Livre blanc co-écrit par Les Ateliers de la Convergence et Catherine de Trogoff BPI group. "Pour un new deal social", Réconcilier Emploi, Compétitivité et Sécurité Juridique
3. Sommaire
Maintenir ou promouvoir l’emploi ?............................................ P. 4
1. L’entreprise, ses partenaires sociaux et le juge : une articulation
à redéfinir
A. L’analyse.................................................................................................................................. P. 8
• Le rôle du juge en matière de licenciement pour motif économique :
un objet d’interrogations pour les acteurs économiques............................................................P. 8
• La judiciarisation des relations sociales dans l’entreprise en restructuration :
symptôme d’un dialogue social déficient ?....................................................................................P. 10
• Un dialogue social équilibré et efficace dans l’entreprise ?......................................................P. 11
B. Les préconisations...........................................................................................................P. 13
2. Placer la personne au centre des actions de promotion de
l’emploi
A. L’analyse...............................................................................................................................P. 14
• Reconsidérer la responsabilité de l’entreprise face à l’objectif de promotion de
l’emploi........................................................................................................................................................P. 14
• Le droit du travail face à la complexité de l’organisation économique des entrepises :
un enjeu pour la sécurité juridique................................................................................................P. 14
• Les limites à l’hyper responsabilisation de l’employeur :
l’exemple de l’obligation de reclassement..................................................................................P. 15
• Redéfinir la responsabilité de l’entreprise à l’aune de la sécurisation des trajectoires
professionnelles des personnes .......................................................................................................P. 17
• Une question de principe : indemniser la perte d’emploi ou
favoriser les transitions professionnelles ?...................................................................................P. 17
• Une nécessité : accompagner réellement les transitions professionnelles
de tous les salariés................................................................................................................................P. 17
• Un nouveau cadre pour l’action : le développement d’approches territoriales
de la gestion de l’emploi....................................................................................................................P. 19
B. Les préconisations..........................................................................................................P. 20
Présentation des Ateliers de la Convergence............................................P. 21
Remerciements.........................................................................................................................P.22
4. 4
Maintenir ou
promouvoir l’emploi ?
Le droit du licenciement économique nourrit à l’évidence une finalité de protection de l’emploi.
Atteint-il son objectif ?
Pour essayer de répondre à cette question, la
tentation est grande de se tourner vers les
enseignements de la littérature économique.
Un expert relevait récemment que nombre
d’analyses économiques soulignent l’impact
négatif de la réglementation du licenciement
sur le fonctionnement du marché du travail.
Ainsi, il semble que, globalement, la rigidité des
conditions de licenciement conduit à favoriser une
segmentation du marché du travail, en dissuadant
les entreprises d’embaucher en contrat à durée
indéterminée1
.
D’autres travaux récents se sont attachés à rendre
compte de l’analyse des effets des « rigidités
réglementaires » du marché du travail sur l’équilibre
macroéconomique2
. Il en résulterait qu’un droit
social essentiellement réglementaire3
influence
négativement à la fois la productivité et l’équilibre
sur le marché du travail. Sur ce dernier point, les
contraintes d’un droit social réglementaire peuvent
contribuer à freiner l’embauche en raison de la
crainte qu’elles peuvent générer pour les entreprises
de rencontrer des difficultés à licencier quant la
conjoncture s’avère difficile.
1Voir P. Cahuc, La Cour de cassation a sauvé l’emploi, Challenges n° 300, 10 mai 2012.
2 Voir G. Cette et J. Barthélémy, Refondation du droit social : concilier protection des travailleurs et
efficacité économique, Conseil d’Analyse Economique.
3 Par opposition à un droit conventionnel, c’est-à-dire résultant de la négociation collective de branche
ou d’entreprise.
Plus avant, des études accréditent l’hypothèse que
les différences affectant la régulation des marchés
du travail nationaux, en regard de la rigueur de
la protection des emplois et de la générosité de
l’assurance chômage, constitue un « déterminant
clé de la vitesse d’insertion des jeunes sur le marché
du travail ». L’exemple danois souligne ainsi qu’un
niveau relativement faible de protection de l’emploi
influence positivement l‘emploi des 15-24 ans4
.
Enfin, les indicateurs de protection de l’emploi de
l’OCDE tendent à montrer, dans un contexte où
les performances du marché du travail français
semblent médiocres5
, que la France fait partie des
payspourlesquelslaréglementationconcernant
les emplois permanents est la plus exigeante6
.
4 A. Chéron, Un haut niveau de protection de l’emploi ralentit l’insertion des jeunes sur le marché du
travail, EDHEC, juillet 2011.
5 En regard notamment d’un taux de chômage qui demeure durablement élevé depuis de nombreuses
années.
6 Hervé Boulhol, économiste en charge du Desk France à l’OCDE, relève de surcroît que l’indicateur de
protection de l’emploi reflète la réglementation mais ne prend pas en compte les pratiques construites
par les acteurs autour de cette législation, ni l’application de celle-ci par le juge (Conférence des Ateliers
de la Convergence, Maison de la Mutualité, 27 mars 2012). Dans le cas français, ces paramètres sont
de nature à accroître le niveau de contrainte, si l’on considère d’une part la conflictualité mimétique
des restructurations conduites depuis 2009 (dossiers Continental, Caterpillar, Sony, Molex etc. et plus
récemment Fralib) et d’autre part l’interventionnisme jurisprudentiel palpable dans l’affaire Viveo
évoquée ci-après.
Indicateurs de protection de l’emploi dans les pays de l’OCDE
et certains pays hors de la zone OCDE (2008)
Protection des emplois permanents
contre les licenciements (individuels)
Obligations spéciales applicables
aux licenciements collectifs
Réglementation des formes
d’emploi temporaire
5. 5
On peut également observer que des coûts de
licenciement élevés et difficilement prévisibles
font baisser les flux de création et de destruction
d’emplois. De ce point de vue, ils « ralentissent le
processus schumpetérien d’adaptation face aux
transformations économiques7
».
Or, le besoin d’adaptation est amplifié par
les mutations profondes engendrées par la
globalisation. « Une trop forte protection de
l’emploi peut ainsi constituer un frein à la vitalité
et au dynamisme des entreprises, et donc à la
croissance, la compétitivité et la spécialisation des
entreprises »8
.
Ces analyses ne sont pas unanimement partagées.
Des approches pluridisciplinaires récentes
soulignent ainsi que les règles juridiques à l’œuvre
sur le marché du travail n’empêchent pas in fine les
employeurs d’adapter le volume de leurs effectifs à
la situation économique9
.
Il n’en reste pas moins qu’au-delà des discussions
académiques, des constats statistiques permettent
eux aussi de questionner l’efficacité de la protection
de l’emploi telle que nous la concevons. En premier
lieu, le volume des inscriptions enregistrées à
Pole Emploi à la suite d’un licenciement pour
motif économique apparaît singulièrement faible
comparé à celui afférent aux fins de contrats à durée
déterminée. Au plus fort de la première phase de
la crise (2008-2009), seuls 4 % des inscriptions
à Pôle Emploi concernaient des licenciements
économiques, alors que ce taux montait à 33 %
pour les intérimaires et les CDD10
. Le chiffre est
aujourd’hui de 3 %. Cette différenciation forte n’est
pas nouvelle et semble structurelle.
Une observation cruciale peut être tirée de ces
constats statistiques : l’attention ordinairement
portée par les médias, et à leur suite par l’opinion
publique, sur les situations de licenciement
économique est sans commune mesure avec la
part que ce motif de rupture représente parmi
l’ensemble des causes d’entrée au chômage. Dans
ces conditions, peut-on vraiment considérer
que le droit du licenciement économique est
le meilleur outil pour assurer la promotion de
l’emploi de tous ?
7 Intervention de M. Hervé Boulhol, Conférence des Ateliers de la Convergence, 27 mars 2012.
8 Intervention de M. Hervé Boulhol, Conférence des Ateliers de la Convergence, 27 mars 2012.
9 B. Gomel, D. Méda, E. Serverin, le licenciement pour motif économique est-il juridiquement risqué en
France ? Connaissance de l’Emploi n° 72, Centre d’Études de l’Emploi, septembre 2010.
10 Données citées par C. de Froment, Conférence des Ateliers de la Convergence, 27 mars 2012.
Il faut permettre aux
entreprises de prévoir les coûts
économiques associés à la
rupture des contrats pour ne
pas nuire à l’embauche.
Stephane Gregoir, Associate Dean for
Faculty and Research, EDHEC
Entrées à Pôle Emploi par motif
(catégories A, B, C) – cvs-cjo en milliers, Pôle Emploi, DARES
Entrées à Pôle Emploi par motif
(catégories A, B, C) – cvs-cjo en milliers, Pôle Emploi, DARES
6. 6
Par ailleurs, le marché du travail français est aujourd’hui largement marqué par sa segmentation. Depuis
les années 80, la part des emplois à durée déterminée (CDD et intérim) dans les embauches n’a cessé de
progresser.
Cette segmentation se caractérise par de profondes différences de situation sociale entre les titulaires de
CDIetlestitulairesdecontratstemporaires.Sil’occupationd’unemploitemporairen’estpasnécessairement
synonyme de précarité sociale, il n’en reste pas moins que les contrats courts concernent surtout certaines
catégories de la population (jeunes, travailleurs les moins diplômés, femmes, ouvriers non qualifiés et
employés). Or, ces dernières sont les premières affectées par les retournements de conjoncture, comme
la crise le rappelle cruellement. Par ailleurs, la probabilité que le contrat court constitue un tremplin vers
l’emploi dit stable est largement influencée par l’âge et le niveau de qualification, traduisant ainsi le risque
d’un enfermement durable des personnes dans un enchaînement de phases de chômage et d’occupation
de contrats courts11
. Enfin, pour les personnes aux marges du marché du travail, il fait peu de doute que
l’accès au logement est singulièrement difficile12
ainsi d’ailleurs, que l’accès au crédit.
11 Plusl’onavanceenâgeetmoinsl’onestqualifié,pluslerisqued’enfermementexiste.Surl’ensembledelaquestion,voirConseild’Orientationpourl’Emploi,Rapportsurlestrajectoiresetlesmobilitésprofessionnelles,
2009.
12 P. Cahuc, F. Kramarz, De la précarité à la mobilité : vers une sécurité sociale professionnelle, Documentation Française, 2004, p. 21 et s.
Développement des formes particulières d’emploi tous âges confondus
Champ : France métropolitaine, population des ménages, personnes de 15 ans et plus.
Source : Insee, enquête Emploi corrigée de la rupture de série en 2003.
Stéphane Lardy, Secrétaire confédéral, Force Ouvrière
Il faut susciter un véritable choc en faveur de la jeunesse de ce pays.
7. 7
Dès lors, peut-on encore ignorer que la protection de l’emploi envisagée au travers du prisme du
licenciement économique ignore une large part des salariés ?
Une partie de la réponse à cette question réside certainement dans une réflexion approfondie autour de la
diversité des statuts d’emploi et de ses impacts sociaux13
.
Au-delà, plutôt que de parier sur une conservation illusoire de l’emploi dans un contexte de mutations
économiques permanentes, n’est-il pas plus que temps d’investir sur le développement de l’employabilité
des personnes aux fins de promouvoir l’emploi du plus grand nombre ?
La promotion de l’emploi n’est aucunement réductible au maintien de l’emploi. Il est urgent de modifier les
postures auxquelles nous sommes, les uns et les autres, accoutumés et d’alimenter l’indispensable débat
pour réconcilier emploi et compétitivité des entreprises dans un monde en perpétuelle évolution.
C’est l’objectif de ce Livre Blanc.
13 Sur ces aspects et les préconisations associées, voir tout particulièrement C. de Froment, Flexibilité responsable - Dépasser le dualisme du marché du travail, Les Notes de l’Institut, Institut de l’Entreprise,
décembre 2011.
Champ : France métropolitaine, population des ménages, personnes de 15 ans à 24 ans.
Source : Insee, enquête Emploi corrigée de la rupture de série en 2003.
Développement des formes particulières d’emploi
chez les jeunes de 15 à 24 ans
8. 8
arrêt Viveo rendu le 12 mai 2011 par la Cour
d’Appel de Paris a suscité un vif émoi dans les
milieux économiques. Ce dernier a été encore
conforté par le prononcé d’une série de décisions de
première instance postérieures et convergentes15
.
Dans ces affaires, le juge conclut à la nullité de la
procédure de licenciement économique dès lors
que le motif économique, la cause économique,
est jugée absente. La solution est inédite16
et, ainsi
qu’en attestent les vifs débats doctrinaux auxquels
elle a donné lieu, ne va pas de soi, concernant en
particulier l’application de la sanction de la nullité
dansunetellehypothèse.C’estsansdoutepourcette
raison que la Cour de Cassation n’a pas manqué, par
un arrêt du 3 mai 2012, de censurer la position des
magistrats parisiens. Pourtant, dès le 22 mai 2012, le
TGI de Créteil résistait à la jurisprudence de la Haute
Cour et reprenait la solution retenue par la Cour
d’appel de Paris sur un fondement voisin17
.
Cette saga judiciaire renvoie à une question
ancienne et majeure : comment définir le rôle
du juge face aux mutations économiques pour
concilier protection de l’emploi, compétitivité des
entreprises et sécurité juridique ?
Le sujet est évidemment sensible et donne souvent
lieu à des prises de position caricaturales, qu’il
s’agisse, d’un côté, de plaider pour un rôle actif du
juge sans considération pour la réalité économique
au nom de la protection de l’emploi ou, de l’autre,
de disqualifier par principe l’intervention judiciaire
au nom de ses impacts économiques négatifs
sur l’entreprise. De là, le constat fréquent mais
remédiable d’une « incommunicabilité »18
de
14 Ce qui inclut les représentants syndicaux désignés comme les représentants élus du personnel.
15 SpécialementdeuxjugementsduTGIdeNanterredes21 octobreet16 décembre2011etunarrêtdela
Cour d’appel de Reims du 3 janvier 2012.
16 Un jugement du Conseil de Prud’hommes d’Amiens en date du 27 octobre 1999 (affaireYoplait) avait
certes adopté une position similaire mais il avait été bien vite infirmé en appel.
17 Pouruneanalysecroiséedecettedécision,v. TatianaSachs,« Dubonusagedelafraudedansledroitdu
licenciementpourmotiféconomique »etJeanMartinez,« Premièrerésistanceàl’arrêtViveo :vitesseet
précipitation », in Semaine Sociale Lamy, 12 juin 2012.
18 Pour reprendre le terme utilisé par M. Guy Canivet, in L’approche économique du droit par la Chambre
sociale de la Cour de Cassation, Droit social, novembre 2005.
principe entre le droit du travail, serviteur univoque
de finalités sociales, et l’analyse économique.
On doit pourtant se défier ici de conclusions trop
hâtives. Ainsi qu’en témoignent régulièrement de
Hauts magistrats de la Cour de Cassation, le juge du
travail n’ignore pas, dans son activité quotidienne,
le fait économique. L’important arrêt SAT19
, non
démenti jusqu’alors, témoigne du refus de la
jurisprudence de la Cour de Cassation d’opérer un
contrôle de proportionnalité sur les décisions de
l’employeur, en imposant à ce dernier d’opter, parmi
plusieurs hypothèses, pour la solution la moins
coûteuse en termes d’emploi.
À l’inverse pourtant, nombre de décisions
jurisprudentielles témoignent du souci du juge de
préserver l’emploi dans l’interprétation des règles
du licenciement pour motif économique.
Demeure ainsi une incompréhension
récurrente sur la pertinence économique des
interprétations judiciaires. Celle-ci nous semble
renvoyer à deux problématiques qu’il faut sans
doute considérer conjointement pour sortir de
« l’incommunicabilité » apparente entre le monde
judiciaire et le monde de l’entreprise.
La première a trait à la multiplication des situations
dans lesquelles le juge du travail est conduit à
interpréter la loi dans une mesure telle qu’il fait
bel et bien figure de créateur de normes. Normes
jurisprudentielles néanmoins, et de ce fait non
parées des garanties de clarté et de stabilité
normalement revêtues par la loi. Cette situation
n’est pas inexplicable. Ainsi que l’indiquait un
acteur averti20
, « C’est le législateur qui définit
ce que contrôle le juge ». Dans ce cadre, il est
aisé d’observer que les nombreuses évolutions
législatives ayant marqué le droit du licenciement
économique, entre autres, ont été placées sous le
19 Rendu en matière de contrôle de la cause économique du licenciement par la Chambre Sociale de la
Cour de Cassation le 8 décembre 2000.
20 Intervention du ConseillerYves Struillou lors de la conférence des Ateliers de la Convergence le 27 mars
2012.
La problématique du maintien de l’emploi trouve particulièrement à s’illustrer au travers de
l’application du droit du licenciement pour motif économique. Elle met dès lors aux prises une
diversité d’acteurs, dans l’entreprise (l’employeur, les représentants du personnel et les salariés) et
hors de l’entreprise où le juge fait figure d’instance majeure de contrôle voire de régulation. Il est
aujourd’hui nécessaire d’interroger l’articulation et le positionnement de ces acteurs.
• Le rôle du juge en matière de licenciement pour motif économique : un objet
d’interrogations pour les acteurs économiques
1. L’entreprise, ses partenaires sociaux et le juge :
une articulation à redéfinir
A. L’analyse
L’
9. 9
signe du maintien de l’emploi, l’emploi des salariés
individus et l’emploi dans l’entreprise en général.
Cet objectif fait alors logiquement figure de fil
directeur des interprétations judiciaires. Ce n’est dès
lors pas seulement le rôle du juge qui est en cause
mais celui d’un législateur ayant progressivement
délégué à ce dernier, au moins partiellement, ses
responsabilités dans la définition et l’édiction de la
règle de droit.
Cependant, au-delà même de l’imprécision
des notions juridiques de source légale et
réglementaire21
, le juge est enclin à exercer un
travail d’interprétation toujours plus large,
qui ne semble pas tant mû par la nécessité de
préciserlesensdelaloiqueparceluidel’orienter
systématiquement dans un sens de protection
du salarié et de l’emploi. Le juge se perçoit souvent
comme le dernier rempart pour protéger le salarié
face aux débordements du monde économique22
.
Une opinion, empreinte d’une fausse évidence,
justifie cette démarche au motif que le droit du
travail serait tout entier orienté vers la protection
du salarié. Conçu comme tel par la loi, il devrait
nécessairement être interprété comme tel par le
juge. Mais si le droit du travail est pensé initialement
comme un outil visant à protéger la partie faible au
contrat,ilnesauraitéchapperauprinciped’équilibre
qui marque l’essence du droit. La protection ne
saurait être absolue sans porter atteinte à d’autres
principes essentiels, au nombre desquels la liberté
d’entreprendre. Du reste, plusieurs interventions
législatives, depuis les années 1980, tendent à
affirmer concrètement ce principe d’équilibre,
d’une part en autorisant des dérogations à la loi
au profit de la négociation collective, d’autre part
en assignant aux règles protégeant les salariés
des limites ou des contrepoids tenant compte de
l’intérêt de l’entreprise. Or le juge tend à cantonner
ou à désactiver ces limites et contrepoids.
Les exemples ne manquent pas concernant plusieurs
lois visant à renforcer la sécurité juridique et la
compétitivité des entreprise. Il en va ainsi de la
loi n° 86-1320 du 31 décembre 1986 qui remanie
la procédure de licenciement collectif et instaure
« des délais contractuels et légaux sensiblement
raccourcis » visant à permettre « aux employeurs
d’ajuster plus rapidement leurs effectifs aux
exigences de la production et de préserver ainsi
la compétitivité des entreprises et la pérennité
des emplois dont le maintien est envisagé »23
. La
jurisprudence décidera pourtant que ces délais
gouvernant la procédure de consultation propre
au licenciement économique doivent céder devant
21 Voir par exemple la définition « ouverte » du motif économique de licenciement – art. L. 1 233-3 du
Code duTravail.
22 Plusieurs observateurs avertis adoptent cette interprétation : v. J-D Combrexelle, « L’entreprise face au
risquesocial»,LesCarnetsd’Altedia,janvier 2012etJ-ERay,matinéedébatAJIS/SemainesocialeLamy
2 mai 2012.
23 Les citations sont extraites de l’exposé des motifs de ce texte.
le « délai d’examen suffisant » garanti au CE par
les dispositions générales de l’article L.2323-424
.
La loi Borloo du 18 janvier 2005 tendait quant à
elle à sécuriser les procédures en ramenant à un
an le délai de prescription relatif à la contestation
du licenciement économique, mais la Cour de
cassation jugera cet aménagement applicable aux
seules actions dirigées contre la validité du plan de
sauvegarde de l’emploi et non à celles contestant la
validité du motif économique. De même, le délai de
forclusion de l’action du Comité d’Entreprise relative
aux irrégularités de procédure (article L. 1235-7 du
Code du travail) ne sera pas jugé applicable aux
actions à jour fixe25
. Rappelons enfin le contentieux
généré par le défunt contrat nouvelles embauches
(CNE). La Cour d’appel de Paris a invalidé
l’ordonnance instituant le CNE, sur le fondement
de la convention n° 158 de l’OIT, aux motifs, entre
autres, « que dans la lutte contre le chômage, la
protection des salariés dans leur emploi semble
être un moyen au moins aussi pertinent que les
facilités données aux employeurs pour les licencier
et qu’il est pour le moins paradoxal d’encourager les
embauches en facilitant les licenciements ».
Ce rempart judiciaire souligne surtout qu’un
vide reste à remplir : plutôt que de dissuader
les licenciements, il conviendrait d’œuvrer à
sécuriser les parcours professionnels dans une
perspective dynamique (v. infra 3.).
La position tendant à dénier toute légitimité
à l’intervention judiciaire dans l’évaluation
des décisions économiques de l’employeur26
est fortement contestée par l’économie dite
hétérodoxe27
ainsi que par des organisations
syndicales28
. Sans aller jusque là, il paraît nécessaire
de permettre que le juge du travail appréhende
mieux les réalités économiques dont il est saisi29
.
24 Ex. L. 431-5 al.2. Soc. 16 avril 1996, n° 93-20228, Sietam Industries.
25 Soc., 26 juin 2008, n° 07-41.786. La lettre de la loi vise en effet les actions en référé, mais l’esprit du
texte aurait pu conduire à étendre la règle aux actions à jour fixe. La Cour de cassation n’a pas manqué
de procéder à ce type d’extension dans l’intérêt du salarié, en disant par exemple que le reclassement
du salarié inapte devait être recherché dans le groupe, alors que l’article L. 1 226-4 du Code du travail
ne vise que l’entreprise.
26 Thèse soutenue par certains économistes, voir O. Blanchard et J. Tirole, Protection de l’Emploi et
procédures de licenciement, La Documentation Française, 2003.
27 VoirparexempleF.Eymard-Duvernay,L’encadrementjuridiquedulicenciementmisenquestionparles
économistes, Centre d’Études de l’Emploi, août 2004.
28 Entretien S. Lardy, secrétaire confédéral CGT-FO, 20 juin 2012.
29 En ce sens, voir G. Canivet, précité.
Marcel Grignard, Secrétaire national CFDT
Le juge est un acteur essentiel du
règlement des conflits dans un Etat de
droit. En revanche, il est impossible de
construire l’équité en simplifiant des
problèmes complexes. De ce point de
vue les solutions négociées sont souvent
préférables au règlement judiciaire.
10. 10
• La judiciarisation des relations sociales dans l’entreprise en restructuration :
symptôme d’un dialogue social déficient ?
Le juge est fréquemment mobilisé au cours des
procédures de licenciement collectif. A ce titre
certains acteurs soulignent que les organisations
syndicales ont aujourd’hui clairement intégré la
menace de recours au juge dans leurs stratégies
d’action30
. Aux yeux de nombreux praticiens du
droit, le processus d’information/consultation des
institutions représentatives du personnel (IRP),
qui n’est pas contestable en lui-même, aboutit
ainsi souvent à des excès dont il convient de saisir
la signification profonde31
. La saisine du juge
conduit en pratique à l’allongement de la durée
des processus de restructuration. Cet allongement
prend sa place dans la construction d’un rapport
de force par les représentants des salariés au sein
de l’entreprise. Pour autant, le rapport de force
ainsi établi n’est pas nécessairement synonyme
de bénéfice à moyen et long terme pour les
salariés impactés par une restructuration. Un long
processus d’information/consultation accroîtra les
coûts de rupture et la période d’incertitude pesant
sur l’ensemble de l’entreprise, sans nécessairement
faciliter les parcours professionnels ultérieurs des
salariés ni la mise en œuvre d’une revitalisation des
territoires efficaces. En effet, en raison des obstacles
ou des craintes suscitées par la protection légale
des représentants du personnel, notamment le
délit d’entrave qui sanctionne les mesures prises
avant la consultation du comité d’entreprise lorsque
celle-ci est requise, les employeurs sont dissuadés
de mettre à profit le temps de la consultation
pour anticiper l’accompagnement des transitions
professionnelles32
. Ces dernières paraissent
pourtant d’autant plus cruciales que la rupture des
contrats de travail ne sera finalement pas, au bout
du compte, évitée.
« Les rapports de force sont utiles mais ils doivent
avoirpourseulobjectifdeservirl’intérêtdessalariés
en leur ouvrant des voies réelles de reclassement. »
Catherine de Trogoff, Directeur associé BPI
On observe donc que le processus juridique
d’information/consultation cache en réalité une
négociation qui ne dit pas son nom. La nature de
ce processus le place dans l’orbite de la négociation
– les uns veulent des maintiens d’emploi et/ou une
compensation financière, les autres veulent de la
30 Entretien N. deWarren, directeur des relations institutionnelles du groupe ARKEMA, réalisé le 27 juin
2012.
31Voirparexemplel’interventiondeJ.MartinezlorsdelorsdelaconférencedesAteliersdelaConvergence
le 27 mars 2012.
32 Pour, par exemple, mettre en place aussitôt que possible une cellule de mobilité/reclassement, sans
attendre l’issue de la procédure d’information/consultation, Entretien N. de Warren, directeur des
relations institutionnelles du groupe ARKEMA, réalisé le 27 juin 2012.
rapidité, de la flexibilité et de la sécurité – mais les
outils de ce processus, qui relèvent de la mécanique
parfois stérile de l’information-consultation, y
restent étrangers. Réserve faite de l’hypothèse
toute facultative de la conclusion d’un accord de
méthode, la discussion avec les représentants du
personnel est marquée, juridiquement, par son
unilatéralité. L’employeur est censé « présenter »
un plan de sauvegarde de l’emploi, aucunement le
négocier. Le comité d’entreprise va donc chercher
dans son droit à l’information, particulièrement
étendu33
, les moyens de peser sur l’employeur. En
définitive, les organisations syndicales ne seront pas
parties au plan de sauvegarde de l’emploi, qu’elles
resterontlibresdecontesterenjustice,mêmesidans
les faits, elles l’ont négocié par la voie détournée du
processus d’information/consultation.
Bien évidemment, ces situations peuvent apparaître
pathologiques et ne peuvent évacuer les exemples
où,faceàunenécessairerestructuration,undialogue
social de qualité se noue entre l’employeur et les
représentants du personnel34
. Mais la confrontation
des expériences révèle justement à quel point un
dialogue social assumé, une négociation réelle
entre l’employeur et les représentants du personnel
sur les modalités de la réorganisation et ses
conséquences pour les salariés, permet de contenir
les effets délétères d’une conflictualité inévitable
dans son principe. Aboutir à un tel résultat peut
supposer de la part des directions d’entreprise de
sortir de logiques de dissimulation en s’attachant
à favoriser la transparence de l’information de
manière systématique, y compris à froid35
.
« Personne ne veut a priori de la judiciarisation,
si cette dernière existe, c’est en raison du déficit
de transparence et d’anticipation imputable aux
entreprises. »
Stéphane Lardy, Secrétaire confédéral Force
Ouvrière
En somme, la judiciarisation des restructurations
témoigne d’un dialogue social déficient et c’est
aux conditions d’émergence d’une négociation
assumée comme telle dans l’entreprise qu’il faut
s’intéresser36
.
33 À titre d’exemple, l’expert nommé par le CE pour l’assister dans l’examen du projet présenté par
l’employeur est considéré comme « seule juge » des informations nécessaires à sa mission, ce qui
lui donne la possibilité d’exiger toute information sociale, financière ou économique au niveau de
l’entreprise comme du groupe.
34Voir à cet égard les exemples de traitement des restructurations au sein du groupe ARKEMA fournis par
N. deWarren, lors de la conférence des Ateliers de la Convergence le 27 mars 2012.
35 Entretien avec N. de Warren réalisé le 27 juin 2012, qui souligne, de surcroît, que cette recherche de
transparence passe, au sein du groupe ARKEMA, par une implication systématique dans les processus
de dialogue social des « patrons » de business units, véritables décideurs au plan opérationnel .
36 En ce sens, ASTREES, Les restructurations en France, rapport national, ITC/ILO, juin 2009.
11. 11
Une idée générale semble aujourd’hui assez
largement partagée : pour concilier promotion de
l’emploi et compétitivité des entreprises, c’est à la
restauration d’un contrat de confiance entre les
différentes parties prenantes de l’entreprise qu’il
convient de travailler. Si l’on peut s’accorder sur un
tel objectif, la véritable interrogation porte sur ce
qu’est et ce qu’implique un tel contrat de confiance.
Une telle ambition suppose probablement, et avant
tout, un changement de posture des acteurs du
dialogue social dans l’entreprise.
« L’innovation sociale ne peut résulter du seul
cadre juridique. Un dialogue social permettant
de préserver les intérêts des uns et des autres et de
construire des compromis équilibrés est un objectif
majeur. »
Marcel Grignard, Secrétaire national CFDT
Àcetégard,lesexemplesétrangerssontintéressants,
en particulier le modèle de partenariat social de nos
voisins allemands. Il ne s’agit pas ici de prôner une
transposition au cas français d’un modèle étranger37
mais de donner un caractère plus concret à ce que
pourrait signifier un positionnement nouveau des
acteurs du dialogue social. L’Institut Montaigne
rappelle ainsi que le partenariat social allemand
repose sur la responsabilisation et la capacité
d’engagement des parties : une forte autonomie
contractuelle d’un côté et l’institution de la
cogestion de l’autre38
.
Certains instruments ébauchés par le droit français
vont dans le sens du renforcement du dialogue
social dans l’entreprise au double bénéfice de la
compétitivité et de l’emploi.
L’introduction des accords collectifs de GPEC dans
l’entreprise témoigne, en premier lieu, d’un souci
de favoriser un dialogue social en continu, à froid
donc, permettant de lier les enjeux économiques et
sociaux auxquels est confrontée l’entreprise. Quand
bien même ces démarches contractuelles souffrent
37 Une telle ambition est largement reconnue comme vaine, tant elle ignore la complexité culturelle et
socio-économique qui fonde tout modèle national de relations sociales.
38 Reconstruire le dialogue social, Institut Montaigne/Entreprise et Personnel, juin 2011.
encore d’insuffisances39
, des analyses récentes
démontrent que pour les DRH comme pour les
représentants du personnel, elles peuvent « faciliter
sensiblement l’accompagnement et la formation
nécessaire pour réussir une mobilité »40
.
De leur côté, les accords de méthode démontrent
qu’il est possible de s’ouvrir à de véritables
démarches négociées comme alternative à la
mécanique formaliste du processus d’information/
consultation critiquée plus haut. Des études de cas
menés sur quelques accords de ce type concluent
qu’ils permettent effectivement d’améliorer la
qualité du dialogue social dans l’entreprise en
améliorant la qualité de l’information fournie aux
représentants du personnel et en permettant
d’introduire de la négociation en amont de la
seule information/consultation prévue par le droit
du licenciement économique. Ils facilitent ainsi
l’obtention de contreparties par les salariés pendant
l’ensemble du processus de restructuration41
. Reste
à définir les conditions pour que ces accords se
généralisent et fassent figure de véritables outils de
sécurité partagée. Ceci peut notamment supposer,
là encore, un changement de posture des acteurs,
et notamment de l’acteur syndical, quelquefois rétif,
au niveau local, à de telles démarches négociées42
.
Enfin, la problématique des accords compétitivité/
emploi témoigne, en période que l’on pourrait
qualifierdetièdepourl’entreprise,d’unsoucisimilaire
de traiter conjointement enjeux économiques et
emploi. L’exemple allemand montre que ce type
d’accords collectifs, dérogatoires aux accords
de branche, permet de concilier productivité de
l’entreprise et véritables garanties afférentes au
maintien ou à la promotion de l’emploi43
.
39 Notamment en ce qu’elles ne semblent que minoritairement permettre un diagnostic partagé sur les
orientations stratégiques de l’entreprise.
40 Oasys Consultants « Regards croisés RH et partenaires sociaux sur la mise en œuvre de la GPEC », 2009
41 ASTREES, Les restructurations en France, rapport national, ITC/ILO, juin 2009.
42 Entretien avec N. de Warren, directeur des relations institutionnelles du groupe ARKEMA, réalisé le
27 juin 2012.
43Voir en particulier l’accord BASF négocié fin 2011 et cité dans M.N. Lopez, les accords compétitivité-
emploi toujours d’actualité en Allemagne, Personnel, n° 529, mai 2012.
• Un dialogue social équilibré et efficace dans l’entreprise ?
Nicolas de Warren, Directeur des relations institutionnelles du groupe ARKEMA
Une bonne gestion du rapport des forces en présence dans le cadre
d’un processus de restructuration n’est nullement incompatible
avec une stratégie d’entreprise fondée
sur la recherche de transparence, tout au contraire…
12. 12
Les enjeux, juridiques notamment, liés au
possible développement de ces outils en France,
sont importants et expliquent en partie que la
négociation engagée au niveau interprofessionnel
n’ait pas abouti à ce jour.
Ceci étant, des acteurs de haut niveau, issus
du Ministère du Travail mais aussi de certaines
confédérations syndicales, envisagent positivement
le principe de tels instruments44
.
Bien entendu, le développement d’un dialogue
social véritable dans l’entreprise se heurte à divers
obstacles. Le premier concerne le champ du
dialogue social à promouvoir. Ce dernier ne peut
s’arrêter aux portes des grands groupes et ignorer
le tissu dense de PME/TPE français. Cela suppose
de disposer, notamment côtés salariés, d’acteurs
investis d’une capacité de négociation. À cet
égard, des dispositifs légaux de négociation avec
les élus du personnel en l’absence de délégués
syndicaux se sont progressivement installés en droit
français mais reste peu exploités. Conjointement,
la question du dialogue social dans les TPE reste
largement un sujet non traité à ce jour45
. Des formes
de dialogue social territorial restent à construire.
Dans cette perspective, plutôt que de songer
à multiplier les institutions représentatives du
personnel au sein des très petites structures, ne
convient-il pas de mettre en place des instances
territoriales de dialogue social46
, à l’image des
commissions paritaires interprofessionnelles
régionales de l’artisanat ou encore de l’exemple
italien ?
Au-delà, la question de la légitimité des acteurs du
dialogue est évidemment cruciale dans un contexte
de faible syndicalisation. Cela renvoie notamment
à la problématique des effets de la réforme de la
représentativité syndicale mais, au-delà également,
à la pertinence d’outils de mobilisation directe de
la collectivité des salariés tels que le référendum
d’entreprise47
. Enfin, le développement d’un
dialogue social véritable suppose certainement
de concevoir des règles claires, encore très peu
présentesàcejour,deconduitedelanégociation
collective et de modes alternatifs de règlement
des conflits48
.
44VoirlesinterventionsdeM.CombrexelleetdeM.Grignardlorsdupetit-déjeunerorganiséle31 janvier
2012 par le cabinet Altedia, « L’entreprise face au risque social », Les Carnets d’Altedia, janvier 2012.
45 Voir le rapport précité « Reconstruire le dialogue social », Institut Montaigne, juin 2011, p. 55 et 56.
46 Enchargedesproblématiquescommunesàdesentreprisesd’unmêmesecteuroud’unemêmefilière,
telles que la formation professionnelle par exemple - Interview de Marcel Grignard réalisée le 13 juin
2012.
47 Sur l’ensemble de ces questions et des préconisations associées, voir tout particulièrement G.
Cette, J. Barthélémy, Refondation du droit social : concilier protection des travailleurs et efficacité
économique, Conseil d’Analyse Économique, 2010.
48 Voir notamment rapport G. Cette et J. Barthélémy précité.
Il est possible de miser sur
la flexibilité interne par le
dialogue pour maintenir
l’emploi en période difficile,
mais il faut pour cela que
les entreprises acceptent de
se montrer transparentes et
respectent la parole donnée.
Les accords compétitivité/
emploi ne répondent pas du
tout à cette problématique.
Stéphane Lardy,
Secrétaire confédéral Force Ouvrière
13. 13
Le juge : formation et dialogue
1.a Élargir l’accès aux fonctions judiciaires des professionnels issus de l’entreprise.
1.B Développer et approfondir la part des sciences économiques et de gestion dans la formation initiale et continue
des magistrats et des avocats.
1.C Favoriser les échanges réguliers entre le juge et l’ensemble des acteurs du monde de l’entreprise (employeurs,
organisations syndicales, praticiens du droit et experts), par exemple au travers de la mise en place de conférences
thématiques permanentes intégrées au processus de formation continue des magistrats et des avocats.
1.D Dans le cadre d’une réflexion globale sur les juridictions du travail, développer l’échevinage1
en particulier au sein
des formations sociales des Cours d’Appel en y introduisant des conseillers prud’hommes.
1.E Encourager le recours à l’ « amicus curiae » 2
, dans le respect du principe du contradictoire, afin de permettre la
consultation par le juge de sachants pouvant éclairer sa décision, et ce à tous les niveaux de juridiction3
.
• La jurisprudence rendue en matière sociale révèle un fossé entre le monde judiciaire et le monde de l’entreprise. À l’opposé
de toute stigmatisation, le développement d’outils de discussion et de formation pourrait apporter des solutions.
L’entreprise : sécurisation et dialogue social
2 Définir le licenciement pour motif économique comme le licenciement non-inhérent à la personne du salarié et
résultant d’une suppression d’emploi, d’une transformation d’emploi ou d’un refus de modification du contrat de
travail.
• Le motif économique de licenciement fait aujourd’hui l’objet d’une jurisprudence porteuse d’une forte insécurité juridique.
Plus généralement, il reflète une concentration des acteurs sur les causes des restructurations au détriment de leur
accompagnement social. Il est proposé de simplifier la définition du motif économique de licenciement en contrepartie
d’une élaboration négociée des mesures d’accompagnement (v. proposition 3).
3 En cas de plan de sauvegarde de l’emploi, instaurer une négociation préalable obligatoire avec les syndicats
représentatifs, pour une durée préfixe, sur les conséquences sociales du projet. En cas d’accord, cette négociation
se substituerait aux prérogatives consultatives du Comité d’entreprise et le PSE ne pourrait pas être contesté en
justice. A défaut d’accord dans le délai fixé, une procédure simplifiée et sécurisée d’information/consultation du
comité d’entreprise aurait lieu.
• La judiciarisation des restructurations est largement le reflet d’une absence de consensus social sur les mesures
d’accompagnement. Mais la procédure actuelle n’encourage pas un tel consensus. L’instauration d’une négociation
préalable vise à remédier à cette situation, en encourageant les parties à rechercher une sécurité partagée : sécurisation
de la procédure d’une part, sécurisation des solutions de reclassement de l’autre.
4 Simplifier, sécuriser et encadrer la procédure de consultation du CE en matière de PSE :
- En supprimant la double consultation du comité d’entreprise au profit d’une seule consultation relative au projet
de licenciement collectif et au PSE y afférent ;
- En supprimant la double consultation comité central d’entreprise/comités d’établissement au profit d’une seule
consultation du CCE ;
- En rendant effectifs les délais maximums prévus par le Code du travail entre les différentes réunions du CE ;
- En calquant la procédure relative à la consultation du CHSCT sur celle prévue pour le CE (obligation de désigner
l’expert dès la première réunion, alignement des délais d’expertise sur le délai de l’expert du CE, faculté pour
l’employeur d’établir unilatéralement l’ordre du jour en cas de refus du secrétaire, alignement du délai et des
modalités de convocation sur ceux prévalant pour le CE) ;
• Si la négociation préalable (v. proposition 3) échoue, cette procédure simplifiée et encadrée dans le temps s’appliquerait.
De leur côté, les représentants du personnel retrouveraient la faculté de contester le PSE en justice.
B. Les préconisations
1 Mode de composition des juridictions associant un ou plusieurs magistrats professionnels et des personnes issues de certaines catégories socio-professionnelles.
2 Personnalité faisant autorité dans un domaine d’activité qu’une juridiction prend l’initiative d’entendre pour connaître son opinion sur le problème débattu devant elle.
3 LaconsultationduMinistèredel’emploietdel’ANDRHparlaCourdecassationdanslecadredel’affaireViveoavaitsuscitéunepolémique,àlasuitedelaquelledesorganisationssyndicalesavaientétéégalemententendues.
La teneur de ces consultations, qui excédaient le strict champ du droit, souligne l’intérêt du procédé pour améliorer la prise en compte par le juge du monde de l’entreprise et des relations sociales.
14. 14
Historiquement, le droit du travail s’est d’abord
constitué en regard de la notion d’établissement,
entendu comme le lieu où capital et travail se
conjuguent pour produire les biens mis sur le
marché. Dans cette perspective, il est possible
de construire une relation juridique binaire qui
confronte employeur et salarié sans grande
difficulté. L’employeur juridique est alors seul
débiteur des obligations que le droit du travail met
à sa charge, singulièrement pour ce qui concerne le
maintien de l’emploi49
.
La difficulté à laquelle cette construction juridique
se heurte tient à la formidable complexification
de l’entreprise, envisagée dans une perspective
économique, sous l’influence d’une multiplicité
de facteurs. Pour reprendre les mots de certains
auteurs50
, la notion d’entreprise s’est largement
diluée. La structuration de groupes d’entreprises,
sans cesse complexifiée au gré de l’inter-
nationalisation de ces derniers, en est une
illustration. Ce que d’aucuns dénomment les
phénomènes de « décentralisation productive »
en sont une autre. L’émergence de réseaux
d’entreprises sans liens financiers ou juridiques forts
entre elles, le développement de réseaux de sous-
traitance hiérarchisées ou encore, sans exhaustive,
l’externalisation de fonctions indépendantes du
« core business » de l’entreprise sont autant de
figures possibles de l’organisation économique
contemporaine des firmes.
Face à ces réalités économiques difficiles à
appréhender, l’employeur, au sens juridique du
terme, s’avère de plus en plus difficile à saisir.
En droit du travail, tant la loi que la jurisprudence
ont donc œuvré à définir un cadre pertinent
d’imputabilité des obligations mises à la charge de
l’employeur en dépassant peu ou prou les frontières
juridiques traditionnelles. Les illustrations de cette
tendance de fond sont nombreuses dans différents
domaines du droit du travail : représentation
collective des salariés, négociation collective (les
49 Encesens,voirM-L.Morin,Ledroitdutravailfaceauxnouvellesformesd’organisationdesentreprises,
intervention Summer University ofWork, Nantes, 2004.
50 J. Freyssinet, Quels acteurs et quels niveaux de représentation pertinents dans un système productif en
restructuration ? Revue de l’IRES, n° 47, 2005.
accords de groupe) ou encore licenciements pour
motif économique51
.
Ces réalisations témoignent du souhait d’adapter
l’application du droit du travail à des réalités
économiques mouvantes, ce qui est évidemment
une tâche ardue. Elle doit donc s’accommoder
d’une approche casuistique, consistant, dans
chaque cas d’espèce, à rechercher dans une logique
d’imputation de responsabilités, le centre réel de
décision économique. Les arrêts rendus récemment
par la Cour de Cassation à propos de la notion de
co-employeur attestent de cette orientation52
.
Est-on pour autant certain que cette casuistique
dans la définition de l’employeur « responsable »
reflète toujours la réalité de la prise de décision
dans les ensembles complexes ? Les périmètres
ainsi forgés sont-ils véritablement lisibles et
compréhensibles par les acteurs économiques
demandeurs d’une sécurité juridique minimale ?
Au-delà de la notion de co-employeur, que penser
de celle de secteur d’activité comme périmètre
d’appréciation des difficultés économiques, notion
dont un haut magistrat reconnaissait récemment
que la jurisprudence avait du mal à la définir ?53
De
quelle cohérence peuvent se prévaloir les multiples
cadres d’appréciation utilisés pour l’application
des différentes obligations résultant du droit du
licenciement économique ?
51 Positionnement des obligations au niveau d’un « groupe » défini de manière asymétrique et souvent
incertaine, notion de co-employeur…
52 Cass. Soc. 18 janvier 2011 (2 arrêts) ; Cass. Soc. 22 juin 2011.
53Voir intervention de M.Yves Struilliou, conférence des Ateliers de la Convergence, 27 mars 2012.
• Reconsidérer la responsabilité de l’entreprise face à l’objectif de promotion de
l’emploi
• Le droit du travail face à la complexité de l’organisation économique des
entreprises : un enjeu pour la sécurité juridique
Le droit de licenciement
économique est incertain,
l’entreprise est en insécurité
juridique sur le contrôle du
motif économique, ainsi que sur
l’obligation de reclassement.
Jean-Christophe Sciberras, président de l’ANDRH.
2. Placer la personne au centre des actions
de promotion de l’emploi
A. L’analyse
15. 15
Il est possible d’observer, depuis longtemps, un
accroissement des obligations juridiques mises
à la charge des entreprises, pas uniquement
mais singulièrement en matière de licenciement
économique. Cette « hyper responsabilisation »
des entreprises peut conduire les dirigeants à se
montrer innovants mais encourage également des
stratégies de contournement des règles applicables,
préjudiciables in fine aux salariés54
. Elle pose, par
ailleurs, la question de l’efficacité pratique des
obligations juridiques ainsi établies. Un exemple
topique de cet état de fait réside dans l’étendue
reconnue, au plan juridique, de l’obligation de
reclassement mise à la charge de tout employeur55
rapportée à son efficacité réelle.
D’après l’article L. 1233-4 du Code du travail,
l’obligation de reclassement préalable au
licenciement vise le groupe. La jurisprudence a
précisé que la recherche devait être au sein des
entreprises du groupe dont l’activité, l’organisation
ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer
la permutation de tout ou partie du personnel.
Le périmètre géographique de l’obligation de
reclassement interne ne se limite pas à la France
mais englobe également les entités étrangères du
groupe. Il en a résulté des situations paradoxales
très médiatisées dans lesquelles l’entreprise qui,
en vertu de ses obligations légales, était amenée
à formuler des propositions de reclassement dans
des pays à bas niveaux de salaire, se trouvait soit
soumise à la vindicte publique lorsqu’elle les faisait,
soit condamnée lorsqu’elle ne les faisait pas56
! Ces
débats ont donné lieu à la loi du 18 mai 2010 venant
encadrer les propositions de reclassement interne
dans ce type de situation. Ce texte a partiellement
permis de remédier aux situations ubuesques
précédemment constatées : les employeurs n’ont
pas à proposer des offres à l’étranger à des salariés
qui n’en voudraient pas, mais ils doivent tout de
même identifier de telles offres à toutes fins utiles.
Le respect de cette obligation est strictement
contrôlé par le juge au titre de l’examen de la
justification du licenciement. Ainsi, a-t-il été jugé
que l’employeur qui s’était borné à solliciter de
ses salariés qu’ils précisent, dans un questionnaire
renseigné avant toute recherche et sans qu’ils aient
été préalablement instruits des possibilités de
reclassement susceptibles de leur être proposées,
leurs vœux de mobilité géographique en fonction
desquels il avait, ensuite, limité ses recherches
et propositions de reclassement, n’avait pas
satisfait à son obligation de reclassement57
. Cette
54EncesensvoirparexempleASTREES,LesrestructurationsenFrance,rapportnational,ITC/ILO,juin 2009.
55 Quelle que soit la taille de l’entreprise.
56 Cf. l’affaire Olympia : http://www.liberation.fr/economie/0101604255-les-chaussettes-olympia-pas-
aidees-par-une-justice-decousue
57 Cass. Soc. 4 mars 2009.
jurisprudence, antérieure à la loi relative aux offres
de reclassement à l’étranger, reste applicable à la
mobilité sur le territoire national.
Pourvued’unedéfinitionàlafoislargeetrigoureuse,
l’obligation de reclassement est-elle efficace en
pratique ? À notre connaissance, aucune étude
d’ensemble relative à l’efficacité des mesures de
reclassement interne n’existe58
. Est-on pour autant
certain qu’aux diligences nombreuses exigées de
l’employeur corresponde une forte propension à la
mobilité, internationale notamment, des salariés ?
Les travaux disponibles attestent d’une mobilité
réduite des salariés, qu’elle soit professionnelle,
sectorielle ou géographique59
.
D’une portée faible en pratique, l’obligation
de reclassement dans le groupe est pourtant
omniprésente dans le contentieux : l’allégation
d’effort de reclassement insuffisant est volontiers
accueillie par le juge, et se traduit ainsi par un
surcroît d’indemnisation pour le salarié.
La jurisprudence évoquée n’apparaît-elle pas alors
essentiellement formaliste ? Dans ces conditions,
si l’on souhaite vraiment favoriser la mobilité des
salariés, le renforcement constant de l’obligation
de reclassement interne est-il le bon angle à
privilégier60
? La capacité des salariés à être mobiles
est en effet conditionnée par une pluralité de
facteurs, dont certains peuvent apparaître très
éloignés de l’entreprise. Il en va ainsi de l’incidence
du patrimoine immobilier des personnes. En
effet, la propriété du logement peut générer des
obstacles majeurs à la mobilité des salariés, en
particulier lorsque le bien est situé dans des zones
géographiques économiquement sinistrées. De tels
phénomènes justifieraient de se montrer inventif,
en réfléchissant par exemple aux mécanismes
assurantiels aptes à permettre de garantir les
personnes contre la perte de valeur de leur
logement61
. L’on conçoit néanmoins que le droit du
reclassement est totalement étranger à ces enjeux
pourtant déterminants.
« Le comité d’entreprise lui-même était d’accord
pour qu’on n’ait pas l’indignité de proposer des
emplois en Roumanie à 110 euros par mois. »
58 Cette absence d’information, reflète de manière générale la faible propension de notre pays à étudier
l’impact de ses lois, et au cas particulier, contraste très fortement avec l’activisme judiciaire constaté
autour de l’obligation de reclassement. Beaucoup de bruit pour rien ?
59 M. Lemoine, E. Wassner, la mobilité des salariés, Conseil d’Analyse Économique, 2010.
60 A fortiori si le pouvoir effectif de reclasser n’existe pas, en particulier lorsque le groupe, défini pour
les besoins du reclassement, ne recouvre aucun lien capitalistique entre les entreprises ainsi réunies !
61 Entretien réalisé avec M. Stephan Gregoir, EDHEC business school, le 26 juin 2012.
• Les limites à l’hyper-responsabilisation de l’employeur : l’exemple de l’obligation de
reclassement
Catherine Rambaud, PDG d’Olympia, après
la condamnation de son entreprise pour
manquement à l’obligation de reclassement.
16. 16
Sil’onportemaintenantleregardsurlereclassement
externe, on peut observer que les mesures y
afférentes constituent un volet majeur des plans
de sauvegarde de l’emploi et trouvent à s’incarner
le plus souvent dans la mise en place de cellules de
reclassement62
. Concrètement l’employeur confie à
un prestataire externe la mise en place et la gestion
d’une cellule de reclassement après consultation
du comité d’entreprise. Il existe plusieurs types de
cellules de reclassement que l’on peut distinguer
selon qu’elles sont partiellement financées par l’État,
au travers du Fonds national de l’emploi, ou non.
Globalement, l’évaluation de l’efficacité des cellules
de reclassement est « lacunaire »63
: connaissances
statistiques parcellaires, difficulté dans la définition
de critères d’évaluation des cellules. Le bilan dressé
à partir des éléments disponibles est très nuancé.
Au-delà des taux de reclassement bruts64
, à la fois
l’adhésion des salariés aux cellules de reclassement
et les reclassements effectifs dans l’emploi dit
durable révèlent de fortes inégalités entre les
populations de salariés face à la probabilité de
retour en emploi65
.
À cet égard, certains professionnels relèvent
les dérives qui semblent aujourd’hui affecter le
travail des cabinets de reclassement66
: les salariés
et leurs représentants semblent se focaliser
toujours davantage sur la multiplication des offres
de reclassement faites aux salariés. La quantité
attendue des offres valables d’emploi (OVE) prime
sur la qualité de ces dernières. Or, spécialement
en regard des salariés les plus difficilement
reclassables67
, l’obtention d’une offre ferme et
valable de reclassement ne doit-elle pas être le
premier objectif pour tous, y compris les salariés
eux-mêmes ? Ce sont ici les postures des uns et des
autres qui sont questionnées.
Parailleurs,laqualitédel’accompagnementproposé
par les cellules de reclassement est généralement
considérée comme très hétérogène, si l’on examine
les prestations offertes ou les méthodologies
utilisées.
Enfin et surtout, l’ensemble des observations
et analyses produites en la matière soulignent
l’insuffisance de la coordination entre l’ensemble
des acteurs, publics et privés, intéressés à la
problématique du reclassement alors même que
cette dernière ne peut se passer, pour être efficace,
62 En2008,85 %desPSEenprévoyaient,voirG.Cherpion,AvisdelaCommissiondesAffairesFamiliales,
Culturelles et Sociales sur le projet de loi de finances pour 2009, n° 1199, 2008.
63 M. Ramonet, Les cellules de reclassement, CESE, 2010.
64 Qui prend en compte le reclassement en CDI et CDD de plus de 6 mois.
65 En regard des profils individuels : âge, statut professionnel…
66 Entretien réalisé avec C. deTrogoff, Cabinet BPI, le 13 juin 2012.
67 Notamment les seniors.
de véritables approches multi-acteurs. En réponse
à cette difficulté, des plateformes locales pluri-
acteurs ont pu se mettre en place ici ou là avec
succès68
. Reste que la généralisation de ces bonnes
pratiques suppose certainement d’envisager « le
plus en amont possible les actions visant à atténuer
les conséquences des restructurations sur l’emploi
et les mesures de reclassement innovantes au profit
notamment des salariés les plus fragilisés »69
. Une
telle ambition est-elle compatible avec « la vision
d’un employeur seul responsable de la mise en
œuvre « à chaud » d’un PSE ? Nous ne le pensons
pas.
68 Ainsi de la plate-forme de reconversion des salariés du Cuir mise en place à Romans sur Isère par BPI.
69 Intervention de C. deTrogoff, conférence des Ateliers de la Convergence, 27 mars 2012.
La vision d’une responsabilité
exclusive de l’employeur dans
la mise en œuvre du PSE
conduit en France à privilégier
la relation entre l’employeur
et le prestataire alors que le
problème du reclassement
des salariés concerne un
grand nombre d’acteurs, et
notamment les employeurs
potentiels actuellement tenus
à l’écart des phénomènes de
restructuration.
Gérard Cherpion, Député,
Avis de la Commission des Affaires Familiales,
Culturelles et Sociales sur le projet de loi de finances
pour 2009, n° 1199, 2008
17. 17
L’observateur des relations sociales en France
n’aura pas manqué de relever que les licenciements
collectifs, en tout cas les plus médiatiques d’entre
eux,donnentleplussouventlieuàdesnégociations70
tout entières orientées vers l’obtention d’indemnités
de départ les plus élevées possibles. La conférence
des Ateliers de la Convergence du 27 mars 2012 a
à cet égard permis de souligner que ces pratiques
conduisent en réalité « l’entreprise à acheter la paix
sociale, ce qui n’est bon ni pour le reclassement
des salariés ni pour l’entreprise ». Il est possible de
comprendre que ce prix de la rupture revêt une
portée symbolique importante pour les salariés
issus, notamment, de grands groupes industriels
et titulaires d’une ancienneté importante. Dans
ces situations, le licenciement collectif, associé à la
crainte d’une absence de reclassement satisfaisant,
conduit à mettre l’accent sur la responsabilité de
l’employeur, rompant le contrat moral l’unissant
à ses salariés. La situation de l’entreprise n’est
ainsi perçue qu’à travers le prisme d’un contrat
synallagmatique qui conduit à faire de l’employeur
le débiteur d’une obligation de maintien de l’emploi
dont la sanction réside dans une indemnisation,
en plus de celle prévue par le Code du travail ou
les conventions collectives. Pour compréhensible
qu’elle soit, cette perspective n’est que partielle. Elle
ignore notamment les enjeux liés à l’intégration,
dans l’appréhension de la restructuration de
l’entreprise, des enjeux de moyen et long terme
afférents à la nécessité de définir et d’implémenter
des solutions de reclassement bénéfiques, in fine,
à tous. Ce point de vue n’est pas purement
patronal. Il ne laisse nullement indifférent certaines
organisations syndicales71
.
Que restera-t-il au bout de quelques années de
l’indemnité, même importante, perçue par le salarié
si celui-ci n’a pu rebondir professionnellement ?
Ne peut-on pas même considérer, comme le
soulignent certains responsables des DIRECCTE,
que des indemnités trop élevées dissuadent les
salariés de s’investir rapidement dans la recherche
d’emploi ? Ne faut-il pas véritablement privilégier
l’accompagnement des transitions professionnelles
plutôt que l’indemnisation de la perte d’emploi ?
• Une question de principe : indemniser la perte d’emploi ou favoriser les transitions
professionnelles ?
•Redéfinir la responsabilité de l’entreprise à l’aune de la sécurisation des
trajectoires professionnelles des personnes
Un chèque de départ ne résout en
rien la question de la sécurité des
parcours professionnels des salariés
les plus fragiles.
Marcel Grignard, Secrétaire national CFDT
70 Qui ne disent néanmoins pas leur nom, cf. supra 1re
partie.
71Voirl’interventiondeM.Grignard,conférencedesAteliersdelaConvergence,27 mars
2012.
Une chose est certaine : la focalisation sur les
obligations de l’entreprise au moment où la
restructuration apparaît inévitable ne répond pas à
l’ambition de promouvoir l’emploi pour tous.
Plusieurs constats peu contestables soutiennent
cette assertion. Les premiers ont trait aux carences
de notre système de formation professionnelle. Si
l’on admet l’impact en pratique limité de l’obligation
de reclassement de l’employeur telle que comprise
au travers du droit du licenciement économique,
alors le rôle de la formation continue, comme levier
permanent d’accompagnement des transitions
professionnelles, devient évident.
Or, l’évaluation de notre système de formation
professionnelle révèle des défauts majeurs72
. Le
plus évident tient à ses impacts sur les personnes.
Ainsi, la formation bénéficie73
le plus souvent aux
salariés jugés les plus productifs, en particulier les
cadresdisposantdéjàd’unhautniveaudeformation
initiale et âgés de moins de 45 ans. Les rendements
de la formation sont également significativement
plus faibles pour les personnes les moins qualifiées.
Comment dès lors espérer que l’employeur puisse
compenser ces faiblesses majeures au moment où il
doit restructurer l’entreprise ?
72 Surl’ensembledelaquestion,voirnot.P. Cahuc,P. FerraccietA. Zylberberg,Formationprofessionnelle :
pour en finir avec les réformes inabouties, Institut Montaigne, octobre 2011.
73 Que l’on considère l’accès effectif à la formation ou les revalorisations salariales consécutives à
l’accomplissement de stages.
• Une nécessité : accompagner réellement les transitions professionnelles de tous les
salariés
18. 18
Ces lacunes, que l’on pourrait amplement détailler,
soulèvent de multiples questions adressées à
l’ensemble des acteurs du système de formation.
Les entreprises bien sûr, soumises à une alternative
« former ou payer » qui conduit in fine, par le biais
de la mutualisation, à faire payer par les petites
entreprises les formations nécessaires aux plus
grandes. Les organisations professionnelles
également, qui assurent la gestion des fonds de la
formationprofessionnelle.Lessalariésenfin,quel’on
peut considérer comme faiblement responsabilisés
et accompagnés vis-à-vis de leur propre formation.
Les outils mobilisables sont pléthoriques, du droit
individuel à la formation à la validation des acquis
de l’expérience. Leur usage est cependant encore
trop limité. Sans doute la multiplicité des dispositifs
les rend-elle peu lisibles aux yeux des salariés et
donc en pratique peu activables, notamment pour
les moins qualifiés d’entre eux. À ce titre, l’entreprise
et les organisations syndicales ont un rôle à jouer.
Ne peut-on ainsi envisager une négociation du plan
de formation dans l’entreprise ? Aux yeux de certains
acteurs, cette dernière permettrait de disposer d’un
levier pour faire de la formation un enjeu partagé
au sein de l’entreprise, notamment au bénéfice des
salariés les plus « fragiles »74
.
Du côté des organisations syndicales, il est possible
de supposer que ces dernières pourraient peut-
être, par exemple, tirer profit des enseignements
de l’expérience britannique des « Union Learning
Representatives » permettant de mieux guider
les salariés peu qualifiés vers la formation
professionnelle75
.
Au-delà, ne doit-on pas substituer à l’obligation
légale mise à la charge des entreprises un système
de subventions publiques à la formation permettant
d’inciter les entreprises à mieux former ceux qui en
ont le plus besoin ? Le taux de subventionnement
des dépenses de formation pourrait ainsi
être inversement proportionnel au niveau de
rémunération du travailleur concerné76
.
74 Entretien avec M. Lardy, secrétaire confédéral CGT-FO réalisé le 20 juin 2012.
75 Sur cette pratique, voir par exemple S. Jefferys and N. Clark, Anticipating and managing restructuring,
UK national background paper, ITC/ILO, septembre 2009, p. 25.
76 Entretien avec M. S. Gregoir, réalisé le 26 juin 2012. Pour une analyse détaillée de ces propositions,
voir A. Chéron, De la modulation des subventions à la formation continue des salariés, EDHEC Business
School, janvier 2012.
Enfin, l’accès à la formation professionnelle ne
bénéficie pas de manière égale aux salariés en
CDI et aux salariés atypiques. Ces derniers restent
largement exclus de la formation professionnelle.
Même dans le secteur de l’intérim, où il existe
pourtant un dispositif conventionnel innovant de
formation professionnelle, les effets de seuil induits
conduisent à ce que seuls les intérimaires qui
travaillent beaucoup puissent en bénéficier77
.
Pourtant, des démarches sectorielles visant à allier
emploi permanent et formation existent dans
certains secteurs où la précarité de l’emploi est
habituellement importante. Ainsi de l’accord du
18 janvier 2012 relatif à la pérennisation de l’emploi
et à la formation professionnelle dans la branche de
l’hôtellerie de plein air qui crée à titre expérimental
un CDI emploi-formation dans la branche, visant à
allier flexibilité et sécurité dans un secteur où les
fluctuations saisonnières sont importantes78
.
Cette opposition entre « insiders et outsiders »
se retrouve aussi de manière frappante dans
l’accompagnement des transitions générées par
des restructurations d’entreprise. Ainsi, en dépit
des progrès issus de la fusion de la convention
de reclassement personnalisée et du contrat
de transition professionnelle au bénéfice des
salariés touchés par un licenciement pour motif
économique, la majorité des ruptures de contrats
enFrancen’emportentpasl’accèsàcesdispositifs
d’accompagnement.
Dans cette mesure, les titulaires de contrats dits
atypiques (CDD et intérim) sont particulièrement
frappés. Des expérimentations visant à étendre
les dispositifs d’accompagnement mentionnés
aux salariés atypiques ont été initiées. Elles posent
cependant la question de leur financement et donc
du rôle des uns et des autres, et singulièrement des
entreprises79
.
Enfin (mais faut-il vraiment le rappeler ?), les
modalités possibles d’accompagnement des
reclassements en cas de licenciement économique80
varient grandement en regard de la taille des
entreprises en dépit d’innovations telles que la
création du contrat de sécurisation professionnelle.
N’est-il pas plus que temps de prôner la mise en
place d’une véritable sécurisation des parcours
professionnels de tous plutôt que de s’opposer
à des mutations devenues permanentes ? Si oui,
peut-être peut-on alors penser la responsabilité
de l’entreprise dans un cadre renouvelé qui ne se
limite pas au droit du licenciement économique.
77Voir C. de Froment, conférence des Ateliers de la convergence, 27 mars 2012.
78 Exemple cité par S. Lardy, secrétaire confédéral CGT FO, entretien réalisé le 20 juin 2012.
79 En ce sens, voir l’intervention de S. Lardy, conférence des ateliers de la convergence, 27 mars 2012.
80 Congé de reclassement, mesures de reclassement prévues dans le PSE, etc.
L’entreprise doit savoir anticiper
pour permettre le développement
de l’employabilité des salariés au
travers d’une véritable
démarche de GPEC.
Catherine de Trogoff, Directeur associé BPI
19. Sortir d’un « tout à l’entreprise » aussi illusoire
qu’inégalitaire en regard de l’objectif de sécurisation
des parcours professionnels des personnes
implique certainement de forger de nouveaux
cadres pour l’action. C’est en regard de ces
nouveaux cadres qu’il devient ensuite possible de
redéfinir les responsabilités des acteurs impliqués
et singulièrement des entreprises.
Aujourd’hui, tout laisse à penser que le territoire
constitue un cadre de développement pertinent
pour organiser les transitions professionnelles
des personnes dans une perspective dynamique.
Cette orientation trouve d’abord sa justification
dans le constat souvent formulé du caractère
difficile et socialement coûteux de la mobilité
géographique pour les salariés, notamment les
moins qualifiés et les plus fragiles d’entre eux. Plus
avant, les territoires constituent les premiers espaces
affectés par les conséquences économiques et
sociales des pertes d’emploi81
.
Cette question a bien entendu partie liée avec le
développement de l’attractivité des territoires. Des
exemples réussis d’initiatives associant diverses
parties prenantes existent : ainsi de l’Agence pour la
promotion internationale de Lille Métropole (APIM),
structure associant les autorités publiques et les CCI
locales82
.
Au-delà,lesoucidepromouvoirunepriseencompte
des impacts territoriaux des restructurations
s’incarne juridiquement au travers des dispositifs
de revitalisation prévus par les articles L. 1 233-84
et L. 1 233-87 du Code du Travail, dont l’intensité
varie selon la taille de l’entreprise. Dans tous les cas
cependant, ils posent la question de la nature et de
l’étendue de l’implication concrète de l’entreprise
assujettie dans les actions de revitalisation. Les
études disponibles relatives aux conventions
de revitalisation pointent un certain nombre de
difficultés affectant l’efficacité de ces dispositifs :
absence de coordination vertueuse entre les
acteurs, publics ou privés, du territoire affecté
(lorsque plusieurs conventions distinctes coexistent
en son sein) ; association effective insuffisante
de l’ensemble des parties prenantes pertinentes
(collectivités locales, organisations syndicales) ;
difficultés afférentes à la mise en œuvre du contenu
des conventions de revitalisation. Par ailleurs, la
contribution financière d’une entreprise soumise
à l’obligation de revitalisation peut sembler bien
limitéeenregarddesenjeuxéconomiquesetsociaux
auxquelsestconfrontéleterritoireaffecté :comment
dès lors « faire masse » pour être véritablement
81 Sur ces réflexions voir notamment X. Baron, F. Bruggeman, Inventer la GTEC en temps de crise, AEF,
n°1974, avril 2009.
82 Exemple cité par C. deTrogoff, cabinet BPI, entretien réalisé le 13 juin 2012.
efficace ?83
Il y aurait là matière à réfléchir. Surtout,
il apparaît qu’il n’y pas véritablement de réflexion
sur les leviers susceptibles de favoriser l’implication
des entreprises assujetties alors même que cette
dernière est souvent perçue comme nécessaire à
la réussite des opérations84
. L’enjeu est important
car l’entreprise a sans nul doute, aux côtés
d’autres partenaires, un rôle important à jouer
pour conjuguer développement économique
des territoires, au travers de la création ou du
développement d’activités, et créations d’emploi.
Au-delà de la revitalisation, le renforcement
de l’ancrage territorial des entreprises au
service d’une dynamisation à froid du tissu
économique local est certainement une piste
à développer. Soucieuses de leur compétitivité
et de leur responsabilité sociale comme sociétale
à l’égard de leur territoires d’implantation, de
grandes entreprises ont de longue date mis en
œuvre des moyens en ce sens : ainsi de Saint
Gobain Développement, structure créée dès 1982
aux fins de mener à bien les reconversions liées
aux restructurations du groupe. Cette dernière
montre le rôle que de grands groupes peuvent
jouer au service du développement économique
local dans l’intérêt de tous85
, bien en amont du
déclenchement d’un processus de restructuration.
L’implication concrète et active de grandes
entreprises dans le développement économique
des PME au niveau des bassins d’emploi permise
par un dispositif souple tel qu’ALIZE86
répond à une
logique similaire. Par ailleurs, l’orientation d’une
partie des fonds de revitalisation vers des outils
de financement en « haut de bilan », par filière
économique par exemple, ou régionaux, construits
sur le modèle de véritables fonds d’investissement
accompagnant des projets de développement
économique territorial et/ou d’innovation (start ups,
entreprises en croissance ou en transition, jeunes
entreprises innovantes, pépinières, incubateurs…),
en abondement des acteurs déjà présents, ne
s’avérerait-elle pas plus efficace87
sur le long terme
que l’exécution strictement locale de l’obligation
légale de revitalisation qui se traduit souvent par
des créations ou consolidations d’emplois très peu
pérennes ?
83 En ce sens, N. deWarren, Groupe Arkema, entretien réalisé le 27 juin 2012.
84 IRES(coord.),Etudeportantsurlebilan2008-2009delarevitalisationdesterritoiresfaiteenapplication
de l’article L. 1 233-84 du Code du travail, Synthèses, DATAR/DGEFP 2011.
85Voir D. Azam, Saint Gobain Développement ou l’art de l’interface, Ecole de Paris du management,
séance du 2 juillet 2003.
86 «Actions Locales Interentreprises en Zone d’Emploi », voir J-M. Bergère et J-L. Charlot, Marchés locaux
du travail et parcours professionnels, les Notes d’ASTREES, n° 4, juin 2009, p. 42-43.
87 Notamment en regard de la capacité d’attractivité ainsi générée.
88 En ce sens, N. deWarren, Groupe Arkema, entretien réalisé le 27 juin 2012, qui cite par ailleurs comme
point de départ d ‘une réflexion en ce sens, l’exemple du Fonds Lorrain de Consolidation (FLC) créé
en 2010 et regroupant groupes industriels (TOTAL DR, PSA, Arkema), acteurs locaux (ILP, SOFIRED,
S3CI, SAFIDI, CCI 57, Neuhauser, Région Lorraine) et nationaux (CDC Entreprises) : http://www.
cdcentreprises.fr/portefeuille/fiche/fonds_directs/F319/fonds_lorrain_de_consolidation.php.
• Un nouveau cadre pour l’action : le développement d’approches territoriales de la
gestion de l’emploi
19
20. 20
Enfin, c’est la construction même de démarches
dites de Gestion Territoriale des Emplois et des
Compétences (GTEC) qui interpelle l’observateur.
Ces dernières, encore balbutiantes, offrent un
cadre pour penser une implication d’une pluralité
d’acteurs aux fins de « territorialiser les enjeux
d’emploi ». En la matière, l’enjeu est de développer
une anticipation des mutations économiques
efficace, c’est-à-dire mobilisant une diversité
d’acteurs aptes à se coordonner pour « construire
lesdispositifsetsedonnerlesressourcespermettant
de gérer le changement » . Là encore, l’entreprise a,
aux côtés d’autres, un rôle utile à jouer !
89Voir sur les questions à résoudre en la matière, Baron et Bruggeman, précité note 88.
B. Les préconisations
5 Restreindre le champ de l’obligation de reclassement à l’entreprise.
• L’extension de l’obligation de reclassement au groupe génère une forte insécurité juridique et n’aboutit pas à des résultats
tangibles en termes de sauvegarde de l’emploi. L’entreprise est un cadre plus sûr et plus réaliste pour la recherche de postes
de reclassement.
6 Étendre le questionnaire de mobilité géographique (articles L. 1233-4-1) aux cas de reclassements impliquant une
mobilité sur le sol national.
• Le questionnaire de mobilité internationale a apporté une réponse au problème des offres de reclassement à l’étranger,
à la fois obligatoires pour les employeurs et mal perçues par les salariés. Désormais, seuls les salariés prêts à envisager
une mobilité internationale reçoivent de telles offres. Dans le même esprit, il est proposé d’appliquer ce questionnaire aux
offres de reclassement impliquant une mobilité nationale.
7 Développer, en parallèle de la procédure de consultation des représentants du personnel, des actions visant à
favoriser le réemploi des salariés menacés par un licenciement économique.
• La période de consultation, ou la négociation qui pourrait la remplacer (v. proposition n° 3), est nécessaire au dialogue
social avec les représentants du personnel. Cette période ne doit toutefois pas exclure, comme c’est trop souvent le cas
aujourd’hui, des actions d’anticipation tournées vers le personnel, permettant notamment de diagnostiquer au plus tôt les
besoins de formation en vue d’un reclassement efficace.
8 Instaurer une négociation obligatoire du plan de formation dans l’entreprise en lieu et place du processus
d’information/consultation y afférent.
• Les choix de formation, outils essentiels de développement de l’employabilité, doivent être davantage partagés entre
l’entreprise et les représentants du personnel.
9.A Tenir compte, pour apprécier la validité du Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), des efforts fournis par l’entreprise
au cours de l’emploi pour développer l’employabilité des salariés, dans une optique de Responsabilité Sociale des
Entreprises. Cette nouvelle exigence s’appliquerait à l’issue d’une période de trois ans suivant la promulgation de
la loi.
9.B Plus généralement, proportionner les obligations entourant le licenciement économique aux efforts accomplis
par l’entreprise pour développer l’employabilité des salariés, à l’aide d’indicateurs reflétant notamment les efforts
de formation et la GPEC.
• En cas de licenciement économique, les salariés sont plus ou moins exposés au risque de chômage selon leur niveau
d’employabilité. De ce point de vue, il serait juste de tenir compte, lors de l’examen du PSE en justice (ce qui n’interviendrait
qu’à défaut d’accord, v. proposition 3), des efforts accomplis ou non par l’entreprise pour développer cette employabilité
en amont.
10 Encourager l’implication concrète et active de grandes entreprises dans le développement économique des PME
au niveau des bassins d’emploi au travers de dispositifs souples tels que le programme « Actions Locales Interen-
treprises en Zone d’Emploi (ALIZE) ».
21. Présentation des ateliers de la Convergence
Les « Ateliers de la Convergence » sont nés de la volonté d’acteurs du monde économique
– chefs d’entreprises, juristes, syndicalistes - de nourrir une réflexion transversale et de faire
émerger des propositions concrètes autour des enjeux de compétitivité, d’emploi et de
sécurité juridique en France.
Cette démarche, conçue comme pragmatique, ouverte, contributive et apolitique, s’articule
autour d’une réflexion commune quant à l’évolution des cadres d’actions des entreprises, des
partenaires sociaux, des juges et du législateur. Elle vise à poser les bases d’un « New Deal »
social permettant à la France d’affronter les mutations économiques de manière sécurisée et
pacifiée.
21
22. 2222
Le présent Livre blanc a été préparé dans le prolongement de la première conférence des Ateliers de
la Convergence qui s’est tenue le 27 mars 2012 à la Mutualité. Que tous les participants et animateurs
de cette journée soient ici chaleureusement remerciés :
• René Bagorski, Président de René Bagorski Conseil
• Hervé Boulhol, Responsable du Bureau France à l’OCDE
• Françoise Champeaux, Rédactrice en chef de la Semaine Sociale Lamy
• Philippe Darantière, Directeur des études à l’Institut Supérieur du Travail
• Françoise Favennec-Héry, Professeur agrégé des Facultés de droit, Paris II Panthéon-Assas
• Charles de Froment, Chargé de mission auprès de la présidente de Manpower France, enseignant à
Sciences Po et expert associé à l’IDE
• Dominique de la Garanderie, Avocat au barreau de Paris, Cabinet La Garanderie et Associés, ancien
Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris
• Antoine Garapon, Directeur général de l’IHEJ
• Marcel Grignard, Secrétaire national CFDT
• Philippe D’Iribarne, Directeur de recherche au CNRS
• Léon-Bernard Krepper, PDG d’Intersa SAS, Vice-Président de la Commission de l’emploi et des
affaires sociales de la CCIP
• Marc Landré, Journaliste, Le Figaro
• Stéphane Lardy, Secrétaire confédéral Force ouvrière
• Philippe Mabille, La Tribune
• Isabelle Moreau, Journaliste indépendante
• Jean Martinez, Avocat au barreau de Paris, Cabinet Hogan Lovells
• Rodrigo Peduzzi, Policy Officer à la DG Entreprises de la Commission européenne
• Yves Struillou, Conseiller d’Etat, Conseiller à la Cour de cassation en service extraordinaire
• Catherine de Trogoff, Associée, Cabinet BPI
• Nicolas de Warren, Directeur des Relations institutionnelles, ARKEMA
• la Semaine Juridique.
Les Ateliers de la Convergence remercient tout particulièrement Monsieur Stéphane Gregoir,
Associate Dean for Faculty and Research, EDHEC, Monsieur Marcel Grignard, Secrétaire national
de la CFDT, Monsieur Stéphane Lardy, Secrétaire confédéral de FO, Madame Catherine de Trogoff,
Directeur associé BPI et Monsieur Nicolas de Warren, Directeur des relations institutionnelles du
groupe Arkema pour avoir accepté de poursuivre les échanges et d’éclairer la rédaction de ce livre
blanc de leur précieux concours.
Les Ateliers de la Convergence remercient également l’Institut Montaigne, l’Institut de l’Entreprise,
l’EDHEC,laCCIPetASTREES(AssociationTravail,Emploi,Europe,Société)pourtouteladocumentation
qu’ils ont mise à leur disposition.
Les Ateliers de la Convergence remercient enfin les membres de son comité scientifique qui ont
participé à l’élaboration de ce Livre Blanc : Isabelle Bost (JohnsonJohnson), Marc Canaple (CCIP),
Alexia de Monterno (Institut Montaigne), Sabine Lochmann (JohnsonJohnson), Jean Martinez
(Hogan Lovells), Anne Outin-Adam (CCIP) et Sandrine Place (Altedia).
La rédaction du Livre Blanc a été assurée par Christophe Teissier dans le cadre du soutien technique
et scientifique apporté au Comité Scientifique des Ateliers de la Convergence par l’Association
Travail, Emploi, Europe, Société (ASTREES).
Les préconisations intégrées au Livre Blanc ont été sélectionnées par les membres du comité
scientifique des Ateliers de la Convergence. On précisera qu’elles diffèrent parfois de celles de
certains de ces experts et des institutions dont ils dépendent. Ces dernières ne sont donc en rien
engagées à titre individuel par le contenu de ce document.
Remerciements
23. 23
Directeur de la publication : Sabine Lochmann (Ateliers de la Convergence)
Conception et réalisation graphique : Agence Spinnaker
Les Ateliers de la Convergence™ - Association Loi 1901 en cours de constitution