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Zoé Bonnardot
DNSEP-2016
Nécessité
charmante
vies, villes et vélos
Zoé Bonnardot
Mémoire de fin d’études
rédigé sous la direction de Miguel Mazeri
École des Beaux-Arts TALM, site Le Mans, 2015 -2016
6//Remerciements
L’écriture d’un mémoire de master nécessite
d’être bien entourée, et je tiens à remercier toute
les personnes qui m’ont aidée, d’une façon ou
d’une autre.
Tout d’abord Miguel Mazeri, pour avoir pris le
temps de me guider malgré mon éloignement
géographique. Mais également Didier Cornille
et Thomas Watkin pour leurs conseils avisés,
ainsi que Ronan le Régent pour sa patience et
ses astuces.
Je remercie également Erwin, Fanny, Mareva,
Mathieu, Alice, Camille, Domitille, Isabel,
Melanie, Antoine et toute l’équipe du “Vieux
Biclou” pour m’avoir accordé leur interêt et leur
temps.
Mes plus sincères remerciement à mes proches,
qui m’ont accompagnée et soutenue quand les
trajets en vélo ne suffisaient plus à m’apaiser.
8//Sommaire
Préambule
--------------------
INTRODUCTION
CONCLUSION
-----------------
Montpellier
Copenhague
Petit lexique cycliste
Aperçus urbains
(Fiches annexes)
RESSENTIR
DIVAGATIONS
VOIE ROYALE
ÊTRE
CYCLISTE
PARTAGE
COMMUNAUTÉ
CULTURE
ÊTRE
SOCIAL
10//Préambule
3 ans
La bicyclette, je l’ai découverte tôt, comme tous les
enfants de ma génération. Je me souviens de cette
photo : un tricycle, un énorme casque rouge et moi.
6 ans
Je me souviens de mes débuts sans petites roues, de
mon frère me poussant dans le jardin, sur cette vieille
bicyclette pour adulte. Forcée de choisir entre les deux,
j’ai préféré la selle aux pédales. Les hématomes qui ont
suivi m’ont confirmé que cela n’était pas le bon choix.
8 ans
Premier vélo. Un VTT rose d’occasion. J’en étais folle.
Je me souviens de ces weekend dans mon village, à
suivre les autres enfants, debout sur ma selle. Je me
souviens de cette journée de « formation » à l’école. Bras
droit, bras gauche, pied à terre. Et ce gendarme qui ne
cessait de m’appeler «Joé». Je me souviens de ma mère
furieuse, qui avait surpris l’un de mes frères installé sur
son vélo, accroché à une voiture, pour aller plus vite.
10 ans
Nous vivons en appartement, les vélos sont à la cave.
14 ans
Nouvelle maison, nouveau village, les vélos sont dans le
jardin, prêts à l’emploi.
16 ans
Nouveau vélo : 3 plateaux, 7 vitesses, un panier et des
suspensions. Un vélo d’adulte ; mes genoux étaient
ravis. Route, plage, digue, plage, route, et mes soucis de
lycéenne disparaissaient.
17 ans
Études, cité universitaire, appartement, ville : adieu,
bicyclette. Avec une amie, nous rêvions de monter
notre propre fixie. À défaut, nous avions acheté un vélo
pliable, sur “leboncoin”. J’ai fini par le lui racheter. Je l’ai
repeint, ai changé les pneus et ajusté la sonnette. Trop
petit pour moi, il n’a pas servi souvent.
23 ans
Toujours étudiante, je suis en échange Erasmus à
Copenhague, la ville des vélos.
Ville, vélo.Ville, vélo ? Ville, vélo ! Vélo, vélo, vélo.
Il ne m’a fallu que quelques heures pour comprendre
que j’allais devoir m’acheter un vélo, et 3 jours pour
en posséder un. Sans vitesse, sans frein à main. Il était
tout noir. Il semblait avoir traversé quelques décennies.
Pendant 5 mois j’ai pédalé  : 30 min le matin, 30 min
le soir. Sous la pluie, sous la neige, face au vent. Et j’ai
râlé, quand il pleuvait. Et j’ai transpiré, tout le temps. Et
j’ai eu très mal au jambes, au début. J’ai eu la flemme,
parfois. Mais je n’ai jamais envisagé de me déplacer
autrement. Plus économique et plus rapide que les
transports en commun, c’était un investissement vite
rentabilisé.
Et la contrainte s’est transformé en plaisir.
12//Introduction
	 Les phénomènes humains, de masse
et de société ont quelque chose de fascinant.
J’ai toujours cherché à comprendre nos
comportement, notre relation aux autres,
et aux objets que nous créons. La collection
fait partie de ces phénomènes étranges, cette
obsession de garder et de collecter tout et
n’importe quoi, de la capsule de bière aux
montres de luxe, et cela sans raison apparente
si ce n’est celle de posséder, d’exposer, de
cumuler. S’approprier puis dévoiler ; c’est
exactement ce que j’ai cherché à faire. Formée
à observer la société et l’espace urbain, à
penser le monde au travers de la création, ce
qui m’a le plus marqué lors de mon expérience
de cinq mois dans la ville de Copenhague à été
la bicyclette. Elle occupe une place centrale
dans le paysage urbain et social de la ville.
Devenue cycliste régulière pour des raisons
principalement économiques, j’ai finit par
y prendre goût. Je me suis alors demandé
quelles étaient les motivations des autres
cyclistes pour l’utiliser tous les jours.
En septembre 2015, j’ai eu l’occasions de voir le
film““Bike vscars”deFredrikGerttenàl’institut
Suédois de Paris. Une des protagonistes,
Aline Cavalcante, est Brésilienne, et réside à
Sao Paulo. Venue en ville pour étudier avec
très peu d’argent, elle explique avoir choisi le
vélo par défaut, puis y avoir très rapidement
pris goût. Elle a monté une association pour
promouvoir la bicyclette, à Sao Paulo, et lutte
contre l’insécurité des cyclistes. Séduite par
son engagement, j’ai réalisé plus tard que
toutes mes interrogations se retrouvaient
finalement autour de ce témoignage.
14//Introduction
C’est par une recherche empirique que j’ai
choisi de développer une, ou plutôt des
réponses à cette question, à la manière d’une
compilation, d’une liste non exhaustive.
Adoptant une démarche abductive, je n’ai eu
de cesse d’osciller entre travail de recherche,
d’analyse et de terrain. Les connaissances
théoriques acquises de concert avec un
travail d’observation et d’entretiens m’ont
permis de structurer mon propos, et de trier
les informations récoltées. Ansi, l’ensemble
des informations présentes dans ce mémoire
forment une collection personnelle. Les textes
présentés, aussi divers soient-ils en terme de
médiums et de thèmes, ont été choisis de
sorte que chacun d’entre eux apporte une
part de réponse en soi.
Ayant vécu à Copenhague et à Montpellier en
2015, j’ai choisis d’utiliser ces deux villes pour
leur dimension représentative. Différentes
d’un point de vue démographique, culturel,
météorologique, politique et économique, je
n’en ferai pas une étude comparative.
Meslecturesontcommencéavecdesouvrages
centrés sur la bicyclette, notamment celui de
Frédéric Héran qui questionne la place de
la bicyclette en ville aujourd’hui, et celui de
Didier Tronchet, qui traite des ressentis du
cycliste en milieu urbain. Puis j’ai élargi mes
recherches, me tournant vers des oeuvres
cinématographiquescommecellesdeJacques
Tati, des reportages et documentaires, mais
aussi beaucoup d’articles de presse en ligne.
	 De la contrainte au plaisir,
de l’indifférence à la délectation,
comment la bicyclette devient-elle
un mode de vie ?
Dans des villes toujours plus peuplées, il est
d’actualité de questionner la gestion des flux
humains en leur coeur, ainsi que l’impact
écologique et économique de nos modes de
déplacement. La bicyclette semble s’annoncer
en Europe comme l’une des solutions possibles
à certains problèmes de pollution, de santé,
d’espace disponible, de congestion du trafic et
de stress. C’est d’ailleurs ce qui m’a conduit à
employer le mot “nécessité” :
Nécessité : caractère inévitable, exigences.
Dont on ne saurait se priver, qui est
indispensable.
De fait, nous ne saurions nous en priver
car nous devons nous déplacer, et le vélo
pourrait rapidement devenir inévitable pour
une majorité de citadins. Mais la nécessité
n’impliqueenaucuncaslanotiondedélectation.
Et c’est justement ce qui m’a intrigué. Pourquoi
le cycliste prend-t-il plaisir à rouler ? Il semble
que la bicyclette ait quelque chose d’attrayant,
de plaisant, comme si, exagérons, elle nous
envoûtait. C’est de ce constat que provient le
mot “charmante” évoqué dans le titre :
Charmante : Qui charme, qui est agréable à
regarder. Attrait exercé surquelqu’un. Qualité
de ce qui est gracieux, agréable.
Quel est donc le charme qu’exerce la bicyclette
sur les cyclistes, qui les pousse à changer leurs
habitudes ?
16//introduction
“Les sondes culturelles utilisent une collection
d’outils, d’artefacts et de tâches destinées à
pousser l’utilisateur à regarder et à penser son
environnement d’une nouvelle manière. Les
réponses engendrées initient un dialogue entre le
designeretlegroupe.Avecuneintrusionminimum,
les chercheurs peuvent glaner des informations
à propos de l’environement des participants, qui
peuvent aider à identifier des problèmes,découvrir
de nouvelles opportunités,et inspirer le concepteur
avec de nouvelles idées et solutions. Les “cultural
probes” ont été développées par Gaver, Dunne
et Pacenti en 1999, eux-mêmes inspirés par le
mouvement situationniste. Cette technique ne suit
pas une démarche scientifique, c’est une approche
artistique, qui est caractérisée par l’irrationnel, le
manque de contrôle,en vue d’obtenir l’inspiration,
et ne peut être systématiquement analysée”.
(traduit à partir d’un texte issu du site internet :
designresearchtechniques.com)
Parallèlement au travail effectué sur le terrain
à l’aide des outils présentés, ce travail s’est
cristallisé en deux parties bien distinctes : être
cycliste et être social. La première partie engage
les ressentis du cycliste lorsqu’il roule en milieu
urbain, et a pour but de comprendre les effets et
les conséquences de l’usage de la bicyclette sur
notre sensibilité et notre perception du monde.
La seconde, engage le cycliste en tant que
citadin, et questionne son rapport au monde
qui l’entoure, à la société. Ainsi, mon travail
est un collage d’expériences et de données
qui, rassemblées, transmettent des éléments
de réponse à des problématiques sociales
de manière sensible, car c’est par là que tout
commence.
Ce travail est orienté vers l’humain avec ses
caractéristiques et sa sensibilité. La question
soulevée relève du domaine de l’expérience
personnelle de chaque cycliste. C’est donc
naturellement vers eux, que je me suis tournée,
empruntant aux sciences humaines et sociales
plusieurs outils :
Un questionnaire effectué sur Facebook m’a
permis d’avoir des données chiffrées sur les
pratiques cyclistes au coeur de Montpellier.
-
Des observations (les textes de couleur grise) issues
d’un carnet de bord tenu au cours de l’année
2015 lors de mes immersions dans les deux villes
énoncées, sont présentées sous forme de récit.
-
Des entretiens oraux ou manuscrits. (retranscrits
en violet) Les premiers relèvent de l’entretien
compréhensif, j’ai choisi de m’y rendre sans
questions pré-écrite, laissant la discussion
évoluer au grée des observations faites sur
place et des réponses obtenues. Les entretiens
envoyés par écrit en revanche, ont été pensés
pour répondre à des questionnements et à des
problématiques précises.
-
Les « cultural probes » (sondes culturelles), ont
été la base d’un carnet nommé “Le vélo, ça
vous fait quoi ?”, composé de quatre missions
à réaliser sur quatre jours. Les personnes
choisies devaient prêter attention à des détails
particuliers durant leur trajet quotidien, puis
relater leur expérience dans le carnet.
18
ê T R
E CY
C L I..
S T E
Être humain, c’est ressentir,
voir, toucher, c’est avoir un
corps , une sensibilité, des
sentiments,despensées,une
réflexion, c’est apprendre,
s’adapter,évoluer.
Que transforme en nous
la bicyclette, lorsque l’on
devient cycliste ?
20//Ressentir
Ressentir
La bicyclette est un vecteur d’imaginaire qui met
en jeu une dimension abstraite et inconsciente liée
à l’objet et à la sensation particulière qu’il procure.
Sentir et ressentir la ville à vélo, c’est avoir les
sens en éveil et le corps en mouvement, c’est être
furtivement présent, c’est prendre de la vitesse.
Ces sensations propres à chaque cycliste, sont la
basedenotreperceptiondelaville.Semettreenselle
nousfaitchangerdepointdevue,deperspective.De
nombreux facteurs rentrent en compte et, cumulés,
ils nous apportent une appréhension nouvelle de la
ville, de notre quotidien.
L’émotion esthétique de la vitesse
dans le soleil et la lumière,
les impressions visuelles se succédant
avec assez de rapidité
pour qu’on n’en retienne que la résultante
et surtout qu’on vive et ne pense pas.
–
Jarry Alfred - cité dans 303 n° 136 consacré au vélo.
____________
Montpellier
2015
22//Ressentir-Souvenirs
souvenirs
	 Bons ou mauvais souvenirs, ville ou
campagne, tempérament agité ou calme,
téméraire ou peureux, notre passé commun
avec la bicyclette ainsi que notre personnalité
va influer sur notre façon de pédaler en milieu
urbain. La perte des roulettes correspond à un
moment fort de la vie d’un enfant, on rentre dans
la cour des grands, on gagne en indépendance.
En France, une grande majorité de la population
sait faire du vélo. C’est par l’usage que l’on
s’approprie le vélo pour la première fois, et
comme le dit l’adage “le vélo, ça ne s’oublie pas”.
La bicyclette devient en grandissant un loisir. Les
adultes responsables, ne montent plus à vélo.
En tout cas, pas la semaine. Il y une dimension
ludique, dans la pratique du vélo, qui nous
renvoie à notre apprentissage, à notre enfance.
Le vélo reste et restera, un vecteur d’imaginaire,
un activateur de souvenirs, un jeu, malgré tout.
Il y a effectivement peu de chances pour que
l’on croise un homme en costume, effectuant
une roue arrière sur le chemin du travail. Mais
rien ne nous dit qu’à aucun moment, il n’en a eu
envie.
Blottiequelquepartentrelecerveaureptilien,
celui de nos lointains ancêtres les poissons,
etlecerveaunéo-mammalien,
celuidesaustralopithèquesquenousfûmes,
ilexisteraitunemémoirecycliste,
queriennepeuteffacer...
Dalloni Michel - Le vélo - chap.100
24//Ressentir-Mécaniqueinterne
	 Le vélo fait partie de ces objets qui
poussent notre corps à se mouvoir dans l’espace.
Encela,ilestunsport.Loindemoil’idéed’évoquer
le Tour de France qui d’une part, ne se déroule
que peu en milieu urbain, et d’autre part, touche
à un domaine sportif qui n’est pas le mien. Il n’en
reste pas moins que la bicyclette nous pousse à
dépenser de l’énergie. Au moins un peu.
Il permet à celui qui l’utilise de décupler sa vitesse
par la seule force de ses jambes. Une fois installé
sur la selle, chaque membre de notre corps est
sollicité. Notre première sensation va se retrouver
au niveau du ventre; à la recherche d’équilibre,
le jeune cycliste se verra tanguer, réveillant son
centre de gravité et par la même occasion, son
coeur, qui va aussitôt faire un bond. Plus tard, le
cycliste aguerri partira à la recherche de la même
sensation, en augmentant sa vitesse.
Mollets, cuisses, fessiers, triceps, biceps, poignets
et chevilles, orteils et doigts, le cycliste est sur
le qui-vive, ses membres prêts à jouer leur rôle.
Jambe gauche, jambe droite, jambe gauche. Un
dénivelé s’annonce et ce sont les fessiers qui
rentrent en action, les bras vont les accompagner
dans l’effort. Inspire, expire, inspire, expire ; les
poumons sont au maximum de leur activité, le
cœur bat à plein régime, chaque pore de la peau
du cycliste s’emploie à refroidir son enveloppe
corporelle. Ses yeux sont rivés sur la route. Son
cerveau le prie de tout arrêter. Ses jambes ne vont
pas tarder à ne plus répondre de rien.
Mécanique interne
“Le vélo, ça vous fait quoi ?”
Carnet de Fanny
_
“Mouvement, vitesse, liberté !”
26//Ressentir-Méchaniqueinterne
Arrivé en haut, le cycliste change totalement de
posture. Assis, jambes et bras détendus, épaules
relâchées. Les yeux se relèvent et observent la ville,
la vue, les passants. Le vent frais vient caresser
et sécher son visage. Son cœur frappe encore
sa poitrine, accentuant toutes ses sensations.
Les poumons mécontents se font remarquer. La
gorge brûle. Le cycliste amateur se promet de ne
plus jamais fumer. Le cerveau, enfin libéré de sa
fonction de coordinateur, est totalement ouvert
sur le monde extérieur. L’attraction terrestre fait
son effet sur la masse, constituée du cycliste et
de sa monture. Et il dévale la pente, à vitesse
grandissante, réveillant les papillons dans son
ventre.
Heureusement,lequotidienducyclisteurbain n’est
pas aussi intense qu’une côte impromptue, mais
l’exemplerévèlelapotentielleintensitéphysiqueet
sensorielle de la pratique. Ainsi, tout corps monté
surunvélosembleprépareràaffronterl’inattendu.
Le cycliste du dimanche, l’hédoniste de la pédale,
ne sera pas épargné. Profitant bien plus longtemps
de la descente, il se gardera bien de donner un
coup de pédale supplémentaire. Ne l’oublions pas,
la bicyclette est un outil de fainéant autant que
de sportif. L’esprit du cycliste s’évade, rêve, crée. 
L’automatisme des mouvements : “jambe
gauche, jambe droite, jambe gauche...” met une
partie du cerveau en veille. Paradoxalement et
parallèlement, l’autre partie est en éveil : animé
par un instinct animal, prêt à bondir au moindre
danger. Voitures, piétons, feu rouge : le cycliste est
alerte.
A l’extérieur,
on se déplace à vélo.
Mais à l’intérieur,
c’est le vélo
qui nous déplace.
TronchetDidier-Petittraitédevélosophie-p.41
28//Ressentir-Environnement
	 L’environnement du cycliste est
déterminant sur son comportement et son
humeur, mais aussi sur son appréhension de la
ville.Regardrehausséetvitessemaitrisée,ilestplus
rapidequelepiétonetpluslentquel’automobiliste
(hors heure de pointe). Sa perception de la ville est
unique : il est le seul véhicule sans moteur autorisé
à rouler sur la route, faute d’emplacement mieux
défini. Mais il y est vulnérable.
Environnement
“Le vélo, ça vous fait quoi ?”
Carnet de Fanny
_
__
Tout corps placé sur un vélo voit
son regard sur le monde déplacé.
Tronchet Didier - Petit traité de vélosophie - p.41
__
Par stimulation des sens et nécessité, les yeux
rivés tantôt sur la route, tantôt sur l’architecture,
le cycliste même pressé, est en permanence
conscient de son environnement. Les rues
s’enchainent les une après les autres, la perception
est fugitive. L’aménagement cyclable est chaotique
dans bon nombre de villes françaises, et le cycliste
est contraint de naviguer entre route et trottoir : il
n’est jamais à l’abri de voir apparaître un bus sur les
voies qu’ils partagent.
“Çapuelesgazsd’échappement,monangoisse
quotidienne:resterbloquéederrièreunbus...”
30//Ressentir-Environnement
Les jours de beau temps, les jours où il prend le
temps, le cycliste et son vélo se transforment en
jeune couple amoureux, aux humeurs rythmées
par les coups de pédales. Ils glissent sur la ville
comme flottant au-dessus du trafic, cheveux au
vent et roue libre, n’en retenant que le meilleur,
trop heureux ensemble pour se laisser perturber
par une voiture mal garée. Ces jours là, le cycliste
sera plus à même, d’observer son environnement
urbain, de se laisser enivrer par l’odeur de la
rôtisserie ou le parfum de la boulangerie, d’être
sensible au soleil sur sa peau et à la douceur de
l’air, faisant fit de la pollution. Les sensations sont
fugaces, mais bien présentes, elles sont diverses et
particulières, propre à chacun, et à chaque ville.
	 Un facteur déterminant du quotidien
cycliste est la météo, qui influe notre humeur et
notre vitesse. Plus ou moins bien équipés, les aléas
de la météo n’atteignent pas tous les cyclistes de
la même manière. Je me souviens par exemple, de
mes trajets sous la pluie à Copenhague : goutte au
nez, l’avant du jean trempé, les orteils pataugeant
dans une petite piscine. Les Danois eux, protégés
par leurs chaussures et pantalons étanches ne
semblaient pas vraiment affectés par l’humidité
environnante.Arrivéeàdestination,j’étaistrempée
et énervée, ils étaient secs et joviaux. Ces jours-là,
je n’étais pas très attentive à la ville. Ma vision était
moins lointaine. Mon esprit plus préoccupé. Les
jours de grand vent, le corps humain fait office
de voile, et poussé par vent arrière, le cycliste file
à toute vitesse avec un sentiment de puissance et
de liberté. Par vent de face, nos instincts marins
disparaissent. Le vent plein d’humour, s’immisce
dans chaque rue de la ville pour se rassembler aux
carrefours dans un tourbillon infernal. Doigts et
orteils gelés. Les yeux asséchés, la peau du visage
frappée par le froid, le cycliste est pris au piège.
“La pluie, le froid, le
vent, sont les éléments
contraires à la pratique
du vélo !”
-
Mareva
32//Ressentir-Vélosophie
	 LIBERTÉ, semble être le mot d’ordre des
cyclistes du dimanche comme des sportifs de haut
niveau. La sensation que procure la bicyclette est
particulière. Le cycliste change de perspective et
de point de vue, de manière abstraite et concrète.
À force de pratique le cycliste développe une
philosophie propre à la bicyclette, ou au vélo.
Vélosophie*
__
À bicyclette, on est un piéton en puissance, flâneur
de venelles, dégustateur du journal sur un banc.
À vélo, on ne s’arrête pas : moulé jusqu’aux genoux
dans une combinaison néospatiale, on ne pourrait
marcher qu’en canard, et on ne marche pas.(...)
Delerme Philippe
La Première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules
__
	 Dans un cas comme dans l’autre, c’est une
philosophiedevie.L’unestrêveur,l’autrepragmatique,
l’unveutdécouvrir,l’autrecombattre.Pourautant,aller
autravailàvéloinduituncomportementnouveau. En
surface, on perd la notion de compétitivité, tout
comme celle de flânerie. La bicyclette devient un
moyen d’accomplir une tâche précise : aller au
travail. Un moyen oui, mais pas seulement.
L’itinéraire est connu, le paysage urbain défile,
la cadence est régulière. Le cerveau libéré de
toute réflexion liée à l’activitée, l’esprit s’évade.
Le trajet travail - maison se transforme alors en
soupape, en sas de décompression, et les soucis
provenant d’un côté comme de l’autre semblent
seperdresurlaroute,entredeuxcoupsdepédale.
“Pour résumer :
	
Le vélo en ville,
c’est la banane assurée :)
Sentiment de liberté
(toute nuancée !) dans les
déplacements
Vitesse (si pas de côtes !)
Gain de temps
Autonomie”
-
Mareva* Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
34//Divagations
DIVAGATIONS
Passage à Montpellier
Montpellier*, huitième ville de France par sa
population, est une des villes les plus actives
du sud de la France. Ville méditéranéenne
typique, elle est formé d’un centre historique
piéton aux rues étroites et pavées, parsemées
de palmiers. Le ciel y est généralement bleu, le
climat y est doux, et l’espace public largement
investi. La vie sociale a lieu à la terasse des cafés
ou des restaurants, devant les bars ou dans la
rue. D’autre part, la ville abrite énormément
d’étudiants, il suffit de se balader dans le centre
historique un soir de semaine pour s’en rendre
compte.
___________
Montpellier
2015
C’est aussi l’occasion de retrouver une
proximité avec la ville (...).
La vitesse du vélo permet d’attraper
beaucoup de réalités,
d’informations sur l’espace
-
Michaud Véronique - Sciences humaines n°40
___________
Montpellier
2015* Se reporter à la fiche “Montpellier”
36//Ressentir-Portrait
Les débuts ?
J’ai commencé à 2 ans comme loisir, puis j’ai commencé
à l’utiliser pour me déplacer vers 5 ans.
-
Un vélo ?
J’ai un fixie et un vélo de route.
-
Le vélo citadin au quotidien ?
Je l’utilise en ville et au quotidien depuis 5 ans,
depuis que je suis étudiant.
-
Pourquoi ?
Je l’utilise pour aller de chez moi à la fac,
c’est le plus rapide.
-
Et Montpellier, sur deux roues ?
Les pistes sont agréables, tout le reste est désagréable.
Les voitures, surtout.
-
Tu es plutôt...
Rapide !
-
Transpirant ou tranquille ?
Transpirant, quand je suis en retard.
-
Pistes cyclables ou route ?
Route.
-
Pluie ou tramway ?
Avant, j’étais plutot pluie, mais j’ai fait une chute
violente récemment, j’ai glissé sur les rails de tramway à
cause de la pluie. Depuis, je prend le tram. Surtout pour
aller à la fac, parce qu’il n’y à pas de douche là bas.
-
Une anecdote ?
Il m’est déja arrivé de me faire chahuter par un
automobiliste parce que je ne roulais pas sur la piste
cyclable...sauf qu’il n’y en avait pas !
Mathieu
25 ans
-
vit à Montpellier
depuis cinq ans
38//Divagations-(des)aménagementurbain
Voies de tramway
Piste cyclable
Bande cyclable latérale
Double sens cyclable
(DES)Aménagement
urbain
	 Par la promotion des mobilités dites
“douces”, les élus de la ville de Montpellier ont
montré une volonté de repousser les voitures
à sa périphérie. Les quatres lignes de tramway
actuelles forment un réseau de cinquante six
kilomètres complété par des lignes de bus, et
le centre historique est entièrement dédié aux
piétons et aux cycles. En ce sens, l’aménagement
urbain laisse une place toute nouvelle à la
bicyclette, qui profite des aménagements liés au
tramway.
Mais les infrastructures cyclables sont
disparates et peu nombreuses, laissant les
cyclistes se glisser dans un flou législatif
Rebellesoucontraints,lescyclistes sefaufilent,
esquivent, contournent. Ilspédalentpartout,tout
le temps, peu importe le sens de la circulation ou
la signalisation, roulant allègrement sur les voies
réservées aux tramways.
Les forces de l’ordre semblent conscientes
du manque d’infrastructure adaptée, et j’ai la
sensation que nous pourrions passer à côté
d’eux vêtu d’un tutu, les fesses posées sur le
guidon et les pieds sur la selle, sans qu’elles ne
nous remarque. Ce qui n’est pas pour déplaire à
une partie de la communauté cycliste, avide de
liberté.
250 m
Se reporter à la fiche “Aperçus urbains”
40//Divagations-(des)aménagementurbain
“Je reconnais faire beaucoup
d’incivilités en vélo et
ne pas suivre le code de la route.
Je prends des sens interdits.
Je roule sur les trottoirs.
Je ralentis aux feux rouges,
parfois je m’arrête, mais
s’il n’y a pas de circulation,
je grille le feu.
Je ne porte pas de casque,
ni de gilet fluo.
Je slalome entre les véhicules
arrétés ou au ralentis”
-
Mareva, “Le vélo, ça vous fait quoi?”
______________
Montpellier - 2015
42//Divagations-Trajetoccasionnel
Montpellier, 9h, mardi matin. Motivée, je décide
d’aller faire les courses dans un magasin excentré.
Après avoir traversé
des travaux
Je me retrouve derrière une file de 10 voitures qui
attendent que le feu passe au vert. Fatiguée de respirer
les vapeurs qu’elles dégagent, je passe sur le trottoir.
Il est très étroit.
Au croisement suivant
Je décide de passer sur celui d’en face, pour être plus à
l’aise. Les voitures n’ont toujours pas avancé. Arrivée
au feu, je traverse une nouvelle fois et tourne à droite.
Un tramway me barre la route. J’attends qu’il passe.
J’avance, et me retrouve face à un flot continu de
voitures. J’attends. Je traverse. Apparaît enfin une voie
cyclable, étrangement tracée sur le trottoir. Un camion
de livraison est garé dessus. Une famille avec plusieurs
enfants marche sur la voie. Je me déporte. Maintenant
une allure raisonnable, j’essaye d’éviter les piétons.
Trajet Occasionnel
Soudain, plus de voie.
Je dois me diriger vers la droite. Sens interdit. Le
trottoir est inexistant d’un côté, en travaux de l’autre.
Le prochain croisement est loin. Tant pis, je ferai
attention, je me lance à contresens. Parfois sur la
route, parfois sur le trottoir, j’ennuie tour à tour
piétons et automobilistes. Trois cents mètres plus loin,
une masse plus bruyante et imposante que les autres
arrive. C’est un bus, qui se déplace légitimement sur
une voie qui lui est reservée, et qui vient subitement
d’apparaitre. Le bus m’a dépassé, je me déporte dessus.
Un autre bus. Coincée, j’avance entre cette énorme
masse et ses petites soeurs. C’est très inconfortable. Un
troisième bus apparaît.
Prochedemadestination
Je ralentis. Un courant d’air violent me déstabilise,
suivit d’une forte odeur d’essence.
Je suis arrivée
et Copenhague me manque.
44//Divagations-Itinéraireindéfini
Itinéraire indéfini
	 L’aménagement cyclable de certaines
villes peut facilement désorienter le cycliste.
C’est très naturellement qu’il définira des
itinéraires qui lui conviennent et s’y tiendra.
Un des exercices glissé dans le carnet “La ville,
ça vous fait quoi ?“ avait pour but de mieux
comprendre l’importance pour les cyclistes
d’un itinéraire défini et constant, ainsi que
les conséquences d’une désorientation. Le
participant devait emprunter un nouvel
itinéraire matinal, et de relater l’expérience
sur le carnet. Certains de ces carnets ont été
distribués à des habitants de la ville de Nîmes,
dont l’aménagement cyclable des voiries est quasi
inexistante. Ainsi, Mareva et Domitille, toutes les
deux cyclistes au quotidien se sont prêtées au jeu :
il semble que l’expérience ait été pour elles deux,
désagréable et dangereuse.
“L’expérience fait appel au sens de
l’orientation. On réfléchit, donc on est moins
attentif à la circulation. C’est plus stressant
de ne pas connaitre le parcours. On cherche
des repères, le nom de rues, on cherche à
apercevoir des lieux connus.”
-
Domitille
“L’itinéraire habituel est le plus rapide, il
emprunte une zone piétone très large. Cette
tentative s’est avérée un véritable échec !
Beaucoup de ruelles étaient à sens unique,
j’avais toujours en tête mon orientation dans
ce dédale”
-
Mareva
46//Divagations-Emplacementindéfini
Emplacements
indéfinis
	 Le sentiment d’insécurité et l’inconfort
provoqué par le manque d’infrastructure peuvent
se manifester également lorsqu’il est question de
stockage. Un cycliste me confiait récemment :
“J’ai refusé un super appartement
au centre-ville, parcequ’ils ne me
proposaient aucun endroit
pour ranger mon vélo”
Posséder une bicyclette en ville, implique de
trouver un lieu pour la stationner. La législation
française n’est aujourd’hui pas pensée pour les
cyclistes, et il est courant que l’on nous refuse
d’entreposer un vélo dans les parties communes
d’un immeuble, sans justification particulière.
À Montpellier, les bicyclettes sont accrochées
partout sauf sur les quelques bornes à vélo, qui
semblent d’ailleurs avoir été consciemment
installées dans des endroits isolés, et par
conséqent inutilisables, puisque plus facilement
sujettes aux vols.
Le vol de vélo est une pratique courante, dans
les villes du monde entier. Des associations
recensent par exemple 45 000 vols par an à
Amsterdam, 15 400 à Rome, 1 900 à Copenhague,
etc. Contrairement aux idées reçues, la plupart
de ces vols sont effectués sur des bicyclettes mal
accrochées, ou avec un cadenas trop fin. Mais
les bicyclettes vraiment attirantes (chères ou à la
mode) sont subtilisées, quel que soit le cadenas.
______________
Montpellier - 2015
48//Divagations-Emplacementindéfinis
______________
Montpellier - 2015
D’autre part, laisser un vélo dans les rues
Montpelliéraines la nuit, c’est le laisser à la portée
d’une jeunesse alcoolisée : roues voilées, selles
volées et bicyclettes déplacées. La présence de
“cadavres” de vélo, un peu partout dans les rues,
donne à penser aux citadins que le vol de vélo est
régulier et inévitable, ce qui ne les encourage pas
à s’en acheter un. Le vol de vélo répandu partout,
mais dans des villes comme Copenhague ou
Amsterdam la présence d’infrastructures propres
àlabicyclette,lesservicesquilesaccompagnent,la
facilité d’achat et la présence massive de cyclistes
permettent de contrebalancer l’inquiétude
provoquée par le vol. Évidemment, pratiquer ne
veut pas dire posséder. Cependant, le système
de VLS (Vélo en Libre Service) de Montpellier,
appelé “cyclomagg”, n’est ni entretenu ni mis en
valeur, et les stations sont presque toutes vides.
50//Divagations-Trajetquotidien
7 h 15
Montpellier. Je me lève.
7h55
Je me faufile à côté de mon vélo et râpe mon sac à dos
sur le crépi du mur. J’ouvre la porte, et sors le vélo de
l’appartement, roue arrière en premier. Tous les matins,
je me prends les pieds dans les pédales et cogne le
guidon dans le pas de la porte. Tous les matins, mon
vélo vacille dans le couloir pendant que je ferme ma
porte à clés. Tous les matins, j’agrippe le cadre de mon
vélo de la main droite et descends les escaliers. Trois
demi étages plus loin je sors de l’immeuble, tenant le
vélo d’une main et la lourde porte métallique de l’autre.
Je passe. Tous les matins, la porte se referme sur la roue
arrière de mon vélo. Et tous les matins, ça m’agace.
8 h
Je claque la porte. C’est parti. Un pied sur la pédale, un
pied au sol, je prend de l’élan met tout mon poids sur la
pédale. Je saute sur la selle. La fraîcheur du matin me
frappe au visage, m’écarquille les yeux et me réveille.
Je suis les voies de tramway. J’accélère, je slalome entre
les piétons endormis et les rails, en prenant garde de ne
pas y coincer mes roues. Une voiture arrive, je monte
sur le trottoir. La voie est libre, j’accélère. J’arrive à
l’arrêt de tramway, je le contourne et me dirige vers le
prochain feu rouge. Je balaye l’intersection du regard.
La circulation est à l’arrêt, j’accélère. J’observe, j’écoute.
Les voitures ralentissent, le bus met son clignotant,
un piéton se lance. Le feu n’est pas encore vert pour
Trajet Quotidien moi, mais je connais le carrefour : je fonce. Je pédale
toujours plus vite, le bus ne va pas tarder à me
rattraper. Dos d’âne. Je me lève et tire sur le guidon.
La vitesse me fait sauter des quelques millimètres.
Ça m’amuse. Second arrêt de tramway. Seconde
intersection. Je passe sur les voies de tramway, sous le
regard vide de ceux qui l’attendent. Je suis devant la
gare. Les voies de trois tramways se croisent. L’endroit
est rempli de rails. Pas de tram à l’horizon, je fonce.
Un tram à l’horizon ? Je fonce. Quoi qu’il arrive, je
serai bien plus rapide que lui.
8 h 05
Je garde un pied sur une pédale, ralentis, puis m’éjecte
du vélo juste devant la gare. Je feins d’être arrivée à
une vitesse raisonnable, jette un coup d’œil rapide
aux écrans d’affichage, agrippe mon vélo par le cadre
et monte les escaliers. Je traverse la gare. Escalators,
quai, attente. Le train est en retard, comme tous les
matins. Je me demande lequel nous allons avoir
aujourd’hui. Si une vieille locomotive pointe le bout
de son nez, on va devoir faire tenir huit vélos dans
un emplacement prévu pour deux. Quand le train
est plus récent, les 6 places que le wagon offre ne
sont toujours pas suffisantes, mais c’est déja plus
confortable.
8h15
Une vieille locomotive fait une entrée bruyante
dans la gare. Il ne me reste plus qu’a porter mon
vélo, encore une fois, à passer cette minuscule porte
pendant que quelqu’un l’empêche de se refermer sur
moi. Je soulève mon vélo et l’accroche par la roue
avant au crochet qui vacille. Je suis enfin assise. J’ai
mal au dos, et je pense aux escaliers, à l’arrivée.
52//Divagations-Intermodalité
“S train”, Copenhague - 2015_____________________
intermodalité
	 Être cycliste ne signifie pas que l’on
abandonne tout autre mode de transport. La
diversité de ceux-ci en milieu urbain s’accroît
avec le temps, et il n’est pas rare que les citadins
les cumulent, dans le but de minimiser les trajet
à pied d’un point A à un point B. Les moyens de
transport légers et à taille humaine comme le
skate, le vélo ou le seagway, facilitent le cumul des
modes de transport.
Autrement dit, l’intermodalité c’est les Parisiens
qui prennent le métro avec leur trottinette, les Al-
lemands qui vont au travail en train, un vélo dans
la gare de départ, un autre à destination, c’est
un skateur qui se déplace à vélo, la planche sur
le porte-bagage, c’est l’automobiliste qui se gare
dans un parc relais et prend le tramway pour se
rendre en ville. En fin de compte, l’intermodalité,
est un moyen de désengorger les centres-villes
des voitures.
Pour les vélos, la question se pose. Doit-on le
ranger dans le coffre de sa voiture ou utiliser les
VLS ? Doit-on grimper dans le train/tramway
avec ou le garer dans des parcs relais, proche des
arrêts de tramways et des gares ? À chaque ville sa
réponse, ou son manque de réponse.
_________________
TER Languedoc Roussillon
2015
54//Voieroyale
voie royale
Passage à copenhague
Copenhague* à été désignée tour à tour capitale
mondiale du vélo, meilleure ville pour les cycliste
et meilleure ville où il fait bon vivre, comme se plait
à le rappeler le site officiel du pays. Capitale du
Danemark, pays où le design fait partie intégrante de
laculture,Copenhagueestuneville propre,ourègne
une certaine harmonie. Des vitrines des magasins
aux styles vestimentaires, en passant par les affiches
pour des évênements et concerts, le sens du beau, du
graphisme et du design scandinave sont palpables.
Les Copenhagois sont souriants et aimables, tous
bilingues. Sous leurs apparences calmes, les Danois
sont des fêtards. Habitués à un climat peu clément
-la ville donne sur la mer Baltique- les habitants de
Copenhague savent profiter de chaque instant de
chaleur et d’ensoleillement, pour sortir des tables
de mixages et enceintes, et boire une bière autour
d’un barbecue.
Ne pas essayer trop vite de trouver
une définition de la ville ;
c’est beaucoup trop gros,
on a toutes les chances de se tromper.
-
George Perec - Espèce d’espace - P119
___________
Copenhague
2015
* Se reporter à la fiche “Copenhague”
I biked from I was five.
-
A bike ?
A lady’s citybike,black and small
-
Since when are you biking in
town everyday ?
Since I moved here. From the
first day. I had 7km to my high
school, and just continued
from there.
-
why ?
It’s the easiest and cheapest.
-
Copenhague is good for..?
The fresh air, sun when it’s there
and watching people.
-
What do you dislike ?
Rain, snow, and wind is
the worst!
-
A favorite place ?
I love biking over the red bridge.
It’s a small only bike bridge
that connects vesterbro and
islandsbrygge over the kanal.
It’s so calming and really soft.
At night it looks amazing.
-
Quick or smooth ?
I’m fast when it’s cooled
and slow when it’s sunny.
-
Following the rules ?
Mostly, but there are some
well known streets where I go
against the rules. Some oneway
streets and stupid red lights
-
Rain or train ?
I often take the metro.
But it depends on to where
Isabel
25 ans
-
vit à Copenhague
depuis 4 ans.
Je fais du vélo depuis que j’ai cinq ans
-
Un vélo ?
Un vélo de femme,noir et petit.
-
Depuis quand fais-tu du vélo en ville
tous les jours ?
Depuis que j’ai emménagé ici.
Dès le premier jour.J’avais 7km
de trajet jusqu’à mon lycée,et j’ai
simplement continué.
-
Pourquoi ?
C’est le plus facile et le moins cher
-
Copenhague, c’est bien pour..?
L’air frais,le soleil quand il y en a,et
regarder les gens.
-
Qu’est ce que tu n’aimes pas ?
La pluie,la neige,et le vent
est le pire !
-
Un endroit favori ?
J’adore faire du vélo sur le“pont
rouge”.C’est un petit pont réservé
aux vélo qui connecteVesterbro et
Islandgrygge en traversant le canal.Il
est vraiment reposant et agréable.
De nuit,il est magnifique.
-
Rapide ou tranquille ?
Je suis rapide quand il fait froid et
lente quand il fait beau.
-
Tu suis les règles ?
La plupart du temps,mais il y a
quelques rues bien connues ou
j’enfreins la loi.Quelques rues en
sens unique et
des feux de signalisation idiots.
-
Pluie ou métro ?
Je prends souvent le métro,mais ça
dépend où je vais.
56//Voieroyale-Portrait
58//Voieroyale-Trajetquotidien
7h45
Copenhague. Je me lève.
8h40
Je pars en retard. J’ai froid. Je pédale trop vite, pour me
donner bonne conscience. Je monte la colline. Je meurs
de chaud. Je transpire. J’accélère. Je double des cyclistes.
Et m’arrête au feu rouge. Les personnes que j’ai doublées
me rattrapent, l’air serein. Et me doublent. Je redescends
la colline. J’en profite, ça ne me demande aucun effort,
j’accélère.
8h48
Je passe devant la gare. J’ai l’impression d’être
bientôt arrivée. Je passe à côté du parc d’attractions
Tivoli. J’entends des gens crier. Je lève les yeux. Et manque
de rentrer dans quelqu’un. Je commence à fatiguer. Je vois
toutes les personnes que j’ai doublées arriver.
8h50
J’aperçois le pont qui mène à Christianshavn. Je le
traverse. Montée. Descente. Je n’avais jamais remarqué
que le plateau des ponts étaient arqué. Je lève ma main
gauche. Je freine. Ma pédale doit être au bon endroit
pour repartir. Je me retrouve au milieu d’une marée de
jeunes vêtus de longues vestes noires, Nike colorées aux
pieds, tous étudiants en design, art ou architecture. Un
pied à terre, un pied sur la pédale. On regarde les voitures
passer.
Trajet Quotidien
9h00
Les voitures s’arrêtent. Les dos se courbent. Les
femmes remontent sur leurs selles. Tout le monde
lève les fesses. Prêts, feu orange, c’est parti. On
se répand vite, sur toute la largeur de la route,
telle une nuée d’étourneaux. D’instinct, on
s’évite. Aucune collision. L’écart se crée. Les vélos
de course partent en tête. Les plus malins ne se
pressent pas. Et moi je transpire.
9h08
On arrive à l’école un par un. On accroche
consciencieusement nos vélos aux bornes. Je
souffle, et prépare une mine désolée. Et chaque
matin. Sans exception. Je suis la première
arrivée. S’il arrive que ce ne soit pas le cas, il me
reste toujours l’excuse magique, à n’utiliser qu’une
fois tous les 3 mois : “Je suis désolée, le pont s’est
levé devant moi, j’ai perdu 15 min”. Tout le monde
sait que c’est faux. Mais tout le monde sait que ça
peut arriver.
60//Voieroyale-Aménagement
AménagemenT
Transport en commun sur rails
Voies et pistes cyclables
	 L’infrastructure cycliste de Copenhague
est très développée. Le premier système de vélo
en libre service est apparu en 1995, et la ville
développe actuellement des autoroutes cyclables.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser,
les Danois n’utilisent pas la bicyclette pour des
raisons écologiques. Ils l’utilisent parce que
c’est un moyen de transport rapide, flexible et
efficace. Tout cela n’étant que la résultante d’un
plancyclableréfléchi. Aufildesannées,lavillede
Copenhague a fait du développement cyclable
une de ses priorités, et a investi dans la mise en
place de voies et pistes cyclables confortables et
sécuritaires en travaillant étroitement avec des
urbanistes. Les grands et moyens axes en sont
tous équipés, et l’on peut aisément traverser la
ville de part en part sans s’aventurer sur la route.
Mais une grande partie du travail de promotion
delabicycletteenvillepasseparlasensibilisation
et les législations. Ainsi à Copenhague, un plan
decommunicationénormeaétémisenplace,en
rendant visibles les pistes cyclables, mais aussi
en utilisant le vélo comme image de marque de
la ville. D’un autre côté, la législation est prévue
pour pousser le citadin à devenir cycliste. Pour
exemple, les feux de circulation de la ville sont
réglés sur des durées calculées en fonction des
cyclistes, c’est-à-dire qu’un cycliste roulant à
20 km/h devrait pouvoir traverser la ville sans
poser un pied à terre. Par ailleurs en hiver, les
voies cyclables sont déneigées avant les routes.
1 km
* Se reporter à la fiche “Aperçus urbains”
(...)
part of the work is also
to change public perception
of which kinds of mobility
carry the greatest benefits
for both citizen and society.
(...) une part du travail est aussi
de changer la perception publique
sur le type de mobilité
qui apporte le plus de bénéfices
pour les citoyens et la société.
-
Lasse Lindholm
City of Copenhagen
________________________
Affiche de communication
de la ville de Copenhague
64//Voieroyale-Vivrelavilledesvélos
l’endroit où je vais et laisser mon
vélo n’importe où.Je me sens libre.
Je fais habituellement du vélo par
tout type de temps,mais je me sens
un peu grognon quand il pleut et
qu’il vente.Dans ces moments je me
demande pourquoi le monde me
déteste.Mais je passe finalement au
dessus et à la fin je me sens vraiment
réveillée après avoir fait du vélo
dans ces conditions !
-
Comme vois-tu/ressens-tu la ville
quand tu fais du vélo ?
Je me sens tellement en sécurité que
je ne porte même pas de casque,
ce qui n’est peut être pas si bon.Je
devrais probablement en porter un
mais je me sent vraiment en sécurité
à vélo dans Copenhague parce que :
1) les pistes cyclables sont très larges,
2)les voitures sont vraiment alertes
et conscientes des cyclistes,et 3) je
peut toujours poser mes pieds au sol
quand je suis à vélo donc je ne me
sens jamais hors de contrôle.
-
Est-ce que tu as un exemple de bon
design ou stratagème qui existent à
Copenhague pour rendre la vie plus
simple aux cyclistes ?
Pistes cyclables,pistes cyclables,
pistes cyclables ! Parfois il y à plus
de place pour les cycliste que pour
les voitures ! C’est vraiment quelque
chose de magnifique.Il y a aussi
des grands parking à vélo dans la
plupart des endroits.
What’s happening in your
mind when you are biking?
(cognitiv effect, mind set,
feelings..)
I feel happy and relaxed - unless
I am in traffic and in a rush
to get to school,then I can
actually feel a bit of road rage
and get agressive.But mostly
biking gives me an opportunity
to reflect on things that are
happening in my day and I feel
very good when I’m out in the
fresh air.
-
How do you deal your life
around bicycle ? (How do you
park, how do you move in
town, weather...)
I just park wherever I can.I
don’t worry so much about my
bike getting stolen because it’s
not unique or special in any
way.It’s so nice not to have to
worry about parking a car (I
come from the U.S.and parking
is a bitch in the city!) So I feel
very relieved to just be able
Melanie
25
-
livesinCopenhagen
from 2 years
Melanie
25 ans
-
vit à Copenhague
depuis 2 ans
to bike right up to the place
I’m going and leave my bike
wherever.It feels free.I usually
bike in all weather,but feel a
bit crabby when it rains and
is windy.In these moments
I ask myself why the world
hates me.But then I get over it
afterwards and at the very least
I feel awake after biking in these
conditions!
-
How do you see/feel the town
when you are biking ?
I feel so safe that I don’t even
wear a bike helmet,which
maybe is not so good.I probably
should wear one but I feel very
safe biking in Copenhagen
because of: 1) very wide bike
lanes 2) cars are very aware
and cautious around bikers 3) I
can always touch my feet to the
ground while I’m on my bike so
I never feel out of control.
-
Do you have any example of
good design or contrivance
that exist in CPH to make life
easier for cyclists ?
Bike lanes,bike lanes,bike
lanes! Sometimes more space
for bikers than for cars! It’s a
really beautiful thing.Also
ample bike parking most
places.
Que se passe-t-il dans ta tête quand
tu fais du vélo ? (Effets cognitifs, état
d’esprit, sensations..)
Je me sens heureuse et relaxée - à
part si je suis dans le trafic et dans la
hâte pour rejoindre l’école,alors je
peut sentir un peu d’enervement dû
à la conduite et je deviens aggressive.
Mais généralement,faire du vélo me
donne l’opportunité de réfléchir sur
les choses qui arrivent durant ma
journée,et je me sens vraiment bien
quand je suis dehors à l’air frais.
-
Comment gères-tu ta vie autour
du vélo ? (Comment tu te gares,
comment tu te déplaces en ville, la
météo..)
Je me gare juste partout ou je peux.
Je ne m’inquiète pas tellement de me
faire voler mon vélo parcequ’il n’est
unique ou spécial d’aucune façon.
C’est si agréable de ne pas avoir à
m’inquiéter de garer une voiture (Je
viens des Etats-Unis et se garer est
une horreur en ville!) Donc je me
sens vraiment soulagée de pouvoir
simplement faire du vélo jusqu’à
66//Voieroyale-Codesethabitudes
Faire du vélo sans gants
est signe d’(une infinie) ignorance.
Les vélos danois sont prévus pour freiner avec les pédales.
En « pédalant à l’envers ». Contrairement à ce qu’on pense
au début, ils sont bel et bien cadenassés, par une bague
sur la roue arrière.
Dans les rues, Il y a des feux rouges de l’autre côté du
carrefour, pour nous permettre d’attendre entre les
voitures et le passage piéton.
Copenhague est une ville plate, et les vitesses sont
inutiles. Sauf quand on habite sur l’unique colline.
Il faut toujours vérifier son angle mort avant de se
déporter. TOUJOURS. Certains cyclistes peuvent être très
rapides.
Aller vite peut s’avérer dangereux. Un accident intervélo
est vite arrivé. Pourtant, aller vite devient une nécessité.
Lever la main
paume ouverte, indique clairement à tout le monde que
l’on s’arrête. Et il vaut mieux ne pas oublier, au risque de
se prendre un guidon dans le dos.
Transpirer, tout les jours, matin et soir.
On est plus rapide en vélo qu’en transport en commun.
Au Danemark, on respecte les feux de signalisation. Sauf
certains.
Ne pas respecter les règles (oublier d’indiquer sa direction
avec son bras avant de tourner par exemple) donne lieu à
des regards très méchants, et ce qui pourrait s’apparenter
à une insulte. (Si l’on parlait Danois)
Avoir la goutte au nez est devenu normal.
Renifler est très mal vu, et se moucher est impossible.
Pour cause de gants trop épais.
Faireduvélosouslaneige
c’est tout un concept. On croit à des conditions extrêmes,
on cligne des yeux et plisse le front. On se dit que c’est
bien parce que l’on est en voyage que l’on accepte ça, que
jamais on ne feraist un truc pareil en France. Et puis
on réitère l’expérience sous la pluie. Et onrelativisée. La
neige, au moins, ça ne mouille pas.
Copenhague est une île. En cas d’oubli, faire confiance au
vent pour nous le rappeler.
Le vent joue parfois à “domino day”, et fait tomber des
rangées de 30 vélos.
Si les gens n’ont pas de sonnette, alors ils en miment le
bruit : “drrrr drrr”
Le vélo est un moyen de faire des économies d’argent :
une bière et 20 minutes de vélo, et c’est l’ivresse assurée.
Avec le temps, on apprends à boire une bière AVANT de
sortir. Ou éventuellement sur la route, tout en pédalant.
Pour les plus Danois : “C’est la meilleure de toutes”.
Le vélo se pratique de 3
à 333 ans.
Environ. 
Le vélo est prioritaire.Vraiment. Couper la route à une
voiture, ne déclenche aucun bruit de klaxon. Manquer de
renverser un piéton le pousse à s’excuser.
Aux heures de pointe, il y a des bouchons : de vélos.
Il faudra attendre deux feux verts avant de pouvoir
traverser. 
Codes et habitudes
68
En somme, être cycliste, c’est éveiller ses cinq
sens et sa sensibilité au monde. Pédaler semble
activer en nous comme un instinct cycliste, où
l’on développe une nouvelle perception la ville et
de nous-même : il faut prendre en compte le vélo
comme une partie de notre corps si l’on veut bien
calculer les distances. Le point de vue réhaussé
et les sens exacerbés, le cycliste se sent puissant,
libre.
Être cycliste c’est être dépendant de son
environnement urbain et météorologique ; être
cycliste à Montpellier, ce n’est pas être cycliste à
Copenhague, où à New York. Être cycliste régulier,
c’est prendre des habitudes, créer des itinéraires
prédéfinis, c’est trouver les moyens d’économiser
l’énergie dépensée dans la désorientation pour la
concentrer dans nos pieds. Être cycliste, c’est être
maître de nos déplacements et de nos trajectoires,
c’est s’autoriser à moduler sa vitesse, c’est s’arrêter
pour discuter. Être cycliste c’est être piéton,
automobiliste, usager des transports en commun,
skateur et trottineur.
Être cycliste, c’est se déplacer, avancer, se
transporter, voyager, c’est être social, s’adapter à
la société, aux règles, aux codes qu’elle génère, et
surtout, aux autres.
70
ê..T.
R..E.
. s o
c . i .
a l
Être social, c’est entrer
en contact avec les
autres, c’est faire partie
d’un collectif, d’une
communauté, c’est créer
des liens, et se confronter
aux autres, c’est vivre en
société.
Sommes nous des êtres
sociaux, à vélo ?
72//Partagedelavoirie
partage
de la voirie
Les villes modernes sont multimodales, et
chaque mode de transport est unique en terme
d’expérience.Dansletramway,lebus,ouletrain,on
se laisse guider passivement, profitant du paysage
qui défile ou en lisant un livre. En voiture, à vélo, en
skate ou en seagway nous sommes maître de nos
trajectoires, concentré sur la route. Coincé entre des
personnes que l’on ne connaît pas, ou seul face aux
embouteillages, les déplacements pendulaires sont
une source quotidienne de stress.
Chaque mode de transports se distingue des autres
entermedesociabilisation.Enferméounon,àvitesse
modulable ou fixe, comment tous se partagent-il la
voirie ?
La bicyclette est un mode éminemment
urbain qui s’adapte à la ville
et respecte les autres,
provoquant peu d’accident.
-
Héran Frédéric - Le retour de la bicyclette. p.42
___________
Montpellier
2015
74//Partage-Lesautres,cesinconnus
Les autres, ces inconnus
Samedi après midi,
je monte sur mon vélo.
C’est une journée chargée en ville. A peine en
selle, je dois freiner, pour éviter des piétons qui
regardent ailleurs. Et je me demande, toujours,
ce qui peut bien se passer dans la tête des
personnes que je croise.
Cette vieille dame
avec son panier, qui ne travaille probablement
plus depuis plusieurs années, et qui choisit un
samedi, pour aller faire ses courses.
Ce groupe,
qui s’affole à mon passage pourtant lent : je
fais attention à ma vitesse, depuis qu’une
malvoyante m’a confié la peur qu’elle renssent
lorsqu’un vélo la dépasse.
Et ce scooter,
qui n’a pas l’air de comprendre, qu’il est censé
rouler sur la route. Pas sur le trottoir, ou les
pistes cyclables, non, la route.
Cet automobiliste
qui se met tout seul dans une situation
énervante en essayant de se déplacer avec son
engin en centre ville un samedi, et qui se défoule
sur moi, parce qu’il ne m’avait pas vu arriver.
Ces mecs à vélo,
qui roulent genoux dehors, clope au bec, passant
plus de temps accoudés au guidon que les pieds sur
les pédales.
Et puis ce chien,
un très beau chien, qui vit dans la rue avec son
maitre, ou l’inverse. Il fait mine de me sauter dessus
quand je passe à côté de lui.
Et ce garçon,
assis sur sa selle, vélo entre les jambes, qui discute
avec une jeune femme, pret à redémarrer.
Deboutsurmespédales,
J’aperçois le marché. Je calcule ma trajectoire, et me
faufile entre les piétons.
J’arrive au marché.
C’est agréable, de pouvoir ralentir, et de regarder les
étalages, sans descendre de ma selle. Mais il y a du
monde, je vais y être forcée.
Cohabitation
	 La bicyclette est étroitement liée à
son environnement, celui de la ville statique
(immeubles,routes,etc.),celuidesautresvéhicules
(plus particulièrement la voiture) et celui de la
société en général. Il est très clair aujourd’hui, au
regard des discours à la fois des automobilistes et
des associations de promotion de la bicyclette,
qu’un clivage s’est formé entre les cyclistes et les
automobilistes. La voiture est originellement,
un vecteur de liberté. Synonyme de réussite
sociale, elle est a été le moyen de transport
principal pendant des années, si bien que 13% des
Américains entre 18 et 34 ans avouent aujourd’hui
ne pas savoir faire du vélo(Courrier international).
Victime de son succès, elle est devenue en milieu
urbain, un véhicule lent et anxiogène, qui n’est
plus réservée aux classes les plus aisées malgré les
coûts qu’elle engendre.
	 Il n’est pas rare de rencontrer des
cyclistes vouant une haine à l’automobile. Tout
cycliste quotidien subit à un moment donné, une
expérience négative face à une voiture. Accidents
de la route, incivilités, stationnements gênants...
Les raisons sont variées et parfois inenvisageables
d’un point de vue extérieur. Une des grandes
peurs du cycliste est, par exemple, de se prendre
de plein fouet une portière de voiture qui s’ouvre
à la volée. Jamais un automobiliste ne penserait à
cela. Sauf aux Pays-Bas, où ils apprennent à ouvrir
leur portière de la main droite, ce qui les oblige
à se retourner et à regarder la route avant d’agir.
La principale raison de ce clivage entre voiture et
bicyclette est la vulnérabilité du cycliste.
76//Partage-Cohabitation
Enfermé dans sa boite métallique, l’automobiliste
ne réalise pas le danger qu’il représente pour nous.
Il est même intimement persuadé que le cycliste est
un gêneur qui n’a rien à faire sur la route et ce, que
l’automobiliste soit cycliste ou non. Lorsque je suis
au volant, je change de perspective, de point de vue,
j’oublierais presque la sensation que cela procure
d’être un cycliste à côté d’une voiture, et les vélos
m’ennuient. De son côté, le cycliste ne semble être
accepté nulle part, et se considère donc accepté
partout. La route est réservée aux voitures, les pistes
cyclables encombrées par des stationnements
intempestifs ou des véhicules à deux roues
motorisés, et le trottoir réservé aux piétons.
__
Capture d’écran
Recherche sur Twitter #garécommeunemerde
78//Partage-Cohabitation
	 La relation entre cycliste et piéton n’est
pas simple non plus. D’expérience, il semble
que dans les rues des villes où le vélo n’a que
peu de place définie, comme à Montpellier, les
piétons sont plutôt accommodants. Qui plus
est, Montpellier est une ville du Sud, une ville
sociale, et le vélo présente l’avantage de pouvoir
s’arrêter spontanément pour discuter avec un
piéton, ou rouler à son allure sur quelques mètres
pour finir la discussion. En revanche, dans des
villes où la règlementation est plus forte, comme
Copenhague, rouler dans des zones piétonnes est
très mal vu : les piétons se sentent attaqués, ils
considèrent que les vélos ont bien assez d’espaces
réservés pour eux, et n’ont pas à empiéter sur
leurs zones. Camille Pascal nous démontre ainsi
le conflit piéton-cycliste dans un article écrit pour
Valeurs actuelles « La dictature à vélo » :
« Le cycliste peut être de tous les milieux. Il y a
lagrandebourgeoiseinénarrablejuchéesurun
magnifique vélo noir hollandais hors de prix
(...) elle n’a pas le temps de vous éviter, car elle
estengrandeconversationavecsontéléphone.
On croise aussi l’étudiant nonchalant et mal
assuré qui godille dangereusement entre des
voitures dont il raye la carrosserie non sans
insulter abondamment leurs conducteurs
stupéfaits et impuissants. Il y a le sportif, enfin,
sûr de lui et de sa force (…). Ils ne sont pas
du même monde, mais ils appartiennent à la
même internationale puissante et redoutable,
celle des gens responsables qui sauvent la
planète en pédalant et qui ont donc, à ce titre,
droitdevieetdemort.Vousavezbeauprotester,
pauvre piéton, car vous utilisez vous aussi
une énergie “propre”, que vous ne polluez pas
plus que lui (…) Peine perdue, le piéton n’est
que de la piétaille aux yeux de ces nouveaux
chevaliers du bitume, pire peut-être, car celui-
civoitderrièrechaquepiétonunautomobiliste
honteux qui rase certainement les murs
pour aller récupérer sa voiture. Le cycliste a
désormais la préséance et partout il faut lui
céder le pas sous peine d’être traité comme
un ennemi déclaré de la couche d’ozone.
Le vélo n’est plus un moyen de locomotion, il
est désormais un signe identitaire, un choix
politique. Hier il était un sport, aujourd’hui il
incarne une idéologie totalitaire et en cela il est
devenu très dangereux. »
Ce texte révèle bien l’incompréhension qui peut
régner entre les usagers des différents modes
de transports. Il souligne également, non sans
amalgames et idées reçues, que l’utilisation
d’un transport au lieu d’un autre, révèle nos
engagements et nos valeurs, et transmet une
certaine image de nous aux yeux de la société.
80//Culture&économie
culture& économie
La bicyclette, redevenue un mode de transport
commun en ville, est aujourd’hui un marqueur
de culture urbaine, un phénomène de mode, une
conséquence de la crise économique et écologique.
La bicyclette est un fort marqueur d’identité.
Mais pour prendre plaisir à rouler, il faut le bon
équipement,carchoisirlebonvélo,facilitelaremise
en selle.
Une nouvelle économie se développe autour
de la bicyclette. À Montpellier, on compte une
boutique spécialisée pour 26 000 habitants tandis
qu’à Copenhague on en compte une pour 4 300
habitants. Du côté de la production en France, des
marques comme Caminade ou MFC (Manufacture
française du cycle) produisent artisanalement des
bicyclettes en acier tubulaire, mettant en avant
un savoir-faire français. Et les accessoires qui se
développent autour de la bicyclette ne manquent
pas : sacoches, sonnettes, lumières, protèges-selles,
cadenas, applications mobiles et GPS spécialisé...
Le vélo est aussi un phénomène social
de masse, un marqueur politique autant
qu’un symbole plastique
-
Zerbone Julien - 303 n° 136 consacré au vélo.
______________
Michael
Nÿkamptest
82//Culture-Phénomènessociaux
__________________
Sempé
Rien n’est simple
1962
84//Culture-Phénomènessociaux
	 La bicyclette a de tout temps été un
marqueur culturel et social, comme le résume
très bien l’illustration de Sempé. Aujourd’hui, la
bicyclette est résolument urbaine, et la diversité et
le nombre de cyclistes s’accroît. La perte de vitesse
de la voiture -littéralement- a poussé les habitants
des centres et hypercentres urbains à redécouvrir
la bicyclette, pour des raisons avant tout pratiques.
Entre prix du loyer et superficie des appartements,
on observe et déduit que cette population se
compose principalement d’étudiants et de familles
aisées. (Henry & Laslaz)
À chaque modèle sa ville emblématique, à chaque
époque et chaque usager son modèle phare.
L’objet lui-même est vecteur de codes sociaux et
d’appartenance, il suit les tendances. Ainsi, Londres
est représentée par le vélo pliable,partenaire
idéal du citadin en manque d’espace, usager des
transports en commun. LeVélib’ Parisien est adapté
aux touristes et cyclistes occasionnels, évitant les
problèmes de stockage et de vol. Copenhague est
envahiparles“Christianiabikes”,quirépondentaux
problématiques de transport de charge (enfants,
courses, etc.). Le vélo hollandais représente
Amsterdam, paisible et confortable. Bordeaux a
fait intervenir Philippe Starck, qui a conçu le Pibal,
un vélo-patinette à l’image de la ville : cycliste et
piétonne à la fois. New York est caractérisé par
l’usage du fixie, popularisé par les coursiers en
recherche de vitesse et de légèreté.
Il est depuis devenu, dans la culture occidentale, un
symbole fort de la culture urbaine et l’emblème du
mouvement «hipster», il est profondément urbain.
Sa légèreté et sa simplicité facilitent son stockage
-suspendus aux murs des appartements- et son
transport, dans les escaliers, par exemple. Ses
pneus très fins sont adaptés à une route lisse
et goudronnée, mais son manque de freins et
de vitesse le différencie du vélo de route ou
de course, et le cantonne à la ville. Son atout
esthétique principal est sa finesse et sa sobriété,
renvoyant à la célèbre citation de Ludwig Mies van
der Rohe «Less is more». Le “fixiste” est simple,
mais chic ; sportif, mais urbain ; jeune, mais pas
juvénile ; masculin, mais délicat. Bref, il est l’outil
idéal de l’homme moderne tout droit sorti d’un
magazine. Le vélo est devenu un accessoire de
mode à part entière, et diffuse une certaine image
de son propriétaire. Les grandes marques l’ont
bien compris, comme Célio (spécialisée dans la
vente de prêt à porter pour homme) qui crée un
partenariat avec un fabriquant de cycles pour
attireruncertainpublic,ouencoredes magazines
de décoration qui mettent en scène une multitude
de loft arborant un vélo élégamment accroché au
mur. On voit des bicyclettes apparaître dans des
contextes étonnants, comme des blogs culinaires
ou de mode  : elle est devenue « sexy », elle fait
vendre, elle fait rêver.
Cependant,loind’unesthétismesuperficielliéaux
codes sociaux du moment, une des fascinations
pour le fixie est provoquée par l’harmonie des
mouvements du corps et de l’objet, comme
l’évoquaitdesontempsAlfredJarryquiconsidérait
le vélo à pignon fixe comme son exosquelette, une
extension de lui-même. Si le cycliste ne ressent
plus son vélo comme un objet encombrant mais
entre en symbiose avec lui, il sera bien plus ouvert
au monde environnant.
Phénomènes sociaux
86//Ressentir-Souvenir
__________________________
Vélo décoré avec de la laine
devant un magasin de laine.
Montpellier,
2015.
88//Culture-Objetd’amour
J’adore les cadres de course,en acier tubulaire
fin.Mais même si je représente le vintage,je suis
parfois très attiré par des cadres neufs,j’admire le
travail des ingénieurs.J’ai arrêté de faire duVTT il
y a des années,j’habite en ville,ce type de vélo ne
correspond pas à ma pratique.Pourtant l’autre
jour un copain m’a montré son dernier achat,un
VTT flambant neuf.Il m’a dit le prix et j’ai vraiment
hésité à l’acheter.Pourtant,je n’en aurait eu
absolument aucune utilité,mais c’est un objet que
j’adore,et je peux devenir irrationnel.
-
Et les clients ?
La grande demande en ce moment,c’est des vélos
dont le système de vitesse et de frein sont très
discrets.Le but,c’est de s’approcher au maximum
de l’esthétique du fixie,mais sans ces inconvénients.
J’ai un client là,il va me prendre un vélo à 400
euros.Ce vélo ne va jamais rouler,je le sais.C’est
assez incroyable mais il est loin d’être le seul.
-
Tu penses que le vélo est un mode de vie ?
Un mode de vie oui,clairement.Mais je ne le pousse
pas à l’extrême non plus,je continue à boire de la
bière par exemple,alors que je sais pertinemment
que pour faire un litre de bière,il faut dix litres
d’eau.Il ne faut pas trop me lancer sur l’écologie,
je peux en parler longtemps.J’ai fait une école
de commerce,et mon mémoire portait sur le
développement durable en Afrique.Ensuite,je suis
parti un an en Espagne,dans une fac d’économie.
Ils nous expliquaient que nos choix actuels se
répercutent trente ans plus tard.Je pense que c’est
en partie ce qui m’a conduit ici.D’ailleurs,les choses
changent,c’est une très bonne chose.Certaines villes
comme Lyon remboursent jusqu’à 250€ pour l’achat
d’un vélo électrique,c’est plutôt bien,c’est un bon
début.
Comment fonctionne votre boutique ?
Tous les vélos que je vends,sont des vieux vélos que
je remets en état.Je les achète (les provenances sont
très diverses) puis je les revends.Je fais aussi de la
réparation pour les particuliers.Là,par exemple,
je répare un vélo pour une femme enceinte.Il était
dans un sale état.Je l’ai prévenue que le coût des
réparations serait sûrement équivalent à l’achat
d’un vélo neuf.Elle à réfléchi et m’a demandé de le
lui réparer,car il lui convenait très bien.J’ai acheté
de nouvelles roues,j’ai mis des vitesses,j’ai fait plein
de petites réparations.C’est pas courant,mais c’est
bien.Aujourd’hui on compte quasiment un vélo par
francais,tout le monde n’a pas besoin d’un vélo neuf.
Dans les années 60,tout le monde savait réparer
son vélo.Moi c’est mon grand père qui m’a appris.
Après j’ai dû passer mon CQP (certification de
qualification professionnelle) pour pouvoir en
faire mon métier,mais il en savait autant que moi
aujourd’hui. Le savoir s’est perdu avec le temps.
-
Qu’est ce que vous aimez dans le vélo ?
Au début,c’était la pratique,maintenant c’est la
mécanique.J’ai un esprit cartésien,logique,j’adore
ça. Avec le vélo,on profite du temps qu’on a,ce n’est
pas une course,c’est ce qui me plaît.Réparer des
vélo,c’est aussi mon côté écolo,je contribue à ma
manière à faire aller le monde dans le bon sens.
-
Et au niveau du design ?
Je suis très attiré par le design en général,et c’est
vrai que l’esthétique du vélo compte beaucoup.
Antoine
-
réparateur et vendeur de vélos
Montpellier
90//Ressentir-Souvenir
_____________________________________
Vélo de course Delta E, Micmo Gitane, 1983
“Invention / Design : Regards croisés”
Exposition des Sismo designer
pour le Musée des arts et métiers-Cnam
2015
92//Culture-Développement
Développement
	 Également lié à des mouvements
écologiques, économiques, le vélo n’est pas
seulement un marqueur esthétique, il est
également un marqueur politique. Chevaliers
sur deux roues, les cyclistes militants se battent
ensemble, pour faire changer la politique, et
l’organisation urbaine des villes modernes. La
pratique n’est pas nouvelle, et la bicyclette a déjà
bien souvent été associée à des mouvements de
militantisme et de développement. En 1965, les
activistes du mouvement «provo» à Amsterdam,
ont pour projet de supprimer les voitures des
villes, et de proposer des bicyclettes blanches
en libre service, comme des Vélib’ avant l’heure.
Volées très rapidement, ces bicyclettes sont
devenues cultes dans le monde des militants
sur deux roues, et auront au moins eu pour effet
d’initier à la logique de gratuité et de libre service.
Aujourd’hui, les villes ont besoin de passer
par l’augmentation de la sécurité, ou tout du
moins, par celle du ressenti sécuritaire des
cyclistes en ville avant de penser à une réelle
augmentation du nombre de citaclistes*. Dans
des villes qui semblent agencées pour une cible
masculine, jeune et en bonne santé (Raibaud)
un bon nombre de citadins ne s’y retrouvant pas
n’osent pas monter en selle. Par ailleurs, lorsque
l’aménagement d’une ville facilite la pratique du
vélo, elle facilite également l’accès aux personnes
âgées et à mobilité réduite par le ralentissement
du trafic et l’effacement des aspérités urbaines.
Le mot actuellement dans toutes les bouches est
celui de pistes cyclables, il en faudrait toujours
plus. À titre personnel, je ne pense pas que
l’augmentation de celles-ci soit une solution
idéale en France. Il n’est pas exclu que celles-
ci accentuent le clivage entre les vélos et les
autres modes de transports, ne facilitant pas une
cohabitation apaisée. Mais force est d’admettre
que leur présence sécurise les cyclistes, et
rassure les plus angoissés du trafic. En réaction
à ce phénomène, dans le but d’éveiller les
consciences et de faire réagir les élus locaux,
les membres de “la masse critique”, un collectif
Toulonnais, s’emploient à peindre eux-mêmes,
des vois cyclables.
* Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
Voie cyclable tracée au rouleau par “la masse critique”
2015
_
94//Culture-Développement
Un des combats principaux de toutes ces
associations est de faire reconnaître la place
de la bicyclette au sein des villes, lesquelles se
sont laissées envahir peu à peu par les véhicules
motorisés. La question aujourd’hui est alors :
comment peut-on trouver un terrain d’entente
pour que la ville appartienne réellement à tous ?
Pour cela, il est aujourd’hui primordial que les
militants soient soutenus par les élus. Nombre de
cyclistes français ont été désappointés face à la
réponse de Martine Aubry lors de l’inauguration
des vélos en libre service de la ville de Lille ;
lorsqu’on lui a proposé de monter à bicyclette,
elle a répondu : “Ah non, c’est ridicule !”. Associer
les mots «bicyclette» et «ridicule» dans la
même phrase induit une mauvaise vision de la
bicyclette, qu’elle qu’en soit la raison. Si les élus
s’y refusent, pourquoi la population devrait-elle
l’utiliser ? Il serait ridicule de demander aux élus
de se déplacer à bicyclette me direz-vous ? Dans la
ville de Copenhague, 63 % des députés se rendent
chaque jours au Parlement à vélo*.
Monter sur une selle dans un espace urbain,
c’est être un militant silencieux, mais actif. C’est,
consciemment ou non, faire partie d’un groupe,
d’un combat pour une cause plus grande : pour
une ville plus douce, plus saine, plus lente et
plus calme. Le cycliste militant s’inscrit dans un
mouvement bien plus grand, de promotion de
l’économie locale, d’une consommation plus
raisonnée, d’un ralentissement des rythmes de
vie et d’un hédonisme certain.
It’s just like
non-smokers
seeking
smoke-free space.
C’estcommelesnonfumeursen
recherched’espacesnonfumeurs.
FranziskaEichstaedt-Bohlig,GermanGreenParty
Mouvement provo
Cor Jaring, untitled, 1966.
_____________________
* Se reporter à la fiche “Copenhague”
96//Communauté
communauté
La bicyclette semble avoir un pouvoir fédérateur
chez ses usagers, qui ont tendance à se regrouper.
Animés par une passion commune, volonté de
se faire entendre, de partager des connaissances
et des expériences, les raisons des cyclistes pour
former des communautés sont nombreuses.
Le vélo a des effets
cognitifs imaginaires et sociaux puissants,
et peut rassembler autour de lui de véritables
communautés.
-
Zerbone Julien, 303 n° 136 consacré au vélo, p5
_______________
Mikey Muirhead
2012
98//Communauté-Rassemblements
Rassemblements
Quand on devient cycliste en milieu urbain, on
fait face à un phénomène qui semble parachuté
d’une autre époque et d’un autre environnement :
unrespectmutuelentrecyclistes.Enbonscitadins
français, nous étions bien habitués à cette douce
ignorance qu’ont les habitants des villes les uns
pourlesautres,maissoudain, monté sur une selle,
un semblant d’humanisme renait, et le fantôme
d’un sourire de politesse apparaît sur les visages
des cyclistes à l’arrêt. Comme un regard complice
qui sans le vouloir, va intégrer ce citacliste* tout
neuf à une grande famille.
Cette grande famille n’a en fait rien de particulier
si ce n’est rouler sur deux roues avec comme
seul moteur, notre coeur. Mais cette action qui
peut paraître anodine, induit un comportement
particulier. Il n’est pas rare d’observer que
la conversation s’engage presque aussi
naturellement entre deux cyclistes qu’entre deux
enfants qui jouent. Une des raisons évidentes
à ce rapprochement humain serait que le
vélo, en tant qu’objet visible, assure aux deux
personnes concernées un sujet de discussion
commun. Une autre serait liée au partage du
même environnement par les deux cyclistes,
qui pédalent au même moment, au même
endroit. Leurs sensations et leurs ressentis sont
partagés, leurs visions de la ville et de sa politique
de développement urbain sont probablement
formées à partir des mêmes observations.
Quand vous verrez passer
un cycliste rêvassant,
ne vous fiez pas
à son allure
inoffensive et bonasse :
il prépare
la conquête du monde
TronchetDidier-Petittraitédevélosophie-p193
* Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
100//Communauté-Rassemblement
	 Et de conversations en rencontres, des
groupes se forment. Les regroupements sont de
tous types : discussions, balades urbaines, vélos-
écoles, etc. Certaines associations ont une vocation
militante, comme MDB (Mieux se Déplacer à
Bicyclette) qui agit en Île de France depuis 40 ans.
De nouvelles initiatives émergent en permanence
et leurs capacités de pression avec.
Il faut le dire, pratiquer le vélo dans certaines villes
est une bataille. Une bataille contre son corps et
sa flemme, contre la météo, les automobilistes,
les mairies et leur service d’urbanisme, et plus
largement le « système ».
Lescyclistesseregroupentsousdesentitésauxnoms
inventés : Vélosophes*, Vélotaffeurs* et Biketivist*
s’emploient à la Vélorution*. Un cycliste régulier
devient facilement et rapidement convaincu que
son moyen de transport est le meilleur. Pour en
persuader le reste du monde, les arguments ne
manquent pas  : économique, écologique, sain,
durable, le vélo procure un sentiment de bien être
qui pourrait à lui seul permettre de panser certains
maux de la société moderne, le cycliste engagé en
est convaincu.
______
nc
Pinterest,
2015
Local du “Vieux biclou” - Montpellier_
* Se repporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
102//Communauté-Réparation
	 Rouler à bicyclette implique des accidents
de parcours : après avoir moi-même passé 10
minutesàremettreenplacemachaînedanslesrues
de Copenhague, je me relève les mains pleines de
cambouis. Quelques jours plus tard, j’ai pu voir un
homme dérailler, sortir un gant en latex de son sac,
remettre la chaine, et repartir. Ainsi, connaitre les
bases mécaniques d’une bicyclette permet d’éviter
tout désagrément. Le mécanisme d’une bicyclette
est simple, et nous sommes tous de potentiels
réparateurs de vélo, et nous avons appris avec nos
parents ou grands-parents, seuls, ou encore grâce
à une association. C’est d’ailleurs ce qui lui permet
d’avoir une durée de vie quasi illimitée.
	 “Le Vieux Biclou” est le seul atelier
d’autoréparation associatif basé à Montpellier.
Ses membres s’engagent à partager leur savoir-
faire avec les autres adhérents. Leur but, c’est la
Vélonomie : “Être autonome avec son propre vélo”.
Leurs adhérents sont principalement des usagers
réguliers, qui pratiquent en ville, parcourent moins
de 5Km chaque jours. L’association répond à un
besoin d’espace de ces citadins qui vivent pour
la plupart dans des appartements. Les membres
parlent d’une “grande famille”, où l’entraide est la
base. La Vélonomie, c’est orienter les usagers vers
le bon choix de vélo en fonction de ses besoins, lui
apprendreàleréparerluimême,l’aideràl’entretenir
et parfois le diriger vers un vélociste*, lorsque ses
besoins ne sont pas compatibles avec les pratiques
de l’association. Il y a des permanences plusieurs
fois par semaine, ce sont des membres bénévoles,
qui se portent volontaires pour surveiller l’atelier et
conseiller les autres adhérents.
Réparation
L’associationbénéficiededonsdevieuxvélosabîmés,
de la part d’Emmaüs ou de la cité universitaire. Ils les
réparent ou les démontent, puis ils trient les pièces.
Ils récupèrent ce qu’il peuvent puis envoient le reste
au recyclage. Des pièces détachées sont rangées
un peu partout dans la pièce. Des instructions
sont accrochées au mur. Chaque pièce a un prix,
l’association fonctionne sur la confiance. Une fois par
mois a lieu un “apéro démontage”, et tout le monde
s’y met, pour remettre en ordre l’atelier.
Le directeur m’explique : les statistiques des dernières
années montrent une majorité grandissante
d’hommes sur les cinq cent cinquante adhérents
que l’association compte. En revanche, il y a une
activité sur laquelle on retrouve principalement des
femmes : la “vélo-école” et les sessions “vélo en ville”.
Accompagnées d’un membre de l’association, les
adhérentes peuvent alors participer à des sessions
d’apprentissage et de ré-apprentissage du vélo. Des
balades en milieux urbains sont organisées afin
de rassurer et d’éduquer les adhérents, face à la
circulation urbaine. Lors de ces sessions, l’important
est en premier lieu de rassurer, mais aussi de faire
découvrir les itinéraires sécurisés qui existent en
ville. Entre Zone 30 et pistes cyclables, il est tout à
fait possible de rouler dans Montpellier en évitant
au maximum de croiser des voitures. Seulement,
cela demande de changer sa vision de la ville et son
itinéraire habituel. Comme l’explique le directeur
de l’association, il faut apprendre à “conduire avec
ses oreilles” et apprendre de nouveau itinéraires.
Conduire en ville à bicyclette devient ensuite une
habitude.Ainsi,lesmembresdel’associationconfient
se retrouver parfois face à des impasses lorsqu’ils
conduisent une voiture à Montpellier, trop habitués
à leur itinéraire cycliste.
* Se repporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
104//Communauté-Réparation
_______________________________
Local du “Vieux Biclou” - Montpellier, 2015
106//Communauté-Rythme&humanité
rythme & humanité
	 L’utilisation de la bicyclette pour des
déplacements utilitaires est un moyen facile et
efficacederéduirenotreconsommationenénergie.
Les citadins sont souvent pressés, entraînés par le
rythme urbain. De plus en plus de mouvements
contestataires qui visent à ralentir cette cadence
apparaissent. Le mouvement “Slow”, par exemple,
qui s’applique à tout : slow food, slow management,
slow money, slow art, slow city, slow tourism, slow
parenting et même slow sex. Cantonnons nous au
slow city.
le vélo a la cote. Devenue une préoccupation
mondiale, la bicyclette rassemble désormais tout
autour du globe, avec la WNBR (World Naked Bike
Ride) depuis 2004. La WNBR s’inscrit dans ces
mouvements issus des cultures hippies, mais elle
rassemble pourtant énormément de participants ;
peut-être est-ce dû au côté amusant et provocateur
de l’action qui consiste à faire le tour de la ville en
tenue d’Eve (ou Adam), assis sur une selle. Même
si je doute que, pour les hommes comme pour
les femmes, cette position soit réellement une
démonstration d’harmonie et de bien-être du
cycliste sur sa bicyclette, cette manifestation a pour
but, entre autres, de montrer la vulnérabilité des
cyclistessurlaroute,etdeprotestercontrelaculture
automobile, en envoyant un message positif, de
paix. Le fait d’être nu renvoit à son côté utopiste, et
hippie. L’aspect provocateur de l’événement a aussi
pour particularité de montrer qu’il est possible de
pédaler en ville, et qu’un bon nombre de personnes
le font déjà.
____
Le slow n’est pas une perte de temps mais
une manière de vivre les choses en conscience.
Il faut prendre son temps pour mieux
prendre son pied.
Menétrey & Toninato - Slow life - Clès
____
Selon l’adage “ce n’est pas la destination qui
compte, mais le voyage”. La bicyclette est un des
moyens qui permet de profiter du voyage, sans
oublier pour autant sa destination. Le changement
de temporalité et d’environnement que propose la
bicyclette offre à son utilisateur une nouvelle vision
de la ville, de la vie. Utopistes et rêveurs de tout
temps ont toujours vanté les bienfaits de celle-ci,
mais l’être humain aime le progrès, et la voiture a
été privilégiée pendant des décennies. Aujourd’hui
World Naked Bike Ride - Bruxelle_____________________________
108//Communauté-Rythme&humanité
	 Dans un esprit moins utopiste et
plus actuel, on observe que la bicyclette entre
aujourd’hui dans une logique d’économie
participative. Au Danemark, on peut trouver une
multitude de groupes Facebook dédiés à la vente
de vélos d’occasion. Les réseaux sociaux jouent
un rôle dans le développement de cette nouvelle
mobilité, en facilitant l’accès aux données, en
connectant des passionnés de toutes parts du
pays, ou en permettant de créer des événements
rassembleurs. La dernière initiative en date qui
s’inscrit dans l’ère de l’économie collaborative
(au même titre que Airbnb) c’est : Splinlister, une
plateforme d’échange qui permet à chacun de
mettre son vélo en location, pour une journée
ou plus. De son côté, reprenant le principe des
VLS, Philock vous vend un cadenas géolocalisé,
accompagné d’une application mobile. Il suffit
d’accrochersonvéloquelquepartaveccecadenas,
de communiquer votre code à l’application, et elle
se charge de lui trouver des locataires. En bonus,
le cadenas fait office d’alarme en cas de vol.
	 Plongé sans protection dans l’univers
urbain,lecyclisteestsensibleàsonenvironnement.
Visible, il prête attention aux regards que vont
porter ses concitoyens sur lui. Le cycliste militant
qui porte un regard sur le monde et son évolution,
agissant en conséquence par l’usage d’un mode de
déplacement doux, durable parce que réparable
quasiment à l’infini, et non polluant, est un être
profondément social, car inscrit dans une société,
conscient de son évolution.
Traversant les âges, les usages et les classes sociales,
la bicyclette semble participer à une grande vague
d’humanité. Elle nous amuse, nous rend service,
nous regroupe et nous divise. Elle est un objet
marqueur de son temps.
Aux énergies fossiles
préférez
l’énergie musculaire
DumontRené-candidatvert,1974.
110//Conclusion
	 Montravailestconstituéd’unemultitude
d’éléments de réponse à la problématique
énoncée dans l’introduction, qui se complètent
et s’entrecroisent. Deux hypothèses ont été
formulées,soulevantl’idéequeleplaisirprovenait
d’une part, de l’effort physique et des sensations
ressenties, et d’autre part, d’un aspect social de
l’objet. Ainsi, deux réponses complémentaires se
dessinent.
Rouler : un plaisir, qui dépend de
l’environnement urbain.
Il semble que le plaisir que procure la bicyclette
soit avant tout physique, et lié à l’objet. En
revanche, il dépend de l’environnement urbain.
La perte de repère et le stress, causés par un
aménagement médiocre ou inexistant, altère la
sensation de bien être normalement éprouvée.
Le vélo est un objet social qui peut
transformer le rapport du citadin
avec son concitoyen.
Bien que les personnes rencontrées ne l’aient
jamais formulé explicitement, l’aspect social de
labicyclettedemeureunanimementapprécié.En
effet,lecontactavecautruiestfacilitéparledéfaut
d’habitacle, et les cyclistes peuvent aisément
s’adapter aux rythmes des piétons comme
des automobilistes. Cependant, l’engagement
communautaire et contestataire n’est pas une
caractéristique propre au vélo. Bien souvent,
les personnes rencontrées ont naturellement
tendance à s’engager dans le monde associatif.
r
t-
Les autres se regroupent par nécessité, face
à un système politique qui les ignore. Les
Danois par exemple, ne considèrent pas le
vélo comme un sujet de discussion, ou un
objet de plaisir particulier, comme si l’aspect
social comme physique avait disparu. De son
côté, Aline Cavalcante, la cycliste de Sao Paulo,
évoquait le plaisir de rouler, de sentir le vent
contre son visage, de se défouler, comme l’une
des raisons qui l’ont poussée à continuer de
se déplacer en vélo. Aujourd’hui, elle affirme
apprécier l’esprit communautaire qui règne
dans son association.
L’aspect social ou physique de la bicyclette est
plus ou moins présent selon les personnalités
et sensibilités de chacun. C’est d’ailleurs ce qui
a fait la force et la faiblesse de ma démarche,
car les personnes interrogées ne représentent
qu’un faible échantillon de la masse cycliste
de Copenhague comme de Montpellier.
Mais apporter une réponse partielle à la
problématique posée est inhérent à mon
approche, car les réponses possibles sont
aussi nombreuses que les citadins cyclistes.
En outre, la mise en place d’un questionnaire
en ligne à produit l’effet inverse. J’ai pu obtenir
cinq cents réponses en l’espace de vingt
quatre heures. C’était un bon moyen d’obtenir
rapidement des données chiffrées, mais les
réponses libres sont quasiment impossibles à
analyser. Une part de mon travail a donc été de
trouverunéquilibredanslaquantitédematière
à analyser. J’ai choisi de garder la diversité des
propos et la personnalité de chacun par la
retranscription d’entretiens, mettant parfois
de côté des propos hors contexte, esseulés ou
les exceptions.
112//Conclusion
	 Lors de mes démarches sur le terrain,
seule une personne a été désagréable, toutes les
autres se sont montrées disponibles et ouvertes.
Je n’ai cessé d’être surprise par les connaissances
sur le sujet de chacun des cyclistes rencontrés : la
majorité des cyclistes français portent en eux des
valeurs, et savent parfaitement pourquoi ils ont
choisi ce mode de transport. Bien souvent, les
entretiens étaient en fait de réels échanges, nous
étions mutuellement intéressés par le point de
vue de l’autre. Ce travail m’a permis d’apprendre
beaucoup sur le plan théorique et humain. D’une
part, j’ai fait face à des difficultés d’organisation et
de hiérarchie des informations, me laissant parfois
impressionner par un nombre trop important de
lectures qui semblaient déjà couvrir largement le
sujet “vélo”. D’autre part, j’ai pu observer à quel
point les personnes concernées et en particulier les
vélocistes sont des experts dans le domaine, et une
source d’information remarquables, de véritables
passionnés.
	 Malgré l’indifférence apparente des
habitants de Copenhague pour la bicyclette, on ne
peut nier que le vélo rythme leur quotidien. Elle a
d’ailleurs très certainement contribué à certaines
observations que j’ai pu faire là bas : très peu de
personnes en surpoids, des rues peu bruyantes, la
neige n’est pas maculée de pollution, et le climat
général de la ville est décontracté et serein.
Adapter la ville à la bicyclette pour
que la nécessité, ou la contrainte de
se déplacer, devienne le plaisir d’un
sport quotidien.
	 Il revient aux villes et à l’État de faciliter
l’utilisation de la bicyclette en ville, et les moyens
d’atteindre ce but sont variés : aménagement
d’infrastructures cyclables, avantages fiscaux
et économiques, aménagement des horaires
de travail, etc. N’oublions pas que Copenhague
n’était à l’origine pas plus “cycliste” que Paris,
mais près de soixante ans ce sont écoulés depuis
le début d’une politique en faveur du vélo à
Copenhague.
En France, le changement semble s’amorcer
avec des villes comme Nantes et Strasbourg, qui
agissent pour rendre les milieux urbains plus
durables en faisant la promotion des mobilités
douces. Cependant, le renouveau des cités est
un long processus, et il me semble que c’est aussi
aux citadins d’adapter leur ville dès à présent.
Montpellier, bien que déjà engagée sur la voie
du changement, n’est pas encore parfaitement
adaptée à l’usage quotidien du vélo, et c’est une
source d’inspiration quotidienne pour moi.
Ce travail m’a permis de dégager les principales
difficultésauxquellesfontfacelescyclistesactuels
dans les rues de Montpellier : stockage, incivilité,
méconnaissance du code de la rue, et manque
d’aides gouvernementales. Cela m’a également
permis de comprendre plus précisément à quel
point l’usage du vélo en ville est relatif à des
problèmes de société, d’une nouvelle économie
collaborative, basé sur des principes écologiques
et durables, et plus largement son aspect
révélateur d’une démocratie, ou chaque citadin
est acteur d’une société en devenir. C’est sur ces
observations, et en m’appuyant sur le travail de
terrain déjà effectué, que je peux aujourd’hui
imaginer une multitudes de solutions pour
simplifier le quotidien des cyclistes…
114
The traffic jam
is
the solution
Lesembouteillagessontlasolution
-
RaquelRolnik,professeurd’urbanisme
BikeVScars
116//Bibliographie
Ouvrages
BERTHO LAVENIR, C. Voyage à vélo : Du vélocipede au
velib’. Paris : Paris bibliothèques. (2011) - 127p
-
COLLECTIF. Pour des espaces publics ordinaires de
qualité. Paris : Gallimard/Fnau. (2014) - 128p.
-
URRY, J. Sociologie des mobilités. chap : Le voyager du
corps ; Les sens. Paris : Armand Colin, U sociologie (2005)-
256p
-
RUBINI, C. La ville mobile. Saint Etienne : Cité du design
édition. (2012) - 208p.
-
HÉRAN, F. . Le retour de la bicyclette : Une histoire des
déplacements urbains en Europe, de 1817 à 2050. Paris : La
découverte. (2014) - 255p
-
DALLONI, M. Le vélo. Chap 100 : Pourquoi le vélo ça ne
s’oublie pas. (googlebooks) [en ligne]
-
DELERME, P. La Première gorgée de bière et autres plaisirs
minuscules : La bicyclette et le vélo. nc : Gallimard. [en
ligne]
-
FOTTORINO, E. Petit éloge de la bicyclette. Novoprint :
Gallimard, Folio- (2007) 135p.
-
SICH et al. Steel n°11. Paris : Steel. (2015) 114p.
-
TRONCHET, D. Petit traité de vélosophie. Paris : PLON.
(2014) -199p
-
ZERBONE et al. Vélo. Nantes : 303. (2015) 119p.
Articles
ALBY, J. Mon fixie, mon amour. Citazine [en ligne],
(2012). <http://www.citazine.fr/article/fixie-amour-
cyclisme-sport> (5 octobre 2015).
-
ARLANDIS, F. La rue, fief des mâles. Le monde culture
et idées [en ligne], (2012) <www.lemonde.fr/culture/
article/2012/10/04/la-rue-fief-des-males_1770418_3246.
html>. (15 novembre 2015).
-
CASSELY, J-L. Comment le vélo est redevenu un sujet
politique. Slate [en ligne], (2014) <http://www.slate.fr/
story/91051/velo-en-ville-luxe-distinction> (26 octobre
2015)
-
HÉRAN, F.Le vélo, une solution d’avenir ?
MICHAUD, V. Pédaler pour mieux rouler.
Sciences humaines n°40 (Ville durable) - (Automne
2015)
-
HENRY & LASLAZ. Politiques publiques et
embourgeoisement des centres à Annecy et Chambéry :
prémices de centralités sélectives en ville moyenne ?
Métropolitique [en ligne], (2014) < http://www.
metropolitiques.eu/Politiques-publiques-et.html >(5
novembre 2015).
-
JORDAN M. Deux-roues, quel supplice. Courrier
international n°1290 - (14 Juillet 2015), [extrait de the
wall street journal New york]
-
MENÉTREY & TONINATO. Slow Life : vers de beaux
lents demains. CLES [en ligne], (nc). <http://www.cles.
com/enquetes/article/slow-life-vers-de-beaux-lents-
demains> (25 octobre 2015)
118//Bibliographie
PASCAL, C. La dictature à vélo. Valeurs actuelles [en
ligne], (2014) <http://www.valeursactuelles.com/
societe/la-dictature-a-velo-46444>. (26 octobre 2015).
-
RAZEMON O. Ces militants qui dessinent de
fausses pistes cyclables. Le magazine du monde [en
ligne], (2012). <http://transports.blog.lemonde.
fr/2012/11/18/ces-militants-qui-dessinent-des-
fausses-pistes-cyclables> (30 octobre 2015).
-
STARCKMAN & SCHOW. Cultural probes. Design
research techniques [en ligne], (nc) <http://
designresearchtechniques.com/casestudies/cultural-
probes/> (5 décembre 2015).
-
NC. Spinlister : et si vous partagiez votre vélo ?. Futur
Mag, Arte tv [en ligne], (2015). <http://www.arte.
tv/magazine/futuremag/fr/spinlister-et-si-vous-
partagiez-votre-velo-futuremag> (20 septembre 2015).
-
N-C. La ville sociale : humaine avant tout. Silex ID n°04
(La ville) - (Été 2015)
Vidéos
GERTTEN F. (2015) Bike VS cars. WG Film AB
[projection]
-
PANG. Vélorution. [youtube] (2014) <https://www.
youtube.com/watch?v=3M05VQpQgqs>( 2 décembre
2015)
-
TATI, J. Jour de fête. Cady-Film /Francinex. (1969)
-
VÉDRINE L. La reine bicyclette : histoire des francais
à vélo. Talweg production. [vimeo] (2013) < https://
vimeo.com/65131629> (22 aout 2015)
-
VASAK ET AL. Portland : bobo, bio, vélo. Arte G.E.I.E [en
ligne ] (2011) < http://artereportage.universpodcast.
com/episode/portland-bobo-bio-velo/> (15 septembre
2015)
Sites Internet
WORLD NAKED BIKE RIDE.
<http://wiki.worldnakedbikeride.org/> (20 octobre 2015)
-
CARTE DE FRANCE.
<www.cartesfrance.fr> (2 décembre 2015)
-
METEOFRANCE
<www.meteofrance.com> (2 décembre 2015)
-
SITE OFFICIEL DU DANEMARK
<http://www.denmark.dk> (5 décembre 2015)
-
EMBASSADE CYCLISTE DE COPENHAGUE
<http://www.cycling-embassy.dk/> (5 décembre 2015)
-
CAMIDANE
<www.caminade.eu> (24 septembre 2015)
-
VILLE ET VÉLO
<http://ville-velo.jimdo.com/> (25 septembre 2015)
-
LAROUSSE
<http://www.larousse.fr/> (4 octobre 2015)
-
ROETZ BIKE
<https://www.roetz-bikes.com/> (4 octobre 2015)
Pictogrammes
Auclair, P-L. / Boatman, E./ Chuchla, P. / Cresnar, G /
Fonseca, J,I. / Glaude, T. / Humphreys, L. / Kim, A,K /
Vidal, P
sur www.thenounproject.com
120//Tabledesmatières
Remerciements
Préambule 
Sommaire
Introduction
Partage de la voirie
	 Les autres, ces inconnus
	Cohabitation
Culture & économie
	 Phénomènes sociaux
	 Objet d’amour
	Développement
		
Communauté
	Rassemblement
	Réparation
	 Rythme et humanité
4
6
8
10
16
18
20
22
26
30
70
72
74
Ressentir
	 Souvenirs
	 Méchanique interne
	Environnement
	Vélosophie
Divagations : Montpellier
	 Portrait : Mathieu
	 (Dés)aménagement urbain
	 Trajet occasionnel
	 Intinéraire indéfinit
	 Emplacements indéfinits
	Trajetquotidien
	Intermodalité
Voie royale : Copenhague
	 Portrait : Isabel
	 Trajet quotidien
	 Aménagement cyclables
	 Vivre la ville des vélos
	 Codes et habitudes
Être cycliste Être social 68
Conclusion
Bibliographie
32
34
36
40
42
44
48
50
52
54
56
58
62
64
78
80
86
90
94
96
100
104
108
114
Fiches annexes :
	 Petit lexique cycliste.
	 Aperçus urbains
	 Ville de Montpellier
	 Ville de Copenhague
Touchées par des problématiques
liées à la pollution, la santé publique, l’espace
disponible, la congestion du trafic et le stress,
les villes contemporaines sont à la recherche de
solutions.
	 Mode de déplacement qui apourtant ses
contraintes, la bicyclette apparaît aujourd’hui
comme une solution choisie par un grand
nombre de citadins face à certains de ces
problèmes.
Comment la bicyclette modifie-t-elle nos modes
de vie ? Pourquoi, malgré les contraintes qu’elle
peut engendrer, est-elle souvent associée à un
sentiment de plaisir ?
Seuls les cyclistes le savent.
148 j 58 j10 - 15°
Montpellier
Résultats d’un questionnaire mis en ligne en octobre 2015 sur
Facebook,dansdes“goupes”destinésauxhabitantsdeMontpellier.
Personnes interrogées :
56,88 Km2
7-121 m x26 000 150 km
Ø
Pour vous, le vélo est synonyme de :
Non Oui
...pourdesdéplacementsutilitaires
(actuellement)
...commemoyendetransportprincipal
(sil’aménagementurbain
lepermettait)
Utilisation de la bicyclette...
Copenhague
88,25 Km2
2-12 m x569 555 390 km
101 j8°
Chaqueannée,deuxfoisplusdekilomètressontparcourusàvélo
qu’enmétro
50 % des habitants de Copenhague se rendent sur leur lieu
detravailàvélo.
63%desdéputésserendentchaquejouràvéloauParlement,
situédanslecentre.
AucentrevilledeCopenhague:
560 000520 000
70%pensentquefaireduvéloaffectel’atmosphereurbaine
Lesraisonsdeshabitantsdecopenhaguepourfaireduvélo
Résultatsd’uneenquête
publiéeenMai2015
parlavilledeCopenhague,
Administrationtechnique
etenvironementale,
mobilitéetespaceurbain.
Sentimentdesécurité:
Cequ’ilfaudraitchangerpourqu’ilssesententplusensécurité
Vies, villes et vélos - mémoire de DNSEP, 2016
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  • 2. Zoé Bonnardot Mémoire de fin d’études rédigé sous la direction de Miguel Mazeri École des Beaux-Arts TALM, site Le Mans, 2015 -2016
  • 3.
  • 4. 6//Remerciements L’écriture d’un mémoire de master nécessite d’être bien entourée, et je tiens à remercier toute les personnes qui m’ont aidée, d’une façon ou d’une autre. Tout d’abord Miguel Mazeri, pour avoir pris le temps de me guider malgré mon éloignement géographique. Mais également Didier Cornille et Thomas Watkin pour leurs conseils avisés, ainsi que Ronan le Régent pour sa patience et ses astuces. Je remercie également Erwin, Fanny, Mareva, Mathieu, Alice, Camille, Domitille, Isabel, Melanie, Antoine et toute l’équipe du “Vieux Biclou” pour m’avoir accordé leur interêt et leur temps. Mes plus sincères remerciement à mes proches, qui m’ont accompagnée et soutenue quand les trajets en vélo ne suffisaient plus à m’apaiser.
  • 5. 8//Sommaire Préambule -------------------- INTRODUCTION CONCLUSION ----------------- Montpellier Copenhague Petit lexique cycliste Aperçus urbains (Fiches annexes) RESSENTIR DIVAGATIONS VOIE ROYALE ÊTRE CYCLISTE PARTAGE COMMUNAUTÉ CULTURE ÊTRE SOCIAL
  • 6. 10//Préambule 3 ans La bicyclette, je l’ai découverte tôt, comme tous les enfants de ma génération. Je me souviens de cette photo : un tricycle, un énorme casque rouge et moi. 6 ans Je me souviens de mes débuts sans petites roues, de mon frère me poussant dans le jardin, sur cette vieille bicyclette pour adulte. Forcée de choisir entre les deux, j’ai préféré la selle aux pédales. Les hématomes qui ont suivi m’ont confirmé que cela n’était pas le bon choix. 8 ans Premier vélo. Un VTT rose d’occasion. J’en étais folle. Je me souviens de ces weekend dans mon village, à suivre les autres enfants, debout sur ma selle. Je me souviens de cette journée de « formation » à l’école. Bras droit, bras gauche, pied à terre. Et ce gendarme qui ne cessait de m’appeler «Joé». Je me souviens de ma mère furieuse, qui avait surpris l’un de mes frères installé sur son vélo, accroché à une voiture, pour aller plus vite. 10 ans Nous vivons en appartement, les vélos sont à la cave. 14 ans Nouvelle maison, nouveau village, les vélos sont dans le jardin, prêts à l’emploi. 16 ans Nouveau vélo : 3 plateaux, 7 vitesses, un panier et des suspensions. Un vélo d’adulte ; mes genoux étaient ravis. Route, plage, digue, plage, route, et mes soucis de lycéenne disparaissaient. 17 ans Études, cité universitaire, appartement, ville : adieu, bicyclette. Avec une amie, nous rêvions de monter notre propre fixie. À défaut, nous avions acheté un vélo pliable, sur “leboncoin”. J’ai fini par le lui racheter. Je l’ai repeint, ai changé les pneus et ajusté la sonnette. Trop petit pour moi, il n’a pas servi souvent. 23 ans Toujours étudiante, je suis en échange Erasmus à Copenhague, la ville des vélos. Ville, vélo.Ville, vélo ? Ville, vélo ! Vélo, vélo, vélo. Il ne m’a fallu que quelques heures pour comprendre que j’allais devoir m’acheter un vélo, et 3 jours pour en posséder un. Sans vitesse, sans frein à main. Il était tout noir. Il semblait avoir traversé quelques décennies. Pendant 5 mois j’ai pédalé  : 30 min le matin, 30 min le soir. Sous la pluie, sous la neige, face au vent. Et j’ai râlé, quand il pleuvait. Et j’ai transpiré, tout le temps. Et j’ai eu très mal au jambes, au début. J’ai eu la flemme, parfois. Mais je n’ai jamais envisagé de me déplacer autrement. Plus économique et plus rapide que les transports en commun, c’était un investissement vite rentabilisé. Et la contrainte s’est transformé en plaisir.
  • 7. 12//Introduction Les phénomènes humains, de masse et de société ont quelque chose de fascinant. J’ai toujours cherché à comprendre nos comportement, notre relation aux autres, et aux objets que nous créons. La collection fait partie de ces phénomènes étranges, cette obsession de garder et de collecter tout et n’importe quoi, de la capsule de bière aux montres de luxe, et cela sans raison apparente si ce n’est celle de posséder, d’exposer, de cumuler. S’approprier puis dévoiler ; c’est exactement ce que j’ai cherché à faire. Formée à observer la société et l’espace urbain, à penser le monde au travers de la création, ce qui m’a le plus marqué lors de mon expérience de cinq mois dans la ville de Copenhague à été la bicyclette. Elle occupe une place centrale dans le paysage urbain et social de la ville. Devenue cycliste régulière pour des raisons principalement économiques, j’ai finit par y prendre goût. Je me suis alors demandé quelles étaient les motivations des autres cyclistes pour l’utiliser tous les jours. En septembre 2015, j’ai eu l’occasions de voir le film““Bike vscars”deFredrikGerttenàl’institut Suédois de Paris. Une des protagonistes, Aline Cavalcante, est Brésilienne, et réside à Sao Paulo. Venue en ville pour étudier avec très peu d’argent, elle explique avoir choisi le vélo par défaut, puis y avoir très rapidement pris goût. Elle a monté une association pour promouvoir la bicyclette, à Sao Paulo, et lutte contre l’insécurité des cyclistes. Séduite par son engagement, j’ai réalisé plus tard que toutes mes interrogations se retrouvaient finalement autour de ce témoignage.
  • 8. 14//Introduction C’est par une recherche empirique que j’ai choisi de développer une, ou plutôt des réponses à cette question, à la manière d’une compilation, d’une liste non exhaustive. Adoptant une démarche abductive, je n’ai eu de cesse d’osciller entre travail de recherche, d’analyse et de terrain. Les connaissances théoriques acquises de concert avec un travail d’observation et d’entretiens m’ont permis de structurer mon propos, et de trier les informations récoltées. Ansi, l’ensemble des informations présentes dans ce mémoire forment une collection personnelle. Les textes présentés, aussi divers soient-ils en terme de médiums et de thèmes, ont été choisis de sorte que chacun d’entre eux apporte une part de réponse en soi. Ayant vécu à Copenhague et à Montpellier en 2015, j’ai choisis d’utiliser ces deux villes pour leur dimension représentative. Différentes d’un point de vue démographique, culturel, météorologique, politique et économique, je n’en ferai pas une étude comparative. Meslecturesontcommencéavecdesouvrages centrés sur la bicyclette, notamment celui de Frédéric Héran qui questionne la place de la bicyclette en ville aujourd’hui, et celui de Didier Tronchet, qui traite des ressentis du cycliste en milieu urbain. Puis j’ai élargi mes recherches, me tournant vers des oeuvres cinématographiquescommecellesdeJacques Tati, des reportages et documentaires, mais aussi beaucoup d’articles de presse en ligne. De la contrainte au plaisir, de l’indifférence à la délectation, comment la bicyclette devient-elle un mode de vie ? Dans des villes toujours plus peuplées, il est d’actualité de questionner la gestion des flux humains en leur coeur, ainsi que l’impact écologique et économique de nos modes de déplacement. La bicyclette semble s’annoncer en Europe comme l’une des solutions possibles à certains problèmes de pollution, de santé, d’espace disponible, de congestion du trafic et de stress. C’est d’ailleurs ce qui m’a conduit à employer le mot “nécessité” : Nécessité : caractère inévitable, exigences. Dont on ne saurait se priver, qui est indispensable. De fait, nous ne saurions nous en priver car nous devons nous déplacer, et le vélo pourrait rapidement devenir inévitable pour une majorité de citadins. Mais la nécessité n’impliqueenaucuncaslanotiondedélectation. Et c’est justement ce qui m’a intrigué. Pourquoi le cycliste prend-t-il plaisir à rouler ? Il semble que la bicyclette ait quelque chose d’attrayant, de plaisant, comme si, exagérons, elle nous envoûtait. C’est de ce constat que provient le mot “charmante” évoqué dans le titre : Charmante : Qui charme, qui est agréable à regarder. Attrait exercé surquelqu’un. Qualité de ce qui est gracieux, agréable. Quel est donc le charme qu’exerce la bicyclette sur les cyclistes, qui les pousse à changer leurs habitudes ?
  • 9. 16//introduction “Les sondes culturelles utilisent une collection d’outils, d’artefacts et de tâches destinées à pousser l’utilisateur à regarder et à penser son environnement d’une nouvelle manière. Les réponses engendrées initient un dialogue entre le designeretlegroupe.Avecuneintrusionminimum, les chercheurs peuvent glaner des informations à propos de l’environement des participants, qui peuvent aider à identifier des problèmes,découvrir de nouvelles opportunités,et inspirer le concepteur avec de nouvelles idées et solutions. Les “cultural probes” ont été développées par Gaver, Dunne et Pacenti en 1999, eux-mêmes inspirés par le mouvement situationniste. Cette technique ne suit pas une démarche scientifique, c’est une approche artistique, qui est caractérisée par l’irrationnel, le manque de contrôle,en vue d’obtenir l’inspiration, et ne peut être systématiquement analysée”. (traduit à partir d’un texte issu du site internet : designresearchtechniques.com) Parallèlement au travail effectué sur le terrain à l’aide des outils présentés, ce travail s’est cristallisé en deux parties bien distinctes : être cycliste et être social. La première partie engage les ressentis du cycliste lorsqu’il roule en milieu urbain, et a pour but de comprendre les effets et les conséquences de l’usage de la bicyclette sur notre sensibilité et notre perception du monde. La seconde, engage le cycliste en tant que citadin, et questionne son rapport au monde qui l’entoure, à la société. Ainsi, mon travail est un collage d’expériences et de données qui, rassemblées, transmettent des éléments de réponse à des problématiques sociales de manière sensible, car c’est par là que tout commence. Ce travail est orienté vers l’humain avec ses caractéristiques et sa sensibilité. La question soulevée relève du domaine de l’expérience personnelle de chaque cycliste. C’est donc naturellement vers eux, que je me suis tournée, empruntant aux sciences humaines et sociales plusieurs outils : Un questionnaire effectué sur Facebook m’a permis d’avoir des données chiffrées sur les pratiques cyclistes au coeur de Montpellier. - Des observations (les textes de couleur grise) issues d’un carnet de bord tenu au cours de l’année 2015 lors de mes immersions dans les deux villes énoncées, sont présentées sous forme de récit. - Des entretiens oraux ou manuscrits. (retranscrits en violet) Les premiers relèvent de l’entretien compréhensif, j’ai choisi de m’y rendre sans questions pré-écrite, laissant la discussion évoluer au grée des observations faites sur place et des réponses obtenues. Les entretiens envoyés par écrit en revanche, ont été pensés pour répondre à des questionnements et à des problématiques précises. - Les « cultural probes » (sondes culturelles), ont été la base d’un carnet nommé “Le vélo, ça vous fait quoi ?”, composé de quatre missions à réaliser sur quatre jours. Les personnes choisies devaient prêter attention à des détails particuliers durant leur trajet quotidien, puis relater leur expérience dans le carnet.
  • 10. 18 ê T R E CY C L I.. S T E Être humain, c’est ressentir, voir, toucher, c’est avoir un corps , une sensibilité, des sentiments,despensées,une réflexion, c’est apprendre, s’adapter,évoluer. Que transforme en nous la bicyclette, lorsque l’on devient cycliste ?
  • 11. 20//Ressentir Ressentir La bicyclette est un vecteur d’imaginaire qui met en jeu une dimension abstraite et inconsciente liée à l’objet et à la sensation particulière qu’il procure. Sentir et ressentir la ville à vélo, c’est avoir les sens en éveil et le corps en mouvement, c’est être furtivement présent, c’est prendre de la vitesse. Ces sensations propres à chaque cycliste, sont la basedenotreperceptiondelaville.Semettreenselle nousfaitchangerdepointdevue,deperspective.De nombreux facteurs rentrent en compte et, cumulés, ils nous apportent une appréhension nouvelle de la ville, de notre quotidien. L’émotion esthétique de la vitesse dans le soleil et la lumière, les impressions visuelles se succédant avec assez de rapidité pour qu’on n’en retienne que la résultante et surtout qu’on vive et ne pense pas. – Jarry Alfred - cité dans 303 n° 136 consacré au vélo. ____________ Montpellier 2015
  • 12. 22//Ressentir-Souvenirs souvenirs Bons ou mauvais souvenirs, ville ou campagne, tempérament agité ou calme, téméraire ou peureux, notre passé commun avec la bicyclette ainsi que notre personnalité va influer sur notre façon de pédaler en milieu urbain. La perte des roulettes correspond à un moment fort de la vie d’un enfant, on rentre dans la cour des grands, on gagne en indépendance. En France, une grande majorité de la population sait faire du vélo. C’est par l’usage que l’on s’approprie le vélo pour la première fois, et comme le dit l’adage “le vélo, ça ne s’oublie pas”. La bicyclette devient en grandissant un loisir. Les adultes responsables, ne montent plus à vélo. En tout cas, pas la semaine. Il y une dimension ludique, dans la pratique du vélo, qui nous renvoie à notre apprentissage, à notre enfance. Le vélo reste et restera, un vecteur d’imaginaire, un activateur de souvenirs, un jeu, malgré tout. Il y a effectivement peu de chances pour que l’on croise un homme en costume, effectuant une roue arrière sur le chemin du travail. Mais rien ne nous dit qu’à aucun moment, il n’en a eu envie. Blottiequelquepartentrelecerveaureptilien, celui de nos lointains ancêtres les poissons, etlecerveaunéo-mammalien, celuidesaustralopithèquesquenousfûmes, ilexisteraitunemémoirecycliste, queriennepeuteffacer... Dalloni Michel - Le vélo - chap.100
  • 13. 24//Ressentir-Mécaniqueinterne Le vélo fait partie de ces objets qui poussent notre corps à se mouvoir dans l’espace. Encela,ilestunsport.Loindemoil’idéed’évoquer le Tour de France qui d’une part, ne se déroule que peu en milieu urbain, et d’autre part, touche à un domaine sportif qui n’est pas le mien. Il n’en reste pas moins que la bicyclette nous pousse à dépenser de l’énergie. Au moins un peu. Il permet à celui qui l’utilise de décupler sa vitesse par la seule force de ses jambes. Une fois installé sur la selle, chaque membre de notre corps est sollicité. Notre première sensation va se retrouver au niveau du ventre; à la recherche d’équilibre, le jeune cycliste se verra tanguer, réveillant son centre de gravité et par la même occasion, son coeur, qui va aussitôt faire un bond. Plus tard, le cycliste aguerri partira à la recherche de la même sensation, en augmentant sa vitesse. Mollets, cuisses, fessiers, triceps, biceps, poignets et chevilles, orteils et doigts, le cycliste est sur le qui-vive, ses membres prêts à jouer leur rôle. Jambe gauche, jambe droite, jambe gauche. Un dénivelé s’annonce et ce sont les fessiers qui rentrent en action, les bras vont les accompagner dans l’effort. Inspire, expire, inspire, expire ; les poumons sont au maximum de leur activité, le cœur bat à plein régime, chaque pore de la peau du cycliste s’emploie à refroidir son enveloppe corporelle. Ses yeux sont rivés sur la route. Son cerveau le prie de tout arrêter. Ses jambes ne vont pas tarder à ne plus répondre de rien. Mécanique interne “Le vélo, ça vous fait quoi ?” Carnet de Fanny _ “Mouvement, vitesse, liberté !”
  • 14. 26//Ressentir-Méchaniqueinterne Arrivé en haut, le cycliste change totalement de posture. Assis, jambes et bras détendus, épaules relâchées. Les yeux se relèvent et observent la ville, la vue, les passants. Le vent frais vient caresser et sécher son visage. Son cœur frappe encore sa poitrine, accentuant toutes ses sensations. Les poumons mécontents se font remarquer. La gorge brûle. Le cycliste amateur se promet de ne plus jamais fumer. Le cerveau, enfin libéré de sa fonction de coordinateur, est totalement ouvert sur le monde extérieur. L’attraction terrestre fait son effet sur la masse, constituée du cycliste et de sa monture. Et il dévale la pente, à vitesse grandissante, réveillant les papillons dans son ventre. Heureusement,lequotidienducyclisteurbain n’est pas aussi intense qu’une côte impromptue, mais l’exemplerévèlelapotentielleintensitéphysiqueet sensorielle de la pratique. Ainsi, tout corps monté surunvélosembleprépareràaffronterl’inattendu. Le cycliste du dimanche, l’hédoniste de la pédale, ne sera pas épargné. Profitant bien plus longtemps de la descente, il se gardera bien de donner un coup de pédale supplémentaire. Ne l’oublions pas, la bicyclette est un outil de fainéant autant que de sportif. L’esprit du cycliste s’évade, rêve, crée.  L’automatisme des mouvements : “jambe gauche, jambe droite, jambe gauche...” met une partie du cerveau en veille. Paradoxalement et parallèlement, l’autre partie est en éveil : animé par un instinct animal, prêt à bondir au moindre danger. Voitures, piétons, feu rouge : le cycliste est alerte. A l’extérieur, on se déplace à vélo. Mais à l’intérieur, c’est le vélo qui nous déplace. TronchetDidier-Petittraitédevélosophie-p.41
  • 15. 28//Ressentir-Environnement L’environnement du cycliste est déterminant sur son comportement et son humeur, mais aussi sur son appréhension de la ville.Regardrehausséetvitessemaitrisée,ilestplus rapidequelepiétonetpluslentquel’automobiliste (hors heure de pointe). Sa perception de la ville est unique : il est le seul véhicule sans moteur autorisé à rouler sur la route, faute d’emplacement mieux défini. Mais il y est vulnérable. Environnement “Le vélo, ça vous fait quoi ?” Carnet de Fanny _ __ Tout corps placé sur un vélo voit son regard sur le monde déplacé. Tronchet Didier - Petit traité de vélosophie - p.41 __ Par stimulation des sens et nécessité, les yeux rivés tantôt sur la route, tantôt sur l’architecture, le cycliste même pressé, est en permanence conscient de son environnement. Les rues s’enchainent les une après les autres, la perception est fugitive. L’aménagement cyclable est chaotique dans bon nombre de villes françaises, et le cycliste est contraint de naviguer entre route et trottoir : il n’est jamais à l’abri de voir apparaître un bus sur les voies qu’ils partagent. “Çapuelesgazsd’échappement,monangoisse quotidienne:resterbloquéederrièreunbus...”
  • 16. 30//Ressentir-Environnement Les jours de beau temps, les jours où il prend le temps, le cycliste et son vélo se transforment en jeune couple amoureux, aux humeurs rythmées par les coups de pédales. Ils glissent sur la ville comme flottant au-dessus du trafic, cheveux au vent et roue libre, n’en retenant que le meilleur, trop heureux ensemble pour se laisser perturber par une voiture mal garée. Ces jours là, le cycliste sera plus à même, d’observer son environnement urbain, de se laisser enivrer par l’odeur de la rôtisserie ou le parfum de la boulangerie, d’être sensible au soleil sur sa peau et à la douceur de l’air, faisant fit de la pollution. Les sensations sont fugaces, mais bien présentes, elles sont diverses et particulières, propre à chacun, et à chaque ville. Un facteur déterminant du quotidien cycliste est la météo, qui influe notre humeur et notre vitesse. Plus ou moins bien équipés, les aléas de la météo n’atteignent pas tous les cyclistes de la même manière. Je me souviens par exemple, de mes trajets sous la pluie à Copenhague : goutte au nez, l’avant du jean trempé, les orteils pataugeant dans une petite piscine. Les Danois eux, protégés par leurs chaussures et pantalons étanches ne semblaient pas vraiment affectés par l’humidité environnante.Arrivéeàdestination,j’étaistrempée et énervée, ils étaient secs et joviaux. Ces jours-là, je n’étais pas très attentive à la ville. Ma vision était moins lointaine. Mon esprit plus préoccupé. Les jours de grand vent, le corps humain fait office de voile, et poussé par vent arrière, le cycliste file à toute vitesse avec un sentiment de puissance et de liberté. Par vent de face, nos instincts marins disparaissent. Le vent plein d’humour, s’immisce dans chaque rue de la ville pour se rassembler aux carrefours dans un tourbillon infernal. Doigts et orteils gelés. Les yeux asséchés, la peau du visage frappée par le froid, le cycliste est pris au piège. “La pluie, le froid, le vent, sont les éléments contraires à la pratique du vélo !” - Mareva
  • 17. 32//Ressentir-Vélosophie LIBERTÉ, semble être le mot d’ordre des cyclistes du dimanche comme des sportifs de haut niveau. La sensation que procure la bicyclette est particulière. Le cycliste change de perspective et de point de vue, de manière abstraite et concrète. À force de pratique le cycliste développe une philosophie propre à la bicyclette, ou au vélo. Vélosophie* __ À bicyclette, on est un piéton en puissance, flâneur de venelles, dégustateur du journal sur un banc. À vélo, on ne s’arrête pas : moulé jusqu’aux genoux dans une combinaison néospatiale, on ne pourrait marcher qu’en canard, et on ne marche pas.(...) Delerme Philippe La Première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules __ Dans un cas comme dans l’autre, c’est une philosophiedevie.L’unestrêveur,l’autrepragmatique, l’unveutdécouvrir,l’autrecombattre.Pourautant,aller autravailàvéloinduituncomportementnouveau. En surface, on perd la notion de compétitivité, tout comme celle de flânerie. La bicyclette devient un moyen d’accomplir une tâche précise : aller au travail. Un moyen oui, mais pas seulement. L’itinéraire est connu, le paysage urbain défile, la cadence est régulière. Le cerveau libéré de toute réflexion liée à l’activitée, l’esprit s’évade. Le trajet travail - maison se transforme alors en soupape, en sas de décompression, et les soucis provenant d’un côté comme de l’autre semblent seperdresurlaroute,entredeuxcoupsdepédale. “Pour résumer : Le vélo en ville, c’est la banane assurée :) Sentiment de liberté (toute nuancée !) dans les déplacements Vitesse (si pas de côtes !) Gain de temps Autonomie” - Mareva* Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
  • 18. 34//Divagations DIVAGATIONS Passage à Montpellier Montpellier*, huitième ville de France par sa population, est une des villes les plus actives du sud de la France. Ville méditéranéenne typique, elle est formé d’un centre historique piéton aux rues étroites et pavées, parsemées de palmiers. Le ciel y est généralement bleu, le climat y est doux, et l’espace public largement investi. La vie sociale a lieu à la terasse des cafés ou des restaurants, devant les bars ou dans la rue. D’autre part, la ville abrite énormément d’étudiants, il suffit de se balader dans le centre historique un soir de semaine pour s’en rendre compte. ___________ Montpellier 2015 C’est aussi l’occasion de retrouver une proximité avec la ville (...). La vitesse du vélo permet d’attraper beaucoup de réalités, d’informations sur l’espace - Michaud Véronique - Sciences humaines n°40 ___________ Montpellier 2015* Se reporter à la fiche “Montpellier”
  • 19. 36//Ressentir-Portrait Les débuts ? J’ai commencé à 2 ans comme loisir, puis j’ai commencé à l’utiliser pour me déplacer vers 5 ans. - Un vélo ? J’ai un fixie et un vélo de route. - Le vélo citadin au quotidien ? Je l’utilise en ville et au quotidien depuis 5 ans, depuis que je suis étudiant. - Pourquoi ? Je l’utilise pour aller de chez moi à la fac, c’est le plus rapide. - Et Montpellier, sur deux roues ? Les pistes sont agréables, tout le reste est désagréable. Les voitures, surtout. - Tu es plutôt... Rapide ! - Transpirant ou tranquille ? Transpirant, quand je suis en retard. - Pistes cyclables ou route ? Route. - Pluie ou tramway ? Avant, j’étais plutot pluie, mais j’ai fait une chute violente récemment, j’ai glissé sur les rails de tramway à cause de la pluie. Depuis, je prend le tram. Surtout pour aller à la fac, parce qu’il n’y à pas de douche là bas. - Une anecdote ? Il m’est déja arrivé de me faire chahuter par un automobiliste parce que je ne roulais pas sur la piste cyclable...sauf qu’il n’y en avait pas ! Mathieu 25 ans - vit à Montpellier depuis cinq ans
  • 20. 38//Divagations-(des)aménagementurbain Voies de tramway Piste cyclable Bande cyclable latérale Double sens cyclable (DES)Aménagement urbain Par la promotion des mobilités dites “douces”, les élus de la ville de Montpellier ont montré une volonté de repousser les voitures à sa périphérie. Les quatres lignes de tramway actuelles forment un réseau de cinquante six kilomètres complété par des lignes de bus, et le centre historique est entièrement dédié aux piétons et aux cycles. En ce sens, l’aménagement urbain laisse une place toute nouvelle à la bicyclette, qui profite des aménagements liés au tramway. Mais les infrastructures cyclables sont disparates et peu nombreuses, laissant les cyclistes se glisser dans un flou législatif Rebellesoucontraints,lescyclistes sefaufilent, esquivent, contournent. Ilspédalentpartout,tout le temps, peu importe le sens de la circulation ou la signalisation, roulant allègrement sur les voies réservées aux tramways. Les forces de l’ordre semblent conscientes du manque d’infrastructure adaptée, et j’ai la sensation que nous pourrions passer à côté d’eux vêtu d’un tutu, les fesses posées sur le guidon et les pieds sur la selle, sans qu’elles ne nous remarque. Ce qui n’est pas pour déplaire à une partie de la communauté cycliste, avide de liberté. 250 m Se reporter à la fiche “Aperçus urbains”
  • 21. 40//Divagations-(des)aménagementurbain “Je reconnais faire beaucoup d’incivilités en vélo et ne pas suivre le code de la route. Je prends des sens interdits. Je roule sur les trottoirs. Je ralentis aux feux rouges, parfois je m’arrête, mais s’il n’y a pas de circulation, je grille le feu. Je ne porte pas de casque, ni de gilet fluo. Je slalome entre les véhicules arrétés ou au ralentis” - Mareva, “Le vélo, ça vous fait quoi?” ______________ Montpellier - 2015
  • 22. 42//Divagations-Trajetoccasionnel Montpellier, 9h, mardi matin. Motivée, je décide d’aller faire les courses dans un magasin excentré. Après avoir traversé des travaux Je me retrouve derrière une file de 10 voitures qui attendent que le feu passe au vert. Fatiguée de respirer les vapeurs qu’elles dégagent, je passe sur le trottoir. Il est très étroit. Au croisement suivant Je décide de passer sur celui d’en face, pour être plus à l’aise. Les voitures n’ont toujours pas avancé. Arrivée au feu, je traverse une nouvelle fois et tourne à droite. Un tramway me barre la route. J’attends qu’il passe. J’avance, et me retrouve face à un flot continu de voitures. J’attends. Je traverse. Apparaît enfin une voie cyclable, étrangement tracée sur le trottoir. Un camion de livraison est garé dessus. Une famille avec plusieurs enfants marche sur la voie. Je me déporte. Maintenant une allure raisonnable, j’essaye d’éviter les piétons. Trajet Occasionnel Soudain, plus de voie. Je dois me diriger vers la droite. Sens interdit. Le trottoir est inexistant d’un côté, en travaux de l’autre. Le prochain croisement est loin. Tant pis, je ferai attention, je me lance à contresens. Parfois sur la route, parfois sur le trottoir, j’ennuie tour à tour piétons et automobilistes. Trois cents mètres plus loin, une masse plus bruyante et imposante que les autres arrive. C’est un bus, qui se déplace légitimement sur une voie qui lui est reservée, et qui vient subitement d’apparaitre. Le bus m’a dépassé, je me déporte dessus. Un autre bus. Coincée, j’avance entre cette énorme masse et ses petites soeurs. C’est très inconfortable. Un troisième bus apparaît. Prochedemadestination Je ralentis. Un courant d’air violent me déstabilise, suivit d’une forte odeur d’essence. Je suis arrivée et Copenhague me manque.
  • 23. 44//Divagations-Itinéraireindéfini Itinéraire indéfini L’aménagement cyclable de certaines villes peut facilement désorienter le cycliste. C’est très naturellement qu’il définira des itinéraires qui lui conviennent et s’y tiendra. Un des exercices glissé dans le carnet “La ville, ça vous fait quoi ?“ avait pour but de mieux comprendre l’importance pour les cyclistes d’un itinéraire défini et constant, ainsi que les conséquences d’une désorientation. Le participant devait emprunter un nouvel itinéraire matinal, et de relater l’expérience sur le carnet. Certains de ces carnets ont été distribués à des habitants de la ville de Nîmes, dont l’aménagement cyclable des voiries est quasi inexistante. Ainsi, Mareva et Domitille, toutes les deux cyclistes au quotidien se sont prêtées au jeu : il semble que l’expérience ait été pour elles deux, désagréable et dangereuse. “L’expérience fait appel au sens de l’orientation. On réfléchit, donc on est moins attentif à la circulation. C’est plus stressant de ne pas connaitre le parcours. On cherche des repères, le nom de rues, on cherche à apercevoir des lieux connus.” - Domitille “L’itinéraire habituel est le plus rapide, il emprunte une zone piétone très large. Cette tentative s’est avérée un véritable échec ! Beaucoup de ruelles étaient à sens unique, j’avais toujours en tête mon orientation dans ce dédale” - Mareva
  • 24. 46//Divagations-Emplacementindéfini Emplacements indéfinis Le sentiment d’insécurité et l’inconfort provoqué par le manque d’infrastructure peuvent se manifester également lorsqu’il est question de stockage. Un cycliste me confiait récemment : “J’ai refusé un super appartement au centre-ville, parcequ’ils ne me proposaient aucun endroit pour ranger mon vélo” Posséder une bicyclette en ville, implique de trouver un lieu pour la stationner. La législation française n’est aujourd’hui pas pensée pour les cyclistes, et il est courant que l’on nous refuse d’entreposer un vélo dans les parties communes d’un immeuble, sans justification particulière. À Montpellier, les bicyclettes sont accrochées partout sauf sur les quelques bornes à vélo, qui semblent d’ailleurs avoir été consciemment installées dans des endroits isolés, et par conséqent inutilisables, puisque plus facilement sujettes aux vols. Le vol de vélo est une pratique courante, dans les villes du monde entier. Des associations recensent par exemple 45 000 vols par an à Amsterdam, 15 400 à Rome, 1 900 à Copenhague, etc. Contrairement aux idées reçues, la plupart de ces vols sont effectués sur des bicyclettes mal accrochées, ou avec un cadenas trop fin. Mais les bicyclettes vraiment attirantes (chères ou à la mode) sont subtilisées, quel que soit le cadenas. ______________ Montpellier - 2015
  • 25. 48//Divagations-Emplacementindéfinis ______________ Montpellier - 2015 D’autre part, laisser un vélo dans les rues Montpelliéraines la nuit, c’est le laisser à la portée d’une jeunesse alcoolisée : roues voilées, selles volées et bicyclettes déplacées. La présence de “cadavres” de vélo, un peu partout dans les rues, donne à penser aux citadins que le vol de vélo est régulier et inévitable, ce qui ne les encourage pas à s’en acheter un. Le vol de vélo répandu partout, mais dans des villes comme Copenhague ou Amsterdam la présence d’infrastructures propres àlabicyclette,lesservicesquilesaccompagnent,la facilité d’achat et la présence massive de cyclistes permettent de contrebalancer l’inquiétude provoquée par le vol. Évidemment, pratiquer ne veut pas dire posséder. Cependant, le système de VLS (Vélo en Libre Service) de Montpellier, appelé “cyclomagg”, n’est ni entretenu ni mis en valeur, et les stations sont presque toutes vides.
  • 26. 50//Divagations-Trajetquotidien 7 h 15 Montpellier. Je me lève. 7h55 Je me faufile à côté de mon vélo et râpe mon sac à dos sur le crépi du mur. J’ouvre la porte, et sors le vélo de l’appartement, roue arrière en premier. Tous les matins, je me prends les pieds dans les pédales et cogne le guidon dans le pas de la porte. Tous les matins, mon vélo vacille dans le couloir pendant que je ferme ma porte à clés. Tous les matins, j’agrippe le cadre de mon vélo de la main droite et descends les escaliers. Trois demi étages plus loin je sors de l’immeuble, tenant le vélo d’une main et la lourde porte métallique de l’autre. Je passe. Tous les matins, la porte se referme sur la roue arrière de mon vélo. Et tous les matins, ça m’agace. 8 h Je claque la porte. C’est parti. Un pied sur la pédale, un pied au sol, je prend de l’élan met tout mon poids sur la pédale. Je saute sur la selle. La fraîcheur du matin me frappe au visage, m’écarquille les yeux et me réveille. Je suis les voies de tramway. J’accélère, je slalome entre les piétons endormis et les rails, en prenant garde de ne pas y coincer mes roues. Une voiture arrive, je monte sur le trottoir. La voie est libre, j’accélère. J’arrive à l’arrêt de tramway, je le contourne et me dirige vers le prochain feu rouge. Je balaye l’intersection du regard. La circulation est à l’arrêt, j’accélère. J’observe, j’écoute. Les voitures ralentissent, le bus met son clignotant, un piéton se lance. Le feu n’est pas encore vert pour Trajet Quotidien moi, mais je connais le carrefour : je fonce. Je pédale toujours plus vite, le bus ne va pas tarder à me rattraper. Dos d’âne. Je me lève et tire sur le guidon. La vitesse me fait sauter des quelques millimètres. Ça m’amuse. Second arrêt de tramway. Seconde intersection. Je passe sur les voies de tramway, sous le regard vide de ceux qui l’attendent. Je suis devant la gare. Les voies de trois tramways se croisent. L’endroit est rempli de rails. Pas de tram à l’horizon, je fonce. Un tram à l’horizon ? Je fonce. Quoi qu’il arrive, je serai bien plus rapide que lui. 8 h 05 Je garde un pied sur une pédale, ralentis, puis m’éjecte du vélo juste devant la gare. Je feins d’être arrivée à une vitesse raisonnable, jette un coup d’œil rapide aux écrans d’affichage, agrippe mon vélo par le cadre et monte les escaliers. Je traverse la gare. Escalators, quai, attente. Le train est en retard, comme tous les matins. Je me demande lequel nous allons avoir aujourd’hui. Si une vieille locomotive pointe le bout de son nez, on va devoir faire tenir huit vélos dans un emplacement prévu pour deux. Quand le train est plus récent, les 6 places que le wagon offre ne sont toujours pas suffisantes, mais c’est déja plus confortable. 8h15 Une vieille locomotive fait une entrée bruyante dans la gare. Il ne me reste plus qu’a porter mon vélo, encore une fois, à passer cette minuscule porte pendant que quelqu’un l’empêche de se refermer sur moi. Je soulève mon vélo et l’accroche par la roue avant au crochet qui vacille. Je suis enfin assise. J’ai mal au dos, et je pense aux escaliers, à l’arrivée.
  • 27. 52//Divagations-Intermodalité “S train”, Copenhague - 2015_____________________ intermodalité Être cycliste ne signifie pas que l’on abandonne tout autre mode de transport. La diversité de ceux-ci en milieu urbain s’accroît avec le temps, et il n’est pas rare que les citadins les cumulent, dans le but de minimiser les trajet à pied d’un point A à un point B. Les moyens de transport légers et à taille humaine comme le skate, le vélo ou le seagway, facilitent le cumul des modes de transport. Autrement dit, l’intermodalité c’est les Parisiens qui prennent le métro avec leur trottinette, les Al- lemands qui vont au travail en train, un vélo dans la gare de départ, un autre à destination, c’est un skateur qui se déplace à vélo, la planche sur le porte-bagage, c’est l’automobiliste qui se gare dans un parc relais et prend le tramway pour se rendre en ville. En fin de compte, l’intermodalité, est un moyen de désengorger les centres-villes des voitures. Pour les vélos, la question se pose. Doit-on le ranger dans le coffre de sa voiture ou utiliser les VLS ? Doit-on grimper dans le train/tramway avec ou le garer dans des parcs relais, proche des arrêts de tramways et des gares ? À chaque ville sa réponse, ou son manque de réponse. _________________ TER Languedoc Roussillon 2015
  • 28. 54//Voieroyale voie royale Passage à copenhague Copenhague* à été désignée tour à tour capitale mondiale du vélo, meilleure ville pour les cycliste et meilleure ville où il fait bon vivre, comme se plait à le rappeler le site officiel du pays. Capitale du Danemark, pays où le design fait partie intégrante de laculture,Copenhagueestuneville propre,ourègne une certaine harmonie. Des vitrines des magasins aux styles vestimentaires, en passant par les affiches pour des évênements et concerts, le sens du beau, du graphisme et du design scandinave sont palpables. Les Copenhagois sont souriants et aimables, tous bilingues. Sous leurs apparences calmes, les Danois sont des fêtards. Habitués à un climat peu clément -la ville donne sur la mer Baltique- les habitants de Copenhague savent profiter de chaque instant de chaleur et d’ensoleillement, pour sortir des tables de mixages et enceintes, et boire une bière autour d’un barbecue. Ne pas essayer trop vite de trouver une définition de la ville ; c’est beaucoup trop gros, on a toutes les chances de se tromper. - George Perec - Espèce d’espace - P119 ___________ Copenhague 2015 * Se reporter à la fiche “Copenhague”
  • 29. I biked from I was five. - A bike ? A lady’s citybike,black and small - Since when are you biking in town everyday ? Since I moved here. From the first day. I had 7km to my high school, and just continued from there. - why ? It’s the easiest and cheapest. - Copenhague is good for..? The fresh air, sun when it’s there and watching people. - What do you dislike ? Rain, snow, and wind is the worst! - A favorite place ? I love biking over the red bridge. It’s a small only bike bridge that connects vesterbro and islandsbrygge over the kanal. It’s so calming and really soft. At night it looks amazing. - Quick or smooth ? I’m fast when it’s cooled and slow when it’s sunny. - Following the rules ? Mostly, but there are some well known streets where I go against the rules. Some oneway streets and stupid red lights - Rain or train ? I often take the metro. But it depends on to where Isabel 25 ans - vit à Copenhague depuis 4 ans. Je fais du vélo depuis que j’ai cinq ans - Un vélo ? Un vélo de femme,noir et petit. - Depuis quand fais-tu du vélo en ville tous les jours ? Depuis que j’ai emménagé ici. Dès le premier jour.J’avais 7km de trajet jusqu’à mon lycée,et j’ai simplement continué. - Pourquoi ? C’est le plus facile et le moins cher - Copenhague, c’est bien pour..? L’air frais,le soleil quand il y en a,et regarder les gens. - Qu’est ce que tu n’aimes pas ? La pluie,la neige,et le vent est le pire ! - Un endroit favori ? J’adore faire du vélo sur le“pont rouge”.C’est un petit pont réservé aux vélo qui connecteVesterbro et Islandgrygge en traversant le canal.Il est vraiment reposant et agréable. De nuit,il est magnifique. - Rapide ou tranquille ? Je suis rapide quand il fait froid et lente quand il fait beau. - Tu suis les règles ? La plupart du temps,mais il y a quelques rues bien connues ou j’enfreins la loi.Quelques rues en sens unique et des feux de signalisation idiots. - Pluie ou métro ? Je prends souvent le métro,mais ça dépend où je vais. 56//Voieroyale-Portrait
  • 30. 58//Voieroyale-Trajetquotidien 7h45 Copenhague. Je me lève. 8h40 Je pars en retard. J’ai froid. Je pédale trop vite, pour me donner bonne conscience. Je monte la colline. Je meurs de chaud. Je transpire. J’accélère. Je double des cyclistes. Et m’arrête au feu rouge. Les personnes que j’ai doublées me rattrapent, l’air serein. Et me doublent. Je redescends la colline. J’en profite, ça ne me demande aucun effort, j’accélère. 8h48 Je passe devant la gare. J’ai l’impression d’être bientôt arrivée. Je passe à côté du parc d’attractions Tivoli. J’entends des gens crier. Je lève les yeux. Et manque de rentrer dans quelqu’un. Je commence à fatiguer. Je vois toutes les personnes que j’ai doublées arriver. 8h50 J’aperçois le pont qui mène à Christianshavn. Je le traverse. Montée. Descente. Je n’avais jamais remarqué que le plateau des ponts étaient arqué. Je lève ma main gauche. Je freine. Ma pédale doit être au bon endroit pour repartir. Je me retrouve au milieu d’une marée de jeunes vêtus de longues vestes noires, Nike colorées aux pieds, tous étudiants en design, art ou architecture. Un pied à terre, un pied sur la pédale. On regarde les voitures passer. Trajet Quotidien 9h00 Les voitures s’arrêtent. Les dos se courbent. Les femmes remontent sur leurs selles. Tout le monde lève les fesses. Prêts, feu orange, c’est parti. On se répand vite, sur toute la largeur de la route, telle une nuée d’étourneaux. D’instinct, on s’évite. Aucune collision. L’écart se crée. Les vélos de course partent en tête. Les plus malins ne se pressent pas. Et moi je transpire. 9h08 On arrive à l’école un par un. On accroche consciencieusement nos vélos aux bornes. Je souffle, et prépare une mine désolée. Et chaque matin. Sans exception. Je suis la première arrivée. S’il arrive que ce ne soit pas le cas, il me reste toujours l’excuse magique, à n’utiliser qu’une fois tous les 3 mois : “Je suis désolée, le pont s’est levé devant moi, j’ai perdu 15 min”. Tout le monde sait que c’est faux. Mais tout le monde sait que ça peut arriver.
  • 31. 60//Voieroyale-Aménagement AménagemenT Transport en commun sur rails Voies et pistes cyclables L’infrastructure cycliste de Copenhague est très développée. Le premier système de vélo en libre service est apparu en 1995, et la ville développe actuellement des autoroutes cyclables. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les Danois n’utilisent pas la bicyclette pour des raisons écologiques. Ils l’utilisent parce que c’est un moyen de transport rapide, flexible et efficace. Tout cela n’étant que la résultante d’un plancyclableréfléchi. Aufildesannées,lavillede Copenhague a fait du développement cyclable une de ses priorités, et a investi dans la mise en place de voies et pistes cyclables confortables et sécuritaires en travaillant étroitement avec des urbanistes. Les grands et moyens axes en sont tous équipés, et l’on peut aisément traverser la ville de part en part sans s’aventurer sur la route. Mais une grande partie du travail de promotion delabicycletteenvillepasseparlasensibilisation et les législations. Ainsi à Copenhague, un plan decommunicationénormeaétémisenplace,en rendant visibles les pistes cyclables, mais aussi en utilisant le vélo comme image de marque de la ville. D’un autre côté, la législation est prévue pour pousser le citadin à devenir cycliste. Pour exemple, les feux de circulation de la ville sont réglés sur des durées calculées en fonction des cyclistes, c’est-à-dire qu’un cycliste roulant à 20 km/h devrait pouvoir traverser la ville sans poser un pied à terre. Par ailleurs en hiver, les voies cyclables sont déneigées avant les routes. 1 km * Se reporter à la fiche “Aperçus urbains”
  • 32. (...) part of the work is also to change public perception of which kinds of mobility carry the greatest benefits for both citizen and society. (...) une part du travail est aussi de changer la perception publique sur le type de mobilité qui apporte le plus de bénéfices pour les citoyens et la société. - Lasse Lindholm City of Copenhagen ________________________ Affiche de communication de la ville de Copenhague
  • 33. 64//Voieroyale-Vivrelavilledesvélos l’endroit où je vais et laisser mon vélo n’importe où.Je me sens libre. Je fais habituellement du vélo par tout type de temps,mais je me sens un peu grognon quand il pleut et qu’il vente.Dans ces moments je me demande pourquoi le monde me déteste.Mais je passe finalement au dessus et à la fin je me sens vraiment réveillée après avoir fait du vélo dans ces conditions ! - Comme vois-tu/ressens-tu la ville quand tu fais du vélo ? Je me sens tellement en sécurité que je ne porte même pas de casque, ce qui n’est peut être pas si bon.Je devrais probablement en porter un mais je me sent vraiment en sécurité à vélo dans Copenhague parce que : 1) les pistes cyclables sont très larges, 2)les voitures sont vraiment alertes et conscientes des cyclistes,et 3) je peut toujours poser mes pieds au sol quand je suis à vélo donc je ne me sens jamais hors de contrôle. - Est-ce que tu as un exemple de bon design ou stratagème qui existent à Copenhague pour rendre la vie plus simple aux cyclistes ? Pistes cyclables,pistes cyclables, pistes cyclables ! Parfois il y à plus de place pour les cycliste que pour les voitures ! C’est vraiment quelque chose de magnifique.Il y a aussi des grands parking à vélo dans la plupart des endroits. What’s happening in your mind when you are biking? (cognitiv effect, mind set, feelings..) I feel happy and relaxed - unless I am in traffic and in a rush to get to school,then I can actually feel a bit of road rage and get agressive.But mostly biking gives me an opportunity to reflect on things that are happening in my day and I feel very good when I’m out in the fresh air. - How do you deal your life around bicycle ? (How do you park, how do you move in town, weather...) I just park wherever I can.I don’t worry so much about my bike getting stolen because it’s not unique or special in any way.It’s so nice not to have to worry about parking a car (I come from the U.S.and parking is a bitch in the city!) So I feel very relieved to just be able Melanie 25 - livesinCopenhagen from 2 years Melanie 25 ans - vit à Copenhague depuis 2 ans to bike right up to the place I’m going and leave my bike wherever.It feels free.I usually bike in all weather,but feel a bit crabby when it rains and is windy.In these moments I ask myself why the world hates me.But then I get over it afterwards and at the very least I feel awake after biking in these conditions! - How do you see/feel the town when you are biking ? I feel so safe that I don’t even wear a bike helmet,which maybe is not so good.I probably should wear one but I feel very safe biking in Copenhagen because of: 1) very wide bike lanes 2) cars are very aware and cautious around bikers 3) I can always touch my feet to the ground while I’m on my bike so I never feel out of control. - Do you have any example of good design or contrivance that exist in CPH to make life easier for cyclists ? Bike lanes,bike lanes,bike lanes! Sometimes more space for bikers than for cars! It’s a really beautiful thing.Also ample bike parking most places. Que se passe-t-il dans ta tête quand tu fais du vélo ? (Effets cognitifs, état d’esprit, sensations..) Je me sens heureuse et relaxée - à part si je suis dans le trafic et dans la hâte pour rejoindre l’école,alors je peut sentir un peu d’enervement dû à la conduite et je deviens aggressive. Mais généralement,faire du vélo me donne l’opportunité de réfléchir sur les choses qui arrivent durant ma journée,et je me sens vraiment bien quand je suis dehors à l’air frais. - Comment gères-tu ta vie autour du vélo ? (Comment tu te gares, comment tu te déplaces en ville, la météo..) Je me gare juste partout ou je peux. Je ne m’inquiète pas tellement de me faire voler mon vélo parcequ’il n’est unique ou spécial d’aucune façon. C’est si agréable de ne pas avoir à m’inquiéter de garer une voiture (Je viens des Etats-Unis et se garer est une horreur en ville!) Donc je me sens vraiment soulagée de pouvoir simplement faire du vélo jusqu’à
  • 34. 66//Voieroyale-Codesethabitudes Faire du vélo sans gants est signe d’(une infinie) ignorance. Les vélos danois sont prévus pour freiner avec les pédales. En « pédalant à l’envers ». Contrairement à ce qu’on pense au début, ils sont bel et bien cadenassés, par une bague sur la roue arrière. Dans les rues, Il y a des feux rouges de l’autre côté du carrefour, pour nous permettre d’attendre entre les voitures et le passage piéton. Copenhague est une ville plate, et les vitesses sont inutiles. Sauf quand on habite sur l’unique colline. Il faut toujours vérifier son angle mort avant de se déporter. TOUJOURS. Certains cyclistes peuvent être très rapides. Aller vite peut s’avérer dangereux. Un accident intervélo est vite arrivé. Pourtant, aller vite devient une nécessité. Lever la main paume ouverte, indique clairement à tout le monde que l’on s’arrête. Et il vaut mieux ne pas oublier, au risque de se prendre un guidon dans le dos. Transpirer, tout les jours, matin et soir. On est plus rapide en vélo qu’en transport en commun. Au Danemark, on respecte les feux de signalisation. Sauf certains. Ne pas respecter les règles (oublier d’indiquer sa direction avec son bras avant de tourner par exemple) donne lieu à des regards très méchants, et ce qui pourrait s’apparenter à une insulte. (Si l’on parlait Danois) Avoir la goutte au nez est devenu normal. Renifler est très mal vu, et se moucher est impossible. Pour cause de gants trop épais. Faireduvélosouslaneige c’est tout un concept. On croit à des conditions extrêmes, on cligne des yeux et plisse le front. On se dit que c’est bien parce que l’on est en voyage que l’on accepte ça, que jamais on ne feraist un truc pareil en France. Et puis on réitère l’expérience sous la pluie. Et onrelativisée. La neige, au moins, ça ne mouille pas. Copenhague est une île. En cas d’oubli, faire confiance au vent pour nous le rappeler. Le vent joue parfois à “domino day”, et fait tomber des rangées de 30 vélos. Si les gens n’ont pas de sonnette, alors ils en miment le bruit : “drrrr drrr” Le vélo est un moyen de faire des économies d’argent : une bière et 20 minutes de vélo, et c’est l’ivresse assurée. Avec le temps, on apprends à boire une bière AVANT de sortir. Ou éventuellement sur la route, tout en pédalant. Pour les plus Danois : “C’est la meilleure de toutes”. Le vélo se pratique de 3 à 333 ans. Environ.  Le vélo est prioritaire.Vraiment. Couper la route à une voiture, ne déclenche aucun bruit de klaxon. Manquer de renverser un piéton le pousse à s’excuser. Aux heures de pointe, il y a des bouchons : de vélos. Il faudra attendre deux feux verts avant de pouvoir traverser.  Codes et habitudes
  • 35. 68 En somme, être cycliste, c’est éveiller ses cinq sens et sa sensibilité au monde. Pédaler semble activer en nous comme un instinct cycliste, où l’on développe une nouvelle perception la ville et de nous-même : il faut prendre en compte le vélo comme une partie de notre corps si l’on veut bien calculer les distances. Le point de vue réhaussé et les sens exacerbés, le cycliste se sent puissant, libre. Être cycliste c’est être dépendant de son environnement urbain et météorologique ; être cycliste à Montpellier, ce n’est pas être cycliste à Copenhague, où à New York. Être cycliste régulier, c’est prendre des habitudes, créer des itinéraires prédéfinis, c’est trouver les moyens d’économiser l’énergie dépensée dans la désorientation pour la concentrer dans nos pieds. Être cycliste, c’est être maître de nos déplacements et de nos trajectoires, c’est s’autoriser à moduler sa vitesse, c’est s’arrêter pour discuter. Être cycliste c’est être piéton, automobiliste, usager des transports en commun, skateur et trottineur. Être cycliste, c’est se déplacer, avancer, se transporter, voyager, c’est être social, s’adapter à la société, aux règles, aux codes qu’elle génère, et surtout, aux autres.
  • 36. 70 ê..T. R..E. . s o c . i . a l Être social, c’est entrer en contact avec les autres, c’est faire partie d’un collectif, d’une communauté, c’est créer des liens, et se confronter aux autres, c’est vivre en société. Sommes nous des êtres sociaux, à vélo ?
  • 37. 72//Partagedelavoirie partage de la voirie Les villes modernes sont multimodales, et chaque mode de transport est unique en terme d’expérience.Dansletramway,lebus,ouletrain,on se laisse guider passivement, profitant du paysage qui défile ou en lisant un livre. En voiture, à vélo, en skate ou en seagway nous sommes maître de nos trajectoires, concentré sur la route. Coincé entre des personnes que l’on ne connaît pas, ou seul face aux embouteillages, les déplacements pendulaires sont une source quotidienne de stress. Chaque mode de transports se distingue des autres entermedesociabilisation.Enferméounon,àvitesse modulable ou fixe, comment tous se partagent-il la voirie ? La bicyclette est un mode éminemment urbain qui s’adapte à la ville et respecte les autres, provoquant peu d’accident. - Héran Frédéric - Le retour de la bicyclette. p.42 ___________ Montpellier 2015
  • 38. 74//Partage-Lesautres,cesinconnus Les autres, ces inconnus Samedi après midi, je monte sur mon vélo. C’est une journée chargée en ville. A peine en selle, je dois freiner, pour éviter des piétons qui regardent ailleurs. Et je me demande, toujours, ce qui peut bien se passer dans la tête des personnes que je croise. Cette vieille dame avec son panier, qui ne travaille probablement plus depuis plusieurs années, et qui choisit un samedi, pour aller faire ses courses. Ce groupe, qui s’affole à mon passage pourtant lent : je fais attention à ma vitesse, depuis qu’une malvoyante m’a confié la peur qu’elle renssent lorsqu’un vélo la dépasse. Et ce scooter, qui n’a pas l’air de comprendre, qu’il est censé rouler sur la route. Pas sur le trottoir, ou les pistes cyclables, non, la route. Cet automobiliste qui se met tout seul dans une situation énervante en essayant de se déplacer avec son engin en centre ville un samedi, et qui se défoule sur moi, parce qu’il ne m’avait pas vu arriver. Ces mecs à vélo, qui roulent genoux dehors, clope au bec, passant plus de temps accoudés au guidon que les pieds sur les pédales. Et puis ce chien, un très beau chien, qui vit dans la rue avec son maitre, ou l’inverse. Il fait mine de me sauter dessus quand je passe à côté de lui. Et ce garçon, assis sur sa selle, vélo entre les jambes, qui discute avec une jeune femme, pret à redémarrer. Deboutsurmespédales, J’aperçois le marché. Je calcule ma trajectoire, et me faufile entre les piétons. J’arrive au marché. C’est agréable, de pouvoir ralentir, et de regarder les étalages, sans descendre de ma selle. Mais il y a du monde, je vais y être forcée.
  • 39. Cohabitation La bicyclette est étroitement liée à son environnement, celui de la ville statique (immeubles,routes,etc.),celuidesautresvéhicules (plus particulièrement la voiture) et celui de la société en général. Il est très clair aujourd’hui, au regard des discours à la fois des automobilistes et des associations de promotion de la bicyclette, qu’un clivage s’est formé entre les cyclistes et les automobilistes. La voiture est originellement, un vecteur de liberté. Synonyme de réussite sociale, elle est a été le moyen de transport principal pendant des années, si bien que 13% des Américains entre 18 et 34 ans avouent aujourd’hui ne pas savoir faire du vélo(Courrier international). Victime de son succès, elle est devenue en milieu urbain, un véhicule lent et anxiogène, qui n’est plus réservée aux classes les plus aisées malgré les coûts qu’elle engendre. Il n’est pas rare de rencontrer des cyclistes vouant une haine à l’automobile. Tout cycliste quotidien subit à un moment donné, une expérience négative face à une voiture. Accidents de la route, incivilités, stationnements gênants... Les raisons sont variées et parfois inenvisageables d’un point de vue extérieur. Une des grandes peurs du cycliste est, par exemple, de se prendre de plein fouet une portière de voiture qui s’ouvre à la volée. Jamais un automobiliste ne penserait à cela. Sauf aux Pays-Bas, où ils apprennent à ouvrir leur portière de la main droite, ce qui les oblige à se retourner et à regarder la route avant d’agir. La principale raison de ce clivage entre voiture et bicyclette est la vulnérabilité du cycliste. 76//Partage-Cohabitation Enfermé dans sa boite métallique, l’automobiliste ne réalise pas le danger qu’il représente pour nous. Il est même intimement persuadé que le cycliste est un gêneur qui n’a rien à faire sur la route et ce, que l’automobiliste soit cycliste ou non. Lorsque je suis au volant, je change de perspective, de point de vue, j’oublierais presque la sensation que cela procure d’être un cycliste à côté d’une voiture, et les vélos m’ennuient. De son côté, le cycliste ne semble être accepté nulle part, et se considère donc accepté partout. La route est réservée aux voitures, les pistes cyclables encombrées par des stationnements intempestifs ou des véhicules à deux roues motorisés, et le trottoir réservé aux piétons. __ Capture d’écran Recherche sur Twitter #garécommeunemerde
  • 40. 78//Partage-Cohabitation La relation entre cycliste et piéton n’est pas simple non plus. D’expérience, il semble que dans les rues des villes où le vélo n’a que peu de place définie, comme à Montpellier, les piétons sont plutôt accommodants. Qui plus est, Montpellier est une ville du Sud, une ville sociale, et le vélo présente l’avantage de pouvoir s’arrêter spontanément pour discuter avec un piéton, ou rouler à son allure sur quelques mètres pour finir la discussion. En revanche, dans des villes où la règlementation est plus forte, comme Copenhague, rouler dans des zones piétonnes est très mal vu : les piétons se sentent attaqués, ils considèrent que les vélos ont bien assez d’espaces réservés pour eux, et n’ont pas à empiéter sur leurs zones. Camille Pascal nous démontre ainsi le conflit piéton-cycliste dans un article écrit pour Valeurs actuelles « La dictature à vélo » : « Le cycliste peut être de tous les milieux. Il y a lagrandebourgeoiseinénarrablejuchéesurun magnifique vélo noir hollandais hors de prix (...) elle n’a pas le temps de vous éviter, car elle estengrandeconversationavecsontéléphone. On croise aussi l’étudiant nonchalant et mal assuré qui godille dangereusement entre des voitures dont il raye la carrosserie non sans insulter abondamment leurs conducteurs stupéfaits et impuissants. Il y a le sportif, enfin, sûr de lui et de sa force (…). Ils ne sont pas du même monde, mais ils appartiennent à la même internationale puissante et redoutable, celle des gens responsables qui sauvent la planète en pédalant et qui ont donc, à ce titre, droitdevieetdemort.Vousavezbeauprotester, pauvre piéton, car vous utilisez vous aussi une énergie “propre”, que vous ne polluez pas plus que lui (…) Peine perdue, le piéton n’est que de la piétaille aux yeux de ces nouveaux chevaliers du bitume, pire peut-être, car celui- civoitderrièrechaquepiétonunautomobiliste honteux qui rase certainement les murs pour aller récupérer sa voiture. Le cycliste a désormais la préséance et partout il faut lui céder le pas sous peine d’être traité comme un ennemi déclaré de la couche d’ozone. Le vélo n’est plus un moyen de locomotion, il est désormais un signe identitaire, un choix politique. Hier il était un sport, aujourd’hui il incarne une idéologie totalitaire et en cela il est devenu très dangereux. » Ce texte révèle bien l’incompréhension qui peut régner entre les usagers des différents modes de transports. Il souligne également, non sans amalgames et idées reçues, que l’utilisation d’un transport au lieu d’un autre, révèle nos engagements et nos valeurs, et transmet une certaine image de nous aux yeux de la société.
  • 41. 80//Culture&économie culture& économie La bicyclette, redevenue un mode de transport commun en ville, est aujourd’hui un marqueur de culture urbaine, un phénomène de mode, une conséquence de la crise économique et écologique. La bicyclette est un fort marqueur d’identité. Mais pour prendre plaisir à rouler, il faut le bon équipement,carchoisirlebonvélo,facilitelaremise en selle. Une nouvelle économie se développe autour de la bicyclette. À Montpellier, on compte une boutique spécialisée pour 26 000 habitants tandis qu’à Copenhague on en compte une pour 4 300 habitants. Du côté de la production en France, des marques comme Caminade ou MFC (Manufacture française du cycle) produisent artisanalement des bicyclettes en acier tubulaire, mettant en avant un savoir-faire français. Et les accessoires qui se développent autour de la bicyclette ne manquent pas : sacoches, sonnettes, lumières, protèges-selles, cadenas, applications mobiles et GPS spécialisé... Le vélo est aussi un phénomène social de masse, un marqueur politique autant qu’un symbole plastique - Zerbone Julien - 303 n° 136 consacré au vélo. ______________ Michael Nÿkamptest
  • 43. 84//Culture-Phénomènessociaux La bicyclette a de tout temps été un marqueur culturel et social, comme le résume très bien l’illustration de Sempé. Aujourd’hui, la bicyclette est résolument urbaine, et la diversité et le nombre de cyclistes s’accroît. La perte de vitesse de la voiture -littéralement- a poussé les habitants des centres et hypercentres urbains à redécouvrir la bicyclette, pour des raisons avant tout pratiques. Entre prix du loyer et superficie des appartements, on observe et déduit que cette population se compose principalement d’étudiants et de familles aisées. (Henry & Laslaz) À chaque modèle sa ville emblématique, à chaque époque et chaque usager son modèle phare. L’objet lui-même est vecteur de codes sociaux et d’appartenance, il suit les tendances. Ainsi, Londres est représentée par le vélo pliable,partenaire idéal du citadin en manque d’espace, usager des transports en commun. LeVélib’ Parisien est adapté aux touristes et cyclistes occasionnels, évitant les problèmes de stockage et de vol. Copenhague est envahiparles“Christianiabikes”,quirépondentaux problématiques de transport de charge (enfants, courses, etc.). Le vélo hollandais représente Amsterdam, paisible et confortable. Bordeaux a fait intervenir Philippe Starck, qui a conçu le Pibal, un vélo-patinette à l’image de la ville : cycliste et piétonne à la fois. New York est caractérisé par l’usage du fixie, popularisé par les coursiers en recherche de vitesse et de légèreté. Il est depuis devenu, dans la culture occidentale, un symbole fort de la culture urbaine et l’emblème du mouvement «hipster», il est profondément urbain. Sa légèreté et sa simplicité facilitent son stockage -suspendus aux murs des appartements- et son transport, dans les escaliers, par exemple. Ses pneus très fins sont adaptés à une route lisse et goudronnée, mais son manque de freins et de vitesse le différencie du vélo de route ou de course, et le cantonne à la ville. Son atout esthétique principal est sa finesse et sa sobriété, renvoyant à la célèbre citation de Ludwig Mies van der Rohe «Less is more». Le “fixiste” est simple, mais chic ; sportif, mais urbain ; jeune, mais pas juvénile ; masculin, mais délicat. Bref, il est l’outil idéal de l’homme moderne tout droit sorti d’un magazine. Le vélo est devenu un accessoire de mode à part entière, et diffuse une certaine image de son propriétaire. Les grandes marques l’ont bien compris, comme Célio (spécialisée dans la vente de prêt à porter pour homme) qui crée un partenariat avec un fabriquant de cycles pour attireruncertainpublic,ouencoredes magazines de décoration qui mettent en scène une multitude de loft arborant un vélo élégamment accroché au mur. On voit des bicyclettes apparaître dans des contextes étonnants, comme des blogs culinaires ou de mode  : elle est devenue « sexy », elle fait vendre, elle fait rêver. Cependant,loind’unesthétismesuperficielliéaux codes sociaux du moment, une des fascinations pour le fixie est provoquée par l’harmonie des mouvements du corps et de l’objet, comme l’évoquaitdesontempsAlfredJarryquiconsidérait le vélo à pignon fixe comme son exosquelette, une extension de lui-même. Si le cycliste ne ressent plus son vélo comme un objet encombrant mais entre en symbiose avec lui, il sera bien plus ouvert au monde environnant. Phénomènes sociaux
  • 44. 86//Ressentir-Souvenir __________________________ Vélo décoré avec de la laine devant un magasin de laine. Montpellier, 2015.
  • 45. 88//Culture-Objetd’amour J’adore les cadres de course,en acier tubulaire fin.Mais même si je représente le vintage,je suis parfois très attiré par des cadres neufs,j’admire le travail des ingénieurs.J’ai arrêté de faire duVTT il y a des années,j’habite en ville,ce type de vélo ne correspond pas à ma pratique.Pourtant l’autre jour un copain m’a montré son dernier achat,un VTT flambant neuf.Il m’a dit le prix et j’ai vraiment hésité à l’acheter.Pourtant,je n’en aurait eu absolument aucune utilité,mais c’est un objet que j’adore,et je peux devenir irrationnel. - Et les clients ? La grande demande en ce moment,c’est des vélos dont le système de vitesse et de frein sont très discrets.Le but,c’est de s’approcher au maximum de l’esthétique du fixie,mais sans ces inconvénients. J’ai un client là,il va me prendre un vélo à 400 euros.Ce vélo ne va jamais rouler,je le sais.C’est assez incroyable mais il est loin d’être le seul. - Tu penses que le vélo est un mode de vie ? Un mode de vie oui,clairement.Mais je ne le pousse pas à l’extrême non plus,je continue à boire de la bière par exemple,alors que je sais pertinemment que pour faire un litre de bière,il faut dix litres d’eau.Il ne faut pas trop me lancer sur l’écologie, je peux en parler longtemps.J’ai fait une école de commerce,et mon mémoire portait sur le développement durable en Afrique.Ensuite,je suis parti un an en Espagne,dans une fac d’économie. Ils nous expliquaient que nos choix actuels se répercutent trente ans plus tard.Je pense que c’est en partie ce qui m’a conduit ici.D’ailleurs,les choses changent,c’est une très bonne chose.Certaines villes comme Lyon remboursent jusqu’à 250€ pour l’achat d’un vélo électrique,c’est plutôt bien,c’est un bon début. Comment fonctionne votre boutique ? Tous les vélos que je vends,sont des vieux vélos que je remets en état.Je les achète (les provenances sont très diverses) puis je les revends.Je fais aussi de la réparation pour les particuliers.Là,par exemple, je répare un vélo pour une femme enceinte.Il était dans un sale état.Je l’ai prévenue que le coût des réparations serait sûrement équivalent à l’achat d’un vélo neuf.Elle à réfléchi et m’a demandé de le lui réparer,car il lui convenait très bien.J’ai acheté de nouvelles roues,j’ai mis des vitesses,j’ai fait plein de petites réparations.C’est pas courant,mais c’est bien.Aujourd’hui on compte quasiment un vélo par francais,tout le monde n’a pas besoin d’un vélo neuf. Dans les années 60,tout le monde savait réparer son vélo.Moi c’est mon grand père qui m’a appris. Après j’ai dû passer mon CQP (certification de qualification professionnelle) pour pouvoir en faire mon métier,mais il en savait autant que moi aujourd’hui. Le savoir s’est perdu avec le temps. - Qu’est ce que vous aimez dans le vélo ? Au début,c’était la pratique,maintenant c’est la mécanique.J’ai un esprit cartésien,logique,j’adore ça. Avec le vélo,on profite du temps qu’on a,ce n’est pas une course,c’est ce qui me plaît.Réparer des vélo,c’est aussi mon côté écolo,je contribue à ma manière à faire aller le monde dans le bon sens. - Et au niveau du design ? Je suis très attiré par le design en général,et c’est vrai que l’esthétique du vélo compte beaucoup. Antoine - réparateur et vendeur de vélos Montpellier
  • 46. 90//Ressentir-Souvenir _____________________________________ Vélo de course Delta E, Micmo Gitane, 1983 “Invention / Design : Regards croisés” Exposition des Sismo designer pour le Musée des arts et métiers-Cnam 2015
  • 47. 92//Culture-Développement Développement Également lié à des mouvements écologiques, économiques, le vélo n’est pas seulement un marqueur esthétique, il est également un marqueur politique. Chevaliers sur deux roues, les cyclistes militants se battent ensemble, pour faire changer la politique, et l’organisation urbaine des villes modernes. La pratique n’est pas nouvelle, et la bicyclette a déjà bien souvent été associée à des mouvements de militantisme et de développement. En 1965, les activistes du mouvement «provo» à Amsterdam, ont pour projet de supprimer les voitures des villes, et de proposer des bicyclettes blanches en libre service, comme des Vélib’ avant l’heure. Volées très rapidement, ces bicyclettes sont devenues cultes dans le monde des militants sur deux roues, et auront au moins eu pour effet d’initier à la logique de gratuité et de libre service. Aujourd’hui, les villes ont besoin de passer par l’augmentation de la sécurité, ou tout du moins, par celle du ressenti sécuritaire des cyclistes en ville avant de penser à une réelle augmentation du nombre de citaclistes*. Dans des villes qui semblent agencées pour une cible masculine, jeune et en bonne santé (Raibaud) un bon nombre de citadins ne s’y retrouvant pas n’osent pas monter en selle. Par ailleurs, lorsque l’aménagement d’une ville facilite la pratique du vélo, elle facilite également l’accès aux personnes âgées et à mobilité réduite par le ralentissement du trafic et l’effacement des aspérités urbaines. Le mot actuellement dans toutes les bouches est celui de pistes cyclables, il en faudrait toujours plus. À titre personnel, je ne pense pas que l’augmentation de celles-ci soit une solution idéale en France. Il n’est pas exclu que celles- ci accentuent le clivage entre les vélos et les autres modes de transports, ne facilitant pas une cohabitation apaisée. Mais force est d’admettre que leur présence sécurise les cyclistes, et rassure les plus angoissés du trafic. En réaction à ce phénomène, dans le but d’éveiller les consciences et de faire réagir les élus locaux, les membres de “la masse critique”, un collectif Toulonnais, s’emploient à peindre eux-mêmes, des vois cyclables. * Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste” Voie cyclable tracée au rouleau par “la masse critique” 2015 _
  • 48. 94//Culture-Développement Un des combats principaux de toutes ces associations est de faire reconnaître la place de la bicyclette au sein des villes, lesquelles se sont laissées envahir peu à peu par les véhicules motorisés. La question aujourd’hui est alors : comment peut-on trouver un terrain d’entente pour que la ville appartienne réellement à tous ? Pour cela, il est aujourd’hui primordial que les militants soient soutenus par les élus. Nombre de cyclistes français ont été désappointés face à la réponse de Martine Aubry lors de l’inauguration des vélos en libre service de la ville de Lille ; lorsqu’on lui a proposé de monter à bicyclette, elle a répondu : “Ah non, c’est ridicule !”. Associer les mots «bicyclette» et «ridicule» dans la même phrase induit une mauvaise vision de la bicyclette, qu’elle qu’en soit la raison. Si les élus s’y refusent, pourquoi la population devrait-elle l’utiliser ? Il serait ridicule de demander aux élus de se déplacer à bicyclette me direz-vous ? Dans la ville de Copenhague, 63 % des députés se rendent chaque jours au Parlement à vélo*. Monter sur une selle dans un espace urbain, c’est être un militant silencieux, mais actif. C’est, consciemment ou non, faire partie d’un groupe, d’un combat pour une cause plus grande : pour une ville plus douce, plus saine, plus lente et plus calme. Le cycliste militant s’inscrit dans un mouvement bien plus grand, de promotion de l’économie locale, d’une consommation plus raisonnée, d’un ralentissement des rythmes de vie et d’un hédonisme certain. It’s just like non-smokers seeking smoke-free space. C’estcommelesnonfumeursen recherched’espacesnonfumeurs. FranziskaEichstaedt-Bohlig,GermanGreenParty Mouvement provo Cor Jaring, untitled, 1966. _____________________ * Se reporter à la fiche “Copenhague”
  • 49. 96//Communauté communauté La bicyclette semble avoir un pouvoir fédérateur chez ses usagers, qui ont tendance à se regrouper. Animés par une passion commune, volonté de se faire entendre, de partager des connaissances et des expériences, les raisons des cyclistes pour former des communautés sont nombreuses. Le vélo a des effets cognitifs imaginaires et sociaux puissants, et peut rassembler autour de lui de véritables communautés. - Zerbone Julien, 303 n° 136 consacré au vélo, p5 _______________ Mikey Muirhead 2012
  • 50. 98//Communauté-Rassemblements Rassemblements Quand on devient cycliste en milieu urbain, on fait face à un phénomène qui semble parachuté d’une autre époque et d’un autre environnement : unrespectmutuelentrecyclistes.Enbonscitadins français, nous étions bien habitués à cette douce ignorance qu’ont les habitants des villes les uns pourlesautres,maissoudain, monté sur une selle, un semblant d’humanisme renait, et le fantôme d’un sourire de politesse apparaît sur les visages des cyclistes à l’arrêt. Comme un regard complice qui sans le vouloir, va intégrer ce citacliste* tout neuf à une grande famille. Cette grande famille n’a en fait rien de particulier si ce n’est rouler sur deux roues avec comme seul moteur, notre coeur. Mais cette action qui peut paraître anodine, induit un comportement particulier. Il n’est pas rare d’observer que la conversation s’engage presque aussi naturellement entre deux cyclistes qu’entre deux enfants qui jouent. Une des raisons évidentes à ce rapprochement humain serait que le vélo, en tant qu’objet visible, assure aux deux personnes concernées un sujet de discussion commun. Une autre serait liée au partage du même environnement par les deux cyclistes, qui pédalent au même moment, au même endroit. Leurs sensations et leurs ressentis sont partagés, leurs visions de la ville et de sa politique de développement urbain sont probablement formées à partir des mêmes observations. Quand vous verrez passer un cycliste rêvassant, ne vous fiez pas à son allure inoffensive et bonasse : il prépare la conquête du monde TronchetDidier-Petittraitédevélosophie-p193 * Se reporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
  • 51. 100//Communauté-Rassemblement Et de conversations en rencontres, des groupes se forment. Les regroupements sont de tous types : discussions, balades urbaines, vélos- écoles, etc. Certaines associations ont une vocation militante, comme MDB (Mieux se Déplacer à Bicyclette) qui agit en Île de France depuis 40 ans. De nouvelles initiatives émergent en permanence et leurs capacités de pression avec. Il faut le dire, pratiquer le vélo dans certaines villes est une bataille. Une bataille contre son corps et sa flemme, contre la météo, les automobilistes, les mairies et leur service d’urbanisme, et plus largement le « système ». Lescyclistesseregroupentsousdesentitésauxnoms inventés : Vélosophes*, Vélotaffeurs* et Biketivist* s’emploient à la Vélorution*. Un cycliste régulier devient facilement et rapidement convaincu que son moyen de transport est le meilleur. Pour en persuader le reste du monde, les arguments ne manquent pas  : économique, écologique, sain, durable, le vélo procure un sentiment de bien être qui pourrait à lui seul permettre de panser certains maux de la société moderne, le cycliste engagé en est convaincu. ______ nc Pinterest, 2015 Local du “Vieux biclou” - Montpellier_ * Se repporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
  • 52. 102//Communauté-Réparation Rouler à bicyclette implique des accidents de parcours : après avoir moi-même passé 10 minutesàremettreenplacemachaînedanslesrues de Copenhague, je me relève les mains pleines de cambouis. Quelques jours plus tard, j’ai pu voir un homme dérailler, sortir un gant en latex de son sac, remettre la chaine, et repartir. Ainsi, connaitre les bases mécaniques d’une bicyclette permet d’éviter tout désagrément. Le mécanisme d’une bicyclette est simple, et nous sommes tous de potentiels réparateurs de vélo, et nous avons appris avec nos parents ou grands-parents, seuls, ou encore grâce à une association. C’est d’ailleurs ce qui lui permet d’avoir une durée de vie quasi illimitée. “Le Vieux Biclou” est le seul atelier d’autoréparation associatif basé à Montpellier. Ses membres s’engagent à partager leur savoir- faire avec les autres adhérents. Leur but, c’est la Vélonomie : “Être autonome avec son propre vélo”. Leurs adhérents sont principalement des usagers réguliers, qui pratiquent en ville, parcourent moins de 5Km chaque jours. L’association répond à un besoin d’espace de ces citadins qui vivent pour la plupart dans des appartements. Les membres parlent d’une “grande famille”, où l’entraide est la base. La Vélonomie, c’est orienter les usagers vers le bon choix de vélo en fonction de ses besoins, lui apprendreàleréparerluimême,l’aideràl’entretenir et parfois le diriger vers un vélociste*, lorsque ses besoins ne sont pas compatibles avec les pratiques de l’association. Il y a des permanences plusieurs fois par semaine, ce sont des membres bénévoles, qui se portent volontaires pour surveiller l’atelier et conseiller les autres adhérents. Réparation L’associationbénéficiededonsdevieuxvélosabîmés, de la part d’Emmaüs ou de la cité universitaire. Ils les réparent ou les démontent, puis ils trient les pièces. Ils récupèrent ce qu’il peuvent puis envoient le reste au recyclage. Des pièces détachées sont rangées un peu partout dans la pièce. Des instructions sont accrochées au mur. Chaque pièce a un prix, l’association fonctionne sur la confiance. Une fois par mois a lieu un “apéro démontage”, et tout le monde s’y met, pour remettre en ordre l’atelier. Le directeur m’explique : les statistiques des dernières années montrent une majorité grandissante d’hommes sur les cinq cent cinquante adhérents que l’association compte. En revanche, il y a une activité sur laquelle on retrouve principalement des femmes : la “vélo-école” et les sessions “vélo en ville”. Accompagnées d’un membre de l’association, les adhérentes peuvent alors participer à des sessions d’apprentissage et de ré-apprentissage du vélo. Des balades en milieux urbains sont organisées afin de rassurer et d’éduquer les adhérents, face à la circulation urbaine. Lors de ces sessions, l’important est en premier lieu de rassurer, mais aussi de faire découvrir les itinéraires sécurisés qui existent en ville. Entre Zone 30 et pistes cyclables, il est tout à fait possible de rouler dans Montpellier en évitant au maximum de croiser des voitures. Seulement, cela demande de changer sa vision de la ville et son itinéraire habituel. Comme l’explique le directeur de l’association, il faut apprendre à “conduire avec ses oreilles” et apprendre de nouveau itinéraires. Conduire en ville à bicyclette devient ensuite une habitude.Ainsi,lesmembresdel’associationconfient se retrouver parfois face à des impasses lorsqu’ils conduisent une voiture à Montpellier, trop habitués à leur itinéraire cycliste. * Se repporter à la fiche “Petit lexique cycliste”
  • 54. 106//Communauté-Rythme&humanité rythme & humanité L’utilisation de la bicyclette pour des déplacements utilitaires est un moyen facile et efficacederéduirenotreconsommationenénergie. Les citadins sont souvent pressés, entraînés par le rythme urbain. De plus en plus de mouvements contestataires qui visent à ralentir cette cadence apparaissent. Le mouvement “Slow”, par exemple, qui s’applique à tout : slow food, slow management, slow money, slow art, slow city, slow tourism, slow parenting et même slow sex. Cantonnons nous au slow city. le vélo a la cote. Devenue une préoccupation mondiale, la bicyclette rassemble désormais tout autour du globe, avec la WNBR (World Naked Bike Ride) depuis 2004. La WNBR s’inscrit dans ces mouvements issus des cultures hippies, mais elle rassemble pourtant énormément de participants ; peut-être est-ce dû au côté amusant et provocateur de l’action qui consiste à faire le tour de la ville en tenue d’Eve (ou Adam), assis sur une selle. Même si je doute que, pour les hommes comme pour les femmes, cette position soit réellement une démonstration d’harmonie et de bien-être du cycliste sur sa bicyclette, cette manifestation a pour but, entre autres, de montrer la vulnérabilité des cyclistessurlaroute,etdeprotestercontrelaculture automobile, en envoyant un message positif, de paix. Le fait d’être nu renvoit à son côté utopiste, et hippie. L’aspect provocateur de l’événement a aussi pour particularité de montrer qu’il est possible de pédaler en ville, et qu’un bon nombre de personnes le font déjà. ____ Le slow n’est pas une perte de temps mais une manière de vivre les choses en conscience. Il faut prendre son temps pour mieux prendre son pied. Menétrey & Toninato - Slow life - Clès ____ Selon l’adage “ce n’est pas la destination qui compte, mais le voyage”. La bicyclette est un des moyens qui permet de profiter du voyage, sans oublier pour autant sa destination. Le changement de temporalité et d’environnement que propose la bicyclette offre à son utilisateur une nouvelle vision de la ville, de la vie. Utopistes et rêveurs de tout temps ont toujours vanté les bienfaits de celle-ci, mais l’être humain aime le progrès, et la voiture a été privilégiée pendant des décennies. Aujourd’hui World Naked Bike Ride - Bruxelle_____________________________
  • 55. 108//Communauté-Rythme&humanité Dans un esprit moins utopiste et plus actuel, on observe que la bicyclette entre aujourd’hui dans une logique d’économie participative. Au Danemark, on peut trouver une multitude de groupes Facebook dédiés à la vente de vélos d’occasion. Les réseaux sociaux jouent un rôle dans le développement de cette nouvelle mobilité, en facilitant l’accès aux données, en connectant des passionnés de toutes parts du pays, ou en permettant de créer des événements rassembleurs. La dernière initiative en date qui s’inscrit dans l’ère de l’économie collaborative (au même titre que Airbnb) c’est : Splinlister, une plateforme d’échange qui permet à chacun de mettre son vélo en location, pour une journée ou plus. De son côté, reprenant le principe des VLS, Philock vous vend un cadenas géolocalisé, accompagné d’une application mobile. Il suffit d’accrochersonvéloquelquepartaveccecadenas, de communiquer votre code à l’application, et elle se charge de lui trouver des locataires. En bonus, le cadenas fait office d’alarme en cas de vol. Plongé sans protection dans l’univers urbain,lecyclisteestsensibleàsonenvironnement. Visible, il prête attention aux regards que vont porter ses concitoyens sur lui. Le cycliste militant qui porte un regard sur le monde et son évolution, agissant en conséquence par l’usage d’un mode de déplacement doux, durable parce que réparable quasiment à l’infini, et non polluant, est un être profondément social, car inscrit dans une société, conscient de son évolution. Traversant les âges, les usages et les classes sociales, la bicyclette semble participer à une grande vague d’humanité. Elle nous amuse, nous rend service, nous regroupe et nous divise. Elle est un objet marqueur de son temps. Aux énergies fossiles préférez l’énergie musculaire DumontRené-candidatvert,1974.
  • 56. 110//Conclusion Montravailestconstituéd’unemultitude d’éléments de réponse à la problématique énoncée dans l’introduction, qui se complètent et s’entrecroisent. Deux hypothèses ont été formulées,soulevantl’idéequeleplaisirprovenait d’une part, de l’effort physique et des sensations ressenties, et d’autre part, d’un aspect social de l’objet. Ainsi, deux réponses complémentaires se dessinent. Rouler : un plaisir, qui dépend de l’environnement urbain. Il semble que le plaisir que procure la bicyclette soit avant tout physique, et lié à l’objet. En revanche, il dépend de l’environnement urbain. La perte de repère et le stress, causés par un aménagement médiocre ou inexistant, altère la sensation de bien être normalement éprouvée. Le vélo est un objet social qui peut transformer le rapport du citadin avec son concitoyen. Bien que les personnes rencontrées ne l’aient jamais formulé explicitement, l’aspect social de labicyclettedemeureunanimementapprécié.En effet,lecontactavecautruiestfacilitéparledéfaut d’habitacle, et les cyclistes peuvent aisément s’adapter aux rythmes des piétons comme des automobilistes. Cependant, l’engagement communautaire et contestataire n’est pas une caractéristique propre au vélo. Bien souvent, les personnes rencontrées ont naturellement tendance à s’engager dans le monde associatif. r t- Les autres se regroupent par nécessité, face à un système politique qui les ignore. Les Danois par exemple, ne considèrent pas le vélo comme un sujet de discussion, ou un objet de plaisir particulier, comme si l’aspect social comme physique avait disparu. De son côté, Aline Cavalcante, la cycliste de Sao Paulo, évoquait le plaisir de rouler, de sentir le vent contre son visage, de se défouler, comme l’une des raisons qui l’ont poussée à continuer de se déplacer en vélo. Aujourd’hui, elle affirme apprécier l’esprit communautaire qui règne dans son association. L’aspect social ou physique de la bicyclette est plus ou moins présent selon les personnalités et sensibilités de chacun. C’est d’ailleurs ce qui a fait la force et la faiblesse de ma démarche, car les personnes interrogées ne représentent qu’un faible échantillon de la masse cycliste de Copenhague comme de Montpellier. Mais apporter une réponse partielle à la problématique posée est inhérent à mon approche, car les réponses possibles sont aussi nombreuses que les citadins cyclistes. En outre, la mise en place d’un questionnaire en ligne à produit l’effet inverse. J’ai pu obtenir cinq cents réponses en l’espace de vingt quatre heures. C’était un bon moyen d’obtenir rapidement des données chiffrées, mais les réponses libres sont quasiment impossibles à analyser. Une part de mon travail a donc été de trouverunéquilibredanslaquantitédematière à analyser. J’ai choisi de garder la diversité des propos et la personnalité de chacun par la retranscription d’entretiens, mettant parfois de côté des propos hors contexte, esseulés ou les exceptions.
  • 57. 112//Conclusion Lors de mes démarches sur le terrain, seule une personne a été désagréable, toutes les autres se sont montrées disponibles et ouvertes. Je n’ai cessé d’être surprise par les connaissances sur le sujet de chacun des cyclistes rencontrés : la majorité des cyclistes français portent en eux des valeurs, et savent parfaitement pourquoi ils ont choisi ce mode de transport. Bien souvent, les entretiens étaient en fait de réels échanges, nous étions mutuellement intéressés par le point de vue de l’autre. Ce travail m’a permis d’apprendre beaucoup sur le plan théorique et humain. D’une part, j’ai fait face à des difficultés d’organisation et de hiérarchie des informations, me laissant parfois impressionner par un nombre trop important de lectures qui semblaient déjà couvrir largement le sujet “vélo”. D’autre part, j’ai pu observer à quel point les personnes concernées et en particulier les vélocistes sont des experts dans le domaine, et une source d’information remarquables, de véritables passionnés. Malgré l’indifférence apparente des habitants de Copenhague pour la bicyclette, on ne peut nier que le vélo rythme leur quotidien. Elle a d’ailleurs très certainement contribué à certaines observations que j’ai pu faire là bas : très peu de personnes en surpoids, des rues peu bruyantes, la neige n’est pas maculée de pollution, et le climat général de la ville est décontracté et serein. Adapter la ville à la bicyclette pour que la nécessité, ou la contrainte de se déplacer, devienne le plaisir d’un sport quotidien. Il revient aux villes et à l’État de faciliter l’utilisation de la bicyclette en ville, et les moyens d’atteindre ce but sont variés : aménagement d’infrastructures cyclables, avantages fiscaux et économiques, aménagement des horaires de travail, etc. N’oublions pas que Copenhague n’était à l’origine pas plus “cycliste” que Paris, mais près de soixante ans ce sont écoulés depuis le début d’une politique en faveur du vélo à Copenhague. En France, le changement semble s’amorcer avec des villes comme Nantes et Strasbourg, qui agissent pour rendre les milieux urbains plus durables en faisant la promotion des mobilités douces. Cependant, le renouveau des cités est un long processus, et il me semble que c’est aussi aux citadins d’adapter leur ville dès à présent. Montpellier, bien que déjà engagée sur la voie du changement, n’est pas encore parfaitement adaptée à l’usage quotidien du vélo, et c’est une source d’inspiration quotidienne pour moi. Ce travail m’a permis de dégager les principales difficultésauxquellesfontfacelescyclistesactuels dans les rues de Montpellier : stockage, incivilité, méconnaissance du code de la rue, et manque d’aides gouvernementales. Cela m’a également permis de comprendre plus précisément à quel point l’usage du vélo en ville est relatif à des problèmes de société, d’une nouvelle économie collaborative, basé sur des principes écologiques et durables, et plus largement son aspect révélateur d’une démocratie, ou chaque citadin est acteur d’une société en devenir. C’est sur ces observations, et en m’appuyant sur le travail de terrain déjà effectué, que je peux aujourd’hui imaginer une multitudes de solutions pour simplifier le quotidien des cyclistes…
  • 58. 114 The traffic jam is the solution Lesembouteillagessontlasolution - RaquelRolnik,professeurd’urbanisme BikeVScars
  • 59. 116//Bibliographie Ouvrages BERTHO LAVENIR, C. Voyage à vélo : Du vélocipede au velib’. Paris : Paris bibliothèques. (2011) - 127p - COLLECTIF. Pour des espaces publics ordinaires de qualité. Paris : Gallimard/Fnau. (2014) - 128p. - URRY, J. Sociologie des mobilités. chap : Le voyager du corps ; Les sens. Paris : Armand Colin, U sociologie (2005)- 256p - RUBINI, C. La ville mobile. Saint Etienne : Cité du design édition. (2012) - 208p. - HÉRAN, F. . Le retour de la bicyclette : Une histoire des déplacements urbains en Europe, de 1817 à 2050. Paris : La découverte. (2014) - 255p - DALLONI, M. Le vélo. Chap 100 : Pourquoi le vélo ça ne s’oublie pas. (googlebooks) [en ligne] - DELERME, P. La Première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules : La bicyclette et le vélo. nc : Gallimard. [en ligne] - FOTTORINO, E. Petit éloge de la bicyclette. Novoprint : Gallimard, Folio- (2007) 135p. - SICH et al. Steel n°11. Paris : Steel. (2015) 114p. - TRONCHET, D. Petit traité de vélosophie. Paris : PLON. (2014) -199p - ZERBONE et al. Vélo. Nantes : 303. (2015) 119p. Articles ALBY, J. Mon fixie, mon amour. Citazine [en ligne], (2012). <http://www.citazine.fr/article/fixie-amour- cyclisme-sport> (5 octobre 2015). - ARLANDIS, F. La rue, fief des mâles. Le monde culture et idées [en ligne], (2012) <www.lemonde.fr/culture/ article/2012/10/04/la-rue-fief-des-males_1770418_3246. html>. (15 novembre 2015). - CASSELY, J-L. Comment le vélo est redevenu un sujet politique. Slate [en ligne], (2014) <http://www.slate.fr/ story/91051/velo-en-ville-luxe-distinction> (26 octobre 2015) - HÉRAN, F.Le vélo, une solution d’avenir ? MICHAUD, V. Pédaler pour mieux rouler. Sciences humaines n°40 (Ville durable) - (Automne 2015) - HENRY & LASLAZ. Politiques publiques et embourgeoisement des centres à Annecy et Chambéry : prémices de centralités sélectives en ville moyenne ? Métropolitique [en ligne], (2014) < http://www. metropolitiques.eu/Politiques-publiques-et.html >(5 novembre 2015). - JORDAN M. Deux-roues, quel supplice. Courrier international n°1290 - (14 Juillet 2015), [extrait de the wall street journal New york] - MENÉTREY & TONINATO. Slow Life : vers de beaux lents demains. CLES [en ligne], (nc). <http://www.cles. com/enquetes/article/slow-life-vers-de-beaux-lents- demains> (25 octobre 2015)
  • 60. 118//Bibliographie PASCAL, C. La dictature à vélo. Valeurs actuelles [en ligne], (2014) <http://www.valeursactuelles.com/ societe/la-dictature-a-velo-46444>. (26 octobre 2015). - RAZEMON O. Ces militants qui dessinent de fausses pistes cyclables. Le magazine du monde [en ligne], (2012). <http://transports.blog.lemonde. fr/2012/11/18/ces-militants-qui-dessinent-des- fausses-pistes-cyclables> (30 octobre 2015). - STARCKMAN & SCHOW. Cultural probes. Design research techniques [en ligne], (nc) <http:// designresearchtechniques.com/casestudies/cultural- probes/> (5 décembre 2015). - NC. Spinlister : et si vous partagiez votre vélo ?. Futur Mag, Arte tv [en ligne], (2015). <http://www.arte. tv/magazine/futuremag/fr/spinlister-et-si-vous- partagiez-votre-velo-futuremag> (20 septembre 2015). - N-C. La ville sociale : humaine avant tout. Silex ID n°04 (La ville) - (Été 2015) Vidéos GERTTEN F. (2015) Bike VS cars. WG Film AB [projection] - PANG. Vélorution. [youtube] (2014) <https://www. youtube.com/watch?v=3M05VQpQgqs>( 2 décembre 2015) - TATI, J. Jour de fête. Cady-Film /Francinex. (1969) - VÉDRINE L. La reine bicyclette : histoire des francais à vélo. Talweg production. [vimeo] (2013) < https:// vimeo.com/65131629> (22 aout 2015) - VASAK ET AL. Portland : bobo, bio, vélo. Arte G.E.I.E [en ligne ] (2011) < http://artereportage.universpodcast. com/episode/portland-bobo-bio-velo/> (15 septembre 2015) Sites Internet WORLD NAKED BIKE RIDE. <http://wiki.worldnakedbikeride.org/> (20 octobre 2015) - CARTE DE FRANCE. <www.cartesfrance.fr> (2 décembre 2015) - METEOFRANCE <www.meteofrance.com> (2 décembre 2015) - SITE OFFICIEL DU DANEMARK <http://www.denmark.dk> (5 décembre 2015) - EMBASSADE CYCLISTE DE COPENHAGUE <http://www.cycling-embassy.dk/> (5 décembre 2015) - CAMIDANE <www.caminade.eu> (24 septembre 2015) - VILLE ET VÉLO <http://ville-velo.jimdo.com/> (25 septembre 2015) - LAROUSSE <http://www.larousse.fr/> (4 octobre 2015) - ROETZ BIKE <https://www.roetz-bikes.com/> (4 octobre 2015) Pictogrammes Auclair, P-L. / Boatman, E./ Chuchla, P. / Cresnar, G / Fonseca, J,I. / Glaude, T. / Humphreys, L. / Kim, A,K / Vidal, P sur www.thenounproject.com
  • 61. 120//Tabledesmatières Remerciements Préambule  Sommaire Introduction Partage de la voirie Les autres, ces inconnus Cohabitation Culture & économie Phénomènes sociaux Objet d’amour Développement Communauté Rassemblement Réparation Rythme et humanité 4 6 8 10 16 18 20 22 26 30 70 72 74 Ressentir Souvenirs Méchanique interne Environnement Vélosophie Divagations : Montpellier Portrait : Mathieu (Dés)aménagement urbain Trajet occasionnel Intinéraire indéfinit Emplacements indéfinits Trajetquotidien Intermodalité Voie royale : Copenhague Portrait : Isabel Trajet quotidien Aménagement cyclables Vivre la ville des vélos Codes et habitudes Être cycliste Être social 68 Conclusion Bibliographie 32 34 36 40 42 44 48 50 52 54 56 58 62 64 78 80 86 90 94 96 100 104 108 114 Fiches annexes : Petit lexique cycliste. Aperçus urbains Ville de Montpellier Ville de Copenhague
  • 62.
  • 63. Touchées par des problématiques liées à la pollution, la santé publique, l’espace disponible, la congestion du trafic et le stress, les villes contemporaines sont à la recherche de solutions. Mode de déplacement qui apourtant ses contraintes, la bicyclette apparaît aujourd’hui comme une solution choisie par un grand nombre de citadins face à certains de ces problèmes. Comment la bicyclette modifie-t-elle nos modes de vie ? Pourquoi, malgré les contraintes qu’elle peut engendrer, est-elle souvent associée à un sentiment de plaisir ? Seuls les cyclistes le savent.
  • 64. 148 j 58 j10 - 15° Montpellier Résultats d’un questionnaire mis en ligne en octobre 2015 sur Facebook,dansdes“goupes”destinésauxhabitantsdeMontpellier. Personnes interrogées : 56,88 Km2 7-121 m x26 000 150 km Ø
  • 65. Pour vous, le vélo est synonyme de : Non Oui ...pourdesdéplacementsutilitaires (actuellement) ...commemoyendetransportprincipal (sil’aménagementurbain lepermettait) Utilisation de la bicyclette...
  • 66. Copenhague 88,25 Km2 2-12 m x569 555 390 km 101 j8° Chaqueannée,deuxfoisplusdekilomètressontparcourusàvélo qu’enmétro 50 % des habitants de Copenhague se rendent sur leur lieu detravailàvélo. 63%desdéputésserendentchaquejouràvéloauParlement, situédanslecentre. AucentrevilledeCopenhague: 560 000520 000 70%pensentquefaireduvéloaffectel’atmosphereurbaine