans ce cas on a un travelling avant d'approche. <br />  <br />- travelling d'accompagnement, travelling d'exploration: technique analogue à celle du panoramique d'accompagnement. <br /> <br />- Le pano-travelling <br />Il résulte de la combinaison d'un panoramique et d'un travelling ; souvent il est réalisé à l'aide d'une grue. <br />- Le zoom <br />Au sens strict, il désigne un type d'objectif spécial à focale variable; sans bouger la caméra de place, il permet d'obtenir des effets de travelling dans l'axe, avant ou arrière. On peut considérer le zoom comme un travelling optique. Alors que le travelling amène un changement de perspective, lié au déplacement de la caméra, le zoom se contente de jouer sur le grossissement de l'image. <br />Usage du zoom pour dégager un personnage de la foule.Le Syndrome de Stendhal de Dario Argento, 1993.<br />3) EN TERME DE DUREE <br />Les plans, unités de montage, peuvent être très brefs (1 seconde), ou plus ou moins longs (x minutes). On arrive au plan-séquence quand un plan est suffisamment long pour contenir l'équivalent événementiel d'une séquence, c.a.d. un enchaînement, une suite logique d'événements distincts. La signification d'un plan simple est perçue rapidement; dans le cas d'un gros plan, deux secondes suffisent. Si le plan est touffu, s'il y a plusieurs personnages, objets, la présence à l'écran doit être nécessairement plus longue. Ainsi, dix secondes semblent utiles pour un plan d'ensemble fixe. <br />Le temps de perception est inversement proportionnel à la grosseur de l'image.<br />D) LES ANGLES DE PRISE DE VUE <br />La prise de vue, la visée, peut se faire selon des angles et des axes variés.  On peut distinguer, selon l'angle formé par l’axe de la caméra et le sol, trois grands types d'angles : 1- vue dans l'axe de l'objectif, sur un plan horizontal : la caméra est à hauteur d'oeil, c'est le cas, non marqué, ordinaire. Certains cinéastes jouent subtilement sur la hauteur de la caméra : le Japonais Yasujiro Ozu a ainsi filmé « au niveau des tatamis » en plaçant la caméra très bas, presque au niveau du sol pour s'adapter à l'ameublement oriental ; cf. le Voyage à Tokyo en 1953 ci-contre et une photographie du tournage de Riz au thé vert en 1952.2- vue en plongée : l'axe optique de la caméra est dirigé vers le bas, très penché éventuellement. On quot; dominequot; le spectacle, on écrase le sujet filmé, on l'amenuise potentiellement. On peut en tirer des effets psychologiques ou symboliques.3- vue en contre-plongée : l'axe optique de la caméra est dirigé vers le haut, cf. la célèbre boutade «On filme les plafonds.» Fréquent, quand il s'agit de montrer un monument, une tour; on peut ainsi accentuer un effet de majesté, le bâtiment paraît dominateur. L'effet est plus ou moins marqué ; la c-p peut être légère.Orson Welles filmant « au ras des marguerites » pour une contre-plongée. Le réalisateur utilise à plusieurs reprises le même procédé dans Citizen Kane ; l'épisode est évoqué de façon pittoresque dans RKO 281 (Citizen Welles) de Benjamin Ross (1999). On peut aussi être attentif à l'axe de la caméra : celle-ci peut-être, par rapport à l'objet filmé, placée en face, frontalement, ou latéralement avec un angle variable : 60°, 45°, 30°... Pour un personnage, on peut observer qu'il peut être vu dans le cadre de l'image sous différents axes de regards : de face, de dos, de profil, de trois-quarts par la gauche ou la droite... Welles compose ainsi habilement ce plan de Citizen Kane.<br />Exemple d'usage des angles et des axes tiré d'une séquence de Citizen Kane. <br />Le dernier photogramme de Welles montre qu'il ne faut pas interpréter mécaniquement ou de façon univoque les valeurs des angles de prise de vue. Kane est réduit et vu d'en haut, mais il serait naïf de dire sommairement qu'il est écrasé symboliquement. Il est au fait de sa puissance ; il est donc l'objet de tous les regards. La surcomposition de l'image avec des cadres dans le cadre et l'effet de lumière attirent l'attention sur lui ou plutôt sur son image même ; cela dit, quelque chose aussi se joue à droite du cadre. Un regard, une menace potentielle sont déjà là. Question de nuance. <br />Dreyer a utilisé dans sa Passion de Jeanne d'Arc des caméras à la verticale, en plongée totale. Cet angle de vue inhabituel attire l'attention du spectateur et dans le contexte signifie le bourleversement du peuple lors de l'exécution de Jeanne. Les Américains appellent cette vue à la verticale bird's eyeview ou bird's eye shot.<br />E) CHAMP / CONTRE-CHAMP / HORS-CHAMP <br />Le champ est la portion d'espace imaginaire contenue à l'intérieur du cadre de l'image. <br />Le hors-champ est lié au champ, il n'existe qu'en fonction de lui : c'est l'ensemble des éléments (personnages, décor...) qui, n'étant pas inclus dans le champ, lui sont néanmoins rattachés imaginairement, pour le spectateur, par un moyen quelconque, selon la définition de Jacques Aumont dans son Esthétique du Film. Avec le hors-champ, on laisse des éléments de l'action hors du cadre, mais pour obtenir un effet : par exemple, on suit sur le visage de spectateurs masculins les étapes d'un strip-tease. On observera que le regard comme le son de la voix sont des éléments essentiels pour constituer ce qui est hors-champ. <br />Le champ et le hors-champ communiquent de différentes façons : <br />- entrée dans le champ / sortie du champ de la caméra (généralement, par le bord latéral du cadre); un personnage sort du cadre ou entre ; - interpellation du hors-champ : un personnage regarde à l'extérieur du champ ; il adresse la parole à quelqu'un qu'on ne voit pas dans le champ ;- le hors-champ peut se définir aussi par rapport à des personnages : une partie d'un personnage est hors cadre. <br />Echange cordial dans Pas de printemps pour Marnie.<br />Le hors-champ peut interagir avec le champ et il investit parfois l'image selon divers procédés : un miroir cadré par la caméra peut refléter des éléments hors-champ; l'ombre d'un personnage hors champ peut se projeter sur le sol ou sur un mur... On pense ainsi au plan célèbre de M. le Maudit de F. Lang.<br />Le champ et le contre-champ : la caméra braquée sur un sujet définit un champ de prise de vue; si on la déplace de 180°, on cadre un contre-champ. On utilise souvent pour cela deux caméras qui tournent en même temps. Par exemple, on filme deux interlocuteurs assis, face à face, à une table; on voit, d'abord, X de face et Y de dos, ensuite Y de face et X de dos. Dans la pratique, les caméras ne sont pas en face à face, en opposition à 180 °, mais elles se situent entre 90 et 120 ° d'opposition ; cela permet d'éviter de les placer l'une dans le champ de l'autre et cela contribue à donner un effet de continuité d'espace au spectateur. <br />Hôtel du Nord (1938) de M. Carné : usage des regards dans l'opposition champ/ contre-champ au comptoir.Citizen Kane d'Orson Welles <br />F) EFFETS OPTIQUES <br />Sans parler des effets spéciaux et de l'image de synthèse, élaborée sur ordinateur, évoquons quelques procédés de base. <br />La profondeur de champ concerne la netteté des différents plans de l'image, elle joue sur la troisième dimension de l'image et permet une mise en perspective. Le cinéaste peut utiliser le flou artistique ou au contraire une grande netteté des objets à l'écran, en faisant varier la P.D.C. (grande / nulle); pour cela, il change la focale de l'objectif (courte / longue) ou l'ouverture du diaphragme. En diminuant la taille de l’ouverture, on augmente ainsi la profondeur de champ... La P.D.C. a un rôle esthétique et expressif. Chez Renoir, par exemple, la netteté de l'arrière plan montre son importance, il essaie de l'utiliser pour suggérer une atmosphère. Orson Welles dans Citizen Kane a utilisé une P.D.C. maximale, où tout est net, du premier à l'arrière plan ; chez lui, la p.d.c. est un des ressorts du plan séquence et participe à la dramatisation.Au contraire, chez Sergio Leone, la P.D.C. est réduite ; le cinéaste, en utilisant de longues focales, centre la vision sur les personnages, réduisant le rôle du décor : il privilégie ainsi un élément dans le contexte.Le Bon, la Brute et le Truand (Il Buono, il Brutto, il Cattivo) de Sergio Leone, Italie, 1966.Ces quelques images de Citizen Kane (1941) montrent d'abord comment Welles fait communiquer les différents plans en jouant de la P.D.C. et de la focale. Il met ainsi en interaction arrière plan et avant plan : c'est le destin de l'enfant, isolé à l'extérieur dans le cadre blanc de la fenêtre, qui est scellé par la signature à l'intérieur, dans cet extrait d'un plan séquence.Dans le deuxième photogramme, notre regard accompagne celui de Kane au 1er plan, vu de dos en amorce ; le regard de Kane et les lignes de fuite convergent ainsi sur Bernstein au fond, au bout de la table.L'effet de perspective est accentué dans le 3ème photogramme : nous avons une forme de «montage parallèle» au sein de la même image, très structurée en profondeur. Le 1er plan met en relief une information et guide le spectateur dans l'interprétation de la tentative de suicide. Pour information, le résultat n'a été permis que par des jeux de lumière et un trucage via surimpression de la pellicule, avec plusieurs prises d'images par Welles.La série des trois dernières images montre l'usage dans un plan séquence d'un cadre très travaillé ; l'axe choisi permet de jouer avec le plafond à l'arrière plan ; l'éclairage est contrasté, le jeu des regards est habile. Kane, au 1er plan de l'image, tourne le dos à Leland au deuxième plan qui se rapproche et Bernstein s'aperçoit dans l'encadrement de la porte à l'arrière plan, spectateur du conflit.Dans la Splendeur des Amberson (1942), Welles en jouant de la P.D.C., dans la scène du bal, met plus le spectateur en position de décider ce qui est important dans le plan (au sens cinématographique) ou ce qui mérite d'être regardé ; plusieurs niveaux de profondeur, donc de lecture, premier plan, second plan, arrière plan de l'image, sont ainsi en interaction. Diverses actions se jouent en même temps et interfèrent entre elles avec le rapprochement des deux jeunes gens ou celui des parents respectifs, dans les photogrammes 2 et 3... Le jeu des regards est important dans le fonctionnement des effets et amène des liens entre les plans de l'image, relayé par l'interpellation de la voix (quot; Lucyquot; ).A. Hitchcock dans Rebecca (1940) utilise moins de P.D.C. lors de la découverte de Manderley par son héroïne : cela contribue à donner une dimension quelque peu étrange, voire gothique, à la grande salle de la demeure et à la situation de parade/ revue des domestiques ; de même, cela permet de faire surgir dans les plans suivants un personnage que l'on n'avait pas aperçu avec l'inquiétante gouvernante, Mme Danvers. Les éclairages et les regards, outre le décor, ont ici un rôle essentiel.<br />La surimpression a été utilisée pour des effets spéciaux ou artistiques, et pas seulement pour des transitions. On superpose ainsi (au moins) deux images l'une à l'autre avec une intention esthétique, psychologique ou symbolique comme Abel Gance le fait avec des images de l'océan déchaîné et des scènes de la Révolution dans son Napoléon, en 1926. Voir aussi Citizen Kane de Welles avec les surimpressions des unes de presse et des visages de Susan ou de son professeur de chant, à la rubrique Langages et codes. <br />On observera que Gance superpose ici à l'image de Napoléon sur fond de mer en proie à la tempête (évocation métaphorique de la violence déchaînée) des images de bataille. Le dernier photogramme aggrave la surcharge symbolique avec la figure impériale de l'aigle.<br />Dans le thriller Un crime dans la tête (The Mandchurian candidate, 1962), John Frankenheimer utilise la surimpression pour présenter un personnage en train de raconter et en même temps montrer les images très subjectives du souvenir relaté. Miracle en Alabama : jeu de reflets<br /> <br />Dans Miracle en Alabama (The Miracle Worker, 1962), Arthur Penn utilise avec les reflets une forme de surimpression «naturelle» ; ainsi l'image d'Hélène Keller, réduite et transformée, se lit sur la surface de la boule et celle d'Annie Sullivan sur la vitre qui souligne la frontière entre deux espaces. L'image de l'enfant rappelle, bien entendu, un motif de la peinture hollandaise ou flamande tout comme Orson Welles sans doute...Le troisième photogramme est, à proprement parler, une surimpression ; cette image de nature subjective traduit une plongée dans la mémoire d'Annie; celle-ci revoit une figure de son passé qui la hante, celle de son frère abandonné. Dans les trois cas, le travail sur la lumière et les ombres est notable. « Vanité avec une boule de cristal » de Vincent Laurensz van der Vinne (1629-1702).L'éclairage peut être ainsi l'objet d'une élaboration savante, comme dans la peinture, avec le clair-obscur. On recherche des effets à valeurs diverses en jouant sur la lumière et l'ombre, voire en travaillant l'effet de cadre, comme dans cette image extraite de la Nuit du chasseur. <br /> <br />Le fondu consiste techniquement à l'origine à ouvrir ou fermer progressivement l'iris de la caméra, en faisant apparaître ou disparaître l'image, progressivement. L'ouverture à l'iris consiste à ouvrir sur l'écran, généralement noir, une image en élargissant un cache en forme de cercle, cf. infra pour Intolérance. La fermeture à l'iris consiste à noircir l'écran en rétrécissant le cercle de l'image visible à partir des bords ; voir un exemple d'usage symbolique de ce procédé par Orson Welles.<br />Avec le fondu enchaîné, on recherche un effet, en substituant progressivement une image à une autre qui s'efface ; il a un rôle syntaxique de transition par cette superposition. Les fondus sont utilisés comme effets pour marquer le temps, pour nous faire passer d'une séquence à l'autre, ainsi qu'on le voit ci-dessus avec ces trois photogrammes de Gervaise de René Clément. Dans ce cas singulier, la transition est accompagnée par la voix off de Gervaise qui commente les diverses étapes de sa propre vie. Ces fondus enchaînés ont donc un rôle de ponctuation, mais avec l'avènement de la vidéo, les films, les vidéo-clips comportent de plus en plus de volets : une image apparaît pour chasser ou balayer la précédente.<br />Trois images d'Intolérance de Griffith : ouverture à l'iris pour la séquence babylonienne.<br />Avec le fondu au noir ou au blanc, l'image s'assombrit ou s'éclaircit progressivement pour disparaître complètement. Ce fondu marque souvent la fin d'une étape, d'une période. Cette sorte d'extinction puis brève suspension des images filmiques par obscurcissement ou éclaircissement est transitoire ; elle peut servir à marquer un écart temporel entre deux séquences. Le fondu constitue ainsi un moyen efficace pour exprimer une ellipse narrative, qu'elle soit d'ordre temporel ou spatial.La fermeture au noir ou au blanc (fade out) est la disparition progressive de l'image de l'ensemble de l'écran. L'ouverture au noir ou au blanc (fade in) est le procédé inverse : on part de l'écran noir ou blanc sur l'ensemble de la surface d'écran pour aboutir progressivement à l'image.<br />Exemple de volets tiré de Citizen Kane : <br />Exemple de transition chez Renoir, dans la Règle du Jeu, 1939 :<br /> <br />Autre exemple, avec effet d'iris, tiré de La Nuit du chasseur de Ch. Laughton, 1955 : <br /> <br />On observera que cet exemple est intéressant pour poser la question du point de vue. <br />Le ralenti / accéléré : on peut faire varier le rythme de présentation des images. On décompose, par exemple, avec un ralenti les étapes d'un événement (mort d'un personnage, chute dans un western). Le ralenti peut avoir une valeur psychologique, suggérer une scène onirique ou donner une dimension magique... Voir Jean Cocteau, le Testament d'Orphée, 1960: quand le poète sort du laboratoire et s'en va croiser l'homme-cheval, sa démarche devient ainsi presque aérienne... <br />Sur le plan de la technique cinématographique, pour obtenir un ralenti, on filme les images à une vitesse plus rapide qu' à la normale pour projeter ensuite à la vitesse de 24 images/ seconde. Cela permet de décomposer le mouvement et des effets esthétiques. <br />LA NARRATION FILMIQUE <br />Remarques sur la narration et les points de vue...<br /> <br />Depuis ses origines pratiquement (Méliès, Porter, Griffith...) le cinéma est une machine à raconter des histoires ; dès le départ le film a ainsi croisé la route de la narrativité littéraire, soit qu'il s'inspire de romans en les adaptant, soit qu'il transpose des procédés narratifs, soit qu'il importe des codes génériques comme celui du western, du roman historique ou policier... Par là, on comprend qu'une étude de type narratologique soit féconde pour aborder des films narratifs fictionnels où les catégories d’intrigue, de personnages sont nettement prégnantes.Pour s'informer sur l'approche narratologique et se doter a minima d'outils et concepts d'analyse, on pourra consulter ces pages spécifiques. L'étude narratologique des textes littéraires aborde des éléments suffisamment généraux pour qu'on puisse aisément les transférer avec profit dans l'abord du cinéma, le film narratif étant une forme de récit en images. <br />Mais on se doit cependant de constater une spécificité du cinéma liée à ses diverses matières d'expression, véhiculées par divers canaux. Une analyse méthodique d'un récit cinématographique peut ainsi difficilement se passer de la prise en compte des dimensions visuelles et auditives des structures narratives : on peut en effet transmettre des éléments relevant de l'actantiel dans un film avec les visages, la position, les postures des acteurs, les angles de prises de vue, voire la musique... Les passages descriptifs, la présentation de l'espace ne fonctionnent pas comme dans un roman qui ne dispose quant à lui que des mots.<br />Le cinéma aux origines s’est bien sûr posé le problème de la narration : comment raconter efficacement, en effet, au temps du cinéma muet, une histoire par le seul biais des images mouvantes ? Si pour assurer la cohésion des scènes et donner une cohérence explicite aux plans et aux séquences, on a utilisé d'abord un commentateur externe lors de la projection, très vite on a intégré au film des cartons, des intertitres, des discours écrits introductifs pour contextualiser... Mais certains cinéastes ont ambitionné de réaliser des oeuvres sans mentions écrites, en quelque manière senties comme plaquées, tels F-W. Murnau avec Le Dernier des hommes en 1924 ou D. Vertov dans L'homme à la caméra en 1929. Observons ici au passage que les cartons ou autres écrits intégrés au film relèvent du discours d'un narrateur extradiégétique. <br />L'analyse de la narration met en évidence cette spécificité : l'énonciation filmique ne passe pas pour l'essentiel par l'énonciation linguistique et n'est pas à caractère déictique. Le cinéma représente autant qu'il raconte à l'instar du genre dramatique : comme au théâtre on semble ne pas pouvoir parler de narrateur car on n'est plus dans le simple domaine du discours narratif mais dans celui de la représentation. Ainsi, le récit cinématographique ne sera jamais vraiment comme un récit écrit, d'ordre scriptural, pour la seule raison que si l’un est quot; polyphoniquequot; , l’autre reste quot; monodiquequot; . En fin de compte, le récit filmique renvoie au théâtre parce qu’il met en scène des actions, mais il renvoie aussi au roman parce qu’il utilise le verbe ou réinvente la narration. <br />Par ailleurs, il convient d'observer que dans le cas du film la communication est aussi différée et quot; figéequot; : on opposera donc une narration orale qui se fait quot; en présencequot; , avec des interactions locuteur / interlocuteur(s), à la narration filmique qui, tout comme la narration écrite, se fait quot; en absencequot; ... La communication orale d'un conte est mouvante comme le spectacle théâtral alors que le film nous donne une version figée par la mémoire artificielle de la pellicule.<br /> <br />1. Enonciation et narration au cinéma : aspects spécifiques<br />L'énonciation filmique souvent ne semble pas manifester de marques spécifiques et le cinéma, dans sa période classique tout au moins, a essayé d'occulter son processus d'énonciation et les traces d'une émission. De là, une apparente transparence du cinéma où l'histoire quot; racontéequot; semble le plus souvent s’engendrer d’elle-même car, en apparence du moins, personne n’est là pour la raconter et elle semble se dérouler simplement sous nos yeux. Toutefois, il convient de percevoir que ce qui se montre à nos yeux, dans tout film narratif de fiction, depuis L’Arroseur arrosé des frères Lumière comme d'ailleurs leurs documentaires, est bien organisé et passe par un processus d'énonciation et de structuration du discours. Cette énonciation est repérable par certaines images ou par leur agencement qui nous donnent à voir de façon humainement impossible, non naturelle, non spontanée, non objective. Certains indices rompent ainsi l'illusion référentielle et manifestent la présence d'un narrateur fondamental, virtuel, appelé «le grand imagier» ou le maître de cérémonie par Albert Laffay, dans la Logique du cinéma. Ainsi, une opposition par passage du flou au net, un changement d'échelle, l'usage de la contre-plongée sont révélateurs... Dans un discours filmique, un jeu musical servant à mettre en relief un mouvement dramatique ou un mouvement de la caméra fixant en gros plan le visage d'un acteur, afin d’en souligner l’expression psychologique, peuvent s'interpréter comme des marques d’une énonciation. En quelque sorte, un narrateur virtuel tourne pour nous les pages de l'histoire et c'est bien lui qui attire, d'une manière ou d'une autre, notre attention sur tel détail, insignifiant en apparence, par une image rapide ou par la composition du cadre, d&ap