1. VIII Le Parisien
VIII MARDI 22 SEPTEMBRE 2020
60SPORTSIDF 60
PARSANDRINELEFÈVRE,ROMAIN
BAHEUXETJULIENLESAGE
AU FOOTBALL
«Onestàlamoitié
desinscriptions
parrapportàlamême
époquel’andernier»
Depuis la tribune, le président
du club rappelle gentiment à
l’ordre un groupe de jeunes
enfants qui se dirige vers la
sortiedustade.«Ilfautpasser
de l’autre côté du terrain
maintenant pour sortir », leur
lance Antonio de Almeida, le
dirigeant. Ce mercredi de
septembre, après des longs
mois de frustration, c’est jour
de reprise des entraînements
pour les licenciés du RC Ar-
pajonnais, club de foot qui re-
groupe quatre villes du sud
Essonne.Etmalgrélasignalé-
tique,avecdesflèchespeintes
sur la piste d’athlétisme, dès
l’entrée du stade Louis-Babin
à La Norville, les habitudes
sonttenaces.
« On aura besoin d’un cer-
tain temps pour prendre nos
marques et faire respecter le
protocole sanitaire », poursuit
de Almeida. « Avant, on de-
mandait aux enfants d’aider à
ranger le matériel, on hésite
maintenant, même si cela
donne plus de travail aux
éducateurs»,indiqueThomas
Lacoste,responsabledel’éco-
ledefoot.Leclubaégalement
fait condamner les deux
autres accès du stade pour li-
miter et surveiller les allers-
retours. Les entraîneurs, eux,
doivent lister les joueurs pré-
sents—ainsiquelesparents—
afin de la communiquer à
l’agence régionale de santé
(ARS)encasdebesoin.
Arriverdéjàentenue
Certaines pratiques semblent
déjàbienancréesdanslequo-
tidien.Lelongdelamaincou-
rante, les parents portent un
masque malgré la chaleur.
Même obligation pour les
éducateursetentraîneurs.Les
jeunes de plus de 11 ans doi-
ventaussirespecterleportdu
masque jusqu’à leur entrée
sur la pelouse. Parmi les nou-
velles habitudes, il convient
désormais de venir en tenue
aux entraînements. Afin de
faciliter le nettoyage et la dé-
sinfection des vestiaires, leur
accès n’est autorisé que pour
les matchs des seniors, le di-
manche.
«Cesontlesmairesquidé-
cident pour les vestiai-
res. Nous, on a le droit, mais il
est fortement recommandé
de se doucher chez soi, expli-
que Antonio de Almeida,
65ansdontcinqdécenniesau
club.Ilfautlimiterletempsde
présence des joueurs et leur
nombre. Pour le moment, on
préfèrelaisserleséquipesde-
hors. Mais comment fera-t-
onquandilpleuvra?»
Cen’estpaslaseuleincerti-
tude qui plane. La saison der-
nière, le club comptait 594 li-
cenciés,ilenespère450.«On
estàlamoitiédesinscriptions
par rapport à la même épo-
quel’andernier,maisonrefu-
se de paniquer. Certains pa-
rentsvontattendrel’évolution
de la situation sanitaire avant
d’adhérer, pense le dirigeant.
Je sens une vraie volonté des
parents à voir leurs enfants
reprendre une activité sporti-
ve. Je n’ai d’ailleurs eu qu’une
seule demande de rembour-
sement. On a quand même
fait un geste commercial en
mettant la licence à 180 € au
lieu de 200 € pour les renou-
vellements.»
Av e c u n b u d g e t d e
150 000 €, le club essonnien,
qui n’a pas pu organiser les
rémunérateurs tournois de
fin de saison et risque de voir
sa buvette tourner à vide, ne
peut se permettre un geste
plus généreux. D’autant plus
que l’achat des masques, du
gel hydroalcoolique, des pro-
duits désinfectants pour les
ballons et le matériel et de
toute la signalétique n’est pas
sans impact sur les finances.
« On a le soutien des collecti-
vités, mais on attend encore
ungestedelaLiguedePariset
COVID-19
Lecasse-tête
desactivités
sportives
Aprèsdelongsmoisdesevrage,l’heuredelarentrée
asonnédanslesclubsdesport.Unerepriseparticulièreoù
ilconvientsurtoutdes’adapterauprotocolesanitaire.
La Norville
(Essonne),
le 9 septembre.
Les éducateurs
sont obligés
de porter un
masque. Pas les
enfants lorsqu’ils
foulent la pelouse.
du district de l’Essonne, souf-
fle le dirigeant. Mais il faut
qu’on s’adapte, c’est notre
quotidienàtous.»
A L’ESCRIME
«Onapuisédansnotre
réservedetrésorerie
afinquetouslesenfants
aientleurfleuret»
Autre endroit, autres règles à
respecter.Surlemur,desaffi-
chettes signalent l’emplace-
ment réservé à l’unique pa-
rent autorisé à assister aux
entraînements. « Ce n’est to-
léré que pour le cours des
4-6 ans. Les enfants ont sou-
vent besoin d’une présence »,
précise Lionel Ghesquier,
président du club d’escrime
deClermont(Oise).
Fini — au moins pour quel-
ques mois — l’époque où les
parents, assis sur des bancs,
discutaient tout en scrutant
les premiers pas d’escri-
meurs de leurs enfants. Le
protocole sanitaire est, là aus-
si, strict et parfaitement or-
chestré au sein de ce club de
87 licenciés. La salle est suffi-
sammentgrande,mêmesiles
vestiaires restent fermés. Les
jeunes viennent désormais
entenue(prêtéepourl’année),
se lavent les mains en arri-
vant, suivent un itinéraire à
sensuniqueetnes’échangent
pluslesarmes.Clermont (Oise) . Chaque escrimeur doit avoir son propre fil de corps.
LP/S.L.
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2. Le Parisien IXMARDI 22 SEPTEMBRE 2020 IX
Wagner pour un premier en-
traînement, à l’occasion de la
fête des associations de la vil-
le où ils résident, Vélizy-Villa-
coublay (Yvelines). « Il y a un
côté bizarre car on nous im-
pose le port du masque dans
les parties communes, mais
on n’a pas accès aux vestiai-
res et, lorsqu’on entre sur le
terrain, il n’y a plus de restric-
tions. On joue à 6 comme
d’habitude et tout le monde
avec le même ballon… »,
s’étonne Damien, volleyeur
amateurdepuisdixans.
«Onatrèsmalvécu
leconfinement»
« Evidemment, cette rentrée
sportive est différente, mais
nos enfants ont absolument
besoin de se défouler, ajoute
Garlonn, qui est devenue, elle,
accro à la course à pied « en-
tre copines ». C’est indispen-
sable pour l’équilibre de la fa-
mille. On a très mal vécu le
confinement. Le petit dernier
a besoin d’exercice, et il a fallu
s’adapter.»
Conscient du privilège de
vivre en pavillon, le couple,
originairedeBretagne,amul-
tiplié les activités pendant
trois mois : « Tant que la forêt
était ouverte, on sortait une
heure pour jouer. Ensuite, on
a organisé dans le jardin des
petits jeux, acheter une pisci-
negonflable.»
PourDamien,quireconnaît
«avoirpriscinqkilospendant
le confinement », et Garlonn,
le budget sport de la tribu
s’élève à 1 500 € par an. Un
sacrifice qui « vaut vraiment
le coup » pour l’informaticien
et son épouse, entrepreneuse
danslegraphisme.
STÉPHANECORBY
TÉMOIGNAGE
Nosenfantsont
absolumentbesoin
desedéfouler
aGARLONN
UNE MÈRE DE FAMILLE
DE VÉLIZY-VILLACOUBLAY
GARLONN est arrivé à l’école
un jeudi « avec la boule au
ventre. » La mère de famille
de 41 ans venait d’apprendre
qu’un enfant de la classe de
petite section de son fils Ro-
bin, 3 ans, était positif au Co-
vid-19.«J’étaistotalementan-
goissée, le visage blême,
raconte la maman de quatre
enfants. On a l’impression
quetouts’écroule.»
Elle et son mari Damien,
42ans,ontmalgrétoutdécidé
d’inscrire leurs chérubins à
une activité sportive. Charlot-
te, l’aînée de 14 ans qui prati-
quait la natation depuis huit
ans, a choisi le volley, comme
ses sœurs Margaux, 11 ans, et
Lison, 9 ans, son papa et son
petit frère qui découvre le ba-
by-volley.
« Pendant le confinement,
mon envie a plongé (sic), con-
fie l’adolescente. Ça me pre-
nait de plus en plus de temps,
et je me suis lassée de nager.
J’avais aussi envie d’une acti-
vitécollective.»
Toutelafamilles’estrendue
le 12 septembre au gymnase
« On a puisé dans notre ré-
serve en trésorerie pour
acheter des fleurets afin que
touslesenfantsaientleleur»,
précise le président, qui a
souhaitéqueletarifdeslicen-
ces ne soit pas augmenté.
Chaqueescrimeurdoitégale-
ment avoir son propre fil de
corps, ce câble qui permet de
compter les points. Et désor-
mais, seul le « responsable
Covid » a le droit de le bran-
cher ou de le débrancher. Car
le cours doit se faire en toute
sécurité, avec un maître d’ar-
mes qui conserve son mas-
que. Les mesures ont forcé-
mentuncoût.
Signalersaprésence
« La Ligue a doté les clubs de
lingettes et de produits désin-
fectants, nous avons acheté
des masques pour les béné-
voles », précise Lionel Ghes-
quier. Les clubs de l’Oise ont
aussi bénéficié d’une « sub-
vention protocole Covid » de
1 500 €. Les risques sont li-
mités au maximum, et cha-
queescrimeurdoitsignalersa
présence sur une feuille
d’émargement, transmise « si
besoin»àl’ARS.Cesmesures
sont forcément compliquées
à mettre en place, d’autant
qu’ellessontévolutives.
«Noussommesbénévoles,
sourit le président, mais tout
ceci fait partie du contrat de
responsabilités du président.
Traditionnellement, nous
connaissons un pic d’affluen-
cel’annéedesJO.Or,mêmesi
Tokyo 2020 a été reporté,
beaucoup de gens viennent
faireunessai.Sansdoutepar-
ce que notre sport, qui se pra-
tique avec un masque et une
tenuespécifique,rassure.»
AU JUDO
«Chaquejeuneason
binômeattitrépourles
combatsd’entraînement»
Dans ce club de judo du Val-
de-Marne, le tatami luit enco-
re du désinfectant dont il a été
généreusement enduit quel-
ques minutes plus tôt. Face
aux quatorze enfants âgés de
6 à 8 ans qui assistent à ce
premier entraînement depuis
la rentrée, Frédéric Colico se
tient en kimono et masqué.
«Toutlemondemetsestongs
pointées vers l’extérieur du
tatami pour ne pas marcher
sur le sol et ramener des mi-
crobes », lance la ceinture
noire, membre du bureau de
l’US Ivry, à ses élèves. Quel-
ques minutes plus tôt, il a in-
terrompu sa séance pour as-
perger les mains d’un judoka
degelhydroalcoolique.
« On fait tout ce que l’on
peut pour limiter les risques
aumaximum.Jenelestouche
plus pour leur montrer les
prises, chaque jeune a son bi-
nômeattitrépourlescombats
d’entraînement,etonleurim-
posedenettoyerleurkimono,
Ivry (Val-de-Marne),
le 14 septembre. « On fait tout
ce que l’on peut pour limiter
les risques au maximum.
Je ne touche plus les élèves
pour leur montrer les prises »,
explique le professeur de judo,
Frédéric Colico.
soulignecebénévole.Mainte-
nant, c’est un art martial. On
nepeutéviterlescontacts.»
Limiterlenombrede
personnesàl’intérieur
Ce lundi, devant la salle de
sport où se déroulent les en-
traînements, se forme un bal-
let entre les parents qui vien-
nent déposer leur enfant et
ceux qui viennent l’inscrire.
Dans le hall, le président Ha-
chemDouirirabroueceuxqui
pénètrent dans le bâtiment
sans avoir été invités à s’as-
seoir. « On doit faire en sorte
qu’un minimum de person-
nes s’agglutinent à l’intérieur,
glisse-t-il. Je redoute l’hiver
oùonauradescasdegrippes,
dont les symptômes se rap-
prochent de ceux du Covid-
19. La mairie nous a prévenus
qu’elle arrêterait toute l’activi-
té pour deux semaines à la
premièresuspicion.»
Non loin de là, Julie finit
d’inscrire pour la première
fois Jana, sa fille de 5 ans. « Il
n’y a pas plus de risques
qu’elle ramène la maladie ici
qu’au parc ou à l’école, souli-
gne la maman. Les enfants
ontsuffisammentétémaltrai-
tés psychologiquement avec
les mesures sanitaires, il faut
qu’ilspuissents’exprimer.»
A l’US Ivry, tout le monde
n’a pas fait le même calcul.
L’an dernier, à la même épo-
que, le club comptait 250 li-
cenciés. Aujourd’hui, ils sont
50demoins.«Çatouchetou-
Vélizy-Villacoublay (Yvelines), le 12 septembre. Garlonn et Damien avec leurs quatre enfants : Charlotte,
Margaux, Lison et le petit Robin.
tes les catégories d’âge, souf-
fle Hachem Douiri. Certains
ont peur. » « Il faut compren-
dre l’appréhension des gens
et montrer que l’on fait tout
pourquelejudos’adapteàces
conditions particulières »,
conclut Frédéric Colico. Un
vraidéfipourlesdirigeantsde
clubdésormais.