1. Est-il possible que l'Italie
abandonne l'euro ?
Eric Dor
Forum Financier Belge Mons 5 décembre 2018
1
2. Plan
• L’Italie à la traîne
• Reproches formulés à l’euro
• Problèmes structurels
• Propositions de monnaies officieuses pour contourner l’euro
• Risque systémique
• Solvabilité de la dette publique italienne
• Conflit budgétaire entre l’Italie et l’UE
• Quelle chaîne de causalité pour mener à un Italexit?
• Hypothèse réaliste ?
3. 90
95
100
105
110
115
120
125
130
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
indice du produit intérieur brut réel par habitant
base 100 pour 1999
Belgique Allemagne Espagne France
Italie Autriche Pays Bas Portugal
5. Reproches formulés à l’euro en Italie
• les taux de conversion initiaux des anciennes monnaies nationales en
euros, en 1999, auraient impliqué d’emblée
• une surévaluation de l’euro pour l’Italie et d’autres pays du sud,
• et une sous-évaluation de l’euro pour l’Allemagne et d’autres pays,
• à l’aune des compétitivités nationales relatives
• Ce phénomène se serait ensuite aggravé en raison des écarts d’évolution
des salaires et des productivités
• Il en aurait résulté une forte perte de compétitivité pour l’Italie
• à laquelle il est impossible de remédier par une dépréciation monétaire comme par
le passé, avant la monnaie unique
• La perte de compétitivité, jointe à l’absence de mécanismes de coopération
et de coordination macroéconomique entre les pays de la zone euro, aurait
provoqué une stagnation économique du pays
6. Reproches formulés à l’euro en Italie
• Cette stagnation économique aurait contribué
• à gonfler le déficit public et la dette publique
• à entraîner une explosion du taux de défaut sur les emprunts bancaires
• Chargées de prêts peu performants, les banques italiennes sont
suspectées d’être ainsi empêchées de prêter suffisamment aux
entreprises et aux ménages
7. Reproches formulés à l’euro en Italie
• C’est pourquoi les efforts de la BCE pour inonder les banques de
financement à bon marché ou même à taux négatif, comme les TLTRO
dont les banques italiennes sont les principales bénéficiaires, seraient
peu efficaces pour relancer les prêts bancaires qui financeraient un
rebond de la consommation et de l’investissement.
• En l’absence de fédéralisme budgétaire en zone euro, l’Italie est
obligée par l’UE de répondre à son déficit excessif et à la dette
publique trop élevée par une politique d’austérité
• qui aggrave encore la stagnation économique et risque d’être contre-
productive
8. Reproches formulés à l’euro en Italie
• De la même manière l’Italie est censée améliorer la compétitivité et
ainsi augmenter ses exportations
• par une politique de réduction des coûts salariaux
• qui pèse sur la demande intérieure.
• L’euro entretiendrait donc l’austérité et en conséquence une
stagnation économique.
9. Reproches formulés à l’euro en Italie
• A cette interprétation de la stagnation de l’Italie s’oppose une autre
manière d’analyser la réalité
• La stagnation de l’Italie aurait peu à voir avec l’euro
• Le manque de croissance de l’Italie serait causé par des problèmes structurels
qui requièrent des réformes
• Quels seraient ces problèmes structurels?
10. Problèmes de productivité en Italie
• Productivité = quantité de biens et services produite par heure
travaillée
• La productivité stagne en Italie depuis le lancement de l’euro
• Et même depuis 1995
11. 95
100
105
110
115
120
125
130
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Indice du PIB réel par heure de travail prestée
mesure de la productivité
Belgique Allemagne Espagne France
Italie Pays-Bas Autriche Portugal
13. Problèmes de productivité en Italie
• En conséquence le coût salarial par unité produite a augmenté plus
vite en Italie qu’ailleurs dans la zone euro
• d‘où des problèmes de rentabilité des entreprises
• d‘où des problèmes d’attractivité de l’Italie pour y investir et créer des
emplois
14. 90
100
110
120
130
140
150
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Coût salarial par unité produite
indice base 100 pour 1999
Belgique Allemagne Espagne France
Italie Pays-Bas Autriche Portugal
15. Les problèmes structurels de l’économie
italienne
• Insuffisance de qualification de la population
• Dysfonctionnement du système éducatif
16. 52,0
48,9
40,9
39,1
27,1
23,6 23,2
22,1 21,6 21,6
19,9 18,9 18,7 18,0 17,2 16,2 16,0 15,0 14,7
13,5
12,1 11,7 11,2
9,6 8,6 7,9
6,2 5,2
0,0
10,0
20,0
30,0
40,0
50,0
60,0
Portugal
Malte
Espagne
Italie
Grèce
Luxembourg
Belgique
Roumanie
France
Pays-Bas
Royaume-Uni
Chypre
Danemark
Irlande
Bulgarie
Croatie
Hongrie
Autriche
Suède
Allemagne
Slovénie
Finlande
Estonie
Lettonie
Slovaquie
Pologne
Tchéquie
Lituanie
pourcentage de la population de 25 à 64 ans ayant au maximum
un diplôme du premier cycle de l'enseignement secondaire
17. 45,7
43,7 42,8 42,5 41,9
40,3 40,3 39,9 39,7 39,1
37,2 36,4
35,2
33,9
32,5 32,4
31,0
29,9
28,6 27,8
24,1 24,0 23,9 23,9 23,7 23,1
18,7
17,6
0,0
5,0
10,0
15,0
20,0
25,0
30,0
35,0
40,0
45,0
50,0
Irlande
Finlande
Royaume-Uni
Chypre
Suède
Belgique
Lituanie
Luxembourg
Estonie
Danemark
Pays-Bas
Espagne
France
Lettonie
Slovénie
Autriche
Grèce
Pologne
Allemagne
Bulgarie
Hongrie
Portugal
Tchéquie
Malte
Croatie
Slovaquie
Italie
Roumanie
Pourcentage de la population de 25 à 64 ans ayant un diplôme de
l'enseignement supérieur
18. 50,7 50,1 49,5
47,2 45,6
40,3 40,0 39,5 38,7
36,1 35,9 35,5 35,2 35,2 35,0 33,0 32,4 32,2 32,0 30,3 28,9
0,0
10,0
20,0
30,0
40,0
50,0
60,0
Puglia
Sicilia
Sardegna
Campania
Calabria
Valled'Aosta
Molise
Basilicata
Piemonte
Veneto
Lombardia
Marche
Toscana
Abruzzo
Liguria
Emilia-Romagna
Friuli-VeneziaGiulia
ProvinciaAutonomadi
Bolzano
Umbria
Lazio
ProvinciaAutonomadi
Trento
pourcentage de la population de 25 à 64 ans ayant au maximum
un diplôme du premier cycle de l'enseignement secondaire
19. 24,9
21,2 21,2 20,8 20,7 20,7 20,4 19,9 19,7 19,6
18,3 18,1 18,0 17,9
16,8 16,5 16,2 15,5 15,1
14,0 13,6
0,0
5,0
10,0
15,0
20,0
25,0
30,0
Lazio
Emilia-Romagna
Umbria
ProvinciaAutonomadiTrento
Toscana
Marche
Lombardia
Friuli-VeneziaGiulia
Molise
Liguria
Abruzzo
Piemonte
Valled'Aosta
Veneto
ProvinciaAutonomadiBolzano
Basilicata
Sardegna
Campania
Calabria
Puglia
Sicilia
Pourcentage de la population de 25 à 64 ans
ayant un diplôme de l'enseignement supérieur
20. Les problèmes structurels de l’économie
italienne
• Dépenses insuffisantes de recherche par les entreprises
• Peu de dépôts de brevets, comparés à ceux des autres pays
• Spécialisation productive dans des secteurs traditionnels à croissance
réduite
• Gouvernance des entreprises de piètre qualité
• structures familiales, recrutement en fonction du réseau plutôt que des
compétences
• Niveau limité de confiance entre les entre prises
• ce qui les empêche de coopérer en réseau pour améliorer leur efficacité et la
mettre sur le marché de bons produits
21. Les problèmes structurels de l’économie
italienne
• Inefficacité de l’administration publique
• temps démesurément long pour créer une entreprise
• Corruption
• Inefficacité du système judiciaire
• temps démesurément long pour procéder à une liquidation judiciaire
• ou pour obtenir gain de cause à propos d’un conflit commercial
22. Suggestions du lancement de monnaies
officieuses pour contourner l’euro
• Les minibots
• Les certificats de crédit d’impôt ou monnaie fiscale
23. lesleslesles minibotsminibotsminibotsminibots
• L’Etat paierait une partie de ce qu’il doit à ses fournisseurs, ou
fonctionnaires, en reconnaissances de dettes plutôt qu’en virements
bancaires ou billets officiels
• ces reconnaissances de dettes en euros seraient émises au porteur en
coupures standardisées, comme des billets de banque
• Le gouvernement s’engagerait à échanger ces reconnaissances de
dettes contre des vrais euros ultérieurement, à une date mentionnée
explicitement.
• ces reconnaissances de dettes fonctionneraient donc comme des
petites obligations émises par le gouvernement
• d’où l’appelation de minibots
24. lesleslesles minibotsminibotsminibotsminibots
• Le gouvernement garantirait toutefois que ces reconnaissances de dettes
puissent être utilisées à tout moment par leurs détenteurs pour payer leurs
impôts, à parité avec l’euro
• Cette garantie d’acceptation par le gouvernement, jointe à la promesse de
les échanger contre des euros à une date déterminée, leur conférerait une
valeur certaine
• Cela leur permettrait normalement d’être acceptés en paiement par les
commerçants, puisque ceux-ci seraient assurés de pouvoir les utiliser
ultérieurement pour leurs propres impôts.
• Les minibots circuleraient donc comme une monnaie supplémentaire, en
complément à l’euro
• Pour ses promoteurs, ces « minibots » seraient une espèce de quasi-
monnaie parallèle déjà en circulation qui rendrait possible ensuite de gérer
de manière souple une décision d’abandonner l’euro et de retourner à une
vraie monnaie nationale, sans pénurie temporaire de liquidités
25. Fragilité des banques italiennes
• Beaucoup de prêts peu performants
• Forte exposition à la dette publique de l’Italie
• Forte dépendance au crédit de la banque centrale
• Besoin de se recapitaliser ou d’émettre des obligations subordonnées
30. Risque systémique
• Exposition des banques étrangères à l’Italie
• Exposition de l’Eurosystème à l’Italie
• Pertes d’autres créanciers étangers en cas de retour de l’Italie à une
monnaie nationale dépréciée
• Choc de compétitivité pour les autres pays en cas de retour de l’Italie
à une monnaie nationale dépréciée
• Perte de crédibilité de l’euro en cas d’Italexit
31.
32.
33. EUROSYSTEME
BCE
BANK OF
GREECE
BUNDESBANK
BANCO DO
PORTUGAL
CENTRAL BANK OF IRELAND
TARGET2
BANQUES
ALLEMANDES BANQUES
GRECQUES
BANQUES
PORTUGAISES
BANQUE
DE FRANCE
BANQUES
ESPAGNOLES
BANQUES
IRLANDAISES
BANQUES
ITALIENNES
BANQUE
D’ESPAGNE
BANCA
D’ITALIA
BANQUES
FRANCAISES
Reste de l’Eurosystème 33
BANQUES
BELGES
BANQUE
NATIONALE DE
BELGIQUE
35. Solvabilité de la dette publique de l’Italie
• Conditions en termes de surplus primaire en pourcentage du PIB
• surplus primaire = recettes moins dépenses hors charges d’intérêt
• pour qu’en pourcentage du PIB, la dette publique d’une année reste
inférieure ou égale à ce qu’elle était l’année précédente
• Il faut que le surplus primaire, en pourcentage du PIB, soit supérieur ou égal à un
plancher
• qui diminue si le taux de croissance nominale du PIB augmente,
• mais augmente si le taux d’intérêt implicite augmente
36.
37. Solvabilité de la dette publique de l’Italie
• pour qu’en pourcentage du PIB, la dette publique diminue chaque
année d’un vingtième de de son écart avec l’objectif,
• Il faut que le surplus primaire, en pourcentage du PIB, soit supérieur ou égal à
un plancher augmenté
• qui diminue si le taux de croissance nominale du PIB augmente,
• mais augmente si le taux d’intérêt implicite augmente
38.
39. -10
-8
-6
-4
-2
0
2
4
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
Surplus primaire en pourcentage
du produit intérieur brut
Italy Spain France Portugal Belgium
40. Conflit entre l’Italie et l’UE
• budget du gouvernement pour 2019
• déficit public de 2,4% du PIB
• alors que la commission exige un maximum de 0,8% accepté par le
gouvernement précédent
• procédure de déficit excessif
• amendes ?
• Explication du gouvernement
• donner priorité à la relance de la croissance avant l’ajustement budgétaire
• qui sera plus facile ensuite avec une meilleure croissance
• Question essentielle
• La composition des dépenses supplémentaires est-elle vraiment de nature à
relancer la croissance ?
43. Critique méthodologique de l’application du
pacte de stabilité
• Le pacte de stabilité fixe des contraintes en terme du déficit structurel
• déficit observé corrigé de l’effet des cycles de l’activité et des mesures ponctuelles
• Pour corriger le déficit brut observé de l’effet des cycles de l’activité, et obtenir le
déficit structurel, on se base sur une estimation de l’écart de production
• Écart de production = différence entre le PIB réel observé et le PIB réel potentiel
• Pour calculer le déficit structurel de l’Italie, la Commission se base sur une
estimation de l’écart de production du pays qui serait de 0,5% en 2019
• la Commission affirme donc qu'en 2019, la production globale de l'Italie serait supérieure de
0,5% à ce qu'elle peut produire en utilisant au maximum le capital et la main d'oeuvre
disponible, sans créer d'inflation excessive
• Or il semble réaliste de considérer que le PIB réel observé est encore inférieur de
1 à 5% à la production potentielle
• Une estimation réaliste de l’écart de production, entre 1% et 5%, conduirait à un
moindre déficit structurel pour un même déficit brut
• Et donc le déficit structurel dépasserait moins la norme autorisée
46. Quelle chaîne de causalité pour mener à un
Italexit ?
• rôle des agences de notation
• Rôle de la BCE
47.
48. Quel réalisme ?
• Un compromis reste plausible car
• Le retour à une monnaie nationale serait certainement très impopulaire en
Italie
• Forte baisse du pouvoir d’achat au départ
• Les autres pays de l’Union Monétaire ont intérêt à ce que l’Italie reste dans la
zone euro