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La contractualisation juridique des communs
Par Jérôme Giusti, avocat, 11.100.34. Avocats Associés
L’objet de la présente étude est d’envisager les modalités possibles d’encadrement contractuel des
communs apportés, créés et développés, dans le cadre de la Fabrique des Mobilités, en
collaboration avec l’ensemble des acteurs qui y participent.
Cette étude fait suite à une première réflexion menée dans le cadre du Livre Blanc, paru en juin
2015, sous l’article « Instituer un droit des communs pour la Fabrique des Mobilités ».
Parmi les préconisations contenues dans ce premier article, nous avions notamment envisagé que
la Fabrique des Mobilités puisse jouer le rôle d’une instance de régulation, en proposant à ses
membres des outils juridiques leur permettant de régir les conditions et modalités de leur
participation à la création, l’usage voire l’exploitation des communs.
Un schéma contractuel était ainsi proposé, selon le niveau d’engagement que souhaitent les
protagonistes et les interactions pouvant exister entre eux. Ce schéma prévoyait une
contractualisation en « entonnoir » : de la simple adhésion à une charte de valeurs vers la
contractualisation de licences dites « ouvertes », à la possible conclusion de partenariats bipartites
ou multipartites ad hoc, privilégiant la réciproque.
Depuis, notre objectif a été de confronter ce schéma contractuel avec les besoins exprimés par les
membres de la Fabrique des mobilités sur des projets concrets actuellement en cours, d’en valider
l’analyse par rapport à des pratiques contractuelles émergentes, notamment dans le domaine des
licences dites « à réciprocité » et enfin, de proposer des modèles de contractualisation possibles et
originaux.
Cette note est la restitution de ces travaux.
Elle donne lieu à la proposition de deux documents :
(i) Une « charte de valeurs », destinée à tous les membres de la Fabrique des Mobilités,
présentant les conditions d’utilisation des ressources alimentées et gérées en son sein,
à des fins exclusivement non commerciales et à condition de partager avec les autres
membres toutes copies et versions dérivées de ces ressources ;
(ii) Une licence d’exploitation, y compris commerciale, de ces ressources, réservée aux
membres ayant contribué à leur réalisation, à leur enrichissement, à leur amélioration
ou à leur perfectionnement des ressources, sous réserve d’une rétribution équitable des
autres contributeurs.
*****
L’existence des communs dans notre droit positif est consacrée par l’article 714 du Code civil, dont
la rédaction est inchangée depuis la loi du 19 avril 1803. Depuis la définition, très générale, donnée
par cet article, l’acception des communs s’est enrichie, tant par la loi, qui a réglementé certaines
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catégories de communs, que par des écoles, groupements et/ou communautés qui ont tenté de
mettre en œuvre des licences pour en administrer l’utilisation voire l’exploitation commerciale, sous
certaines conditions de réciprocité.
Il existe ainsi une sorte de « taxinomie » des communs, qui peuvent être ainsi identifiés en fonction
de leur nature et de leur mode d’administration.
Concernant leur administration, seule question qui nous occupe dans le cadre de la présente étude,
deux grands modèles de contractualisation coexistent :
(i) Une mise à la disposition du public des communs, généralement la plus large possible,
dans le cadre de licences « ouvertes » ;
(ii) Un partage sous conditions des communs au sein d’une communauté d’intérêts, dans
le cadre de licences dites « à réciprocité ».
Dès lors que la Fabrique des Mobilités a pour vocation de créer une plateforme de partage
d’informations et de ressources entre les différents acteurs de la mobilité, avec l’institution de droits
et de devoirs respectifs entre les parties, le modèle des licences à réciprocité, plutôt que des licences
ouvertes, devrait à notre sens être privilégié.
Il s’agit alors de voir comment et de proposer des schémas contractuels possibles.
Après avoir rappelé les différentes acceptions des communs qui existent à date (I), la présente étude
examine donc les tentatives de licences proposées ou mises en œuvre pour régir l’utilisation des
communs dans un double objectif d’ouverture et de réciprocité (II) et émet des recommandations
sur les outils contractuels à envisager pour la Fabrique des Mobilités afin que les communs qui en
émergent puissent faire l’objet d’échange entre les membres, à titre désintéressé mais également à
titre commercial (III).
I. LES DIFFERENTES ACCEPTIONS DES COMMUNS
A côté de la conception « classique » s’appliquant à tous les communs en général (A), il existe une
catégorie de communs propres au domaine des transports et des mobilités, récemment consacrés
par le législateur : les données d’intérêt général (B).
A. Les communs en général
La notion de communs peut revêtir aujourd’hui plusieurs acceptions juridiques, découlant tant de
la loi que des choix de communautés humaines. Ce peut être une chose qui n’appartient à personne
et dont l’usage est commun à tous (1), un bien dont l’usage est concédé au plus grand nombre (2)
ou tous résultats issus de l’action altruiste d’une communauté de personnes (3).
1. Une chose qui n’appartient à personne et dont l’usage est commun à tous
La première définition des biens communs est donnée par l’article 714 du Code civil :
« Il est des choses qui n'appartiennent à personne et dont l'usage est commun à tous ».
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Les res communes traditionnellement visées par cet article sont des choses naturelles, telles que l’air,
l’eau de mer ou les eaux courantes, ainsi que certaines ressources physiques, telles que des pâtures
ou des pêcheries.
Cette définition classique peut également s’appliquer à des ressources instituées plus récemment
par le législateur contemporain.
Ainsi, les données publiques répondent parfaitement au régime juridique des choses communes,
en ce qu’elles n’appartiennent pas à la personne publique qui les détient matériellement mais
doivent être ouvertes au plus grand nombre, selon un dispositif légal de redistribution.
Instaurée depuis la loi dite CADA du 17 juillet 1978, la politique d’ouverture des données publiques
connaît aujourd’hui un nouvel essor, puisque la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016, dite « Loi pour
une République numérique », oblige toutes les administrations (ministères, collectivités territoriales,
établissements publics...) à mettre, de façon générale et systématique, à la disposition du public tout
document administratif publié sur format électronique, « dans un standard ouvert, aisément réutilisable et
exploitable par un système de traitement automatisé ».
2. Un bien dont l’usage est concédé au plus grand nombre
A côté de la définition du Code civil, une autre acception des communs a émergé, fondée sur l’idée
que les communs ne se définissent pas nécessairement par leur essence mais également par leur
fonction : seraient communes toutes choses dont l’accès et l’utilisation sont libres.
Il en va ainsi lorsque le propriétaire d’un bien fait le choix de concéder totalement ou partiellement,
temporairement ou définitivement, sa propriété à d’autres, selon un mode prédéterminé et non-
discriminatoire.
Dans cette conception, qui fonde l’« open-source », la propriété elle-même devient ainsi
une source alternative des communs. Les logiciels, données ou autres contenus distribués
« sous licences libres », sont issus de la volonté de leurs auteurs d’en partager l’usage mais
restent néanmoins leur propriété.
Une licence « open-source » est en effet toujours ouverte sous certaines conditions et réserves
qu’elle prédétermine. Enfreindre les conditions d’une licence libre équivaut ainsi à porter atteinte
aux droits de propriété intellectuelle des auteurs, en les contrefaisant.
Les licences ouvertes ne sont donc pas, contrairement à une idée reçue, la négation de la propriété
mais un aménagement altruiste et désintéressé de celle-ci.
3. Tous résultats de l’action altruiste d’une communauté de personnes
Avec le mouvement des communs qui se renforce et se structure, a également émergé la conception
de « communs collaboratifs », selon laquelle les communs deviennent des choses non plus
seulement naturelles mais des « choses humaines ».
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Dans une société qui privilégie le don et la participation de soi, le partage et retour d’expérience,
ainsi que la collaboration, les activités humaines sortent aujourd’hui de l’emprise de l’appropriation
individuelle pour devenir des choses échangeables voire valorisables au sein de communautés de
personnes ou d’intérêts.
En plus de ces trois conceptions traditionnelles, une nouvelle acception a vu le jour, dans le
domaine des transports : les données d’intérêt général, dont la définition semble correspondre à
une nouvelle typologie de communs.
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B. Les données d’intérêt général dans le domaine des transports
En mars 2015, le « Rapport Jutand » remis au Secrétaire d’Etat chargé des Transports, de la Mer et
de la Pêche, sur l’ouverture des données de transport, a préconisé la création d’une nouvelle
catégorie de données, celle des données d’intérêt général.
Ce rapport a reçu une application pratique dans la loi n°2015-990 du 6 août 2015, dite loi Macron,
qui a introduit un nouvel article L1115-1 du Code des transports, prévoyant que les données des
services réguliers de transport publics de personnes et de mobilités doivent être diffusées librement,
immédiatement et gratuitement pour informer les usagers.
Sous réserve du décret d’application de cette disposition de la loi Macron, encore en cours
d’examen au Conseil d’Etat, les services publics, mais également les sociétés privées, de transport
public de personnes, les services de mobilité et les services de calculateurs d’itinéraire des AOT
devraient être soumis à cette obligation de diffusion et d’accès libres et gratuits des données
précitées.
Cette même loi, appliquant les recommandations du rapport Jutland, crée donc la nouvelle
catégorie des données d’intérêt général, entendues comme des données qui sont de nature
privée mais dont la publication peut se justifier en raison de leur intérêt pour améliorer les politiques
publiques. Ces données d’intérêt général sont de trois sources :
 Les données issues des délégations de service public ;
 Les données essentielles issues des conventions de subvention ;
 Les données d’entreprises privées nécessaires aux enquêtes menées par l’INSEE.
Les données d’intérêt général sont indubitablement assimilables à de nouveaux communs, puisque
leur objectif est d’être distribuées et partagées entre le plus grand nombre.
Ainsi entendus, les communs ne se détermineraient plus uniquement par rapport à un
usage commun ou une concession de propriété mais aussi par rapport à une finalité, celle
dont l’ouverture poursuit un objectif d’intérêt général.
*****
Ces communs existant de diverses façons, leur administration, à savoir la manière dont on en use
en commun, peuvent-ils faire l’objet d’une modélisation contractuelle ? Selon leur nature ? Les
communautés qui les utilisent et les exploitent ? Et de possibles modes d’exploitation, autorisés,
conditionnés ou interdits ?
Il existe à ce jour différentes licences qui régissent l’utilisation des communs. Certaines se cherchent
encore. D’autres sont à inventer …
II. LES TENTATIVES DE LICENCES POUR REGIR LES COMMUNS
Les conditions de l’administration des communs par le contrat font l’objet de deux grands modèles
de licences : les licences ouvertes, mettant les communs à la disposition de tous (A) et les licences
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à réciprocité, conditionnant l’usage des communs à des règles de partage et de rétribution, au sein
d’une communauté d’utilisateurs (B).
A. Les licences ouvertes
Comme cela a été indiqué ci-dessus, le modèle « open source » est fondé sur une conception des
communs comme des biens appartenant à un propriétaire exclusif mais dont l’usage est concédé à
tous, par la volonté altruiste de ce dernier.
Dans cette perspective, un bien « propriétaire » peut être considéré comme un commun si le
propriétaire en autorise l’usage au plus grand nombre.
Il existe ainsi deux concepts possibles menant à une même fin d’ouverture. Peut être ouvert un
bien qui par nature, n’appartient à personne ou alors, un bien dont le propriétaire
« abandonne » sa propriété au plus grand nombre.
Et dans chacun de ces deux schémas, il peut y avoir plusieurs degrés d’ouverture : du plus fermé
au plus ouvert ou inversement, du plus ouvert au plus fermé. C’est, dans le premier cas, le
propriétaire qui décide d’ouvrir un bien par nature fermé et dans le second cas, la communauté qui
peut décider de fermer une ressource par nature ouverte, selon un schéma progressif et des critères
qui peuvent être d’ailleurs les mêmes.
Ces critères peuvent être l’identité de l’usager, la nature de la chose ouverte, l’intensité de son
utilisation envisagée, un territoire donné, une durée d’utilisation, un investissement à protéger, une
contrepartie ou une réciprocité attendues ou le caractère commercial ou non commercial de
l’utilisation.
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Dans tous les cas, c’est le contrat qui est l’outil de l’ouverture, ou de la fermeture. Ce contrat est
généralement qualifié de licence qui selon les acceptions qu’on lui donne, peut être une licence
exclusive, ouverte ou à réciprocité.
Il s’agit, dans la présente étude, de s’intéresser aux licences non pas « propriétaires » mais ouvertes
ou à réciprocité.
Plusieurs catégories de licences ouvertes visent les logiciels (1), les autres œuvres de l’esprit (2) et
les données publiques (3). Le principe de ces licences fait toutefois l’objet de critiques (4).
1. Les logiciels « open source »
Le schéma « Propriété » ci-dessus s’applique parfaitement à la logique des logiciels concédés en
« open source ».
Certains logiciels « propriétaires » peuvent en effet être diffusés librement, pour une utilisation non
commerciale, selon un modèle « freeware », lorsque les auteurs ont abandonné leurs droits de
propriété intellectuelle et que les logiciels sont libres d’utilisation, sans contrepartie financière ni
obligation particulière, ou « shareware », lorsque le logiciel est distribué à des utilisateurs qui sont
invités à les essayer et choisissent de verser une contribution financière s’ils sont satisfaits.
L’ouverture fonctionne ici selon un schéma conditionné.
La notion de logiciels « libres » a vu le jour à l’initiative du Finlandais Linus TORVALDS, et dans
le but de lutter contre les monopoles des sociétés éditrices de logiciels de bureautique, les sources
du logiciel Linux ont été mises gracieusement à la disposition du public.
Ce modèle de logiciel libre, aussi appelé « copyleft », se fonde sur le principe qu’un logiciel ne doit
pas être considéré comme un produit susceptible d’être vendu, mais comme une ressource. Son
code source est donc mis gratuitement à la disposition de tous, tandis que, généralement, les
services de distribution, maintenance, conseil, intégration, etc. attachés à ce logiciel sont fournis à
titre payant.
Les conditions d’utilisation d’un logiciel libre sont encadrées par une licence à source accessible ou
« open source », dont les principaux modèles sont les licences GNU GPL (General Public License),
GNU LGPL (Lesser General Public License), toutes deux conçues par la Free Software Foundation,
et NPL (Netscape Public License), proposée par la société NETSCAPE sur son navigateur
Communicator.
Les caractéristiques des principales licences « open source » sont détaillées dans le tableau ci-après.
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2. Extension aux autres œuvres de l’esprit : le modèle « Creative Commons »
Il a été proposé des licences d’utilisation en mode « open source » d’œuvres autres que les logiciels,
mais qui ne s’appliquent qu’à une catégorie spécifique d’œuvres : Cecill pour les Logiciels, Licence
LEL pour les œuvres d'art, Licence Musique Libre pour les œuvres musicales.
En 2001, le professeur Lawrence LESSIG, de l’Université de Stanford, a créé le modèle « Creative
Commons », afin de proposer aux auteurs d’œuvres de l’esprit une alternative aux schémas
traditionnels de leur communication au public et, ainsi, de favoriser leur partage tout en maintenant
leur protection.
Il existe, à ce jour, six licences susceptibles d’être choisis par les titulaires des droits de propriété
intellectuelle afférents à leurs œuvres, en fonction de l'exploitation qu'ils entendent leur donner.
1. Attribution (BY): Le titulaire des droits autorise toute exploitation de l’œuvre, y compris à
des fins commerciales, ainsi que la création d’œuvres dérivées, dont la distribution est
également autorisé sans restriction, à condition de l’attribuer à son l’auteur en citant son
nom.
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2. Attribution + Pas de Modification (BY ND) : Le titulaire des droits autorise toute
utilisation de l’œuvre originale (y compris à des fins commerciales), mais n’autorise pas la
création d’œuvres dérivées.
3. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale + Pas de Modification (BY NC ND) : Le
titulaire des droits autorise l’utilisation de l’œuvre originale à des fins non commerciales,
mais n’autorise pas la création d’œuvres dérivés.
4. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale (BY NC) : le titulaire des droits autorise
l’exploitation de l’œuvre, ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’il ne s’agisse
pas d’une utilisation commerciale (les utilisations commerciales restant soumises à son
autorisation).
5. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale + Partage dans les mêmes conditions (BY NC
SA) : Le titulaire des droits autorise l’exploitation de l’œuvre originale à des fins non
commerciales, ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’elles soient distribuées
sous une licence identique à celle qui régit l’œuvre originale.
6. Attribution + Partage dans les mêmes conditions (BY SA) : Le titulaire des droits autorise
toute utilisation de l’œuvre originale (y compris à des fins commerciales) ainsi que la
création d’œuvres dérivées, à condition qu’elles soient distribuées sous une licence
identique à celle qui régit l’œuvre originale.
3. Les licences d’utilisation des données publiques
En application de la loi CADA et de la loi pour une République numérique, évoquées ci-dessus,
l’accès aux données publiques et leur réutilisation peuvent être soumis à des licences qui fixent les
droits et les obligations qui y sont associés, selon une logique de licences plus ou moins ouvertes.
A ce jour, plusieurs licences coexistent :
- La mission ETALAB promeut une licence totalement ouverte, libre, non-exclusive et
gratuite, qui favorise la réutilisation la plus large possible, en autorisant la transformation des
données, leur reproduction et leur redistribution commerciale, en ce compris leur adaptation
et leur combinaison avec d’autres données, sous réserve du mention de la source des données
et de la date de leur dernière mise à jour.
Le « producteur » des données n’offre aucune garantie quant à leurs défauts et irrégularités
et ne garantit pas non plus que leur fourniture puisse être continue. Il garantit toutefois que
les données ne contiennent pas de droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers.
S’il les détient, il les cède de façon non exclusive, à titre gracieux, pour le monde entier et
toute la durée des droits.
La licence ETALAB a été récemment actualisée, pour intégrer les nouvelles dispositions de
la loi « pour une République numérique ». Elle prend notamment en compte la réutilisation
des informations publiques comportant de données à caractère personnel, subordonnée au
respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, dite « Informatique et Libertés ».
- D’autres types de licences ouvertes, non prévues initialement pour l’open data mais plutôt
pour la libération des droits de propriété intellectuelle, peuvent s’adapter aisément à
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l’ouverture des données, telles que les licences « Open Government Licence (OGL) »,
« Creative Commons », déjà décrite ci-dessus, et « Open Data Commons ».
Ces licences sont adoptées par certaines institutions en France. Les plus utilisées semblent
être les licences OBdL et ODC-By.
- Les Licences Informations Publiques (LIP) proposées l’Agence du patrimoine immatériel de
l’Etat (APIE), qui ne sont pas des « licences libres », permettent, en rémunération d’une
redevance pour la personne publique, la réutilisation des données publiques sous certaines
conditions.
La durée de ces licences peut être illimitée ou alors, restreinte.
Ces licences semblent tomber en désuétude au profit de modèles « ouverts ».
Au demeurant, force est de constater que l’accès aux données publiques et leur réutilisation ne sont
que très partiellement réalisés à ce jour en France : trop peu de personnes publiques ont ouvert
leurs données et les modalités de leur réutilisation se confrontent à de nombreuses résistances. Il
n’existe pas non plus à ce jour de consensus sur un modèle de licence de réutilisation possible, bien
que le modèle de la licence ouverte soit fortement promu par le gouvernement.
C’est pourquoi, la loi « pour une République numérique » a institué un service public de la donnée.
L’article 11 de cette loi prévoit en effet que les administrations ne peuvent pas faire obstacle à la
réutilisation des bases de données publiques qu’elles publient, à l’exception de celles produites ou
reçues dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial soumise
à la concurrence.
A cette fin, il est prévu l’établissement d’une liste, fixée par décret et révisable tous les cinq ans, des
licences de réutilisation à titre gratuit de ces données publiques.
Lorsqu'une administration souhaite recourir à une licence ne figurant pas sur cette liste, cette licence
doit être préalablement homologuée par l'Etat, dans des conditions devant être fixées par décret.
A ce jour, ces deux décrets n’ont pas encore été publiés.
4. Critiques du modèle « open source »
Le modèle « open source » a fait l’objet de plusieurs critiques de la part de théoriciens et de
praticiens des communs.
Il a d’abord été reproché à ce modèle d’être inadéquat par rapport à la conception des communs
qui se fonde sur l’idée de ressources « gouvernées » par une communauté d’intérêts.
Valérie Peugeot, chercheur et présidente de VECAM, définit en effet les communs par les trois
dimensions qui les caractérisent : les communs sont (i) des ressources (ii) soumises à un régime
collectif de droits et d’obligations et (iii) dont l’usage est gouverné par une communauté.
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Or les licences ouvertes, décrites précédemment, sont des licences unilatérales dont l’ouverture est
décidée par la seule volonté du détenteur initial de la ressource qui fixe lui-même les modalités de
cette ouverture.
Mais plus encore, une licence « open source » vise la dissémination d’une œuvre auprès du plus
grand nombre, sans toutefois retenir l’idée de réciprocité de la part des utilisateurs de ces licences,
ni, plus généralement, d’interaction entre ceux-ci et les détenteurs initiaux de la ressource.
Soumettre l’ouverture d’une ressource à certaines conditions, comme dans le schéma des licences
ouvertes, n’équivaut pas à convenir ensemble de conditions d’ouverture qui exigent de la part de
ceux auprès de qui on ouvre la réalisation d’une action positive de réciprocité, qu’elle soit matérielle,
financière ou éthique.
Les critiques ont également reproché au modèle de licence ouverte de ne pas faire de distinction
entre utilisation non commerciale et exploitation commerciale, ce qui a pour effet de permettre à
des entités commerciales de profiter gratuitement de ressources, voire de se les approprier sans y
avoir contribué, ni avoir financé sa création et son développement, créant ainsi un état de
concurrence non régulée et une nouvelle forme de parasitisme.
A l’écoute de ces pratiques, l’article 8 du projet de loi pour une République numérique prévoyait la
protection d’une nouvelle catégorie de communs, le domaine commun informationnel. L’objectif
de ces dispositions était de « protéger les ressources communes à tous appartenant au domaine public contre les
pratiques d’appropriation qui conduisent à en interdire l’accès », en permettant à des associations agréées
d’intenter une action en justice pour défendre le périmètre de ce domaine commun et faire cesser
toute tentative de réappropriation exclusive.
Ces dispositions n’ont toutefois pas été retenues dans la loi finalement votée, en raison de
l’opposition de plusieurs acteurs de la propriété littéraire et artistique (SEPM, SACD, SNEP, FNPS,
SNE, …), qui ont estimé qu’elles étaient imprécises et dangereuses pour la protection du droit
d’auteur.
Quoiqu’il en soit, l’ensemble des critiques faites aux licences « open source » fonde aujourd’hui le
courant de pensée des licences à réciprocité.
B. Les licences à réciprocité
Par opposition à la dissémination auprès de tous, prônée par le modèle « open source », les
licences à réciprocité posent le principe d’un partage du commun réservé aux membres
d’une communauté, dans des conditions dépendant des contributions de chacun d’eux sur
ce commun.
Aux fins de garantir une réciprocité dans les conditions de ce partage, les licences à réciprocité
prévoient usuellement des restrictions croissantes, en fonction des catégories d’utilisateurs du
commun.
Les grands principes fondant ces restrictions sont généralement les suivants :
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a) Le commun peut être utilisé par tous les membres d’une communauté, pour une
utilisation non-commerciale.
b) Une exploitation commerciale du commun par les membres est possible, sous
condition d’une rétribution des contributeurs dudit commun.
c) L’exploitation commerciale du commun est interdite aux tiers, non-contributeurs, sauf
si ces derniers payent une redevance dans le cadre d’une licence spécifique.
Quatre grands types de licences à réciprocité, fondées sur quatre philosophies différentes, peuvent
ainsi être mises en œuvre.
1. Le modèle « Copyfarleft »
Le modèle de licence « copyfarleft » (extrême-gauche d’auteur) a été développé par Dmytri Kleiner,
notamment dans sa publication « The Telekommunist Manifesto » (2010).
Son principe est que l’utilisation d’une ressource n’est libre que si son utilisation n’est pas
commerciale. Si cette utilisation est commerciale, seules certaines entités juridiques peuvent
valablement l’exploiter.
L’utilisation commerciale de la ressource est ainsi réservée à des entreprises appartenant à ses
salariés et aux coopératives, à condition que tous les gains financiers, excédents, profits et avantages
produits par l'entreprise ou la coopérative soient redistribués aux salariés-propriétaires.
Toute utilisation de la ressource par une entreprise privée, non coopérative et qui cherche à
produire du bénéfice à partir de cette ressource, n’est donc pas permise.
Les entités commerciales ne pourront alors utiliser le commun qu’à condition de payer une
redevance pour ce faire, dans le cadre d’une licence ad hoc, en dehors de la licence gratuite.
Le critère principal de cette licence est donc la nature coopérative des usagers de la ressource.
A ce jour, le modèle « Copyfarleft » reçoit une illustration dans le modèle de licence « Peer
Production License ».
Il a vocation à s’appliquer à toute création dans le domaine littéraire, scientifique et artistique,
protégeable par un droit de propriété intellectuelle, quel qu'en soit le mode ou la forme
d'expression, y compris sous forme numérique.
Cette licence peut se modéliser comme suit :
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Le modèle « copyfarleft » a ainsi pour principal objectif de prévenir le risque d’une concurrence
sauvage de la part d’entités économiques profitant d’un commun réalisé par d’autres et à leur seuls
avantages.
Il introduit toutefois un biais en ce que l’exploitation commerciale est réservée à des catégories
d’entités, en fonction de leur statut juridique et non de leurs contributions effectives. Sont ainsi
exclues toutes les sociétés commerciales, sans distinction entre celles qui auraient effectivement
contribué au commun de celles qui n’auraient pas contribué.
Cette approche trop réductrice a notamment été soulignée par Miguel Said Viera et Primavera de
Filipi, dans leur article « une nouvelle proposition de Commons » (revue en ligne « Journal of Peer Production »
-n° 4 jan. 2014).
2. Le modèle « Commons Reciprocity Licence »
Comme alternative au « copyfarleft », Miguel Said Viera et Primavera de Filipi, dans l’article précité,
proposent d’inclure une clause de réciprocité selon laquelle seuls les contributeurs à la ressource
puissent exploiter commercialement ou non un commun et ce, indépendamment de leur statut
juridique.
Le critère principal de cette licence est le fait de contribuer à la ressource.
Toute personne qui contribue à la ressource et l’utilise à des fins non commerciales
bénéficie d’une licence libre. Leur contribution est mesurée par une monnaie virtuelle, la
« Peer-Currency ». Si les contributeurs utilisent la ressource à des fins commerciales, cette
monnaie doit également servir à évaluer la rémunération des contributeurs du commun exploité
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commercialement. Une variante au modèle « Commons Reciprocity Licence », le modèle « Open
Value Accounting », propose une mesure des contributions par une notation que chaque
contributeur reçoit de ses pairs.
Les non-contributeurs ne peuvent exploiter commercialement un commun qu’après avoir conclu
une licence ad hoc avec les contributeurs, en contrepartie du paiement d’une redevance.
A ce jour, le modèle « Commons Reciprocity Licence » n’a toutefois pas donné lieu à l’écriture
d’une licence-type. Il peut néanmoins se modéliser comme suit :
Le modèle « Commons Reciprocity License » a pour principal avantage de permettre aux
contributeurs d’un commun, sans exclusion en raison de leur statut, de l’exploiter commercialement
et de recevoir une rétribution proportionnelle à leur contribution.
La difficulté de ce modèle réside toutefois dans les modalités d’évaluation des contributions. Un
système de mesure par une monnaie virtuelle pourrait générer un système trop complexe à mettre
en œuvre et à gérer. Il risquerait également d’introduire une part d’arbitraire dans l’évaluation des
différents modes de contribution.
Les initiateurs du « Commons Reciprocity License » sont d’ailleurs conscients de ce risque, qu’ils
évoquent dans leur article :
« L’un des plus importants réside dans la détermination du « taux de change » entre les différents types
d’œuvres. En d’autres termes, comment pouvons-nous mesurer des contributions individuelles (dans différents
domaines) par le biais de jetons ? Combien de jetons seraient alloués à un utilisateur qui aurait contribué en
versant dans les communs une image, une vidéo ou un texte ? Les œuvres dérivées ou les simples améliorations
devraient-elles être récompensées par moins de jetons ? Est-ce que le système devra prendre en compte une
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mesure de la qualité ou du mérite artistique de ces œuvres ? Et si oui, qui sera compétent pour effectuer cette
forme d’évaluation ? »
Un système de « monnaie d’échange » a toutefois l’avantage de conférer un système de mesure
objectif des contributions, contrairement au système de notation préconisé par le modèle « Open
Value Accounting ».
3. Le « Fair Source Licence »
D’autres licences ont été élaborées pour permettre le partage des biens communs, tout en encadrant
leur exploitation, afin que les titulaires des droits puissent recevoir une rétribution.
Ainsi, la « Fair Source License » se fonde sur un partage du code source d’un logiciel ou
développement informatique, tout en permettant au(x) titulaire(s) des droits de recevoir des
revenus de l’exploitation de ce bien.
Cette licence est consentie à titre gratuit aux particuliers et aux entreprises, sous réserve d’un
nombre limité d’utilisateurs finaux au sein d’une entreprise (en ce compris ses affiliées).
Si une entreprise utilise le logiciel pour un nombre d’utilisateurs supérieur au plafond susvisé, la
licence est soumise au paiement d’une redevance.
Le critère principal de cette licence est donc la nature de l’utilisateur (particulier ou
entreprise) et quand il s’agit d’entreprises, du nombre d’utilisateurs de la ressource.
Le mécanisme de cette licence peut se modéliser comme suit :
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La licence « Fair Source » correspond donc à une organisation beaucoup plus libérale de la
communauté constituée autour du commun. En effet, aucune obligation de contrepartie entre
contributeurs et utilisateurs n’est spécifiquement prévue, à l’exception du paiement d’une redevance
par les entreprises dépassant une certaine taille.
En outre, en l’état, cette licence ne prévoit pas de système de mesure des contributions, susceptible
de permettre d’évaluer une juste rémunération qui serait due aux contributeurs.
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4. Licence FairlyShare
L’autre licence mise en œuvre pour assurer une rétribution aux titulaires des droits sur le commun
est la licence « FairlyShare » dont l’objet est de laisser les communs gratuits dans la sphère
contributive, mais payants dans la sphère commerciale. Cette licence part du principe que le
contributeur est prêt à contribuer gratuitement mais, si quelqu'un en retire un profit, il
veut en recevoir une part équitable.
Le licencié s’engage donc à faire ses meilleurs efforts pour définir un domaine et une durée
d'exploitation limités des droits qui lui sont concédés, ainsi qu’identifier les contributions et leurs
auteurs. Ceci fait, il doit définir la part de ses profits affectée aux contributeurs, en application des
meilleures pratiques (à défaut, la part est de 50%), puis répartir cette part entre les différents
contributeurs.
Le licencié doit enfin s’engager à souscrire à plusieurs valeurs sociétales et environnementales,
notamment le Pacte Mondial de l'ONU, la Responsabilité Sociale et Environnementale et le code
déontologique des journalistes.
La licence « FairlyShare » est relativement proche du modèle « Commons Reciprocity Licence »,
précité, en ce qu’il oblige l’exploitant d’un commun à élaborer et à mettre en œuvre un système de
répartition entre les contributeurs de la part des profits qui leur est allouée au titre de l’exploitation
commerciale du commun. Cette licence peut se modéliser comme suit :
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Le système mis en place est cependant plus libéral, en ce que ce système de répartition n’est pas
déterminé par la communauté, mais laissé au libre choix de l’exploitant et sous sa responsabilité.
Ainsi, il n’existe, dans cette licence, aucun système de mesure des contributions, par une monnaie
virtuelle ou tout autre moyen. Seul un système de répartition « par défaut » est prévu.
III. PRECONISATIONS POUR LA FABRIQUE DES MOBILITES
La Fabrique des Mobilités pourrait, dans une première approche, vouloir promouvoir auprès de
ses membres l’adoption de licences ouvertes et de licences à réciprocité, comme celles décrites
précédemment. Elle interviendrait ainsi comme une instance de médiation, au sens de l’article
du Livre Blanc, paru en juin 2015, précité, à savoir comme un espace d’échange et de collaboration
entre ses membres, sans toutefois les obliger à adopter des cadres contractuels précis.
Il s’agirait alors d’informer les membres de l’existence de ces diverses licences, de leur nature et de
leur contenu, à charge pour les membres de la Fabrique de les adopter ou non et dans l’affirmative,
de choisir entre eux celles qu’ils souhaitent utiliser, ce choix leur revenant en propre et étant de leur
seule responsabilité.
Dans une approche plus volontariste, la Fabrique pourrait vouloir inciter ses membres à privilégier
certaines licences, faire un choix entre des licences ouvertes ou des licences à réciprocité, en
imposer certaines dans le cadre de son fonctionnement. Elle agirait ainsi plus comme une instance
de régulation, au sens de l’article du Livre Blanc précité.
Si la Fabrique souhaitait s’engager dans la promotion de licences à réciprocité, elle pourrait vouloir
également privilégier certains modèles, parmi les licences à réciprocité susvisées, ou en créer
d’autres qui lui soient spécifiques.
C’est là, à notre sens, la vocation de la Fabrique des Mobilités qui a pour objet de réunir
plusieurs acteurs très différents, créateurs et contributeurs de ressources multiples et dont
l’objectif est de viser une exploitation commerciale de ces ressources, après une démarche
d’expérimentation et d’échanges qui peut être, dans un premier temps, hors commerce.
Le système des licences à réciprocité semble ainsi parfaitement répondre à cette vocation,
en ce qu’il permet de distinguer entre activité désintéressée et activité commerciale,
typologie de contributeurs et modes de contributions.
Une réflexion devrait alors s’engager sur l’opportunité d’en choisir le modèle.
Le modèle « Copyfarleft » qui vise à exclure des catégories d’utilisateurs (à savoir les entreprises
commerciales au bénéfice des coopératives) semble inadapté pour l’écosystème développé par la
Fabrique des Mobilités, dont l’objet est de faire interagir des acteurs aux statuts juridiques très
différents, lesquels adoptent peu le modèle coopératif.
Le modèle « Commons Reciprocity Licence » semble plus proche de la philosophie de la
Fabrique des Mobilités, en ce qu’il utilise comme critère principal la contribution. Ainsi,
tous les contributeurs, quel que soit leur statut juridique, pourraient bénéficier de la licence
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et d’un possible retour sur leurs apports respectifs. La difficulté résiderait toutefois dans la
création d’une unité de mesure de la contribution, ayant valeur de monnaie d’échange.
Il conviendrait ainsi de mener une réflexion plus approfondie sur la mise en œuvre d’un tel système
de valorisation des contributions. Il s’agirait notamment de prévoir des règles quant à l’attribution
des unités de cette monnaie aux contributeurs et à l’échange de ces unités entre eux. Eviter
également les éventuels risques de spéculation ou de contributions superficielles tendant à fausser
les règles du jeu. Le LAB-RH, structure similaire à la Fabrique des Mobilités dans le domaine des
RH, a développé une monnaie permettant de quantifier l’engagement des acteurs en quantifiant ce
qu’ils produisent pour le LAB au regard de ce qu’ils gagnent.
Le modèle « Fair Source Licence » pose le problème, quant à lui, d’utiliser comme critère de la
licence, pour les entreprises, le nombre d’utilisateurs susceptibles d’utiliser la ressource. Un système
de redevances dues par des entreprises en fonction de leur taille ne semble pas correspondre au
modèle mis en œuvre par la Fabrique des Mobilités, laquelle accueille des start-ups de très petite
taille comme des groupes industriels de très grande taille, ainsi que des collectivités territoriales.
L’emploi de cette licence impliquerait donc des conditions d’accès possiblement inéquitables pour
les acteurs de la Fabrique des Mobilités, dans la mesure où des start-ups pourraient les utiliser
gratuitement, tandis que les grandes entreprises devraient payer une redevance, sans aucune
considération liée au volume de la contribution des uns et des autres. Enfin, si la licence « Fair
Source » pose le principe d’une rémunération en faveur des contributeurs d’une ressource sur la
base des recettes générées par son exploitation commerciale, au-delà d’un certain nombre
d’utilisateurs, les modalités de répartition de cette rémunération ne sont toutefois pas prévus par
ce modèle, ce qui le rend insuffisant pour fonder un système d’administration des communs
immédiatement reproductible pour la Fabrique des Mobilités.
Le modèle « Licence FailyShare », en ce qu’il n’oblige pas les exploitants à se conformer à un
modèle-type de rétribution, pourrait ainsi présenter, quant à lui, l’inconvénient d’une rémunération
non uniforme voire dissemblable des apports des contributeurs, chaque exploitant du commun
pouvant appliquer son propre système.
Ce modèle ne semble donc pas non plus suffisamment organisé pour être mis en œuvre dans le
cadre de la Fabrique des Mobilités. En outre, selon ce modèle, les exploitants des communs sont
soumis à des obligations très contraignantes en matière d’adhésion à des normes sociétales et
environnementales, dont il faudrait contrôler le respect. L’application d’une licence « FairlyShare »
au sein de la Fabrique des Mobilités aurait ainsi pour effet d’empêcher toute maitrise de la mesure
des contributions et, de manière assez contradictoire, d’obliger la mise en œuvre d’un système de
contrôle strict du respect de normes sociétales et environnementales, même si ces exigences
pourraient répondre aux préoccupations de l’ADEME et en cela, constituer une piste de réflexion
intéressante.
La Fabrique des Mobilités pourrait alors vouloir inventer son propre modèle de licence.
La régulation de l’usage des communs au sein de cette structure pourrait ainsi s’organiser selon un
modèle original mais s’inspirant des mécanismes les plus intéressants des licences à réciprocité, à
savoir :
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a) La possibilité pour tous les membres de la Fabrique des Mobilités d’utiliser les
communs créés dans son cadre, à titre gratuit et non-exclusif, pour le monde entier et
une durée illimitée, aux fins d’une utilisation non-commerciale.
La réciprocité viendrait du fait que chaque membre qui apporterait un commun à la
Fabrique ou utiliserait un commun issu de la Fabrique pour l’améliorer ou le
perfectionner s’obligerait aux mêmes conditions de partage et en cas d’amélioration ou
de perfectionnement, s’engagerait à partager de nouveau ce commun ainsi enrichi entre
les membres de la Fabrique, dans les mêmes conditions d’usage.
Les utilisateurs des communs se soumettraient soumis à une charte de valeurs, posant
les obligations essentielles auxquelles ils devraient se conformer.
Un exemple de cette charte est proposé en annexe I. Cet exemple en constitue
une trame minimale. Il peut être amélioré par une réflexion qui pourrait être
menée collégialement entre les membres de la Fabrique des Mobilités.
L’idée d’une charte de valeurs est qu’elle puisse être proposée comme socle minimal de
droits et obligations à l’entrée d’un membre au sein de la Fabrique, par simple adhésion
volontaire, sans qu’il soit nécessaire de recueillir le consentement exprès et écrit des
membres. Sa diffusion devra toutefois être suffisante pour en permettre la connaissance
par tous.
Le critère d’application de cette charte serait la non-commercialité et son critère
d’opposabilité serait la qualité de membre de la Fabrique.
b) La possibilité pour les seuls acteurs de la Fabrique ayant contribué aux communs de les
exploiter commercialement, à la condition qu’ils rétribuent les autres contributeurs, à
proportion de leurs apports.
La réciprocité viendrait ici du fait que chaque contributeur s’oblige à récompenser
l’autre, en cas d’utilisation commerciale des communs générés par ce dernier.
La question de l’évaluation des apports de chaque contributeur devra être interrogée
avant la mise en œuvre d’une telle licence à visée commerciale.
Comme cela a été indiqué ci-dessus, une mesure des contributions par une monnaie
virtuelle, telle que pressentie par la « Commons Reciprocity Licence », pourrait
cependant être complexe à mettre en œuvre.
Le principe d’une évaluation des contributions à l’aide d’une « monnaie d’échange » est
néanmoins une idée pertinente, en ce qu’elle permet une mesure objective des apports
de chacun.
Il conviendrait alors de réfléchir à un système à la fois suffisamment simple à mettre en
œuvre, de manière à éviter un fonctionnement non maîtrisé, et suffisamment rigoureux
pour prévenir tout risque de contournement.
Page 21 sur 31
Un exemple de licence à réciprocité, conçu pour la Fabrique des Mobilités, est
fourni en annexe II. Il peut être amélioré par une réflexion collective.
La licence proposée aurait vocation à s’appliquer à tous types de ressources, qu’il
s’agisse de données, de biens matériels ou de droits intangibles, tels que des logiciels,
des créations graphiques ou toute autre œuvre de l’esprit.
Cette licence conviendrait d’être proposée à la signature de tout membre de la Fabrique
qui contribue, d’une manière ou d’une autre, à l’apport, la création ou l’enrichissement
d’un commun.
Le critère d’application de cette licence serait la commercialité et son critère
d’opposabilité serait la qualité de contributeurs aux communs.
c) La soumission de toute exploitation commerciale des communs par des acteurs non
membres de la Fabriques des Mobilités à la conclusion d’une licence ad hoc et au
paiement de redevances, dans des conditions à déterminer selon la nature des
communs, les modes d’exploitation, la durée et le territoire envisagés.
Cette hypothèse est intéressante à envisager pour permettre la dissémination des
communs dont la Fabrique aurait permis l’émergence et le retour sur investissement de
leurs contributeurs.
A ce stade, il est difficile d’en proposer une rédaction tant les situations et les intérêts
en jeu peuvent être différents, et les acteurs divers, mais son principe devrait pouvoir
faire l’objet d’une réflexion collective plus poussée.
Le critère d’application de cette licence ad hoc serait la commercialité et son critère
d’opposabilité serait la qualité de non-membre de la Fabrique et de non-contributeur
aux communs.
Ce modèle général pourrait être schématisé ainsi :
Page 22 sur 31
L’adhésion à ce corpus de droits et obligations serait ainsi progressive, en fonction de l’implication
des membres et leur volonté de s’engager.
Il ferait une claire distinction entre non-membres et membres de la Fabrique,
reconnaissant à ces derniers un avantage à y participer et à entrer dans un « club ».
La distinction entre membres et contributeurs serait également clairement posée. Peuvent
participer à la Fabrique des acteurs qui ne contribuent pas aux communs mais dès lors,
qu’ils y contribuent, ils entreraient dans un second « club », plus fermé, permettant de
rendre possible l’utilisation commerciale de communs, à condition de participer à une
juste et réciproque rétribution des contributeurs.
Les non-membres de la Fabrique ne seraient toutefois pas exclus de cette commercialité,
dans des conditions financières et commerciales à définir au cas par cas.
Ce schéma contractuel reste, à ce stade, une promesse. Il doit être alimenté par une réflexion
collective et confrontée à la pratique des communautés d’intérêts qui constitue la Fabrique des
Mobilités.
Cette réflexion sur le cadre contractuel doit être menée de front avec une tout aussi
nécessaire réflexion sur la gouvernance de la Fabrique des Mobilités. Comme présenté
dans l’article précité de juin 2015, au sein du Livre Blanc, cette structure de gouvernance
aurait notamment pour mission d’attribuer les ressources, en réglementer l’usage mais
aussi également, gérer les conflits entre les usagers.
Page 23 sur 31
La Fabrique deviendrait ainsi, outre un club et une plateforme technique de partage des
ressources, un tiers de confiance dans la régulation et la gestion des communs.
Jérôme Giusti
Avocat spécialiste en droit de la propriété intellectuelle
et en droit des nouvelles technologies, de l’informatique et de la communication
11.100.34. Avocats Associés
j.giusti@11-100-34.com
Page 24 sur 31
ANNEXE I
CHARTE DE VALEURS
DE LA FABRIQUE DES MOBILITES
Préambule :
La présente charte s’adresse à l’ensemble des membres de La Fabrique des Mobilités (ci-après :
« Vous »).
La Fabrique des Mobilités est un accélérateur européen qui a pour objet de mettre en relation les
acteurs du transport et des mobilités et de leur donner la possibilité de développer leurs projets, de
les partager, de capitaliser les retours d’expériences et les erreurs, pour faire émerger une culture
commune de l’innovation dans l’action.
A cette fin, La Fabrique des Mobilités a créé plusieurs communautés d’intérêt (ci-après : les
« Communautés »), dans plusieurs domaines en lien avec les transports et les mobilités, pour
développer des plateformes ouvertes de contributions.
Droits qui vous sont consentis :
En participant à La Fabrique des Mobilités, vous êtes autorisés à utiliser les ressources alimentées
et gérées collectivement par les différentes Communautés (ci-après : les « Communs »), sous
réserve des conditions d’utilisations spécifiques éventuellement imposées par chaque Communauté
dans le cadre d’éventuelles licences à réciprocité.
Sous cette réserve, vous avez ainsi le droit de :
 Utiliser et partager les Communs entre les membres, en tout ou en partie, pour un usage
exclusivement non commercial ;
 Enrichir, compléter, améliorer ou perfectionner les Communs, seul ou à plusieurs membres ;
 Créer et utiliser des copies et des versions dérivées des Communs, pour un usage
exclusivement non commercial ;
 Initier et proposer des projets collectifs entre les membres, sur la base des Communs, de
leurs copies ou versions dérivées, à fins exclusivement non commerciales.
Ces droits vous sont consentis pour la durée de votre participation à la Fabrique des Mobilités et
pour le monde entier.
Si vous apportez des Communs à la Fabrique, ou si vous réalisez des Communs ou contribuez à
leur réalisation ou enrichissement, vous acceptez de vous soumettre aux mêmes conditions d’usage
et de partage.
Conditions d’exercice de ces droits :
Votre exercice des droits visés ci-dessus est soumis aux conditions suivantes :
Page 25 sur 31
 Si vous partagez les Communs, vous devez mentionner les noms de leurs contributeurs par
tout moyen utile et inclure une copie de la présente charte, ou de l’adresse internet où elle
peut être consultée, à toute copie partagée ou version dérivée de ces Communs ;
 Le cas échéant, vous devez indiquer si vous avez créé une version dérivée d’un Commun,
identifier toute modification apportée et donner toute indication sur les modifications
préalables du Commun ;
 Lorsque vous créez une version dérivée d’un Commun, vous vous interdisez de porter
atteinte aux droits de propriété intellectuelle d’un tiers, ou, plus généralement, de contrevenir
aux droits de tiers ou à la réglementation applicable, sauf autorisation préalable et écrite des
auteurs ou ayants-droit.
 Vous ne pouvez utiliser et partager les Communs que sous les conditions de la présente
charte.
Obligation de réciprocité
Vous vous engagez à partager avec les autres membres toutes copies et versions dérivées des
Communs, auxquels vous auriez apporté tous enrichissements, compléments, améliorations ou
perfectionnements, pour un usage exclusivement non commercial et dans les mêmes conditions
que celles prévues dans la présente charte pour le partage des Communs.
Vous vous interdisez d’imposer toute autre restriction et/ou restriction aux autres membres avec
lesquels vous effectuez ces partages.
Garantie et limitation de responsabilité
Sous réserve des garanties d’ordre public imposées par la loi, les Communs sont fournis en l’état,
sans garantie d’aucune sorte, expresse ou tacite, en ce compris à l’égard de leur contenu, de leur
exactitude ou de leur conformité à l’usage auxquels ils sont destinés. En aucun cas, vous ne
chercherez à engager la responsabilité des contributeurs des Communs à cet égard.
Autres obligations
En participant à La Fabrique des Mobilités, vous vous engagez :
 à respecter les lois et règlements en vigueur et à ne pas porter atteinte aux droits de tiers ou
à l’ordre public ;
 à ne pas usurper l’identité d’autrui et à ne pas donner d’information fausse ou de nature à
induire en erreur ;
 à informer sans délai La Fabrique des Mobilités de toute difficulté relative à votre
participation aux Communautés et à votre utilisation des Communs, dans les conditions
prévues dans la présente charte ;
 à répondre dans les meilleurs délais à toute demande d’information de la part du responsable
d’une Communauté ou de La Fabrique des Mobilité.
La Fabrique des Mobilités se réserve le droit de suspendre ou de mettre fin à votre participation,
d’avertir toute autorité concernée ou d’engager toute action judiciaire, en cas de manquement de
votre part aux règles de la présente charte.
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Page 27 sur 31
ANNEXE II
LICENCE A RECIPROCITE
DE LA FABRIQUE DES MOBILITES
Préambule :
La présente licence s’applique à tous les membres de La Fabrique des Mobilités (ci-après : les
« Contributeurs ») ayant contribué à la réalisation et/ou à l’enrichissement, l’amélioration ou le
perfectionnement d’un Commun (tel que défini ci-dessous).
Les Communs sont mis à disposition des Licenciés (tels que définis ci-dessous) selon les termes de
la présente licence (dénommée ici la « Licence »), sous réserve des licences d’exploitation
spécifiques éventuellement imposées par chacune des communautés d’intérêt visées ci-dessus.
L'exercice sur un Commun de tout droit proposé par la Licence vaut acceptation de celle-ci. Selon
les termes et les obligations de la Licence, le Concédant (tel que défini ci-dessous) propose au
Licencié l'exercice de certains droits présentés ci-après, et le Licencié en approuve les termes et
conditions d'utilisation.
1. Définitions
a. « Commun » : une ressource alimentée et gérée collectivement par une des communautés
d’intérêt de La Fabrique de Mobilités ;
b. «Ressource Collective » : une ressource, alimentée et gérée collectivement dans le cadre
de La Fabrique de Mobilités, dans laquelle le Commun, dans sa forme intégrale et non
modifiée, est assemblé en un ensemble collectif avec d'autres Communs séparés et
indépendants. Aux termes de la présente Licence, un Commun qui constitue une
Ressource Collective ne sera pas considérée comme une Version Dérivée (telle que définie
ci-après).
c. « Version Dérivée » : une ressource créée soit à partir du Commun seul, soit à partir du
Commun et d'autres ressources préexistantes, également alimentées et gérées
collectivement dans le cadre de La Fabrique de Mobilités. Une Ressource Collective ne
sera pas considérée comme une Version Dérivée aux termes de la Licence.
d. « Concédant » : le ou les Contributeurs qui proposent la mise à disposition d’un
Commun selon les termes de la présente Licence.
e. « Licencié » : le Contributeur qui accepte la présente Licence d’utilisation d’un Commun.
2. Exceptions aux droits exclusifs.
Aucune disposition de cette Licence n'a pour intention de réduire, limiter ou restreindre les
prérogatives issues des exceptions aux droits, de l'épuisement des droits ou d'autres limitations aux
droits exclusifs des ayants droit selon le droit de la propriété intellectuelle ou les autres lois
applicables.
Page 28 sur 31
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3. Etendue de la Licence
Soumis aux termes et conditions définis dans la présente Licence, le Concédant consent au Licencié
le droit d'exercer, pour le monde entier et pour une durée illimitée, à titre non exclusif, les droits
suivants :
a. utiliser, copier et exploiter le Commun ;
b. incorporer le Commun dans une ou plusieurs Ressources Collectives ainsi qu’utiliser,
copier et exploiter ces Ressources Collectives ;
c. créer des Versions Dérivées, ainsi qu’utiliser, copier et exploiter ces Versions Dérivées ;
d. distribuer des copies, présenter, représenter ou communiquer au public, par tout
procédé technique, le Commun, les Ressources Collectives et les Versions Dérivées ;
e. lorsque le Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée est une base de
données, en extraire et en réutiliser des parties substantielles.
Les droits mentionnés ci-dessus peuvent être exercés sur tous les supports, médias, procédés
techniques et formats. Ils incluent le droit d'effectuer les modifications nécessaires techniquement
à l'exercice des droits dans d'autres formats et procédés techniques. L'exercice de tous les droits
qui ne sont pas expressément autorisés par le Concédant ou dont il n'aurait pas la gestion demeure
réservé.
4. Restrictions.
Les droits consentis par l'article 3 sont expressément assujettis et limités par le respect des
restrictions suivantes :
a. Le Licencié peut exploiter le Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée,
y compris par voie numérique, uniquement selon les termes de la Licence. Le Licencié
doit associer une copie ou l'adresse Internet (Identifiant Uniforme de Ressource) de la
présente Licence à toute copie du Commun que le Licencié exploite y compris par voie
numérique. Le Licencié ne peut pas offrir ou imposer de conditions d'utilisation du
Commun, d’une Ressource Collective ou d’un Version Dérivée qui altèrent ou
restreignent les termes de la présente Licence ou l'exercice des droits qui y sont accordés
au bénéficiaire. Le Licencié doit conserver intactes toutes les informations qui renvoient
à cette Licence et à l'exonération de responsabilité. Le Licencié ne peut pas exploiter le
Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée, y compris par voie
numérique, en utilisant une mesure technique de contrôle d'accès ou de contrôle
d'utilisation qui serait contradictoire avec les termes de cette Licence.
b. Le Licencié s’interdit de porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle des autres
Contributeurs sur les Communs, les Ressources Collectives et/ou les Versions Dérivées
d’un tiers. Plus généralement, le Licencié s’interdit de contrevenir aux droits de tiers ou à
la réglementation applicable, sauf autorisation préalable et écrite des Contributeurs
concernés.
c. Si le Licencié exploite, y compris par voie numérique, un Commun, une Ressource
Collective ou une Version Dérivée protégé ou protégeable par le droit d’auteur, il doit
Page 30 sur 31
conserver intactes toutes les informations sur le régime des droits et en attribuer la
paternité aux Contributeurs l’ayant réalisé et/ou amélioré, par tout moyen utile au regard
au médium ou au moyen utilisé. Il doit communiquer :
 le nom du ou des Contributeur(s),
 le titre du Commun, de la Ressource Collective ou de la Version Dérivée, s'il est
indiqué,
 dans la mesure du possible, l'adresse Internet ou Identifiant Uniforme de
Ressource (URI), s'il existe, spécifié par le Concédant comme associé au Commun,
à la Ressource Collective ou la Version Dérivée.
Dans le cas d'une Version Dérivée, il doit indiquer les éléments identifiant l'utilisation du
Commun dans la Version Dérivée. Ces obligations d'attribution de paternité doivent être
exécutées par tout moyen utile. Cependant, dans le cas d'une Version Dérivée ou d'une
Ressource Collective, ces informations doivent, au minimum, apparaître à la place et de
manière aussi visible que celles à laquelle apparaissent les informations de même nature.
5. Exploitation commerciale du Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une
Version Dérivée
Les droits consentis par l’article 3 incluent le droit de procéder à une exploitation commerciale du
Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une Version Dérivée, aux conditions expresses
suivantes :
a. Le Licencié s’engage à réserver aux Contributeurs une part globale de [XX] % du chiffre
d’affaires hors taxes réalisé au titre de l’exploitation commerciale du Commun, des
Ressources Collectives et/ou des Versions Dérivées.
b. La répartition de cette part entre les différents Contributeurs sera calculée selon la méthode
mise en œuvre par La Fabrique des Mobilités, accessible sur son site internet
lafabriquedesmobilites.fr.
6. Garantie sur les droits d’utilisation des Communs, Ressources Collectives et
Version Dérivées
En mettant le Commun, une Ressource Collective et/ou une Version Dérivée à la disposition du
public selon les termes de cette Licence, le Concédant déclare de bonne foi qu'à sa connaissance :
a. Le Concédant a obtenu tous les droits éventuellement attachés au Commun, à la
Ressource Collective et/ou à la Version Dérivée, nécessaires pour pouvoir autoriser
l'exercice des droits accordés par la présente Licence et permettre la jouissance paisible et
l'exercice licite de ces droits, ceci sans que le Licencié n'ait aucune obligation de verser de
rémunération ou tout autre paiement ou droits autre que la part visée à l’article 5 ci-dessus,
dans la limite de la réglementation applicable ;
b. Le Commun, la Ressource Collective et/ou la Version Dérivée ne sont constitutifs ni
d'une violation des droits de tiers, notamment des droits de la propriété intellectuelle, du
Page 31 sur 31
droit civil ou de tout autre droit, ni de diffamation, de violation de la vie privée ou de tout
autre préjudice délictuel à l'égard de toute tierce partie.
7. Communs, Ressources Collectives et Version Dérivées en l’état
A l'exception des situations expressément mentionnées dans la présente Licence, et sous réserve
des dispositions de l’article 6, le Commun, la Ressource Collective et/ou la Version Dérivée sont
mis à disposition en l'état, sans autre garantie d'aucune sorte, qu'elle soit expresse ou tacite, quant
à leur utilisation.
A l'exception des garanties d'ordre public imposées par la loi applicable, le Concédant ne sera en
aucun cas tenu responsable vis-à-vis du Licencié d'aucun préjudice direct, indirect, matériel ou
moral, résultant de l'utilisation du Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une Version
Dérivée, dont le Licencié est seul responsable.
8. Résiliation
Tout manquement aux termes de la Licence par le Licencié entraîne la résiliation automatique de
la Licence et la fin des droits qui en découlent. Cependant, la Licence conserve ses effets envers les
personnes physiques ou morales qui ont reçu de la part du Licencié, en exécution de la présente
Licence, la mise à disposition du Commun, d’une Ressource Collective ou d’une Version Dérivée,
ceci tant qu'elles respectent pleinement leurs obligations.
9. Divers
a. La nullité ou l'inapplicabilité d'une quelconque disposition de cette Licence au regard de
la loi applicable n'affecte pas celle des autres dispositions qui resteront pleinement valides
et applicables. Sans action additionnelle par les parties à cet accord, lesdites dispositions
devront être interprétées dans la mesure minimum nécessaire à leur validité et leur
applicabilité.
b. Aucune limite, renonciation ou modification des termes ou dispositions de la présente
Licence ne pourra être acceptée sans le consentement écrit et signé de la partie
compétente.
c. Cette Licence constitue le seul accord entre les parties à propos du Commun mis ici à
disposition, ainsi que des éventuelles Ressources Collectives et Versions Dérivées. Il
n'existe aucun élément annexe, accord supplémentaire ou mandat portant sur ce
Commun, ainsi que sur les éventuelles Ressources Collectives et Versions Dérivées, en
dehors des éléments mentionnés ici. Le Concédant ne sera tenu par aucune disposition
supplémentaire qui pourrait apparaître dans une quelconque communication en
provenance du Licencié. Cette Licence ne peut être modifiée sans l'accord mutuel écrit
du Concédant et du Licencié.
d. Le droit applicable est le droit français. Tout litige pouvant naître à l'occasion de la validité,
l’interprétation ou l’exécution de la présente Licence sera soumis à la compétence
exclusive des tribunaux compétents de Paris.

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  • 1. Page 1 sur 31 La contractualisation juridique des communs Par Jérôme Giusti, avocat, 11.100.34. Avocats Associés L’objet de la présente étude est d’envisager les modalités possibles d’encadrement contractuel des communs apportés, créés et développés, dans le cadre de la Fabrique des Mobilités, en collaboration avec l’ensemble des acteurs qui y participent. Cette étude fait suite à une première réflexion menée dans le cadre du Livre Blanc, paru en juin 2015, sous l’article « Instituer un droit des communs pour la Fabrique des Mobilités ». Parmi les préconisations contenues dans ce premier article, nous avions notamment envisagé que la Fabrique des Mobilités puisse jouer le rôle d’une instance de régulation, en proposant à ses membres des outils juridiques leur permettant de régir les conditions et modalités de leur participation à la création, l’usage voire l’exploitation des communs. Un schéma contractuel était ainsi proposé, selon le niveau d’engagement que souhaitent les protagonistes et les interactions pouvant exister entre eux. Ce schéma prévoyait une contractualisation en « entonnoir » : de la simple adhésion à une charte de valeurs vers la contractualisation de licences dites « ouvertes », à la possible conclusion de partenariats bipartites ou multipartites ad hoc, privilégiant la réciproque. Depuis, notre objectif a été de confronter ce schéma contractuel avec les besoins exprimés par les membres de la Fabrique des mobilités sur des projets concrets actuellement en cours, d’en valider l’analyse par rapport à des pratiques contractuelles émergentes, notamment dans le domaine des licences dites « à réciprocité » et enfin, de proposer des modèles de contractualisation possibles et originaux. Cette note est la restitution de ces travaux. Elle donne lieu à la proposition de deux documents : (i) Une « charte de valeurs », destinée à tous les membres de la Fabrique des Mobilités, présentant les conditions d’utilisation des ressources alimentées et gérées en son sein, à des fins exclusivement non commerciales et à condition de partager avec les autres membres toutes copies et versions dérivées de ces ressources ; (ii) Une licence d’exploitation, y compris commerciale, de ces ressources, réservée aux membres ayant contribué à leur réalisation, à leur enrichissement, à leur amélioration ou à leur perfectionnement des ressources, sous réserve d’une rétribution équitable des autres contributeurs. ***** L’existence des communs dans notre droit positif est consacrée par l’article 714 du Code civil, dont la rédaction est inchangée depuis la loi du 19 avril 1803. Depuis la définition, très générale, donnée par cet article, l’acception des communs s’est enrichie, tant par la loi, qui a réglementé certaines
  • 2. Page 2 sur 31 catégories de communs, que par des écoles, groupements et/ou communautés qui ont tenté de mettre en œuvre des licences pour en administrer l’utilisation voire l’exploitation commerciale, sous certaines conditions de réciprocité. Il existe ainsi une sorte de « taxinomie » des communs, qui peuvent être ainsi identifiés en fonction de leur nature et de leur mode d’administration. Concernant leur administration, seule question qui nous occupe dans le cadre de la présente étude, deux grands modèles de contractualisation coexistent : (i) Une mise à la disposition du public des communs, généralement la plus large possible, dans le cadre de licences « ouvertes » ; (ii) Un partage sous conditions des communs au sein d’une communauté d’intérêts, dans le cadre de licences dites « à réciprocité ». Dès lors que la Fabrique des Mobilités a pour vocation de créer une plateforme de partage d’informations et de ressources entre les différents acteurs de la mobilité, avec l’institution de droits et de devoirs respectifs entre les parties, le modèle des licences à réciprocité, plutôt que des licences ouvertes, devrait à notre sens être privilégié. Il s’agit alors de voir comment et de proposer des schémas contractuels possibles. Après avoir rappelé les différentes acceptions des communs qui existent à date (I), la présente étude examine donc les tentatives de licences proposées ou mises en œuvre pour régir l’utilisation des communs dans un double objectif d’ouverture et de réciprocité (II) et émet des recommandations sur les outils contractuels à envisager pour la Fabrique des Mobilités afin que les communs qui en émergent puissent faire l’objet d’échange entre les membres, à titre désintéressé mais également à titre commercial (III). I. LES DIFFERENTES ACCEPTIONS DES COMMUNS A côté de la conception « classique » s’appliquant à tous les communs en général (A), il existe une catégorie de communs propres au domaine des transports et des mobilités, récemment consacrés par le législateur : les données d’intérêt général (B). A. Les communs en général La notion de communs peut revêtir aujourd’hui plusieurs acceptions juridiques, découlant tant de la loi que des choix de communautés humaines. Ce peut être une chose qui n’appartient à personne et dont l’usage est commun à tous (1), un bien dont l’usage est concédé au plus grand nombre (2) ou tous résultats issus de l’action altruiste d’une communauté de personnes (3). 1. Une chose qui n’appartient à personne et dont l’usage est commun à tous La première définition des biens communs est donnée par l’article 714 du Code civil : « Il est des choses qui n'appartiennent à personne et dont l'usage est commun à tous ».
  • 3. Page 3 sur 31 Les res communes traditionnellement visées par cet article sont des choses naturelles, telles que l’air, l’eau de mer ou les eaux courantes, ainsi que certaines ressources physiques, telles que des pâtures ou des pêcheries. Cette définition classique peut également s’appliquer à des ressources instituées plus récemment par le législateur contemporain. Ainsi, les données publiques répondent parfaitement au régime juridique des choses communes, en ce qu’elles n’appartiennent pas à la personne publique qui les détient matériellement mais doivent être ouvertes au plus grand nombre, selon un dispositif légal de redistribution. Instaurée depuis la loi dite CADA du 17 juillet 1978, la politique d’ouverture des données publiques connaît aujourd’hui un nouvel essor, puisque la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016, dite « Loi pour une République numérique », oblige toutes les administrations (ministères, collectivités territoriales, établissements publics...) à mettre, de façon générale et systématique, à la disposition du public tout document administratif publié sur format électronique, « dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé ». 2. Un bien dont l’usage est concédé au plus grand nombre A côté de la définition du Code civil, une autre acception des communs a émergé, fondée sur l’idée que les communs ne se définissent pas nécessairement par leur essence mais également par leur fonction : seraient communes toutes choses dont l’accès et l’utilisation sont libres. Il en va ainsi lorsque le propriétaire d’un bien fait le choix de concéder totalement ou partiellement, temporairement ou définitivement, sa propriété à d’autres, selon un mode prédéterminé et non- discriminatoire. Dans cette conception, qui fonde l’« open-source », la propriété elle-même devient ainsi une source alternative des communs. Les logiciels, données ou autres contenus distribués « sous licences libres », sont issus de la volonté de leurs auteurs d’en partager l’usage mais restent néanmoins leur propriété. Une licence « open-source » est en effet toujours ouverte sous certaines conditions et réserves qu’elle prédétermine. Enfreindre les conditions d’une licence libre équivaut ainsi à porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle des auteurs, en les contrefaisant. Les licences ouvertes ne sont donc pas, contrairement à une idée reçue, la négation de la propriété mais un aménagement altruiste et désintéressé de celle-ci. 3. Tous résultats de l’action altruiste d’une communauté de personnes Avec le mouvement des communs qui se renforce et se structure, a également émergé la conception de « communs collaboratifs », selon laquelle les communs deviennent des choses non plus seulement naturelles mais des « choses humaines ».
  • 4. Page 4 sur 31 Dans une société qui privilégie le don et la participation de soi, le partage et retour d’expérience, ainsi que la collaboration, les activités humaines sortent aujourd’hui de l’emprise de l’appropriation individuelle pour devenir des choses échangeables voire valorisables au sein de communautés de personnes ou d’intérêts. En plus de ces trois conceptions traditionnelles, une nouvelle acception a vu le jour, dans le domaine des transports : les données d’intérêt général, dont la définition semble correspondre à une nouvelle typologie de communs.
  • 5. Page 5 sur 31 B. Les données d’intérêt général dans le domaine des transports En mars 2015, le « Rapport Jutand » remis au Secrétaire d’Etat chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, sur l’ouverture des données de transport, a préconisé la création d’une nouvelle catégorie de données, celle des données d’intérêt général. Ce rapport a reçu une application pratique dans la loi n°2015-990 du 6 août 2015, dite loi Macron, qui a introduit un nouvel article L1115-1 du Code des transports, prévoyant que les données des services réguliers de transport publics de personnes et de mobilités doivent être diffusées librement, immédiatement et gratuitement pour informer les usagers. Sous réserve du décret d’application de cette disposition de la loi Macron, encore en cours d’examen au Conseil d’Etat, les services publics, mais également les sociétés privées, de transport public de personnes, les services de mobilité et les services de calculateurs d’itinéraire des AOT devraient être soumis à cette obligation de diffusion et d’accès libres et gratuits des données précitées. Cette même loi, appliquant les recommandations du rapport Jutland, crée donc la nouvelle catégorie des données d’intérêt général, entendues comme des données qui sont de nature privée mais dont la publication peut se justifier en raison de leur intérêt pour améliorer les politiques publiques. Ces données d’intérêt général sont de trois sources :  Les données issues des délégations de service public ;  Les données essentielles issues des conventions de subvention ;  Les données d’entreprises privées nécessaires aux enquêtes menées par l’INSEE. Les données d’intérêt général sont indubitablement assimilables à de nouveaux communs, puisque leur objectif est d’être distribuées et partagées entre le plus grand nombre. Ainsi entendus, les communs ne se détermineraient plus uniquement par rapport à un usage commun ou une concession de propriété mais aussi par rapport à une finalité, celle dont l’ouverture poursuit un objectif d’intérêt général. ***** Ces communs existant de diverses façons, leur administration, à savoir la manière dont on en use en commun, peuvent-ils faire l’objet d’une modélisation contractuelle ? Selon leur nature ? Les communautés qui les utilisent et les exploitent ? Et de possibles modes d’exploitation, autorisés, conditionnés ou interdits ? Il existe à ce jour différentes licences qui régissent l’utilisation des communs. Certaines se cherchent encore. D’autres sont à inventer … II. LES TENTATIVES DE LICENCES POUR REGIR LES COMMUNS Les conditions de l’administration des communs par le contrat font l’objet de deux grands modèles de licences : les licences ouvertes, mettant les communs à la disposition de tous (A) et les licences
  • 6. Page 6 sur 31 à réciprocité, conditionnant l’usage des communs à des règles de partage et de rétribution, au sein d’une communauté d’utilisateurs (B). A. Les licences ouvertes Comme cela a été indiqué ci-dessus, le modèle « open source » est fondé sur une conception des communs comme des biens appartenant à un propriétaire exclusif mais dont l’usage est concédé à tous, par la volonté altruiste de ce dernier. Dans cette perspective, un bien « propriétaire » peut être considéré comme un commun si le propriétaire en autorise l’usage au plus grand nombre. Il existe ainsi deux concepts possibles menant à une même fin d’ouverture. Peut être ouvert un bien qui par nature, n’appartient à personne ou alors, un bien dont le propriétaire « abandonne » sa propriété au plus grand nombre. Et dans chacun de ces deux schémas, il peut y avoir plusieurs degrés d’ouverture : du plus fermé au plus ouvert ou inversement, du plus ouvert au plus fermé. C’est, dans le premier cas, le propriétaire qui décide d’ouvrir un bien par nature fermé et dans le second cas, la communauté qui peut décider de fermer une ressource par nature ouverte, selon un schéma progressif et des critères qui peuvent être d’ailleurs les mêmes. Ces critères peuvent être l’identité de l’usager, la nature de la chose ouverte, l’intensité de son utilisation envisagée, un territoire donné, une durée d’utilisation, un investissement à protéger, une contrepartie ou une réciprocité attendues ou le caractère commercial ou non commercial de l’utilisation.
  • 7. Page 7 sur 31 Dans tous les cas, c’est le contrat qui est l’outil de l’ouverture, ou de la fermeture. Ce contrat est généralement qualifié de licence qui selon les acceptions qu’on lui donne, peut être une licence exclusive, ouverte ou à réciprocité. Il s’agit, dans la présente étude, de s’intéresser aux licences non pas « propriétaires » mais ouvertes ou à réciprocité. Plusieurs catégories de licences ouvertes visent les logiciels (1), les autres œuvres de l’esprit (2) et les données publiques (3). Le principe de ces licences fait toutefois l’objet de critiques (4). 1. Les logiciels « open source » Le schéma « Propriété » ci-dessus s’applique parfaitement à la logique des logiciels concédés en « open source ». Certains logiciels « propriétaires » peuvent en effet être diffusés librement, pour une utilisation non commerciale, selon un modèle « freeware », lorsque les auteurs ont abandonné leurs droits de propriété intellectuelle et que les logiciels sont libres d’utilisation, sans contrepartie financière ni obligation particulière, ou « shareware », lorsque le logiciel est distribué à des utilisateurs qui sont invités à les essayer et choisissent de verser une contribution financière s’ils sont satisfaits. L’ouverture fonctionne ici selon un schéma conditionné. La notion de logiciels « libres » a vu le jour à l’initiative du Finlandais Linus TORVALDS, et dans le but de lutter contre les monopoles des sociétés éditrices de logiciels de bureautique, les sources du logiciel Linux ont été mises gracieusement à la disposition du public. Ce modèle de logiciel libre, aussi appelé « copyleft », se fonde sur le principe qu’un logiciel ne doit pas être considéré comme un produit susceptible d’être vendu, mais comme une ressource. Son code source est donc mis gratuitement à la disposition de tous, tandis que, généralement, les services de distribution, maintenance, conseil, intégration, etc. attachés à ce logiciel sont fournis à titre payant. Les conditions d’utilisation d’un logiciel libre sont encadrées par une licence à source accessible ou « open source », dont les principaux modèles sont les licences GNU GPL (General Public License), GNU LGPL (Lesser General Public License), toutes deux conçues par la Free Software Foundation, et NPL (Netscape Public License), proposée par la société NETSCAPE sur son navigateur Communicator. Les caractéristiques des principales licences « open source » sont détaillées dans le tableau ci-après.
  • 8. Page 8 sur 31 2. Extension aux autres œuvres de l’esprit : le modèle « Creative Commons » Il a été proposé des licences d’utilisation en mode « open source » d’œuvres autres que les logiciels, mais qui ne s’appliquent qu’à une catégorie spécifique d’œuvres : Cecill pour les Logiciels, Licence LEL pour les œuvres d'art, Licence Musique Libre pour les œuvres musicales. En 2001, le professeur Lawrence LESSIG, de l’Université de Stanford, a créé le modèle « Creative Commons », afin de proposer aux auteurs d’œuvres de l’esprit une alternative aux schémas traditionnels de leur communication au public et, ainsi, de favoriser leur partage tout en maintenant leur protection. Il existe, à ce jour, six licences susceptibles d’être choisis par les titulaires des droits de propriété intellectuelle afférents à leurs œuvres, en fonction de l'exploitation qu'ils entendent leur donner. 1. Attribution (BY): Le titulaire des droits autorise toute exploitation de l’œuvre, y compris à des fins commerciales, ainsi que la création d’œuvres dérivées, dont la distribution est également autorisé sans restriction, à condition de l’attribuer à son l’auteur en citant son nom.
  • 9. Page 9 sur 31 2. Attribution + Pas de Modification (BY ND) : Le titulaire des droits autorise toute utilisation de l’œuvre originale (y compris à des fins commerciales), mais n’autorise pas la création d’œuvres dérivées. 3. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale + Pas de Modification (BY NC ND) : Le titulaire des droits autorise l’utilisation de l’œuvre originale à des fins non commerciales, mais n’autorise pas la création d’œuvres dérivés. 4. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale (BY NC) : le titulaire des droits autorise l’exploitation de l’œuvre, ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’il ne s’agisse pas d’une utilisation commerciale (les utilisations commerciales restant soumises à son autorisation). 5. Attribution + Pas d’Utilisation Commerciale + Partage dans les mêmes conditions (BY NC SA) : Le titulaire des droits autorise l’exploitation de l’œuvre originale à des fins non commerciales, ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’elles soient distribuées sous une licence identique à celle qui régit l’œuvre originale. 6. Attribution + Partage dans les mêmes conditions (BY SA) : Le titulaire des droits autorise toute utilisation de l’œuvre originale (y compris à des fins commerciales) ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’elles soient distribuées sous une licence identique à celle qui régit l’œuvre originale. 3. Les licences d’utilisation des données publiques En application de la loi CADA et de la loi pour une République numérique, évoquées ci-dessus, l’accès aux données publiques et leur réutilisation peuvent être soumis à des licences qui fixent les droits et les obligations qui y sont associés, selon une logique de licences plus ou moins ouvertes. A ce jour, plusieurs licences coexistent : - La mission ETALAB promeut une licence totalement ouverte, libre, non-exclusive et gratuite, qui favorise la réutilisation la plus large possible, en autorisant la transformation des données, leur reproduction et leur redistribution commerciale, en ce compris leur adaptation et leur combinaison avec d’autres données, sous réserve du mention de la source des données et de la date de leur dernière mise à jour. Le « producteur » des données n’offre aucune garantie quant à leurs défauts et irrégularités et ne garantit pas non plus que leur fourniture puisse être continue. Il garantit toutefois que les données ne contiennent pas de droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers. S’il les détient, il les cède de façon non exclusive, à titre gracieux, pour le monde entier et toute la durée des droits. La licence ETALAB a été récemment actualisée, pour intégrer les nouvelles dispositions de la loi « pour une République numérique ». Elle prend notamment en compte la réutilisation des informations publiques comportant de données à caractère personnel, subordonnée au respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, dite « Informatique et Libertés ». - D’autres types de licences ouvertes, non prévues initialement pour l’open data mais plutôt pour la libération des droits de propriété intellectuelle, peuvent s’adapter aisément à
  • 10. Page 10 sur 31 l’ouverture des données, telles que les licences « Open Government Licence (OGL) », « Creative Commons », déjà décrite ci-dessus, et « Open Data Commons ». Ces licences sont adoptées par certaines institutions en France. Les plus utilisées semblent être les licences OBdL et ODC-By. - Les Licences Informations Publiques (LIP) proposées l’Agence du patrimoine immatériel de l’Etat (APIE), qui ne sont pas des « licences libres », permettent, en rémunération d’une redevance pour la personne publique, la réutilisation des données publiques sous certaines conditions. La durée de ces licences peut être illimitée ou alors, restreinte. Ces licences semblent tomber en désuétude au profit de modèles « ouverts ». Au demeurant, force est de constater que l’accès aux données publiques et leur réutilisation ne sont que très partiellement réalisés à ce jour en France : trop peu de personnes publiques ont ouvert leurs données et les modalités de leur réutilisation se confrontent à de nombreuses résistances. Il n’existe pas non plus à ce jour de consensus sur un modèle de licence de réutilisation possible, bien que le modèle de la licence ouverte soit fortement promu par le gouvernement. C’est pourquoi, la loi « pour une République numérique » a institué un service public de la donnée. L’article 11 de cette loi prévoit en effet que les administrations ne peuvent pas faire obstacle à la réutilisation des bases de données publiques qu’elles publient, à l’exception de celles produites ou reçues dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial soumise à la concurrence. A cette fin, il est prévu l’établissement d’une liste, fixée par décret et révisable tous les cinq ans, des licences de réutilisation à titre gratuit de ces données publiques. Lorsqu'une administration souhaite recourir à une licence ne figurant pas sur cette liste, cette licence doit être préalablement homologuée par l'Etat, dans des conditions devant être fixées par décret. A ce jour, ces deux décrets n’ont pas encore été publiés. 4. Critiques du modèle « open source » Le modèle « open source » a fait l’objet de plusieurs critiques de la part de théoriciens et de praticiens des communs. Il a d’abord été reproché à ce modèle d’être inadéquat par rapport à la conception des communs qui se fonde sur l’idée de ressources « gouvernées » par une communauté d’intérêts. Valérie Peugeot, chercheur et présidente de VECAM, définit en effet les communs par les trois dimensions qui les caractérisent : les communs sont (i) des ressources (ii) soumises à un régime collectif de droits et d’obligations et (iii) dont l’usage est gouverné par une communauté.
  • 11. Page 11 sur 31 Or les licences ouvertes, décrites précédemment, sont des licences unilatérales dont l’ouverture est décidée par la seule volonté du détenteur initial de la ressource qui fixe lui-même les modalités de cette ouverture. Mais plus encore, une licence « open source » vise la dissémination d’une œuvre auprès du plus grand nombre, sans toutefois retenir l’idée de réciprocité de la part des utilisateurs de ces licences, ni, plus généralement, d’interaction entre ceux-ci et les détenteurs initiaux de la ressource. Soumettre l’ouverture d’une ressource à certaines conditions, comme dans le schéma des licences ouvertes, n’équivaut pas à convenir ensemble de conditions d’ouverture qui exigent de la part de ceux auprès de qui on ouvre la réalisation d’une action positive de réciprocité, qu’elle soit matérielle, financière ou éthique. Les critiques ont également reproché au modèle de licence ouverte de ne pas faire de distinction entre utilisation non commerciale et exploitation commerciale, ce qui a pour effet de permettre à des entités commerciales de profiter gratuitement de ressources, voire de se les approprier sans y avoir contribué, ni avoir financé sa création et son développement, créant ainsi un état de concurrence non régulée et une nouvelle forme de parasitisme. A l’écoute de ces pratiques, l’article 8 du projet de loi pour une République numérique prévoyait la protection d’une nouvelle catégorie de communs, le domaine commun informationnel. L’objectif de ces dispositions était de « protéger les ressources communes à tous appartenant au domaine public contre les pratiques d’appropriation qui conduisent à en interdire l’accès », en permettant à des associations agréées d’intenter une action en justice pour défendre le périmètre de ce domaine commun et faire cesser toute tentative de réappropriation exclusive. Ces dispositions n’ont toutefois pas été retenues dans la loi finalement votée, en raison de l’opposition de plusieurs acteurs de la propriété littéraire et artistique (SEPM, SACD, SNEP, FNPS, SNE, …), qui ont estimé qu’elles étaient imprécises et dangereuses pour la protection du droit d’auteur. Quoiqu’il en soit, l’ensemble des critiques faites aux licences « open source » fonde aujourd’hui le courant de pensée des licences à réciprocité. B. Les licences à réciprocité Par opposition à la dissémination auprès de tous, prônée par le modèle « open source », les licences à réciprocité posent le principe d’un partage du commun réservé aux membres d’une communauté, dans des conditions dépendant des contributions de chacun d’eux sur ce commun. Aux fins de garantir une réciprocité dans les conditions de ce partage, les licences à réciprocité prévoient usuellement des restrictions croissantes, en fonction des catégories d’utilisateurs du commun. Les grands principes fondant ces restrictions sont généralement les suivants :
  • 12. Page 12 sur 31 a) Le commun peut être utilisé par tous les membres d’une communauté, pour une utilisation non-commerciale. b) Une exploitation commerciale du commun par les membres est possible, sous condition d’une rétribution des contributeurs dudit commun. c) L’exploitation commerciale du commun est interdite aux tiers, non-contributeurs, sauf si ces derniers payent une redevance dans le cadre d’une licence spécifique. Quatre grands types de licences à réciprocité, fondées sur quatre philosophies différentes, peuvent ainsi être mises en œuvre. 1. Le modèle « Copyfarleft » Le modèle de licence « copyfarleft » (extrême-gauche d’auteur) a été développé par Dmytri Kleiner, notamment dans sa publication « The Telekommunist Manifesto » (2010). Son principe est que l’utilisation d’une ressource n’est libre que si son utilisation n’est pas commerciale. Si cette utilisation est commerciale, seules certaines entités juridiques peuvent valablement l’exploiter. L’utilisation commerciale de la ressource est ainsi réservée à des entreprises appartenant à ses salariés et aux coopératives, à condition que tous les gains financiers, excédents, profits et avantages produits par l'entreprise ou la coopérative soient redistribués aux salariés-propriétaires. Toute utilisation de la ressource par une entreprise privée, non coopérative et qui cherche à produire du bénéfice à partir de cette ressource, n’est donc pas permise. Les entités commerciales ne pourront alors utiliser le commun qu’à condition de payer une redevance pour ce faire, dans le cadre d’une licence ad hoc, en dehors de la licence gratuite. Le critère principal de cette licence est donc la nature coopérative des usagers de la ressource. A ce jour, le modèle « Copyfarleft » reçoit une illustration dans le modèle de licence « Peer Production License ». Il a vocation à s’appliquer à toute création dans le domaine littéraire, scientifique et artistique, protégeable par un droit de propriété intellectuelle, quel qu'en soit le mode ou la forme d'expression, y compris sous forme numérique. Cette licence peut se modéliser comme suit :
  • 13. Page 13 sur 31 Le modèle « copyfarleft » a ainsi pour principal objectif de prévenir le risque d’une concurrence sauvage de la part d’entités économiques profitant d’un commun réalisé par d’autres et à leur seuls avantages. Il introduit toutefois un biais en ce que l’exploitation commerciale est réservée à des catégories d’entités, en fonction de leur statut juridique et non de leurs contributions effectives. Sont ainsi exclues toutes les sociétés commerciales, sans distinction entre celles qui auraient effectivement contribué au commun de celles qui n’auraient pas contribué. Cette approche trop réductrice a notamment été soulignée par Miguel Said Viera et Primavera de Filipi, dans leur article « une nouvelle proposition de Commons » (revue en ligne « Journal of Peer Production » -n° 4 jan. 2014). 2. Le modèle « Commons Reciprocity Licence » Comme alternative au « copyfarleft », Miguel Said Viera et Primavera de Filipi, dans l’article précité, proposent d’inclure une clause de réciprocité selon laquelle seuls les contributeurs à la ressource puissent exploiter commercialement ou non un commun et ce, indépendamment de leur statut juridique. Le critère principal de cette licence est le fait de contribuer à la ressource. Toute personne qui contribue à la ressource et l’utilise à des fins non commerciales bénéficie d’une licence libre. Leur contribution est mesurée par une monnaie virtuelle, la « Peer-Currency ». Si les contributeurs utilisent la ressource à des fins commerciales, cette monnaie doit également servir à évaluer la rémunération des contributeurs du commun exploité
  • 14. Page 14 sur 31 commercialement. Une variante au modèle « Commons Reciprocity Licence », le modèle « Open Value Accounting », propose une mesure des contributions par une notation que chaque contributeur reçoit de ses pairs. Les non-contributeurs ne peuvent exploiter commercialement un commun qu’après avoir conclu une licence ad hoc avec les contributeurs, en contrepartie du paiement d’une redevance. A ce jour, le modèle « Commons Reciprocity Licence » n’a toutefois pas donné lieu à l’écriture d’une licence-type. Il peut néanmoins se modéliser comme suit : Le modèle « Commons Reciprocity License » a pour principal avantage de permettre aux contributeurs d’un commun, sans exclusion en raison de leur statut, de l’exploiter commercialement et de recevoir une rétribution proportionnelle à leur contribution. La difficulté de ce modèle réside toutefois dans les modalités d’évaluation des contributions. Un système de mesure par une monnaie virtuelle pourrait générer un système trop complexe à mettre en œuvre et à gérer. Il risquerait également d’introduire une part d’arbitraire dans l’évaluation des différents modes de contribution. Les initiateurs du « Commons Reciprocity License » sont d’ailleurs conscients de ce risque, qu’ils évoquent dans leur article : « L’un des plus importants réside dans la détermination du « taux de change » entre les différents types d’œuvres. En d’autres termes, comment pouvons-nous mesurer des contributions individuelles (dans différents domaines) par le biais de jetons ? Combien de jetons seraient alloués à un utilisateur qui aurait contribué en versant dans les communs une image, une vidéo ou un texte ? Les œuvres dérivées ou les simples améliorations devraient-elles être récompensées par moins de jetons ? Est-ce que le système devra prendre en compte une
  • 15. Page 15 sur 31 mesure de la qualité ou du mérite artistique de ces œuvres ? Et si oui, qui sera compétent pour effectuer cette forme d’évaluation ? » Un système de « monnaie d’échange » a toutefois l’avantage de conférer un système de mesure objectif des contributions, contrairement au système de notation préconisé par le modèle « Open Value Accounting ». 3. Le « Fair Source Licence » D’autres licences ont été élaborées pour permettre le partage des biens communs, tout en encadrant leur exploitation, afin que les titulaires des droits puissent recevoir une rétribution. Ainsi, la « Fair Source License » se fonde sur un partage du code source d’un logiciel ou développement informatique, tout en permettant au(x) titulaire(s) des droits de recevoir des revenus de l’exploitation de ce bien. Cette licence est consentie à titre gratuit aux particuliers et aux entreprises, sous réserve d’un nombre limité d’utilisateurs finaux au sein d’une entreprise (en ce compris ses affiliées). Si une entreprise utilise le logiciel pour un nombre d’utilisateurs supérieur au plafond susvisé, la licence est soumise au paiement d’une redevance. Le critère principal de cette licence est donc la nature de l’utilisateur (particulier ou entreprise) et quand il s’agit d’entreprises, du nombre d’utilisateurs de la ressource. Le mécanisme de cette licence peut se modéliser comme suit :
  • 16. Page 16 sur 31 La licence « Fair Source » correspond donc à une organisation beaucoup plus libérale de la communauté constituée autour du commun. En effet, aucune obligation de contrepartie entre contributeurs et utilisateurs n’est spécifiquement prévue, à l’exception du paiement d’une redevance par les entreprises dépassant une certaine taille. En outre, en l’état, cette licence ne prévoit pas de système de mesure des contributions, susceptible de permettre d’évaluer une juste rémunération qui serait due aux contributeurs.
  • 17. Page 17 sur 31 4. Licence FairlyShare L’autre licence mise en œuvre pour assurer une rétribution aux titulaires des droits sur le commun est la licence « FairlyShare » dont l’objet est de laisser les communs gratuits dans la sphère contributive, mais payants dans la sphère commerciale. Cette licence part du principe que le contributeur est prêt à contribuer gratuitement mais, si quelqu'un en retire un profit, il veut en recevoir une part équitable. Le licencié s’engage donc à faire ses meilleurs efforts pour définir un domaine et une durée d'exploitation limités des droits qui lui sont concédés, ainsi qu’identifier les contributions et leurs auteurs. Ceci fait, il doit définir la part de ses profits affectée aux contributeurs, en application des meilleures pratiques (à défaut, la part est de 50%), puis répartir cette part entre les différents contributeurs. Le licencié doit enfin s’engager à souscrire à plusieurs valeurs sociétales et environnementales, notamment le Pacte Mondial de l'ONU, la Responsabilité Sociale et Environnementale et le code déontologique des journalistes. La licence « FairlyShare » est relativement proche du modèle « Commons Reciprocity Licence », précité, en ce qu’il oblige l’exploitant d’un commun à élaborer et à mettre en œuvre un système de répartition entre les contributeurs de la part des profits qui leur est allouée au titre de l’exploitation commerciale du commun. Cette licence peut se modéliser comme suit :
  • 18. Page 18 sur 31 Le système mis en place est cependant plus libéral, en ce que ce système de répartition n’est pas déterminé par la communauté, mais laissé au libre choix de l’exploitant et sous sa responsabilité. Ainsi, il n’existe, dans cette licence, aucun système de mesure des contributions, par une monnaie virtuelle ou tout autre moyen. Seul un système de répartition « par défaut » est prévu. III. PRECONISATIONS POUR LA FABRIQUE DES MOBILITES La Fabrique des Mobilités pourrait, dans une première approche, vouloir promouvoir auprès de ses membres l’adoption de licences ouvertes et de licences à réciprocité, comme celles décrites précédemment. Elle interviendrait ainsi comme une instance de médiation, au sens de l’article du Livre Blanc, paru en juin 2015, précité, à savoir comme un espace d’échange et de collaboration entre ses membres, sans toutefois les obliger à adopter des cadres contractuels précis. Il s’agirait alors d’informer les membres de l’existence de ces diverses licences, de leur nature et de leur contenu, à charge pour les membres de la Fabrique de les adopter ou non et dans l’affirmative, de choisir entre eux celles qu’ils souhaitent utiliser, ce choix leur revenant en propre et étant de leur seule responsabilité. Dans une approche plus volontariste, la Fabrique pourrait vouloir inciter ses membres à privilégier certaines licences, faire un choix entre des licences ouvertes ou des licences à réciprocité, en imposer certaines dans le cadre de son fonctionnement. Elle agirait ainsi plus comme une instance de régulation, au sens de l’article du Livre Blanc précité. Si la Fabrique souhaitait s’engager dans la promotion de licences à réciprocité, elle pourrait vouloir également privilégier certains modèles, parmi les licences à réciprocité susvisées, ou en créer d’autres qui lui soient spécifiques. C’est là, à notre sens, la vocation de la Fabrique des Mobilités qui a pour objet de réunir plusieurs acteurs très différents, créateurs et contributeurs de ressources multiples et dont l’objectif est de viser une exploitation commerciale de ces ressources, après une démarche d’expérimentation et d’échanges qui peut être, dans un premier temps, hors commerce. Le système des licences à réciprocité semble ainsi parfaitement répondre à cette vocation, en ce qu’il permet de distinguer entre activité désintéressée et activité commerciale, typologie de contributeurs et modes de contributions. Une réflexion devrait alors s’engager sur l’opportunité d’en choisir le modèle. Le modèle « Copyfarleft » qui vise à exclure des catégories d’utilisateurs (à savoir les entreprises commerciales au bénéfice des coopératives) semble inadapté pour l’écosystème développé par la Fabrique des Mobilités, dont l’objet est de faire interagir des acteurs aux statuts juridiques très différents, lesquels adoptent peu le modèle coopératif. Le modèle « Commons Reciprocity Licence » semble plus proche de la philosophie de la Fabrique des Mobilités, en ce qu’il utilise comme critère principal la contribution. Ainsi, tous les contributeurs, quel que soit leur statut juridique, pourraient bénéficier de la licence
  • 19. Page 19 sur 31 et d’un possible retour sur leurs apports respectifs. La difficulté résiderait toutefois dans la création d’une unité de mesure de la contribution, ayant valeur de monnaie d’échange. Il conviendrait ainsi de mener une réflexion plus approfondie sur la mise en œuvre d’un tel système de valorisation des contributions. Il s’agirait notamment de prévoir des règles quant à l’attribution des unités de cette monnaie aux contributeurs et à l’échange de ces unités entre eux. Eviter également les éventuels risques de spéculation ou de contributions superficielles tendant à fausser les règles du jeu. Le LAB-RH, structure similaire à la Fabrique des Mobilités dans le domaine des RH, a développé une monnaie permettant de quantifier l’engagement des acteurs en quantifiant ce qu’ils produisent pour le LAB au regard de ce qu’ils gagnent. Le modèle « Fair Source Licence » pose le problème, quant à lui, d’utiliser comme critère de la licence, pour les entreprises, le nombre d’utilisateurs susceptibles d’utiliser la ressource. Un système de redevances dues par des entreprises en fonction de leur taille ne semble pas correspondre au modèle mis en œuvre par la Fabrique des Mobilités, laquelle accueille des start-ups de très petite taille comme des groupes industriels de très grande taille, ainsi que des collectivités territoriales. L’emploi de cette licence impliquerait donc des conditions d’accès possiblement inéquitables pour les acteurs de la Fabrique des Mobilités, dans la mesure où des start-ups pourraient les utiliser gratuitement, tandis que les grandes entreprises devraient payer une redevance, sans aucune considération liée au volume de la contribution des uns et des autres. Enfin, si la licence « Fair Source » pose le principe d’une rémunération en faveur des contributeurs d’une ressource sur la base des recettes générées par son exploitation commerciale, au-delà d’un certain nombre d’utilisateurs, les modalités de répartition de cette rémunération ne sont toutefois pas prévus par ce modèle, ce qui le rend insuffisant pour fonder un système d’administration des communs immédiatement reproductible pour la Fabrique des Mobilités. Le modèle « Licence FailyShare », en ce qu’il n’oblige pas les exploitants à se conformer à un modèle-type de rétribution, pourrait ainsi présenter, quant à lui, l’inconvénient d’une rémunération non uniforme voire dissemblable des apports des contributeurs, chaque exploitant du commun pouvant appliquer son propre système. Ce modèle ne semble donc pas non plus suffisamment organisé pour être mis en œuvre dans le cadre de la Fabrique des Mobilités. En outre, selon ce modèle, les exploitants des communs sont soumis à des obligations très contraignantes en matière d’adhésion à des normes sociétales et environnementales, dont il faudrait contrôler le respect. L’application d’une licence « FairlyShare » au sein de la Fabrique des Mobilités aurait ainsi pour effet d’empêcher toute maitrise de la mesure des contributions et, de manière assez contradictoire, d’obliger la mise en œuvre d’un système de contrôle strict du respect de normes sociétales et environnementales, même si ces exigences pourraient répondre aux préoccupations de l’ADEME et en cela, constituer une piste de réflexion intéressante. La Fabrique des Mobilités pourrait alors vouloir inventer son propre modèle de licence. La régulation de l’usage des communs au sein de cette structure pourrait ainsi s’organiser selon un modèle original mais s’inspirant des mécanismes les plus intéressants des licences à réciprocité, à savoir :
  • 20. Page 20 sur 31 a) La possibilité pour tous les membres de la Fabrique des Mobilités d’utiliser les communs créés dans son cadre, à titre gratuit et non-exclusif, pour le monde entier et une durée illimitée, aux fins d’une utilisation non-commerciale. La réciprocité viendrait du fait que chaque membre qui apporterait un commun à la Fabrique ou utiliserait un commun issu de la Fabrique pour l’améliorer ou le perfectionner s’obligerait aux mêmes conditions de partage et en cas d’amélioration ou de perfectionnement, s’engagerait à partager de nouveau ce commun ainsi enrichi entre les membres de la Fabrique, dans les mêmes conditions d’usage. Les utilisateurs des communs se soumettraient soumis à une charte de valeurs, posant les obligations essentielles auxquelles ils devraient se conformer. Un exemple de cette charte est proposé en annexe I. Cet exemple en constitue une trame minimale. Il peut être amélioré par une réflexion qui pourrait être menée collégialement entre les membres de la Fabrique des Mobilités. L’idée d’une charte de valeurs est qu’elle puisse être proposée comme socle minimal de droits et obligations à l’entrée d’un membre au sein de la Fabrique, par simple adhésion volontaire, sans qu’il soit nécessaire de recueillir le consentement exprès et écrit des membres. Sa diffusion devra toutefois être suffisante pour en permettre la connaissance par tous. Le critère d’application de cette charte serait la non-commercialité et son critère d’opposabilité serait la qualité de membre de la Fabrique. b) La possibilité pour les seuls acteurs de la Fabrique ayant contribué aux communs de les exploiter commercialement, à la condition qu’ils rétribuent les autres contributeurs, à proportion de leurs apports. La réciprocité viendrait ici du fait que chaque contributeur s’oblige à récompenser l’autre, en cas d’utilisation commerciale des communs générés par ce dernier. La question de l’évaluation des apports de chaque contributeur devra être interrogée avant la mise en œuvre d’une telle licence à visée commerciale. Comme cela a été indiqué ci-dessus, une mesure des contributions par une monnaie virtuelle, telle que pressentie par la « Commons Reciprocity Licence », pourrait cependant être complexe à mettre en œuvre. Le principe d’une évaluation des contributions à l’aide d’une « monnaie d’échange » est néanmoins une idée pertinente, en ce qu’elle permet une mesure objective des apports de chacun. Il conviendrait alors de réfléchir à un système à la fois suffisamment simple à mettre en œuvre, de manière à éviter un fonctionnement non maîtrisé, et suffisamment rigoureux pour prévenir tout risque de contournement.
  • 21. Page 21 sur 31 Un exemple de licence à réciprocité, conçu pour la Fabrique des Mobilités, est fourni en annexe II. Il peut être amélioré par une réflexion collective. La licence proposée aurait vocation à s’appliquer à tous types de ressources, qu’il s’agisse de données, de biens matériels ou de droits intangibles, tels que des logiciels, des créations graphiques ou toute autre œuvre de l’esprit. Cette licence conviendrait d’être proposée à la signature de tout membre de la Fabrique qui contribue, d’une manière ou d’une autre, à l’apport, la création ou l’enrichissement d’un commun. Le critère d’application de cette licence serait la commercialité et son critère d’opposabilité serait la qualité de contributeurs aux communs. c) La soumission de toute exploitation commerciale des communs par des acteurs non membres de la Fabriques des Mobilités à la conclusion d’une licence ad hoc et au paiement de redevances, dans des conditions à déterminer selon la nature des communs, les modes d’exploitation, la durée et le territoire envisagés. Cette hypothèse est intéressante à envisager pour permettre la dissémination des communs dont la Fabrique aurait permis l’émergence et le retour sur investissement de leurs contributeurs. A ce stade, il est difficile d’en proposer une rédaction tant les situations et les intérêts en jeu peuvent être différents, et les acteurs divers, mais son principe devrait pouvoir faire l’objet d’une réflexion collective plus poussée. Le critère d’application de cette licence ad hoc serait la commercialité et son critère d’opposabilité serait la qualité de non-membre de la Fabrique et de non-contributeur aux communs. Ce modèle général pourrait être schématisé ainsi :
  • 22. Page 22 sur 31 L’adhésion à ce corpus de droits et obligations serait ainsi progressive, en fonction de l’implication des membres et leur volonté de s’engager. Il ferait une claire distinction entre non-membres et membres de la Fabrique, reconnaissant à ces derniers un avantage à y participer et à entrer dans un « club ». La distinction entre membres et contributeurs serait également clairement posée. Peuvent participer à la Fabrique des acteurs qui ne contribuent pas aux communs mais dès lors, qu’ils y contribuent, ils entreraient dans un second « club », plus fermé, permettant de rendre possible l’utilisation commerciale de communs, à condition de participer à une juste et réciproque rétribution des contributeurs. Les non-membres de la Fabrique ne seraient toutefois pas exclus de cette commercialité, dans des conditions financières et commerciales à définir au cas par cas. Ce schéma contractuel reste, à ce stade, une promesse. Il doit être alimenté par une réflexion collective et confrontée à la pratique des communautés d’intérêts qui constitue la Fabrique des Mobilités. Cette réflexion sur le cadre contractuel doit être menée de front avec une tout aussi nécessaire réflexion sur la gouvernance de la Fabrique des Mobilités. Comme présenté dans l’article précité de juin 2015, au sein du Livre Blanc, cette structure de gouvernance aurait notamment pour mission d’attribuer les ressources, en réglementer l’usage mais aussi également, gérer les conflits entre les usagers.
  • 23. Page 23 sur 31 La Fabrique deviendrait ainsi, outre un club et une plateforme technique de partage des ressources, un tiers de confiance dans la régulation et la gestion des communs. Jérôme Giusti Avocat spécialiste en droit de la propriété intellectuelle et en droit des nouvelles technologies, de l’informatique et de la communication 11.100.34. Avocats Associés j.giusti@11-100-34.com
  • 24. Page 24 sur 31 ANNEXE I CHARTE DE VALEURS DE LA FABRIQUE DES MOBILITES Préambule : La présente charte s’adresse à l’ensemble des membres de La Fabrique des Mobilités (ci-après : « Vous »). La Fabrique des Mobilités est un accélérateur européen qui a pour objet de mettre en relation les acteurs du transport et des mobilités et de leur donner la possibilité de développer leurs projets, de les partager, de capitaliser les retours d’expériences et les erreurs, pour faire émerger une culture commune de l’innovation dans l’action. A cette fin, La Fabrique des Mobilités a créé plusieurs communautés d’intérêt (ci-après : les « Communautés »), dans plusieurs domaines en lien avec les transports et les mobilités, pour développer des plateformes ouvertes de contributions. Droits qui vous sont consentis : En participant à La Fabrique des Mobilités, vous êtes autorisés à utiliser les ressources alimentées et gérées collectivement par les différentes Communautés (ci-après : les « Communs »), sous réserve des conditions d’utilisations spécifiques éventuellement imposées par chaque Communauté dans le cadre d’éventuelles licences à réciprocité. Sous cette réserve, vous avez ainsi le droit de :  Utiliser et partager les Communs entre les membres, en tout ou en partie, pour un usage exclusivement non commercial ;  Enrichir, compléter, améliorer ou perfectionner les Communs, seul ou à plusieurs membres ;  Créer et utiliser des copies et des versions dérivées des Communs, pour un usage exclusivement non commercial ;  Initier et proposer des projets collectifs entre les membres, sur la base des Communs, de leurs copies ou versions dérivées, à fins exclusivement non commerciales. Ces droits vous sont consentis pour la durée de votre participation à la Fabrique des Mobilités et pour le monde entier. Si vous apportez des Communs à la Fabrique, ou si vous réalisez des Communs ou contribuez à leur réalisation ou enrichissement, vous acceptez de vous soumettre aux mêmes conditions d’usage et de partage. Conditions d’exercice de ces droits : Votre exercice des droits visés ci-dessus est soumis aux conditions suivantes :
  • 25. Page 25 sur 31  Si vous partagez les Communs, vous devez mentionner les noms de leurs contributeurs par tout moyen utile et inclure une copie de la présente charte, ou de l’adresse internet où elle peut être consultée, à toute copie partagée ou version dérivée de ces Communs ;  Le cas échéant, vous devez indiquer si vous avez créé une version dérivée d’un Commun, identifier toute modification apportée et donner toute indication sur les modifications préalables du Commun ;  Lorsque vous créez une version dérivée d’un Commun, vous vous interdisez de porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle d’un tiers, ou, plus généralement, de contrevenir aux droits de tiers ou à la réglementation applicable, sauf autorisation préalable et écrite des auteurs ou ayants-droit.  Vous ne pouvez utiliser et partager les Communs que sous les conditions de la présente charte. Obligation de réciprocité Vous vous engagez à partager avec les autres membres toutes copies et versions dérivées des Communs, auxquels vous auriez apporté tous enrichissements, compléments, améliorations ou perfectionnements, pour un usage exclusivement non commercial et dans les mêmes conditions que celles prévues dans la présente charte pour le partage des Communs. Vous vous interdisez d’imposer toute autre restriction et/ou restriction aux autres membres avec lesquels vous effectuez ces partages. Garantie et limitation de responsabilité Sous réserve des garanties d’ordre public imposées par la loi, les Communs sont fournis en l’état, sans garantie d’aucune sorte, expresse ou tacite, en ce compris à l’égard de leur contenu, de leur exactitude ou de leur conformité à l’usage auxquels ils sont destinés. En aucun cas, vous ne chercherez à engager la responsabilité des contributeurs des Communs à cet égard. Autres obligations En participant à La Fabrique des Mobilités, vous vous engagez :  à respecter les lois et règlements en vigueur et à ne pas porter atteinte aux droits de tiers ou à l’ordre public ;  à ne pas usurper l’identité d’autrui et à ne pas donner d’information fausse ou de nature à induire en erreur ;  à informer sans délai La Fabrique des Mobilités de toute difficulté relative à votre participation aux Communautés et à votre utilisation des Communs, dans les conditions prévues dans la présente charte ;  à répondre dans les meilleurs délais à toute demande d’information de la part du responsable d’une Communauté ou de La Fabrique des Mobilité. La Fabrique des Mobilités se réserve le droit de suspendre ou de mettre fin à votre participation, d’avertir toute autorité concernée ou d’engager toute action judiciaire, en cas de manquement de votre part aux règles de la présente charte.
  • 27. Page 27 sur 31 ANNEXE II LICENCE A RECIPROCITE DE LA FABRIQUE DES MOBILITES Préambule : La présente licence s’applique à tous les membres de La Fabrique des Mobilités (ci-après : les « Contributeurs ») ayant contribué à la réalisation et/ou à l’enrichissement, l’amélioration ou le perfectionnement d’un Commun (tel que défini ci-dessous). Les Communs sont mis à disposition des Licenciés (tels que définis ci-dessous) selon les termes de la présente licence (dénommée ici la « Licence »), sous réserve des licences d’exploitation spécifiques éventuellement imposées par chacune des communautés d’intérêt visées ci-dessus. L'exercice sur un Commun de tout droit proposé par la Licence vaut acceptation de celle-ci. Selon les termes et les obligations de la Licence, le Concédant (tel que défini ci-dessous) propose au Licencié l'exercice de certains droits présentés ci-après, et le Licencié en approuve les termes et conditions d'utilisation. 1. Définitions a. « Commun » : une ressource alimentée et gérée collectivement par une des communautés d’intérêt de La Fabrique de Mobilités ; b. «Ressource Collective » : une ressource, alimentée et gérée collectivement dans le cadre de La Fabrique de Mobilités, dans laquelle le Commun, dans sa forme intégrale et non modifiée, est assemblé en un ensemble collectif avec d'autres Communs séparés et indépendants. Aux termes de la présente Licence, un Commun qui constitue une Ressource Collective ne sera pas considérée comme une Version Dérivée (telle que définie ci-après). c. « Version Dérivée » : une ressource créée soit à partir du Commun seul, soit à partir du Commun et d'autres ressources préexistantes, également alimentées et gérées collectivement dans le cadre de La Fabrique de Mobilités. Une Ressource Collective ne sera pas considérée comme une Version Dérivée aux termes de la Licence. d. « Concédant » : le ou les Contributeurs qui proposent la mise à disposition d’un Commun selon les termes de la présente Licence. e. « Licencié » : le Contributeur qui accepte la présente Licence d’utilisation d’un Commun. 2. Exceptions aux droits exclusifs. Aucune disposition de cette Licence n'a pour intention de réduire, limiter ou restreindre les prérogatives issues des exceptions aux droits, de l'épuisement des droits ou d'autres limitations aux droits exclusifs des ayants droit selon le droit de la propriété intellectuelle ou les autres lois applicables.
  • 29. Page 29 sur 31 3. Etendue de la Licence Soumis aux termes et conditions définis dans la présente Licence, le Concédant consent au Licencié le droit d'exercer, pour le monde entier et pour une durée illimitée, à titre non exclusif, les droits suivants : a. utiliser, copier et exploiter le Commun ; b. incorporer le Commun dans une ou plusieurs Ressources Collectives ainsi qu’utiliser, copier et exploiter ces Ressources Collectives ; c. créer des Versions Dérivées, ainsi qu’utiliser, copier et exploiter ces Versions Dérivées ; d. distribuer des copies, présenter, représenter ou communiquer au public, par tout procédé technique, le Commun, les Ressources Collectives et les Versions Dérivées ; e. lorsque le Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée est une base de données, en extraire et en réutiliser des parties substantielles. Les droits mentionnés ci-dessus peuvent être exercés sur tous les supports, médias, procédés techniques et formats. Ils incluent le droit d'effectuer les modifications nécessaires techniquement à l'exercice des droits dans d'autres formats et procédés techniques. L'exercice de tous les droits qui ne sont pas expressément autorisés par le Concédant ou dont il n'aurait pas la gestion demeure réservé. 4. Restrictions. Les droits consentis par l'article 3 sont expressément assujettis et limités par le respect des restrictions suivantes : a. Le Licencié peut exploiter le Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée, y compris par voie numérique, uniquement selon les termes de la Licence. Le Licencié doit associer une copie ou l'adresse Internet (Identifiant Uniforme de Ressource) de la présente Licence à toute copie du Commun que le Licencié exploite y compris par voie numérique. Le Licencié ne peut pas offrir ou imposer de conditions d'utilisation du Commun, d’une Ressource Collective ou d’un Version Dérivée qui altèrent ou restreignent les termes de la présente Licence ou l'exercice des droits qui y sont accordés au bénéficiaire. Le Licencié doit conserver intactes toutes les informations qui renvoient à cette Licence et à l'exonération de responsabilité. Le Licencié ne peut pas exploiter le Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée, y compris par voie numérique, en utilisant une mesure technique de contrôle d'accès ou de contrôle d'utilisation qui serait contradictoire avec les termes de cette Licence. b. Le Licencié s’interdit de porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle des autres Contributeurs sur les Communs, les Ressources Collectives et/ou les Versions Dérivées d’un tiers. Plus généralement, le Licencié s’interdit de contrevenir aux droits de tiers ou à la réglementation applicable, sauf autorisation préalable et écrite des Contributeurs concernés. c. Si le Licencié exploite, y compris par voie numérique, un Commun, une Ressource Collective ou une Version Dérivée protégé ou protégeable par le droit d’auteur, il doit
  • 30. Page 30 sur 31 conserver intactes toutes les informations sur le régime des droits et en attribuer la paternité aux Contributeurs l’ayant réalisé et/ou amélioré, par tout moyen utile au regard au médium ou au moyen utilisé. Il doit communiquer :  le nom du ou des Contributeur(s),  le titre du Commun, de la Ressource Collective ou de la Version Dérivée, s'il est indiqué,  dans la mesure du possible, l'adresse Internet ou Identifiant Uniforme de Ressource (URI), s'il existe, spécifié par le Concédant comme associé au Commun, à la Ressource Collective ou la Version Dérivée. Dans le cas d'une Version Dérivée, il doit indiquer les éléments identifiant l'utilisation du Commun dans la Version Dérivée. Ces obligations d'attribution de paternité doivent être exécutées par tout moyen utile. Cependant, dans le cas d'une Version Dérivée ou d'une Ressource Collective, ces informations doivent, au minimum, apparaître à la place et de manière aussi visible que celles à laquelle apparaissent les informations de même nature. 5. Exploitation commerciale du Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une Version Dérivée Les droits consentis par l’article 3 incluent le droit de procéder à une exploitation commerciale du Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une Version Dérivée, aux conditions expresses suivantes : a. Le Licencié s’engage à réserver aux Contributeurs une part globale de [XX] % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au titre de l’exploitation commerciale du Commun, des Ressources Collectives et/ou des Versions Dérivées. b. La répartition de cette part entre les différents Contributeurs sera calculée selon la méthode mise en œuvre par La Fabrique des Mobilités, accessible sur son site internet lafabriquedesmobilites.fr. 6. Garantie sur les droits d’utilisation des Communs, Ressources Collectives et Version Dérivées En mettant le Commun, une Ressource Collective et/ou une Version Dérivée à la disposition du public selon les termes de cette Licence, le Concédant déclare de bonne foi qu'à sa connaissance : a. Le Concédant a obtenu tous les droits éventuellement attachés au Commun, à la Ressource Collective et/ou à la Version Dérivée, nécessaires pour pouvoir autoriser l'exercice des droits accordés par la présente Licence et permettre la jouissance paisible et l'exercice licite de ces droits, ceci sans que le Licencié n'ait aucune obligation de verser de rémunération ou tout autre paiement ou droits autre que la part visée à l’article 5 ci-dessus, dans la limite de la réglementation applicable ; b. Le Commun, la Ressource Collective et/ou la Version Dérivée ne sont constitutifs ni d'une violation des droits de tiers, notamment des droits de la propriété intellectuelle, du
  • 31. Page 31 sur 31 droit civil ou de tout autre droit, ni de diffamation, de violation de la vie privée ou de tout autre préjudice délictuel à l'égard de toute tierce partie. 7. Communs, Ressources Collectives et Version Dérivées en l’état A l'exception des situations expressément mentionnées dans la présente Licence, et sous réserve des dispositions de l’article 6, le Commun, la Ressource Collective et/ou la Version Dérivée sont mis à disposition en l'état, sans autre garantie d'aucune sorte, qu'elle soit expresse ou tacite, quant à leur utilisation. A l'exception des garanties d'ordre public imposées par la loi applicable, le Concédant ne sera en aucun cas tenu responsable vis-à-vis du Licencié d'aucun préjudice direct, indirect, matériel ou moral, résultant de l'utilisation du Commun, d’une Ressource Collective et/ou d’une Version Dérivée, dont le Licencié est seul responsable. 8. Résiliation Tout manquement aux termes de la Licence par le Licencié entraîne la résiliation automatique de la Licence et la fin des droits qui en découlent. Cependant, la Licence conserve ses effets envers les personnes physiques ou morales qui ont reçu de la part du Licencié, en exécution de la présente Licence, la mise à disposition du Commun, d’une Ressource Collective ou d’une Version Dérivée, ceci tant qu'elles respectent pleinement leurs obligations. 9. Divers a. La nullité ou l'inapplicabilité d'une quelconque disposition de cette Licence au regard de la loi applicable n'affecte pas celle des autres dispositions qui resteront pleinement valides et applicables. Sans action additionnelle par les parties à cet accord, lesdites dispositions devront être interprétées dans la mesure minimum nécessaire à leur validité et leur applicabilité. b. Aucune limite, renonciation ou modification des termes ou dispositions de la présente Licence ne pourra être acceptée sans le consentement écrit et signé de la partie compétente. c. Cette Licence constitue le seul accord entre les parties à propos du Commun mis ici à disposition, ainsi que des éventuelles Ressources Collectives et Versions Dérivées. Il n'existe aucun élément annexe, accord supplémentaire ou mandat portant sur ce Commun, ainsi que sur les éventuelles Ressources Collectives et Versions Dérivées, en dehors des éléments mentionnés ici. Le Concédant ne sera tenu par aucune disposition supplémentaire qui pourrait apparaître dans une quelconque communication en provenance du Licencié. Cette Licence ne peut être modifiée sans l'accord mutuel écrit du Concédant et du Licencié. d. Le droit applicable est le droit français. Tout litige pouvant naître à l'occasion de la validité, l’interprétation ou l’exécution de la présente Licence sera soumis à la compétence exclusive des tribunaux compétents de Paris.