1. Février 2011
Le bulletin de veille sur les aides d’État
à l’usage des pôles de compétitivité
Le bureau de la coordination des politiques européennes de la DGCIS établit chaque mois une veille
des principales aides d’Etat en faveur de l’innovation, au sein de l’Union européenne.
Cette veille permet d’effectuer comparaison des mesures mises en place par les Etats membres, elle
permet également d’appréhender les activités subventionnées des entreprises implantées en Europe.
Ce document n’a pas de valeur juridique. Sa publication ne saurait se substituer à la lecture des
documents officiellement diffusés par la Commission européenne.
En actualité
• Le Tribunal a rendu un arrêt sur la notion d’aide nouvelle et la question de l’application dans le
temps de dispositions temporaires en faveur du secteur de la construction navale qui ont fait
l’objet de contestation au niveau de l’OMC. Cette décision très classique pour ce qui concerne le
règlement du litige au plan du droit communautaire des aides d’Etat, présente cependant l’intérêt
de mettre en exergue la nécessité de moderniser le contrôle communautaire des aides
d’Etat dans le contexte d une économie mondialisée.
Décisions de la Commission européenne
Aides destinées à remédier à la crise économique (article 107. 3 b TFUE)
Aides sous la forme de prêts bonifiés
Roumanie (SA.31478 (N372/2010)) – La Commission européenne a autorisé un régime d’aide
permettant d’octroyer des prêts subventionnés aux agriculteurs qui ont souffert des conséquences de
la crise économique, la mesure répond au cadre temporaire permettant l’octroi d’aide remédiant à la
crise économique. Les prêts subventionnés pourront être octroyés jusqu’au 31 décembre 2011 et les
intérêts couverts par la mesure courent jusqu’au 31 décembre 2013.
Aides aux projets d’investissements (art 107.3 c TFUE)
Aide en faveur d’un projet de R&D visant à développer une nouvelle pièce de moteur d’avion
(SA.30282 ou N204/2010)
Suède - La Commission européenne a autorisé le 22 février 2011 une aide versée sous la forme
d’une avance remboursable d’un montant de 12 millions d’euros à Volvo Aero Corporation pour le
développement du carter du compresseur intermédiaire destiné au moteur Trent XWB (moteur destiné
à équiper les Airbus A350XWB). La décision de la Commission européenne a été prise sur la base de
l’encadrement communautaire des aides à la recherche au développement et à l’innovation.
L’intensité de l’aide est de 40%. La Commission a estimé que l’aide était compatible dans la mesure
où :
Sans l’avance remboursable le projet n’aurait pas pu être financé en raison des risques liés au
projet et du montant élevé qui doit être investis pour le réaliser.
En cas de réussite du projet l’aide sera intégralement remboursée (intérêt et principal).
La part de marché de Volvo Aero est relativement faible sur le marché des pièces de moteur,
l’impact sur la concurrence devrait donc être limité.
1
2. Ouvertures de procédures (article 108.2 du TFUE)
Equipement automobile
Pologne – Dans le cadre de l’examen de compatibilité d’une aide d’Etat envisagée par la Pologne
pour financer un investissement productif en Silésie (zone économiquement défavorisée dite zone à
finalité régionale) par la firme FIAT, la commission a ouvert une procédure formelle d’examen. L’aide
prévue sous la forme de subventions directes à l’investissement et à l’emploi et d’allégements fiscaux
devrait atteindre 40,9 millions d’euros sur un grand projet d’investissement dont le coût s’élève à 180
millions d’euros. L’aide à l’investissement porte sur la production de nouveaux moteurs à essence. La
Commission européenne émet un doute sur la compatibilité de cette aide en raison :
De la part de plus de 25% détenue par FIAT sur le marché pertinent
Ou du risque d’augmentation des surcapacités
La décision paraîtra dans les prochaines semaines sous le numéro SA.30340, ainsi que l’avis officiel
(publié au JOUE) invitant toute partie intéressée à présenter des observations dans le cadre de la
procédure.
→ Recherche de la décision : http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/index.cfm?clear=1&policy_area_id=3
Ligne aérienne
République Tchèque - Dans le cadre d’une procédure notifiée d’aide au sauvetage et à la
restructuration de la compagnie aérienne Czech Airlines, la Commission européenne a ouvert une
procédure d’enquête approfondie au sujet de l’analyse du plan de redressement soumis. La mesure
prévoit un prêt de 94 millions d’euros qui serait accordé par l’entreprise OSINEK à des conditions qui
pourraient être préférentielles. La commission émet des doutes sur la compatibilité de l’aide à la
restructuration (date à laquelle la compagnie est en difficulté, pertinence du plan de redressement
pour parvenir à viabiliser l’entreprise à terme, suffisance des mesures compensatoires pour minimiser
l’avantage). La décision sera publiée sous le n° SA.30908. Un avis paru au JOUE du 11 février 2011
invite toute partie intéressée à présenter ses observations dans le cadre de la procédure.
→ Recherche de la décision : http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/index.cfm?clear=1&policy_area_id=3
→ Avis paru au JOUE http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2011:043:0006:0018:FR:PDF
Environnement
Malte – Dans le cadre d’une procédure de notification, la Commission européenne a ouvert une
procédure d’enquête approfondie pour évaluer si le financement public apporté pour soutenir
l’aménagement de deux chaudières de la centrale électrique de Delimara est compatible. La
Commission européenne émet un doute sur l’inexistence de l’aide qui serait due au monopole de la
société exploitante. Elle repousse les arguments de Malte visant à faire reconnaître l’existence d’un
service d’intérêt économique général qui dans le domaine électrique est limité par la directive sur le
marché intérieur à la sécurité, à la régularité et à la qualité et au prix de la fourniture d’électricité. La
Commission estime que l’aide relève des lignes directrices favorisant les aides à l’environnement mais
elle constate que le taux envisagé par les autorités maltaises s’élève à 85% au lieu des 10-15% qui
sont les maximums autorisés par la règlementation communautaire applicable.
La décision paraîtra dans les prochaines semaines sous le numéro C 32/2010. Un avis paru au JOUE
du 18 février 2011 invite toute partie intéressée à présenter ses observations dans le cadre de la
procédure.
→ Recherche de la décision : http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/index.cfm?clear=1&policy_area_id=3
→ Avis paru au JOUE http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2011:052:0003:0017:FR:PDF
Assurance crédit à l’exportation de court terme
Belgique et Italie – A la suite d’une plainte d’un concurrent, la Commission européenne a ouvert une
procédure formelle d’examen visant à déterminer si la fourniture de capitaux dans le cadre d’opération
d’assurance crédit à l’exportation de court terme apportée aux entreprises DUCROIRE (Belgique) et
SACE BT (Italie) a été octroyée aux conditions de marché. Les financements en cause s’élèvent
respectivement à 150 millions d’euros pour la société DUCROIRE et 105,8 millions d’euros pour la
SACE.
La décision paraîtra dans les prochaines semaines sous le numéro SA.23420, ainsi que l’avis officiel
(publié au JOUE) invitant toute partie intéressée à présenter des observations dans le cadre de la
procédure.
2
3. Aides illégales et incompatibles
Illégalité des aides sous la forme de tarifs d’électricité subventionnés en faveur des
producteurs de métaux sardes (C36/b/2006 et C38/a/2004)
Italie - Les aides sous la forme de tarifs d’électricité subventionnés au profit de trois producteurs de
métaux implantés en Sardaigne (Portovesme, ILA et Eurallumina) ont été déclarés illégalles et
incompatibles par la Commission. Cette mesure n’a pas fait l’objet d’une notification à la Commission
européenne. Elle n’est par ailleurs pas justifiée au regard de la règlementation communautaire sur les
aides d’Etat. Une telle pratique revient à octroyer des aides au fonctionnement qui sont interdites et à
faire baisser les prix artificiellement au bénéfice que quelques entreprises. La Commission demande à
l’Italie de récupérer l’aide augmentée des intérêts.
Illégalité des aides provenant de la cession des mines à un prix inférieur à celui du marché
(C48/2008)
Grèce – A l’issue d’une procédure formelle d’examen, la Commission a conclu à l’illégalité et
l’incompatibilité de l’aide correspondant à la cession du site minier d’Ellinikos Xrysos. La vente s’est
effectuée sans mise en concurrence préalable à un prix inférieur à celui du marché (11 million d’euros
au lieu de 25 millions d’euros). Dès lors les taxes qui auraient dû être perçues sur la vente ont été
également minorées de 1,34 millions d’euros. La Commission européenne demande à la Grèce de
récupérer l’aide illégale et ses intérêts.
Jurisprudence
Tribunal
Mécanisme de défense temporaire en faveur de la construction navale – incompatibilité de la
modification du régime préalablement autorisé
La décision du Tribunal prise le 3 février 2011 est une illustration de l’application de la notion d’aide
nouvelle en précisant les règles applicables aux refinancements de certaines mesures d’aides
temporairement autorisées en vertu d’un règlement communautaire. La décision explicite également
l’articulation qui existe entre le contrôle communautaire des aides d’Etat d’une part, et le respect par
les instances européenne des engagements communautaires pris auprès de l’organisation mondiale
du commerce (OMC). Ces derniers développements, s’ils ne constituent assurément pas le cœur de
la décision, n’en présentent pas moins d’intérêt. Ils indiquent en effet que le contrôle communautaire
des aides d’Etat ne garantit nullement la compatibilité des aides européenne suivant les critères de
l’OMC. Ces considérations nous portent à souhaiter l’évolution du contrôle communautaire des aides
d’Etat pour prendre en considération la dimension externe de la compétitivité. A cette fin les atteintes
à la concurrence doivent être regardées au regard des prix pratiqués et de la diversité des offres faites
aux consommateurs et non pas à la préservation des intérêts de compétiteurs sur un marché unique
qui, dans bien des cas, ne correspond pas au marché pertinent visé par les entreprises qui est
mondial.
Faits - En 2002, le Conseil avait pris, en raison des conditions de concurrence très tendues imposée
par la république de Corée dans le secteur de la construction navale, un règlement n°1177/2002 qui
permettait d’octroyer des aides aux chantiers sur la base de l’article 87 §3 e) du traité (aides d’Etat
décidées à la majorité qualifiée du Conseil). Ce règlement avait une durée temporaire jusqu’au 31
mars 2005.
Procédure - L’Italie avait notifié en 2004, en vertu de ce texte, un régime d’aide pour un montant de
10 millions d’euros. Cette mesure avait été autorisée par la Commission européenne. En 2008, l’Italie
à souhaité refinancer le mesure à hauteur de 10 millions d’euros supplémentaires. A cette fin elle a
présenté à la Commission européenne une notification visant à faire approuver ce refinancement. La
Commission a décidé, après ouverture d’une procédure formelle d’examen, que le refinancement de
la mesure était illégal et incompatible dans la mesure où :
• La mesure notifiée constituait une aide nouvelle (selon l’article 1 sous c) du règlement n°659/1999
et de l’article 4 du règlement n°794/2004).
• L’aide ne pouvait plus être compatible avec le marché commun puisque le règlement n°1177/2002
n’était plus en vigueur et ne pouvait donc plus servir de base légale.
3
4. • L’aide n’était ni compatible avec les lignes directrices sectorielles relatives à la construction navale
ni avec aucune autre disposition applicable en matière d’aide d’Etat.
La Commission a également précisé dans sa décision que la République de Corée avait présentée à
l’organe de règlement des différends de l’OMC la question de la légalité du règlement communautaire
temporaire. A l’issue de la procédure OMC, le rapport du groupe des experts recommandait à la
Communauté de mettre le règlement temporaire en conformité avec les engagements pris dans le
cadre de l’OMC.
L’Italie et l’un des bénéficiaires de l’aide ont demandé au tribunal l’annulation de la décision de la
Commission européenne.
Décision - Le Tribunal a rejeté l’ensemble des moyens invoqués.
• Le tribunal a confirmé que la décision de la Commission européenne était suffisamment motivée
au regard des circonstances de l’espèce, du contenu de l’acte, des destinataires et de la nature
des motifs invoqués.
• Concernant la question de l’application dans le temps des actes communautaires en l’absence de
disposition transitoires, il a appliqué les règles de compétence et les règles de droit matériel.
Selon la règle de compétence il ressort que la Commission européenne était dûment habilitée au
moment de la prise de décision à statuer sur la compatibilité des aides d’Etat en vertu de l’article
88 du traité. Selon la règle de droit matériel, il ressort que les aides notifiées et non versées
entrent en vigueur au moment de leur approbation par la Commission européenne. Dès lors il ne
pouvait pas être reproché à la Commission européenne de ne pas s’être adossée au règlement
n°1177/2002, qui au moment de la notification du refinancement de la mesure n’était plus en
vigueur.
• Concernant la compétence de la Commission européenne pour prendre la décision litigieuse, le
tribunal relève que le règlement n°1177/2002 était pris sur la base de l’article 87§3 e) du traité,
nécessitant un examen préalable de compatibilité de la mesure. Le tribunal a conclu que la
Commission européenne était donc compétente pour examiner l’aide.
• Concernant la contestation de la qualification de la mesure en une aide nouvelle, le tribunal
rappelle que la portée de la notion de modification d’une aide existante se fait par rapport à la
base juridique ayant instauré le régime d’aide existant. Or le régime notifié par l’Italie en 2004
prévoyait un budget de 10 millions d’euros. Le refinancement supplémentaire de 10 millions
d’euros excédant les 20% de marge autorisées, constituait une aide nouvelle dans la mesure où
ce refinancement peut avoir une incidence substantielle sur la concurrence.
• Le Tribunal relève que la Commission s’est bornée à examiner la compatibilité de l’aide sur le
fondement des articles 87 et 88 du traité. Ce raisonnement étant bien distinct et autonome de
l’appréciation qu’elle porte sur les responsabilités de la Communauté à l’égard de l’OMC.
Affaire T-584/08 Cantiere navale De Poli SpA c/ Commission européenne 3 février
2011
Affaire T-3/09 République italienne c/ Commission européenne 3 février 2011
4