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JUILLET AOUT SEPTEMBRE 2015 ANALYSE FINANCIÈRE N° 56
ACTUALITÉ
ASSURANCE
ENTRETIEN AVEC
LIVRE BLANC : LE NOUVEAU VISAGE DE L’ASSURANCE - GESTION DES RISQUES
PHILIPPE FOULQUIER ET LILIANA ARIAS PAR MICHÈLE HÉNAFF
v
Livre blanc :le nouveau
visage de l’assurance - gestion
des risques
En février dernier,le Pôle finance innovation a présenté le livre blanc :Le nouveau visage de l’assu-
rance – Livre blanc Gestion des risques1
.Si le sujet n’est pas nouveau pour les assureurs,il prend
d’autres contours sous l’effet de l’avènement de la norme européenne Solvabilité 2.
Philippe Foulquier et LilianaArias répondent aux questions de la revue Analyse financière.
PHILIPPE FOULQUIER,
MEMBRE DE LA SFAF,
PHD, PROFESSEUR
DE FINANCE, EST
DIRECTEUR DU CENTRE
DE RECHERCHE EN
ANALYSE FINANCIÈRE
ET COMPTABILITÉ,
ET DIRECTEUR DE
L'EXECUTIVE MBA
À PARIS, À L'EDHEC
BUSINESS SCHOOL.
Il est responsable d'une chaire
de recherche sur l'Entreprise
Risk Management et Solvency  II
et réalise de nombreux travaux
sur la performance et la
valorisation des entreprises,
tous secteurs confondus.
Auparavant, il a été analyste
financier sell side, responsable
d'une équipe paneuropéenne
assurance pendant dix ans chez
Exane BNP Paribas, Enskilda
et Credit Lyonnais Securities
Europe.
LILIANA ARIAS EST
INGÉNIEUR
DE RECHERCHE au sein
du Centre de recherche Analyse
financière et Comptabilité de
l’EDHEC Business School.
ous avez participé
à la rédaction du
nouveau livre blanc
« La gestion des
risques : le nouveau visage de
l’assurance » piloté par le pôle
Finance Innovation. Pourquoi
parler d'un nouveau visage de
l'assurance ?
P. F : La gestion des risques n’est
certes pas un sujet nouveau pour
les sociétés d’assurance, puisqu’elle
est au cœur de leur métier.Toutefois,
avec l’avènement de la réglemen-
tation prudentielle Solvabilité II en
2016, les pratiques de gestion des
risques sont actuellement en totale
mutation. Ce livre blanc fait un état
des lieux et apporte des éclairages
sur les perspectives à venir, les
méthodologies et stratégies retenues
et les best practices, notamment en
matière de gouvernance,de système
d’information, de gestion du capital
et de contrôle interne. Pour notre
part, nous nous focalisons dans ce
livre sur l’évolution des pratiques
traditionnelles de gestion des risques
vers la mise en œuvre d’un Enter-
prise Risk Management (ERM) dont
le pilier 2 de Solvabilité 2 constitue le
principal catalyseur.
Qu’est-ce que l’Enterprise Risk
Management ?
P. F : L’ERM est une approche particu-
lière de la structuration de la gestion
des risques. Elle consiste à mettre en
place toute une organisation et une
méthodologie pour maîtriser et pilo-
ter les risques selon une approche
holistique, en fonction des objectifs
de l’entreprise et au service de sa
stratégie.Ainsi,l’ERM établit des prin-
cipes structurants pour la définition
des politiques de risques et d’inves-
tissements, les fonctions et les res-
ponsabilités d’une organisation effi-
cace et permet également d’identifier
les procédures et moyens à mettre
en œuvre, pour proposer des solu-
tions et des arbitrages satisfaisant les
objectifs et la stratégie des dirigeants
de l’entreprise. Déjà implanté chez
les leaders de l’assurance mondiale,
l’ERM est en passe de devenir le nou-
vel outil de pilotage de référence des
sociétés d’assurance.
Quelle est l’influence de
Solvabilité II dans ce domaine ?
L. A : La directive Solvabilité II spéci-
fie les exigences en matière de ges-
tion des risques, en particulier la for-
malisation d’une vision holistique des
risques de l’entreprise. Le régulateur
a ainsi défini une cartographie des
risques relativement complète, une
mesure pour les quantifier, offre un
indicateur agrégé du profil du risque
(le Solvency Capital Requirement ) et
formalise les attentes et exigences
en matière de gouvernance, de
transparence, de traçabilité des pro-
cessus décisionnels, des documents
de reporting et de communication.
De par son caractère normatif, Sol-
vabilité II constitue un catalyseur de
mise en œuvre d’un ERM au sein de
toutes les sociétés d'assurance.
Le livre blanc insiste sur
l’appétence au risque, cœur de
l’ERM. De quoi s’agit-il ?
L. A : L’appétence au risque est au
cœur du dispositif de l’ERM et est
un des bénéfices les plus structu-
rants. Elle est définie par COSO 22
15
L’ERM est
une approche
particulière
de la
structuration
de la gestion
des risques.
Elle consiste
à mettre en
place toute une
organisation
et une
méthodologie
pour maîtriser
et piloter les
risques selon
une approche
holistique, en
fonction des
objectifs de
l’entreprise et
au service de
sa stratégie.
JUILLET AOUT SEPTEMBRE 2015 ANALYSE FINANCIÈRE N° 56
comme le montant de risque qu’une
entreprise est prête à accepter au
niveau global, dans la poursuite de la
création de valeur. Elle permet ainsi
d’apporter à la direction générale des
réponses aux questions clés relatives
aux risques : quels sont les risques
qu’elle accepte de prendre ? Ceux
qu’elle souhaite éviter ? Ceux sur les-
quels l’entreprise possède un avan-
tage compétitif de gestion ? Ceux
qui doivent être atténués ? À quel
niveau ? À quel horizon ? Quels sont
les événements futurs ou les risques
émergents qui peuvent impacter la
stratégie de l’entreprise ?
Une fois définie, l’appétence au
risque offre à l’entreprise une vision
prospective des stratégies les plus
adaptées pour atteindre ses objec-
tifs, en fonction du niveau de risque
qu'elle juge pertinent et acceptable.
Quels sont les autres bénéfices
de la mise en œuvre d’une ERM ?
P. F : La mise en œuvre de l’ERM
offre de nombreux bénéfices :
• La formalisation d’une vision holis-
tique des risques. L’ERM requiert
une cartographie exhaustive des
risques, les mesure individuellement
et conjointement. Ainsi, corrélation
et diversification des risques sont
non seulement essentielles dans la
gestion des risques mais également
dans la définition des objectifs et de
la stratégie de l’entreprise. Solvabi-
lité II est, à ce titre, un accélérateur
de tendance à la généralisation de
l’implantation d’un l’ERM au sein du
secteur de l’assurance, puisque le
premier pilier de la réglementation
offre une cartographie des risques
relativement complète. Il constitue
d’ailleurs en général le référentiel
des ERM existants.
• Le pilotage de l’entreprise et son
organisation selon une approche glo-
bale, ce qui requiert une nécessaire
refonte des processus d’organisation
mais, surtout, une sensible évolution
culturelle de l’entreprise, une plus
forte implication de la direction géné-
rale et du conseil d’administration, la
création d’une nouvelle comitologie
et gouvernance.
• L’ERM est au service de la stratégie
de l’entreprise et de ses objectifs. À
ce titre, nous avons observé que la
plupart des acteurs de l’assurance,
notamment les mutuelles, sont
contraints de mieux formaliser leurs
objectifs. De par l’environnement
spécifique de l’ERM, certains acteurs
en ont profité pour mieux les définir,
les formaliser et, parfois même, pour
mieux les divulguer et les communi-
quer à travers le groupe, notamment
en rappelant leur adéquation avec
l’ADN de l’entreprise.
• L’ERM permet aussi de mesurer
l’impact d’une décision stratégique,
opérationnelle, commerciale ou
financière sur l’exigence des fonds
propres et, donc, sur la performance
de l’entreprise. Cet outil de pilotage
reposant sur une “tarification” des
risques (selon leur gravité et leurs
impacts sur les objectifs de l’entre-
prise à travers l’exigence plus ou
moins importante des capitaux
propres exigés), il favorise l’optimi-
sation des coûts en capitaux. Les
arbitrages stratégiques sont ainsi
objectivés.
• L’ERM constitue un outil objectif
en matière de politique de couver-
ture des risques. Chaque prise de
décision de couverture de risque
(réassurance,instruments financiers,
diversification, auto-assurance) peut
être mesurée en termes de réduction
de risque, de contribution à la perfor-
mance (notamment au regard des
coûts de couverture), de consomma-
tion de capitaux propres et ainsi, là
encore être objectivée grâce à l’ap-
proche holistique de l’ERM.
• L’ERM est un outil de pilotage
dynamique et prospectif. Il est dans
son ADN d’intégrer une dimension
dynamique (simulation de prises de
décisions stratégiques) et prospec-
tive (prévision des besoins de capi-
taux propres futurs et anticipations
des impacts consécutivement à
des scenarii “hostiles”, tant sur les
actifs que sur les passifs). D’ailleurs,
il est important de souligner que là
encore le pilier 2 de la réglementa-
tion prudentielle constitue un véri-
table catalyseur sur ce sujet à travers
l’ORSA3
.  M
ACTUALITÉ
ASSURANCE
ENTRETIEN AVEC
LIVRE BLANC : LE NOUVEAU VISAGE DE L’ASSURANCE - GESTION DES RISQUES
PHILIPPE FOULQUIER ET LILIANA ARIAS PAR MICHÈLE HÉNAFF
(1) http://www.finance-innovation.org
(2) COSO : Committee of Sponsoring Orga-
nizations of the Treadway Commission.
(3) L’ORSA est un processus interne d’éva-
luation des risques et de la solvabilité par
l’organisme (ou le groupe). Il doit illustrer
la capacité de l’organisme ou du groupe à
identifier, mesurer et gérer les éléments de
nature à modifier sa solvabilité ou sa situa-
tion financière. Aussi, sa déclinaison opé-
rationnelle en fait-elle un outil stratégique
de premier plan. L’ORSA est défini à l’ar-
ticle 45 de la directive Solvabilité II, modi-
fiée par Omnibus 2 (une version consolidée
est fournie par la Commission européenne
à titre de document de travail). Source :
http://acpr.banque-france.fr

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  • 1. 14 JUILLET AOUT SEPTEMBRE 2015 ANALYSE FINANCIÈRE N° 56 ACTUALITÉ ASSURANCE ENTRETIEN AVEC LIVRE BLANC : LE NOUVEAU VISAGE DE L’ASSURANCE - GESTION DES RISQUES PHILIPPE FOULQUIER ET LILIANA ARIAS PAR MICHÈLE HÉNAFF v Livre blanc :le nouveau visage de l’assurance - gestion des risques En février dernier,le Pôle finance innovation a présenté le livre blanc :Le nouveau visage de l’assu- rance – Livre blanc Gestion des risques1 .Si le sujet n’est pas nouveau pour les assureurs,il prend d’autres contours sous l’effet de l’avènement de la norme européenne Solvabilité 2. Philippe Foulquier et LilianaArias répondent aux questions de la revue Analyse financière. PHILIPPE FOULQUIER, MEMBRE DE LA SFAF, PHD, PROFESSEUR DE FINANCE, EST DIRECTEUR DU CENTRE DE RECHERCHE EN ANALYSE FINANCIÈRE ET COMPTABILITÉ, ET DIRECTEUR DE L'EXECUTIVE MBA À PARIS, À L'EDHEC BUSINESS SCHOOL. Il est responsable d'une chaire de recherche sur l'Entreprise Risk Management et Solvency  II et réalise de nombreux travaux sur la performance et la valorisation des entreprises, tous secteurs confondus. Auparavant, il a été analyste financier sell side, responsable d'une équipe paneuropéenne assurance pendant dix ans chez Exane BNP Paribas, Enskilda et Credit Lyonnais Securities Europe. LILIANA ARIAS EST INGÉNIEUR DE RECHERCHE au sein du Centre de recherche Analyse financière et Comptabilité de l’EDHEC Business School. ous avez participé à la rédaction du nouveau livre blanc « La gestion des risques : le nouveau visage de l’assurance » piloté par le pôle Finance Innovation. Pourquoi parler d'un nouveau visage de l'assurance ? P. F : La gestion des risques n’est certes pas un sujet nouveau pour les sociétés d’assurance, puisqu’elle est au cœur de leur métier.Toutefois, avec l’avènement de la réglemen- tation prudentielle Solvabilité II en 2016, les pratiques de gestion des risques sont actuellement en totale mutation. Ce livre blanc fait un état des lieux et apporte des éclairages sur les perspectives à venir, les méthodologies et stratégies retenues et les best practices, notamment en matière de gouvernance,de système d’information, de gestion du capital et de contrôle interne. Pour notre part, nous nous focalisons dans ce livre sur l’évolution des pratiques traditionnelles de gestion des risques vers la mise en œuvre d’un Enter- prise Risk Management (ERM) dont le pilier 2 de Solvabilité 2 constitue le principal catalyseur. Qu’est-ce que l’Enterprise Risk Management ? P. F : L’ERM est une approche particu- lière de la structuration de la gestion des risques. Elle consiste à mettre en place toute une organisation et une méthodologie pour maîtriser et pilo- ter les risques selon une approche holistique, en fonction des objectifs de l’entreprise et au service de sa stratégie.Ainsi,l’ERM établit des prin- cipes structurants pour la définition des politiques de risques et d’inves- tissements, les fonctions et les res- ponsabilités d’une organisation effi- cace et permet également d’identifier les procédures et moyens à mettre en œuvre, pour proposer des solu- tions et des arbitrages satisfaisant les objectifs et la stratégie des dirigeants de l’entreprise. Déjà implanté chez les leaders de l’assurance mondiale, l’ERM est en passe de devenir le nou- vel outil de pilotage de référence des sociétés d’assurance. Quelle est l’influence de Solvabilité II dans ce domaine ? L. A : La directive Solvabilité II spéci- fie les exigences en matière de ges- tion des risques, en particulier la for- malisation d’une vision holistique des risques de l’entreprise. Le régulateur a ainsi défini une cartographie des risques relativement complète, une mesure pour les quantifier, offre un indicateur agrégé du profil du risque (le Solvency Capital Requirement ) et formalise les attentes et exigences en matière de gouvernance, de transparence, de traçabilité des pro- cessus décisionnels, des documents de reporting et de communication. De par son caractère normatif, Sol- vabilité II constitue un catalyseur de mise en œuvre d’un ERM au sein de toutes les sociétés d'assurance. Le livre blanc insiste sur l’appétence au risque, cœur de l’ERM. De quoi s’agit-il ? L. A : L’appétence au risque est au cœur du dispositif de l’ERM et est un des bénéfices les plus structu- rants. Elle est définie par COSO 22
  • 2. 15 L’ERM est une approche particulière de la structuration de la gestion des risques. Elle consiste à mettre en place toute une organisation et une méthodologie pour maîtriser et piloter les risques selon une approche holistique, en fonction des objectifs de l’entreprise et au service de sa stratégie. JUILLET AOUT SEPTEMBRE 2015 ANALYSE FINANCIÈRE N° 56 comme le montant de risque qu’une entreprise est prête à accepter au niveau global, dans la poursuite de la création de valeur. Elle permet ainsi d’apporter à la direction générale des réponses aux questions clés relatives aux risques : quels sont les risques qu’elle accepte de prendre ? Ceux qu’elle souhaite éviter ? Ceux sur les- quels l’entreprise possède un avan- tage compétitif de gestion ? Ceux qui doivent être atténués ? À quel niveau ? À quel horizon ? Quels sont les événements futurs ou les risques émergents qui peuvent impacter la stratégie de l’entreprise ? Une fois définie, l’appétence au risque offre à l’entreprise une vision prospective des stratégies les plus adaptées pour atteindre ses objec- tifs, en fonction du niveau de risque qu'elle juge pertinent et acceptable. Quels sont les autres bénéfices de la mise en œuvre d’une ERM ? P. F : La mise en œuvre de l’ERM offre de nombreux bénéfices : • La formalisation d’une vision holis- tique des risques. L’ERM requiert une cartographie exhaustive des risques, les mesure individuellement et conjointement. Ainsi, corrélation et diversification des risques sont non seulement essentielles dans la gestion des risques mais également dans la définition des objectifs et de la stratégie de l’entreprise. Solvabi- lité II est, à ce titre, un accélérateur de tendance à la généralisation de l’implantation d’un l’ERM au sein du secteur de l’assurance, puisque le premier pilier de la réglementation offre une cartographie des risques relativement complète. Il constitue d’ailleurs en général le référentiel des ERM existants. • Le pilotage de l’entreprise et son organisation selon une approche glo- bale, ce qui requiert une nécessaire refonte des processus d’organisation mais, surtout, une sensible évolution culturelle de l’entreprise, une plus forte implication de la direction géné- rale et du conseil d’administration, la création d’une nouvelle comitologie et gouvernance. • L’ERM est au service de la stratégie de l’entreprise et de ses objectifs. À ce titre, nous avons observé que la plupart des acteurs de l’assurance, notamment les mutuelles, sont contraints de mieux formaliser leurs objectifs. De par l’environnement spécifique de l’ERM, certains acteurs en ont profité pour mieux les définir, les formaliser et, parfois même, pour mieux les divulguer et les communi- quer à travers le groupe, notamment en rappelant leur adéquation avec l’ADN de l’entreprise. • L’ERM permet aussi de mesurer l’impact d’une décision stratégique, opérationnelle, commerciale ou financière sur l’exigence des fonds propres et, donc, sur la performance de l’entreprise. Cet outil de pilotage reposant sur une “tarification” des risques (selon leur gravité et leurs impacts sur les objectifs de l’entre- prise à travers l’exigence plus ou moins importante des capitaux propres exigés), il favorise l’optimi- sation des coûts en capitaux. Les arbitrages stratégiques sont ainsi objectivés. • L’ERM constitue un outil objectif en matière de politique de couver- ture des risques. Chaque prise de décision de couverture de risque (réassurance,instruments financiers, diversification, auto-assurance) peut être mesurée en termes de réduction de risque, de contribution à la perfor- mance (notamment au regard des coûts de couverture), de consomma- tion de capitaux propres et ainsi, là encore être objectivée grâce à l’ap- proche holistique de l’ERM. • L’ERM est un outil de pilotage dynamique et prospectif. Il est dans son ADN d’intégrer une dimension dynamique (simulation de prises de décisions stratégiques) et prospec- tive (prévision des besoins de capi- taux propres futurs et anticipations des impacts consécutivement à des scenarii “hostiles”, tant sur les actifs que sur les passifs). D’ailleurs, il est important de souligner que là encore le pilier 2 de la réglementa- tion prudentielle constitue un véri- table catalyseur sur ce sujet à travers l’ORSA3 .  M ACTUALITÉ ASSURANCE ENTRETIEN AVEC LIVRE BLANC : LE NOUVEAU VISAGE DE L’ASSURANCE - GESTION DES RISQUES PHILIPPE FOULQUIER ET LILIANA ARIAS PAR MICHÈLE HÉNAFF (1) http://www.finance-innovation.org (2) COSO : Committee of Sponsoring Orga- nizations of the Treadway Commission. (3) L’ORSA est un processus interne d’éva- luation des risques et de la solvabilité par l’organisme (ou le groupe). Il doit illustrer la capacité de l’organisme ou du groupe à identifier, mesurer et gérer les éléments de nature à modifier sa solvabilité ou sa situa- tion financière. Aussi, sa déclinaison opé- rationnelle en fait-elle un outil stratégique de premier plan. L’ORSA est défini à l’ar- ticle 45 de la directive Solvabilité II, modi- fiée par Omnibus 2 (une version consolidée est fournie par la Commission européenne à titre de document de travail). Source : http://acpr.banque-france.fr