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Le digital au service de la transparence alimentaire:
La technologie blockchain une solution de demain?
Thèse professionnelle de:
Karine Correia
INSTITUT LEONARD DE VINCI
12 Avenue Léonard de Vinci
92400 Courbevoie
Responsable E-business/Responsable E-marketing
Code NSF 312 - 326, certification professionnelle de niveau I (Fr) et de niveau 7 (Eu)
enregistrée au RNCP par arrêté du 7/07/2017 publié au JO le 19/07/2017.
Promotion 2016 - 2017
Date de remise : 19/12/2017
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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RÉSUMÉ
Au cours des deux dernières décennies, la confiance des consommateurs dans l'industrie
agroalimentaire a été fortement mise à mal par les scandales alimentaires répétés. De fait,
l'inquiétude sur la sécurité et la qualité de la nourriture n'a fait que croître. De plus en plus
souvent, ils veulent savoir quels ingrédients entrent dans la composition des produits
alimentaires et quelle est leur provenance, et ce dans une quête de meilleure santé, d'éthique
environnementale et sociétale. La chaine de valeur alimentaire, quant à elle, s'est fragmentée
et énormément complexifiée avec le temps, créant un système opaque dont l'information et la
transparence sont limitées. Elle se démène aujourd'hui avec la capture de données, le partage
et la coopération entre ses différents maillons. La circulation séquentielle de l'information entre
les parties prenantes entraîne des retards potentiels dans la prise de décision. Aussi, la
pression exercée par la réglementation, par les questions liées au gaspillage alimentaire et à
la croissance démographique mondiale a créé les conditions pour revoir de nouvelles
approches. La technologie blockchain, une innovation révolutionnaire dans la technologie de
l'information décentralisée, permet de reconnecter la chaîne d'approvisionnement comme
jamais auparavant. Elle constitue une base de données sécurisée et distribuée qui contient
l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Partagée
par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, elle permet à chacun de vérifier la validité
de la chaîne. Associée aux IoT, réseaux de capteurs RFID et sans fil, elle permet de fournir
une information globale sur les produits alimentaires et de réguler les inefficacités de la chaîne
ainsi que de créer de nouveaux modèles de valeur et d'affaires dans l'économie, notamment
les smart contract et les smart marketplace. Cependant, en tant que technologie émergente,
la blockchain rencontre des limites et des défis que l’adaptabilité et l’évolutivité, primordiales
et urgentes, permettront de surmonter.
Cette thèse propose d’étudier ce phénomène blockchain comme solution à la transparence
alimentaire mais aussi de présenter des propositions et des nouvelles valeurs. Elle développe
un cas applicatif afin de dégager de prime abord les avantages et les inconvénients de cette
solution. Une méthodologie est également proposée pour guider les entreprises qui
souhaiteraient initier cette transformation en choisissant un bon cas d’usage et en se posant
les bonnes questions dans son implémentation.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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SUMMARY
Over the past two decades, consumer confidence in the agri-food industry has been severely
damaged by repetitive food scandals. This trend has bolstered the concern over the safety and
quality of food. Increasingly, consumers want to know the composition of their food and the
origins of ingredients, this in a quest for better health, and attention to environmental and
societal ethics. The food value chain has become fragmented and enormously complex over
time, creating an opaque system with limited information and transparency. Today the industry
struggles with data capture, sharing and cooperation between its various processes. The
sequential flow of information between stakeholders often leads to delays in decision-making
and the increasing pressures of regulation, food waste, and a growing global population have,
together, fueled the need for creating and testing new approaches. Blockchain technology, a
revolutionary innovation in decentralized information technology, is helping to connect the
supply chain in ways previously impossible. It is a secured database, which distributes the
complete history of all exchanges between users. Information shared directly by each of the
users validates the legitimacy of the chain, since there is no interference from potentially biased
intermediaries. Combined with IoT, RFID and wireless sensor networks, blockchain provides
comprehensive information on food products and regulates inefficiencies in the chain. It also
creates new values and business models in the economy, including smart contracts and the
smart marketplace. However, as an emerging technology, blockchain has encountered critical
limitations and urgent challenges that its adaptability and scalability have helped it overcome.
This thesis proposes to study this blockchain phenomenon as a solution to food transparency
but also to present propositions and new values. It develops an application case in order to
first identify the advantages and disadvantages of this solution. A methodology is also
proposed to companies wishing to integrate this technology, guiding them to choose a fitting
application of blockchain and to ask the right questions in its implementation.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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INTRODUCTION
“Il ne suffit pas qu’un aliment soit bon à manger, encore faut-il qu’il soit bon à penser “Claude
Levi-Strauss, Le totémisme aujourd'hui (1962)
Cette phrase du célèbre anthropologue résume parfaitement la situation du consommateur-
mangeur des pays industrialisés, qui font face à des situations d’abondance voire de
surabondance. Il n'y a plus pour eux un problème de manque, mais un problème de choix. La
modernité alimentaire et sa complexité ont créé un contexte anxiogène et elles sèment
désormais le doute.
La mondialisation a incité les consommateurs à demander davantage de produits diversifiés,
ce qui s’est traduit par une chaîne alimentaire mondiale de plus en plus longue et complexe.
À mesure que la population mondiale s’accroît, l’agriculture et la production animale
s’intensifient et s’industrialisent pour satisfaire une demande alimentaire croissante et
suscitent à la fois des opportunités et des défis pour la sécurité sanitaire des aliments et leur
traçabilité. Ces défis alourdissent la responsabilité qui pèse sur les producteurs de denrées
alimentaires et les intermédiaires de la chaîne de distribution. Des incidents locaux peuvent
rapidement dégénérer en urgences internationales en conséquences de la vitesse et de l'aire
de distribution des produits. Au cours de la dernière décennie, tous les continents ont connu
de graves épidémies d’origine alimentaire, souvent amplifiées par un commerce mondialisé.
Il ressort d'un rapport de l'OMS que si les estimations prêtent à l'Europe la charge la plus faible
de maladies d’origine alimentaire, on y enregistre tout de même chaque année cinq mille cas
mortels (parmi vingt-trois millions de cas) sur les quatre cents mille dans le monde.
La confiance des consommateurs s'est ainsi grandement dégradée dans la dernière décennie,
et le contenu de notre assiette en est une cause majeure. Crises sanitaires, opacité sur les
traitements et sur la provenances des aliments, médiatisation dramatiques des scandales
alimentaires, compétitivité de plus en plus rudes sur les prix de plus – souvent au détriment
de la qualité: le cocktail est idéal pour une prise de conscience sans précédent.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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Que mangeons-nous réellement? C’est bien une question que nous nous sommes tous déjà
posée. En France, malgré une réglementation sur les contrôles sanitaires plus exigeante que
chez la majorité de ses voisins européens, le doute ne disparaît pas et le phénomène «
consommation consciente » – manger sain pour un corps sain, mais aussi le souci de l'éthique
environnementale, du travail, du bien-être animal... – est bel et bien d'actualité. Le
consommateur ne demande qu’à être informé et à retrouver confiance dans ce qu'il ingère.
Ce phénomène a provoqué la volonté de vouloir tracer les modes de production des produits
que l'on achète. La demande de clarté quant à l’origine, mais aussi quant au parcours de
transformation des aliments est particulièrement forte pour les produits d’origine animale
(comme les œufs et surtout la viande). Cette quête de transparence est d’autant plus
importante que les consommateurs attendent des informations sur la composition et la qualité
des produits alimentaires en privilégiant fortement ceux d’origine française, et donc les circuits
de distribution courts ou même les circuits de distribution de proximité.
L’industrie alimentaire française est au second rang européen derrière l’Allemagne.
Cependant, selon le rapport de l'ANIA (Association Nationale des Industries Alimentaires), elle
perd progressivement du terrain face à la concurrence européenne, et au-delà. Entre 2007 et
2016, sa valeur ajoutée a chuté de 14.5%. De leur côté, l’Allemagne (+0.7%), le Royaume-Uni
(+11.1%), l’Italie (+20.6%) et l’Espagne (+22%) ont augmenté la leur. Pour que la première
industrie de France puisse retrouver ses marges et sa place sur la scène internationale, l’ANIA
demande aux gouvernants du pays de s’engager aux côtés des 17 647 entreprises
agroalimentaires afin de:
- Recréer de la valeur dans la filière alimentaire en assurant des relations apaisées entre
les acteurs
- Recréer de la confiance avec les entreprises agroalimentaires
Attaché à restaurer la confiance des consommateurs dans l’alimentaire, Jean-Philippe Girard,
Président de l’ANIA en 2013, plaide: « La grande ambition de l’industrie alimentaire française
est de redonner de la valeur à l’alimentation. Cette ambition collective nécessite la contribution
de chaque acteur ».
La transparence devient incontournable afin de répondre à ces défis. De grandes enseignes
l’ont intégrée dans leur marketing et dans leur communication, au moyen de journées « portes
ouvertes », d'opérations de "green washing", ainsi qu'au travers d'un élargissement de leur
offre alimentaire vers les domaines du terroir, du bio, du local. Mais ce n'est plus suffisant.
Aujourd'hui, elles doivent afficher au consommateur les preuves de leurs actions.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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La blockchain, une technologie disruptive, rendue célèbre par son application ‘bitcoin’, porte
en elle de grandes promesses. C'est une sorte de registre virtuel géant distribué, infalsifiable
et transparent. Elle permet à des personnes ou des entités qui ne se connaissent pas ou peu,
potentiellement sans lien de confiance établi, de réaliser des transactions qui seront
sécurisées dans un réseau informatique de confiance, distribué entre les partenaires et les
autorités, et constamment contrôlé par de puissants algorithmes. Sans passer par une entité
de contrôle ou un accès central, il est possible de consulter en continu le cheminement complet
de toutes les transactions réalisées. Ses usages sont soit les transferts d'actifs, soit le registre
(utile pour la traçabilité et la certification) et également l’application des smart contracts (codes
informatiques hébergés dans la blockchain définissant et éxécutant automatiquement les
termes d’un accord entre les parties).
Son champ d'application couvre la banque, l'assurance, l'énergie, l’éducation et beaucoup
d’autres; elle répond aussi à de gros enjeux dans la transparence et la traçabilité du secteur
agroalimentaire.
Cependant, l'application de la technologie blockchain à l'agroalimentaire n'en est encore qu'à
ses prémisses, comme dans bien d'autres domaines. Certaines entreprises ont lançé les
premiers projets pilotes en fin 2016 comme Walmart en partenariat avec IBM, mais très peu
sont déjà passées au stade du MVP1
. Bien que satisfaisante dans ses premiers résultats, la
technologie présente d'importantes limites organisationnelles, juridiques et techniques. Mais
comment avancer sur la voie de ce bouleversement technologique sans l'avoir expérimentée
à petite échelle? Nous arrivons au cœur du sujet: "le digital au service de la transparence
alimentaire, la blockchain: une solution de demain?".
Dans cette thèse, nous donnerons dans une première partie la définition de la blockchain, son
potentiel et ses enjeux, et nous dresserons un état des lieux de la transparence alimentaire en
l'illustrant par une étude de l'impact des scandales alimentaires sur tous les maillons de la
chaîne agroalimentaire. En deuxième partie, nous aborderons le potentiel de cette technologie
dans la traçabilité des denrées agroalimentaires, ainsi que le rôle et la valeur ajoutée que
pourront jouer l’Internet des Objets (IOT,) dans la fiabilisation de la donnée et aussi les smart
contracts dans la contractualisation au sein de la filière et la communication sur le produit.
Ensuite seront décryptées les enjeux de la blockchain pour chaque participant de la chaine
agroalimentaire, ses propositions de valeur et aussi ses défis.
1
MVP (de l’anglais : Minimum Viable Product) – Produit minimum viable - est une stratégie de développement
de produit, utilisée pour tester rapidement la viabilité d'un produit sur le marché.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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Un tour du marché des sociétés présentes dans le domaine et de l'engouement actuel qui voit
éclore de nombreuses startups est également exposé. Finalement, afin d'appuyer le potentiel
de cette technologie créatrice de transparence, nous détaillerons un cas applicatif sur la
sécurité sanitaire tout au long de la chaine alimentaire. L'objectif sera de former une réflexion
sur l’intérêt de la blockchain et sa faisabilité en proposant une méthodologie d'implémentation
de proofs of concept, sans lesquels il est impossible de mesurer le potentiel et les limites de
cette technologie si prometteuse.
Pour réaliser ce travail, il a été nécessaire de confronter les analyses techniques et les
analyses métiers, encore très dissociées à ce jour, en s’appuyant sur des témoignages, des
échanges avec des acteurs comme IBM, des lectures, des discussions à l'occasion de salons,
du BizHackathon blockchain sur Paris en juin 2017, des réunions avec la startup Connecting
Food, et une expérience professionnelle dans le domaine agroalimentaire, tout en gardant
une vision « user centric » non seulement autour du consommateur, mais aussi autour des
différents maillons de la chaîne agroalimentaire.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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RECOMMANDATIONS
SYNTHETISEES
La technologie blockchain est d’ores et déjà une solution au service de la transparence
alimentaire mais elle n’en est qu’à ses prémisses. Constituant une base de données partagée
et sécurisée, elle a pour but de redonner confiance et de récréer de la valeur au sein de la
chaîne d’approvisionnement alimentaire. Ce n’est que récemment, en conséquence des
nombreux scandales alimentaires et donc une demande croissante de transparence de la part
des consommateurs, que des initiatives pour des cas d’usage se sont mis en place. Ces cas
se multiplient à grande vitesse, encourageant les plus frileux à agir et se lancer dans
l’expérimentation.
Dans cette démarche expérimentale, il faut avant tout :
1/ Comprendre la blockchain, et son concept complètement disruptif, afin de percevoir
clairement son potentiel, ses applications et sa plus-value.
2/ Identifier les problèmes liés à l’opacité pouvant générer un manque de confiance vis-à-
vis du produit et des conditions de son traitement.
Confrontés à la technologie qui pourrait les résoudre, plusieurs questions se posent sur la
pertinence de son application dont notamment : Comment l’intégrer ? Quel consensus ? Quel
rôle désormais des organismes de contrôle ? Quelles informations insérer ? Quelle mise en
place ? Quels intérêts et quelles motivations de chaque entité participante ?
3/ Démarrer des POC2
(Proof of concept), des démonstrations de faisabilité, du fait de
l’immaturité de cette technologie prometteuse ; cela permet d’intégrer cette technologie dans
la vie réelle et d’évaluer son réel intérêt et sa viabilité, sans quoi il ne sera possible d’avancer.
4/ Retenir que cette technologie s’avère plus pertinente dans le cas de certaines typologies
de produits, notamment les plus sensibles, si possible avec un circuit de traçabilité simple
et court - par exemple, les viandes bovines et porcines non transformées, la volaille, les œufs,
certains laitages.
2
POC (de l’anglais : proof of concept) – ou preuve de concept – est une réalisation expérimentale concrète et
préliminaire, courte ou incomplète, illustrant une certaine méthode ou idée afin d’en démontrer la faisabilité
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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5/ Appliquer, dans le choix des cas d’usage, des méthodes comme le Canvas Blockchain ou
le design thinking d’IBM ; cela permet une réelle collaboration des équipes techniques et
métiers amenant à une immersion et à un choix plus assertif pour les expérimentations.
6/ Développer le(s) POC en mode agile, c’est-à-dire dans le modèle « test-and-learn ». Cette
approche permet d’itérer en permanence, de confirmer la valeur et d’identifier de nouvelles
opportunités et en cas d'échec, d’être capable de modifier le projet initial.
7/ Constituer une équipe de collaborateurs techniques et métiers. L'approche repose
sur une architecture de confiance et sur les compétences nécessaires pour implémenter la
technologie mais aussi les ressources métiers qui identifieront les besoins réels et dans quelle
mesure l’adaptabilité doit et peut se faire.
Dans l’applicatif, il est important d’accorder une attention particulière sur l’intérêt de l’IoT3
.
Constitué entre autres par les capteurs et les appareils connectés, il joue un rôle primordial
associé à la blockchain dans la traçabilité car elle permet non seulement d’assurer la véracité
de l’information qui y est inscrite mais aussi de récolter des données quasiment en temps réel
et d’enregistrer les empreintes relatives à un produit de façon permanente. Il y a une valeur à
exploiter dans le partage de cette information notamment via les smartcontrats qui exécutent
automatique les clauses des contrats entre les parties ce qui permet un gain de temps,
d’argent, une garantie de l’opération mais également d’automatiser les commandes et d’éviter
les stocks dormants. Ils amènent ainsi à une collaboration entre acteurs qui ne se font pas
confiance à priori.
Aussi, en mettant les données à disposition de l’écosystème associé, dans le respect de la
protection des données sensibles et en définissant qui y a accès, cela peut créer également
des opportunités de marché notamment sur des smart marketplaces. L'acquisition de ces
données supplémentaires et accessibles permettent de vérifier et de commercialiser des
caractéristiques non valorisées jusque-là.
Les participants à la chaîne de valeur pourront voir leur valeur différenciante reconnue, comme
notamment les démarches étiques et environnementales appréciées par un bon nombre de
consommateurs. Et l’apparition de nouveaux modèles, grâce à la transparence permettront de
revoir les usages, les équipements et les termes des contrats.
3
IoT (de l’anglais: internet of things) – ou Internet des objets - regroupe les objets et équipements connectés (à
Internet) et les technologies (en grande partie réseaux et logicielles) qui s'y rapportent, et par extension
l’universalité de tout ce qui peut être connecté via le réseau Internet pour recevoir et/ou émettre des données.
© Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017
“Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?”
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Certaines missions sont amenées à évoluer et plusieurs pistes existent. Par exemple,
l’organisme central de contrôle existerait toujours mais jouerait un nouveau rôle. Cette
technologie permettra justement de fluidifier et simplifier les audits que ce soit du côté audité
et auditeur étant donné que toutes les informations sont infalsifiables et consultables à tout
moment.
Certes, il y a des challenges techniques et opérationnels comme la scalabilité,
l’interopérabilité des blockchains, la mise en place d’équipe, la rémunération des participants,
mais aussi des freins juridiques tels que la gouvernance, la responsabilité de la régulation qui
écrit le protocole entre autres. Toutefois, afin d’avancer et pour les maîtriser, il est approprié
de :
Ne pas se limiter à son périmètre et collaborer, principe même de la blockchain, qui est
donc nécessaire pour avancer. Participer à un consortium avec les coopétiteurs (comme l’ont
fait certaines banques et assurances avec le labchain) est essentiel notamment pour les cas
d'usage qui font appel à la diversité et à l'évolutivité de l'écosystème blockchain. Un consensus
peut être établi par un protocole commun aux parties intégrantes de la chaîne. Aussi, plus le
nombre de partenaire est grand, plus il y aura de valeur, ce qui permettra de dynamiser le ROI.
Sans oublier que, l'interopérabilité peut permettre de personnaliser et d'améliorer les solutions
blockchain en affinant les paramètres techniques, de régulation et organisationnels.
Participer à des évènements sur le sujet, organiser des hackathon sur des thématiques ou
se lier à un écosystème de startups innovantes sur le sujet sont des pistes à envisager pour
se maintenir informé et créer de nouvelles opportunités.

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Blockchain au service de la transparence alimentaire (extrait) - Blockchain for food transparency

  • 1. Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain? Thèse professionnelle de: Karine Correia INSTITUT LEONARD DE VINCI 12 Avenue Léonard de Vinci 92400 Courbevoie Responsable E-business/Responsable E-marketing Code NSF 312 - 326, certification professionnelle de niveau I (Fr) et de niveau 7 (Eu) enregistrée au RNCP par arrêté du 7/07/2017 publié au JO le 19/07/2017. Promotion 2016 - 2017 Date de remise : 19/12/2017
  • 2. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 2 RÉSUMÉ Au cours des deux dernières décennies, la confiance des consommateurs dans l'industrie agroalimentaire a été fortement mise à mal par les scandales alimentaires répétés. De fait, l'inquiétude sur la sécurité et la qualité de la nourriture n'a fait que croître. De plus en plus souvent, ils veulent savoir quels ingrédients entrent dans la composition des produits alimentaires et quelle est leur provenance, et ce dans une quête de meilleure santé, d'éthique environnementale et sociétale. La chaine de valeur alimentaire, quant à elle, s'est fragmentée et énormément complexifiée avec le temps, créant un système opaque dont l'information et la transparence sont limitées. Elle se démène aujourd'hui avec la capture de données, le partage et la coopération entre ses différents maillons. La circulation séquentielle de l'information entre les parties prenantes entraîne des retards potentiels dans la prise de décision. Aussi, la pression exercée par la réglementation, par les questions liées au gaspillage alimentaire et à la croissance démographique mondiale a créé les conditions pour revoir de nouvelles approches. La technologie blockchain, une innovation révolutionnaire dans la technologie de l'information décentralisée, permet de reconnecter la chaîne d'approvisionnement comme jamais auparavant. Elle constitue une base de données sécurisée et distribuée qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, elle permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne. Associée aux IoT, réseaux de capteurs RFID et sans fil, elle permet de fournir une information globale sur les produits alimentaires et de réguler les inefficacités de la chaîne ainsi que de créer de nouveaux modèles de valeur et d'affaires dans l'économie, notamment les smart contract et les smart marketplace. Cependant, en tant que technologie émergente, la blockchain rencontre des limites et des défis que l’adaptabilité et l’évolutivité, primordiales et urgentes, permettront de surmonter. Cette thèse propose d’étudier ce phénomène blockchain comme solution à la transparence alimentaire mais aussi de présenter des propositions et des nouvelles valeurs. Elle développe un cas applicatif afin de dégager de prime abord les avantages et les inconvénients de cette solution. Une méthodologie est également proposée pour guider les entreprises qui souhaiteraient initier cette transformation en choisissant un bon cas d’usage et en se posant les bonnes questions dans son implémentation.
  • 3. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 3 SUMMARY Over the past two decades, consumer confidence in the agri-food industry has been severely damaged by repetitive food scandals. This trend has bolstered the concern over the safety and quality of food. Increasingly, consumers want to know the composition of their food and the origins of ingredients, this in a quest for better health, and attention to environmental and societal ethics. The food value chain has become fragmented and enormously complex over time, creating an opaque system with limited information and transparency. Today the industry struggles with data capture, sharing and cooperation between its various processes. The sequential flow of information between stakeholders often leads to delays in decision-making and the increasing pressures of regulation, food waste, and a growing global population have, together, fueled the need for creating and testing new approaches. Blockchain technology, a revolutionary innovation in decentralized information technology, is helping to connect the supply chain in ways previously impossible. It is a secured database, which distributes the complete history of all exchanges between users. Information shared directly by each of the users validates the legitimacy of the chain, since there is no interference from potentially biased intermediaries. Combined with IoT, RFID and wireless sensor networks, blockchain provides comprehensive information on food products and regulates inefficiencies in the chain. It also creates new values and business models in the economy, including smart contracts and the smart marketplace. However, as an emerging technology, blockchain has encountered critical limitations and urgent challenges that its adaptability and scalability have helped it overcome. This thesis proposes to study this blockchain phenomenon as a solution to food transparency but also to present propositions and new values. It develops an application case in order to first identify the advantages and disadvantages of this solution. A methodology is also proposed to companies wishing to integrate this technology, guiding them to choose a fitting application of blockchain and to ask the right questions in its implementation.
  • 4. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 4 INTRODUCTION “Il ne suffit pas qu’un aliment soit bon à manger, encore faut-il qu’il soit bon à penser “Claude Levi-Strauss, Le totémisme aujourd'hui (1962) Cette phrase du célèbre anthropologue résume parfaitement la situation du consommateur- mangeur des pays industrialisés, qui font face à des situations d’abondance voire de surabondance. Il n'y a plus pour eux un problème de manque, mais un problème de choix. La modernité alimentaire et sa complexité ont créé un contexte anxiogène et elles sèment désormais le doute. La mondialisation a incité les consommateurs à demander davantage de produits diversifiés, ce qui s’est traduit par une chaîne alimentaire mondiale de plus en plus longue et complexe. À mesure que la population mondiale s’accroît, l’agriculture et la production animale s’intensifient et s’industrialisent pour satisfaire une demande alimentaire croissante et suscitent à la fois des opportunités et des défis pour la sécurité sanitaire des aliments et leur traçabilité. Ces défis alourdissent la responsabilité qui pèse sur les producteurs de denrées alimentaires et les intermédiaires de la chaîne de distribution. Des incidents locaux peuvent rapidement dégénérer en urgences internationales en conséquences de la vitesse et de l'aire de distribution des produits. Au cours de la dernière décennie, tous les continents ont connu de graves épidémies d’origine alimentaire, souvent amplifiées par un commerce mondialisé. Il ressort d'un rapport de l'OMS que si les estimations prêtent à l'Europe la charge la plus faible de maladies d’origine alimentaire, on y enregistre tout de même chaque année cinq mille cas mortels (parmi vingt-trois millions de cas) sur les quatre cents mille dans le monde. La confiance des consommateurs s'est ainsi grandement dégradée dans la dernière décennie, et le contenu de notre assiette en est une cause majeure. Crises sanitaires, opacité sur les traitements et sur la provenances des aliments, médiatisation dramatiques des scandales alimentaires, compétitivité de plus en plus rudes sur les prix de plus – souvent au détriment de la qualité: le cocktail est idéal pour une prise de conscience sans précédent.
  • 5. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 5 Que mangeons-nous réellement? C’est bien une question que nous nous sommes tous déjà posée. En France, malgré une réglementation sur les contrôles sanitaires plus exigeante que chez la majorité de ses voisins européens, le doute ne disparaît pas et le phénomène « consommation consciente » – manger sain pour un corps sain, mais aussi le souci de l'éthique environnementale, du travail, du bien-être animal... – est bel et bien d'actualité. Le consommateur ne demande qu’à être informé et à retrouver confiance dans ce qu'il ingère. Ce phénomène a provoqué la volonté de vouloir tracer les modes de production des produits que l'on achète. La demande de clarté quant à l’origine, mais aussi quant au parcours de transformation des aliments est particulièrement forte pour les produits d’origine animale (comme les œufs et surtout la viande). Cette quête de transparence est d’autant plus importante que les consommateurs attendent des informations sur la composition et la qualité des produits alimentaires en privilégiant fortement ceux d’origine française, et donc les circuits de distribution courts ou même les circuits de distribution de proximité. L’industrie alimentaire française est au second rang européen derrière l’Allemagne. Cependant, selon le rapport de l'ANIA (Association Nationale des Industries Alimentaires), elle perd progressivement du terrain face à la concurrence européenne, et au-delà. Entre 2007 et 2016, sa valeur ajoutée a chuté de 14.5%. De leur côté, l’Allemagne (+0.7%), le Royaume-Uni (+11.1%), l’Italie (+20.6%) et l’Espagne (+22%) ont augmenté la leur. Pour que la première industrie de France puisse retrouver ses marges et sa place sur la scène internationale, l’ANIA demande aux gouvernants du pays de s’engager aux côtés des 17 647 entreprises agroalimentaires afin de: - Recréer de la valeur dans la filière alimentaire en assurant des relations apaisées entre les acteurs - Recréer de la confiance avec les entreprises agroalimentaires Attaché à restaurer la confiance des consommateurs dans l’alimentaire, Jean-Philippe Girard, Président de l’ANIA en 2013, plaide: « La grande ambition de l’industrie alimentaire française est de redonner de la valeur à l’alimentation. Cette ambition collective nécessite la contribution de chaque acteur ». La transparence devient incontournable afin de répondre à ces défis. De grandes enseignes l’ont intégrée dans leur marketing et dans leur communication, au moyen de journées « portes ouvertes », d'opérations de "green washing", ainsi qu'au travers d'un élargissement de leur offre alimentaire vers les domaines du terroir, du bio, du local. Mais ce n'est plus suffisant. Aujourd'hui, elles doivent afficher au consommateur les preuves de leurs actions.
  • 6. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 6 La blockchain, une technologie disruptive, rendue célèbre par son application ‘bitcoin’, porte en elle de grandes promesses. C'est une sorte de registre virtuel géant distribué, infalsifiable et transparent. Elle permet à des personnes ou des entités qui ne se connaissent pas ou peu, potentiellement sans lien de confiance établi, de réaliser des transactions qui seront sécurisées dans un réseau informatique de confiance, distribué entre les partenaires et les autorités, et constamment contrôlé par de puissants algorithmes. Sans passer par une entité de contrôle ou un accès central, il est possible de consulter en continu le cheminement complet de toutes les transactions réalisées. Ses usages sont soit les transferts d'actifs, soit le registre (utile pour la traçabilité et la certification) et également l’application des smart contracts (codes informatiques hébergés dans la blockchain définissant et éxécutant automatiquement les termes d’un accord entre les parties). Son champ d'application couvre la banque, l'assurance, l'énergie, l’éducation et beaucoup d’autres; elle répond aussi à de gros enjeux dans la transparence et la traçabilité du secteur agroalimentaire. Cependant, l'application de la technologie blockchain à l'agroalimentaire n'en est encore qu'à ses prémisses, comme dans bien d'autres domaines. Certaines entreprises ont lançé les premiers projets pilotes en fin 2016 comme Walmart en partenariat avec IBM, mais très peu sont déjà passées au stade du MVP1 . Bien que satisfaisante dans ses premiers résultats, la technologie présente d'importantes limites organisationnelles, juridiques et techniques. Mais comment avancer sur la voie de ce bouleversement technologique sans l'avoir expérimentée à petite échelle? Nous arrivons au cœur du sujet: "le digital au service de la transparence alimentaire, la blockchain: une solution de demain?". Dans cette thèse, nous donnerons dans une première partie la définition de la blockchain, son potentiel et ses enjeux, et nous dresserons un état des lieux de la transparence alimentaire en l'illustrant par une étude de l'impact des scandales alimentaires sur tous les maillons de la chaîne agroalimentaire. En deuxième partie, nous aborderons le potentiel de cette technologie dans la traçabilité des denrées agroalimentaires, ainsi que le rôle et la valeur ajoutée que pourront jouer l’Internet des Objets (IOT,) dans la fiabilisation de la donnée et aussi les smart contracts dans la contractualisation au sein de la filière et la communication sur le produit. Ensuite seront décryptées les enjeux de la blockchain pour chaque participant de la chaine agroalimentaire, ses propositions de valeur et aussi ses défis. 1 MVP (de l’anglais : Minimum Viable Product) – Produit minimum viable - est une stratégie de développement de produit, utilisée pour tester rapidement la viabilité d'un produit sur le marché.
  • 7. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 7 Un tour du marché des sociétés présentes dans le domaine et de l'engouement actuel qui voit éclore de nombreuses startups est également exposé. Finalement, afin d'appuyer le potentiel de cette technologie créatrice de transparence, nous détaillerons un cas applicatif sur la sécurité sanitaire tout au long de la chaine alimentaire. L'objectif sera de former une réflexion sur l’intérêt de la blockchain et sa faisabilité en proposant une méthodologie d'implémentation de proofs of concept, sans lesquels il est impossible de mesurer le potentiel et les limites de cette technologie si prometteuse. Pour réaliser ce travail, il a été nécessaire de confronter les analyses techniques et les analyses métiers, encore très dissociées à ce jour, en s’appuyant sur des témoignages, des échanges avec des acteurs comme IBM, des lectures, des discussions à l'occasion de salons, du BizHackathon blockchain sur Paris en juin 2017, des réunions avec la startup Connecting Food, et une expérience professionnelle dans le domaine agroalimentaire, tout en gardant une vision « user centric » non seulement autour du consommateur, mais aussi autour des différents maillons de la chaîne agroalimentaire.
  • 8. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 8 RECOMMANDATIONS SYNTHETISEES La technologie blockchain est d’ores et déjà une solution au service de la transparence alimentaire mais elle n’en est qu’à ses prémisses. Constituant une base de données partagée et sécurisée, elle a pour but de redonner confiance et de récréer de la valeur au sein de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Ce n’est que récemment, en conséquence des nombreux scandales alimentaires et donc une demande croissante de transparence de la part des consommateurs, que des initiatives pour des cas d’usage se sont mis en place. Ces cas se multiplient à grande vitesse, encourageant les plus frileux à agir et se lancer dans l’expérimentation. Dans cette démarche expérimentale, il faut avant tout : 1/ Comprendre la blockchain, et son concept complètement disruptif, afin de percevoir clairement son potentiel, ses applications et sa plus-value. 2/ Identifier les problèmes liés à l’opacité pouvant générer un manque de confiance vis-à- vis du produit et des conditions de son traitement. Confrontés à la technologie qui pourrait les résoudre, plusieurs questions se posent sur la pertinence de son application dont notamment : Comment l’intégrer ? Quel consensus ? Quel rôle désormais des organismes de contrôle ? Quelles informations insérer ? Quelle mise en place ? Quels intérêts et quelles motivations de chaque entité participante ? 3/ Démarrer des POC2 (Proof of concept), des démonstrations de faisabilité, du fait de l’immaturité de cette technologie prometteuse ; cela permet d’intégrer cette technologie dans la vie réelle et d’évaluer son réel intérêt et sa viabilité, sans quoi il ne sera possible d’avancer. 4/ Retenir que cette technologie s’avère plus pertinente dans le cas de certaines typologies de produits, notamment les plus sensibles, si possible avec un circuit de traçabilité simple et court - par exemple, les viandes bovines et porcines non transformées, la volaille, les œufs, certains laitages. 2 POC (de l’anglais : proof of concept) – ou preuve de concept – est une réalisation expérimentale concrète et préliminaire, courte ou incomplète, illustrant une certaine méthode ou idée afin d’en démontrer la faisabilité
  • 9. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 9 5/ Appliquer, dans le choix des cas d’usage, des méthodes comme le Canvas Blockchain ou le design thinking d’IBM ; cela permet une réelle collaboration des équipes techniques et métiers amenant à une immersion et à un choix plus assertif pour les expérimentations. 6/ Développer le(s) POC en mode agile, c’est-à-dire dans le modèle « test-and-learn ». Cette approche permet d’itérer en permanence, de confirmer la valeur et d’identifier de nouvelles opportunités et en cas d'échec, d’être capable de modifier le projet initial. 7/ Constituer une équipe de collaborateurs techniques et métiers. L'approche repose sur une architecture de confiance et sur les compétences nécessaires pour implémenter la technologie mais aussi les ressources métiers qui identifieront les besoins réels et dans quelle mesure l’adaptabilité doit et peut se faire. Dans l’applicatif, il est important d’accorder une attention particulière sur l’intérêt de l’IoT3 . Constitué entre autres par les capteurs et les appareils connectés, il joue un rôle primordial associé à la blockchain dans la traçabilité car elle permet non seulement d’assurer la véracité de l’information qui y est inscrite mais aussi de récolter des données quasiment en temps réel et d’enregistrer les empreintes relatives à un produit de façon permanente. Il y a une valeur à exploiter dans le partage de cette information notamment via les smartcontrats qui exécutent automatique les clauses des contrats entre les parties ce qui permet un gain de temps, d’argent, une garantie de l’opération mais également d’automatiser les commandes et d’éviter les stocks dormants. Ils amènent ainsi à une collaboration entre acteurs qui ne se font pas confiance à priori. Aussi, en mettant les données à disposition de l’écosystème associé, dans le respect de la protection des données sensibles et en définissant qui y a accès, cela peut créer également des opportunités de marché notamment sur des smart marketplaces. L'acquisition de ces données supplémentaires et accessibles permettent de vérifier et de commercialiser des caractéristiques non valorisées jusque-là. Les participants à la chaîne de valeur pourront voir leur valeur différenciante reconnue, comme notamment les démarches étiques et environnementales appréciées par un bon nombre de consommateurs. Et l’apparition de nouveaux modèles, grâce à la transparence permettront de revoir les usages, les équipements et les termes des contrats. 3 IoT (de l’anglais: internet of things) – ou Internet des objets - regroupe les objets et équipements connectés (à Internet) et les technologies (en grande partie réseaux et logicielles) qui s'y rapportent, et par extension l’universalité de tout ce qui peut être connecté via le réseau Internet pour recevoir et/ou émettre des données.
  • 10. © Karine Correia Thèse professionnelle MBA Spécialisé Marketing et Commerce sur Internet – 2017 “Le digital au service de la transparence alimentaire: La technologie blockchain une solution de demain?” Page | 10 Certaines missions sont amenées à évoluer et plusieurs pistes existent. Par exemple, l’organisme central de contrôle existerait toujours mais jouerait un nouveau rôle. Cette technologie permettra justement de fluidifier et simplifier les audits que ce soit du côté audité et auditeur étant donné que toutes les informations sont infalsifiables et consultables à tout moment. Certes, il y a des challenges techniques et opérationnels comme la scalabilité, l’interopérabilité des blockchains, la mise en place d’équipe, la rémunération des participants, mais aussi des freins juridiques tels que la gouvernance, la responsabilité de la régulation qui écrit le protocole entre autres. Toutefois, afin d’avancer et pour les maîtriser, il est approprié de : Ne pas se limiter à son périmètre et collaborer, principe même de la blockchain, qui est donc nécessaire pour avancer. Participer à un consortium avec les coopétiteurs (comme l’ont fait certaines banques et assurances avec le labchain) est essentiel notamment pour les cas d'usage qui font appel à la diversité et à l'évolutivité de l'écosystème blockchain. Un consensus peut être établi par un protocole commun aux parties intégrantes de la chaîne. Aussi, plus le nombre de partenaire est grand, plus il y aura de valeur, ce qui permettra de dynamiser le ROI. Sans oublier que, l'interopérabilité peut permettre de personnaliser et d'améliorer les solutions blockchain en affinant les paramètres techniques, de régulation et organisationnels. Participer à des évènements sur le sujet, organiser des hackathon sur des thématiques ou se lier à un écosystème de startups innovantes sur le sujet sont des pistes à envisager pour se maintenir informé et créer de nouvelles opportunités.