SOFT POWER : Les compatriotes russes de l’étranger Dans quelles mesures peut-on considérer les russes de l’étranger en tant qu’instrument du soft power russe ?
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Mémoire et reconnaissance de crimes du passé. — 06a. La mémoire des crimes de...
SOFT POWER : Les compatriotes russes de l’étranger Dans quelles mesures peut-on considérer les russes de l’étranger en tant qu’instrument du soft power russe ?
1. Beauvillier Pauline
Magistère 2 Communication interculturelle
INALCO, Paris
Séminaire « Acteurs, processus et moyens des relations internationales
Le cas de la Russie
SOFT POWER : Les compatriotes russes de l’étranger
Dans quelles mesures peut-on considérer les russes de l’étranger en
tant qu’instrument du soft power russe ?
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2. Beauvillier Pauline
Magistère 2 Communication interculturelle
INALCO, Paris
Séminaire « Acteurs, processus et moyens des relations internationales
Le cas de la Russie
Plan du dossier
Introduction
Rappel historique et contextualisation
I-Un traitement de la question à deux logiques
La logique de la politique étrangère russe envers ses
compatriotes
La logique d’une politique d’immigration à soutenir :
L’Appel massif au « retour » des russes de l’étranger
II- Les russes de l’étranger : vecteur clé de l’expansion culturelle
Un tissu associatif et culturel en développement
Une politique étrangère encourageant mais limitée sur la
question de la diaspora russe
Conclusion
Des améliorations à mettre en place pour développer cet instrument
du « soft power » afin qu’ils deviennent des diffuseurs de l’influence
russe à l’étranger.
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3. Beauvillier Pauline
Magistère 2 Communication interculturelle
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Séminaire « Acteurs, processus et moyens des relations internationales
Le cas de la Russie
Introduction
Il est nécessaire de faire un rappel historique afin de remettre
dans son contexte les évènements produits pour comprendre
l’importance de la question des russes de l’étranger. En effet, d’un
point de vue politique, des bouleversements considérables se sont
produits et ont totalement modifiés le destin des russes de
l’étranger.
Dès l’automne 1989, à la faveur de la libéralisation politique
gorbatchévienne plusieurs fractions parlementaires se constituent au
sein du Soviet suprême et tentent de préserver l’unité de la structure
soviétique. C’est le cas du groupe parlementaire de Russie, crée à
l’initiative de Sergei Vasiliev et de Nikolai Pavlov qui regroupe des
députés procommunistes de la République Socialiste Fédérale
Soviétique de Russie. De même le mouvement Union sera créé par
des députés russes et se transformera en 1990 en un groupe
parlementaire actif. Ces deux tentatives politiques du début des
années 90 ont les mêmes objectifs, la défense des russes dans les
autres républiques, mais aussi la volonté de préserver la structure
fédérale de l’URSS.
Puis au moment de l’effondrement de l’URSS, un nouveau
climat politique s’installe, notamment de grandes tensions entre la
Fédération de Russie et les pays de l’ex espace soviétique. En effet les
évènements d’automne 1993 opposent Boris Eltsine au soviet
suprême. Le vote d’une loi restrictive sur la citoyenneté en Estonie, le
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conflit moldave et le sécessionnisme de la Transnistrie
http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/etatsnsouverains/transnistrie.htm
(En 1992, une guerre civile éclata dans la république de
Transnistrie entre les forces armées moldaves et les russophones.
Ces derniers étaient alors appuyés par des contingents de cosaques
et surtout par la 14e armée russe qui, stationnée en permanence sur
le territoire, pouvait opposer une force de 6000 hommes bien
entraînés et bien équipés contre les Moldaves de Chisinau. La
nouvelle République sécessionniste de Transnistrie désigna Tiraspol
comme capitale et demanda son rattachement à l'URSS, puis à la
Russie).
Les tensions avec l’Ukraine autour du statut de la Crimée en Janvier
1992. Tous ces évènements accentuent les dissensions entre les
pouvoirs exécutifs et législatifs à propos de la « diaspora » russe. De
plus à noter que les dirigeants traitent peu cette question des russes
de l’étranger dans un climat politique aussi tendu. Ils ne veulent pas
que la Russie désunifiée apparaisse comme un pays incapable
d’accepter le démembrement de l’espace soviétique. La peur de la
montée de l’immigration durant cette période, fin de l’année 1992
justifiera la création d’un Service fédéral des migrations. Lors de
cette période, la question des russes de l’étranger n’est pas une
priorité et surtout interroge sur l’ambiguïté de la nationalité russe
dans ce climat d’indépendances successives des ex pays soviétiques.
Au milieu des années 90, apparaît le « Congrès des
Communauté russe » créé et dirigé par Alexandre Lebed. Dimitri
Rogozine sera à la tête du Congrès. Ce parti se veut le défenseur des
Russes des ex-républiques soviétiques. Le premier congrès s’est
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tenu en mars 1993 avec près de 400 délégués représentant diverses
associations culturelles de Russie et de l’étranger proche. Le
deuxième congrès a eu lieu en Janvier 1994 et réunit 1800 personnes
représentant près d’une cinquantaine d’associations dites
« communautés russes » venues des différentes républiques. Pour
aller plus loin, en 1995 le mouvement est enregistré en parti
politique par le ministre de la justice. Néanmoins le mouvement
n’atteint pas les 5 % nécessaires à une représentation à la
Douma et les leaders du Congrès retournent alors à la seule
question de la défense des Russes du proche-étranger. Ils ne
souhaitent pas le retour des Russes en Russie mais leur
maintien dans les républiques en tant que citoyens égaux en
droits aux populations éponymes.
Dès 1994, la Douma vote une première déclaration
officielle sur les compatriotes, fortement inspirée de celle
proposée par le Congrès des communautés russes. L’année
suivante, la politique étatique en direction des compatriotes se
voit octroyer un budget fédéral spécifique, qui, en 2005,
atteindra les 300 millions de roubles. Il finance principalement
des mesures scolaires (envoi de manuels russes aux écoles
russophones du proche-étranger), de soutien médical et d’aide
sociale aux plus pauvres des Russes de la CEI et des pays
baltes. Cet engagement de l’Etat sur la question reste limité.
Dans une première partie, nous analyserons la question des
russes de l’étranger avec deux logiques distinctes. D’un côté une
politique étrangère à l’écoute de ses compatriotes et d’un autre côté
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une politique d’immigration « spéciale » d’appel au retours des
russes dans leur pays d’origine. Enfin dans une seconde partie, nous
démontrerons que les russes de l’étranger sont de réels vecteurs
d’influences des idées russes dans leurs pays d’accueils.
I-Un traitement de la question à deux logiques
La logique de la politique étrangère russe envers ses
compatriotes
L’arrivée à la présidence de Vladimir Poutine va permettre de
relancer au premier plan cette question des russes de l’étranger.
Rappelons-nous qu’en 1997 Eltsine avait mis son véto au sujet du
projet de loi sur la « politique de l’Etat russe à l’égard des relations
avec les compatriotes de l’étranger » en se justifiant par une crainte
de flux migratoires importants vers la Russie. A l’inverse, Vladimir
Poutine va apporter des modifications et des propositions pour
dynamiser sa nouvelle politique étrangère envers les russes de
l’étranger. Il s’appuie sur les enjeux toujours d’actualité, la crise
démographique que connait la Russie et le levier d’influence que
pourrait avoir les russes de l’étranger. Pour cela, Vladimir Poutine
change de discours et apporte une forte prise de considération à
l’égard des russes de l’étranger ; cela devient une priorité du
gouvernement de la Fédération de Russie.
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En Octobre 2001 est organisé le Congrès Mondial des
compatriotes de l’étranger à Moscou, Vladimir Poutine déclarera « la
Russie est intéressée par le retour des compatriotes de l’étranger […]
Sur les dix années écoulées à œuvrer avec les compatriotes, l’État a
fait trop peu, on peut même dire si peu que cela est inacceptable. Il y
a eu des insuffisances évidentes du côté des pouvoirs publics, du côté
de l’État, et jusqu’à aujourd’hui, il y a des vides dans la législation et
les lois adoptées sont incomplètes, embrouillées et, parfois, ne sont
tout simplement pas appliquées » (Itogovye materialy, 2001, p. 6). À
la suite de ce Congrès, le Kremlin publie un nouveau texte, les
«Principales orientations pour 2002-2005 du soutien de la Fédération
de Russie aux compatriotes vivant à l’étranger »qui détaille pour la
première fois les possibilités d’action de la Russie à cet égard ainsi
que la carte de la défense sur place et celle du rapatriement. En
2004, devant le Conseil de sécurité de la Fédération, le Président
demande que la défense des droits des compatriotes s’organise dans
le cadre juridique de la CEI. En 2005, il approuve publiquement
l’organisation du deuxième Congrès mondial des compatriotes, qui se
tient en octobre 2006 à Saint-Pétersbourg et au cours duquel
Vladimir Poutine fait des déclarations remarquées sur l’intérêt qu’il
porte à la « diaspora ». Le troisième Congrès des compatriotes de
l’étranger en 2009 à Moscou a permis une nouvelle fois de
rassembler et de débattre sur la question de russes de l’étranger.
Lors d’une conférence, il a été rappelé la tâche principale de cet
évènement qui consiste à aider les ressortissants de la Russie, nos
compatriotes, à mener une vie digne, à jouir pleinement de leurs
droits, à sauvegarder leur identité ethnoculturelle et la langue
maternelle, à entretenir des liens intimes avec leur patrie historique
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et, en cas de nécessité, à se rapatrier d’une manière civilisée. De plus
lors du Congrès, les questions telles que le soutien à donner aux
foyers de la culture russe à l’étranger, la sauvegarde du patrimoine
scientifique et culturel de l’émigration, l’ouverture des «écoles
russes», le rétablissement de la justice et de la vérité historiques ont
permis de mettre l’accent sur l’importance du rétablissement de
l’unité de l’histoire et de la continuité des générations émigrés. A
l’occasion de ce rassemblement, le ministre russe des Affaires
étrangères Sergueï Lavrov a rappelé les paroles du célèbre
constructeur d’aéronefs Sikorsky adressés aux émigrés russes : il nous
faut travailler et surtout apprendre ce qui permettra de relever notre
patrie quand elle l’exigera de nous. «Ce temps-là est venu ». Ce
troisième Congrès des compatriotes russes de l’étranger marque
clairement une forme de diplomatie sociale mise en œuvre par la
politique étrangère de Vladimir Poutine afin d’entretenir une relation
de confiance entre les russes de l’étranger et leur patrie.
Enfin le quatrième Congrès Mondial des russes de l’étranger intitulé
« le droit à une patrie » a réunis plus de 540 délégués de 94 pays au
mois d’Octobre 2012 à Saint Petersbourg. Les sujets évoqués lors de
ce congrès ont été la protection des droits des Russes de l'étranger,
les problèmes de la diffusion de la langue russe, de la culture russe et
de l'enseignement de la langue russe dans le monde entier. Le
directeur de l'Institut de la diaspora russe Sergueï Panteleev a
déclaré : « Le Congrès mondial est l'événement principal dans la vie
de nos compatriotes de l'étranger. C'est une rencontre au sommet.
D'une part, c'est un événement passionnant. D'autre part, tout le
monde attend des décisions importantes des structures d'Etat de la
Russie. Chaque Congrès est un pas sérieux en direction des
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compatriotes, il définit les directions prometteuses ». Cette
déclaration souligne le caractère privilégié de ces rencontres entre
les compatriotes de l’étranger et la Russie, leur pays d’origine. On
observe une volonté du pouvoir russe à soutenir ses compatriotes en
mettant en place de nombreux organismes.
En effet, une structure entière chargée de mener une action en
direction des compatriotes résidant à l’étranger a été mise en place
en 11 ans qui se sont écoulés depuis le premier congrès. Une
commission gouvernementale spéciale a également été mise en
place. Le Conseil mondial de coordination des compatriotes russes
opère avec succès depuis 2007. Des organisations regroupant des
représentants de la diaspora russe ont été créées dans 94 États et
coopèrent efficacement entre elles. Le Fonds de soutien et de
protection des droits des compatriotes rend depuis le début de
l’année 2012 des services pratiques aux compatriotes. L’institut de la
diaspora et de l’intégration dirigé par Zatulin est composé de 20
chercheurs rédigeant des travaux académiques et milite en faveur
des compatriotes. Le 7 mai 2012 le président a signé le décret qui
définit les mesures destinées à mettre en application la politique
extérieure de la Fédération de Russie. Dans ce document, le MAE et
les autres organes du pouvoir exécutif se voient assigner l’objectif de
protéger par tous les moyens les droits, les libertés et les intérêts
légitimes des citoyens russes et des compatriotes résidant à
l’étranger. La réalisation conséquente de ces objectifs est appelée à
faciliter les mesures qui prévoient l’extension du réseau des
établissements consulaires, des centres scientifiques et culturels
russes et l’action de promotion de la langue et de la culture russe
dans le monde.
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Les compatriotes russes de l’étranger sont des éléments clés du
dispositif culturel russe. Ce sont les portes paroles à l’étranger de la
politique mise en place par Vladimir Poutine.
La logique d’une politique d’immigration à soutenir : L’Appel
massif au « retour » des russes de l’étranger
La politique étrangère de Vladimir Poutine en faveur des russes de
l’étranger n’est pas sans des objectifs désintéressés. Il est vrai que
le président de la Fédération de Russie adopte un discours
favorable au « retour » des russes en Russie et met en place une
stratégie de politique d’immigration « volontaire » de ces
compatriotes. Le 22 juin 2006 est publié le Programme d’Etat
d’aide au rapatriement volontaire des compatriotes en Russie.
Etalé sur six ans (2007-2012), il prévoit d’encadrer le « retour » des
compatriotes, définis comme étant « les personnes éduquées dans
les traditions de la culture russe, maîtrisant la langue russe et ne
souhaitant pas perdre leurs liens avec la Russie ». Les organes
d’Etat ont l’intention de faire revenir prioritairement les citoyens
russes expatriés et ceux ayant une double nationalité, qu’ils soient
installés dans l’étranger proche ou lointain. Pour se faire, le service
fédéral des migrations a ouvert des bureaux dans presque toutes
les ambassades russes des républiques postsoviétiques ainsi
qu’aux Etats-Unis, en Allemagne et en Israël pour attirer des
rapatriés potentiels. Plus de 25 millions de personnes étaient
admissibles au programme de rapatriement, « dont beaucoup sont
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des personnes d’origine russe qui se sont retrouvées dans
d’anciennes républiques soviétiques après l’effondrement
soviétique en 1991. Le programme désigne les régions dans
lesquelles les nouveaux arrivants pourront s’installer en Russie et
« obtenir des avantages à la condition qu’ils restent dans ces
régions pendant au moins deux ans ». Par exemple, «des
programmes d’aide financière et sociale financés par l’État »
seraient offerts, comme le remboursement des frais de
réinstallation, des indemnités de déménagement (RIA Novosti
15juill. 2010) et un processus accéléré de naturalisation .De plus,
les rapatriés peuvent travailler sans avoir à détenir un permis de
travail spécial et, pendant leur séjour en Russie autorisé par leur
permis de résidence temporaire, ils peuvent demander la
résidence permanente et la citoyenneté. D’après le Service
fédéral des migrations, dans le cadre du programme national de
rapatriement, 32 régions ont élaboré des programmes de
réinstallation régionaux pour prêter assistance aux rapatriés en
matière de logement, d’emploi, de perfectionnement
professionnel et d’aide juridique. Diverses critiques sont défendus
en ce qui concerne ce programme telles que ; le gouvernement
russe impose aux rapatriés le lieu où ils s’installeront,
principalement dans des régions dépeuplés (Sibérie, Extrême
Orient), la sélection pour intégrer le programme de rapatriement
est pointue il est nécessaire d’obtenir un bon niveau de langue
russe ainsi qu’une connaissance de l’histoire et de la culture russe.
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Pour illustrer l’impact de ce programme, il est intéressant de relever
quelques chiffres. En 2007, 682 compatriotes se sont installés en
Russie, alors que l’objectif était de 23 000 pour cette année-là (Focus
Migration juill. 2010, 6). En 2008, 3 000 compatriotes sont retournés
en Russie (RIA Novosti 3 juin 2008). En 2009, environ 10 000
personnes avaient tiré profit du programme de rapatriement. Le chef
adjoint du ministère du Développement régional de la Russie a
affirmé qu’en 2010, 23 000 Russes étaient retournés en Russie par
l’entremise du programme national de rapatriement.
La Russie financièrement apporte des fonds pour ce programme
jugés insuffisant par rapport aux objectifs qu’il prétend atteindre. Le
budget fédéral du programme prévoit une aide de 17 milliards de
roubles soit 635 millions de dollars. L’Etat prend en charge le
transport des migrants et de leur famille, leur déménagement,
l’ensemble des droits sociaux et une aide financière estimée à
100 000 roubles par famille. Le montant de l’aide dépend en partie
de la classification du territoire « choisi ». L’Etat fédéral garantit
également l’obtention de la citoyenneté russe dans un délai de six
mois.
Ce programme d’aide au rapatriement volontaire des
compatriotes russes de l’étranger a été rallongé par Lavrov pour les
années 2012 à 2014. Il met l’accent sur un fort soutien juridique des
compatriotes ainsi que de nouvelles possibilités de retour dans leur
patrie. Il défend la protection de leurs droits et libertés de
l’assistance humanitaire des diasporas russophones. Le budget 2012
pour ce programme s’observe dans la création d’un fonds de soutien
aux compatriotes résidant à l’étranger de 150 millions de dollars soit
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5 millions de dollars. Le processus du traitement de la question des
russes de l’étranger est donnant/donnant en ce qui concerne la
politique menée par Vladimir Poutine ; Mieux les considérer pour
mieux les récupérer. Les objectifs démographiques se mêlent aux
objectifs d’immigrations pour repeupler le pays avec des russes de
l’étranger et non pas « des étrangers ». Cette immigration choisie n’a
pas réussi à remplir les quotas prévus.
II-Les russes de l’étranger : un vecteur clé de l’expansion culturelle
Un tissu associatif et culturel en développement
En vue de retisser le lien social dans la terre d’exil et de consolider
la diaspora, il est important de développer un riche tissu associatifs.
Les associations russophones sont des interlocuteurs privilégiées
dans le travail avec les communautés. La politique envers les
communautés russophones de l’étranger proche et de l’étranger
lointain est caractérisé par ce que les chercheurs, comme Rogers
Brubaker appellent « external homeland nationalism ». Il s’agit de
consolider la diaspora en créant des conseils de coordination des
compatriotes russes. Ces structures associatives représentent
l’ensemble des associations et servent de relais entre l’Etat russe et
les communautés. Prenons par exemple la communauté russe
d’Israël qui entre 1989 et 2002 a connu une immigration de plus de
900 000 russes à partir de l'Union soviétique et a élargi la
Communauté russe d'Israël déjà forte d'environ 120 000personnes.
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L'intégration de la communauté russe d’Israël a été favorisée par les
contextes sécuritaire, démographique et économique israéliens. Elle
a contribué à sa propre intégration. Elle a créé des systèmes d'accueil
pour les nouveaux arrivants, un système propre des retraites et un
réseau privé d'enseignement. Elle a fondé de nombreuses
organisations culturelles, en particulier pour établir des liens avec les
autres communautés juives israéliennes. Ils forment aujourd'hui la
première communauté juive du pays. Cette stratégie d’influence du
pouvoir russe permet à la Russie de garder un lien intérieur et
extérieur avec ses compatriotes de l’étranger pour préserver une
culture russe et d’améliorer les échanges culturels.
Les communautés russes à travers elles permettent de faire
passer les idées du pouvoir politique russe. Elles soutiennent leur
patrie et permettent d’être un vecteur sur les positions prises pas la
Russie. Elles donnent une vision différente et plus positive de leur
pays. La diaspora russes de ne désolidarisent pas du pouvoir russe
mais apportent une dimension culturelle fondamentale dans l’image
de la Russie. Dans ce cas précis, les ambassades effectues un travail
de relations publiques considérables entre la Russie et le pays
d’accueil. De nombreux évènements sont organisés pour permettre
aux russes et aux expatriés de conserver un lien avec leur pays
d’origine. Par exemple l’évènement 2010 : Année croisées France-
Russie qui a permis d’organiser de nombreux spectacles, expositions
et concerts dans le cadre de ce programme culturel. Il a été
renouvelé par 2012 : Année France-Russie de la langue et de la
littérature. Le salon du livre en mars 2012 avait pour ville invitée
Moscou, de nombreuses conférences et de nombreux débats se sont
tenus dans ce programme d’échange culturel. Ces larges
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manifestations culturelles russes dans le paysage français permettent
à la Russie d’élargir son soft power et de se rendre visible par les
communautés russes de l’étranger.
Ce milieu associatif actif et cette présence forte autour des
évènements culturels permettent à la Russie de devenir un vecteur
du discours officiel du pays. Les compatriotes russes de l’étranger
sont un instrument de diffusion de l’influence de l’étranger de la
Patrie. Ils permettent de développer une dimension culturelle
rayonnante russe à l’étranger.
Une politique étrangère encourageant mais limitée sur la
question de la diaspora russe
Il est encore délicat de parler de diaspora en parlant de la
communauté russe de l’étranger, bien qu’elle représente une des
plus importantes entités ethnoculturelles de l’étranger. La diaspora
suppose un groupement organisé et structuré, ce qui n’est pas le cas
de la communauté russe à l’étranger actuellement. Une série de
facteurs s’opposent à la constitution d’une diaspora russe à part
entière. Premièrement, c’est la politique des Etats où vivent les
compatriotes russes, visant à assimiler ou à marginaliser les
immigrés, à empêcher leur organisation autonome et leur
consolidation. Deuxièmement, il existe une propagande antirusse
cherchant à présenter la Russie sous un éclairage négatif. Elle
bénéficie de l’accompagnement de la part de certains ressortissants
russes dont une partie, à la différence des représentants des autres
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Le cas de la Russie
diasporas, persiste dans sa phobie de la Russie, ce dont témoigne le
caractère de nombreux médias russophones à l’étranger, surtout
dans le lointain étranger. Troisièmement, in ne faut pas oublier de
mentionner les différentes vagues de l’émigration et la disparité de la
diaspora qui varie depuis les oligarques et jusqu’aux plus démunis.
On y trouve et la vieille noblesse de Russie, et ceux qui ont quitté
l’URSS. Il y a des amis sincères de la Russie, une partie de la «grande
Russie», et des individus qui font profession de jugements antirusses
et du dénigrement de la politique extérieure et intérieure du pays de
leur exode. On observe une diaspora multiethnique et
multiconfessionnelle. Il existe des communautés russes, tatares et
celles des autres ethnies autochtones de la Russie, de même que des
millions de rapatriés russophones d’URSS et de la Fédération de
Russie.
En effet la politique de Vladimir Poutine est centrée sur cette
question des russes de l’étranger, néanmoins les mesures mises en
place ne font pas l’unanimité en ce qui concerne leurs applications et
leurs résultats. Pour bénéficier de ce programme de rapatriement, la
sélection est rude. En effet les « candidats» volontaires au
rapatriement sont triés sur le volet pour obtenir ses aides. Il faut
noter tout de même que ses aides « promises » par le programme
dans la réalité sont tout autres. Une fois enregistré dans le
programme, le candidat jugé apte au rapatriement, sur place est
confronté à plusieurs problèmes. L’administration russe étant assez
lente, il peut attendre plusieurs mois ses aides financières ainsi que
son logement « prévu » par les autorités russes. Enfin, il est aussi
difficile pour ses russes de l’étranger socialement de trouver une
nouvelle place au sein de leur pays d’origine.
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Le cas de la Russie
Conclusion
Nous avons évoqué dans une première partie la nécessité
politique pour le gouvernement russe de prendre en considération la
question des russes de l’étranger en termes de soft power efficace.
Puis il a été important de relever les réelles intentions et les limites
du pouvoir politique russe qui ont pour objectifs également d’attirer
un maximum de compatriotes en vue de répondre aux problèmes de
la démographie en Russie.
Il est vrai que la Russie développe son influence à travers « les
compatriotes russes de l’étranger » qui sont un soutien essentielle
pour conforter la politique étrangère menée par la Russie. Ils
permettent de mettre en avant une autre vision de la Russie grâce au
développement de l’expansion des échanges culturels russes.
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18. Beauvillier Pauline
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Le cas de la Russie
Bibliographie
Denis Eckert, Le monde russe, Hachette Supérieur, collection « Carré
géographie », Paris, 239 p.
Articles
Alexei Drujinin «Moscou soutiendra les russes de l’étranger », RIA
Novosti, oct. 2012,
http://fr.rian.ru/world/20121026/196429834.html
Mikhaïl Aristov « IV Congrès mondial des Russes de l'étranger : le
droit à une patrie », la voix de la Russie, oct. 2012,
http://french.ruvr.ru/2012_10_25/92411305/
« Lavrov annonce un nouveau programme de soutien des
compatriotes », la voix de la Russie, oct. 2011,
http://french.ruvr.ru/2011/10/17/58853993.html
« 29.000 Russes se sont réinstallés en Russie en 2011 », la voix de la
Russie, déc. 2011, http://french.ruvr.ru/2011/12/16/62346557.html
« Les chercheurs russes de l’étranger », la voix de la Russie, juin 2011,
http://french.ruvr.ru/2011/06/29/52551607.html
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19. Beauvillier Pauline
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INALCO, Paris
Séminaire « Acteurs, processus et moyens des relations internationales
Le cas de la Russie
« La Russie aidera les compatriotes en paroles et en actes », la voix
de la Russie, avril 2011,
http://french.ruvr.ru/2011/04/21/49255303.html
Svetlana Kalmykova, « Les compatriotes russes répondent à l’appel »,
la voix de la Russie, oct.2012,
http://french.ruvr.ru/2012_10_26/92544151/
Tchépourine A.M., « Le Congrès des compatriotes, point de repère »,
la vie internationale,N°12, 2009,
http://fr.interaffairs.ru/arpg.php?pg=6
Poutine Vladimir, « La Russie et l’évolution du monde », voltaire.net,
http://www.egaliteetreconciliation.fr/La-Russie-et-l-evolution-du-
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Marlène Laruelle, « Les Russes de l’étranger proche : le thème
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FS0338059908001022a.pdf&code=c2b695a3dc3cdc30ff41ae708a1ef
5e1
Malène Lurelle, « La question des Russes du proche-étranger en
Russie (1991-2006) », Les études du CERI, juin 2006,
19
20. Beauvillier Pauline
Magistère 2 Communication interculturelle
INALCO, Paris
Séminaire « Acteurs, processus et moyens des relations internationales
Le cas de la Russie
http://www.sciencespo.fr/ceri/sites/sciencespo.fr.ceri/files/etude12
6.pdf
Vidéo
« Message vidéo du Président Poutine au Congrès mondial des
compatriotes », la voix de la Russie, oct. 2012,
http://www.kremlin.ru/video/1317?page=1
Émissions de radios :
Igor Yazon« La Russie doit être plus présente à l’étranger », Radio la
voix de la Russie, sept. 2012,
http://french.ruvr.ru/radio_broadcast/5646129/87114630.html
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