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Décision n° 2021-819 DC
du 31 mai 2021
(Loi relative à la gestion de la sortie de
crise sanitaire)
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les
conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, de
la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, sous le n° 2021-
819 DC, le 27 mai 2021, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc
MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie-
Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT,
Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume
GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Mme Chantal JOURDAN,
M. Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme
LAMBERT, Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe
NAILLET, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Dominique POTIER,
Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie
TOLMONT, Cécile UNTERMAIER, Hélène VAINQUEUR-
CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mme Michèle VICTORY, M. Gérard
LESEUL, Mmes Isabelle SANTIAGO, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo
BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline
FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO,
Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD’HOMME, Adrien QUATENNENS,
Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN,
M. François RUFFIN, Mmes Bénédicte TAURINE, Karine LEBON,
Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetaï BROTHERSON, Jean-
Philippe NILOR, Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET,
MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa
FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU,
Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Jean-Michel CLÉMENT,
Mme Frédérique DUMAS, MM. François-Michel LAMBERT, Jean
LASSALLE, Bertrand PANCHER, Mmes Jennifer de TEMMERMAN,
Martine WONNER, MM. Sébastien NADOT et Gabriel SERVILLE,
députés.
Le 28 mai 2021, le Premier ministre a demandé au Conseil
constitutionnel de statuer selon la procédure d’urgence prévue au troisième
alinéa de l’article 61 de la Constitution.
2
Au vu des textes suivants :
– la Constitution ;
– l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi
organique sur le Conseil constitutionnel ;
– la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à
l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ;
– le code pénal ;
– le code de la santé publique ;
– la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence
sanitaire et complétant ses dispositions ;
– la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-803 DC du
9 juillet 2020 ;
Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 29 mai
2021 ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE
QUI SUIT :
1. Les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la
loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire. Ils contestent la
procédure d’adoption de certaines dispositions de son article 1er
. Ils
contestent également certaines des dispositions de celui-ci. Ils contestent en
outre certaines dispositions de son article 7 et ses articles 8 et 12.
– Sur certaines dispositions de l’article 1er
:
. En ce qui concerne certaines dispositions du paragraphe I :
2. Le 1° du paragraphe I de l’article 1er
permet notamment au
Premier ministre d’interdire la circulation des personnes et des véhicules
dans les parties du territoire où une circulation active du virus est constatée.
3
Le second alinéa du 2° du même paragraphe I lui permet, notamment sous
cette même condition, d’ordonner la fermeture provisoire de certaines
catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de
réunion.
3. Les députés requérants soutiennent que, faute d’avoir défini la
notion de « circulation active du virus » permettant de prendre ces mesures,
le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence. Ils estiment par
ailleurs que, compte tenu des interprétations potentiellement multiples de
cette notion, ces dispositions risqueraient d’entraîner une atteinte à la liberté
d’aller et de venir, à la liberté d’entreprendre et à la liberté de réunion.
4. En premier lieu, selon l’article 34 de la Constitution, la loi fixe
les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens
pour l’exercice des libertés publiques. Il incombe au législateur d’exercer
pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier,
son article 34.
5. Les dispositions contestées permettent aux pouvoirs publics
d’interdire la circulation des personnes et des véhicules et d’ordonner la
fermeture provisoire de certaines catégories d’établissements recevant du
public ainsi que des lieux de réunion, à l’exception des locaux à usage
d’habitation, dans les parties du territoire dans lesquelles est constatée une
« circulation active du virus ». En employant ces termes, le législateur a
entendu permettre la mise en œuvre de ces mesures en cas de propagation
rapide de l’épidémie de covid-19, laquelle peut être appréciée en
considération d’indicateurs tels que l’évolution du taux d’incidence du virus
ou son facteur de reproduction. Ce faisant, le législateur n’a pas méconnu
l’étendue de sa compétence.
6. En second lieu, aux termes du onzième alinéa du Préambule
de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous … la protection de la
santé ». Il en découle un objectif de valeur constitutionnelle de protection de
la santé.
7. Il appartient au législateur d’assurer la conciliation entre cet
objectif de valeur constitutionnelle et le respect des droits et libertés
constitutionnellement garantis. Parmi ces droits et libertés figurent la liberté
d’aller et de venir, composante de la liberté personnelle protégée par les
articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789,
la liberté d’entreprendre qui découle de cet article 4, ainsi que le droit
4
d’expression collective des idées et des opinions résultant de l’article 11 de
cette déclaration.
8. Les mesures prévues par les dispositions contestées ne peuvent
être prononcées que pour la période allant du 2 juin au 30 septembre 2021,
durant laquelle le législateur a estimé, au regard notamment de l’avis du 21
avril 2021 du comité de scientifiques prévu par l’article L. 3131-19 du code
de la santé publique, qu’un risque important de propagation de l’épidémie
persistait. Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas
d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui
du Parlement, de remettre en cause l’appréciation par le législateur de ce
risque, dès lors que cette appréciation n’est pas, en l’état des connaissances,
manifestement inadéquate au regard de la situation présente.
9. Dès lors, pour les mêmes motifs que ceux énoncés dans la
décision du Conseil constitutionnel du 9 juillet 2020 mentionnée ci-dessus,
en adoptant les dispositions contestées le législateur a procédé à une
conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées.
10. Par conséquent, les mots « dans certaines parties du territoire
dans lesquelles est constatée une circulation active du virus, interdire la
circulation des personnes et des véhicules » figurant au 1° du paragraphe I
de l’article 1er
, ainsi que les mots « ou lorsqu’ils se situent dans certaines
parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du
virus » figurant au second alinéa du 2° de ce même paragraphe I, qui ne
méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la
Constitution.
. En ce qui concerne certaines dispositions du paragraphe II :
11. Le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er
permet au Premier
ministre, au cours de la période allant du 2 juin au 30 septembre 2021, de
subordonner l’accès à certains lieux, établissements ou événements
impliquant de grands rassemblements de personnes pour des activités de
loisirs ou des foires ou des salons professionnels à la présentation soit du
résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une
contamination par la covid-19, soit d’un justificatif de statut vaccinal
concernant la covid-19, soit d’un certificat de rétablissement à la suite d’une
contamination par la covid-19.
12. Les députés requérants contestent tout d’abord la procédure
d’adoption de ce 2°. Ils soutiennent que l’introduction de ces dispositions par
le Gouvernement par voie d’amendement avait pour objet de contourner les
5
obligations procédurales de présentation d’une étude d’impact et de recueil
de l’avis du Conseil d’État résultant de l’article 39 de la Constitution et de
l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus. Cette
volonté de contournement résulterait de ce que l’amendement à l’origine de
ces dispositions n’a été adopté que quelques jours après l’adoption du projet
de loi en conseil des ministres, alors que les questions qu’il traite auraient
fait l’objet de débats depuis plusieurs mois à l’échelle européenne.
13. Les députés requérants estiment ensuite que le législateur
aurait méconnu l’étendue de sa compétence en adoptant le 2° du A du
paragraphe II de l’article 1er
, lequel méconnaîtrait en outre l’exigence
d’intelligibilité et de clarté de la loi. Ils considèrent ainsi que la notion de
« grands rassemblements de personnes » est insuffisamment précise et que
le législateur aurait dû fixer lui-même un nombre minimal de personnes à
compter duquel ce « passe sanitaire » aurait pu être imposé. Il en serait de
même de la notion d’« activités de loisirs », qui serait insuffisamment
déterminée.
14. Enfin, ils estiment que ces dispositions violeraient le principe
d’égalité devant la loi si les examens de dépistage virologique n’étaient pas
gratuits dès lors, d’une part, que la vaccination est, pour sa part, gratuite et,
d’autre part, que certaines personnes ne peuvent se faire vacciner pour des
raisons indépendantes de leur volonté.
15. En premier lieu, l’article 39 de la Constitution et la loi
organique du 15 avril 2009 n’imposent la présentation d’une étude d’impact
et la consultation du Conseil d’État que pour les projets de loi et non pour
les amendements. Par conséquent, le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er
a été adopté selon une procédure conforme à la Constitution.
16. En deuxième lieu, l’objectif de valeur constitutionnelle
d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et
16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d’adopter des
dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. Il doit
en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la
Constitution ou contre le risque d’arbitraire, sans reporter sur des autorités
administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la
détermination n’a été confiée par la Constitution qu’à la loi.
17. D’une part, en permettant de subordonner l’accès des
personnes à certains lieux, établissements ou événements impliquant de
grands rassemblements de personnes, le législateur a entendu limiter
6
l’application des dispositions contestées aux cas où il est envisagé de mettre
en présence simultanément un nombre important de personnes en un même
lieu. Par ailleurs, il a précisé que cette réglementation doit être appliquée
« en prenant en compte une densité adaptée aux caractéristiques des lieux,
établissements ou événements concernés, y compris à l’extérieur, pour
permettre de garantir la mise en œuvre de mesures de nature à prévenir les
risques de propagation du virus ». Il appartiendra donc au pouvoir
réglementaire de prendre en compte les conditions effectives d’accueil du
public. Dès lors, en réservant l’application des dispositions contestées aux
cas de grands rassemblements de personnes, le législateur, qui n’avait pas à
déterminer un seuil minimal chiffré, n’a pas méconnu l’étendue de sa
compétence.
18. D’autre part, la notion d’activité de loisirs, qui exclut
notamment une activité politique, syndicale ou cultuelle, n’est ni imprécise
ni ambiguë.
19. Il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de la
méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et
d’intelligibilité de la loi et de la méconnaissance par le législateur de
l’étendue de sa compétence doivent être écartés.
20. En dernier lieu, les dispositions contestées ne sont ni relatives
aux conditions d’obtention des documents permettant l’accès aux lieux,
établissements ou événements impliquant de grands rassemblements de
personnes, ni au caractère payant ou non des actes donnant lieu à la
délivrance de ces documents. Dès lors, le grief tiré de ce qu’elles pourraient
créer une différence de traitement inconstitutionnelle entre les personnes,
selon le document qu’elles pourraient présenter, ne peut qu’être écarté.
21. Par conséquent, le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er
, qui
ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la
Constitution.
– Sur certaines dispositions de l’article 7 :
22. Le 1° du paragraphe I de l’article 7 de la loi déférée complète
l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus par un
paragraphe X afin de prévoir l’intégration au système national des données
de santé des données recueillies dans le cadre des systèmes d’information
mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de covid‑19.
7
23. Les députés requérants soutiennent que les dispositions
contestées méconnaîtraient le droit au respect de la vie privée. En effet, selon
eux, le transfert de ces données au sein du système national des données de
santé emporte un allongement de la durée de leur conservation qui ne serait
ni justifié ni proportionné. La protection de ces données médicales,
particulièrement sensibles, ne serait en outre pas assurée par des garanties
adéquates, dès lors qu’elles sont traitées sous une forme qui n’est pas
réellement anonyme et qu’elles sont susceptibles d’être mises à disposition
d’un grand nombre de personnes.
24. La liberté proclamée par l’article 2 de la Déclaration de 1789
implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte,
l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de
données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt
général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif.
Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale,
une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces
opérations et la détermination de leurs modalités.
25. L’article 11 de la loi du 11 mai 2020 prévoit que, par
dérogation à l’exigence fixée à l’article L. 1110-4 du code de la santé
publique, aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de
covid-19, les données à caractère personnel relatives à la santé des personnes
atteintes par ce virus et des personnes en contact avec elles peuvent être
traitées et partagées, sans le consentement des intéressés, dans le cadre d’un
système d’information ad hoc. Les données à caractère personnel ainsi
collectées ne peuvent, en principe, être conservées à l’issue d’une durée de
trois mois.
26. Les dispositions contestées prévoient que ces données sont
rassemblées au sein du système national des données de santé prévu à
l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, lorsqu’elles relèvent de son
champ, et précisent qu’elles sont soumises au chapitre Ier
du titre VI du livre
IV de la première partie du même code.
27. Ce faisant, les dispositions contestées permettent que ces
données soient conservées pour une durée maximale de vingt ans après leur
transfert et que les personnes mentionnées à l’article L. 1461-3 du code de la
santé publique soient autorisées à y accéder. Elles portent donc atteinte au
droit au respect de la vie privée.
8
28. Toutefois, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le
législateur a entendu améliorer les connaissances sur le virus responsable de
l’épidémie de covid-19, en particulier sur ses effets à long terme, et renforcer
les moyens de lutte contre celle-ci. Il a ainsi poursuivi l’objectif de valeur
constitutionnelle de protection de la santé.
29. Ensuite, il résulte du paragraphe III de l’article L. 1461-1 du
code de la santé publique que ces données peuvent être mises à disposition
pour des finalités limitativement énumérées : l’information sur la santé et
l’offre de soins, la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques
de santé, la connaissance des dépenses de santé, l’information des
professionnels et des établissements sur leurs activités, la surveillance, la
veille et la sécurité sanitaires, ainsi que la recherche, les études, l’évaluation
et l’innovation dans les domaines de la santé et de la prise en charge médico-
sociale.
30. Enfin, le paragraphe V du même article interdit le traitement
de ces données à des fins de promotion de médicaments ou de produits de
santé ou à des fins d’exclusion de garanties de contrats d’assurance ou de
modification de cotisations ou de primes d’assurance.
31. En deuxième lieu, en application de l’article L. 1461-4 du code
de la santé publique, le système national des données de santé ne contient ni
les noms et prénoms des personnes, ni leur numéro d’inscription au
répertoire national d’identification des personnes physiques, ni leur adresse.
S’agissant des données transférées en application des dispositions
contestées, sauf à méconnaître le droit au respect de la vie privée, cette
exclusion doit également s’étendre aux coordonnées de contact téléphonique
ou électronique des intéressés.
32. En troisième lieu, en application de l’article L. 1461-3 du code
de la santé publique, l’accès aux données rassemblées au sein du système
national des données de santé en application des dispositions contestées est
soumis, selon les cas, à une procédure de déclaration ou d’autorisation
préalable auprès de la Commission nationale de l’informatique et des
libertés. Ensuite, en application du 2° du paragraphe IV de l’article L. 1461-
1 du même code, les personnes autorisées à accéder à ces données sont
soumises au secret professionnel dans les conditions et sous les peines
prévues à l’article 226-13 du code pénal. En outre, en application du 3° du
paragraphe IV de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, l’accès
aux données s’effectue dans des conditions assurant la confidentialité et
l’intégrité des données et la traçabilité des accès et autres traitements. Enfin,
en application de l’article L. 1461-2 du même code, les données qui font
9
l’objet d’une mise à la disposition du public « sont traitées pour prendre la
forme de statistiques agrégées ou de données individuelles constituées de
telle sorte que l’identification, directe ou indirecte, des personnes
concernées y est impossible ».
33. En dernier lieu, il résulte du paragraphe II de l’article 7 de la
loi déférée que les personnes dont les données médicales sont rassemblées et
mises à disposition par le système national des données de santé en sont
informées « sans délai et par tout moyen ». Ces personnes sont également
informées « des conséquences juridiques qui en résultent, s’agissant
notamment de la durée de conservation de ces données, des personnes qui y
ont accès et des finalités en vue desquelles elles peuvent être traitées » et
« du droit d’opposition dont elles disposent en application de l’article 74 de
la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et
aux libertés ». Cette information est délivrée individuellement aux personnes
dont les données sont collectées à compter de l’entrée en vigueur de la loi
déférée.
34. Il résulte de ce qui précède que, sous la réserve énoncée au
paragraphe 31, le grief tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie
privée doit être écarté. Par conséquent, le paragraphe X de l’article 11 de la
loi du 11 mai 2020, qui ne méconnaît aucune autre exigence
constitutionnelle, est, sous la même réserve, conforme à la Constitution.
– Sur les articles 8 et 12 :
35. L’article 8 modifie un certain nombre de dispositions de lois et
ordonnances aux fins de prolonger et d’adapter des mesures
d’accompagnement de la crise sanitaire.
36. L’article 12 prévoit notamment l’habilitation du
Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures tendant à adapter et
prolonger certaines dispositions applicables en matière d’activité partielle,
de trêve hivernale et cyclonique et de revenus de remplacement.
37. Les députés requérants soutiennent que les demandes de
prolongation d’habilitation contenues dans ces articles ne satisferaient pas
les exigences de l’article 38 de la Constitution en raison des renvois qu’elles
opèrent vers de précédentes habilitations législatives rédigées dans des
termes imprécis. Il en résulterait également une méconnaissance des
exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
10
38. Contrairement à ce que soutiennent les députés requérants, ni
l’article 8 ni l’article 12 ne visent à permettre la prolongation de précédentes
habilitations législatives ou à autoriser le Gouvernement à prendre par
ordonnances des mesures dont le domaine d’intervention et les finalités
seraient définies par renvois à de précédentes habilitations législatives. Les
griefs manquent en fait et doivent donc être écartés.
– Sur les autres dispositions :
39. Le Conseil constitutionnel n’a soulevé d’office aucune
question de conformité à la Constitution et ne s’est donc pas prononcé sur la
constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la
présente décision.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er
. – Sous la réserve énoncée au paragraphe 31, le paragraphe X de
l’article 11 de la loi n° 2020‑546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence
sanitaire et complétant ses dispositions, dans sa rédaction résultant de
l’article 7 de la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, est
conforme à la Constitution.
Article 2. – Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la
même loi :
– les mots « dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée
une circulation active du virus, interdire la circulation des personnes et des
véhicules » figurant au 1° du paragraphe I de l’article 1er
, ainsi que les mots
« ou lorsqu’ils se situent dans certaines parties du territoire dans lesquelles
est constatée une circulation active du virus » figurant au second alinéa du
2° de ce même paragraphe I ;
– le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er
.
Article 3. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République
française.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 31 mai 2021,
où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY
MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne
11
LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel
PINAULT.
Rendu public le 31 mai 2021.

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DC Conseil Constitutionnel pass sanitaire

  • 1. Décision n° 2021-819 DC du 31 mai 2021 (Loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire) LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, de la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, sous le n° 2021- 819 DC, le 27 mai 2021, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie- Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT, Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Mme Chantal JOURDAN, M. Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe NAILLET, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie TOLMONT, Cécile UNTERMAIER, Hélène VAINQUEUR- CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mme Michèle VICTORY, M. Gérard LESEUL, Mmes Isabelle SANTIAGO, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO, Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD’HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, M. François RUFFIN, Mmes Bénédicte TAURINE, Karine LEBON, Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetaï BROTHERSON, Jean- Philippe NILOR, Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET, MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Jean-Michel CLÉMENT, Mme Frédérique DUMAS, MM. François-Michel LAMBERT, Jean LASSALLE, Bertrand PANCHER, Mmes Jennifer de TEMMERMAN, Martine WONNER, MM. Sébastien NADOT et Gabriel SERVILLE, députés. Le 28 mai 2021, le Premier ministre a demandé au Conseil constitutionnel de statuer selon la procédure d’urgence prévue au troisième alinéa de l’article 61 de la Constitution.
  • 2. 2 Au vu des textes suivants : – la Constitution ; – l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; – la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ; – le code pénal ; – le code de la santé publique ; – la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions ; – la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-803 DC du 9 juillet 2020 ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 29 mai 2021 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire. Ils contestent la procédure d’adoption de certaines dispositions de son article 1er . Ils contestent également certaines des dispositions de celui-ci. Ils contestent en outre certaines dispositions de son article 7 et ses articles 8 et 12. – Sur certaines dispositions de l’article 1er : . En ce qui concerne certaines dispositions du paragraphe I : 2. Le 1° du paragraphe I de l’article 1er permet notamment au Premier ministre d’interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les parties du territoire où une circulation active du virus est constatée.
  • 3. 3 Le second alinéa du 2° du même paragraphe I lui permet, notamment sous cette même condition, d’ordonner la fermeture provisoire de certaines catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion. 3. Les députés requérants soutiennent que, faute d’avoir défini la notion de « circulation active du virus » permettant de prendre ces mesures, le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence. Ils estiment par ailleurs que, compte tenu des interprétations potentiellement multiples de cette notion, ces dispositions risqueraient d’entraîner une atteinte à la liberté d’aller et de venir, à la liberté d’entreprendre et à la liberté de réunion. 4. En premier lieu, selon l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Il incombe au législateur d’exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34. 5. Les dispositions contestées permettent aux pouvoirs publics d’interdire la circulation des personnes et des véhicules et d’ordonner la fermeture provisoire de certaines catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l’exception des locaux à usage d’habitation, dans les parties du territoire dans lesquelles est constatée une « circulation active du virus ». En employant ces termes, le législateur a entendu permettre la mise en œuvre de ces mesures en cas de propagation rapide de l’épidémie de covid-19, laquelle peut être appréciée en considération d’indicateurs tels que l’évolution du taux d’incidence du virus ou son facteur de reproduction. Ce faisant, le législateur n’a pas méconnu l’étendue de sa compétence. 6. En second lieu, aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous … la protection de la santé ». Il en découle un objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 7. Il appartient au législateur d’assurer la conciliation entre cet objectif de valeur constitutionnelle et le respect des droits et libertés constitutionnellement garantis. Parmi ces droits et libertés figurent la liberté d’aller et de venir, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la liberté d’entreprendre qui découle de cet article 4, ainsi que le droit
  • 4. 4 d’expression collective des idées et des opinions résultant de l’article 11 de cette déclaration. 8. Les mesures prévues par les dispositions contestées ne peuvent être prononcées que pour la période allant du 2 juin au 30 septembre 2021, durant laquelle le législateur a estimé, au regard notamment de l’avis du 21 avril 2021 du comité de scientifiques prévu par l’article L. 3131-19 du code de la santé publique, qu’un risque important de propagation de l’épidémie persistait. Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, de remettre en cause l’appréciation par le législateur de ce risque, dès lors que cette appréciation n’est pas, en l’état des connaissances, manifestement inadéquate au regard de la situation présente. 9. Dès lors, pour les mêmes motifs que ceux énoncés dans la décision du Conseil constitutionnel du 9 juillet 2020 mentionnée ci-dessus, en adoptant les dispositions contestées le législateur a procédé à une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées. 10. Par conséquent, les mots « dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus, interdire la circulation des personnes et des véhicules » figurant au 1° du paragraphe I de l’article 1er , ainsi que les mots « ou lorsqu’ils se situent dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus » figurant au second alinéa du 2° de ce même paragraphe I, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. . En ce qui concerne certaines dispositions du paragraphe II : 11. Le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er permet au Premier ministre, au cours de la période allant du 2 juin au 30 septembre 2021, de subordonner l’accès à certains lieux, établissements ou événements impliquant de grands rassemblements de personnes pour des activités de loisirs ou des foires ou des salons professionnels à la présentation soit du résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, soit d’un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19, soit d’un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19. 12. Les députés requérants contestent tout d’abord la procédure d’adoption de ce 2°. Ils soutiennent que l’introduction de ces dispositions par le Gouvernement par voie d’amendement avait pour objet de contourner les
  • 5. 5 obligations procédurales de présentation d’une étude d’impact et de recueil de l’avis du Conseil d’État résultant de l’article 39 de la Constitution et de l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus. Cette volonté de contournement résulterait de ce que l’amendement à l’origine de ces dispositions n’a été adopté que quelques jours après l’adoption du projet de loi en conseil des ministres, alors que les questions qu’il traite auraient fait l’objet de débats depuis plusieurs mois à l’échelle européenne. 13. Les députés requérants estiment ensuite que le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence en adoptant le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er , lequel méconnaîtrait en outre l’exigence d’intelligibilité et de clarté de la loi. Ils considèrent ainsi que la notion de « grands rassemblements de personnes » est insuffisamment précise et que le législateur aurait dû fixer lui-même un nombre minimal de personnes à compter duquel ce « passe sanitaire » aurait pu être imposé. Il en serait de même de la notion d’« activités de loisirs », qui serait insuffisamment déterminée. 14. Enfin, ils estiment que ces dispositions violeraient le principe d’égalité devant la loi si les examens de dépistage virologique n’étaient pas gratuits dès lors, d’une part, que la vaccination est, pour sa part, gratuite et, d’autre part, que certaines personnes ne peuvent se faire vacciner pour des raisons indépendantes de leur volonté. 15. En premier lieu, l’article 39 de la Constitution et la loi organique du 15 avril 2009 n’imposent la présentation d’une étude d’impact et la consultation du Conseil d’État que pour les projets de loi et non pour les amendements. Par conséquent, le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er a été adopté selon une procédure conforme à la Constitution. 16. En deuxième lieu, l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. Il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d’arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n’a été confiée par la Constitution qu’à la loi. 17. D’une part, en permettant de subordonner l’accès des personnes à certains lieux, établissements ou événements impliquant de grands rassemblements de personnes, le législateur a entendu limiter
  • 6. 6 l’application des dispositions contestées aux cas où il est envisagé de mettre en présence simultanément un nombre important de personnes en un même lieu. Par ailleurs, il a précisé que cette réglementation doit être appliquée « en prenant en compte une densité adaptée aux caractéristiques des lieux, établissements ou événements concernés, y compris à l’extérieur, pour permettre de garantir la mise en œuvre de mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus ». Il appartiendra donc au pouvoir réglementaire de prendre en compte les conditions effectives d’accueil du public. Dès lors, en réservant l’application des dispositions contestées aux cas de grands rassemblements de personnes, le législateur, qui n’avait pas à déterminer un seuil minimal chiffré, n’a pas méconnu l’étendue de sa compétence. 18. D’autre part, la notion d’activité de loisirs, qui exclut notamment une activité politique, syndicale ou cultuelle, n’est ni imprécise ni ambiguë. 19. Il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de la méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi et de la méconnaissance par le législateur de l’étendue de sa compétence doivent être écartés. 20. En dernier lieu, les dispositions contestées ne sont ni relatives aux conditions d’obtention des documents permettant l’accès aux lieux, établissements ou événements impliquant de grands rassemblements de personnes, ni au caractère payant ou non des actes donnant lieu à la délivrance de ces documents. Dès lors, le grief tiré de ce qu’elles pourraient créer une différence de traitement inconstitutionnelle entre les personnes, selon le document qu’elles pourraient présenter, ne peut qu’être écarté. 21. Par conséquent, le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er , qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution. – Sur certaines dispositions de l’article 7 : 22. Le 1° du paragraphe I de l’article 7 de la loi déférée complète l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus par un paragraphe X afin de prévoir l’intégration au système national des données de santé des données recueillies dans le cadre des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de covid‑19.
  • 7. 7 23. Les députés requérants soutiennent que les dispositions contestées méconnaîtraient le droit au respect de la vie privée. En effet, selon eux, le transfert de ces données au sein du système national des données de santé emporte un allongement de la durée de leur conservation qui ne serait ni justifié ni proportionné. La protection de ces données médicales, particulièrement sensibles, ne serait en outre pas assurée par des garanties adéquates, dès lors qu’elles sont traitées sous une forme qui n’est pas réellement anonyme et qu’elles sont susceptibles d’être mises à disposition d’un grand nombre de personnes. 24. La liberté proclamée par l’article 2 de la Déclaration de 1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités. 25. L’article 11 de la loi du 11 mai 2020 prévoit que, par dérogation à l’exigence fixée à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19, les données à caractère personnel relatives à la santé des personnes atteintes par ce virus et des personnes en contact avec elles peuvent être traitées et partagées, sans le consentement des intéressés, dans le cadre d’un système d’information ad hoc. Les données à caractère personnel ainsi collectées ne peuvent, en principe, être conservées à l’issue d’une durée de trois mois. 26. Les dispositions contestées prévoient que ces données sont rassemblées au sein du système national des données de santé prévu à l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, lorsqu’elles relèvent de son champ, et précisent qu’elles sont soumises au chapitre Ier du titre VI du livre IV de la première partie du même code. 27. Ce faisant, les dispositions contestées permettent que ces données soient conservées pour une durée maximale de vingt ans après leur transfert et que les personnes mentionnées à l’article L. 1461-3 du code de la santé publique soient autorisées à y accéder. Elles portent donc atteinte au droit au respect de la vie privée.
  • 8. 8 28. Toutefois, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu améliorer les connaissances sur le virus responsable de l’épidémie de covid-19, en particulier sur ses effets à long terme, et renforcer les moyens de lutte contre celle-ci. Il a ainsi poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 29. Ensuite, il résulte du paragraphe III de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique que ces données peuvent être mises à disposition pour des finalités limitativement énumérées : l’information sur la santé et l’offre de soins, la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques de santé, la connaissance des dépenses de santé, l’information des professionnels et des établissements sur leurs activités, la surveillance, la veille et la sécurité sanitaires, ainsi que la recherche, les études, l’évaluation et l’innovation dans les domaines de la santé et de la prise en charge médico- sociale. 30. Enfin, le paragraphe V du même article interdit le traitement de ces données à des fins de promotion de médicaments ou de produits de santé ou à des fins d’exclusion de garanties de contrats d’assurance ou de modification de cotisations ou de primes d’assurance. 31. En deuxième lieu, en application de l’article L. 1461-4 du code de la santé publique, le système national des données de santé ne contient ni les noms et prénoms des personnes, ni leur numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques, ni leur adresse. S’agissant des données transférées en application des dispositions contestées, sauf à méconnaître le droit au respect de la vie privée, cette exclusion doit également s’étendre aux coordonnées de contact téléphonique ou électronique des intéressés. 32. En troisième lieu, en application de l’article L. 1461-3 du code de la santé publique, l’accès aux données rassemblées au sein du système national des données de santé en application des dispositions contestées est soumis, selon les cas, à une procédure de déclaration ou d’autorisation préalable auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ensuite, en application du 2° du paragraphe IV de l’article L. 1461- 1 du même code, les personnes autorisées à accéder à ces données sont soumises au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 226-13 du code pénal. En outre, en application du 3° du paragraphe IV de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, l’accès aux données s’effectue dans des conditions assurant la confidentialité et l’intégrité des données et la traçabilité des accès et autres traitements. Enfin, en application de l’article L. 1461-2 du même code, les données qui font
  • 9. 9 l’objet d’une mise à la disposition du public « sont traitées pour prendre la forme de statistiques agrégées ou de données individuelles constituées de telle sorte que l’identification, directe ou indirecte, des personnes concernées y est impossible ». 33. En dernier lieu, il résulte du paragraphe II de l’article 7 de la loi déférée que les personnes dont les données médicales sont rassemblées et mises à disposition par le système national des données de santé en sont informées « sans délai et par tout moyen ». Ces personnes sont également informées « des conséquences juridiques qui en résultent, s’agissant notamment de la durée de conservation de ces données, des personnes qui y ont accès et des finalités en vue desquelles elles peuvent être traitées » et « du droit d’opposition dont elles disposent en application de l’article 74 de la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ». Cette information est délivrée individuellement aux personnes dont les données sont collectées à compter de l’entrée en vigueur de la loi déférée. 34. Il résulte de ce qui précède que, sous la réserve énoncée au paragraphe 31, le grief tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée doit être écarté. Par conséquent, le paragraphe X de l’article 11 de la loi du 11 mai 2020, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est, sous la même réserve, conforme à la Constitution. – Sur les articles 8 et 12 : 35. L’article 8 modifie un certain nombre de dispositions de lois et ordonnances aux fins de prolonger et d’adapter des mesures d’accompagnement de la crise sanitaire. 36. L’article 12 prévoit notamment l’habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures tendant à adapter et prolonger certaines dispositions applicables en matière d’activité partielle, de trêve hivernale et cyclonique et de revenus de remplacement. 37. Les députés requérants soutiennent que les demandes de prolongation d’habilitation contenues dans ces articles ne satisferaient pas les exigences de l’article 38 de la Constitution en raison des renvois qu’elles opèrent vers de précédentes habilitations législatives rédigées dans des termes imprécis. Il en résulterait également une méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
  • 10. 10 38. Contrairement à ce que soutiennent les députés requérants, ni l’article 8 ni l’article 12 ne visent à permettre la prolongation de précédentes habilitations législatives ou à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures dont le domaine d’intervention et les finalités seraient définies par renvois à de précédentes habilitations législatives. Les griefs manquent en fait et doivent donc être écartés. – Sur les autres dispositions : 39. Le Conseil constitutionnel n’a soulevé d’office aucune question de conformité à la Constitution et ne s’est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er . – Sous la réserve énoncée au paragraphe 31, le paragraphe X de l’article 11 de la loi n° 2020‑546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions, dans sa rédaction résultant de l’article 7 de la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, est conforme à la Constitution. Article 2. – Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la même loi : – les mots « dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus, interdire la circulation des personnes et des véhicules » figurant au 1° du paragraphe I de l’article 1er , ainsi que les mots « ou lorsqu’ils se situent dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus » figurant au second alinéa du 2° de ce même paragraphe I ; – le 2° du A du paragraphe II de l’article 1er . Article 3. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 31 mai 2021, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne
  • 11. 11 LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 31 mai 2021.