L’entrepreneuriat est un phénomène complexe et pluriel qu’il convient d’appréhender dans sa dimension globale, en ne se focalisant pas exclusivement sur son acceptation économique (développement de nouvelles activités économiques et/ou création d’entreprise) mais bien en l’étudiant de façon dynamique : c’est tout le sens de l’expression « esprit d’entreprendre ».
Les jeunes de 2014, que nous avons approché en utilisant le concept de génération, sont de plus en plus sensibilités à l’esprit d’entreprendre du fait de la multiplication des initiatives publiques comme privées. Différentes formes d’entrepreneuriat existent comme l’engagement associatif. Quant à l’essor de la création d’entreprise, il apparait comme évident que les opportunités de par l’existence de structures variées d’accompagnement dépassent largement les contraintes qui sont principalement subjectives et non pas objectives.
Le grand défi des années à venir est alors l’éveil de l’esprit d’entreprendre tout au long de la vie et non pas uniquement chez les plus jeunes. De cette façon, entreprendre peut s’apparenter à un véritable art de vivre.
Ailes Musicales : projet de création d'une boite de production de spectacles ...
Existe-t-il un âge pour entreprendre ?
1. !
Note De Synthèse
!
Candidature pour le Master 264 : Entrepreneuriat et
projets innovants
Numéro de dossier : YEJLZNC6
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!!!!
Ludovic Craïssac
Avril 2014
!!!
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"1
2. !!!
Sommaire
!
!
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Introduction 3
I. L’esprit d’entreprendre chez les jeunes: une
dynamique en marche ? 5
1. L’approche globale du phénomène entrepreneurial 5
2. Le cas de l’engagement associatif des jeunes en France 7
II. L’esprit d’entreprise chez les jeunes: entre
contraintes et opportunités : 9
1. Des contraintes objectives et subjectives à nuancer 9
2. De nombreux dispositifs publics et privés à saisir 12
Conclusion 14
Bibliographie 15
!
!
!
!
!
!
!!
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"2
3. Introduction
!
Du 14 janvier au 29 avril 2013, se sont tenues les premières assises de
l’entrepreneuriat en France, organisées par Mme Fleur Pellerin, déléguée auprès
du ministre du Redressement productif, chargée des petites et moyennes
entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique 1. Organisées autour de 9
thématiques de travail, comme la mobilisation des talents pour la création
d’entreprise ou l’entrepreneuriat des jeunes, ces assises entendent créer un
environnement propice à l’entrepreneuriat en France.
Depuis le début des années 2000, la thématique de l’entrepreneuriat est à
l’agenda politique des pouvoirs publics français et européens, en témoigne les
nombreuses lois françaises comme celle sur l’Innovation de 1999 (dite loi
Allègre) ou plus récemment la loi de Modernisation de l’économie de 2008 qui
crée notamment le régime de l’auto-entrepreneur, accélérant irrémédiablement
le nombre de création d’entreprises. L’Union européenne s’est également
emparée du sujet en adoptant entre autres l’agenda d’Oslo en octobre 2006, à la
suite de la conférence « Entrepreneurship Education in Europe : Fostering
entrepreneurial mindsets throught education and learning »2 ; cet agenda
s’insérant dans la stratégie de Lisbonne visant à faire de l’UE « l’économie de la
connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde capable d’une
croissance économique durable, accompagnée d’une amélioration quantitative
et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale. »3
En étudiant le terme « entreprendre » du sujet retenu, il apparait
nécessaire de ne pas considérer l’entrepreneuriat sous sa seule dimension
économique. En effet, comme l’explique Catherine Léger-Jarniou4:
l’appréhension de l’entrepreneuriat comme « l’action humaine consistant à
entreprendre pour générer de la valeur en créant ou en développant des activités
économiques grâce à l’identification et à l’exploitation de nouveaux produits,
1 Le site internet des assises de l’entrepreneuriat est accessible en ligne : http://www.redressement-productif.
gouv.fr/assises-entrepreneuriat
2 L’ensemble des documents entourant l’agenda d’Oslo est accessible sur le site de la DG Entreprises et industrie
de la Commission européenne : http://ec.europa.eu/enterprise/policies/sme/promoting-entrepreneurship/
education-training-entrepreneurship/policy-framework/2006-conference/index_en.htm
3 Conclusions du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000, paragraphe 5 (ligne d’action).
Document accessible en ligne : http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/
00100-r1.f0.htm
4 Catherine Léger-Jarniou (dir), 2013, Le grand livre de l’entrepreneuriat, éditions Dunod, pp7-8
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"3
4. processus ou marchés » apparait comme réductrice, ne permettant 5 pas de saisir
le phénomène d’entrepreneuriat dans toute sa complexité. Partir du verbe
entreprendre pour saisir ce phénomène nous invite à étudier l’entrepreneuriat
de façon globale, s’inscrivant dans un environnement social et environnemental
donné, porté par des acteurs pluriels agissant en accord avec des valeurs et des
référentiels d’action propres. Au cours de cette note de synthèse, nous tenterons
donc de nous inscrire dans cette approche de l’entrepreneuriat combinant
« esprit d’entreprise » et « esprit d’entreprendre »6.
Si nous passons maintenant à la question de l’âge également présente
dans le sujet, associée au verbe « exister » qui sous-tend une donnée naturelle,
notre réflexion tend évoluer vers la problématique générale : est-ce que l’âge
constitue une contrainte ou une opportunité pour entreprendre ? Au cours de
cette note de synthèse nous tenterons d’apporter un éclairage nuancé à cette
problématique en nous focalisant sur la jeunesse. Il est indéniable que cette
focalisation induit un biais d’analyse, se justifiant néanmoins par les contraintes
de l’exercice imposant un format court et une envie personnelle d’approfondir
cette problématique de fond. Enfin, par « jeunesse », nous adoptons un point de
vue culturaliste comme le fait Chantal Nicole-Drancourt 7en considérant les
jeunes d’aujourd’hui comme des individus fédérés par des valeurs et des
références communes. Cette approche prend tout son sens avec la génération
« mai 1968 ». Dans notre cas, nous nous focaliserons sur la génération
« Internet » née entre les années 1990 et le début des années 2000, notamment
marquée par un contexte de globalisation pluriel et complexe8, l’essor des
nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’émergence de
préoccupations environnementales, etc.
De fait, l’étude de notre sujet nous emmène à essayer de comprendre
si le fait d’être jeune est un facteur contraignant, un frein ou bien un
stimulateur, une ressource pour entreprendre? Nous utiliserons
successivement les notions d’« esprit d’entreprendre » et d’« esprit d’entreprise »
pour rendre compte des dynamiques principales de l’entrepreneuriat chez les
jeunes en 2014.
5 OCDE, 2012, Panorama de l’entrepreneuriat, page 9
6 Catherine Léger-Jarniou (dir), 2013, Le grand livre de l’entrepreneuriat, éditions Dunod, pp8
7 Chantal Nicole-Drancourt, 1996, Historique du sujet et statut du sujet. L’apport de la sociologie du comportement dans Les
jeunes et l’emploi, recherches pluridisciplinaire, Paris, La documentation Française.
8 C’est notamment l’approche adoptée par Michel Serres, 2011, Petite Poucette, Manifeste Le Pommier
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"4
5. I. L’esprit d’entreprendre chez les jeunes: une dynamique en
marche ?
Comme nous l’avons évoqué en introduction, l’esprit d’entreprendre (qu’il
est possible de traduire par « entrepreneurial spirit ») ne doit pas être confondu
avec l’esprit d’entreprise (« spirit of enterprise »). Le fait d’entreprendre se réfère
à l’action et à la prise d’initiative de façon globale. Concrètement, c’est le fait de
mener un projet sur une période donnée, avec des ressources et des acteurs
s’inscrivant dans un environnemental social et environnemental mouvant.
!
1. L’approche globale du phénomène entrepreneurial
L’esprit d’entreprise correspond à un faisceau de compétences plurielles et
variées que tente de mettre en exergue le référentiel de compétences
Entrepreneuriat et Esprit d’entreprendre reconnu par le ministère de
l’Enseignement supérieur et de la
recherche lors de la conférence des
président d’universités et le
MEDEF . Ce 9 référentiel entend
offrir un cadre à l’ensemble des
programmes de formation des
étudiants du système français. Il
définit des objectifs par niveau
d’étude, s’inscrivant dans le système
LMD du processus de Bologne, et
précise les compétences associées à
chaque étape de formation. Ce qu’il
faut bien garder à l’esprit c’est que
l’approche par les compétences de
l’entrepreneuriat est celle qui est
dominante auprès des pouvoirs
publics. C’est également le cas du
Permis d’Entreprendre qui vise à
aider les étudiants à découvrir les compétences entrepreneuriales : pro-activité,
adaptation, autonomie, créativité, responsabilité, etc.
Les objectifs du référentiel de compétences Entrepreneuriat et
Esprit d’entreprendre pour les formations de niveau Licence.
9 Référentiel de compétences Entrepreneuriat et Esprit d’entreprendre, octobre 2010, 22 pages, disponible en
ligne : http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2013/09/referentiel_entrepreneuriat_def.pdf
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"5
6. De fait, des initiatives sont à noter, signe d’une prise de conscience de la
nécessité de considérer l’entrepreneuriat de façon globale en tant que prise
d’initiatives et conduite de projets. Cependant, beaucoup reste à faire et la vision
de l’entrepreneuriat comme la simple création de nouvelles entreprises reste
dominante au sein du monde académique mais aussi auprès des pouvoirs
publics. Par exemple, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a identifié comme
objectif principal des assises de l’entrepreneuriat évoquées en introduction de
doubler le nombre de création d'entreprise par an sur le territoire d’ici à cinq
ans. C’est également le cas de la Commission européenne qui considère
l’entrepreneuriat sous sa seule dimension « création d’entreprise ». Pour
renforcer la prise de conscience auprès des jeunes de ce qu’est l’esprit
d’entreprendre « les voies de progrès s’inscrivent dans le métissage des
approches, des programmes développés et des acteurs, selon un processus allant
de l’éveil entrepreneurial au développement d’un potentiel entrepreneurial puis
à la décision d’entreprendre. » Nous sommes face à 10 un véritable potentiel
d’ouverture des formations, couplé à l’essor d’actions en dehors du champs
strictement scolaire. L’enquête Créactiv-Université de Nantes11 réalisée en 2008
montre très clairement l’importance des échanges d’expériences entre
professionnels et étudiants comme dans le cas des Journées de l’Entrepreneur ou
encore les Start-Up weekends. Enfin, l’esprit d’entreprendre est de plus en plus
valorisée par les recruteurs comme ce fut le cas dans mon cas, lors de mon
entretien pour un stage six mois chez Solocal group, il m’a été demandé ce que
je pensais de la « capacité à entreprendre » d’un individu et si c’était important
pour un stagiaire dans une direction des relations institutionnelles d’une grande
entreprise.
!
Comme nous venons de le voir une dynamique est en marche en faveur
des jeunes pour tenter de les sensibiliser à l’importance de l’esprit
d’entreprendre, tant de la part des pouvoirs publics que des acteurs privés.
Toutes les formes d’acculturation à l’esprit d’entreprise ne débouchent pas
forcément sur la création d’entreprise. C’est le cas de l’engagement associatif
que nous allons évoquer maintenant, en tant que dynamique de création,
conduite de projets, prise de risque et responsabilisation des actions.
10 Nathalie Schieb-Bienfait, 2013, dans Le grand livre de l’entrepreneuriat, Catherine Léger-Jarniou (dir), éditions
Dunod, p 205
11 Ibid p 205
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"6
7. 2. Le cas de l’engagement associatif des jeunes en France
!
L’engagement associatif peut être considéré comme une expression de
l’esprit d’entreprendre. Cette forme d’engagement a été choisie comme grande
cause nationale en 2014 signe là encore d’une prise en compte progressive mais
continue de l’esprit d’entreprendre en France et plus généralement en Europe.
Les jeunes sont tout particulièrement concernés par l’engagement
associatif. Les associations sont définies comme des « concrétiseurs de
l’action » et perçues comme garantes d’un changement 12 concret de la société
par les actes. Il existe une véritable attractivité des jeunes pour le monde
associatif : d’après les chiffres de l’observatoire de la jeunesse13 plus d’un tiers
des jeunes français adhèrent à au moins une association14. Depuis les années
1990, les taux d’adhésion sont relativement stables, c’est donc une tendance de
fond qui s’observe depuis plus de 20 ans maintenant. Toutefois, si on affine un
peu les chiffres comme le fait Valérie Becquet15, 61% des jeunes membres d’une
association se déclarent actifs et seulement 15% d’entre eux occupent une
position hiérarchique au sein de l’association. Il est également important de
noter que de nombreux jeunes s’engagent dans des projets ponctuels qui ne
donnent pas lieu à la création d’une organisation propre. Toujours selon Valérie
Becquet, 63,5% des jeunes engagés dans une ou plusieurs associations affirment
que c’est la dimension utilitariste qui justifie leur engagement : par dimension
utilitariste il faut comprendre l’envie d’être utile, l’importance des actions et le
goût d’entreprendre. Bien entendu, d’autres facteurs d’engagement existent
comme la dimension relationnelle mais ce qui est important dans notre étude
c’est bien de montrer que l’engagement associatif est une des formes de
matérialisation de l’esprit d’entreprendre chez les jeunes. A ce titre, l’association
France bénévolat16 a réalisé en 2007/2008 l’enquête « BOB » (baromètre de
12 Valérie Becquet, 2009, « L’engagement des jeunes dans l’espace public », dans Roudet Bernard (dir.), Regard sur les
jeunes en France, Presses de l’université Laval (Québec)/INRS/INJEP, pp. 103-122.
13 Disposant d’un site internet : http://www.injep.fr/
14 Observatoire de la jeunesse, mai 2011, Etudes et synthèses : des jeunes plus engagés dans la vie de la cité, étude réalisée
par Bernard Roudet
15 Valérie Becquet, 2009, « L’engagement des jeunes dans l’espace public », dans Roudet Bernard (dir.), Regard sur les
jeunes en France, Presses de l’université Laval (Québec)/INRS/INJEP, pp. 103-122.
16 Site internet disponible en ligne : http://www.francebenevolat.org/
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"7
8. l’opinion des bénévoles) où nous pouvons constater dans le tableau ci-dessus17
que près de la moitié des jeunes engagés dans une association font du « besoin
d’activités » un facteur déclenchant de l’engagement associatif. La
reconnaissance d’un certain dynamisme au sein de l’association est également
un facteur clé expliquant leur engagement.
S’engager dans une association n’est pas une activité anodine. Il s’agit
dans bien des cas de conduire des projets sur une certaine durée, d’être
responsable devant les autres membres des actions prises au nom de l’association
et même de devoir gérer un budget et des ressources affectées annuellement
principalement par des cotisations et/ou des subventions. La constitution des
dossiers de demandes de subventions elles-mêmes constituent une socialisation à
l’entrepreneuriat, constituée de pratiques administratives où les appels à projets
prennent une place de plus en plus importante.
!
Nous avons tenté de le montrer, l’esprit d’entreprendre chez les jeunes est
de plus en plus encouragé, se matérialisant sous différentes formes comme
l’engagement associatif. La création d’entreprise et l’essor de nouvelles activités
économiques que nous allons maintenant considérer constituent une autre
forme de concrétisation de l’esprit d’entreprendre
!
17 Enquête BOB, France bénévolat, 2008, L’engagement bénévole chez les jeunes, sous la direction de Dominique
Thierry, document disponible en ligne : http://www.francebenevolat.org/uploads/documents/
3a1afd7ed071c247539efb2090ca0d6ef491a978.pdf
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"8
9. II. L’esprit d’entreprise chez les jeunes: entre contraintes et
opportunités :
Au cours de cette seconde partie nous nous insérons dans la définition de
l’entrepreneuriat fournie par l’OCDE citée en introduction (page 4) : le
développement de nouvelles activités économiques par la création de nouvelles
entreprises. Selon les chiffres fournis dans Le grand livre de l’entrepreneuriat18, 24%
des créateurs d’entreprises ont moins de 30 ans et seulement 9% ont moins de
25 ans : soit une estimation de 131.000 entreprises créées en 2011 par des jeunes
de moins de 30 (dont 82.000 avec le régime d’auto-entrepreneurs). La création
d’entreprise chez les jeunes est fortement corrélée au niveau d’études : plus des
3/4 des créateurs d’entreprises en 2011 sont issus de l’enseignement supérieur.
Concernant les domaines d’activités, la moitié des créateurs offre des services
aux entreprises (commerce et construction en tête). Une fois ce bref état des
lieux réalisé, il convient d’étudier les dynamiques à l’oeuvre favorisant ou
freinant le processus d’entrepreneuriat.
!
1. Des contraintes objectives et subjectives à nuancer !
Lorsque je me suis rendu à la StartupKeynote organisée par Learn
Assembly et Maddyness le 12 mars dernier, j’ai pu m’entretenir avec Xavier
Zeitoun, fondateur et CEO de 1001 Menus, Rodolphe Menegaux, senior
Investment Manager, XAnge Private Equity et Morgan Angov, fondateur et
CEO de l’application mobile U&I. Tous trois ont alors affirmé que le fait d’être
jeune n’est pas un handicap en soi. Ce sont plutôt les attributs normatifs associés
à la jeunesse qui constituent des freins à la création et au développement d’une
entreprise : manque de ressources financières, difficulté à appréhender un
environnement complexe et défaut d’une culture du risque en tête.
Le manque de ressources financières est le premier attribut normatif
associé au fait d’être jeune. Le passage entre le monde académique et le monde
professionnel se fait dans la majorité des cas avec des ressources financières
limitées. C’est ce qu’à démontré de façon plus argumentée Modigliani avec sa
théorie du cycle de vie19. En effet, il montre que le patrimoine des jeunes
individus est en règle générale faible voire négatif du fait notamment de crédits
18 Nathalie Schieb-Bienfait, 2013, dans Le grand livre de l’entrepreneuriat, Catherine Léger-Jarniou (dir), p 197
19 Franco Modigliani, 1960, The permanent income and the life cycle hypothesis of saving behaviour:
comparison and tests
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"9
10. contractés en début de carrière professionnelle. Le graphique ci-dessous entend
rendre compte de façon plus explicite cette théorie20.
Or ce manque de ressources financières de la part des jeunes est un frein
objectif à la création d’une entreprise. Toutefois cette approche par la contrainte
est à nuancer fortement car elle considère l’individu comme isolé de la société.
Ce dernier est bien au contraire encastré dans une myriade de réseaux plus ou
moins connectés qui offrent de fortes possibilités de financement en amorçage :
des business angels (avec de nombreux réseaux comme Investessor ou Investir en
direct), des fonds d’investissements d’amorçage (Partech Ventures ou Ventech),
des fonds d’investissements d’entrepreneurs (Kima ventrues fondé par Xavier
Niel et Jérémie Berrebi) ou encore l’essor du crowdfunding (la plateforme
américaine Kickstarter par exemple). De très nombreuses autres contraintes
objectives pourraient être développées : acculturation aux codes formels et
informels propres au monde de la création d’entreprise (faire un business plan
ou savoir faire un pitch), choix d’une structure juridique parmi les très
nombreuses possibilités en France (entreprise individuelle, société à
responsabilité limitée, société anonyme), etc. Là encore, les contraintes de cette
note de synthèse ne me permettent pas de prétendre à l’exhaustivité.
20 Ce dernier est extrait du cours de macroéconomie d’Olivier Brossard en 2e année à Sciences Po Toulouse.
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"10
11. Une autre catégorie de contraintes agit également comme un frein à la
création d’entreprise particulièrement chez les jeunes : les contraintes
subjectives. Parmi celles-ci, l’absence d’une culture de l’échec socialement
valorisée en France contribue à une auto-limitation incorporée de
l’entrepreneuriat chez les jeunes. En effet, un véritable gap existe entre la
volonté affirmée des jeunes de créer une entreprise et le passage à l’acte, qui est
très limité comme nous l’avons vu dans le chapeau introductif de notre
deuxième partie. Le sondage Opinion-Way pour l’APCE de 201021 montre que
plus de la moitié des jeunes français de 18 à 29 ans ont « l’intention de créer une
entreprise un jour ». Ce sondage est corroboré par de nombreuses études
comme l’affirme Nathalie Schieb-Bienfait22. Cette véritable aversion pour le
risque, ce que nous appelons ici la peur de l’échec, constitue une contrainte
majeure à l’entrepreneuriat chez les jeunes. Là encore, de nombreuses initiatives
ont successivement émergé pour tenter de libérer les volontés : c’est par exemple
le cas de l’article très détaillé « naissance, vie et mort de ma startup »23 de
Guilhem Bertholet retweeté plus de 500 fois et partagé des centaines de fois sur
d’autres réseaux sociaux comme Facebook ou Google+. Son long article fournit
un retour d’expériences sur l’échec d’une création d’entreprise. Nous pouvons
également citer le récent ouvrage de Robert Greene24 où ce dernier montre que
les grands entrepreneurs (reconnus comme tels) comme Steve Jobs ont connu de
très nombreux échecs dans leurs carrières. Néanmoins ce type d’initiatives est
plutôt anecdotique. Une véritable barrière cognitive semble perdurer
principalement du fait de l’absence de transmission de valeurs entrepreneuriales
dès le plus jeune âge, telles que le sens du risque et l’acceptation de l’échec, ce
dernier n’étant pas une fin en soi mais bien une expérience à valoriser.
!
Nous venons de le voir, l’esprit d’entreprise chez les jeunes est
principalement contraint par des facteurs subjectifs et dans une moindre mesure
par des facteurs objectifs. Face à ces contraintes, il existe de très nombreuses
opportunités que nous allons étudier maintenant.
21 Opinion-Way pour l’APCE, Les jeunes et l’intention entrepreneuriale, 2010, 1024 personnes interrogées de 18
à 29 ans disponible en ligne : http://media.apce.com/file/41/6/intention_entrep_jeunes.29416.pdf
22 Nathalie Schieb-Bienfait, 2013, dans Le grand livre de l’entrepreneuriat, Catherine Léger-Jarniou (dir), p 199
23 Blog de Guilhem Bertholet : http://www.guilhembertholet.com/blog/2013/07/18/post-mortem-naissance-vie-
et-mort-de-ma-startup-fail/
24 Robert Greene, mars 2014, Atteindre l’excellence, éditions Leduc.s
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"11
12. 2. De nombreux dispositifs publics et privés à saisir
!
Depuis la création des Maisons de l’entrepreneuriat au sein
d’établissements d’enseignement supérieur en 2001, les pouvoirs publics français
et européens n’ont eu de cesse de porter de nouveaux dispositifs pour favoriser
l’entrepreneuriat des jeunes. De fait, l’Union européenne a fortement contribué
à l’émergence de ces dispositifs à l’échelle nationale : dans l’agenda d’Oslo de
2006 mentionné en introduction de cette étude, nous pouvons citer l’objectif A4
« mettre en place des stratégies nationales en faveur de la formation à
l’entrepreneuriat » ou encore l’objectif B1 « mieux intégrer les programmes et
activités liés à l’entrepreneuriat dans les cursus officiels des établissements
scolaires à tous les niveaux (primaire, secondaire et professionnel). »25
En France, on assiste à la montée en puissance des dispositifs en faveur de
l’entrepreneuriat étudiant vers la fin des années 2000 avec le lancement du plan
d’action national Etudiants entrepreneurs en 2009 mais aussi avec les assises de
l’entrepreneuriat de 2013. Pour être plus concret, il peut être intéressant de se
focaliser sur le plan « Entrepreneuriat étudiant » adopté à la suite desdites
assises. Il repose sur quatre axes principaux : 1/ généralisation des formations à
l’entrepreneuriat ; 2/ lancement d’un appel à projet pour la formation de 30
pôles pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat (PEPITE) ; 3/ lancement
d’un prix « Tremplin entrepreneuriat étudiant » récompensant chaque année 50
lauréats avec des prix de 10.000€ pour la création d’entreprise et 4/ création du
statut « étudiant entrepreneur ».
La création de ce statut est peut être le dispositif le plus incitatif : il
permettra dès la rentrée 2014 aux jeunes diplômés de conserver leur statut
étudiant tout au long de la période de création d’entreprise, par l’intermédiaire
de l’inscription dans un diplôme d’université. De fait, ce statut permet de
conserver tous les avantages liés au statut étudiant : mutuelle à des prix
préférentiels, aides au logement, bourses de l’enseignement supérieur, etc.
A côté des dispositifs publics d’aide à la création d’entreprise pour les
jeunes, existent également des structures privées d’accompagnement. Nous
pouvons noter tout d’abord les très nombreux réseaux d’entrepreneurs comme
« Parrainer la croissance », « France Digitale » ou encore le « Centre des jeunes
dirigeants ». La force de ces réseaux repose sur l’échange d’expériences est le
25 L’ensemble des documents entourant l’agenda d’Oslo est accessible sur le site de la DG Entreprises et
industrie de la Commission européenne : http://ec.europa.eu/enterprise/policies/sme/promoting-entrepreneurship/
education-training-entrepreneurship/policy-framework/2006-conference/index_en.htm
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"12
13. partage d’informations. Cet échange d’expériences est l’un des vecteurs
principaux poussant à la création d’entreprise. Comme le montre Scott
SHANE, « les entrepreneurs découvrent les opportunités liées à l’information
qu’ils détiennent déjà » . Il distingue alors 26 trois types d’information qui
poussent à l’entrepreneuriat: celles qui concernent les marchés, celles portant sur
les différentes façons de servir les marchés et celles en relation avec les problèmes
des consommateurs. De fait, les réseaux d’entrepreneurs constituent des noeuds
de concentration de ces trois types d’information de par l’organisation de
conférences thématiques, de rencontres informelles et de partage d’expériences.
J’ai notamment pu me rendre compte de cela lors d’événements organisés
par Learn Assembly, plateforme dédiée à l’entrepreneuriat lancée par Antoine
Amiel. Par exemple, lors de la conférence du mardi 1er avril sur la
consommation collaborative, j’ai pu m’entretenir avec Francois De Landes, co-cofondateur
de Sejourning et de Misterbnb. Grâce à ces échanges, j’ai pu
intégrer un autre regard sur la consommation collaborative, plus concrète et
moins idéalisée, notamment concernant le choix du modèle économique
particulièrement difficile à trouver sur ce marché naissant.
A côté de ces réseaux, il existe également d’autres structures
d’accompagnement à la création d’entreprise pour les jeunes comme les
incubateurs de plus en plus présents dans l’environnement entrepreneurial : des
incubateurs d’écoles, des accélérateurs privés comme 50 partners ou encore des
incubateurs portés par des grandes sociétés comme Orange avec le Orange Fab.
Nous pouvons enfin citer le cas d’événements comme les StartupWeekends ou
même les StartupBus, réunissant des dizaines de jeunes dans un bus à travers
toute l’Europe pour échanger sur la création d’entreprise27. Là encore, nous ne
prétendons pas à l’exhaustivité et une étude plus poussée permettrait une
approche plus détaillée.
!
Nous venons de le voir, il existe une grande variété de dispositifs
d’accompagnement pour créer son entreprise, qu’ils soient publics ou privés. La
création d’entreprise est de fait un nouvel impératif promu et valorisé par une
coalition d’acteurs variés (Union européenne, Etat, collectivités territoriales,
réseaux d’entrepreneurs, grandes entreprises).
26 Scott SHANE, 2000, Prior knowledge and the discovery of entrepreneurial opportunities, Organization Science,
11, 4, p. 448-469
27 Plus d’informations sont disponibles sur leur site internet : http://europe.startupbus.com/all-buses/
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"13
14. Conclusion
!!
L’entrepreneuriat est un phénomène complexe et pluriel qu’il convient
d’appréhender dans sa dimension globale, en ne se focalisant pas exclusivement
sur son acceptation économique (développement de nouvelles activités
économiques et/ou création d’entreprise) mais bien en l’étudiant de façon
dynamique : c’est tout le sens de l’expression « esprit d’entreprendre ».
Les jeunes de 2014, que nous avons approché en utilisant le concept de
génération, sont de plus en plus sensibilités à l’esprit d’entreprendre du fait de la
multiplication des initiatives publiques comme privées. Différentes formes
d’entrepreneuriat existent comme l’engagement associatif. Quant à l’essor de la
création d’entreprise, il apparait comme évident que les opportunités de par
l’existence de structures variées d’accompagnement dépassent largement les
contraintes qui sont principalement subjectives et non pas objectives.
Le grand défi des années à venir est alors l’éveil de l’esprit d’entreprendre
tout au long de la vie et non pas uniquement chez les plus jeunes. De cette
façon, entreprendre peut s’apparenter à un véritable art de vivre.
!!!!!!!!!!!!!!!
NOTE DE SYNTHESE LUDOVIC CRAÏSSAC"14
15. Bibliographie
!
Ressources académiques:
!!
Francis BECARD, décembre 2011, Panorama national de l’enseignement de l’entrepreneuriat,
innovation et de l’entrepreneuriat ! étudiant
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ligne : http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2013/09/referentiel_entrepreneuriat_def.pdf
Site internet des assises de l’entrepreneuriat est accessible en ligne : http://www.redressement-productif.gouv.fr/
assises-entrepreneuriat
Site internet de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) : http://www.injep.fr/
Site internet de France bénévolat : http://www.francebenevolat.org/
Site du ministère de l’enseignent supérieur sur l’entrepreneuriat étudiant : http://www.enseignementsup-recherche.
gouv.fr/pid25427/entrepreneuriat-etudiant.html
Stratégie de Lisbonne : conclusions du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000,http://
www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/00100-r1.f0.htm
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